tw :
- sang/blessure
- émetophobie à la toute fin du chapitre
- Harry souffre de troubles du comportement alimentaire au début de ce chapitre à cause du stress
note :
j'ai écouté une vidéo d'ambiance musicale du Lac Noir pendant l'écriture et traduction de ce chapitre. Je vous le mets le lien si vous voulez vous mettre dans l'ambiance! watch?v=2XutZEJSFwM
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Hermione
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Harry, Ron et Hermione étaient en train de rentrer de la cabane d'Hagrid. Ils avaient passé la soirée à le rassurer, et il avait finalement consenti à reprendre les cours de Soins aux Créatures Magiques, malgré l'article de cette satanée Skeeter.
C'était une excellente nouvelle, pourtant, Harry semblait assez anxieux sur le chemin du retour. Hermione le regardait discrètement. Il ne cessait de se triturer les mains, les yeux dans le vide. Ils regagnèrent la Salle Commune, et s'installèrent dans le canapé en face de la cheminée, Hermione blottie contre la couverture que sa maman lui avait tricotée en première année.
Harry faisait semblant de lire, mais Hermione pouvait voir que ses yeux restaient fixés sur la même ligne depuis une dizaine de minutes. Il semblait vraiment préoccupé. Comme ça, il lui faisait penser au Harry de première année, fraîchement libéré des Dursley et qui sursautait à chaque bruit un peu trop fort. Elle eut le sentiment que son angoisse était liée à ce qu'Hagrid lui avait dit, plus tôt dans la soirée : "Tu sais ce qui me ferait plaisir, Harry ? Que tu gagnes. C'est vraiment ce que je souhaite."
Hermione savait qu'Harry avait une grande estime pour Hagrid, et qu'il occupait une place particulière dans son cœur. Probablement parce que c'était lui qui était venu l'enlever de cette famille atroce qui le maltraitait, et qui lui a montré toutes les joies d'être un sorcier. Pour elle, c'était McGonagall, et elle savait qu'il voulait rendre fier Hagrid tout comme elle le faisait pour sa professeure. Hagrid ne s'était simplement pas rendu compte de la pression monumentale qu'il venait de lui imposer.
Quand Ron partit se coucher, Hermione glissa sur le canapé pour se rapprocher d'Harry et murmura :
"Harry ? Tout va bien ?"
"Hm ?" demanda le brun, sortant de ses pensées. Il remit ses lunettes sur son nez et acquiesça : "Euh, oui oui, très bien."
"Tu as bien résolu l'énigme de l'œuf en or ?" demanda-t-elle.
"Oui, Hermione, c'est fait."
Elle pouvait voir qu'il mentait. Quand il était stressé, il évitait les contacts visuels. Ses doigts étaient dans un sale état, la peau déchirée par le stress et ses ongles rongés.
"Tu sais que tu peux me demander, si tu as besoin." insista Hermione en posant une main réconfortante sur le dos de celle d'Harry. "Je t'ai aidé pour le Accio, pour la première épreuve."
Harry sembla se détendre un peu en entendant ça. Il sourit, un pâle sourire plein d'angoisse :
"Merci, Hermione. Qu'est-ce que je ferais sans toi ?"
Elle lui sourit à son tour et elle retourna dans son livre, tout en jetant des regards vers Harry, qui avait abandonné son magazine de Quidditch et regardait maintenant le feu, pensif. Elle se demanda s'il espérait y voir apparaître la tête de Sirius dans les flammes. Mais rien n'apparut, alors il finit par se lever doucement, souhaita une bonne nuit à Hermione et alla se coucher.
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Toute la semaine, Harry rumina dans son coin. Hermione et Ron s'étaient décidés à le laisser tranquille. Ils savaient très bien qu'Harry finirait par leur demander de l'aide en temps voulu, et qu'il ne fallait pas le presser. Mais c'était très difficile de le voir comme ça.
Comme souvent quand il était stressé, il mangeait de moins en moins. Ron et Hermione prirent l'habitude de prendre des sandwiches ou des muffins dans leurs poches pour lui donner quelque chose à grignoter entre les repas. Très souvent, il sautait même le dîner et retournait directement dans la Salle Commune. Et quand ils étaient tous les trois, Harry était silencieux. Ron lui proposa de jouer aux échecs, de demander à Madame Bibine s'ils pouvaient jouer au Quidditch sur le terrain, ou des escapades nocturnes avec la cape d'invisibilité. Mais Harry refusa tout d'office.
Hermione, quant à elle, passait de moins en moins de soirées à la Bibliothèque pour veiller sur Harry. Deux soirs dans la semaine, il s'endormit sur le canapé de la Salle Commune : une fois affalé sur Hermione, une fois sur Ron. Ils finirent par le réveiller doucement et Ron l'aidait à monter dans le dortoir, un air soucieux sur le visage. Neville avoua aussi à Hermione qu'Harry avait de nouveau des cauchemars : il l'entendait souvent se réveiller en sursaut pendant la nuit.
La semaine suivante, en cours de Sortilèges, Harry finit par -enfin- leur raconter ce qui le tracassait. Il leur raconta son plan de se baigner dans la salle de bains des préfets, la veille, parce que Cedric lui aurait donné ce conseil.
"Tu m'avais dit que tu avais déjà résolu l'énigme de cet œuf !" s'indigna Hermione.
"Ne crie pas comme ça !" s'énerva Harry sur le champ. "J'ai simplement besoin… d'affiner les choses, d'accord ?"
Hermione soupira d'impatience malgré elle. Elle était persuadée qu'Harry n'avait rien résolu du tout, mais qu'il ne voulait pas l'admettre.
"Oublie un peu cet œuf, d'accord ?" chuchota Harry. "J'essaie de te parler de Maugrey et Rogue…"
Harry profita du brouhaha ambiant du cours de Sortilèges pour leur raconter tout ce qui lui était arrivé la veille : la chanson des sirènes dans le bain, Bartemius Croupton dans le bureau de Rogue sur la carte du Maraudeur, son pied coincé dans la marche des escaliers, Rusard, Rogue et Maugrey qui avaient presque failli le retrouver… Hermione avait bloqué sa respiration dans sa poitrine sans le vouloir en écoutant cette partie. Heureusement, Harry avait été sauvé par Maugrey.
Après avoir raconté l'histoire, Ron, Harry et Hermione partirent dans des théories murmurées. Entre chaque phrase, Hermione s'entraînait aussi au sort d'Expulsion en envoyant valser des coussins. Elle fut agréablement satisfaite de constater que tous ses coussins atterrissaient parfaitement dans la boîte prévue à cet effet.
L'élément le plus surprenant dans l'histoire d'Harry aux yeux d'Hermione était Croupton. Hermione ne comprenait pas pourquoi il se trouvait dans le bureau de Rogue la veille, alors qu'il avait été soi-disant trop malade pour travailler ou assister au Bal. Ron était évidemment trop focalisé sur Rogue (il était persuadé que c'était lui qui avait mis le nom d'Harry dans la Coupe de Feu), pour s'intéresser à Croupton. Quand elle s'interrogea à voix haute, Ron lui répondit :
"Tu n'aimes pas Croupton à cause de ce qu'il a fait à son elfe."
"Et toi, tu tiens absolument à ce que Rogue mijote quelque chose de louche." répliqua-t-elle en envoyant un Repulso parfaitement exécuté.
Aussi bien que l'histoire de Croupton et Rogue soit intrigante, la seconde épreuve n'en demeurait pas moins la plus importante. Maintenant qu'ils savaient ce qu'Harry devait faire, ils devaient trouver un moyen de le faire respirer sous l'eau. Hermione ne connaissait aucun sort d'apné, alors elle décida d'aller dans son endroit préféré au monde pour en trouver un : la Bibliothèque.
Ils passèrent toutes leurs heures libres là-bas, à lire chaque livre potentiellement lié à l'eau. Hermione pensait que ça serait une tâche assez simple, parce que la Bibliothèque regorgeait de sortilèges possibles. Mais elle se rendit compte avec horreur que ce n'était pas le cas. Il n'y avait rien, pas la moindre information sur un sortilège qui pouvait faire respirer sous l'eau pendant assez longtemps.
Cette constatation l'énerva. Elle le vit comme un challenge personnel. Elle passa des heures entières à la table d'Harry, Ron et elle, entourée de piles de livres impressionnantes, un thé à la cannelle à côté d'elle, à éplucher chaque paragraphe de chaque livre qu'elle trouvait. Quand le mois de Février débuta, elle décida d'étendre son cercle de recherches et chercha même dans les livres de Métamorphose et de Légendes sorcières qui pourraient l'aider.
Ils ne trouvèrent rien. Hermione finit par ne faire que ça. Elle était devenue obsédée à l'idée de trouver un sortilège, une potion, n'importe quoi qui pourrait aider Harry à respirer sous l'eau.
Elle faisait des insomnies. La nuit, elle était étendue dans son lit, à faire des listes et des listes de sorts liés à l'eau, tous ceux qu'elle connaissait. Quand elle parvenait enfin à s'endormir, elle rêvait qu'elle était dans la mer, au milieu des vagues qui l'engloutissait et elle se réveillait en sursaut avec l'impression de ne plus savoir respirer normalement.
Étant donné qu'elle devait toujours continuer son planning de révisions, Hermione essayait de travailler de son côté le plus possible. Dès qu'Harry et Ron se plaignaient d'être trop fatigués pour aller à la Bibliothèque, elle s'y réfugiait. Et à chaque fois qu'elle s'asseyait à la table reculée, Drago apparaissait derrière elle, comme s'il devinait sa présence sans la voir. Une après-midi de Février, elle lui demanda :
"Comment tu sais que je suis là ?"
Malefoy fronça les sourcils en entendant cette question.
"Ça fait presque quatre mois qu'on s'assoit là." dit-il avec un petit rire.
"Non mais je veux dire, comment tu sais spécifiquement que je suis là, ce soir ? Je ne te préviens jamais, et tu devines tout le temps quand je m'assois là. Tu as jeté un sortilège de localisation sur la table pour savoir qui s'asseyait dessus ?"
Malefoy ricana à cette idée.
"Non, rien de tout ça. Je le devine, simplement."
"Comment ?" demanda-t-elle, curieuse.
Il réfléchit un peu en faisant tournoyer sa plume dans sa main.
"Disons que j'ai remarqué que tu passais beaucoup de temps avec Potter, ces derniers temps. J'imagine que tu l'aides encore pour la deuxième Tâche qui approche. Tu pourras lui dire de manger un peu d'ailleurs, il ressemble à un poulet déplumé."
"Donc, tu viens au hasard ?" dit-elle en ignorant sa remarque sur la maigreur flagrante d'Harry.
"Pas vraiment, je déduis, plutôt." corrigea Malefoy. "Quand je te vois partir avec Potter ou Weasley au dîner, je me dis que tu ne vas pas aller à la Bibliothèque le soir, c'est tout."
"Tu es un très bon observateur, alors." fit-elle remarquer, assez admirative.
Malefoy haussa les épaules :
"Pourtant, tous mes amis me reprochent de ne pas l'être assez."
"Alors, tu m'observes bien moi." dit-elle en riant.
Malefoy ne rit pas avec elle, mais il ébaucha un sourire sans le vouloir. Puis, ils se remirent à travailler en silence.
Malefoy avait probablement remarqué que le comportement d'Hermione avait changé. Avant, elle passait toutes ses soirées à la Bibliothèque à travailler, mais depuis qu'Harry lui avait révélé l'énigme de l'œuf, elle avait mis de côté ses devoirs pour se concentrer là-dessus. Elle n'avait pas sorti son carnet de la S.A.L.E depuis près d'un mois, et avait pris du retard sur ses essais à rendre.
Pourtant, il ne fit pas de commentaire. Hermione lui en était reconnaissante. Il aurait pu la questionner, lui reprocher son absence, mais il n'en fit rien. Il se contentait de travailler avec elle quand elle le pouvait, en silence. Il avait compris qu'elle avait besoin de focaliser toute son attention sur son travail et le respectait. C'était difficile à croire, mais elle l'appréciait un peu plus grâce à ça.
Un soir de mi-Février, Hermione resta jusqu'à la fermeture de la Bibliothèque, bien après que Malefoy soit parti. Elle fut chassée gentiment par Madame Pince, qui l'aida même à ranger ses livres dans les étagères respectives. En voyant les titres de ses bouquins, la bibliothécaire demanda :
"Vous êtes intéressée par les métamorphoses partielles, Miss Granger ?"
"Pas vraiment." répondit Hermione en reposant "Changer son apparence : lier l'utile à l'agréable". "Je cherche un moyen de respirer sous l'eau. C'est pour… Un essai d'Histoire de la Magie."
"Je vois… Avez-vous regardé le livre des "100 sortilèges à adopter pour une vie plus facile ?"" proposa Madame Pince. "Je suis sûre que vous trouverez la réponse à cette question."
"Oui, j'ai déjà vérifié." dit Hermione. "Et il n'y a rien sur des sortilèges d'apné… Existe-il un sort pour chercher un mot clé dans les livres de la Bibliothèque ?"
Madame Pince secoua la tête.
"Malheureusement, il est interdit d'utiliser Accio sur les livres de la Bibliothèque. Il était possible d'utiliser un sort qui faisait venir tous les livres sur un sujet précis, mais il est également interdit depuis qu'un élève l'a utilisé sur le mot "magie" et qu'une centaine de livres se sont écrasés sur lui simultanément."
Elle ne semblait pas du tout affectée par le sort de ce pauvre élève, mais plutôt de l'état de ses précieux livres. Hermione la comprenait : qui pourrait être assez bête pour utiliser le mot "magie" ? Si elle pouvait utiliser ce sort avec le mot "apné" ou "respirer", elle aurait pu trouver la solution pour Harry depuis des jours. Elle sortit donc de la Bibliothèque en grinçant des dents.
Hermione était en train de tourner dans le couloir de la Bibliothèque quand elle se stoppa brutalement en apercevant Krum qui l'attendait devant. Il avait un petit sourire aux lèvres. Hermione regarda partout autour d'elle pour voir si quelqu'un pouvait les voir, mais le couloir était désert. Heureusement que Ron ne venait jamais la chercher à la Bibliothèque.
"Bonsoirrr Herrrrmion." dit-il en la voyant s'approcher.
"Bonsoir Viktor. Tu m'attends depuis longtemps ?"
"Non, une dizaine de minutes." répondit-il en prenant son sac pour le porter à sa place. "Je me doutais que tu ne sortirrrai qu'à la ferrrmeturrre. Tu trrravaillais ?"
Hermione pensa à ses cheveux, qui devaient être dans un état catastrophique à force d'être tirés dans tous les sens par le stress, et à son dos courbé, et se redressa subtilement.
"Oui… Viktor, je suis désolée, je suis vraiment débordée en ce moment. Je sais que je ne suis pas très disponible, mais j'ai beaucoup de choses en tête et je…"
"Ne t'en fais pas Herrrmion." dit Krum. "Tu es une fille trrrès intelligente, je comprrrends. Je te rrracompagne juste à ta Salle Commune, d'accorrrd ?"
Elle lui sourit et ils commencèrent à marcher. Au final, ce fut plutôt Hermione qui accompagnait Viktor, parce qu'il n'avait aucune idée de comment se rendre à sa Salle Commune. Il n'était jamais allé dans cette partie du Château.
Ils discutèrent de choses et d'autres. Hermione avait remarqué que Viktor ne faisait jamais référence au Tournoi, probablement parce que Karkaroff ne voulait pas qu'il en parle à une élève de Poudlard. Il n'avait pas l'air stressé, non plus, contrairement à Harry. Peut-être que c'était grâce au Quidditch, c'était une célébrité sportive internationale après tout, le Tournoi devait lui sembler comme des épreuves enfantines à côté.
Hermione fut tentée de lui demander s'il avait trouvé une solution pour respirer sous l'eau. Elle était sûre qu'il était au courant pour la seconde Tâche, et voulait désespérément savoir ce qu'il avait trouvé. Mais c'était interdit, elle n'était même pas censée connaître le contenu de l'œuf. Alors, elle se tut à contrecœur.
"Tu ne m'as jamais dit où tu habitais, Herrrmion." dit Viktor.
Hermione lui raconta sa vie à Londres sur le reste des escaliers jusqu'au septième étage. Il écouta avec attention, et ne fit pas la moindre expression quand elle lui parla de ses parents Moldus. Il le savait déjà, mais elle avait toujours eu peur que les préjugés des Durmstrangs soient vrais. En tout cas, Krum n'en avait vraisemblablement pas.
Une fois arrivés au septième étage, près du tableau de la Grosse Dame, Hermione ressentit soudain une appréhension. Et si Krum imaginait qu'ils allaient s'embrasser ? Il l'avait attendu devant la Bibliothèque, et c'était déjà la deuxième fois qu'ils passaient du temps tous les deux depuis le Bal. Hermione n'avait pas réalisé qu'il pouvait considérer ça comme des dates. Elle n'avait aucune idée de ce qu'elle était censée faire. À partir de combien de temps faut-il dire qu'on est en couple ? Devait-elle déjà ressentir quelque chose pour lui ? Est-ce qu'il pensait qu'elle était sa petite amie ?
Hermione déglutit, soudain submergée de questions angoissées. Elle avait été tellement occupée à aider Harry qu'elle avait délaissé tout le reste. Elle regarda Krum timidement, n'ayant aucune idée de ce qu'elle était censée faire : lui dire au revoir ? l'embrasser ? attendre ?
Elle tourna les yeux vers le tableau de la Grosse Dame et pensa à Ron, de l'autre côté, probablement en train de jouer aux échecs ou de faire ses devoirs. Ce n'était pas très juste de sortir avec Krum alors que Ron ressentait clairement quelque chose pour elle, mais elle était tellement agacée qu'il ne fasse pas le moindre pas qu'elle était tentée de le faire juste pour l'énerver. Et en même temps, ce n'était pas très juste vis-à-vis de Krum.
Hermione était complètement perdue.
Elle allait ouvrir la bouche (parce que le silence était beaucoup trop pesant), mais au moment où elle cherchait quoi dire, Ginny apparut au bout du couloir, accompagnée de Neville. En la voyant, Hermione se précipita presque sur elle.
"Ginny ! Te voilà !" dit-elle dans une exclamation légèrement étranglée.
"Me voilà…" dit Ginny, un peu surprise par l'attitude d'Hermione. "Bonsoir Viktor, comment vas-tu ?"
"Trrrès bien, merrrci." répondit Viktor avec un signe de tête amical à l'adresse de Ginny et Neville.
Puis, il se tourna vers Hermione, qui s'était placée à côté de sa meilleure amie.
"Bonne soirrrée alors, Herrrmion. Peut-êtrrre à plus tarrrd."
Elle lui fit un signe de la main et le regarda s'éloigner avec un soupir de soulagement. Une fois qu'il fut descendu des escaliers, elle desserra sa prise sur le bras de Ginny, qui eut un petit rire moqueur :
"Tu sais que tu es censée l'apprécier, pas avoir peur de lui."
"Je sais, je sais." dit Hermione en tirant inconsciemment sur ses cheveux de stress. "C'est juste que je suis débordée en ce moment, et je n'ai pas le temps de penser à ce genre de choses, et j'ai cru qu'il allait m'embrasser."
Ginny eut un petit hoquet de surprise, tandis que Neville gémit de plainte :
"Je peux y aller ?" demanda-t-il, suppliant.
"Je rentre aussi." dit Hermione, qui n'avait pas envie de devoir analyser ses sentiments à Ginny dans un couloir. "Et pas un mot à Ron et Harry, c'est compris ?" ajouta-t-elle en montrant Ginny et Neville du doigt.
Ginny leva les yeux au ciel et Neville marmonna un "comme si j'en avais envie" dans sa barbe. Hermione énonça le mot de passe au tableau qui s'ouvrit et ils entrèrent tous les trois dans la Salle Commune.
Harry était là, le visage plus livide que jamais. Il ne restait que quelques jours avant la seconde Tâche. Quand il la vit, il leva vers elle des yeux pleins d'espoir, mais elle secoua la tête dans un "non" inaudible et le garçon se ratatina encore plus dans le canapé.
Ron était assis à côté, presque aussi inquiet qu'Harry. D'habitude, ses traits étaient constamment tirés dans des sourires, comme les jumeaux Weasley, mais en voyant l'état de son meilleur ami, il affichait une mine sombre qui lui ressemblait très peu. Hermione leur proposa un thé qu'ils prirent en silence devant le feu, laissant Ginny et Seamus faire toute la conversation.
De temps en temps, Hermione jetait un regard vers Harry, et elle pouvait presque deviner ses pensées : je vais devoir abandonner.
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Les derniers jours qui les séparaient de la deuxième Tâche passèrent en un clin d'œil. Hermione avait définitivement arrêté de travailler et passait son temps à lire les livres de la Bibliothèque avec Harry et Ron. La veille du jour de l'épreuve, elle avait fait tellement d'insomnies que ses yeux se fermaient tout seuls et que les livres épais ressemblaient de plus en plus à des oreillers moelleux.
Mais elle continua à chercher, sous la lueur de la chandelle de la table de la Bibliothèque. La solution était forcément là. Il existait une potion, un sortilège, n'importe quoi qui pouvait permettre de respirer sous l'eau pendant une heure.
"Ce livre ne sert à rien." asséna Hermione en refermant brutalement son livre, faisant sursauter Ron qui somnolait à moitié. "Qui donc aurait envie de faire des frisettes à ses poils de nez ?"
"Moi, ça me plairait assez." lança une voix familière à côté d'eux. "C'est un bon moyen de faire parler de soi, non ?"
Hermione leva la tête et croisa le regard malicieux de Fred, suivi de près par George.
"Qu'est-ce que vous faites là ?" demanda Ron.
"On te cherchait." répondit George. "McGonagall veut te voir. Et toi aussi, Hermione."
Cette dernière ressentit une pique d'inquiétude dans son estomac.
"Pourquoi ?" demanda-t-elle.
"'J'sais pas… Mais elle avait l'air assez sinistre." commenta Fred, ce qui augmenta le stress d'Hermione.
"On est chargés de vous emmener dans son bureau." conclut George.
Hermione et Ron regardèrent Harry, qui, par miracle, semblait encore plus pâle qu'avant. Son manque d'alimentation, de sommeil et de stress lui donnait une tête effrayante.
"On se retrouve dans la Salle Commune." dit Hermione d'une voix assurée. "Apporte autant de livres que tu pourras, d'accord ?"
"D'accord." glapit Harry.
Une fois sortis de la Bibliothèque, ils se dirigèrent silencieusement vers le bureau de McGonagall. Hermione n'avait pas besoin d'échanger de regard avec Ron pour savoir qu'ils partageaient la même inquiétude : et si McGonagall avait compris qu'ils aidaient Harry ? Ce n'était pas très juste de leur reprocher ça, sachant que tous les Champions avaient triché dans la compétition. Harry était celui qui en avait le plus besoin, McGonagall le savait très bien !
Ils arrivèrent devant le bureau de la directrice de Gryffondor et Fred et George les laissèrent là, après leur avoir souhaité un "bonne chance" à voix basse. Ron, le visage inquiet, toqua à la porte.
"Entrez !" énonça la voix de McGonagall.
Ron poussa la porte et ils furent surpris de voir que la pièce était en fait remplie. McGonagall était assise derrière son bureau, l'air passablement irritée. Dumbledore était là aussi, calme et presque amusé, près de la cheminée. De part et d'autre des deux professeurs de Poudlard se tenait Karkaroff, qui donnait toujours l'impression d'être furieux, et Madame Maxime qui frôlait le plafond du bureau de McGonagall. Il y avait aussi Percy Weasley et Ludo Verpey, qui était le seul avec un grand sourire. De l'autre côté du bureau se tenaient Cho Chang et une jeune fille blonde, toutes les deux intimidées. Madame Pomfresh était là aussi, à côté de la porte.
Le tableau que donnait cette scène surréaliste aurait presque été comique si Hermione n'avait pas le ventre tordu par le trac.
"Ah, vous voilà !" dit McGonagall en se relevant légèrement sur sa chaise. "Entrez, entrez. Nous allons pouvoir vous expliquer pourquoi vous avez été appelés."
Ron et Hermione se mirent timidement dans l'un des coins de la pièce inoccupé. Hermione nota mentalement que Percy remplaçait toujours Croupton, mais n'eut pas le temps de développer cette pensée davantage avant que Dumbledore ne prenne la parole :
"Bonsoir à tous." salua-t-il, à l'adresse de Cho, la jeune fille, Ron et Hermione. "Je pense que vous connaissez déjà toutes les personnes dans ce bureau, donc pas besoin d'introduction. Vous devez sûrement vous demander pourquoi nous vous avons appelé ce soir, alors nous irons droit au but. Ludo ?"
Ludo Verpey s'approcha légèrement du bureau, extrêmement enthousiaste. Hermione ne savait vraiment pas pourquoi, mais cet homme lui donnait une mauvaise impression.
"Il est temps de vous révéler en exclusivité l'épreuve de demain." annonça-t-il avec hâte. "Voyez-vous, vous avez tous les quatre un rôle très important, qui est primordial pour la seconde Tâche que les Champions attendent avec impatience ! Elle se déroulera dans le Lac Noir. Les Champions, grâce à l'œuf d'or de la première Tâche, savent qu'ils doivent y rester pendant une heure pour retrouver quelque chose qui leur est cher."
Hermione pensa à Harry, seul à la Bibliothèque, qui cherchait toujours un moyen d'aller sous l'eau.
"C'est vous !" s'exclama joyeusement Verpey.
Personne ne réagit. Cho Chang fronça les sourcils et demanda :
"Nous ?"
"Oui, vous ! Chacun de vous représente l'objet le plus cher aux yeux d'un Champion. Vous, Miss Chang, vous êtes celle de Mr. Diggory. Miss Delacour, celle de votre sœur, Mr. Weasley pour Mr. Potter et Miss Granger pour Mr. Krum !"
Hermione sentit Ron se tendre en entendant le nom associé à Hermione, mais il ne fit pas de commentaire et ne tourna même pas la tête dans sa direction. Hermione, quant à elle, ressentit un vague embarras à l'idée d'être nommée "objet le plus cher aux yeux de Viktor Krum" devant ses professeures, mais refusa de rougir en voyant l'air indigné de Karkaroff.
"Vous serez donc placés sous un sortilège de Sommeil ensorcelé réalisé par mes soins." reprit Dumbledore, d'une voix beaucoup plus posée que Verpey. "Vous ne sentirez absolument rien. Nous vous mettront au fond du Lac Noir, gardés par les sirènes qui ont accepté de participer à l'épreuve, et qui ne vous causeront pas le moindre mal. Les Champions devront vous trouver et vous libérer dans le temps imparti."
Hermione ne s'attendait pas du tout à ça. Elle avait pensé se faire réprimander, et à la place, elle allait être placée dans un sortilège de Sommeil ensorcelé.
"Que se passera-t-il si le Champion ne parvient pas à nous libérer ?" demanda anxieusement Ron.
Hermione savait qu'il pensait à Harry qui n'avait toujours pas résolu l'énigme de l'œuf.
"N'ayez crainte, Mr. Weasley." assura Dumbledore. "Le sort s'arrête à l'instant où vous sortirez de l'eau, sans aucun dégât corporel. Si votre Champion ne vous trouve pas à temps, Hagrid sera chargé de venir vous chercher et de vous ramener hors de l'eau pour interrompre votre Sommeil."
"Et on ne se souviendra de rien ?" demanda la petite fille à côté d'Hermione.
C'était la première fois qu'elle parlait, et son fort accent français prouvait que c'était bien la sœur de Fleur Delacour, en plus de ses longs cheveux blonds et de ses yeux bleus perçants. Elle ne devait pas avoir plus de 10 ans, et regardait anxieusement chaque personne de la pièce.
"Tout à fait." dit gentiment Dumbledore.
"Le sort va vous faire un drôle d'effet, cependant." avertit McGonagall, qui était toujours assise derrière son bureau. "Vous allez tomber dans un sommeil profond en quelques secondes, et vous serez inconscients jusqu'à demain. Les effets varient en fonction des sujets, mais il se peut que vous vous sentiez mal lors de votre réveil."
Les quatre élèves acquiescèrent doucement. Hermione avait, évidemment, lu beaucoup de choses sur le sort de Sommeil, mais elle n'avait jamais connu ses effets. La seule chose qui s'en rapprochait le plus étaient les potions de Sommeil que Madame Pomfresh lui avait donné à l'infirmerie en deuxième année.
"Bien. Qui veut commencer ?" annonça Ludo Verpey en tapant dans ses mains.
Ce fut Cho Chang qui fut la première à être endormie. Dumbledore posa sa baguette contre son front, la rassura une dernière fois sur le fait que ce n'était pas dangereux, puis lança le sort sans parler. Aussitôt, la jeune femme ferma les yeux et tomba en arrière, rattrapée par Percy et Ron qui avaient prévu le coup. Elle fut allongée sur une sorte de brancard que Madame Pomfresh avait installé.
Ce fut ensuite au tour de Gabrielle Delacour, qui tomba de la même manière que Cho Chang. Quand elle était endormie, elle semblait encore plus jeune.
Ensuite, ce fut au tour de Ron. Il était inquiet, comme en témoignait son teint un peu verdâtre, mais hocha tout de même fermement la tête quand Dumbledore lui demanda s'il était prêt. Dumbledore jeta le sort, et tout le corps de Ron se figea, avant qu'il ne tombe en arrière, rattrapé par son frère. Il avait les yeux clos et la bouche légèrement entrouverte.
"Miss Granger, à votre tour." annonça doucement Dumbledore.
Hermione s'approcha du centre de la pièce et échangea un regard avec McGonagall, qui hocha doucement la tête pour l'encourager. Ses doigts picotaient à cause de l'appréhension. Dumbledore posa le bout de sa baguette sur son front et murmura :
"Êtes-vous prête ?"
Hermione pensa à Harry, qui devait probablement s'arracher les cheveux à la Bibliothèque à cet instant. Elle pensa à Krum, en espérant qu'il avait une bonne stratégie pour demain. Elle pensa à Lavande et Parvati, qui ne la verraient pas rentrer au dortoir ce soir.
Elle hocha lentement la tête et Dumbledore prit une petite inspiration pour lancer le sortilège…
Juste avant qu'il ne le lance, juste avant qu'elle ne se sente partir, une nouvelle pensée s'interposa dans son esprit, éclipsant tout le reste : Drago.
Puis, un coup de vent, et toute sa vision devint noire.
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Drago
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"Qu'est-ce que vous pensez que ça va être, la deuxième épreuve ?" demanda Pansy tandis qu'ils quittaient la table du petit déjeuner.
"Aucune idée." admit Théo. "Ils ont fait fort avec les dragons, je sais pas s'ils vont réussir à surpasser ça."
"Je ne sais pas en quoi ça consistera," dit Blaise à côté d'eux, en sortant du Château. "Mais je pense savoir où ça se passera."
Il pointa du doigt quelque chose devant lui et Drago, Pansy, Théo, Crabbe et Goyle levèrent tous la tête en même temps dans la direction indiquée. Des immenses tribunes se dressaient tout autour du Lac Noir, surplombant la grande surface lisse du lac. De nombreux élèves s'installaient déjà.
"Le Lac Noir ?" dit Pansy avec une moue. "Mais on ne va rien voir !"
Ils s'approchèrent de la tribune verte et prirent place au premier rang. Il n'était que 9h10, l'épreuve ne commençait que dans vingt minutes. Le jury était déjà installé sur une table, au centre des tribunes.
Théo et Blaise échangeaient des théories sur l'épreuve pendant que Drago observait les alentours. Trois des Champions étaient déjà là. Krum était le plus concentré, et déjà vêtu d'un maillot de bain, malgré la fraîcheur du mois de Février. Fleur Delacour était à côté de lui, habillée d'une robe fine sous laquelle elle avait mis son maillot de bain et sa baguette solidement accrochée avec une bandoulière. Diggory, tout à gauche, n'avait pas l'air aussi stressé que lors de la première épreuve : il saluait le public avec des grands gestes de la main.
Au fur et à mesure que l'heure approchait, les tribunes se remplissaient. Daphné et Tracey arrivèrent et se mirent dans le même rang qu'eux. Puis, ce fut au tour de Léo, au désarroi général. Il embrassa Pansy et Drago se demanda s'ils faisaient exprès de produire le plus de bruit possible quand ils le faisaient, juste pour dégoûter les autres.
Il préféra donc contempler les autres tribunes. Son père et sa mère étaient censés venir, mais étant donné que Lucius avait été évincé du conseil d'administration de Poudlard, il n'avait plus le droit d'assister à ce genre d'évènements. Drago était soulagé de ne pas revoir son père, mais attristé pour sa mère qui aurait aimé venir, comme elle le répétait souvent dans ses lettres. Depuis quelques temps, elle semblait plus morose dans ses écrits. Il aurait aimé qu'elle vienne seule pour se changer les idées.
Potter n'était pas là, ce qui était assez étrange. Normalement, les Champions arrivaient en avance. Drago se tourna vers la tribune des Gryffondors et chercha Granger du regard. Il s'attendait à ce qu'elle soit assise à côté de Londubat, ou des jumeaux Weasley, mais elle n'était pas là non plus. Weasley non plus ne se trouvait pas sur la tribune. Drago fronça les sourcils. Personne d'autre autour de lui n'avait remarqué leur absence.
Quelques minutes avant le début de l'épreuve, alors que tout le monde commençait à trépigner d'impatience dans les tribunes, Potter arriva en courant, haletant et visiblement pas réveillé. Il était clairement en retard. Il courut jusqu'à la table des juges où il se fit prendre à part par les professeurs, puis les quatre Champions se mirent en rang.
"Il n'a même pas de maillot de bain !" se moqua Pansy en voyant Potter.
Drago regardait obsessivement derrière Potter, mais personne d'autre que lui ne sortit du Château. Il avait pensé que Granger avait voulu l'aider jusqu'à la dernière minute, mais elle n'était pas avec lui. Drago analysa de nouveau la tribune des Gryffondors, scannant les visages un par un de loin pour tenter d'identifier celui de Granger. Weaslette, Londubat, Finnigan, les jumeaux Weasley, Thomas…
Il vit que Krum aussi cherchait quelque chose dans le public, et il était sûr qu'il cherchait Granger. Le temps d'une seconde, la concentration du bulgare fut changée par un visage anxieux, presque un peu peiné, avant de reprendre contenance.
Ludo Verpey posa sa baguette dans le creux de son cou, et ses paroles résonnèrent tout autour du Lac :
"Et voilà, tous nos Champions sont prêts à entreprendre la deuxième Tâche qui commencera à mon coup de sifflet. Ils auront exactement une heure pour reprendre ce qui leur a été enlevé. Attention, à trois… un… deux… trois !"
Un coup de sifflet retentit et Fleur et Cedric brandirent tous les deux leurs baguettes dans un même geste. Ils lancèrent un sort sur leurs visages, et deux grosses bulles entourèrent alors leurs bouches, déformant leurs visages. Cedric plongea dans l'eau la tête la première, tandis que Fleur testa plusieurs inspirations dans sa nouvelle bulle, enleva sa robe et rentra délicatement dans l'eau, avant de disparaître.
Krum, quant à lui, avait pointé sa baguette sur sa poitrine et murmura un sort qui mit du temps avant de se manifester.
Potter enleva ses chaussures et sortit une grosse boule grise et visqueuse de sa poche, qu'il fourra dans sa bouche. Pansy fit un glapissement écoeuré.
Soudain, après quelques minutes d'attente, Krum se tordit de douleur et posa un genou à terre. Drago ne comprenait pas vraiment ce qu'il se passait, jusqu'à ce qu'il aperçoive un aileron pousser dans son dos. Dumbledore et Karkaroff se rapprochèrent de lui rapidement pour l'aider, mais Krum les poussa de la main juste avant que son visage s'étire et prenne une teinte grisâtre.
"Qu'est-ce qui lui arrive ?!" demanda Blaise.
"Une métamorphose ratée, visiblement." dit Théo en observant Krum, un peu dégoûté.
Potter était à moitié immergé dans l'eau, sa robe de sorcier gonflée par l'eau tout autour de lui. Il attendait quelque chose, faisant rire le public. Il ne voyait pas Krum derrière lui, qui avait maintenant le haut de son corps métamorphosé : vers la moitié de son torse, il avait une peau grise de requin, et le visage remplacé par une immense mâchoire. Il était absolument terrifiant. Il se releva maladroitement et sauta de l'estrade pour s'enfoncer dans les profondeurs noires de l'eau.
Il ne restait que Potter, à moitié dans l'eau et attendant vraisemblablement quelque chose, un effet de la plante bizarre qu'il avait mangé. Toutes les tribunes riaient, désormais.
"Ça n'a pas marché." dit Léo à la gauche de Drago. "Potter a perdu."
"Il a mangé une Branchiflore." s'écria Théo, agacé. "Ça prend du temps, c'est tout."
En effet, le cou de Potter se fendit après plusieurs secondes. Il porta une main à son visage en gémissant de douleur. Drago ne pouvait pas voir les changements d'aussi loin, mais il eut l'impression que Potter jugea qu'il était prêt, parce qu'il plongea d'un coup dans l'eau.
Pendant plusieurs minutes, le public resta silencieux. Pansy s'assit sur les gradins en croisant les bras, visiblement déjà ennuyée à l'idée de devoir attendre une heure. Théo se frottait déjà les bras sous son manteau pour montrer à tout le monde qu'il avait froid.
"N'oubliez pas le pari !" rappela Blaise, qui continuait de fixer la surface de l'eau, dans l'espoir que Krum réapparaisse d'une seconde à l'autre.
"Fleur a des bonnes chances de gagner." dit Daphné. "Vous avez vu comment elle avait l'air confiante en lançant son sort ?"
"Oui, mais tu as vu un peu Krum ? Il s'est métamorphosé en requin !" s'exclama tout de suite Blaise. "C'était phénoménal !"
"Ça l'aurait été s'il ne l'avait pas ratée ! Il va perdre des points à cause de ça." pointa Pansy.
Ils engagèrent un débat sur le meilleur Champion, tous défendant celui sur lequel il avait misé de l'argent. Drago, lui, cherchait toujours Granger dans la foule. Elle était introuvable. Dumbledore et le jury discutaient à voix basse à la table des juges.
Pourquoi Londubat était là et pas elle ? D'habitude, elle traînait toujours avec lui quand elle n'était pas avec Potter et Weasley. Où était Weasley, d'ailleurs ? Lui non plus ne s'était pas montré. Peut-être qu'ils s'étaient disputés avec Potter ? Drago ne voyait pas comment Granger aurait pu s'énerver contre Potter juste avant la seconde Tâche. Il les avait aperçus tous les trois hier à la Bibliothèque, plongés dans des bouquins éparpillés à leur table.
Drago avait remarqué que Granger travaillait moins depuis le début du mois de Février. Il était persuadé qu'elle aidait Potter pour le Tournoi, et vu l'épreuve, il devina sans mal qu'elle avait cherché un moyen de le faire respirer sous l'eau. Était-ce elle qui avait réussi à trouver cette Branchiflore ? Peut-être que les professeurs avaient compris que Granger avait trouvé la solution, et pas Potter, et qu'elle avait peut-être été exclue du Tournoi ? Ou pire… de Poudlard ?
Soudain, la voix amplifiée de Dumbledore remplit les alentours, interrompant Drago dans ses pensées.
"Nos Champions sont tous dans l'eau." annonça le directeur d'une voix solennelle. "Chacun d'entre eux a trouvé un moyen de respirer sous l'eau, avec pour seul indice une chanson des sirènes enfermée dans l'œuf d'or et délivrée uniquement s'ils le plongeaient dans l'eau. Vous vous demandez sûrement ce que les Champions doivent retrouver au fond du Lac ! La chanson indiquait qu'ils devaient retrouver ce qu'on l'avait pris de plus cher…"
"Vous pensez que Potter va retrouver ses parents ?" demanda Pansy, ce qui fit rire les Serpentards.
"Nous avons donc pris la personne qui leur était le plus cher à Poudlard, que nous avons ensuite plongé dans un sommeil artificiel et attaché au fond du lac. Les Champions doivent retrouver leur proche, le libérer, et le ramener à la surface, tout ça en moins d'une heure !" continua Dumbledore. "Mr. Diggory doit ainsi retrouver Miss Chang, Miss Delacour sa petite soeur, Mr. Potter doit atteindre Mr. Weasley, et Mr. Krum va tenter de ramener Miss Granger !"
Si Dumbledore avait donné un coup de poing dans le ventre à Drago, ça aurait eu le même effet que la phrase qu'il venait de prononcer. Il arracha son regard de la tribune rouge et or et regarda plutôt avec horreur la surface lisse du Lac Noir. Soudain, il lui paraissait beaucoup plus sombre et dangereux.
"Ils sont retenus par les êtres de l'eau, et ne peuvent être détachés que par leur Champion attitré." termina Dumbledore. "De temps en temps, le chef des êtres de l'eau, Merrow Murcus viendra nous donner des nouvelles du déroulé de l'épreuve."
Drago imagina Granger, pétrifiée comme en seconde année, au fond de l'eau, ligotée et retenue par une horde d'êtres de l'eau menaçants. Il se pencha en avant, les mains blanchies à force de s'agripper à la rampe du gradin.
Il fallait qu'elle soit l'être cher de Krum. De toutes les personnes à Poudlard, celle que Drago haïssait le plus à cet instant était Viktor Krum. Pourquoi avait-il choisi Granger, de toutes les filles de Poudlard ?
Drago avait conscience du regard de Pansy dans son dos, mais il ne fit rien pour changer son comportement. Il était terriblement inquiet, et ne détachait plus son regard du Lac Noir, comme si, s'il cessait de regarder, Granger serait perdue au fond de l'eau pour toujours.
Les minutes s'écoulèrent dans une tension insupportable. Drago n'écoutait même plus les pronostics de ses amis à côté de lui, ni même les cris d'encouragement du public. Il avait les yeux rivés sur l'eau, son cœur cognant fort contre sa peau, sa tête listant toutes les choses qui pourraient mal se passer.
À un moment, une tentacule géante vint briser l'étendue d'eau et alla frapper le Lac avant de retourner dans les abysses. Le calmar géant, apparu comme une menace silencieuse de toutes les choses mauvaises de ce lac. Drago sentit un frisson désagréable lui parcourir la nuque et le dos. Sa bouche était sèche, pâteuse. Il angoissait tellement qu'il sentait son coeur se serrer de plus en plus, lui faisant mal à la poitrine.
"Qu'est-ce que vous pensez qu'il arrive, aux prisonniers, si personne ne les récupère ?" demanda Théo, qui regardait avec inquiétude le calmar géant de l'autre côté du lac.
"Peut-être qu'ils meurent." dit Daphné avec un rire.
La vision de Drago se brouilla légèrement à cette idée. Il avait appris il y a bien longtemps à ne pas faire confiance à Dumbledore concernant les dangers de Poudlard. Granger en était la preuve : elle avait été pétrifiée, blessée, harcelée. Il était probable que l'organisation bancale du Tournoi n'ait pas tout pris en compte, et que Granger devienne l'une des victimes dont parlait sa mère quand elle avait refusé que Drago participe au Tournoi. "Des enfants sont morts dans cette compétition !"
Il imagina Granger, le visage livide et creusé par l'eau, repêchée du Lac et posée sur un brancard. Drago dû s'asseoir.
"N'importe quoi." rétorqua Pansy à l'adresse de Daphné. "Je suis sûre qu'il ne leur arrivera rien. Ils n'auraient jamais organisé cette épreuve s'ils n'étaient pas sûrs qu'ils pourraient récupérer les élèves ensuite !"
Daphné haussa mollement les épaules. En entendant Pansy, Drago parvint à calmer sa respiration hachée. Il n'était pas complètement détendu, mais la perspective que des dizaines de personnes soient mobilisées en cas de problème l'aidait à se sentir mieux. Pansy regardait droit devant elle, mais Drago aurait pu jurer qu'elle frôla sa main contre la sienne, sûrement pour le rassurer. Il ne savait pas si elle avait fait ça parce qu'elle avait vu son désarroi. En tout cas, ça fonctionna.
Au bout d'une vingtaine de minutes, une créature de l'eau sortit sa tête du Lac vers l'estrade, probablement pour informer Dumbledore de ce qu'il se passait sous l'eau. Il avait la peau verdâtre, les yeux étrangement éloignés l'un de l'autre et surtout, une sorte de chevelure qui ressemblait à un tas d'algues grises sur le haut de son crâne. En le voyant, Pansy, Daphné et Théo émirent un petit cri d'effroi.
Il discuta avec Dumbledore pendant quelques minutes avant qu'il ne replonge dans l'eau. Dumbledore lança un Sonorus et expliqua au public :
"Aucun des Champions n'est encore arrivé là où sont retenus les prisonniers. Pour cela, il faut traverser une bonne partie du Lac et s'enfoncer dans les profondeurs, sans craindre les Strangulots et autres créatures maritimes qui peuvent les retenir. Murcus viendra nous tenir au courant de la situation dans une dizaine de minutes."
Ils attendirent, donc. Blaise fit remarquer que l'épreuve des dragons avait été plus distrayante que celle-ci, et tout le monde approuva. Crabbe s'était endormi sur l'épaule de Goyle et ronflait un peu. Au milieu de l'épreuve, quelqu'un passa dans la tribune avec un chariot plein de boissons chaudes : Théo s'empressa de demander à Blaise de lui prendre un grand chocolat chaud.
Drago refusa, parce que son ventre était tellement contracté qu'il était sûr de ne pas réussir à avaler quelque chose. Parfois, l'eau se divisait en plusieurs vaguelettes et Drago retenait son souffle en espérant voir Granger sortir de l'eau. Mais personne n'apparut.
Le chef des sirènes réapparut plusieurs fois, toujours sans nouvelle. Quand il ne restait que quinze minutes avant la fin de l'épreuve, quelque chose se passa : une sorte de gerbe d'étincelles rouges qui transpercèrent un peu la surface de l'eau. Un signal d'alerte. Dumbledore et l'un des Weasley à lunettes (Drago n'avait aucune idée de ce qu'il faisait à la table du jury), se précipitèrent au bord de l'eau et remontèrent un corps inanimé.
Drago se leva précipitamment du banc et s'accrocha à la rambarde, prêt à passer par-dessus. Faites que ça ne soit pas Granger, faites que ça ne soit pas Granger…
Heureusement, Dumbledore tourna la fille sur le dos et Drago vit ses longs cheveux blonds s'étaler autour d'elle. Il expulsa l'expiration qu'il avait retenue en voyant la fille inconsciente. Dumbledore posa sa baguette sur la poitrine de Fleur Delacour et elle s'éveilla soudainement en recrachant de l'eau. Madame Maxime était accroupie à côté d'elle.
"Oh non !" s'exclama Daphné, déçue. "C'est Fleur ! Elle va être dernière du classement, maintenant !"
"Vous devez déjà 10 Gallions, les filles !" avertit Blaise avec un sourire.
Fleur pleurait, désormais. Elle ne cessait de retourner vers le bord du Lac et de pointer l'eau du doigt avec colère.
"Miss Delacour a été attaquée par des Strangulots et a été contrainte d'abandonner la Tâche." informa Dumbledore de sa voix amplifiée. "Quant aux autres Champions, ils sont presque arrivés à l'endroit où sont retenus leurs êtres chers. Apparemment, Mr. Potter serait en tête !"
La tribune des Gryffondors explosa dans un hurlement de joie, tandis que les autres Maisons montraient leurs déceptions en criant ou en levant leurs poings. Blaise tapa contre la rambarde du gradin, prenant très à cœur la victoire de Krum.
Drago, lui, n'en avait plus rien à faire de la compétition. Il attendait simplement une seule chose : que Granger remonte à la surface. Et si Krum se faisait emporter dans le fond par un Strangulot au passage, il ne s'en plaindrait pas le moins du monde.
La dernière minute avant la fin de l'épreuve sonna sur la grande horloge de la tribune officielle. Le "tic tac tic tac" qu'elle produisait était insupportable. Krum était censé être l'un des joueurs de Quidditch les plus forts de la planète, et il ne savait pas nager correctement ?!
Fleur Delacour refusait de se faire examiner par l'infirmière, malgré sa jambe en sang. Elle voulait à tout prix revenir dans l'eau, en se débattant et en hurlant si fort que ça glaçait le sang de Drago. Si elle avait si peur pour sa sœur, que se passait-il vraiment au fond du Lac ?
La cloche sonna, indiquant la fin de l'épreuve. Tout le monde était cramponné à la tribune, l'impatience palpable dans l'air.
Le premier Champion à revenir fut Diggory. Il fut acclamé par tous les Poufsouffles et la moitié des Serpentards. Il tenait Cho Chang par le bras, et à l'instant où elle retrouva l'air libre, elle ouvrit les yeux et toussa, puis fit un grand sourire à Cedric.
Malgré les vents glacials autour des tribunes, Drago sentait la sueur coller ses vêtements contre sa peau. Il n'avait pas détaché son regard de la surface du Lac depuis qu'il avait appris que Granger était retenue prisonnière en dessous. Il commençait à avoir sérieusement le tournis, parce que ses craintes se réalisaient : et s'il y avait un problème ?
Soudain, la tête difforme de requin de Krum brisa la surface du lac.
Il était seul.
Drago sentit ses jambes faiblir sous son poids.
Granger était perdue, Granger était…
Il aperçut alors enfin les cheveux de Granger sortir de l'eau, puis son visage. Krum l'aida à se hisser en dehors de l'eau en la tenant par la taille. Elle ouvrit les yeux et prit une grande inspiration, puis regarda partout autour d'elle dans un geste paniqué. En la voyant, Drago ressentit une vague de soulagement telle qu'il n'en avait jamais connu : il crut qu'il allait s'évanouir sur le champ. Il n'entendit pas ce que Blaise hurla. Il ne remarqua même pas que Pansy le regardait, inquiète.
Il observa Granger nager jusqu'à la tribune et remonter, aidée par Krum qui retrouvait petit à petit sa figure normale. Dès qu'elle eut retrouvé la terre ferme, Drago s'autorisa à détendre tous ses muscles tendus par l'angoisse et il sourit malgré lui. Elle était saine et sauve.
Il était tellement content de la revoir qu'il ne fit pas attention au fait que c'était Krum qui l'aidait. Madame Pomfresh enveloppa Granger dans une serviette épaisse et lui proposa de s'asseoir. Ses cheveux étaient trempés et sa robe dégoulinait. Elle s'assit à la place indiquée et observa rapidement les tribunes.
Drago sentit son corps se réchauffer quand elle le trouva dans la foule. Ils échangèrent un regard de loin. Seulement sa tête dépassait de la serviette et ses cheveux mouillés encadraient son visage. Le temps qu'ils se regardent, une fraction de seconde, il eut l'impression qu'elle fut soulagée aussi, avant qu'elle ne reporte son attention sur l'eau.
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Hermione
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C'était une sensation très étrange. Une seconde avant, elle était dans le bureau de McGonagall, réchauffée par les flammes de la cheminée, et une seconde plus tard, elle se retrouvait dans de l'eau glacée, le cerveau cotonneux, accrochée à Viktor et observée par des centaines de personnes.
Elle s'agrippa aux épaules de Viktor et réprima un frisson en voyant son visage reprendre sa forme normale. Il s'était visiblement métamorphosé en requin, ce qui était assez logique car il était assez âgé pour avoir étudié les métamorphoses humaines. Ils nagèrent jusqu'à l'estrade et Viktor l'aida à grimper dessus. Elle se fit tout de suite accueillir par Madame Pomfresh qui l'enroula dans deux serviettes épaisses :
"Miss Granger ! Comment allez-vous ? Des vertiges ?"
"Non, juste froid." dit-elle d'une voix enrouée.
Elle s'assit à côté de Cho Chang, Cedric, Fleur et Viktor. Ses oreilles étaient bouchées à cause de l'eau, elle avait du mal à entendre les exclamations du public autour du lac, comme un brouhaha distant. Elle plissa les yeux et, par réflexe, chercha un certain blond dans la tribune verte. Il la regardait déjà, le seul du rang des Serpentards à ne pas observer l'eau. Ils se regardèrent de loin et Hermione se rappela qu'il avait été sa dernière pensée avant qu'elle ne se fasse endormir. Ce souvenir la rendit un peu honteuse, et elle détourna vite les yeux.
Seamus, Dean et Neville s'avancèrent alors vers elle avec des grands sourires :
"Bien joué Hermione !" lança Dean. "Alors, comment c'était ?"
Hermione ne comprenait pas vraiment ce qu'elle avait fait pour mériter des félicitations, mis à part dormir sous l'eau. Elle haussa les épaules et Seamus s'accroupit à côté d'elle pour lui frotter le dos. Elle mourrait de froid.
"Tenez !" dit l'infirmière en lui tendant une fiole, qu'Hermione reconnut comme de la Pimentine.
Hermione la but en entier, et sentit ses oreilles se déboucher. Sa gorge lui faisait un peu mal.
"Où est Harry ?" demanda-t-elle immédiatement à Neville. "Il a fait l'épreuve ?"
"Oui, il a pris une Branchiflore." dit Neville qui scrutait l'eau à la recherche du garçon. "Il était censé récupérer Ron, mais ils ne sont toujours pas remontés. Il a dépassé la limite de temps."
Elle se pinça les lèvres en étudiant l'eau devant elle. Harry et Ron auraient déjà dû être là. Pourquoi Harry mettait-il autant de temps à récupérer Ron ? Elle espérait qu'il n'avait pas eu de problèmes pour remonter.
Hermione était très frustrée de ne pas connaître cette plante. Elle n'avait pas pensé à chercher dans la section de Botanique, ou de demander des conseils à Neville, ce qu'elle trouvait maintenant parfaitement stupide.
Elle se souvint alors soudainement de la présence de Viktor à côté d'elle, à qui elle n'avait toujours pas parlé depuis qu'il l'avait repêchée.
"Merci de m'avoir récupérée, Viktor." dit-elle au garçon, qui avait retrouvé son visage.
Étrangement, Krum ne souriait pas. Au contraire, depuis qu'ils étaient revenus sur l'estrade, il affichait un air sombre qu'Hermione ne reconnaissait pas. Il regarda autour de lui et sembla déterminer qu'il y avait trop de monde pour discuter (il fallait dire que l'estrade était bondée, entre tous les Champions, leurs proches et le jury), alors il se leva et tendit la main pour emmener Hermione à l'écart.
Elle prit sa main et se laissa guider à l'autre bout de la tribune, de l'autre côté du lac. Elle n'était pas très à l'aise à l'idée de s'éloigner de là où Harry et Ron pouvaient resurgir à n'importe quel moment, mais la curiosité de savoir ce qu'il voulait lui dire l'emportait.
"Tu ne devrrrais pas me rrremerrrcier, Herrrmion." annonça Krum à voix basse.
Le bulgare secoua la tête plusieurs fois, comme s'il s'en voulait. Elle fronça les sourcils :
"Pourquoi je ne devrais pas te remercier ? Tu m'as retrouvée et aidée à remonter, je me fiche que tu ne sois pas arrivé le premier…"
"Ce n'est pas pourrr ça…" coupa-t-il, penaud. "Je t'ai blessée. J'étais en rrrequin, je ne contrrrôlais pas assez ma forrrce et… Je t'ai morrrdue sans fairrre exprrrès en voulant te détacher…"
Il lui montra son bras, qu'elle enleva de la serviette. En effet, elle n'avait pas remarqué qu'une plaie s'était formée, de son poignet jusqu'à son avant bras. Elle n'était pas profonde et ne saignait pas beaucoup, mais Krum observait la blessure comme s'il lui avait arraché la jambe.
"Oh." dit-elle en constatant la plaie. Elle remit son bras sous la serviette et le compressa contre la serviette pour stopper le saignement. "Ne t'en fais pas, ce n'est rien."
"Tu devrrrais le dire à l'infirrrmièrrre, Herrrmion." dit Viktor, accablé.
"Non, non, ça te ferait perdre des points. Je vais bien, ne t'en fais pas."
Viktor fronça les sourcils mais acquiesça tout de même. Il continuait de fixer son bras caché par la serviette.
"Tu sais Herrrmion…" commença Viktor en fixant le plancher de l'estrade. "Je voulais te dirrre… Je n'ai jamais rrressenti quelque chose d'aussi forrrt pour une fille…"
Hermione sentit son visage rougir intensément d'un seul coup. Heureusement, Viktor regardait toujours par terre.
"Je trrrouve que tu es une fille exceptionnelle, et je t'aime beaucoup. Je ne sais pas si c'est rrréciproque, en tout cas, j'aimerrrais beaucoup que tu viennes me voir cet été en Bulgarrrie."
"Oh… Viktor, je suis très touchée, merci beaucoup. Je trouve que tu es un garçon vraiment incroyable aussi." avoua Hermione à voix basse. "J'aimerais beaucoup venir te voir en Bulgarie, il faudrait juste que je demande à mes parents s'ils seront d'accord…"
"C'est vrai ?" demanda le garçon en levant soudain les yeux vers elle, emplis d'espoir et de soulagement.
"Oui, pourquoi pas !" dit-elle, en essayant de ne pas penser à la réaction de Ron s'il apprenait qu'elle partait en Bulgarie cet été pour visiter Viktor.
"Tu as encorrre le temps de décider, je ne veux pas prrrécipiter les choses pour toi… Je voulais que tu le saches. Je n'ai jamais rrressenti ça, avant."
Hermione lui fit un sourire et Viktor l'enlaca doucement, avant de lui déposer un baiser sur son front, juste sous ses cheveux. Puis, ils retournèrent au bord de l'estrade. En l'espace d'une dizaine de minutes, elle avait ressenti tellement d'émotions qu'elle se sentait un peu mal. Elle ne savait plus si elle était comblée ou terrifiée. En revenant, elle comprit qu'Harry n'était toujours pas remonté et l'inquiétude refit surface :
"Où est Harry ?" demanda-t-elle à Neville et Dean en se rasseyant. "Si l'épreuve est terminée, pourquoi personne ne va les chercher ?"
"Aucune idée." avoua Dean. "Peut-être qu'il s'est perdu dans le Lac ?"
Cette perspective n'était pas rassurante du tout. Assise ainsi sur l'estrade, elle avait une vue parfaite du lac, et il paraissait bien plus immense que d'habitude. Hermione regarda l'horloge et constata que le temps imparti était terminé depuis longtemps déjà.
"Mais où sont…"
Elle n'eut pas le temps de finir sa phrase, car trois têtes sortirent du Lac à cet instant. Une était rousse, une blonde, et une aux cheveux noirs. Harry inspira de grandes bouffées d'air frais avec délectation, comme s'il avait manqué d'oxygène depuis un moment. Ron et Gabrielle Delacour ouvrirent les yeux, et crachèrent de l'eau en s'habituant doucement à la lumière du jour.
"Ils sont là ! Ils sont là !" hurla Fleur en se débattant de l'emprise de Madame Maxime.
Harry et Ron aidèrent la fillette à nager jusqu'à l'estrade. Percy, qui était devenu un peu blême depuis que son frère n'était pas revenu, les aidèrent à remonter. Ron partit avec Percy pour trouver une couverture. Harry était dans un sale état, mais tellement soulagé d'être revenu qu'il avait un grand sourire au visage.
Hermione se leva quand il s'avança vers elle :
"Harry ! Harry, tu as réussi ! Bravo, bravo !"
Elle enleva sa propre serviette et l'utilisa pour couvrir Harry. Il tremblait de tout son corps et était toujours hors d'haleine.
"J'ai fini dernier, Hermione…" dit-il de sa voix cassée.
Hermione, tellement heureuse de revoir son meilleur ami, se propulsa en avant et l'embrassa sur le front :
"Avant-dernier ! Fleur est dernière, elle s'est fait attaquer par des Strangulots !"
Harry sourit un peu. Viktor posa alors sa main sur l'épaule d'Hermione :
"Tu as un scarrrabée dans les cheveux, Herrrmion."
Elle chassa l'insecte de ses cheveux rapidement. Fleur arriva à ce moment-là et s'accroupit à côté d'Harry, qui tentait toujours de retrouver son souffle :
"Tu l'as sauvée !" s'écria-t-elle. Elle avait des égratignures partout : sur les bras et les jambes, et sa robe était déchirée. "Tu l'as sauvée, ma petite soeur ! Alors que ce n'était pas à toi de le faire !"
"Ouais…" dit Harry, visiblement mal à l'aise.
Fleur s'approcha de lui et prit son visage entre les mains, et lui déposa deux baisers sur chaque joue en répétant "merci, merci !". Harry rougit instantanément. Elle se releva ensuite et s'approcha de Ron, qui était toujours avec Percy, qui insistait pour lui remettre une serviette supplémentaire.
"Et toi aussi, tu as aidé !"
"Euh, oui, oui…" dit Ron, surpris que Fleur lui donne soudain de l'intérêt.
Fleur réitéra son geste et embrassa Ron sur les joues. Ce dernier afficha un air simplet qui agaça Hermione.
"Mesdames et messieurs, nous venons de prendre une décision." annonça alors Dumbledore avec un Sonorus, pour que les tribunes puissent entendre. "Merrow Murcus, chef des êtres de l'eau, nous a fait le compte rendu détaillé de ce qui s'est passé au fond du Lac et, en conséquence, voici les notes, sur cinquante, que nous avons décidé d'accorder à chacun des Champions : Miss Fleur Delacour, bien qu'elle ait fait un excellent usage du sortilège de Têtenbulle, a été attaquée par des Strangulots en approchant du but et n'a pas réussi à délivrer sa prisonnière. Nous lui accordons vingt-cinq points."
Quelques personnes du public applaudirent, accompagnées par les élèves de Beauxbâtons.
"Mr. Cedric Diggory, qui a également fait usage du sortilège de Têtenbulle, a été le premier à revenir avec sa prisonnière, bien qu'il ait dépassé d'une minute le temps imparti. Nous lui accordons par conséquent quarante-sept points."
Les tribunes de Poudlard explosèrent toutes dans un tonnerre d'acclamations. Cedric leva la main pour les remercier et le reposa ensuite sur les épaules de Cho pour la tenir contre lui.
"Mr. Viktor Krum a eu recours à une forme incomplète de métamorphose, qui s'est quand même révélée efficace puisqu'il a été le deuxième à ramener sa prisonnière. Nous lui accordons quarante points."
Hermione applaudit avec les autres pour féliciter Viktor qui hocha la tête en guise de remerciement. Ron, lui, garda ses mains le long de son corps.
"Pour ce qui est de Mr. Harry Potter…" continua Dumbledore, et tout le monde redevint silencieux. "Il a utilisé d'une manière très judicieuse les propriétés de la Branchiflore. Il est revenu le dernier et bien après la limite de temps. Toutefois, Merrow Murcus nous a informés que Mr. Potter a été le premier à arriver auprès des prisonniers et que son retard est dû à la détermination qu'il a manifestée de ramener tous les prisonniers, pas seulement le sien. La plupart des juges pensent donc que cette attitude démontre une grande force morale et aurait mérité la note maximum. Il obtient cependant quarante-cinq points."
Hermione ouvrit grand la bouche de surprise. Harry était ex-aequo avec Cedric ! Elle se tourna vers son meilleur ami qui affichait la même tête qu'elle. Ron, Harry et elle éclatèrent alors de rire, probablement parce que tout le stress et l'adrénaline étaient soudain retombés, puis applaudirent avec les autres. Le vacarme que produisaient tous les applaudissements du public faisait trembler l'estrade.
"Bravo Harry ! Mon dieu, tu as réussi !" s'égosilla Hermione en serrant Harry dans ses bras.
"La troisième et dernière Tâche se déroulera le 24 juin au coucher du soleil." annonça Verpey par-dessus le bruit fracassant des applaudissements et des hurlements. "Les Champions seront informés de la nature de cette Tâche un mois exactement avant sa date. Merci à tous du soutien que vous avez manifesté aux Champions."
Hermione ressentit la boule de stress et d'angoisse qui s'était formée depuis quelques jours s'évaporer en entendant la date lointaine de la troisième Tâche. Comme d'habitude, Harry avait réussi à s'en sortir en arrivant premier, sans avoir le moindre plan avant la veille de l'épreuve. Elle comprenait un peu mieux pourquoi Drago insistait autant sur le fait qu'Harry était toujours chanceux.
Elle enlaca une dernière fois son meilleur ami, puis ils se levèrent en même temps que le public pour aller tout raconter à Hagrid.
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Le reste de la journée passa comme dans un rêve. Harry, Ron et Hermione se rendirent chez Hagrid pour déjeuner, et surtout revenir sur l'épreuve qui venait de se dérouler. Hagrid leur raconta ce qu'il avait vécu depuis le public, puis Harry leur expliqua que c'était Dobby qui lui avait trouvé la fameuse plante, une dizaine de minutes seulement avant le début de l'épreuve.
Puis, il leur relata le récit du lac, sa rencontre avec les Strangulots et les êtres de l'eau, sa volonté de sauver tout le monde, et sa remontée sans oxygène. À la fin, ils avaient dévoré tous les biscuits d'Hagrid. Ils retournèrent ensuite au Château où Harry se faisait acclamer de toutes parts, excepté par les Serpentards.
Ils passèrent l'après-midi à raconter, encore et encore, ce qu'il s'était passé sous l'eau. Ron prenait part au récit en inventant des détails pour se faire bien voir, ce qui faisait beaucoup rire Harry et Hermione. Après le dîner (où Harry avait dû répondre à toutes les questions des Gryffondors et reçut une centaine de félicitations), Fred et George annoncèrent qu'une fête était organisée dans la Salle Commune pour fêter la première place d'Harry.
Hermione monta les escaliers dans une sorte de transe mêlant l'euphorie et l'excitation. Il s'était passé tellement de choses en une journée qu'il avait été difficile de s'arrêter pour respirer un peu. Elle était à la fois surexcitée et épuisée, ce qui donnait un mélange étrange, le tout ajouté à de longues heures de sommeil artificiel. Sa peau était sans cesse parcourue de frissons. De quoi, elle n'aurait su le dire.
Ron marchait en face d'elle et racontait comment il avait dû se battre contre une sirène dans son sommeil, un récit complètement inventé que Neville avait du mal à suivre. Hermione l'écoutait en levant les yeux au ciel.
Une fois arrivés au septième étage, Dean annonça le mot de passe au tableau qui pivota. Hermione aperçut alors Viktor à gauche, tout au fond du couloir, un peu caché par la pénombre.
"Allez-y sans moi, je vous retrouve dans cinq minutes !" lança Hermione aux Gryffondors.
Ils ne firent même pas attention à elle et entrèrent tous par le tableau sans se retourner. Elle s'avança vers Viktor qui avait tourné dans le couloir adjacent, entre la classe 7C et un tableau d'une femme au chapeau pointu qui dormait.
"Viktor ? Qu'est-ce que tu fais là ?" demanda Hermione.
"Je voulais te voirrr pour te demander comment allait ton brrras."
Hermione avait presque oublié l'état de son bras. Elle releva la manche de la robe de sorcière sèche qu'elle avait emprunté après l'épreuve. La blessure était beaucoup plus nette, mais tuméfiée par endroits.
"Tu devrrrais vraiment fairrre nettoyer ça, Herrrmion." dit Krum en voyant la plaie sur son poignet. "Je m'en fiche que ça m'enlève des points."
"Ne t'en fais pas, je ne sens rien." assura Hermione en remettant sa manche par-dessus. "Ginny m'aidera à la nettoyer."
Viktor ne semblait pas convaincu.
"Je t'emmène à l'infirrmerrrie." décréta-t-il. "Ça ne prendrrra que cinq minutes !"
"Tu as eu des blessures bien plus importantes au Quidditch !" dit Hermione avec un rire. "Ce n'est qu'une égratignure, je survivrai."
"J'ai toujourrrs été soigné aprrrès mes matchs." dit Viktor avec un sourire.
"Je sais. Je t'ai déjà dit que j'étais venue à la finale de la Coupe du Monde de Quidditch, l'été dernier ?"
"C'est vrrrai ?" demanda Viktor, surpris. "Je crrroyais que tu n'aimais pas le Quidditch."
"Ce n'est pas trop mon truc, mais la famille de Ron m'y a emmenée. On était même dans la tribune officielle."
"Pourrrquoi ?"
"Le père de Ron travaille au Ministère de la Magie, donc il avait réussi à avoir des places. Il y avait Harry, aussi ! Il adore le Quidditch, et il est Attrapeur, comme toi !"
Le visage de Viktor se referma dès qu'elle fit allusion à Harry.
"Ah… Potterrr… Je vois que tu l'aimes beaucoup." dit-il.
"Oui, mais c'est mon ami." corrigea Hermione aussitôt. "Je ne ressens rien pour lui."
"Tu le prrromets ?" demanda Viktor.
Hermione trouvait ça fou de se dire que ce garçon, bien plus âgé, costaud et grand, pouvait se sentir menacé par Harry, alors qu'Harry était beaucoup plus intimidé par Viktor. Les garçons étaient vraiment étranges. Elle trouvait aussi bizarre qu'autant de gens soient persuadés qu'elle ressentait quelque chose pour Harry, alors qu'elle n'avait rien d'autre que des sentiments fraternels à son égard. Le fait que Viktor ne s'inquiète pas pour Ron était presque ironique.
"Je le promets, c'est juste mon meilleur ami."
Viktor hocha la tête.
"J'étais sincèrrre quand je disais que je n'avais jamais rrressenti quelque chose d'aussi forrrt pourrr une fille, Herrrmion." poursuivit Viktor. "Mais je comprrrends aussi qu'une fille aussi incrrroyable que toi puisse êtrrre convoitée par beaucoup de garrrçons…"
"Ce n'est pas le cas." dit-elle.
"Même le garrrçon de Serrrpentarrrd ? Malefoy ?" demanda Viktor.
Hermione sentit son cœur battre anormalement contre sa poitrine.
"Quoi ?"
"J'ai vu que tu passais beaucoup de temps avec lui, à la Bibliothèque. Je ne t'en veux pas, Herrrmion, mais je veux juste comprrrendre ce que tu rrressens."
"Je ne… Je ne ressens rien pour Malefoy." bafouilla-t-elle, choquée. "C'est juste… Un ami. Je révise avec lui à la Bibliothèque, c'est tout."
"Comme l'autre garrrçon, Neville ?"
"Voilà, exactement." dit Hermione, bien que ça n'avait rien à voir.
En un éclair, elle vit dans sa tête Drago Malefoy, dans sa tenue de Serpentard, en train de rire à la table ronde de la Bibliothèque, leur banc, sa crise de jalousie au Bal, son sourire en coin, la manière dont il prononçait son nom, "Bonsoir Granger", sa vision dans la boule de cristal, les insultes, leurs deals, leurs secrets, tout ce qu'elle n'oserait jamais avouer à personne.
Ça n'avait rien à voir avec Neville, elle le savait très bien. Mais elle ne pouvait pas l'admettre à Krum.
"Alorrrs…" commença Viktor en s'approchant d'elle, aussi timide qu'elle. "Est-ce que je peux… T'embrrrasser ?"
Le souffle d'Hermione se bloqua dans sa poitrine. Elle avait toujours eu conscience que ce moment arriverait. Elle savait que Viktor était attiré par elle et qu'ils passeraient à "l'étape supérieure" à un moment donné. Mais elle n'avait pas anticipé que ça soit ce soir-là.
Hermione avait toujours été une fille curieuse, ce qui lui avait été reproché de nombreuses fois. Elle pesa le pour et le contre, en essayant de penser raisonnablement à ce qu'un baiser engendrerait. Elle fit une liste mentale :
Ron n'aurait pas à être au courant.
Ça lui donnerait de l'expérience dans ce domaine dont elle ne connaissait rien.
Peut-être même que ça ferait naître en elle des sentiments qu'elle n'avait pas réalisé avoir pour Viktor.
Elle pourrait se vanter auprès de Lavande et Parvati.
Alors, elle hocha timidement la tête. Elle ferma les yeux, essayant de regrouper les connaissances qu'elle avait sur le sujet : devait-elle mettre ses mains autour de son cou ? ou… mettre sa langue ?!
Elle décida de se laisser faire. Viktor s'approcha d'elle. Elle sentit son souffle chaud contre son visage, juste avant qu'il ne pose ses lèvres sur les siennes. Au début, il les pressa simplement, puis leurs lèvres s'entrouvrirent légèrement. Elle ressentit quelques frissons sur ses bras, et dans le creux de son ventre, comme lorsqu'elle trouvait une réponse à une question ardue, ou qu'elle recevait bonne nouvelle.
Hermione n'avait jamais embrassé de garçon de sa vie. Elle ne savait pas vraiment quoi en penser. C'était plaisant, intime, mais elle réfléchissait tellement à ce qu'elle devait faire qu'elle ne profitait pas vraiment du baiser en lui-même. Viktor était pareil que lorsqu'il dansait : c'était lui qui menait, lui apprenant comment faire en le faisant. Au bout d'une minute, elle osa capturer la lèvre inférieure du garçon avec sa bouche. Il sembla apprécier. Son haleine avait un goût de tarte à la poire, le dessert qui avait été servi au dîner. C'était agréable. Il ne la touchait pas : il avait posé une main sur le mur derrière elle, n'osant sûrement pas aller plus loin.
Il finit par arrêter de lui-même. Hermione rouvrit les yeux et détailla son visage : il n'avait jamais été aussi proche d'elle physiquement. Elle pouvait voir les fossettes qui se creusaient un peu sur ses joues quand il souriait, et les cicatrices blanchâtres sur son menton et son arcade sourcilière. Il devait se pencher en avant, parce qu'il était beaucoup plus grand qu'elle.
"Bonne nuit, Herrrmion." dit-il dans un murmure. "N'oublie pas de soigner ton brrras, s'il te plaît."
Il lui prit la main et déposa un baiser sur le dos, comme lorsqu'ils avaient ouvert la danse. Elle sourit, et il partit vers les escaliers.
Hermione resta de longues minutes dans le couloir, à ressasser ce qu'il venait de se passer. Elle était supposée ressentir toutes les choses que les héroïnes de ses livres racontaient : les papillons dans le ventre, les frissons dans le dos, un sourire impossible à contrôler. Bizarrement, elle ne ressentait rien d'autre qu'un sentiment de satiété. Elle était satisfaite de l'avoir fait, sans plus.
Elle retourna dans la Salle Commune pensive. Quand le tableau pivota, la fête battait déjà son plein. Fred fut près d'elle dès qu'elle passa le tableau :
"Alors Mione ? T'étais où ?"
"Euh…"
"Tiens, bois ça ! Le Champion est de l'autre côté !"
Il désigna Harry du doigt et lui tendit une Bièraubeurre, avant de partir rejoindre Lee Jordan et Angelina Johnson près du phonographe. Hermione resta plantée là quelques secondes, incapable de savoir où aller. Elle finit par rejoindre Ginny, qui était assise dans un fauteuil avec une amie de troisième année et Pattenrond sur les genoux.
"Hey Hermione ! Comment ça va ?" demanda Ginny.
Pour toute réponse, Hermione but une grande gorgée de Bièraubeurre. Ginny écarquilla les yeux :
"Oula ! Qu'est ce qui t'arrive ?"
Hermione déballa tout ce qu'il venait de se passer avec Viktor à voix basse. Ginny réagit exactement comme Hermione l'avait anticipé : d'abord un choc, puis par un conseil :
"Ne t'en fais pas, tout le monde le fait. C'est normal que tu n'aies rien ressenti, c'était ton premier. Il embrassait bien ?"
"Euh… Oui, je crois. Comment je suis censée savoir ?"
"Aucune idée, je n'ai jamais embrassé de garçon non plus." admit Ginny avec un rire. "L'important c'est que l'aie fait avant Ron !"
"Oui… J'imagine…"
Hermione ne savait pas vraiment quoi penser. Elle avait passé une journée trop éprouvante pour s'ajouter un problème supplémentaire. Ginny et elle décidèrent donc de profiter de la fête, et elle mit Viktor dans un coin de sa tête pour ne pas angoisser en repensant à ce moment quelque peu embarrassant.
Elles dansèrent un peu, puis mangèrent des snacks que Fred et George avaient apporté des cuisines. Hermione enchaîna les Bièraubeurres sans s'en rendre compte. Au début, elle but simplement deux bières, parce qu'elle aimait le goût de la crème par dessus. Puis, elle réalisa que Fred et George avaient pris l'habitude de toujours lui en remettre une dans la main dès qu'elle avait terminé sa bouteille.
Plus les minutes s'écoulaient, plus sa gêne était dissipée. La musique était soudain beaucoup plus entraînante (ou alors elle ne l'avait simplement pas remarquée au début ?) et elle n'était même pas embarrassée de danser avec Ginny. Elle parla à Ron et Harry normalement (peut-être un poil trop enjouée ?), et dansa même avec Fred une sorte de valse endiablée qui lui fit renverser sa Bièraubeurre sur Lavande. Elle s'en resservit une et but la moitié d'une traite.
Vêtue d'un t-shirt noir et de sa jupe d'uniforme (quand est-ce qu'elle avait retiré sa robe de sorcière ?) Hermione s'amusa ensuite à jouer à une Bataille explosive en compagnie de George, Lee, Angelina et Katie Bell. À chaque fois qu'une carte explosait, la personne qui l'avait posée devait boire une gorgée de bière. Hermione commençait à ne plus se souvenir du nombre de Bièraubeurres qu'elle avait bu.
Harry et Ron finirent par aller se coucher, suivis par plusieurs élèves qui étaient trop fatigués pour continuer à danser. Ce n'était pas le cas d'Hermione, qui dansa avec Ginny, Fred et George encore longtemps, et à boire des Bièraubeurres. À la fin, quand tout le monde s'était écroulé dans les canapés, Hermione avait vraiment le vertige. Elle posa sa bière sur la table et faillit trébucher en marchant vers le fauteuil.
"Je vais me coucher, je suis épuisé." annonça Fred en se levant, les cheveux tout décoiffés à cause de la danse. "Très bonne soirée, merci à tout le monde d'avoir tenu aussi tard !"
Hermione n'avait aucune idée de l'heure qu'il était. Ginny s'était endormie dans le canapé devant la cheminée éteinte. George monta à son tour, puis Lavande, puis Parvati, puis Lee, et au final, il ne restait plus personne dans la Salle Commune.
Elle se sentait… bien. Étrangement bien. Elle avait l'impression de flotter. Et ses pensées n'étaient pas claires, comme elles l'étaient d'habitude. Là, tout partait dans tous les sens, elle ne contrôlait plus rien.
Hermione se leva subitement. Elle avait très envie d'aller dehors. Il faisait chaud ici, à force de danser, et du feu dans la cheminée. Et à cause de la bière ! Elle devait absolument aller dehors. Peut-être sentir l'air frais. Oh, elle pourrait aller sur le banc ! Leur banc, comme il l'avait appelé. Hermione sourit. Pourquoi elle souriait ? Elle n'en avait aucune idée.
Elle posa aléatoirement une couverture sur Ginny et rit en la voyant dormir, sans savoir pourquoi. Elle ne savait plus comment contrôler son visage. C'était donc ça, être bourrée ? Elle avait déjà vu ses parents bourrés, quand ils étaient rentrés des fêtes, mais elle n'avait jamais essayé. Jamais, jamais. Elle sortit par le tableau et n'écouta pas la Grosse Dame qui piaillait quelque chose dans son dos. L'heure, peut-être ?
Elle avait faim. Ou soif. Elle avait bu trop de Bièraubeurres, le goût caramélisé remontait dans sa gorge et elle avait envie de vomir. Elle avait envie de rire, aussi ! Elle descendit les escaliers en se tenant à la rampe pour ne pas tomber. Parfois, elle oubliait où elle était et devait prendre quelques secondes pour se souvenir qu'elle voulait aller sur leur banc. Tous ses muscles étaient engourdis par la danse. Et peut-être par l'eau.
Elle finit par arriver dans le hall principal, sans avoir aucune idée de comment elle avait fait pour arriver là. Elle n'avait pas l'impression d'avoir descendu les escaliers. Elle ouvrit la porte principale du Château et se prit une grosse bourrasque de vent frais sur le visage. Ça lui fit un bien fou. Elle n'avait plus envie de vomir, maintenant. Elle avança sur le chemin en ricanant. Puis, elle leva la tête, et son cœur bondit dans sa poitrine en voyant Drago, assis sur le banc.
Comme s'il savait qu'elle viendrait.
Elle sourit et avança jusqu'à lui.
