Hermione
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Quand Hermione ouvrit les yeux ce matin-là, le bout de son lit était encombré de cadeaux emballés.
Elle sourit et se pencha pour les ouvrir : le premier était emballé dans un joli papier cadeau blanc, et contenait un kit de couture pour débutant envoyé par sa maman. Le second provenait de son père, des encres de plusieurs couleurs, le troisième était de sa grand-mère, un roman d'amour qui se passait à Edimbourg.
Enfin, il y avait une large enveloppe envoyée par Danny. Quand elle l'ouvrit, elle s'exclama doucement. C'était un très joli dessin fait à l'aquarelle, qui représentait le parc de Londres où ils passaient souvent leurs après-midis pendant l'été. Avec, il y avait un petit mot :
Joyeux anniversaire Hermione,
J'espère que ce dessin te plaira, et qu'il te donnera un petit bout de chez toi. Je l'ai fait pendant une séance de mon cours d'art, dont le sujet était "dessinez votre endroit préféré au monde."
Tu me manques,
Danny.
Hermione s'empressa d'accrocher le dessin au-dessus de son bureau. Lavande et Parvati, qui étaient en train de se préparer pour leur journée de cours, sortirent à ce moment-là de la salle de bains.
"Joyeux anniversaire, Hermione !"
"Oh, merci beaucoup les filles."
"Joli dessin. C'est de qui ?"
"Mon ami Danny, de chez moi."
Hermione se retourna et fut surprise de voir que Lavande était derrière elle, un paquet emballé entre les mains.
"Oh… Lavande, il ne fallait pas…"
"C'est pas grand chose."
Hermione le prit et ouvrit la petite boite : c'était le flacon de shampooing à la fraise. Avec, il y avait un petit mot, signé par Lavande et Parvati dans une jolie encre violette.
"Merci beaucoup les filles !"
"On s'est dit que ça te ferait plaisir, parce que tu n'as pas changé depuis que je t'avais donné le mien. En plus, l'odeur te va trop bien."
Hermione rangea ses nouveaux cadeaux, puis descendit à la Grande Salle. Quand elle arriva en bas des escaliers de la Salle Commune, elle trouva Harry et Ron, tous les deux assis dans le canapé. Ils baillaient et semblaient épuisés. Mais quand ils la virent, ils firent tous les deux un grand sourire :
"Joyeux anniversaire Mione !"
Elle les prit tous les deux dans ses bras pour les remercier. Ron, qui était beaucoup plus grand, posa son menton sur le haut de son crâne.
"Merci les garçons ! Vous êtes déjà réveillés à cette heure-là ?"
"On a pensé que ça te ferait plaisir qu'on vienne prendre notre petit-déjeuner avec toi. On savait que tu allais te lever beaucoup trop tôt…" expliqua Harry.
"Merci, ça me fait très plaisir !"
Ils descendirent tous les trois à la Grande Salle. Quand ils arrivèrent à la table des Gryffondors, elle fut surprise de voir que Neville, Ginny et les jumeaux Weasley étaient déjà attablés.
"Joyeux anniversaire Hermione !" s'écrièrent-ils tous en chœur.
"Merci ! Mais pas trop fort, s'il vous plaît, je ne veux pas que les autres entendent…"
Elle s'assit, un peu gênée d'être autant au centre de l'attention. Elle voulut se servir pour manger mais fut interrompue dans son geste par Ginny qui lui passa son cadeau :
"Tiens, pour toi !"
Harry, Ron, Neville, Fred et George firent de même. Hermione sentait ses joues rougir sans qu'elle le contrôle :
"Oh, merci beaucoup…"
"Ouvre-le !"
Hermione le fit successivement. Harry lui avait offert une jolie tasse verte pour ses thés à la Bibliothèque, Ron du papier à lettres, Neville une montre et les jumeaux un bon d'achat pour leurs inventions, bien qu'ils savaient pertinemment qu'Hermione n'achèterait jamais de nougats Néansang ou de petits fours Tourndelœil.
Ginny, elle, lui avait offert une bouillotte magique qui restait chaude toute la nuit, parce qu'elle savait à quel point Hermione pouvait être frileuse.
Elle les remercia tous plein de fois et voulut commencer son petit-déjeuner, mais les jumeaux Weasley avaient profité de sa déconcentration lors de l'ouverture de ses cadeaux pour mettre des bougies sur un croissant, et ils refusèrent de les éteindre tant qu'Hermione n'avait pas soufflé dessus.
Gênée au plus haut point, elle finit par le faire, pendant que la moitié de la table des Gryffondors chantaient "Joyeux anniversaire Hermione !" en boucle et le plus fort possible. À la fin, les joues d'Hermione étaient probablement cramoisies, mais elle n'arrivait pas à s'arrêter de sourire.
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Drago
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"Joyeux anniversaire Hermioneeeee…"
"Ils ne peuvent pas se taire ? Ils vont me donner une migraine avant même de commencer la journée." se plaignit Pansy.
Drago, Pansy et Blaise étaient tous les trois assis à la table de Serpentards pour le petit déjeuner. Théo n'était pas encore arrivé.
Drago regardait la table des Gryffondors discrètement, où Granger se faisait applaudir par ses amis. Il savait que c'était son anniversaire, depuis qu'il avait appris la date, il l'avait retenue sans savoir pourquoi. Il essaya de distinguer les cadeaux qu'elle avait reçus, mais Pansy le gênait parce qu'elle était assise pile en face de lui et l'empêchait de voir. Il crut discerner une bouillotte blanche avant que Théo finisse par les rejoindre à table.
"Bonjour." dit-il d'une voix pâteuse.
Théo avait fini par digérer la nouvelle que Pansy et Drago couchaient ensemble et n'avait pas reparler de l'incident du début de mois. Par contre, depuis, Drago trouvait qu'il était sensiblement plus agacé et précautionneux quand il traînait avec eux.
"Hey." dirent-ils tous en retour.
Théo haussa les sourcils en entendant les éclats de voix particulièrement bruyants des Gryffondors :
"Pourquoi ils crient comme ça ? Weasley s'est enfin coupé les cheveux et tout le monde célèbre ça ?" demanda-t-il avec un rire sarcastique.
Drago pouffa de rire.
"C'est l'anniversaire de Granger." grinça Pansy, qui était dos à eux et s'appliquait à ne pas se retourner pour les observer. "Avec un peu de chance, elle va se faire offrir un sortilège pour raccourcir ses dents de lapin."
Théo sourit et se servit un large verre de jus de citrouille. Blaise lisait, comme d'habitude, la Gazette des Sorciers, et était plongé dans un article sur une potentielle corruption entre un arbitre de Quidditch et un entraîneur qui l'aurait payé pour favoriser son équipe.
Le repas fut silencieux. Pendant qu'il se servait à manger, Théo toussota et soudain, Pansy poussa un cri de joie, ce qui fit sursauter Théo et Drago qui firent tomber leurs couverts dans leur assiette.
"AH-AH ! JE TE L'AVAIS DIT ! J'AVAIS RAISON !" cria-t-elle avec un grand sourire.
Elle dansait sur place, visiblement ravie.
"De quoi tu parles ?"
"La toux !"
"Hein ?" demanda Théo en ramassant sa fourchette, sonné.
"Ton horoscope du mois !" s'exclama Pansy.
Elle sortit un bout de journal de sa poche qu'elle lissa pour le lire :
"Santé : Vous êtes en bonne forme, excepté cette petite toux de 3 jours, du 18 au 21 septembre. Tu vois ? Je t'avais dit que c'était vrai !"
"Pans', j'ai à peine toussoté !" s'insurgea Théo.
"Non, tu as une toux, et nous sommes le 19 septembre, ce qui veut dire que la divination est vraie, l'astrologie est vraie, et tu as tort !"
"Tu attends qu'il tousse depuis hier pour nous montrer ce bout de journal ?" demanda Blaise, qui était mort de rire en voyant la tête outrée de Théo.
"Parfaitement, mais je savais que ça allait arriver, les horoscopes ont toujours raison." répliqua Pansy, fière d'elle. "Maintenant, il ne reste plus qu'à voir pour le 30 septembre… « Peut-être que la personne que vous avez en vue fera un pas vers vous ? » C'est qui, ta personne en vue ?"
"Personne." siffla Théo.
"Bien sûr…" Pansy chercha du regard les personnes autour d'elle, en quête d'une fille qui pourrait intéresser Théo. "Astoria, la soeur de Daphné ?"
Théo fit la grimace.
"Non, absolument pas. Laisse-moi tranquille."
"On verra le 30 septembre, quand la personne que tu aimes en secret viendra te parler…"
"Si quelqu'un fait un pas vers moi le 30 septembre, ça sera simplement une coïncidence, comme toutes les prédictions en toc que tu lis…"
La dispute entre Pansy et Théo dura une bonne partie du déjeuner, mais Drago n'écoutait plus que d'une oreille. Il était d'accord avec Théo mais n'avait pas assez de motivation pour argumenter contre Pansy. Il préféra donc regarder tranquillement Granger, dont les rougeurs causées par les chants d'anniversaire ne s'étaient toujours pas atténuées.
Soudain, un bruissement d'ailes couvrit le bruit des conversations de la Grande Salle, maintenant remplie d'élèves. Drago jeta un coup d'œil en l'air, où des centaines d'hiboux volaient au-dessus d'eux en cherchant leur destinataire.
Ébène se posa devant Drago pour lui apporter la lettre hebdomadaire de sa mère, qu'il décrocha de sa patte pendant que l'hibou grignotait des miettes de son toast. Lucius ne lui avait rien envoyé depuis le début de l'année.
Un autre hibou se posa face à eux. Depuis qu'il était à Poudlard, Théo n'avait jamais reçu de lettre. Le seul hibou qui venait le voir était celui de la Gazette du Sorcier qu'il recevait tous les matins.
Celui qui se posa devant lui, cependant, n'avait rien à voir avec les chouettes factrices du journal, celui-là était très grand, majestueux, d'un plumage impeccable, et tenait un rouleau de parchemin scellé entre son bec. Théo, décontenancé, le prit et l'hibou s'envola immédiatement sans attendre de paiement.
"Une lettre recommandée ?" dit Pansy en regardant le parchemin de Théo. "Ça vient de qui ?"
"Aucune idée." répondit le brun en analysant le sceau.
Il le brisa pour dérouler la lettre, qu'il lit en silence. Drago ne pouvait pas voir la lettre de là où il se tenait, mais vu les yeux agrandis de Théo, il comprit que ce n'était pas une lettre très plaisante à recevoir. Il attendit que son meilleur ami eût fini sa lecture.
Quand il releva la tête, et avant qu'il n'ait pu expliquer quoique ce soit, Pansy lui arracha presque des mains pour la lire à son tour, insensible à la possibilité qu'elle puisse empiéter sur sa vie privée.
À l'instar de Théo, plus sa lecture avançait, plus elle parut choquée. À la fin, elle le regarda avec un air de pitié :
"Oh, Théo… Je suis désolée…"
"Quoi ?" demandèrent de vive voix Drago et Blaise en même temps.
Pansy leur tendit la lettre, que Blaise attrapa pour lire, et Drago fit de même par-dessus son épaule :
Cher Théodore,
C'est avec regret que je t'annonce que tu es officiellement renié de la famille des Nott. Tu as décidé de salir les valeurs respectables de ta lignée et de ne pas remplir ton devoir qu'un héritier pur-sang se doit d'accomplir, malgré plusieurs de mes avertissements.
Je t'informe donc que ton nom sera supprimé de l'arbre généalogique des Vingt-huits sacrés, et que tu ne figureras plus sur aucun régistre de familles sangs-purs. Tu es également évincé de l'héritage des Nott, et coupé des richesses qui t'étaient dûes : plus accès aux coffres de Gringotts, au Manoir des Nott, et à toute autre résidence que la famille possède.
Pour ma part, je ne te considère plus comme mon enfant.
Adieu.
Théodore Nott Sr.
Drago sentit une boule de se former dans sa gorge en lisant la calligraphie du père de Théo. Quand il releva la tête, il ne les regardait pas, mais tentait de faire bonne figure :
"Je m'y attendais, ce n'était qu'une question de temps."
"Tu n'es pas trop…" demanda Pansy, mais elle se fit couper par un geste de la main de Théo.
"Non, ça va. Je préfère ça plutôt que de devoir être rattaché à cette famille que je déteste. Je ne voulais plus jamais revoir mon père dans tous les cas, alors, ça m'arrange."
Pourtant, Drago pouvait voir que la lettre l'avait troublé. Il ne cessait de revenir dessus avec ses yeux en déglutissant difficilement. Heureusement, Blaise lui posa tout de suite une main sur l'épaule :
"Tu n'as pas besoin de lui pour vivre. Chez toi, c'est mon Manoir maintenant, et tu peux te servir dans mon coffre à Gringotts, j'ai largement assez pour nous deux."
"Pareil pour moi." dit Drago doucement. "Et ma mère m'a dit que tu pouvais venir à la maison quand tu le souhaitais."
"Merci. Vous ne savez pas comment ça m'aide."
Blaise et Théo lui tapotèrent les deux épaules simultanément et Pansy lui fit un petit sourire triste. Ils mangèrent en silence, chacun digérant la nouvelle qui était si brutalement tombée sans qu'ils s'y attendent. Puis, Théo murmura, railleur :
"«Le 19 septembre, votre père vous reniera officiellement de sa famille, le rendant orphelin.» Tu ne l'avais pas vu ça dans ton horoscope, hein, Pansy ?"
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Hermione
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Le mois d'octobre se déroula exactement comme le mois de septembre : Hermione passa le plus de temps possible à la Bibliothèque pour s'occuper de la S.A.L.E, Harry et Ron ne révisaient pas du tout leurs cours, et Neville ne comprenait toujours rien aux cours de Potions. Les deux seules différences étaient qu'Hermione passait plus de temps avec Ginny que les années précédentes, et que Drago Malefoy révisait toujours autant à la Bibliothèque.
Hermione devait avouer qu'elle avait pris une habitude étrange depuis quelque temps, qui était d'observer en douce Malefoy. Il était assis à quelques tables d'Hermione, et elle ne pouvait s'empêcher de lever la tête de temps en temps pour regarder ce qu'il faisait. Parfois, il travaillait, parfois il lisait un livre, et parfois il parlait avec Théodore Nott ou Blaise Zabini.
En tout cas, il venait pratiquement tous les jours, ce qui était extrêmement inhabituel. Personne d'autre qu'elle ne passait autant de temps à la Bibliothèque.
Plusieurs questions la déconcentraient donc dans son travail : pourquoi étudiait-il plus qu'avant ? Voulait-il la battre en cours ? Ou s'était-il fait engueuler par ses parents ?
Elle avait aussi remarqué qu'il reparlait à Pansy Parkinson. Elle se demanda s'ils s'étaient réconciliés pendant l'été, s'ils passaient du temps ensemble à l'extérieur de Poudlard. Il avait l'air très proche de Nott et Zabini aussi, mais elle n'arrivait pas vraiment à comprendre le lien qu'ils avaient tous les quatre.
Alors, sa curiosité prenait souvent le dessus, et elle se mettait à observer le Serpentard bien plus qu'avant. Parfois, il tournait légèrement la tête vers elle à la Bibliothèque, ce qui la ramenait brutalement à la réalité, et elle se remettait à écrire ou à lire.
Le 30 octobre, Hermione descendit à 18h avec Ron et Harry pour accueillir les nouveaux élèves de Durmstrang et Beauxbâtons. Les élèves français arrivèrent après plusieurs minutes d'attente, dans un magnifique carrosse bleu pastel volant. Hermione regarda toutes les élèves qui en sortaient avec autant d'attention qu'eux en voyant l'énorme château de Poudlard. Pour avoir passé beaucoup de temps en France en vacances avec ses parents, elle était sûre qu'ils étaient français, et leur accent très prononcés le confirmèrent.
Ensuite, ce furent les élèves de Durmstrang qui arrivèrent, avec une entrée tout aussi magistrale que ceux de Beauxbâtons. À bord d'un énorme bâteau, ils avaient émergé de la surface bouillonnante du Lac Noir, et étaient tous sortis en rang, vêtus d'épaisses fourrures.
Ce fut quand le rang avança vers les portes du château que Ron remarqua quelqu'un dedans :
"C'est Krum ! Harry, c'est Krum ! Je n'arrive pas à y croire ! C'est Viktor Krum !" s'exclama-t-il en remontant les marches de l'escalier.
"Pour l'amour du ciel, Ron, c'est un simple joueur de Quidditch." dit Hermione, exaspérée.
Sur tout le chemin vers la Grande Salle, Harry, Ron et Hermione croisèrent des fans, désespérés de se faire signer un autographe par Krum. Hermione n'arrivait pas à le voir dans la foule d'élèves, mais quand elle s'assit à la table des Gryffondors, elle put le voir de l'autre côté de la salle, pendant qu'il s'installait à la table des Serpentards.
Il était grand, et assez imposant. Il avait la tête rasée et semblait fuir le regard de tous les élèves qui le regardaient avec stupéfaction, comme s'il était gêné de toute l'attention qu'il était en train de recevoir. Pourtant, il devait y être habitué. Il enleva sa fourrure épaisse, en dessous, il portait une robe rouge sang, tout comme les autres élèves de Durmstrang.
Les plats arrivèrent sur les quatre tables et Hermione grimaça en voyant la quantité impressionnante de plats variés. Les pauvres elfes de maison devaient s'être épuisés à la tâche. Elle jeta un regard noir à Dumbledore, mais ce dernier était plongé dans une conversation avec Karakoff, le directeur des élèves de Durmstrang, et ne fit absolument pas attention à elle.
Elle se servit surtout dans les plats français, la nourriture qu'elle aimait le plus. Pendant le dîner, une élève de Beauxbâtons s'approcha de leur table :
"Excusez-moi, vous avez fini avec la bouillabaisse ?"
Elle était très belle, blonde aux cheveux lisses qui tombaient gracieusement à sa taille, et des grands yeux bleus clairs. Elle regardait Ron, mais ce dernier était devenu écarlate et bredouilla :
"La bouba... la boubaliaisse... La bailloubaisse…"
"Bouillabaisse." corrigea la fille.
"Bouba… Boubia…"
"Tu n'as pas l'air très doué pour les langues étrangères…" s'impatienta la blonde. "Alors, vous avez fini, oui ou non, avec cette bouillabaisse ?"
"Oui." dit Ron, le souffle coupé. "Oui, c'était… c'était excellent."
Elle emporta la soupière et Hermione ne se gêna pour lever gravement les yeux au ciel pendant qu'Harry était mort de rire.
"C'est une Vélane !" s'exclama Ron.
"Bien sûr que non ! Il n'y a que toi qui la regarde d'un air idiot !"
Elle piqua son morceau de bœuf violemment, irritée. Elle ne savait pas vraiment pourquoi, mais la réaction de Ron lui avait donné une petite pique au cœur. De la jalousie. Elle n'avait jamais ressenti ça auparavant, et encore moins à cause de Ron.
Les desserts arrivèrent et Hermione remarqua que Ron n'arrêtait pas de regarder vers la table des Serdaigles, là où la jolie fille blonde était attablée. Il n'était pas du tout discret, on aurait dit qu'il était hypnotisé par elle. À chaque regard qu'il jetait à la table en face, Hermione ressentait cette douloureuse piqûre. À la fin du repas, son moral était à zéro.
Pour éviter de regarder Ron, elle se concentra plutôt sur la table des Serpentards. Krum était en train de manger tranquillement, à quelques places de Drago Malefoy qui parlait à voix basse avec Blaise Zabini.
Si Malefoy semblait heureux d'être proche du joueur de Quidditch, ce n'était rien comparé à Zabini. Hermione ne l'avait jamais vu avec une autre expression sur le visage que l'indifférence, alors ça contrastait beaucoup avec sa tête actuelle, c'est-à-dire complètement surexcité. Il n'osait même pas se tourner vers Krum et échangeait des mots à voix basse avec Malefoy en trépignant sur place. Théodore Nott, de l'autre côté, était complètement indifférent à la présence de Krum et préférait parler avec Pansy Parkinson en face de lui.
Pendant que Dumbledore expliquait le fonctionnement de la Coupe de Feu et la sélection des champions du lendemain, Ginny se tourna légèrement vers Hermione. Malgré les quelques places qui les séparaient, elle pouvait parfaitement voir son visage inquiet. Ginny était extrêmement observatrice. Hermione haussa simplement les épaules et continua d'écouter le discours de Dumbledore.
Sur le chemin vers la tour des Gryffondors, Fred et George étaient déjà en train d'exposer leurs théories pour contourner la Limite d'Âge instaurée par Dumbledore pour empêcher les élèves de moins de 17 ans de déposer leur nom. Hermione, elle, était profondément contrariée. Elle ne dit pas un mot à Ron, et quand ils entrèrent dans la Salle Commune et qu'Harry et Ron annoncèrent qu'ils allaient se coucher, elle ne leur dirent pas "bonne nuit".
À peine furent-ils partis que Ginny s'installa à côté d'Hermione sur le canapé qu'elle occupait.
"Qu'est-ce que tu as, Mione ?" demanda-t-elle.
Hermione lui fit un geste muet pour dire qu'elle ne pouvait pas en parler maintenant, en montrant du doigt Fred, George, Seamus et Dean qui étaient à côté d'elles. Ginny comprit et ne demanda pas plus de détails.
Elle regarda Hermione sortir sa baguette pour lancer un "accio tasses !" et deux mugs, celui qu'Harry lui avait offert pour son anniversaire et celui de sa chambre arrivèrent dans sa main. Elle servit deux thés, dont un qu'elle tendit à Ginny, et elles parlèrent de tout et de rien le reste de la soirée.
Quand Fred et George, les derniers de la Salle Commune, dirent bonne nuit à Hermione et Ginny, leurs thés étaient finis. Hermione regardait le feu de la cheminée d'un air absent.
"Ça t'a énervée, non ? La réaction de Ron avec cette fille de Beauxbâtons ?" demanda finalement Ginny.
À quoi bon essayer de cacher quelque chose à Ginny ? Elle savait déjà tout. Hermione se frotta les paupières :
"Oui, un peu. Et je ne sais même pas pourquoi, ça me rend folle."
"Tu ne penses pas que tu ressens quelque chose pour lui ?" demanda gentiment la rouquine.
Hermione réfléchit quelques secondes en observant les flammes lécher les briques rouges de la cheminée. Elle avait toujours eu une connexion différente avec Ron qu'avec Harry.
Harry, c'était comme son frère, elle l'avait toujours vu comme ça et ce lien si précieux ne changerait jamais, elle en était persuadée. Ron, c'était différent. Il la stimulait plus, elle se sentait plus exposée, plus ouverte à l'idée qu'il puisse y avoir autre chose qu'une amitié entre eux. Pourtant, elle ne l'avait jamais vraiment constaté jusqu'à l'été dernier.
"Je ne sais pas." avoua Hermione. "Je ne sais pas si je suis vraiment attirée par lui, ou si je suis simplement flattée de ce que tu m'as dit pendant l'été."
"Tu lui plais, Hermione, c'est évident !"
"Peut-être, mais je ne sais pas si je ressens la même chose que lui… Si c'est bien le cas... Vu comment il a réagi ce soir avec la blonde…"
"Il est juste idiot." coupa Ginny avec un sourire. "Attends un peu, laisse le mariner, et tu verras."
Hermione hocha silencieusement la tête, son esprit bourdonnant de pensées. Ginny posa la tasse sur la petite table basse :
"Merci pour le thé, Mione. Je vais me coucher."
"D'accord, bonne nuit !"
Ginny lui sourit et se rendit à son dortoir. Une fois que ses pas eurent cessé de résonner et que la porte de son dortoir claqua quelque part un peu plus haut, Hermione fut seule dans la Salle Commune. Les flammes qui crépitaient en face d'elle étaient la seule source de bruit. Elle se versa un autre thé et s'allongea dans le canapé, pensive.
Ron… En première année, elle n'aurait jamais pensé pouvoir un jour ressentir quelque chose pour lui. Pourtant, il habitait beaucoup ses pensées, ces derniers temps. Et le fait qu'elle était jalouse prouvait qu'il avait une place particulière, non ?
Elle ressassa ses pensées longtemps. C'était très rare qu'elle soit seule, d'habitude, elle faisait partie des premières à aller se coucher. Pourtant, elle resta là très longtemps, parce que son esprit la tenait éveillée. Puis, quand les flammes avaient considérablement rétréci et que ses paupières se fermaient toutes seules, Hermione posa sa tasse et monta dans son dortoir.
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Drago
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Le jour d'Halloween, tout le monde ne parlait plus que des candidats qui avaient mis leur nom dans la Coupe de Feu. Quand Drago, Blaise, Théo, Pansy, Crabbe et Goyle allèrent prendre leur petit-déjeuner, Goyle leur informa :
"Warrington a déposé son nom ce matin de bonne heure."
Drago observa le Serpentard qui était assis un peu plus loin et qui avait un grand sourire aux lèvres. Warrington jouait dans l'équipe de Quidditch de Serpentard, mais Drago ne lui avait jamais trop parlé.
"Il est baraqué, ça peut être pas mal pour le tournoi." dit-il en guise de commentaire.
"Qui d'autre s'est inscrit ?" demanda Théo.
"Angelina Johnson, Gryffondor, et Cedric Diggory, à Poufsouffle."
Diggory n'était plus assis à sa table. Drago l'aimait bien, et il trouvait qu'il avait une bonne carrure de champion. Son seul défaut était sa Maison.
"Je suis sûr que j'aurais pu gagner." marmonna Blaise.
Tout le monde le regarda, surpris :
"Hein ?"
"J'aurais pu gagner." répéta Blaise d'un ton déterminé. "Si j'avais eu plus de dix-sept ans, j'aurais participé. Je suis sûr que j'aurais été sélectionné."
"Comment peux-tu en être aussi certain ?" demanda Pansy sans cacher son ton railleur.
"Je suis charismatique, rusé et athlétique." répondit Blaise du tac au tac.
"Et modeste." ajouta Théo.
"Tu ne sais même pas en quoi consiste le Tournoi !" dit Pansy en riant.
"Et alors ? Je te dis que j'aurais gagné."
"Dans ce cas-là, tu peux dire ça de n'importe qui !" dit Pansy en se tournant pour observer la Grande Salle. "Les jumeaux Weasley, ce mec là-bas à Serdaigle… Crabbe et Goyle."
Ces derniers gonflèrent fièrement la poitrine en entendant leurs noms.
"Crabbe et Goyle ?" répéta Blaise avec un rire. "J'ai dit rusé et charismatique."
Les concernés se dégonflèrent immédiatement. Blaise ne semblait pas du tout gêné d'avoir dit ça devant eux.
"J'aime bien Diggory." intervint Drago qui buvait son café. "J'espère que ça sera lui qui sera pris ce soir."
"Moi, je veux que ça soit Angelina." annonça Pansy.
Elle reçut plusieurs regards étonnés.
"Quoi ? Je ne dis pas que je suis une grande fan de sa Maison." se défendit-elle. "Je dis juste que ça serait bien que ça soit une fille."
"Tu veux parier ?" proposa Blaise.
"Ok." dit Pansy sans hésiter. "10 Gallions que ça sera sur Angelina."
"Moi, je mets 10 Gallions sur Diggory." dit Blaise.
"Pareil." intervint Drago.
"Nous aussi !" dirent Crabbe et Goyle.
"Vous ne m'avez toujours pas remboursé votre devoir de Métamorphose." coupa Théo. "Vous parierez une fois que ça sera fait."
"Et toi, Théo ? Tu paries ?" proposa Blaise.
"J'aimerais que ça soit Johnson aussi, mais je ne vais pas mettre de l'argent en jeu. Déjà que j'en ai pas beaucoup…"
"Tu peux prendre le mien." dit Blaise.
"Ça casserait un peu tout le principe." répondit Théo en souriant. "Et puis, ça ne me dérangerait pas que ça soit Diggory non plus."
"Moi non plus." dit Pansy à voix basse avec un petit sourire.
"Tu dis ça juste parce qu'il est beau." rétorqua Théo.
"Ouais, c'est vrai." dit-elle. "Tout comme Warrington."
"Tu aimes juste les mecs grands."
"Ouais, mais je déteste les mecs châtains qui lisent trente livres par jour, en tout cas." répondit Pansy avec un sourire.
Celui de Théo s'effaça :
"Hé !"
"Bon." coupa Blaise. "Deux pour Diggory, et un pour Johnson. 10 Gallions. On verra ce soir."
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Pendant le festin, Drago avait tellement hâte de découvrir ce que la Coupe de Feu avait choisi comme nom qu'il mangea rapidement, avide de savoir. Les autres élèves de la Grande Salle avaient fait pareil, trop impatients de découvrir qui était le champion de Poudlard. Quand, enfin, les assiettes disparurent, Dumbledore se leva et tous les regards se posèrent sur la Coupe de Feu, d'où sortait toujours les flammes bleues.
"Voilà." dit Dumbledore. "La Coupe de Feu ne va pas tarder à prendre sa décision. Je pense qu'il faudra attendre encore une minute. Lorsque le nom des champions sera annoncé, je demanderai aux heureux élus de venir jusqu'ici et d'aller se regrouper dans la pièce voisine où ils recevront leurs premières instructions."
Il éteignit les chandelles du plafond, plongeant la Salle dans une atmosphère trépignante d'attente. Drago pouvait entendre Blaise murmurer entre ses dents "Diggory, Krum, Diggory, Krum…"
Au bout d'une minute, les flammes bleues prirent soudain une couleur rouge foncée, et un grand bruit retentit. C'était comme si tous les élèves retenaient leur respiration. Les flammes s'embrasèrent dans l'air et un morceau de parchemin froissé et noirci s'envola. Dumbledore l'attrapa au vol, le lit et déclara d'une voix grave :
"Le champion de Durmstrang sera… Viktor Krum !"
Bien que c'était très prévisible, cela n'empêchèrent pas Drago et Blaise d'hurler de joie. Ils applaudirent le champion qui se leva doucement, monta sur l'estrade et disparut derrière la porte de la salle indiquée par Dumbledore. Puis, il y eut de nouveau un silence. Les flammes redevinrent rouges et expulsèrent un autre morceau de parchemin :
"La championne de Beauxbâtons sera… Fleur Delacour !"
Une fille aux longs cheveux blonds se leva de la table des Serdaigle avec un sourire victorieux. Elle contourna la table des professeurs et alla rejoindre Krum. Drago remarqua avec étonnement que Granger la regardait avec un regard noir, généralement celui qu'elle réservait plutôt à Drago ou Pansy.
Le silence se réinstalla et tout le monde attendit le champion de Poudlard. Blaise avait croisé les doigts sur ses cuisses et Pansy fixait intensément les flammes rouges de la Coupe. Le dernier parchemin vola alors, Dumbledore l'attrapa et ébaucha un petit sourire :
"Le champion de Poudlard sera… Cedric Diggory !"
La table des Poufsouffles explosa en hurlements et en applaudissements. Pendant toute la marche de Diggory vers la porte des champions, il était impossible de se faire entendre à cause du vacarme que provoquait la table des Poufsouffles. Quand il disparut de leur vue, Drago put enfin entendre Blaise :
"Gagné ! Tu nous dois 10 Gallions chacun, Pansy !" jubilait-il.
Pansy, pour une fois, n'était pas une mauvaise joueuse. Elle accepta son sort avec un hochement de tête amusé.
Ils commencèrent à discuter des choix des champions, quand soudain, le bruit des conversations s'étouffa d'un coup. Drago leva la tête et vit avec stupéfaction que les flammes de la Coupe étaient redevenues rouges. Un parchemin en sortit, et Dumbledore, indifférent aux murmures qui s'étaient élevés dans la Grande Salle, l'attrapa et le lut silencieusement. Il parut étonné et laissa passer quelque instant, puis annonça d'une voix forte :
"Harry Potter."
Il y eut comme une onde de choc. Blaise, qui s'était légèrement levé du banc pendant l'annonce, retomba brutalement sur son siège. Pansy avait la bouche grande ouverte de choc, et Théo murmura :
"C'est une plaisanterie ?"
Drago se tourna vers la table des Gryffondors. Potter paraissait aussi choqué que les autres, comme figé de stupeur. Granger le regardait avec effarement, visiblement incapable de trouver quoi dire, pour une fois.
"Harry Potter !" clama de nouveau Dumbledore. "Harry, venez ici, s'il vous plaît !"
Granger le poussa dans le dos en lui murmurant quelque chose à l'oreille, et Potter fut contraint de marcher. Pansy se tourna vers les Serpentards :
"Comment est-ce qu'il a fait pour mettre son nom ?"
"Aucune idée, peut-être un sortilège puissant de…" commença Blaise.
"Potter a été élevé par des Moldus, il est incapable de faire quoique ce soit." trancha Drago.
Sa voix était teintée de colère, mais il ne fit rien pour la corriger.
"Il a l'air surpris." commenta Théo qui suivait Potter des yeux tandis qu'il rejoignait les autres champions par la porte dérobée.
Quand la porte se ferma, les murmures de la Salle se transformèrent en brouhaha. Les bancs sur lesquels les élèves étaient assis pour manger grincèrent sur le sol tandis que tout le monde se levait et sortait en parlant de ce qui venait de se passer. Drago resta assis, tout comme ses amis, et Granger et Weasley. Cette dernière parlait maintenant à Weasley à toute vitesse, elle était sous le choc.
"Parfait Potter qui a toujours ce qu'il veut." marmonna Drago. "Toujours au centre de l'attention."
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Hermione
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Quand Hermione descendit du dortoir le lendemain, seul Ron l'attendait. Il était très tôt, alors elle ne s'attendait pas du tout à le voir, encore moins un dimanche.
"Ron ?" appela-t-elle depuis les escaliers.
Il se tourna vers elle et elle fut surprise de voir les traits de son visage. D'habitude, il avait toujours le sourire. Là, il était froid et énervé, et ne lui adressa même pas un bonjour quand elle arriva à côté de lui.
"Qu'est-ce qui t'arrive ?" demanda-t-elle, alarmée. "Où est Harry ?"
"Peu importe. Allons manger."
Il la tira par le bras pour sortir par le portrait. Hermione le suivit, stupéfaite. Ce ne fut que quand ils descendirent les marches des escaliers qu'elle osa lui demander :
"Ron, tu peux me dire ce qu'il se passe, s'il te plaît ? Tu me fais peur."
"Tu ne trouves pas ça bizarre…" commença-t-il en se retenant visiblement de s'énerver. "Qu'Harry ait parlé de «venir déposer son nom pendant la nuit pour que personne ne le voit» ?"
Hermione ne comprit pas du tout son allusion.
"Quoi ?"
"Je veux dire, il avait l'air d'y avoir déjà pensé. Venir pendant la nuit, avec une cape d'invisibilité, et sa carte du Maraudeur peut-être, sans prévenir personne ? Oh non, pas ça !" rugit-il.
Les escaliers venaient de trembler et bougeaient pour se rattacher à un autre couloir, les éloignant encore plus de leur destination. Ron paraissait à bout de nerfs. Il attrapa Hermione pour ne pas qu'elle chancelle à cause du mouvement des escaliers. Elle comprit enfin la raison de sa colère :
"Ron, ne me dis pas que tu penses sincèrement qu'Harry ait pu déposer son nom dans la Coupe ?"
"C'est bien ce qu'il s'est passé hier, non ?" dit-il, furieux. "Harry Potter, toujours celui qu'on regarde, celui qu'on admire, et il n'a même pas pensé à nous prévenir avant !"
"Ron !" s'exclama Hermione. "Comment peux-tu dire ça ? On parle d'Harry ! Il a clairement été piégé, tu as vu sa tête quand son nom est sorti ? Quelqu'un a essayé de le faire entrer illégalement dans le tournoi pour le tuer !"
Mais Ron n'écoutait pas un mot de ce que disait Hermione, trop occupé à ruminer. Ils arrivèrent enfin en bas des escaliers et Ron entama alors une marche si rapide qu'Hermione devait trottiner à côté de lui pour garder le rythme :
"C'est pour ça qu'il n'est pas venu ?" demanda-t-elle. "Vous vous êtes disputés ?!"
Le visage de Ron était fermé et ses lèvres formaient un trait fin. Il ne répondit pas, ce qui était assez explicite. Il s'assit sur les bancs des Gryffondors et ne dit plus un mot.
Elle n'aurait jamais pu penser être au milieu d'une dispute entre Harry et Ron, qui étaient meilleurs amis depuis toujours. Ils n'avaient jamais été en froid, c'était tellement nouveau qu'Hermione n'avait aucune idée de quoi dire à Ron pour le réconforter. Elle était persuadée qu'Harry n'avait pas mis son nom, mais elle comprenait la colère de Ron qui pensait qu'il était, une fois de plus, dans l'ombre de son meilleur ami célèbre.
Hermione grignota un bout de toast sans appétit. Elle pensa à Harry, qui devait être profondément malheureux, alors elle tartina quelques toasts de confiture, le déjeuner préféré d'Harry, et les enveloppèrent dans une serviette en papier. Quand elle se leva, Ron demanda d'un ton dédaigneux :
"Et tu vas où, comme ça ?"
"La Bibliothèque." mentit-elle. "Travailler un peu sur la S.A.L.E."
Il acquiesça, même si elle pouvait voir qu'il n'était pas dupe. Elle sortit et remonta les sept étages. Quand elle arriva devant le portrait de la Grosse Dame, il coulissa avant qu'elle ait pu dire le mot de passe et Harry en sortit. Il était tellement triste que ça brisa le cœur d'Hermione. Elle lui tendit ses toasts à la confiture :
"Je t'ai apporté ça…" dit-elle. "Tu veux aller faire un tour avec moi ?"
Les yeux d'Harry se plissèrent légèrement de soulagement derrière ses lunettes rondes.
"Bonne idée."
Ils descendirent pour aller dehors. Hermione n'avait qu'un pull sur elle alors elle frissonna légèrement en arrivant sur les bords du Lac Noir, mais elle n'y tient pas compte et mangea un toast en écoutant Harry lui raconter tout ce qu'il s'était passé dans la salle voisine de la Grande Salle. Il insista plusieurs fois sur le fait qu'il n'avait aucune idée que son nom allait sortir de la Coupe, bien qu'elle ne questionnait pas du tout cette partie-là de l'histoire.
Il semblait aussi furieux que Ron, ce qui n'aidait pas du tout. Il était trop focalisé sur le fait qu'il ne voulait plus lui parler pour s'inquiéter du vrai danger : il allait participer au tournoi. Le ventre d'Hermione se retournait rien que d'y penser. Elle avait lu des choses affreuses sur les épreuves, Harry allait risquer sa vie…
Elle lui conseilla d'envoyer une lettre à Sirius pour lui raconter, et ils se rendirent à la volière.
Quand Ron était énervé, il n'arrivait pas vraiment à garder tout pour lui et préférait donc tout lâcher sans faire attention à ce qu'il disait, ou comment il pouvait blesser. Harry était tout l'opposé. Il gardait tout pour lui et ne se confiait pas sur ce qu'il ressentait, pourtant, Hermione pouvait voir à quel point il était troublé.
"Hermione, je vais faire un tour en balai pour me changer les idées." dit-il avec un profond soupir exaspéré. "On se voit tout à l'heure ?"
"Tu vas déjeuner, au moins ?" demanda-t-elle tandis qu'il s'éloignait.
"Non. Je ne veux pas que tout le monde me regarde comme si j'étais un demeuré. On se voit ce soir."
Et il s'en alla dans les escaliers de la volière. Hermione ne savait pas quoi faire de plus. Elle espérait que Sirius aurait une réponse adéquate à la situation et qu'il arriverait à raisonner Harry, parce que c'était la seule personne qui pouvait le faire. Elle prit un parchemin de son sac et écrivit alors une longue lettre à ses parents pour leur raconter ce qu'il venait de se passer, qu'elle envoya avec l'un des hiboux de l'école.
Hermione n'avait aucune envie de voir Ron, alors elle décida de mettre son mensonge à exécution et d'aller à la Bibliothèque. De toute façon, c'était ce qu'elle avait prévu de faire de sa journée, avant que l'annonce du nom d'Harry ne chamboule tout. Elle sortit donc de la volière et se dirigea vers la Bibliothèque, son sac rempli de recherches sur les elfes de maison.
Mais quand elle arriva, elle ne fut pas au bout de ses surprises. Krum était assis à l'une des tables de la Bibliothèque, en train de lire un livre avec les sourcils froncés, visiblement très concentré. Quand elle entra, il jeta un rapide coup d'œil vers elle et lui fit un petit sourire, auquel elle répondit non sans surprise. Elle vit alors avec horreur que deux filles étaient assises à sa table habituelle. Elles n'avaient rien devant elles, pas même un malheureux bout de parchemin. Elles ne faisaient que glousser en pointant du doigt Krum, qui prenait soin de les ignorer.
Hermione haussa les sourcils. Elle savait que Krum était un joueur connu de Quidditch, Ron lui avait assez répété comme ça, mais elle n'avait pas réalisé que la célébrité attirait tant les filles. S'il n'était pas célèbre pour le Quidditch, il serait passé complètement inaperçu, parce qu'il ressemblait à tous les garçons de Durmstrang. Elle montra son mécontentement en claquant la langue en passant à côté de sa table et en chercha une autre.
Elle se rendit compte alors que la Bibliothèque était remplie, et que toutes les tables étaient occupées par des filles qui regardaient Krum en riant. Elle vagabonda entre les rayons dans l'espoir de trouver une place libre.
Enfin, elle en trouva une, qu'elle n'avait jamais remarqué parce qu'elle était complètement au fond, cachée de tous les regards. Elle était petite, ne pouvant accueillir que deux personnes tout au plus, mais Hermione s'y assit tout de suite. De là, personne ne pourrait la déranger.
Elle voulut sortir ses parchemins de la S.A.L.E mais réalisa qu'elle n'avait pas du tout la motivation pour travailler dessus à cet instant. Elle ne cessait de repenser à Harry et au Tournoi des Trois Sorciers, elle serait incapable de se concentrer.
Alors, elle prit plutôt le roman que lui avait envoyé sa grand-mère pour son anniversaire et l'ouvrit à la première page. Elle fut instantanément plongée dans sa lecture et put profiter des lignes devant elle sans être dérangée par ses pensées.
L'histoire était très intéressante, elle dévorait les pages avec ardeur. Soudain, elle entendit l'autre chaise de sa table grincer, et elle leva la tête avec impatience, prête à dire à la personne qui s'asseyait avec elle de ne pas la déranger quand les mots se bloquèrent dans sa gorge.
Drago Malefoy venait de s'asseoir sur la chaise en face d'elle tranquillement, comme si c'était un geste qu'il faisait tous les jours.
