notes :
- il y a une légère divergence au canon dans la chronologie des évènements
- j'ai écouté la playlist "songs that remind me of hogwarts" par not lovely malfoy sur youtube, donc si vous aimez lire en écoutant de la musique je vous la recommande :)
- si vous trouvez la référence que j'ai utilisé pour écrire la scène avec Ginny à Pré-Au-Lard, vous gagnez 10 points pour votre Maison! :))
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Hermione
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"Bonjourrr." dit Krum d'une voix grave.
Hermione réalisa que c'était la première fois qu'elle entendait le son de sa voix. Elle n'était pas du tout comme elle l'aurait imaginé, son accent fort se mêlait à la tonalité de sa voix rauque.
Hermione ne répondit rien, trop estomaquée pour se souvenir qu'elle possédait l'habilité de parler.
"Tu es Herrrmion, c'est ça ?" continua le garçon. "Je peux m'asseoirrr ?"
Elle avait la bouche entrouverte tant la surprise l'avait clouée sur place. Elle repensa au fan-club de filles qui gloussaient et ferma tout de suite la bouche.
"Euh, oui, bien sûr." balbutia-t-elle.
Krum s'installa sur la chaise la plus proche d'elle. N'ayant aucune idée de ce qu'il faisait là, Hermione passa son regard entre lui et son livre, cherchant quelque chose à dire. Il finit par le faire :
"Je te vois souvent ici."
"Oui, je viens souvent pour travailler." dit-elle, essayant tant bien que mal d'adopter un ton normal. "Toi aussi, tu viens souvent ?"
C'était une question idiote, elle le voyait venir ici tous les jours depuis Septembre. Krum hocha la tête :
"Oui, c'est plutôt calme."
En le voyant d'aussi près, Hermione fut surprise de voir qu'il était beaucoup moins intimidant que ce qu'elle avait imaginé. Il était jeune, elle pouvait le voir quand ses traits n'étaient pas crispés, comme ils l'étaient d'habitude. Il avait une peau pâle qui contrastait avec ses cheveux noirs coupés ras et ses yeux sombres qui la détaillaient. Elle. Hermione Granger.
Qu'est-ce qu'il pouvait bien faire là ? Peut-être voulait-il lui demander de faire un essai à sa place, en échange d'un paiement.
"Qu'est-ce que tu lis ?" demanda Krum amicalement.
Elle se pencha sur son livre et bégaya un peu :
"Euh… C'est… Juste un livre. Pas pour l'école."
Sa phrase n'avait aucun sens. Elle devait se ressaisir, ce n'était pas son genre d'être intimidée comme ça par quelqu'un.
"Ça parrrle de quoi ?" questionna Krum.
"C'est… Une histoire sur un prisonnier à Venise, qui réussit à s'échapper." expliqua-t-elle en tapotant ses doigts sur la couverture.
"Et tu l'aimes bien ?"
Hermione ne comprenait pas du tout où il voulait en venir. S'il voulait un service, autant le demander tout de suite, au lieu d'essayer d'être amical de la sorte.
Hermione repensa à Ron qui, pas plus tard que deux jours auparavant, avait conçu un plan pendant vingt minutes pour accoster Krum et lui demander un autographe "en mode décontracté". Hermione et Harry avaient fini par pleurer de rire derrière des coussins.
"Oui, ça va." dit-elle en baissant la tête sur la couverture de son livre. "J'aime beaucoup ce style d'écriture, les romans d'aventure, c'est ce que je préfère je crois. Surtout ceux qui se passent dans un contexte historique, c'est…" Hermione se rendit compte qu'elle était en train de déblatérer beaucoup trop vite et que Krum avait de la peine à la suivre. Elle finit piteusement : "...passionnant."
"Moi aussi, j'aime bien ça. Il n'y a pas beaucoup de livrrres dans notrre bibliothèque, chez nous, à Durrrmstrrrang." répondit Krum.
"Ah oui ?"
"Non, juste pourrr les courrrs."
Hermione remarqua que Krum avait une cicatrice qui partait de son sourcil gauche jusqu'à son crâne rasé, et une autre en travers de son nez. Elle se demanda si c'était à cause de sa blessure lors de la Coupe du Monde de Quidditch. En réalité, elle avait du mal à réaliser que le garçon qui lui parlait actuellement était le même qu'elle avait applaudi, l'été dernier.
"En tout cas…" continua Krum, soudain un peu plus hésitant. "J'ai vu que tu étais assez… populairrre, ici, à Poudlarrrd."
Elle faillit éclater de rire en entendant ce terme, qui était le plus lointain de la réalité.
"Quoi ? Qu'est-ce qui te fait dire ça ?" demanda-t-elle.
"Je te vois souvent parrrtager des tables avec d'autrrres gens." expliqua Krum avec un sourire gêné. "Harrry Potterrr, et un rrrouquin, et le garrrçon joufflu, et le blond de Serrrpentarrrd…"
Hermione perdit tout de suite son sourire en entendant le dernier.
"Oh non, non, non." dit-elle d'un ton sensiblement paniqué. "Je ne traîne plus avec Drago Malefoy, c'était… une simple… Tu pourrais éviter de raconter aux autres, ça ? Une amitié entre une Gryffondor et un Serpentard, ça serait mal vu."
Krum hocha la tête :
"Je comprrrends, Herrrmion, tu es une trrrès jolie fille, c'est norrrmal que tu aies des prrrétendants."
Hermione pensa aux cheveux hirsutes qu'elle avait quand elle révisait à la Bibliothèque et se demanda si Krum ne l'avait pas confondue avec une autre fille. Peut-être que sa blessure de la Coupe du Monde avait endommagé son cerveau ?
"Des prétendants ?" répéta Hermione, hébétée.
"Oui… Je savais que je devais fairrre vite, si je voulais avoirrr ma chance… Je suppose que l'un de ces garrrçons qui t'accompagne souvent est ton petit ami ?" demanda Krum.
"Oh. Euh. Non. Pas du tout."
Il parut surpris, mais probablement moins qu'Hermione.
"C'est vrrrai ? Alorrrs, je peux te demander si tu accepterrrais de m'accompagner au Bal ?" demanda Krum.
C'était comme si toute la tête d'Hermione venait de se vider sur le champ. Elle observa, stupéfait, le visage soudain sérieux de Krum, attendant qu'il se brise pour révéler une face hilare, un rire moqueur…
Mais rien. Plusieurs secondes de silence s'écoulèrent et Krum la regardait toujours intensément, attendant certainement une réponse, alors qu'Hermione avait perdu l'usage de sa langue.
Elle fut tentée de lui demander si ce n'était pas une blague mise en place par Fred et George. Mais en jetant un coup d'œil aux alentours, elle vit qu'aucune des tables n'était occupée. Même Madame Pince était absente de sa place habituelle derrière le comptoir.
Hermione toussota et lui demanda :
"Hmm… Krum, je…"
"Viktorrr." corrigea-t-il.
"Viktor." reprit-elle. "Je ne suis pas sûre…"
Elle pensa à Ron. Celui avec qui elle avait imaginé aller au Bal. Elle repensa à ses paroles odieuses et à son manque d'investissement. La perspective de le rendre jaloux était soudain très alléchante… Son joueur de Quidditch préféré…
Puis, elle pensa à Drago, sans crier gare. Elle pensa à sa tête déconfite en la voyant arriver aux bras de Viktor Krum, l'un des joueurs de Quidditch le plus célèbre du monde…
Sans qu'elle puisse contrôler son geste, elle hocha la tête, et les mots se bousculèrent sur ses lèvres sans qu'elle le veuille :
"D'accord."
"C'est vrrrai ? J'étais perrrsuadé que tu dirrrais non." admit Krum, qui avait l'air un peu plus soulagé. "Merrci, ça serrrait un honneurrr d'êtrrre ton cavalier au Bal d'Hiverrr, Herrmion."
Krum se leva, lui adressa un dernier sourire, puis s'éloigna de la table.
Hermione dû prendre quelques minutes pour collecter ses pensées. Elle se pinça même sous son pull pour vérifier qu'elle n'était pas dans un rêve. Populaire ? Prétendants ? Viktor Krum ? Son cavalier ?!
Elle se leva subitement et rangea ses affaires pêle-mêle dans son sac, qu'elle balança sur son épaule et fonça vers la sortie. Elle escalada les escaliers rapidement, sans même remarquer qu'ils bougeaient vers l'aile ouest. La conversation qu'elle venait d'avoir avec Krum était tellement insensée, il fallait absolument qu'elle la partage.
Hermione finit par arriver à toute vitesse dans le couloir du septième étage. Le portrait coulissa après qu'elle ait crié le mot de passe, puis elle scanna la Salle Commune pour trouver la personne qu'elle cherchait dans la foule. Ne la trouvant pas, elle finit par monter jusqu'au dortoir des troisièmes années.
Ginny eut à peine le temps de prononcer le mot "entrez !" qu'Hermione était déjà dans la pièce. Ginny était assise au pied de son lit, en train de ranger ses affaires. La radio sorcière qu'elles avaient réglée la veille diffusait une musique assourdissante de rock.
"Oh, Mione !" salua Ginny avec un sourire.
"Ginny, il faut absolument que je te raconte quelque chose !" s'exclama Hermione en s'asseyant par terre, en face d'elle.
La rouquine écarquilla les yeux en voyant l'excitation d'Hermione et baissa le volume de la musique sur le poste de radio d'un mouvement de baguette.
"Euh… D'accord, que se passe-t-il ? C'est une mauvaise nouvelle ?"
"Non, loin de là, c'est juste… Mon Dieu, Ginny, c'est choquant, c'est incroyable ! C'est…"
Les yeux de Ginny s'illuminèrent et elle balança son pull qu'elle était en train de ranger par terre.
"Quoi, quoi, quoi ?" pressa-t-elle, avide de potins.
Hermione, incapable de rester en place, se leva et trépigna un peu sur place :
"On vient de m'inviter… Quelqu'un de... Mon Dieu, c'est fou !" s'écria Hermione en réalisant ce qu'elle s'apprêtait à dire.
"Qui ?" demanda Ginny, de plus en plus énergisée.
"Mon Dieu, Ginny, c'est… Quelqu'un de…"
"QUI ? HERMIONE !" hurla Ginny.
"Krum ! Viktor Krum !" lâcha Hermione.
Le visage de Ginny se fendit dans une expression choquée et elle se leva à son tour :
"Noooon ?"
"Si !" insista Hermione.
"QUOI !" hurla Ginny, adoptant soudain le même ton qu'Hermione. "Viktor Krum ! Le joueur international de Quidditch, Viktor Krum ? L'idole de Ron ? L'Attrapeur bulgare, Krum ?"
"Lui-même !" s'exclama Hermione avec un rire.
Ginny, sous le coup de la stupeur, attrapa les mains d'Hermione et elles se mirent à danser toutes les deux dans une danse de la joie improvisée sans queue ni tête.
Hermione sentait les battements de son coeur battre frénétiquement contre sa cage thoracique, d'une part parce qu'elle venait de se faire invitée par le garçon le plus désiré de l'école, et d'autre parce qu'elle venait de grimper une centaine de marches en moins de dix minutes.
"Merlin, Hermione, c'est énorme ! C'est fantastique !" cria Ginny.
Elle lâcha ses mains et se jeta en arrière dans son lit.
"C'est incroyable !" poursuivit-elle. "Imagine la tête de Ron quand tu vas… Merlin, j'ai trop hâte !"
"Alors, tu ne crois pas que je devrais lui dire ?" demanda Hermione, soudain ramenée sur Terre.
"Quoi ? Non, bien sûr que non !" dit Ginny en se relevant suffisamment pour apercevoir Hermione. "Tu vas garder le secret jusqu'au jour J ! Tu ne dois le dire à personne, et tu vas faire une entrée phénoménale !"
"Oh, Ginny !" s'exclama Hermione dans un souffle étranglé. "Je n'ai rien à porter, je n'ai pas de robe dans ma valise ! Et je ne sais pas danser ! Krum est un champion, il doit ouvrir le Bal… Mon Dieu, Ginny, je vais devoir ouvrir le Bal !"
L'excitation d'Hermione se remplaça par de l'angoisse. Elle était à deux doigts de tourner les talons pour retrouver Krum et annuler avant que Ginny ne se lève :
"Hermione Granger, je t'interdis de paniquer."
"Je n'ai pas de ro…"
"Nous allons aller à Pré-Au-Lard demain pour t'acheter une tenue, d'accord ?"
"Mais… La danse…"
Ginny balaya son inquiétude d'un geste de la main :
"Ne t'en fais pas ! Tu vas rayonner, Mione !"
Hermione se mordit la lèvre inférieure en pensant à ce qui allait arriver. Elle qui pensait ne pas aller au Bal… Elle devait désormais l'ouvrir. Tous les yeux seront braqués sur elle, et elle ne connaissait rien à la danse.
Elle observa Ginny, qui était déjà en train de faire un plan dans sa tête pour aider Hermione. La brune sentit une piqûre de culpabilité :
"Oh, Ginny, je suis désolée, j'ai dit que j'irai avec toi…"
"Tu plaisantes ?" lança Ginny. "C'est tellement mieux si tu vas avec Krum, tu vas rendre jalouse chaque fille de cette école ! J'espère simplement qu'un garçon m'invitera, pour que je puisse voir la tête de Ron quand il va te voir aux côtés de Viktor Krum !"
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Le lendemain, un samedi, Krum n'était pas à la Bibliothèque. À chaque fois que quelqu'un entrait, son cœur faisait un bond dans sa poitrine, mais ce n'était pas lui. Toutes les filles qui l'observaient d'habitude avaient l'air particulièrement maussades de voir ce changement d'emploi du temps.
Hermione était assise à sa place habituelle et essayait vraiment de ne pas sourire, quand quelqu'un entra dans la Bibliothèque. C'était Neville, les bras chargés de livres, parfaitement à l'heure.
Il arriva sur la table d'Hermione et lui fit un petit sourire.
"Salut Neville !" lança joyeusement Hermione. "Tu sais, tu n'es pas obligé de venir pendant les vacances, tu devrais te reposer…"
"Non non." dit le garçon. "J'avais envie d'être là quand même."
Hermione haussa les épaules et lui demanda ce dont il avait besoin de travailler. Sans surprise, il lui demanda des précisions sur les antidotes, alors Hermione commença un exposé rapide de la leçon que Rogue leur avait fait apprendre cette semaine. Elle passa une vingtaine de minutes sur l'explication, puis piocha quelques exercices dans leur manuel pour qu'il puisse s'entraîner.
Pendant qu'il travaillait, Hermione tourna discrètement la tête vers les autres tables. Nott n'était pas là, ce jour-là, ni Malefoy. Elle tâcha de ne pas y faire attention et se concentra sur autre chose.
À la fin, Neville lui tendit son exercice et ils le corrigèrent ensemble. L'heure s'était écoulée très rapidement. Hermione s'étira et lui proposa d'aller déjeuner.
"Euh, d'accord." dit Neville. "Mais avant, je voulais te demander quelque chose…"
Hermione vit que ses joues avaient pris une teinte rosée. Elle fronça les sourcils :
"Oh, tu veux revoir autre chose ?"
"Non, ce n'est pas ça…"
Neville évitait complètement de la regarder dans les yeux maintenant. Il devenait de plus en plus empourpré.
"Je voulais savoir…" bégaya-t-il. "Situvoulaisveniraubalavecmoi."
Il lâcha un gros soupir de soulagement et continua, toujours sans la regarder :
"Tu as toujours été gentille avec moi et je voulais savoir si tu étais intéressée de venir avec moi. En tant qu'amis, bien sûr."
Hermione sentit son cœur se serrer en voyant la vulnérabilité de Neville à cet instant. Il lui rappelait Danny.
"Oh… Neville, je suis sincèrement désolée, j'y vais déjà avec quelqu'un d'autre." dit-elle platement.
"Avec Ron ?" tenta Neville.
"Non… Un autre garçon. Il m'a demandé hier. Mais j'aurais beaucoup aimé y aller avec toi."
"Ce n'est pas grave." dit Neville, bien qu'il semblait quelque peu accablé.
Hermione lui fit un pâle sourire. Si Neville lui avait demandé la veille, elle aurait accepté avec plaisir. En plus, elle n'aurait pas eu à ouvrir le Bal, une perspective qui la rendait folle d'inquiétude.
Neville se leva et lui fit un petit signe de la main pour la saluer.
"Merci quand même, et merci pour les révisions."
Il s'en alla, un peu peiné, quand Hermione eut une idée :
"Oh, Neville !"
Il se retourna immédiatement, plein d'espoir :
"Oui ?"
"Je ne suis pas disponible, mais je sais avec qui tu peux y aller !" dit-elle en se levant à son tour. "Ginny ! Elle n'a pas encore de cavalier !"
Le visage de Neville s'éclaira subitement.
"Ginny ? C'est vrai ?" (il fronça légèrement les sourcils.) "Tu penses vraiment qu'elle voudra y aller avec moi ?"
"Oh oui, j'en suis persuadée ! Va l'inviter, elle doit être dans la Grande Salle en train de déjeuner."
Neville hocha plusieurs fois la tête et sembla retrouver un semblant de courage.
"Ok ! Merci, Hermione !"
Hermione alla déjeuner et retrouva Ginny, en train de déguster son dessert, un grand sourire aux lèvres.
"Neville m'a invitée !" s'écria-t-elle quand Hermione prit place en face d'elle.
"Oui, il me l'a dit. Tu as accepté ?" demanda Hermione en se servant de la salade.
Ginny hocha vigoureusement la tête en croquant dans une pomme :
"Évidemment. J'adore Neville, il compte beaucoup pour moi. J'ai accepté tout de suite."
"C'est super, je suis contente pour toi." dit Hermione, heureuse de savoir que Ginny serait là le soir qu'elle redoutait atrocement.
"Il m'a dit qu'il t'avait demandé d'abord." continua Ginny avec un sourcil relevé. "Tu penses qu'il a quelque chose pour toi ?"
Hermione haussa les épaules et engloutit son repas en quelques secondes. Ron lui disait tout le temps qu'elle mangeait trop vite, heureusement qu'il n'était pas là pour se moquer d'elle.
"Honnêtement, je n'en ai aucune idée. J'ai eu ma dose de surprises et de rebondissements pour comprendre ce que les garçons veulent."
Ginny acquiesça pour montrer qu'elle était d'accord. Hermione termina rapidement son repas et se retrouva rapidement au même niveau que Ginny avant que cette dernière n'ait fini sa pomme.
"Alors, on va à Pré-Au-Lard cette après-midi ?" proposa la rouquine. "J'ai quelques économies de mon anniversaire, j'aimerais bien m'acheter une belle robe de soirée."
"D'accord." dit Hermione, en pensant à la bourse pleine d'argent au fond de sa valise que ses parents lui avaient donnée pendant l'été. "Tu sais où aller ?"
Ginny leva les yeux au ciel, comme si c'était une question particulièrement stupide.
"Évidemment que je sais où aller, je bave devant les robes de Gaichiffon depuis le début de l'année."
Hermione eut un petit rire et termina son dessert en quelques bouchées. Quand elle n'avait pas de livre devant elle, Hermione avait la fâcheuse habitude de manger très vite. Ginny termina à son tour, et elles remontèrent dans leur dortoir pour aller chercher leur argent et se couvrir un peu plus chaudement.
Puis, elles redescendirent et affrontèrent le froid le long du chemin menant à Pré-Au-Lard. Pendant la route, Ginny parla de Quidditch, de rock, et des derniers potins de l'école, et Hermione était tellement captivée par leur conversation qu'elle ne remarqua même pas qu'elles étaient arrivées.
Les rues de Pré-Au-Lard étaient aussi enneigées que le parc du Château. Chaque toît de maison et de boutique étaient recouverts d'une épaisse couche de neige, c'était si joli qu'on aurait dit un paysage tiré d'un film de Noël. Une délicieuse odeur de cannelle et de pommes d'amour embaumaient les chemins bondés d'élèves.
Une énorme partie des élèves de Poudlard étaient venus, probablement pour acheter des parties de tenue manquantes pour le Bal, ou des cadeaux de Noël. Hermione suivit Ginny qui se frayait un chemin parmi la foule, puis elles entrèrent dans une grande boutique de vêtements où Hermione n'était jamais allée. Plusieurs groupes de filles de Poudlard étaient déjà là, à côté des cabines d'essayage.
"Bonjour, bonjour !" salua le vendeur, un homme assez petit avec une grande moustache et un fort accent français. Il avait enroulé son mètre-ruban autour de son cou et semblait assez pressé. "Le Bal, je suppose ? Les robes sont ici, mes chères. N'hésitez pas à me solliciter pour tout renseignement !"
Et il s'éloigna avant qu'elles ne puissent le remercier. Ginny s'aventura dans les rayons de tenues de soirée et commença à faire défiler les cintres à toute vitesse. Hermione pouvait l'entendre murmurer -non, trop courte- -trop moulante-, -trop jaune-...
Hermione chercha à son tour mais elle n'avait aucune idée de ce qu'elle voulait. Elle avait deux robes chez elle, à Londres, et c'était celles qu'elle portait toujours pendant les rares grandes occasions. Ginny s'empressa de la repousser :
"Laisse-moi faire, je vais te trouver quelque chose."
Hermione abandonna et laissa à Ginny la tâche ardue de lui trouver une jolie robe. Elle s'assit sur une banquette bleue, à côté des rayons, et contempla Pré-Au-Lard à travers la fenêtre de la boutique.
Ginny revint une dizaine de minutes plus tard et lui fourra un tas de tissu dans les bras.
"Essaie-les, et tu me dis laquelle tu préfères."
Hermione obéit et alla s'installer dans l'une des cabines inoccupées. Elle essaya trois robes consécutives, une rose, une orange, et une blanche. Mais à chaque fois qu'elle sortait de la cabine, Ginny faisait une petite grimace :
"Non, pas celle-là, la couleur ne va pas avec tes cheveux."
Hermione rentra dans la cabine, déjà pressée de terminer cette séance shopping qui avait duré trop longtemps à son goût. Elle détestait ça. En plus, elle ne voyait pas comment une robe pouvait ne pas aller avec ses cheveux, qu'elle soit rose ou blanche. Ses cheveux n'allaient avec rien, de toute façon.
La quatrième robe qu'elle essaya avait une matière différente. Elle était plus légère, plus flottante, et Hermione fut étonnée de constater qu'elle était beaucoup plus confortable que les trois précédentes. Elle se regarda dans le miroir et détermina celle-ci comme sa préférée.
Elle sortit de la cabine et Ginny leva aussitôt les deux pouces en l'air.
"Je l'adore ! Tu te sens bien dedans ?" demanda la rouquine.
"Oui, je crois." dit Hermione en inspectant la robe.
Elle était bleue pervenche, avec une décolleté en cœur et des manches trois quarts. Elle n'y connaissait rien en vêtements, mais elle avait la sensation que cette robe lui allait bien. Elle se sentait étrangement bien dedans, tout l'opposé de la robe blanche au décolleté plongeant qu'elle venait d'essayer.
Quand Hermione tira l'étiquette pour voir le prix, ses yeux s'exhorbitèrent.
"Mon Dieu, Ginny, tu as vu le prix de cette robe ?"
Ginny lui fit un sourire innocent et partit s'enfermer dans la cabine à côté. À ce moment-là, le vendeur s'approcha d'elle et lui fit une tête dramatiquement émerveillée :
"Oh, cette robe vous va à ravir !"
Hermione sourit et le remercia, bien qu'elle se doutait que le vendeur devait avoir prononcé cette phrase une vingtaine de fois depuis le début de la journée. Hermione rentra de nouveau dans la cabine, regarda une dernière fois son reflet, puis trancha pour cette robe. Elle n'avait pas prévu de dépenser autant pour une simple tenue, mais elle n'avait pas la force d'essayer autre chose.
Hermione se changea, puis sortit de la cabine pour retrouver sa place sur la banquette.
"Ginny ? Tu as trouvé une robe ?" demanda-t-elle.
"Non, pas encore !" cria Ginny à travers le rideau violet. "Attends, je te montre !"
Hermione patienta en regardant par la fenêtre. Les rues de Pré-Au-Lard étaient particulièrement bondées, en ce samedi avant Noël. De là où elle se trouvait, elle pouvait apercevoir la devanture de Zonko, le magasin de farces et attrapes, où de nombreux élèves sortaient avec des gros sacs rouges.
Hermione se faisait la liste de ses cadeaux de Noël à acheter quand elle vit Pansy Parkinson derrière la fenêtre, accompagnée de son groupe de copines : Daphné et Astoria Greengrass, les deux sœurs magnifiques, et Tracey Davis qui portait un bonnet vert. Les quatre filles étaient collées à la vitrine du magasin d'en face, un joaillier. Pansy montrait un collier avec envie.
"Alors, qu'est-ce que tu en penses ?"
Hermione détourna son attention des quatre filles et observa Ginny. Elle avait essayé une robe d'un rose criard, en bustier.
"Euh…" commença Hermione.
"Tu peux dire si tu n'aimes pas." ajouta Ginny.
"... Je n'aime pas." conclut Hermione. "Désolée."
Ginny haussa ses épaules parsemées de petites tâches de rousseur.
"Pas grave, j'ai d'autres options."
Ginny entra de nouveau dans la cabine et Hermione retourna à sa contemplation de la fenêtre. Pansy et les filles lorgnaient toujours les bijoux étalés sur la vitrine du vendeur. Après plusieurs minutes de discussion qu'Hermione ne pouvait pas entendre, Pansy Parkinson finit par entrer dans le magasin et acheta le collier. Il avait l'air onéreux, et lourd à porter.
Elle se demanda si Pansy irait avec Drago, au Bal. Il lui avait dit qu'ils étaient "très" amis, mais Hermione ne savait pas vraiment ce que ça voulait dire, parce qu'ils avaient l'air extrêmement proches pour des "amis". Elle se demanda vaguement comment Drago réagirait en voyant sa robe et son cavalier quand Ginny sortit de nouveau de la cabine, vêtue d'une robe noire bien trop courte.
Après une bonne dizaine de robes essayées, Ginny finit par opter pour une très jolie robe verte pâle, ornée d'un ruban rose qui lui serrait la taille. Elle lui avait expliqué que c'était une "robe babydoll", mais Hermione n'avait aucune idée de ce que c'était.
Elles sortirent de la boutique après avoir reçu de nombreux compliments de la part du vendeur, puis elles remontèrent le long de la rue pour faire quelques achats de Noël.
Sur son chemin, Ginny saluait les élèves de Poudlard qu'elle connaissait, et ça s'avérait être beaucoup, beaucoup plus qu'Hermione, qui marchait maladroitement à côté d'elle. À chaque fois qu'elle saluait quelqu'un, Ginny se penchait ensuite vers Hermione pour lui faire une biographie détaillée et une mise à jour des derniers commérages qu'elle connaissait.
Hermione et Ginny achetèrent leurs cadeaux : un livre de Quidditch pour Harry à la librairie, un assortiment de dragées pour Ron, des chocolats d'Honeydukes pour son père, du thé pour sa mère, de la peinture pour Danny, un set d'assiettes en terre cuite pour Hagrid et une plume auto-correctrice pour Neville.
Elle eut juste assez pour acheter le cadeau de Ginny en avance, un autre livre de Quidditch sur lequel elle s'était arrêté longuement à la librairie. En rentrant de leur "après-midi girly", (comme l'avait appelée Ginny) chargées de nombreux sacs, Hermione dû avouer que Ginny était une experte pour la faire déstresser : elle n'avait pas pensé à Krum de toute la journée.
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Après Pré-Au-Lard, Ginny et Hermione se séparèrent : Hermione alla à la Bibliothèque, et Ginny alla montrer sa nouvelle robe à une amie de sa promotion.
La Bibliothèque était toujours aussi vide, sûrement parce que les élèves voulaient profiter de leurs vacances. Hermione avait décidé de ne pas travailler avant Noël, pour se vider un peu la tête, alors elle s'installa à sa table habituelle et sortit son livre, qu'elle avait presque terminé.
Au bout d'une bonne heure, quelqu'un entra dans la Bibliothèque. C'était Krum. Elle sentit ses mains se contracter contre la page de son livre en le voyant. Heureusement, il ne lui fit qu'un petit sourire, et alla s'installer à une table un peu plus loin. Ce n'était pas celle de d'habitude, mais ça n'empêcha pas quelques filles de le retrouver pour autant. L'une d'entre elles alla même lui parler, mais Krum avait retrouvé son visage impassible qu'elle lui connaissait, et la fille repartit donc bredouille.
Hermione était reconnaissante qu'il ne s'asseye pas à côté d'elle, elle ne voulait pas attirer toute l'attention sur eux avant le Bal. Elle était déjà suffisamment stressée à l'idée de devoir danser devant tout le monde pour affronter les regards noirs du fan-club de Krum.
Quand le soleil fut couché et qu'il était temps d'aller dîner, Hermione rangea son livre (terminé) dans son sac et alla directement à la Grande Salle. Quand elle passa devant la table de Krum, ce dernier lui fit un petit geste de la main discret, auquel elle répondit, le cœur vacillant.
Elle fut surprise de voir que ni Harry ni Ron n'étaient présents à la table des Gryffondors. Elle dîna seule rapidement, puis retourna à la Salle Commune, se demandant bien où était passé tout le monde.
Quand le portrait pivota et qu'elle entra dans la Salle, elle reconnut le rire familier de Ron. Elle s'approcha du canapé où étaient assis Ron, Ginny et Harry. Le visage du rouquin était anormalement rouge.
"Pourquoi est-ce que vous n'êtes pas venus dîner ?" demanda Hermione.
"Parce que -oh, arrêtez de rire tous les deux-, parce qu'ils viennent de se faire envoyer promener par les deux filles à qui ils ont demandé de les accompagner au Bal !" s'écria Ginny d'un ton enjoué.
Les sourires sur les visages de Ron et Harry disparurent aussitôt.
"Merci beaucoup, Ginny." dit Ron avec aigreur.
Hermione se sentit égoïstement ravie de voir que le garçon venait de se faire rejeter. C'était une victoire personnelle, mais elle devait se retenir de sourire.
"Alors, toutes les belles filles sont prises ?" demanda Hermione. "Eloïse Midgen commence à être jolie, non ?" Elle se tourna vers Harry, qui avait l'air un peu triste, et elle ajouta d'une voix plus douce : "Enfin, je suis sûre que vous trouverez quelqu'un, quelque part, qui acceptera de vous accompagner."
"Hermione…" dit Ron, comme frappé par une révélation. "Neville a raison : tu es une fille !"
Hermione vit Ginny lever les yeux au ciel.
"Quel sens de l'observation." railla Hermione.
"Alors tu n'as qu'à venir avec l'un de nous deux !"
Elle fut estomaquée de voir que Ron n'avait pas pensé à faire cette proposition plusieurs jours plus tôt. Elle qui avait attendu et stressé pendant des jours ! Ron l'énervait déjà, mais là, il l'agaçait au plus haut point.
"Non, impossible." asséna-t-elle.
"Allez, arrête." dit Ron, agacé. "On a besoin de cavalières, on va avoir l'air vraiment idiot si on n'en a pas, tous les autres en ont…"
"Je ne peux pas venir avec l'un de vous. J'y vais déjà avec quelqu'un d'autre."
Elle vit dans le regard de Ron un éclair d'inquiétude passer, avant qu'il soit remplacé rapidement par son éclat habituel.
"Tu parles ! Tu as dit ça simplement pour te débarrasser de Neville." dit-il avec assurance.
"Ah tu crois ça ? Ce n'est pas parce que tu as mis trois ans à t'en apercevoir que d'autres n'ont pas vu tout de suite que je suis une fille !"
Elle pensa à Drago qui, une semaine auparavant, avait dit que Ron pouvait être long à la détente, et elle fut obligée d'être d'accord.
"D'accord, d'accord, on sait que tu es une fille." dit Ron, ce qui enragea encore plus Hermione. "Ça te va ? Alors, tu es d'accord pour venir avec nous, maintenant ?"
"Je t'ai déjà dit que c'est impossible !" répondit Hermione. "Je vais au bal avec quelqu'un d'autre !"
Hermione monta rapidement les escaliers du dortoir avant d'entendre la phrase de Ron dans son dos. Cette fois-ci, elle n'était plus peinée, elle était sérieusement énervée. Il n'avait vraiment rien compris, et comme à chaque fois, il se réveillait au dernier moment.
Hermione en avait assez de se mettre dans tous ses états pour Ronald Weasley. Elle était désormais plus déterminée que jamais à aller au Bal avec Krum.
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Drago
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La seule chose qui permettait à Drago de ne pas penser à l'accumulation de problèmes qu'il avait en ce moment était les bavardages incessants de Pansy sur le Bal. Elle en parlait tellement que Théo avait même proposé de la payer pour qu'elle arrête, même si Drago le soupçonnait d'aimer secrètement ce genre de commérages très Pansy-esques.
Après avoir décrit le collier qu'elle avait acheté, la robe de Daphné, les invités probables, la décoration, et le fait que Tracey avait passé la soirée à pleurer parce qu'un certain Arthur ne l'avait pas invitée, Pansy passa à sa longue liste des cavaliers des filles qu'elle connaissait.
Drago attendit qu'elle mentionne Granger, le cœur battant, mais elle ne le fit pas. Il espérait égoïstement que Weasley ne l'avait toujours pas invitée. Peut-être irait-elle avec Potter ? Ou Londubat ?
"Avec qui Fleur Delacour va-t-elle aller ?" demanda distraitement Blaise, qui lisait son magazine de Quidditch.
"Roger Davies." dit Pansy, bien qu'elle l'avait déjà dit. "Désolé, Blaise." ajouta-t-elle avec un petit rire mesquin.
Blaise eut un sourire en coin.
"Pas grave, je savais qu'elle ne m'attendrait pas." dit-il en haussant les épaules. "Je suis satisfait de ma cavalière."
Blaise avait proposé à Daphné Greengrass d'y aller en tant qu'amis, juste pour une danse ou deux. Pansy se tourna vers Théo, qui lisait dans son fauteuil :
"Et toi Théo ? Toujours pas de cavalière ?"
Théo leva les yeux au ciel :
"Pansy, pour la centième fois, je déteste ce genre d'évènements. J'ai une phobie sociale."
Ce fut au tour de Pansy de lever les yeux au ciel :
"N'importe quoi, tu dis ça simplement parce que tu n'as pas eu l'audace d'inviter Maïa."
"Et pour la centième fois…" continua Théo, agacé. "Je n'ai pas envie d'inviter Maïa, arrêtez de vous faire des films et laissez-moi tranquille !"
"Théo a vraiment une phobie sociale." dit Blaise sans lever les yeux des pages de son magazine. "Depuis qu'il est petit."
"Vraiment ? Alors pourquoi es-tu ami avec nous, dans ce cas-là ?" railla Pansy, qui n'en croyait pas un mot.
"Tu n'as pas remarqué que vous êtes approximativement les seules personnes avec qui je parle ?" dit Théo. "Je passe ma vie à lire des livres et à m'enfermer dans la Bibliothèque, et je déteste les fêtes, ou tout rassemblement social, d'ailleurs."
Pansy haussa les épaules, toujours pas convaincue. Pourtant, Théo était bien la personne la plus introvertie que Drago connaissait.
"Donc, tu ne viens pas au Bal ?" demanda finalement Pansy.
"Si, j'irai." dit Théo avec un soupir. "C'est difficile d'être ami avec toi et de ne pas aller à ce genre de fête. Je danserai avec une fille puis je repartirai au dortoir. Contente ?"
Drago ricana. Blaise proposa alors d'aller déjeuner et Drago accepta, plus pour se dégourdir les jambes que pour véritablement manger. Ils passèrent le déjeuner à parler du Bal, ou plutôt Pansy, qui avait décidément toujours des choses à dire sur cette soirée.
Granger n'était pas habillée comme d'habitude. Quand elle était en vacances, elle mettait ses vêtements "moldus". En l'occurrence, elle portait un sweat bleu pâle où était inscrit quelque chose qu'il ne pouvait pas voir de là où il se trouvait et un pantalon blanc. C'était déconcertant de la voir dans une autre tenue que sa robe de sorcière. Il était trop habitué aux couleurs bordeaux de ses robes.
Il l'observa discuter avec Weasley, Potter et Londubat. De temps en temps, elle se tournait vers un autre Gryffondor, Dean Thomas, qui était aussi impliqué dans leur conversation. Drago se demanda si elle allait au Bal avec lui. Pourtant, elle aurait préféré que ce soit Weasley… Mais si c'était Weasley, Pansy lui aurait déjà dit. Pansy savait tout.
Granger mangea en une dizaine de minutes, contrairement à tous ses autres camarades qui n'avaient même pas fini leur plat principal. Elle attendit patiemment que Potter et Weasley terminent leur assiette sans jeter le moindre coup d'œil dans la direction de Drago. Il avait l'impression qu'elle ne lui avait pas parlé depuis des semaines.
Il se sentait étrangement vide, depuis.
Pansy, Théo et Blaise se levèrent et partirent chacun de leur côté, mais Drago resta à table. Il faisait semblant de continuer de manger, alors qu'en réalité, il ne faisait que d'émietter un morceau de pain sans s'en rendre compte.
Crabbe interrompit sa contemplation discrète de Granger en s'asseyant pile en face de lui.
"Salut Drago." dit-il de sa voix bourrue.
"S'lut." marmonna Drago. "Goyle n'est pas avec toi ?"
Il se fit la réflexion qu'il n'avait jamais vu Crabbe et Goyle séparés. C'était une vision bizarre, c'était comme s'ils étaient des siamois, tous les deux.
"Non, il n'avait pas faim." dit Crabbe.
Drago haussa les sourcils, sans cacher sa surprise.
"Dis, tu as trouvé une cavalière pour le Bal ?" demanda Crabbe en se servant un énorme bifteck.
"Euh… Oui, j'y vais avec Pansy." répondit Drago, étonné de cette question. Il pensait que c'était évident.
Crabbe fronça les sourcils :
"Ah bon ? Je ne savais pas. Vous êtes ensemble, tous les deux ?"
Drago soupira, ne voulant pas se lancer dans une explication de son lien avec Pansy, surtout avec Crabbe.
"En quelques sortes." dit-il évasivement. "Pourquoi ?"
"Je comptais l'inviter."
Il se retint de rire.
"Quoi ? Mais… Pansy… Elle a déjà préparé sa robe, et tout ça. Pourquoi tu ne lui as pas demandé avant ?"
"Je n'avais pas compris que c'étaient les garçons qui devaient inviter les filles !" se lamenta Crabbe.
"Tu n'as pas remarqué que toutes les filles autour de toi étaient prises ?"
"Non…" avoua Crabbe, toujours perplexe.
"Ah."
"Tu peux pas me présenter quelqu'un ? Tu connais plein de gens, toi." croissa-t-il.
Drago se passa une main sur le front. S'il avait su, il serait parti en même temps que Pansy.
"Euh… Je sais pas, tu veux pas y aller avec… elle ?" proposa Drago en pointant la première fille qu'il vit à la table des Serpentards.
Crabbe la jaugea du regard.
"J'sais pas. Elle est de sang pur ?"
Drago tiqua en entendant ça. Il regarda par-dessus l'épaule de Crabbe pour apercevoir Granger. Il se revit en première année, à jurer à chaque personne qu'il croisait qu'il haïssait les Sang-de-Bourbes et qu'il ne parlerait jamais à la vermine. Il se revit, l'année précédente, demander à Blaise si Astra était une Sang pure, tout comme Crabbe.
Qu'aurait pensé le Drago de 11 ans de celui de maintenant, qui observait Granger à chaque fois qu'elle était dans son champ de vision ? À analyser ses vêtements et ressasser leurs conversations comme un fou avant de dormir ?
"Euh, je sais pas, demande lui." dit Drago.
Il vit alors Granger se lever, alors il suivit le mouvement et se décolla du banc.
"Hé, attends !" s'exclama Crabbe. "Tu ne m'as pas présenté !"
"Désolé vieux, mais je crois que tu vas devoir y aller avec Goyle." annonça Drago d'un ton faussement compatissant.
Il s'éclipsa avant que Crabbe puisse répliquer et se mit derrière le groupe de Weasley, Potter et Granger qui sortaient de la Grande Salle pour écouter un bout de leur conversation :
"Oh, mais voilà une petite tragédie !" s'exclamait ironiquement Granger, et bien qu'il n'avait aucune idée de quoi elle parlait, son ton le fit sourire. Il n'avait pas entendu ce ton cinglant depuis trop longtemps, ça lui avait manqué. "Elle se prend vraiment pour quelqu'un, celle-là !"
"Hermione, avec qui tu vas au Bal ?" demanda Weasley.
Cette question prit Drago au dépourvu. Comment Weasley ne pouvait-il pas être au courant du cavalier de Granger ? Drago faillit s'arrêter, mais ne le fit pas pour se dépêcher de les suivre et entendre la réponse de Granger. Pitié, personne, pitié, personne…
"Je ne te le dirais pas, tu te moquerais de moi." dit-elle piteusement.
Drago sentit une profonde vague de panique l'envahir. Avec qui y allait-elle, si ce n'était pas Weasley ou Potter ? Il avait besoin de savoir, parce que le fait qu'elle rougisse n'augurait vraiment rien de bon.
Il fallait agir, et vite. Il voulait des réponses à ses questions, mais étant donné que Granger et lui ne s'adressaient plus la parole, il décida de faire autrement :
"Tu plaisantes, Weasley ?" lança-t-il au rouquin en manageant sa voix pour ne pas qu'il paraisse trop agité. "Tu ne vas quand même pas me dire que quelqu'un a demandé à ça de l'accompagner au Bal ? Une Sang-de-Bourbe aux dents de lapin ?"
C'était tellement étrange de l'insulter, il ne retrouvait pas la délectation qu'il ressentait avant en le faisant. En réalité, il se sentait un peu stupide. Potter et Weasley se retournèrent d'un même mouvement, et Granger posa dédaigneusement les yeux sur lui.
C'était la première fois qu'elle le regardait depuis la fameuse fois où elle l'avait insulté de lâche. Son regard chocolat passa une seconde sur son visage et Drago se sentit exister de nouveau, le temps d'une courte seconde. Elle avait un petit sourire aux lèvres, le genre de sourire malicieux qu'elle avait lorsqu'elle allait lancer une pique ou une répartie, le genre de sourire qu'il adorait et qui lui avait désespérément manqué.
Puis, ses yeux montèrent un peu plus haut et fixèrent quelque chose derrière lui :
"Bonjour, professeur Maugrey !"
Drago fit volte-face en un quart de seconde, toujours traumatisé par sa transformation en fouine. Il ne l'aurait avoué à personne, mais parfois, il avait encore la sensation d'être projeté dans les airs comme un vulgaire sac à patates.
"Tu m'as l'air d'être une fouine très nerveuse, Malefoy !" lança Granger, fière d'elle.
Il ne put s'empêcher de sourire, malgré son angoisse. Il avait toujours l'envie brûlante de savoir avec qui elle se rendrait au Bal, mais elle détourna trop vite le regard pour qu'il puisse l'interroger silencieusement. Elle l'ignorait toujours.
Il la regarda grimper les marches de l'escalier sans se retourner vers lui. Il savait qu'elle n'avait aucun compte à lui rendre, après tout, c'était lui qui avait interdit de lui reparler.
Drago n'aurait jamais pensé qu'autre chose que ça puisse lui faire aussi mal, et pourtant, elle savait exactement où appuyer pour le faire souffrir.
Il espérait au moins que sa référence à ses dents pousserait Weasley à réaliser le changement physique de Granger. Avec un peu de chance, peut-être qu'il la demanderait même au Bal.
Drago n'en revenait pas. Quelques jours plus tôt, il était scandalisé de voir que Granger éprouvait quelque chose pour Weasley, et aujourd'hui, il priait pour qu'elle y aille avec lui. Peut-être parce qu'au fond, il savait pertinemment que Weasley n'était qu'un second choix. C'était juste une passade, c'était impossible qu'elle soit amoureuse de lui. Si ?
Il valait mieux que ça soit Weasley qu'un autre. Weasley, il s'était fait à l'idée. La voir arriver avec un autre garçon le tuerait.
Ses pas l'avaient guidé devant la porte de la Salle Commune sans qu'il le réalise. Il prononça le mot de passe et s'avança directement vers la table des bouteilles d'alcool. Il prit la seule qui restait et un gobelet probablement déjà utilisé, et renversa la tête en arrière pour sentir la délicieuse brûlure du whisky sur sa gorge.
"Dray ?"
Drago se retourna et vit Blaise, qui était assis sur le fauteuil. Il regardait la bouteille que Drago avait dans la main.
"Quoi ?" lança le blond.
"Il n'est même pas 14h, Dray." soupira Blaise.
Simplement pour l'emmerder, Drago se remit un fond de whisky qu'il avala tout aussi vite. Sa langue le brûlait atrocement mais il fit semblant de ne pas le sentir devant Blaise. Ce dernier secoua la tête, désapprobateur, mais ne fit pas de commentaire.
"Théo te cherchait. Il est dans le dortoir, je crois." dit-il simplement.
"Oh."
Drago reposa la bouteille et le gobelet, puis se dirigea vers les dortoirs, se demandant vaguement où pouvait-être Pansy. Il avait besoin de se vider la tête, et il était sûr qu'elle serait d'accord pour l'aider.
Il arriva dans le dortoir. Pansy n'était pas là, c'était juste Théo, assis sur son fauteuil en train de lire, pour changer.
"Tu me cherchais ?" demanda Drago.
Théo leva la tête et referma son livre tout de suite.
"Oui."
Il se leva et lui montra le bureau de Drago. La lettre n'était plus là. À la place, il y avait un petit morceau de parchemin.
"Je sais à quel point cette lettre t'angoissait." expliqua Théo, un peu penaud. "Alors… Quand j'ai vu que tu n'avais pas écrit de réponse… Je me suis dit que je pouvais le faire à ta place."
Surpris, Drago s'approcha du bureau et prit le parchemin entre ses mains. Son écriture, parfaitement recopiée, était tellement semblable à la sienne qu'il se demanda si ce n'était pas une lettre qu'il avait lui-même écrite sans s'en rappeler.
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Cher Père,
Désolé pour le délai de la lettre, j'ai été pas mal occupé ces derniers temps avec les révisions et le Bal. Je n'ai parlé à personne de ce que tu as dit dans ta dernière lettre, mais ces informations sont en effet capitales. Je suis ravi de faire partie de la confidence.
Les choses n'ont pas vraiment changé à Poudlard. Potter a réussi sa première épreuve, probablement en trichant, parce qu'il ne sait rien faire d'autre. La seconde tâche du Tournoi n'est pas avant fin Février, et ici, tout le monde ne parle plus que du Bal. Je t'informerai dès que j'entends quelque chose.
Je suis honoré de représenter le lien direct entre Poudlard et toi. Je prends ce rôle très à cœur.
J'espère que Mère va bien et que tout se passe bien au Manoir.
À bientôt,
Drago.
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Drago finit sa lecture et se tourna vers Théo, qui abordait un visage mi-anxieux et mi-méfiant.
"Alors ?" osa-t-il demander. "Qu'est-ce que tu en penses ? Si tu trouves que ce n'est pas bien, tu n'es pas obligé de lui envoyer, je pensais simplement que ça t'arrangerait que je le fasse à ta place sans que tu aies à…"
"Théo, c'est parfait." coupa Drago.
Théo fut soulagé. Drago réalisa qu'une grosse partie du poids sur ses épaules s'était relâchée. La menace de la lettre lui avait pesé beaucoup plus que ce qu'il avait cru.
"C'est vrai ?" demanda Théo.
"Oui, c'est brillant." dit Drago en observant la lettre. "Et l'écriture… Toutes ces heures à recopier les essais de Crabbe et Goyle ont enfin payé, hein ?"
"Ouais, mais toi, tu n'as pas besoin de me payer."
Drago eut un petit rire et plia la lettre. Il devait absolument l'apporter à Ebène pour la faire parvenir au Manoir, pour que son père soit rassuré.
"Merci, Théo." dit Drago sincèrement.
"Tu sais Drago…" continua Théo en baissant légèrement la tête, ses mèches châtains cachant ses yeux une longue seconde. "Quand ça ne va pas, au lieu de te refermer sur toi-même, tu devrais vraiment nous en parler. On peut t'aider."
Drago hocha la tête, reconnaissant à cet instant d'avoir un ami aussi précieux que Théodore Nott.
"Théo, si tu ne souffrais pas de cette terrible phobie sociale, je crois que je te ferai un câlin, là."
Théo éclata de rire.
"Pour toi, c'est ok."
Drago enlaça rapidement son ami et lui tapa le dos en guise de remerciement. Il espérait sincèrement que Théo comprenne que son geste l'avait vraiment touché, il se sentait vraiment mieux.
"Et c'est pas tout." compléta Théo. "Je t'ai aussi apporté ça."
Il désigna deux petits flocons de potions pourpres, sur sa table de chevet. Drago fronça les sourcils :
"C'est quoi ?"
"Je vois que tu as bien révisé tes Potions." railla Théo. "Ce sont des potions de Sommeil-Sans-Rêve."
"Où est-ce que tu as trouvé ça ?" demanda Drago en la prenant entre ses doigts pour observer le contenu.
"Je les ai piquées dans la réserve de Rogue il y a une heure."
Drago ouvrit grand les yeux :
"Quoi ?!"
Théo haussa les épaules, comme s'il ne venait pas de briser dix consignes du règlement de l'école.
"Je me suis dit que tu en avais bien besoin. Et Pansy aussi, mais elle refuse d'en prendre, j'hésite même à en mettre dans son putain de gobelet vert pendant ses soirées pour qu'elle dorme enfin…"
"Théo, pourquoi as-tu volé ces potions ?" demanda Drago, toujours aussi scandalisé. "Si Rogue l'apprend, tu peux avoir de vrais problèmes."
"Il ne se doutera jamais que c'est moi. Je suis le deuxième meilleur élève du classement, je n'ai aucune raison de le voler."
Théo fit un petit sourire fier et Drago comprit à cet instant pourquoi Théo avait été mis à Serpentard, et pas à Serdaigle. Il possédait le même caractère qu'eux, il était simplement plus perfide, plus sournois. Drago n'avait jamais trop vu ce côté-là de Théo, qui paraissait si studieux à l'extérieur.
"Allez, au dodo." dit Théo, pour clore la conversation. "Tu vas faire la sieste, parce que tu en as bien besoin, tu as des cernes horribles."
"Et toi, une coupe de cheveux digne d'un Boursouflet." répliqua Drago.
"Ta gueule, je t'ai apporté des potions et écrit une lettre à ton père à ta place. Pas de moquerie sur ma coupe pendant au moins une journée. Je vais à la volière pour donner la lettre à Ébène, ok ?" dit Théo en prenant le parchemin sur le bureau. "Dors, c'est un ordre."
Drago fut obligé d'obéir. Il retira ses chaussures et son pull et s'allongea dans son lit tandis que Théo fermait la porte du dortoir, le plongeant dans l'obscurité. Drago dévissa le bouchon de la potion, qui dégageait une odeur semblable à du coton, et avala une petite gorgée.
L'effet fut immédiat. Il se sentit s'enfoncer légèrement dans le matelas de son lit, et eut juste le temps de rabattre l'épaisse couverture sur lui avant de sombrer dans les abysses, comme deux bras accueillants et chauds qui l'emportèrent avec lui dans un sommeil réparateur.
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Hermione
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Le Bal était plus proche que jamais, et Hermione était presque aussi angoissée que lorsqu'elle utilisait le Retourneur de Temps, l'année précédente. Elle avait écrit une lettre à ses parents pour leur annoncer qu'elle n'irait pas au Bal avec Ron, mais n'avait pas donné énormément de détails sur Krum, simplement que c'était un garçon de l'école de Durmstrang, venu pour assister au Tournoi.
Danny s'était moqué d'elle quand elle lui avait dit qu'elle devait danser devant tout le monde. "Ta seule expérience avec la danse, c'était nos danses au festival de la musique de Londres, quand on avait 9 ans." avait-il écrit, et elle avait souri en se remémorant ce doux souvenir d'enfance.
Avant qu'il soit remplacé par une terrible appréhension.
Elle pouvait gérer les cours, elle pouvait gérer ses problèmes de cœur, elle pouvait même gérer les menaces qu'Harry subissait. Mais la danse ?!
Alors, chaque soir de la semaine, Hermione faisait ce qu'elle savait faire de mieux quand elle paniquait : elle épluchait tous les livres de la Bibliothèque sur ce sujet. Mais trois jours avant le Bal, alors qu'elle venait de fermer "Coutumes des danses sorcières au fil des siècles", Hermione dû se rendre à l'évidence. La danse, ça ne s'apprenait pas à l'écrit.
Elle soupira et posa son livre sur la pile de bouquins. Elle ne pouvait pas vraiment s'entraîner à la Bibliothèque, toute seule, elle aurait l'air complètement folle. Comment les autres allaient-ils faire ?
Elle se rappela de Malefoy qui lui avait parlé des classes qu'il avait dû suivre avant Poudlard. Elle se souvenait qu'il avait spécifiquement parlé de la danse, qu'il avait étudié avec Pansy Parkinson quand ils étaient plus jeunes. "Pas la danse avec un tutu. La vraie danse, la valse." S'ils étaient toujours amis, elle aurait pu lui demander de lui apprendre.
Elle s'imagina danser avec Malefoy à côté de leur table reculée et se sentit rougir tout de suite. N'importe quoi, c'était une idée stupide. Elle devait vraiment être épuisée pour penser à des choses pareilles.
Hermione s'apprêtait à ranger ses livres quand Ginny entra dans la Bibliothèque. Madame Pince lui jeta un regard peu amène, probablement parce que Ginny avait tendance à parler très fort et qu'elle n'était donc pas très appréciée à la Bibliothèque.
"Coucou Mione !" lança-t-elle, bien au-dessus des volumes des conversations de la Bibliothèque. "Qu'est-ce que tu fabriques ?"
Ginny s'approcha de la table et lut le titre d'un des livres d'Hermione en fronçant les sourcils :
"Valses et autres danses classiques pour une soirée réussie" ? Ne me dis pas que tu es en train de réviser la danse…"
"Je n'ai pas d'autres choix, je ne sais pas danser !"
Ginny ne put s'empêcher de rire, et en voyant l'air renfrogné d'Hermione, elle lui prit doucement l'épaule pour la rassurer :
"Je sais que cette histoire de danse te stresse. Je vais trouver une solution, ok ?"
"Une solution ? Comment peux-tu m'aider à apprendre à danser en trois jours…"
"T'inquiètes." coupa Ginny, assurée. "Je trouverai. En attendant, rentre avec moi à la Salle Commune, si j'entends encore une fois Parvati Patil dire qu'elle va au Bal avec Harry, je vais sérieusement la tuer."
Hermione sourit malgré elle, puis rangea chaque livre sur les étagères. Madame Pince lui adressa un rare sourire, probablement parce qu'elle avait trié ses livres pour les ranger à la bonne place, et pas n'importe où comme les autres élèves. Hermione termina son thé à la cannelle qu'elle avait oublié, puis rentra avec Ginny.
"Des nouvelles de Viktor ?" demanda la rouquine, une fois dans les escaliers, en insistant bien sur le prénom du Bulgare.
Hermione secoua la tête. Depuis qu'il lui avait demandé de venir au Bal avec lui, Krum n'était venu la voir qu'une seule fois, pour lui demander si elle avait finalement terminé son livre.
Elles arrivèrent au septième étage bien plus rapidement que lorsqu'Hermione montait les escaliers. Ginny était beaucoup plus athlétique qu'elle, elle arrivait à grimper les marches deux par deux, et n'était même pas essoufflée en arrivant. Hermione, elle, ne sentait plus ses jambes. Comment était-elle censée danser pendant plusieurs heures si elle n'était pas capable de monter des escaliers ?
La Salle Commune était assez pleine. Quelqu'un avait installé un phonographe sorcier, qui diffusait une musique calme, sans paroles. Comment Hermione pouvait-elle danser sur un rythme pareil ? Est-ce que ce serait ce genre de musique au Bal ? Et le groupe dont Ginny parlait tout le temps, est-ce que les gens dansaient vraiment dessus ?
Elle repéra Ron et Harry qui faisaient une partie d'échecs, entourés par Neville et Lee Jordan. Ron était visiblement en train de gagner, comme souvent, parce que son visage était crispé dans un sourire arrogant. Harry regarda sa reine se faire démolir la tête sans rien pouvoir faire pour l'en empêcher.
"Je vais prendre une douche." annonça Hermione à Ginny. "On se voit demain ?"
Ginny hocha rapidement la tête mais Hermione ne lui laissa pas le temps de répondre et monta les escaliers du dortoir. La chambre était vide, Lavande et Parvati devaient être en bas.
Hermione entra tout de suite dans la salle de bains, se déshabilla et se mit sous la douche. L'eau chaude parvenait un peu à éliminer ses peurs, elle resta sous le jet d'eau longtemps, le temps que son rythme cardiaque se calme. Puis, elle s'enveloppa dans une grosse serviette et essaya de démêler ses cheveux, sans grand succès.
Elle se mit en pyjama et retourna dans la chambre. Lavande et Parvati étaient revenues entre-temps, chacune d'elles étaient allongées dans leurs lits respectifs : Lavande lisait un magazine, et Parvati se préparait à se mettre au lit.
"Bonsoir Hermione !"
"Bonsoir les filles." salua-t-elle, avant de s'allonger dans son lit à son tour.
Lavande et elle lurent en silence pendant une bonne heure, tandis que Parvati s'était endormie. Ses respirations assoupies réussissaient à apaiser Hermione, qui pensait enfin à quelque chose que cette maudite danse. Pattenrond était venu la rejoindre dans son lit et s'était installé en boule dans le creux de son bras, il ronronnait doucement contre elle.
Hermione finit par se lever pour fermer les rideaux de la fenêtre du dortoir. Dehors, le ciel était noir encre, et la lune était presque pleine. Ça lui fit penser à Lupin. Elle se demanda comment il allait.
Quelqu'un toqua à la porte du dortoir et Hermione, surprise, alla ouvrir. C'était Ginny, et elle avait un sourire taquin qui n'avait rien de bon.
"Ginny ?" murmura Hermione, surprise.
"Viens, Mione, j'ai trouvé une solution !"
Hermione arqua un sourcil. Une solution pour lui apprendre à danser ? Si tard ?
Elle se retourna et croisa le regard interloqué de Lavande, mais elle ne fit pas de commentaire. Hermione revint sur Ginny, qui n'avait pas perdu son sourire et lui tendait la main pour qu'elle la suive.
"Ginny, je suis en pyjama. Et le couvre-feu est déjà passé."
"Ne t'en fais pas, ça ne prendra pas beaucoup de temps." répondit mystérieusement la rouquine.
Hermione soupira et consentit à enfiler sa robe de chambre pour descendre. Pattenrond sauta du lit pour les suivre, probablement curieux, lui aussi. Dans les escaliers, elle demanda à Ginny :
"Qu'est-ce que tu as mijoté, Ginny ?"
"Juste un petit coup de pouce…"
Elles arrivèrent dans la salle ronde où le feu crépitait toujours. Il n'y avait plus personne, mis à part les deux jumeaux Weasley qui la regardaient arriver avec le même genre de sourire que Ginny, les sourires Weasley.
"Fred ? George ? Qu'est-ce que vous faîtes là ?" demanda Hermione, qui ne comprenait décidément rien à ce qu'il se passait.
Puis, elle fit tourner son cerveau fatigué et comprit avant qu'ils puissent parler :
"Ah non, si vous êtes là pour me vendre une nouvelle invention qui fait danser, c'est un non, il est hors de question que je serve de cobaye pour l'une de vos inventions devant toute l'école !"
"Du calme, Mione." dit Ginny, qui avait pris place sur l'un des accoudoirs d'un canapé, Pattenrond sur les genoux, et la regardait avec un éclat amusé. "Ils ne sont pas là pour te vendre quelque chose, ils sont là pour t'aider."
Hermione fronça les sourcils. Puis, elle reporta son attention sur les jumeaux, et vit à cet instant ce qu'ils portaient : ils avaient tous les deux ajouté des vestes et des cravates par-dessus leur pyjama quadrillé.
Hermione comprit enfin et recula tout de suite :
"Ah non. Non. Non, non, non, non."
"Mademoiselle Hermione Granger, nous accorderiez-vous cette danse ?" demanda Fred, main tendue vers elle, et sourire en coin.
