Avant toute chose, je tiens à vous remercier pour vos reviews! Ça me touche énormément ! Je n'ai pas le temps de répondre à tout le monde, mais sachez que je lis tout et que ça me fait trop trop plaisir! :)
Ensuite, j'ai reçu un commentaire sur la version anglaise qui me demandait si ma fanfiction allait devenir une Dreomione (Drago + Hermione + Théo), et même si j'essaie de dévoiler le moins possible ce qu'il va se passer dans MAG, je tiens à vous rassurer : Cette fic restera une Dramione jusqu'à la fin! Je n'ai pas du tout envisagé de relation amoureuse entre Théo et Hermione, et encore moins un triangle amoureux entre les trois. J'insiste sur les similarités entre Théo et Hermione pour montrer qu'ils pourraient avoir une très belle amitié, mais absolument pas comme un indice d'un couple futur! Je n'ai rien contre ce ship mais je trouve qu'il n'irait pas du tout dans ce contexte!
Je n'ai pas mis d'autres ships que Dramione dans les tags pour ne pas spoïler les couples "de second plan", mais je veux bien insister : Mon Ange Gardien est une Dramione, et le ship principal ne changera pas :)
Bonne lecture à tous et merci encore pour votre implication, ça me va droit au coeur :)
tw :
- crise d'angoisse (au début du chapitre)
- émétophobie (allusion de Daphné au petit-déjeuner des Serpentards)
.
.
Drago
.
.
Drago,
Je sais tout.
.
À l'instant où ses yeux parcoururent la première ligne, les jambes de Drago se dérobèrent sous son poids. Comme si sa tête s'était vidée de son sang et que la gravité ne le retenait plus. Il se rattrapa de justesse à la colonne du lit de Blaise. Sa main tremblait tellement que la feuille de parchemin s'échappa de ses doigts et tomba par terre.
Drago entendit son propre sang pulser contre ses tympans. La phrase de son père s'insinuait lentement dans son cerveau, mais c'était comme si elle était venimeuse, parce que la trace qu'elle laissait était douloureusement vive.
Son père savait.
Pour tout.
Il connaissait son secret. La première personne qui ne devait pas être au courant. Qui ne devait pas l'apprendre.
Les doigts de Drago étaient parcourus de spasmes et peinaient à rester accrochés à la colonne du lit.
Lucius l'avait appris… Tout le monde allait le savoir… Il allait se faire renier… Serait-il envoyé quelque part ? À Durmstrang ? Peut-être que Rogue pourrait l'aider ? Est-ce que Blaise accepterait de le laisser vivre chez lui ?
Est-ce que c'était la dernière fois qu'il voyait Granger ?
"Drago ? Drago !"
Drago cligna des yeux plusieurs fois et la tâche blanche devant ses yeux se précisa pour devenir le visage de porcelaine de Pansy. Ses yeux noirs étaient remplis de peur.
"Drago ? Ça va ?"
Il baissa le regard et vit qu'elle avait ramassé la lettre de son père. Sa vision se troubla de nouveau. Sa tête tournait tellement qu'il gémit involontairement.
"Drago, tu avais raison !" continua Pansy, avec une pique de panique dans la voix. "Drago, tu avais raison, le chien de Potter était bizarre, et ton père sait pourquoi maintenant !"
Il fronça les sourcils et se concentra sur la phrase de Pansy.
Le chien de Potter ?
"Qu-quoi ?" bégaya-t-il.
"Assieds-toi…" dit-elle, l'inquiétude perçant autant dans son ton que sur son visage. "Assieds-toi, tu fais une crise de panique…"
Drago tourna la tête, hagard, et fut surpris de constater que le poids qu'il sentait sur son épaule était en fait Théo qui le tenait tant bien que mal. Son visage était aussi pâle que celui de Pansy, les yeux grands écarquillés. Blaise s'était levé de son lit et le regardait avec la même urgence que les deux autres.
"Dray ? Tu te sens bien ?" demanda-t-il.
Il lui prit le poignet pour l'aider à s'asseoir sur son lit, la respiration toujours saccadée. Ils se mirent tous les trois devant lui, et le regardèrent comme s'il était soudainement devenu vert.
"Ça va." croissa Drago d'une voix rauque. "J'ai juste… Flippé."
"Putain, Drago, tu nous as fait peur !" explosa Théo, ses yeux bleus toujours écarquillés.
"Tu es tout pâle..." constata Pansy.
Elle posa sa main froide contre son front et grimaça en sentant à quel point il était brûlant.
"Drago…"
"Pourquoi t'as flippé comme ça ?" demanda Théo, qui prit la lettre de la main de Pansy pour lire le début. ""Je sais tout" ? C'est ça qui t'as fait peur ? Merlin, Drago, qu'est-ce tu caches comme secret pour flipper autant si ton père le découvre ?"
Drago ne répondit pas et utilisa la manche de son pull pour s'éponger le front.
"J'ai juste pas assez mangé." mentit-il, lamentablement. "J'ai dû faire un malaise…"
"Tu sautes toujours un repas sur deux et tu as mangé une part de tarte tout à l'heure." pointa Pansy d'une voix sévère. "Ce n'était pas un malaise."
"C'est la deuxième fois que tu t'évanouis devant nous." remarqua Blaise, les sourcils froncés par l'inquiétude.
"Je ne me suis pas évanoui, j'ai simplement perdu l'équilibre !" contesta Drago.
"Si Théo n'avait pas été derrière toi, tu te serais cogné la tête par terre." accusa Pansy.
Drago grommela et jeta un regard furtif à Théo :
"M'rci." lâcha-t-il froidement.
"Avec plaisir." répondit Théo d'un ton cynique. "Est-ce que tu veux que je reste derrière toi à chaque fois que tu lis une lettre, à partir de maintenant ?"
"Ta gueule." répondit Drago.
Il se prit la tête entre les mains et essuya sa peau couverte de sueur froide. Quand il eut enfin retrouvé un battement du cœur normal et que sa vision n'était plus floue, il s'autorisa à lever la tête. Il n'avait plus de vertiges.
"Alors, j'avais raison ?" demanda-t-il d'une voix rauque. "À propos du chien ?"
"Oui, apparemment ton père dit qu'il sait qui c'était…" dit Pansy, troublée. "Je n'ai lu que le début…"
Théo lui donna la lettre et Drago se mit à lire. Comme il savait que la lettre ne mentionnait pas Granger, l'écriture de son père lui parut tout à coup beaucoup moins sinistre.
Drago,
Je sais tout.
J'ai enfin percé le mystère.
Le chien à la gare de King's Cross m'a paru très anormal, et j'ai essayé de comprendre pourquoi il agissait si bizarrement avec Potter depuis tout ce temps. J'étais persuadé que quelque chose se tramait derrière cette scène. J'en ai parlé avec Alistair Crabbe, Perceval Parkinson et Théodore Nott, mais aucun d'entre eux ne connaissaient l'existence d'un chien dans l'entourage de Potter.
C'est là qu'est intervenu Peter Pettigrow, un ancien ami du père de Potter qui a rejoint les rangs des Mangemorts récemment. Il a donné l'information au Seigneur des Ténèbres que le chien était en fait un Animagus non répertorié. C'est en fait nul autre que Sirius Black !
"Sirius Black ?!" s'exclama Drago en plein milieu de sa lecture.
"Hein ? Qu'est-ce que Black a à voir là dedans ?" demanda Théo, perplexe.
"C'est lui !" s'écria Drago en regardant ses amis avec effarement. "Le chien est un Animagus, c'était Sirius Black !"
"Quoi ?!" hurlèrent Théo et Pansy en même temps.
"Tu veux dire que Sirius Black était à moins de dix mètres de nous à la gare ?!" cria Blaise. "Le tueur en série, Sirius Black ?"
"Continue à lire !" intima Pansy en pointant le parchemin du doigt. Drago se pencha de nouveau sur la lettre et la lut en silence.
Le Seigneur des Ténèbres nous a donné l'information, et nous a demandé de garder l'œil ouvert. Sirius Black a donc officiellement rejoint les rangs opposés. Inutile de te rappeler, Drago, à quel point cet homme est dangereux. Je suis sûr que tu te souviens de son instabilité. Si tu croises un chien noir, ne réfléchis pas, et cours. Je ne veux pas que tu te fasses blesser, ou pire, juste parce que tu n'appartiens pas du côté de ce maudit Potter et de tous ses amis impurs.
Ne te préoccupe pas plus que nécessaire, Drago. Maintenant que le Seigneur des Ténèbres connaît l'effectif de l'armée de Dumbledore, il sera plus facile de les intercepter. La situation ira mieux bientôt, je te le promets. En attendant, garde la tête baissée sans cesser d'observer autour de toi, et tiens-moi au courant de tout évènement qui te paraît suspect. Comment Potter est-il traité, à Poudlard ? Est-ce que la Gazette a réussi à faire ouvrir les yeux sur sa santé mentale détraquée ?
J'ai entendu dire que les derniers enseignants médiocres de Poudlard sont en voie de disparition. J'ai parlé avec Cornelius l'autre jour, et il m'a dit que ce balourd d'Hagrid avait été aperçu dans un camp de géants, probablement envoyé par Dumbledore pour les rallier à leur cause. Pathétique. Il est probablement déjà mort écrasé à l'heure qu'il est, et c'est tant mieux.
Mais de vraies personnes compétentes arrivent enfin à redresser le niveau de cette école ! Drago, il faut impérativement que tu te rapproches de Dolores Ombrage. Elle est la seule personne raisonnée de tout Poudlard ces derniers jours, et une excellente professeure. J'attends toi une excellente note en Défense Contre les Forces du Mal à tes BUSES.
Je t'envoie cette lettre tard pour ne pas risquer qu'elle se fasse lire par des regards indiscrets. Ne la montre à personne d'autre.
Je compte sur toi.
Transmets mes salutations à Pansy de ma part.
Cordialement,
Lucius Malefoy.
Drago termina la lettre et la tendit aussitôt à Pansy, Théo et Blaise qui la lirent avec empressement. Théo, qui lisait le plus vite des trois, afficha clairement la répulsion sur son visage en lisant le nom de son propre père, mais ne dit rien à voix haute. Il réagit, cependant, dès que ses yeux descendirent suffisamment bas :
"Dolores Ombrage, une excellente professeure ?!"
"C'est le seul truc que tu retiens de la lettre ?" s'indigna Drago. "Sirius Black est en liberté !"
"C'est quand même étrange..." dit Blaise en terminant la lettre quelques secondes plus tard. "Ton père te demande de pas t'inquiéter du tueur en série qui traîne avec Potter, parce qu'un autre tueur en série bien plus puissant est censé te protéger. C'est quand même incohérent."
"J'imagine qu'il vaille mieux avoir Tu-Sais-Qui de notre côté que Sirius Black." dit Drago. "S'Il est au courant de sa forme d'Animagus, il ne va pas faire long feu."
"En tout cas, je ne fais définitivement plus partie de "votre" côté." commenta Théo sarcastiquement en pointant la dernière phrase de Lucius. "Il ne me transmet plus de salutations."
Malgré son sarcasme, on pouvait percevoir de la tristesse dans sa voix. Drago relit la phrase en question, "Transmets mes salutations à Pansy de ma part.", et se sentit un peu honteux.
"À moi non plus, on dirait bien." renchérit Blaise d'un ton léger. "Ma mère n'a plus autant d'estime à ses yeux maintenant qu'elle s'est mariée trop de fois."
Théo parut rassuré par cette constatation.
"On s'en fiche d'à qui il dit au revoir." asséna Pansy en arrachant le parchemin des mains de Blaise. "On est ensemble, c'est le principal. On est du même côté."
Elle lut de nouveau la lettre. Elle avait dit ça naturellement, pourtant, cette perspective rassurait énormément Drago. Pendant la seconde de panique où il avait cru que son père le renierait, il s'était senti atrocement seul. Il comprenait un peu mieux l'état de Théo et sa volonté de gagner de l'argent, désormais. Le fait de savoir qu'il pourrait toujours compter sur eux était tellement réconfortant qu'il laissa échapper un soupir de soulagement entre ses lèvres.
"Alors, comme ça, Potter a retrouvé son précieux parrain." dit Blaise d'un ton calculateur. "Badass."
"Badass ?" répéta Théo, incrédule.
"Sirius Black est un tueur en série." expliqua Blaise, d'une voix beaucoup trop dégagée par rapport à la gravité de ses propos. "Il a réussi à s'échapper d'Azkaban, et il n'a pas été attrapé par les Mangemorts pendant toute sa cavale. Faut l'avouer, c'est badass."
"Mais je croyais qu'il voulait tuer Potter ?" demanda Pansy en fronçant les sourcils.
"Visiblement non. Peut-être qu'il était de son côté pendant tout ce temps."
Drago réalisa qu'à cet instant ce que la présence de Sirius Black sur le quai de la gare impliquait. Granger ! Elle était forcément au courant de la véritable identité de ce chien. Avait-elle passé tout un été avec un tueur en série ?! Il devait absolument lui en parler le lendemain.
"En tout cas, on a une bonne nouvelle dans cette lettre." dit Pansy avec un petit sourire narquois.
"Si tu dis qu'Ombrage est une bonne nouvelle Pansy, je te jure…" commença Théo au bord de l'impatience.
"Non, je voulais parler d'Hagrid." dit-elle en posant son doigt manucuré de noir sur le parchemin. "Ton père dit qu'il est probablement mort."
Drago haussa les épaules. Il s'en fichait éperdument du sort de ce vieil abruti. La seule chose qui le dérangeait avec cette information était la détresse que pourrait ressentir Granger si elle apprenait ça. Elle avait toujours apprécié Hagrid pour une raison qui lui échappait complètement.
"Ce n'est pas vraiment une bonne nouvelle." remarqua Théo d'un ton sec.
"Pourquoi ?" s'étonna Pansy en se tournant vers lui.
"Peu importe à quel point tu ne l'aimes pas, tu ne peux pas dire que sa mort est une bonne nouvelle." grinça-t-il entre ses dents serrées. "Souhaiter la mort de quelqu'un est une pensée atroce."
"C'est la guerre, Théo." répliqua Pansy d'un ton acerbe. "Il n'y a pas le temps pour pleurer les morts qui ne sont pas les nôtres."
Théo ouvrit la bouche pour répondre mais Blaise s'interposa entre les deux avec un soupir fatigué :
"Arrêtez de vous disputer, tous les deux. On s'en fout d'Hagrid, ne vous prenez pas la tête pour une raison aussi stupide. Dray, tu veux qu'on échange de lit ou tu peux te lever ?"
Drago se mit aussitôt sur ses pieds :
"Je vais très bien." dit-il férocement. "Je vais me coucher dans mon lit."
Et comme pour le prouver, il marcha à pas lourd dans tout le dortoir pour atteindre son lit à l'opposé. Blaise roula des yeux face à son entêtement et se mit sous sa couette. Théo regagna le sien, et Pansy retourna à la malle de Drago pour trouver un pyjama.
"Je n'arrive pas à croire que le chien en face de nous à la gare était en fait un homme." dit Blaise qui réprima un frisson.
Il y eut un silence, où tout le monde sembla digérer cette information désagréable.
"Est-ce qu'on peut choisir la forme qu'on veut pour devenir un Animagus ?" demanda Pansy.
"Non." répondit aussitôt Théo, comme si on lui avait posé une question en classe. "On ne peut pas choisir. Mais il est dit que l'animal dans lequel on se transforme nous ressemble, en termes de personnalité."
"Vous seriez quoi, vous ?" demanda Blaise.
"Je ne serai jamais un Animagus." répondit d'emblée Théo. "C'est trop compliqué à faire, et tu peux mourir si tu rates…"
"Je disais ça hypothétiquement, Théo." précisa Blaise.
"Oh."
"Moi, je serai un chien." dit Pansy sans hésiter.
Blaise arqua un sourcil.
"Comme Black ?"
"Pas vraiment." répondit-elle, la tête penchée sur la malle de Drago. "Plutôt un chien blanc, comme ceux de la race des montagnes des Pyrénées."
Drago ne fut pas surpris. Le chien était l'animal préféré de Pansy depuis la nuit des temps, elle connaissait toutes les races et leurs personnalités. Quand ils étaient petits, elle forçait tout le temps Drago à jouer aux classements de races de chien pour savoir laquelle ils préféraient. Son père avait cependant toujours refusé de lui en offrir un, sous prétexte qu'ils n'avaient pas de pouvoir magique particulier et que c'était donc "des animaux de Moldus."
"Ça serait trop classe." complimenta Blaise, bien qu'il ne devait pas connaître cette race en particulier.
"Et toi, Blaise, tu serais quoi ?" demanda Drago.
"Je sais pas trop…" dit-il, pensif. "Peut-être un renard… J'aime bien cet animal, c'est rusé."
Tout le monde approuva, parce que ça collait parfaitement à sa personnalité.
"Moi, je pense que je serais un loup…" commença Théo.
Blaise, Pansy et Drago éclatèrent de rire en même temps. Théo se renfrogna aussitôt :
"Quoi ? C'est solitaire, ça vit en meute, et c'est très intelligent !" se défendit-il d'une petite voix, qui n'avait rien à voir avec le hurlement du loup.
"C'est aussi extrêmement féroce. Ça chasse." nota Pansy qui souriait toujours.
Elle finit par opter par un t-shirt blanc et un short en tissu bleu et alla dans la salle de bains pour les enfiler, en laissant la porte entrouverte pour écouter le reste de la conversation.
"Théo, tu sais que je t'adore, mais tu n'as rien à voir avec un loup." dit Blaise avec un ricanement moqueur. "Tu as chouiné quand les elfes ont servi du lapin la dernière fois."
"Alors, qu'est-ce que je suis ?" demanda le concerné d'un ton impérieux.
"... Un hibou." tenta Drago.
Théo fit une moue déçue tandis que Blaise et Pansy (depuis la salle de bains) s'écriaient :
"Oh oui, trop bien trouvé !"
"Un hibou ?" s'indigna Théo. "Mais c'est tout pourri !"
"Attention, si Ébène entend ça, il va venir te picorer les yeux pendant la nuit." avertit Drago avec un sourire amusé.
"Pourquoi vous pensez que je serais un hibou ?" se lamenta Théo.
"Y a pas vraiment de raison, ça te va juste bien." répondit Blaise. "Et c'est intelligent aussi, bien plus que les loups."
Théo n'était pas convaincu. Il croisa les bras sur sa poitrine dans une posture d'enfant qui boude.
"N'importe quoi." grogna-t-il. "J'ai envie de devenir un Animagus juste pour vous prouver que je serais un loup."
Ils entendirent distinctement le rire de Pansy à travers la porte pendant qu'elle se changeait. La bouche de Théo se tordit, lui donnant une expression grognon.
"Et moi, je serais quoi ?" demanda Drago.
"Oh, toi, c'est évident." dit Blaise avec un sourire.
"Je sais que tu vas dire un dragon, mais je ne sais pas si ça me définit vraiment…" dit Drago.
Pansy sortit de la salle de bains avec son pyjama improvisé.
"Oh, je n'allais pas dire un dragon." coupa Blaise. "J'aurais plutôt dit… une petite fouine."
Ils éclatèrent tous les trois de rire en même temps. Ce fut au tour de Drago d'être grognon.
"Allez, c'est reparti…" marmonna-t-il en voyant Pansy en plein fou rire. "Ça suffit, je ne veux plus jamais parler d'animaux avec vous !"
Il se roula en boule dans son lit en grognant. À cet instant, quelqu'un toqua doucement à la porte du dortoir. Pansy se redressa, essuya les larmes de rire qui avaient perlé dans le coin de ses yeux et dit doucement :
"C'est Daphné. J'y vais. Bonne nuit les garçons !"
"Bonne nuit Pans' !" lança Théo avant qu'elle ne referme la porte.
La mention de Daphné avait réussi à remettre Blaise dans son état maussade. Théo ferma les rideaux de son lit à baldaquins après avoir souhaité une bonne nuit aux deux autres et Drago devina le faisceau de lumière à travers le tissu que sa baguette projetait pour qu'il puisse lire.
"Bonne nuit." lança Drago à son tour.
Blaise lui fit un geste de la main en réponse et ils fermèrent les rideaux verts de leurs lits. La conversation avec ses amis avait réussi à lui changer les idées après la lettre de son père.
Mais maintenant qu'il était seul, il ouvrit de nouveau le parchemin.
Il parvenait à distinguer quelques lignes écrites à la main malgré l'obscurité, s'il plissait les yeux. Il s'imaginait Lucius, assis à son immense bureau, en train de prendre le temps d'écrire une lettre à son fils pour l'informer et le mettre en garde. Contre toute attente, cette image le fit un peu sourire.
Il relut le passage qu'il avait survolé la première fois : "Si tu croises un chien noir, ne réfléchis pas, et cours. Je ne veux pas que tu te fasses blesser, ou pire, juste parce que tu n'appartiens pas du côté de ce maudit Potter."
Drago ressentit une vague d'affection pour son père en lisant ses mots. Même s'il aurait voulu être impassible, ne rien ressentir à l'égard de son paternel, Drago ne pouvait s'empêcher d'être un peu touché.
Son père s'inquiétait pour lui.
.
.
.
Le lendemain matin, Daphné avait toujours les yeux rouges au petit-déjeuner, et ses cheveux étaient dans un état catastrophique. Drago ne savait pas si c'était parce qu'elle avait trop bu, ou si c'était parce qu'elle était triste. Elle s'assit tout au bout de la table des Serpentards, et évita de regarder Blaise pendant tout le petit-déjeuner.
Pansy était dans un meilleur état, bien que son visage affichait un manque de sommeil évident. Elle s'assit en face de Drago en grognant.
"Comment va-t-elle ?" demanda aussitôt Blaise.
"Mal." répondit froidement Pansy. "Elle a pleuré toute la nuit."
"Mais pourquoi ?" demanda Blaise d'un ton implorant. "C'était y a deux mois…"
"Elle allait bien cet été." répondit Pansy dans une phrase entrecoupée de bâillements que Drago eut du mal à comprendre. "Mais elle t'as revu, et t'étais tout content, et elle a vu que tu prenais bien la rupture… Et ça l'a énervée."
"Évidemment qu'il prend bien la rupture, vu que c'est lui qui l'a quittée." fit remarquer Théo, mais en voyant le regard que lui jeta Blaise, il ajouta un "Désolé."
"Je sais que je ne dois pas me mêler de vos affaires et tout ça…" dit Pansy en se servant une grande tasse de café noir. "Mais est-ce que tu pourrais au moins me dire pourquoi tu l'as quittée ? Elle refuse de me le dire et j'ai du mal à la consoler quand je ne connais même pas la raison."
"Je n'aime pas être en couple." dit Blaise d'un ton détaché.
"Visiblement, ça n'a pas l'air de gêner les autres." commenta Théo en plongeant sa cuillère dans son porridge à la noisette.
"Quelles autres ?" demanda Drago, qui avait l'impression d'avoir loupé quelque chose.
Théo pointa sa cuillère en direction d'un groupe de filles, assises à la table en face des Serpentards. Elles étaient quatre et gloussaient à voix basse en montrant Blaise du doigt.
Pansy se retourna pour les regarder et soupira d'agacement.
"Pathétique." dit-elle, assez fort pour que les filles entendent.
Elles se turent aussitôt. Théo observa Pansy, puis sa tasse de café remplie à ras bord en plissant le nez.
"Tu as pu dormir, toi ?" demanda-t-il.
"Non." répondit Pansy froidement. Elle était manifestement de très mauvaise humeur. "Daphné a vomi jusqu'à 4h et a pleuré ensuite jusqu'à ce matin."
Blaise grommela en entendant ça, toujours aussi dévasté. Drago ne comprenait pas vraiment pourquoi il se sentait si mal. Ce n'était pas vraiment de sa faute.
Pansy but une énorme gorgée de café brûlant et prit une pomme pour la couper en petits morceaux.
"J'ai une tête affreuse." continua-t-elle. Son ton indiquait qu'elle était bien plus soucieuse de ça que de son manque de sommeil. "Je ne me suis même pas reconnue dans le miroir, ce matin."
Elle parut réfléchir une seconde et jeta un regard en biais à une fille blonde, assise un peu plus loin. Drago était pratiquement sûr que c'était la sœur de Daphné, mais elle avait tellement grandi que c'était difficile de la reconnaître. Quand Pansy retourna à son assiette, Théo lui lançait un regard d'avertissement. Drago ne comprit pas cet échange silencieux.
"Tu n'es jamais affreuse…" dit Blaise, bien qu'il avait la tête complètement tournée vers Daphné en bout de table et que ce n'était pas très clair à qui il s'adressait.
À ce moment-là, un bruissement d'ailes se fit entendre dans la Grande Salle et une centaine d'hiboux entrèrent par la fenêtre. Comme d'habitude, l'un des hiboux de la poste se posa devant Blaise, qui glissa une Noise dans sa bourse. Pansy arracha le journal de ses mains et scanna la première page avec hâte.
Ses yeux glissèrent le long de la couverture, puis elle le reposa sur la table dans un geste si brusque qu'elle faillit renverser le lait de Théo.
"Toujours rien !" s'écria-t-elle, furieuse. "Je pensais qu'elle serait enfin revenue de ses vacances maintenant…"
"Skeeter ?" devina Théo.
"Toujours pas d'article !" se lamenta Pansy. "Elle part toujours aux Bahamas pendant l'été, mais elle n'est toujours pas revenue…"
"Ce n'est pas elle qui écrit les horoscopes, d'habitude ?" demanda Drago.
Le visage de Pansy se crispa en entendant cette remarque.
"Si." siffla-t-elle. "Mais maintenant que Rita est en vacances, c'est Céleste Valpan qui la remplace, et elle n'y connaît rien !"
Pour le prouver, elle ouvrit abruptement le journal à la dernière page et lut à haute voix :
"Scorpions : Le travail sera plus rude que jamais, mais ne baissez pas les bras, tous vos efforts seront récompensés à la fin du mois. N'hésitez pas à vous reposer tout de même, et profitez de vos proches. Santé : Attention au vent automnal, il est trompeur ! Amour : Célibataires, vous profitez de votre bulle en solitaire en attendant que la personne que vous avez en vue fasse le premier pas. En couple, n'hésitez pas à lui donner des petites attentions pour raviver la flamme."
Elle leva les yeux vers eux avec consternation, comme s'ils étaient censés réaliser à quel point cet horoscope était faux par rapport aux précédents.
"N'importe quoi, du début à la fin !" s'insurgea Pansy d'une voix forte. "Je ne travaille jamais, je ne tombe jamais malade en automne, et je n'ai personne en vue !"
"Cette Celestia truc est peut-être un peu nulle…" tenta Théo timidement. "Mais peut-être qu'elle n'a pas complètement tort sur le fait que tu devrais te reposer un peu…"
Pansy lui jeta un regard si noir que Théo déglutit et continua de manger sans rien dire. Pansy râla encore en lisant quelques passages des autres horoscopes pour montrer à quel point ils étaient faux. Ni Théo, ni Blaise, ni Drago n'osèrent contester : elle était bien trop irritée.
Quand Pansy s'énerva en lisant que les Verseaux devaient "boire beaucoup d'eau" alors que leur planète était Uranus (Drago avait beau retourner cette explication dans sa tête plusieurs fois, il ne comprenait toujours pas le rapport), Blaise lança distraitement :
"Tu devrais faire ça, Pans'."
"Faire quoi ?" demanda-t-elle agressivement.
"Écrire les horoscopes pour la Gazette." dit Blaise. "Tu as l'air de t'y connaître beaucoup mieux que cette Celestia Valpan."
Pansy ferma la bouche, soudain pensive.
Drago eut le temps de terminer son café et sa pomme verte avant qu'elle ne reparle :
"En tout cas, je ne lirai pas ces horoscopes pourris jusqu'à ce que Rita revienne."
Elle ferma le journal avec hargne et le tendit à Blaise pour qu'il puisse lire les actualités, comme tous les matins.
.
.
Hermione
.
.
Hermione était en train d'observer Drago en train de discuter avec Pansy Parkinson à la table des Serpentards quand Ron s'exclama soudain :
"Le côté positif, c'est qu'on a pas Rogue aujourd'hui !"
Il essayait visiblement de remonter le moral d'Harry, qui était au plus bas. Il avait écopé d'une semaine de retenue avec Ombrage à cause de son insolence de la veille. Entre ça, l'absence d'Hagrid à la table des professeurs, et le ciel tout gris au-dessus de leurs têtes, Harry était de très mauvaise humeur.
Pourtant, Hermione était relativement contente, ce matin-là. Sa conversation de la veille avec Drago avait réussi à lui calmer ses angoisses. En plus, tous les chapeaux qu'elle avait tricotés la veille pour les elfes avaient disparus.
Elle bâilla et se servit une tasse de café. Ron plissa les yeux en la scrutant :
"Pourquoi t'es si contente ?" demanda-t-il.
Hermione ne lui donna, évidemment, que la seconde raison :
"Les chapeaux ont disparu. Les elfes de maison ont quand même envie d'être libres, on dirait."
Quand elle avait raconté aux garçons son nouveau projet de tricot pour libérer les elfes le soir de la rentrée, Ron avait été infect. Au lieu de la féliciter pour son engagement, il avait plutôt été outré qu'elle ose faire "un tel coup bas" aux elfes "qui étaient forcés à être libérés."
Elle ne fut donc pas très surprise quand il répondit d'un ton tranchant :
"Je ne parierais pas là-dessus. Ce ne sont pas vraiment des vêtements. Pour moi, ça ressemble plutôt à des vessies en laine."
Elle ne lui parla plus pendant toute la matinée.
Quand Harry et lui sortirent de table pour aller se balader avant de commencer les cours, elle prétendit continuer son petit-déjeuner pour ne pas les accompagner. Ron la rendait furieuse ! S'il était aussi véhément envers le sort des pauvres elfes de maison, alors elle arrêterait de l'aider pour ses devoirs.
Hermione était en train d'imaginer le visage ahuri de Ron quand elle refuserait de l'aider quand une personne s'assit en face d'elle. S'attendant à voir Ginny, Hermione leva la tête et sursauta un peu en tombant nez à nez avec Luna Lovegood.
"Bonjour Hermione." dit Luna poliment en se servant un thé. "Tu as bien dormi ?"
Hermione fut tellement surprise qu'elle mit plusieurs secondes à répondre. Les élèves des Maisons avaient le droit d'échanger de table pendant les petits-déjeuners, mais c'était une pratique tellement peu répandue que tout le monde observait Luna avec des regards interloqués.
"Euh… Oui, très bien, merci. Et toi ?" répondit Hermione en bredouillant un peu.
À cet instant, Ginny arriva dans la Grande Salle et s'assit à gauche de Luna. Elle ne parut absolument pas surprise de son intrusion à la table des Gryffondors.
"Bonjour les filles." dit Ginny en s'étirant. "Vous allez bien ?"
"Très bien. Juste une petite migraine." répondit Luna avant qu'Hermione ait pu ouvrir la bouche. "Mais c'est sûrement parce que je n'ai pas bu d'eau depuis trois jours."
Ginny renversa du jus de citrouille sur la table en se servant.
"Oh !" s'exclama-t-elle, abasourdie. "Merlin, Luna, pourquoi tu n'as pas bu d'eau depuis trois jours ?!"
Les yeux bleus exorbités de Luna se tournèrent pour regarder Ginny.
"Je suspecte l'eau d'être infestée de larves d'Aquavirus." dit-elle très sérieusement.
Hermione dû prendre une gorgée de café pour ne pas réagir. Ginny, elle, fronça simplement les sourcils :
"Je ne crois pas que ça soit le cas." dit-elle d'une voix doucereuse, comme si elle parlait à une enfant. "Dumbledore ne laisserait sûrement pas ses élèves boire de l'eau contaminée. Tu ne penses pas ?"
Luna pencha la tête sur le côté, comme si elle était en pleine réflexion, ses yeux bleus toujours fixés sur Ginny.
"C'est une bonne théorie." finit-elle par dire, et elle se servit un grand verre d'eau fraîche.
Hermione ne fit pas de commentaire sur cette conversation bizarre. Luna Lovegood était définitivement la fille la plus étrange qu'il lui ait été donné de rencontrer.
Elle finit plutôt son café et regarda l'heure.
"Je dois y aller, j'ai cours de Sortilèges dans dix minutes…" dit-elle en ramassant son sac.
Ginny termina son jus d'une traite et enroula une serviette autour d'un toast :
"Je t'accompagne !" dit-elle en enjambant le banc. "Je dois poser une question à Flitwick sur le devoir à rendre. À plus tard, Luna !"
Elle lui fit un geste de la main auquel Luna répondit vaguement, préoccupée à inspecter la carafe d'eau.
Quand Hermione se retrouva dans le couloir avec Ginny qui grignotait son toast en marchant, elle lui demanda :
"Cette Luna…"
"Hmm ?"
"Luna." répéta Hermione plus clairement. "Elle est un peu…"
Elle n'avait aucune idée de comment la décrire. Heureusement, Ginny finit sa phrase à sa place :
"Bizarre ? Oui, un peu." admit la rouquine en haussant les épaules. "Elle parle sans arrêt de créatures magiques dont je n'ai jamais entendu parler, je pense qu'elle croit beaucoup aux articles de son père dans le Chicaneur. Mais je l'aime bien. Elle change de mes copines qui ne font que parler de garçons tout le temps."
"Je ne suis pas sûre de beaucoup l'apprécier." confessa Hermione en fronçant les sourcils.
"Je comprends, elle est plutôt fantaisiste, alors que tu es… Rationnelle." dit Ginny.
"Tu peux dire intello, tu sais." dit Hermione avec un rire.
"Jamais." répondit Ginny. "Tu me fais bien trop peur."
Elles retrouvèrent les garçons devant la salle de classe de Sortilèges. Harry était toujours aussi grognon. Mais quand Ginny le salua avec un sourire, il ne put s'empêcher d'hausser les sourcils de surprise derrière ses lunettes rondes. Il fallait dire que Ginny faisait rarement la conversation avec lui sans devenir rouge comme une pivoine.
"Qu'est-ce que tu fais là ?" demanda Ron à sa sœur d'un ton goguenard. "Tu n'as pas Sortilèges, tu es en quatrième année."
"Beau travail d'observation, Ronald." répondit Ginny en levant les yeux au ciel. "Je viens seulement poser une question à Flitwick pour un devoir."
La porte s'ouvrit et les élèves prirent place. Ginny posa sa question au professeur, et quand elle s'en alla, tout le monde était déjà installé. Flitwick se mit sur sa pile de livres derrière son bureau et observa les élèves avec un sourire dissimulé derrière sa moustache :
"Bonjour à tous !"
Il reçut quelques "bonjours" disséminés dans la classe.
"Alors, comme vous le savez, vous entamez officiellement votre cinquième année. Votre cursus scolaire prend donc un tournant primordial avec les BUSES à la fin de l'année. Ce que vous devez toujours avoir en tête, c'est que ces examens peuvent influencer votre avenir pour de longues années ! Si vous n'avez pas encore sérieusement pensé à la carrière que vous choisirez, il est temps de le faire. Et en attendant, je le crains, il nous faudra travailler plus dur que jamais pour être sûrs de mettre toutes les chances de votre côté !"
Hermione se sentit revigorée juste en entendant ces mots. Elle était plus déterminée que jamais à réviser, même si elle ne voulait pas admettre qu'une des raisons principales était la personne avec qui elle révisait.
Ils s'entrainèrent ensuite au sortilège d'Attraction. Hermione, qui savait pratiquer ce sort sans le prononcer à voix haute désormais, fut vite lassée. Elle aida Neville à attirer le livre vers lui tandis qu'Harry (qui réussissait aussi bien Accio qu'Hermione depuis la deuxième Tâche du Tournoi), aidait Ron.
Le cours de Métamorphose fut plus difficile. McGonagall passa un bon quart d'heure à souligner l'importance des BUSES, et leur enseignèrent le sortilège de Disparition, qui tomberait probablement aux examens. Hermione savait déjà Conjurer, mais seulement les objets qu'elle connaissait très bien, alors elle était un peu nerveuse.
Elle réussit à faire Disparaître son escargot après la troisième tentative et sentit les veines de son poignet pulser de satisfaction, comme à chaque fois qu'elle pratiquait un sortilège un peu difficile. Les effets de la magie.
"Excellent, Miss Granger !" s'exclama McGonagall, qui passait justement dans les rangs à ce moment-là. "Excellent ! Dix points pour Gryffondor !"
Hermione sourit de toutes ses dents. Ron, qui était assis derrière elle, lui tapota l'épaule dès que McGonagall s'était éloignée.
"Merlin, Hermione, comment t'as fait ça ?!"
Hermione l'ignora.
"Ça sera tout pour aujourd'hui." annonça McGonagall à la classe une trentaine de minutes plus tard. "Je veux que vous vous entraîniez tous ce soir à faire Disparaître des objets, et nous continuerons de retravailler ce sort demain après-midi. Miss Granger, ce devoir vous est évidemment exempté."
Ron et Harry laissèrent échapper une exclamation plaintive en même temps. Hermione leva les yeux au ciel. Ce n'était pas comme si ça faisait cinq ans qu'elle les prévenait que les BUSES arrivaient !
"On va passer le déjeuner à la Bibliothèque pour travailler sur l'essai de Rogue." dit Harry d'un ton fatigué quand ils sortirent de la classe. "Tu viens avec nous ?"
"Non, je vais aller déjeuner." dit-elle. "On se retrouve tout à l'heure, au cours de Soins aux Créatures Magiques ?"
Harry et Ron lui fit un geste las de la main et ils s'en allèrent tous les deux, les épaules voûtées. En les voyant partir comme ça, on aurait pu croire que ça faisait six mois qu'ils travaillaient d'arrache-pied.
Hermione passa donc le déjeuner avec Ginny, Neville, Fred et George, à rire et jeter des regards en biais à Drago, assis trois tables plus loin.
Hermione retrouva ensuite Harry et Ron devant la hutte fermée d'Hagrid. Leurs visages étaient tellement maussades qu'Hermione décida d'arrêter de faire la tête à Ron. Au moment où le cours allait commencer, elle entendit le rire de Drago derrière elle et elle se retourna inconsciemment vers lui. Il descendait les escaliers en compagnie de Blaise Zabini, Théodore Nott et Pansy Parkinson. Crabbe et Goyle marchaient derrière eux.
"Tout le monde est là ?" aboya le professeur Gobe-Planche quand tous les élèves de Gryffondor et de Serpentard furent arrivés. "Alors, on s'y met. Qui peut me dire comment s'appelle ce que l'on voit sur cette table ?"
Elle pointa du doigt une table où étaient entassés plusieurs brindilles. Hermione leva la main aussitôt. Les Botrucs se mirent alors à bondir dans les airs et sortir leurs bras et leurs jambes en bois, ce qui fit hurler Pansy Parkinson.
"Oooohh !" s'écrièrent Lavande et Parvati, ce qui eut le don d'exaspérer Hermione.
"Un peu moins de bruit, s'il vous plaît, les filles !" demanda la professeure Gobe-Planche. Elle plongea sa main dans une boîte de cloportes et les jeta aux Botrucs qui se jetèrent sur la nourriture. "Alors, quelqu'un connaît-il le nom de ces animaux ? Miss Granger ?"
"Ce sont des Botrucs." répondit Hermione. "Ils gardent les arbres, surtout ceux dont on se sert pour fabriquer les baguettes magiques."
"Cinq points pour Gryffondor." annonça la professeure. "En effet, il s'agit de Botrucs et comme le dit si justement Miss Granger, ils vivent généralement dans les arbres dont le bois est utilisé dans la confection de baguettes magiques. Qui peut me dire ce qu'ils mangent ?"
"Des cloportes." répondit hâtivement Hermione. "Mais aussi des œufs de fée quand ils peuvent s'en procurer."
"Très bien, ça vous fera cinq points de plus. Les Botrucs ne paraissent peut-être pas très dangereux, mais quand on les met en colère, ils essayent d'arracher les yeux des humains avec leurs doigts qui sont très pointus, comme vous pouvez le constater." (Parkinson gémit de dégoût). "Croyez-moi, il n'est pas du tout conseillé d'en laisser un s'approcher de votre œil. Bien, alors, maintenant, vous allez tous prendre quelques cloportes et un Botruc, il y en a à peu près un pour trois élèves, afin de l'étudier de plus près. Je veux que, d'ici à la fin du cours, chacun de vous me fasse un dessin de la créature en indiquant très précisément toutes les parties du corps."
Hermione se pencha sur la table pour choisir le Botruc le plus facile à dessiner. Elle opta finalement pour le plus long, et alla s'asseoir avec Ron dans l'herbe.
Harry arriva quelques minutes plus tard :
"Gobe-Planche ne veut pas me dire où est Hagrid." pesta-t-il. "Et Malefoy vient de me dire quelque chose de très étrange…"
Hermione leva brusquement la tête de son croquis de Botruc.
"Ah bon ? Quoi donc ?" demanda-t-elle d'un ton qu'elle espérait être détaché.
"Il a dit qu'Hagrid était sûrement gravement blessé, parce qu'il se serait frotté à quelque chose de trop grand pour lui, et il a ajouté "si tu vois ce que je veux dire.""
Hermione fronça les sourcils. Pourquoi est-ce que Drago ne lui avait pas dit ça la veille, s'il savait où se trouvait Hagrid ?
"Tu es sûr qu'il a utilisé l'expression "trop grand" ?" demanda Hermione.
"Oui, c'est justement ce qui m'a marqué." expliqua Harry. "Et je me dis, son père est un Mangemort, il a peut-être appris des choses sur lui qu'on ne sait pas…"
Le Botruc s'était désintéressé des cloportes et essayait maintenant de monter sur la tête de Ron. Hermione le prit par le tronc et essaya de le dessiner de l'autre main, tout en répondant à Harry :
"Dumbledore le saurait si quelque chose était arrivé à Hagrid. Si on a l'air de s'inquiéter, ça fera le jeu de Malefoy. Il saura que nous ignorons ce qui se passe. Il ne faut pas faire attention à lui, Harry. Tiens-moi ce Botruc un instant que je puisse dessiner sa tête…"
En lui donnant la créature, Hermione risqua un regard vers le blond. Il était assis un peu plus loin, avec Crabbe, Goyle et Parkinson. Nott et Zabini étaient assis plus loin avec un autre Botruc.
Hermione entendit alors la voix traînante de Drago :
"Mon père s'entretenait avec le Ministre il y a quelques jours, et il semble bien que le Ministère soit décidé à en finir avec les cours qui ne sont pas au niveau. Alors même si ce crétin hypertrophié remet les pieds ici, il faudra sans doute qu'il fasse tout de suite ses valises."
Parkinson ne réagit pas, trop occupée à glapir de peur dès que le Botruc s'approchait d'elle. Crabbe et Goyle, eux, étaient vivement intéressés, mais Hermione était persuadée que sa phrase ne leur était pas destinée.
Au moment où elle se dit ça, Drago tourna la tête vers elle, le regard victorieux. Elle plissa les lèvres et reporta son attention sur son croquis, déterminée à ne pas rentrer dans son jeu agaçant.
"AÏE !" hurla Harry.
Harry avait vraisemblablement trop serré le Botruc de colère, parce que ce dernier s'échappa avec un air courroucé sur son visage d'écorce. La main d'Harry était couverte de sang.
"Merlin, Harry !" s'exclama Ron. "Pourquoi t'as fait ça ?"
"Malefoy m'a énervé." répondit-il, les dents serrées.
Hermione nettoya le sang de sa main et enroula un mouchoir autour de sa paume sans rien dire. Elle n'avait pas fini son croquis, mais elle n'osa pas le faire remarquer, parce qu'Harry était furieux. Quand la sonnerie annonça la fin de la classe, il marchait tellement vite vers le Château qu'Hermione devait trottiner derrière lui à toute vitesse.
"Si jamais il recommence à traiter Hagrid de crétin…" gronda-t-il.
"Harry, ne cherche pas la bagarre avec Malefoy, n'oublie pas qu'il est préfet, maintenant, il pourrait te rendre la vie difficile…" conseilla-t-elle.
"Tiens, je me demande bien ce que ce serait d'avoir une vie difficile." répondit Harry, plein de sarcasme.
Hermione pinça les lèvres et ne répondit pas. Elle jeta un regard en biais à Ron qui haussa vaguement les épaules.
Le cours de Botanique portait sur les propriétés de la bouse de dragon, mais Hermione ne leva pas la main, cette fois. Elle préféra passer le cours à jeter des petits regards vers Harry pour jauger son humeur.
.
.
Drago
.
.
Arriver à la table ronde de la Bibliothèque était une expérience déconcertante pour Drago. À la fois, cet endroit lui avait terriblement manqué, et en même temps, il avait l'impression d'y avoir passé tout son été. Il avait tellement perfectionné son Occlumancie pendant ses longs moments d'ennui au Manoir qu'il avait réussi à s'imaginer cet endroit de la Bibliothèque dans les moindres détails : la couleur du bois foncé de la table, l'odeur du papier et de cannelle qui paraissait incrustée dans les murs, la lumière de la fenêtre qui éclairait la table à différents endroits à mesure que le soleil se couchait.
Pourtant, malgré la précision de l'image qu'il avait réussi à graver dans sa mémoire, il manquait un détail crucial, que l'Occlumancie n'arriverait jamais à reproduire : c'était le sentiment d'apaisement qu'il ressentait dès qu'il s'asseyait là. Jamais son esprit ne pourrait capturer ce calme, cette douce chaleur qu'il ressentait quand il était à cette table ronde, qui s'incrustait dans ses pores et le faisait respirer plus facilement.
Drago avait dit, l'année précédente, que son endroit préféré au monde était la fontaine de son jardin, mais il était maintenant évident que ce n'était plus le cas. Il avait maintenant la même réponse que Granger : la Bibliothèque de Poudlard.
Il s'assit donc, observa les alentours en soupirant de plaisir, puis sortit ses affaires. Théo n'avait pas minimisé la quantité de devoirs qu'il allait devoir faire cette année : Drago avait déjà deux essais à faire, dont un en Métamorphose qui s'annonçait particulièrement difficile. Il ouvrit son manuel à la page des sortilèges de Disparition, découpa un parchemin, trempa sa plume et commença à composer son devoir.
Il repensa à Granger qui arrivait à faire Disparaître sa tasse de thé si facilement que ça en était presque énervant, et pile à cet instant, cette dernière arriva.
"Bonsoir Granger." annonça Drago dès qu'il l'aperçut.
Aujourd'hui, ses cheveux étaient attachés avec une pince bleue, mais quelques mèches bouclées tombaient tout de même autour de son visage.
"Bonsoir Drago." répondit-elle avec un petit sourire. "Je ne pensais pas que tu serais là si tôt."
Elle s'assit en face de lui et sortit ses affaires, c'est-à-dire une dizaine de livres qu'elle éparpilla partout, et sa tasse de thé verte.
"Deux essais à rendre, un dessin de Botruc à terminer, un questionnaire sur la guerre des géants à compléter et s'entraîner au sortilège de Disparition." énuméra Drago d'une voix lasse. "J'étais obligé de venir si tôt."
Granger eut un petit rire et ouvrit son planning. Pour la première fois depuis qu'il connaissait l'existence de ce cahier, Drago se surprit à vouloir le même pour organiser son travail.
"Tu fais l'essai pour la Métamorphose ?" demanda-t-elle en jetant un coup d'œil à son parchemin.
"Oui. Ne me dis pas que tu l'as déjà terminé ?" grogna-t-il.
"Non, McGonagall ne nous a pas encore demandé de le faire." répondit-elle. "Je crois qu'elle veut d'abord qu'on réussisse le sort avant de nous faire écrire dessus."
"Qu'ils réussissent." corrigea Drago.
Granger leva la tête de son planning, interloquée :
"Qu'est-ce que tu veux dire ?"
"Tu arrives déjà à faire les sortilèges de Disparition." rappela-t-il. "Je t'ai vue faire Disparaître ta tasse de thé, la dernière fois."
"Oh." répondit Granger, étonnée par cette remarque. "Oui, je suppose. Mais je n'y arrive qu'avec des objets très familiers, que je connais par cœur…"
Drago eut un petit rire narquois.
"Tu n'as pas besoin d'être modeste avec moi, Granger." dit-il en voyant son air étonné. "Je suis probablement le garçon le plus arrogant de Poudlard à tes yeux, tu as le droit de frimer un peu devant moi."
Granger ferma la bouche, surprise. Puis, un sourire timide étira doucement ses lèvres :
"Et bien… J'ai réussi à faire Disparaître mon escargot en trois essais." avoua-t-elle avec fierté.
Drago ne put s'empêcher de sourire en voyant son expression de Miss-Je-Sais-Tout.
"Et tu n'étais pas particulièrement familière avec ton escargot, si ?" demanda Drago.
"Non, pas vraiment." admit-elle avec un sourire.
"Merlin, Granger, je ne comprends pas pourquoi tu continues à réviser." dit Drago dans un soupir, en baissant la tête sur ses propres devoirs à peine entamés. "Tu vas avoir le maximum de BUSES de toute façon, même si tu arrêtais soudainement de travailler pendant toute l'année."
"Il faut réussir à faire Disparaître l'escargot du premier coup, aux BUSES." pointa Granger de sa voix haut-perchée. "Je ne dois surtout pas me reposer sur mes acquis."
"Tu es sûrement la seule à avoir réussi à le faire Disparaître aussi vite." dit Drago. "Théo n'a réussi qu'en cinq essais."
Étonnamment, Granger sembla ravie de cette information : elle commença ses devoirs avec un grand sourire sur le visage qu'elle n'arrivait pas à dissimuler.
Ils travaillèrent ainsi une bonne heure. Drago en était au quart de son essai quand il reposa sa plume et s'étira avec difficulté. Fatigué de lire des formules mathématiques de sortilèges, il préféra plutôt observer la fille en face de lui.
Elle était en train de terminer le croquis de Botruc de Botanique, en s'appliquant tellement sur les lignes qu'elle tirait un peu la langue sans s'en rendre compte. Drago observa son dessin pendant plusieurs minutes, qui était encore plus précis que celui du manuel, et se rappela soudain de sa découverte de la veille.
Sirius Black.
Granger avait passé l'été avec Sirius Black. Il voulait lui poser plein de questions, mais il avait appris à ne pas confronter Granger directement, au risque qu'elle se braque. Il préféra donc utiliser une méthode bien plus Serpentarde.
"Granger ?" appela-t-il.
"Hmm ?"
"De quel animal prendrais-tu la forme, si tu devenais un Animagus ?"
Drago devait saluer les efforts de Granger : elle ne montra pas sa surprise en entendant cette question, alors qu'il s'attendait à ce qu'elle devienne toute rouge en comprenant son insinuation.
"On ne peut pas choisir la forme qu'on prend en tant qu'Animagus." fit-elle remarquer, toujours penchée sur son dessin de Botruc.
"Je sais." dit Drago impatiemment. "Mais si tu devenais un Animagus, quelle forme penserais-tu prendre ?"
"Je ne deviendrais jamais un Animagus, la préparation est particulièrement atroce…" répondit-elle d'un ton détaché. "Et j'ai déjà donné dans les transformations animales pour retenter l'expérience."
Il ouvrit la bouche pour répondre, mais il fut stoppé par la seconde partie de sa phrase. Drago fut tellement surpris que tout son plan machiavélique de Serpentard s'évapora de son esprit et il ne put que demander :
"Hein ?"
Granger leva une seconde la tête de son dessin pour le balayer d'un regard blasé :
"Deuxième année. Je me suis transformée en chat à cause d'une potion ratée." expliqua-t-elle d'une voix morne.
"Qu- quoi ?" s'écria Drago, consterné par cette information. "Quelle potion ?"
"Du Polynectar, que j'avais confectionné moi-même." répondit-elle, comme si elle lui racontait une anecdote des plus banales. "Je me suis trompée d'un ingrédient et je me suis transformée partiellement en chat. Ce n'était vraiment pas beau à voir."
"C'est pour ça que tu as passé un mois à l'infirmerie ?!" s'écria Drago, choqué.
Il n'avait jamais réussi à percer ce mystère. Il s'était demandé de nombreuses fois ce que Granger avait pu avoir pour passer un mois entier à l'infirmerie, mais il n'aurait jamais imaginé que ça puisse être pour ça.
Quand elle entendit cette question, Granger releva de nouveau la tête, les sourcils haussés :
"Oui. Je suis étonnée que tu t'en souviennes."
Il reconnut aisément la citation de la lettre qu'elle lui avait envoyée cet été : il les avait lues une bonne vingtaine de fois chacune et les connaissait pratiquement par cœur.
"Évidemment que je m'en souviens." dit-il, à la fois choqué et amusé. "On était persuadés que tu t'étais faite pétrifiée."
"Non, pas encore." dit-elle amèrement.
"Attends, ça veut dire que tu as réussi à préparer du Polynectar en deuxième année ?" réalisa Drago avec surprise. "Toute seule ?!"
"Pas vraiment, puisque je l'ai ratée." dit-elle, toujours concentrée sur son dessin, de sorte à ce qu'il ne pouvait pas voir son visage. "Et je ne suis pas prête à en goûter de nouveau, ça avait un goût immonde."
Drago cogita quelques minutes sur cette nouvelle découverte. Il savait que Granger était une sorcière extrêmement douée, mais il avait du mal à imaginer que quelqu'un puisse faire une telle potion à douze ans, ratée ou pas.
Il finit par se reconcentrer :
"Alors, tu ne serais pas un chat." asséna-t-il.
"Pour ?" demanda Granger, le nez toujours collé à son foutu dessin qui l'empêchait de se concentrer pleinement sur la conversation.
"Pour ta forme d'Animagus." répéta sèchement Drago. "Qu'est-ce que tu serais ?"
"Je n'en ai aucune idée, Drago !" s'impatienta Granger. "Sûrement pas un Botruc, en tout cas…"
"Ou sûrement pas en chien, comme Sirius Black !" lâcha-t-il sous la colère.
Raté pour sa tentative sournoise de Serpentard, sa colère avait encore une fois eu raison de lui. Comment cette fille insupportable pouvait-il le faire craquer à chaque fois ?
Granger fit tomber sa plume de surprise, qui forma une grosse tâche d'encre sous l'impact. Ses yeux étaient fixés sur Drago, la bouche entrouverte, la peur sur ses traits. Ils ne dirent rien pendant plusieurs secondes, les yeux plongés dans ceux de l'autre. Il devait l'avouer : lire le choc sur son visage était toujours aussi enivrant. Il adorait la choquer.
"Je…" bredouilla-t-elle.
"Ça ne sert à rien de me dire que tu ne sais pas de quoi je parle, Granger." annonça Drago fermement. "Je vois sur ton visage que j'ai raison."
Granger déglutit, et Drago put observer sa gorge se serrer quand elle inspira. Un flash de compréhension anima ses prunelles chocolat :
"C'est ton père, c'est ça ?"
Ce fut au tour de Drago d'essayer de cacher sa surprise.
"Mon père ?"
"Tout à l'heure, en cours de Botanique, tu as dit que ton père t'avais parlé des cours d'Hagrid." dit Granger d'un ton saccadé. "Et tu ne savais rien sur le chien hier… C'est ton père qui te l'a dit, non ? Il t'as envoyé une lettre pour te le dire ?"
Drago hocha la tête, étonné qu'elle ait pu parvenir à cette déduction en si peu de temps.
"Il t'as dit que le chien était Sirius Black ?" poursuivit-elle d'un ton pressé. "C'est lui qui l'a reconnu, sur le quai de la gare ?"
"Non !" contesta Drago, agacé par cette remarque. "C'est moi qui ai dit que ce chien était étrange, je savais que quelque chose se tramait derrière ! Mon père n'a fait que me donner l'identité de l'Animagus !"
"Donc, le Seigneur des Ténèbres est au courant..." résuma Granger, les yeux soudain perdus dans le vide.
Elle était en train de partir dans ses propres réflexions. Il pouvait le voir à ses yeux qui se voilaient de plus en plus. C'était une pratique courante chez elle : elle s'absentait quelques secondes, voire plusieurs minutes, pour réfléchir à un problème toute seule. Parfois, elle bredouillait des mots intelligibles en réfléchissant sans s'en rendre compte.
Drago n'aimait pas trop ne pas faire partie de ses pensées, alors il s'exclama :
"Granger, cet homme est dangereux ! Comment peux-tu être à côté de lui si tu sais que c'est Sirius Black qui se cache derrière ce chien ? Est-ce que tu sais ce qu'il a fait ?"
Granger revint à l'instant présent et posa son regard calme sur Drago. Elle parut réfléchir à sa prochaine phrase.
"Sirius n'est pas dangereux, Drago." dit-elle doucement, comme si elle essayait de le rassurer.
Drago fronça les sourcils, surpris qu'elle ose l'appeler par son prénom uniquement.
"Si, il l'est." contesta-t-il, et il sentit les frissons de colère parcourir ses bras. "C'est un tueur en série, Granger. Il a tué treize personnes, dont douze Moldus ! Comment peux-tu le côtoyer en sachant ça ?! Des Moldus, Granger !"
"Sirius n'a pas fait ça." répondit-elle, dans un calme olympien auquel il ne s'attendait pas du tout et qui l'énervait atrocement. "Il a été accusé à tort. C'est Pettigrow qui a fait ces crimes, et il a ensuite fait porter le chapeau à Sirius, qui s'est fait envoyer en prison alors qu'il était innocent."
"Non, ce n'est pas vrai." dit Drago, bien que ces mots commençaient à le faire douter.
"Réfléchis, Drago." intima Granger. "Qui t'as dit que Sirius Black était dangereux ?"
Drago mit du temps avant de répondre. Il voyait où elle voulait en venir.
"Mon père." siffla-t-il entre ses dents.
"Et qui demande à ce que Sirius Black soit retrouvé ?" continua Granger. "Qui clame qu'il est un tueur en série dangereux, et qu'il doit retourner à Azkaban, alors qu'il n'a jamais commis d'autres crimes depuis son évasion ?"
"... Fudge." dit Drago, qui comprit soudain.
"Ton père sait que Sirius n'est pas un tueur en série." expliqua-t-elle. "Il veut juste continuer la campagne ridicule du Ministère, pour que tout le monde se concentre sur lui, et pas sur les vrais crimes qui sont commis tous les jours…"
"... Les crimes commis par mon père." termina Drago avec amertume.
La colère s'était volatilisée de son corps. Maintenant, il ne ressentait qu'un vague sentiment de mal-être qui lui donnait la nausée. Cette découverte était encore plus écrasante que celle du chien. Il n'avait jamais imaginé que Granger puisse défendre ce type.
Il détestait se l'avouer, mais il savait qu'elle avait raison. Son explication était beaucoup plus logique que celle de son père. Mais pour une raison obscure, il ne voulait pas l'admettre. Peut-être parce que si la révélation de Granger était vraie, alors son père n'avait pas vraiment été inquiet pour lui. Peut-être parce que, s'il avait menti dans sa lettre, Drago n'avait eu aucune raison de s'endormir en la serrant pathétiquement contre lui.
Il repensa à la phrase de Blaise de la veille, quand il avait terminé la lettre de Lucius : "Ton père te demande de pas t'inquiéter du tueur en série qui traîne avec Potter, parce qu'un autre tueur en série bien plus puissant est censé te protéger. C'est quand même incohérent."
"Sirius est le parrain d'Harry." continua Granger à voix basse. "J'ai passé l'été avec lui, et il est très gentil, je t'assure."
"Je n'aime pas beaucoup ça." admit Drago d'une voix rauque. "Que tu aies passé l'été avec un…"
Il ne savait pas vraiment comment le décrire, désormais. Même si l'explication de Granger faisait sens, il avait toujours un mauvais pressentiment concernant cet homme.
"Je sais. Et je comprends que ça soit beaucoup à digérer, mais tu dois savoir. Le Ministère ment. Sirius n'est pas plus un tueur que je ne le suis."
Drago regarda son parchemin de Métamorphose sans le voir. Il faisait la même chose que Granger sans s'en rendre compte : se perdre dans ses propres réflexions. Il avait été tellement inquiet pendant l'été, quand Granger était partie au "Terrier" et qu'il n'avait plus eu de nouvelle. Il était loin d'imaginer que Granger puisse passer ses journées avec l'homme le plus recherché du pays. Même si elle voulait lui faire croire que c'était un gentil, Drago n'arrivait pas vraiment à imaginer une scène où Granger et Sirius Black pouvaient discuter amicalement dans une même pièce.
"Drago." appela Granger, soudain beaucoup plus sérieuse. Il releva la tête et son visage affichait maintenant une expression d'urgence. "Il faut que tu me promettes de ne rien répéter à personne. Sirius est mon ami, Drago. S'il te plaît, ne dis rien qui pourrait le compromettre."
Drago fronça les sourcils, ne s'attendant pas à ce ton de supplique.
"Que veux-tu dire ?"
"Tu disposes d'informations très confidentielles, maintenant." expliqua-t-elle à voix basse. "Tu as découvert son secret tout seul, et c'est important que tu connaisses la vérité à son sujet, pour que tu comprennes ce que Fudge et ton père essayent de te mettre dans la tête… Mais tu ne dois en parler à personne d'autre."
"Pourquoi ?" demanda-t-il d'un ton hautain. "Visiblement, mon père sait déjà tout ça. Qu'est-ce que ça changerait si je lui disais ?"
"Tu ne peux pas communiquer ce genre de secret à… L'autre côté." dit-elle, la voix tombant de plus en plus dans un murmure. "Dumbledore pourrait avoir des problèmes…" (Drago ricana amèrement mais Granger continua) "Harry aussi, et surtout… moi."
"Toi ?" répéta-t-il, soudain anxieux.
"Oui, moi ! J'ai divulgué cette information, et si quelqu'un apprend que je transmets des secrets de la sorte à un fils de Mangemort… Je serais considérée comme une espionne, ou une traîtresse. Je perdrais tout. Drago, tu dois me promettre de ne rien dire. C'est un secret qui nous dépasse largement."
Le cœur de Drago se serra en voyant son visage si consterné. Il secoua la tête aussitôt :
"Je ne dirai rien, Granger. Promis."
Elle expira et ses épaules crispées tombèrent de soulagement. Drago n'avait pas pensé qu'elle puisse être si stressée par ça. Pour lui, découvrir qui était ce chien n'avait été qu'une énigme, un mystère de plus à percer sur Granger. Il n'avait pas réalisé que ça pouvait englober des personnes bien plus haut placées.
"Merci, Drago." dit-elle sincèrement.
Il hocha la tête et reposa ses yeux sur son essai, qu'il avait complètement oublié.
Il était maintenant en possession d'un secret que très peu de personnes connaissait, et c'était à la fois terrifiant et gratifiant.
Granger termina son dessin de Botruc dans un silence de plomb. Elle était cependant un peu moins concentrée qu'avant. Drago se demandait à quoi elle pouvait penser. Est-ce qu'elle doutait ? Est-ce qu'elle avait peur de lui avoir confié un secret aussi important ?
Drago était pourtant sûr de lui. Si Granger risquait quelque chose, il ne révélerait rien à personne. Sa sécurité était plus importante que n'importe quoi d'autre. Il ne savait pas encore qui il devait croire dans cette guerre, mais il savait une chose : il protégerait toujours Granger, coûte que coûte.
Cette dernière termina enfin son croquis et ouvrit son manuel d'Arithmancie, mais elle le referma bien vite avec un soupir agacé :
"Je n'arrive pas à travailler." grommela-t-elle.
"Moi non plus." admit Drago. "Tu veux aller sur le banc ?"
Contre toute attente, Granger acquiesça. Elle devait être dans un grand moment de perplexité pour arrêter de travailler de la sorte. Drago ne dit rien, cependant, de peur qu'elle change d'avis. Il rangea hâtivement ses affaires et sortit de la Bibliothèque à une distance convenable de Granger pour que personne ne se doute qu'ils marchaient ensemble.
Ils atteignirent le banc et s'assirent dessus sans parler. Il ne devait être que 20h, mais il n'y avait plus personne dans le parc du Château. Granger regarda la façade devant elle, et Drago pouvait presque sentir la chaleur émaner de sa tête tant elle réfléchissait.
"Granger, relax." finit-il par dire. "Je t'ai promis que je ne dirai rien !"
"Même à Pansy ?" demanda-t-elle en tournant précipitamment la tête vers lui. "Théodore ? Blaise ?"
"Je ne leur dirai rien, si tu ne veux pas que je le fasse." promit Drago. "De toute façon, il n'y avait que moi qui était aussi obsédé à l'idée de découvrir ce qui se cachait derrière ce chien. Ils ne me demanderont rien."
Granger hocha la tête et s'adossa contre le dossier du banc dans une position plus confortable.
"Merlin, je n'arrive pas à croire que tu aies découvert ça." murmura-t-elle.
"Je ne suis pas aussi stupide que tu ne le penses, Granger." grogna-t-il.
"Je ne te trouve pas stupide." dit-elle, les yeux toujours rivés sur la façade. "Au contraire, je te trouve… Très ingénieux."
Comme à chaque fois qu'elle le complimentait, il oublia soudainement sa mauvaise humeur et réfréna un sentiment de fierté.
"C'est parce que tu passes tout ton temps avec Weasley et Potter." dit-il avec un rire mesquin. "Tu n'es pas habituée à ce qu'on puisse avoir le sens de l'observation."
"Peut-être…" dit-elle vaguement.
Ils ne dirent rien pendant un long moment. Drago put profiter du silence pour réunir ses propres pensées, lui aussi. Maintenant qu'il connaissait la vérité sur Black, il se demanda si son père lui avait menti, ou s'il croyait aveuglément le Ministère. En plus, Lucius avait mentionné ce "Peter Pettigrow" dans sa lettre…
"Mon Dieu, qu'est-ce qu'il fait là ?" couina soudain Granger, sortant Drago de ses pensées.
Il tourna la tête vers l'endroit qu'elle indiquait. Sur le chemin qui menait au terrain de Quidditch, il pouvait apercevoir la silhouette de quelqu'un qui marchait, un balai sous le bras. Quand la personne s'approcha du Château, Drago reconnut Weasley, dont les cheveux roux étaient tout ébouriffés par le vent d'automne.
Heureusement, le banc était caché par un tronc d'arbre qui l'empêcherait de voir Granger et Drago ensemble. De toute façon, les yeux du rouquin restèrent fixés sur le sol et il rentra par la porte principale, le dos arqué par la fatigue.
"Qu'est-ce qu'il fait là ?" répéta Granger, visiblement troublée par la présence de Weasley ici. "Je croyais qu'il faisait ses devoirs dans la Salle Commune, ce soir…"
Son visage crispé se détendit soudain quand elle comprit.
"Oh…"
"Quoi ?" demanda Drago d'une voix brusque.
"Il s'entraîne." dit-elle simplement, comme si Drago était censé comprendre tout ce qui lui passait par la tête.
"S'entraîne à quoi ?" demanda-t-il avec impatience.
"Au Quidditch." répondit-elle en se mordant la lèvre, les yeux toujours rivés sur le chemin vers le terrain. "J'aurais dû le comprendre plus tôt, il agissait bizarrement depuis la rentrée… Quand sont prévues les attributions de rôles des équipes, déjà ?"
"Vendredi." dit Drago, qui comprit enfin pourquoi Weasley se trouvait là. "C'est vrai ? Tu penses vraiment qu'il s'entraîne ?" demanda-t-il sans pouvoir cacher le mépris dans sa voix.
"Pourquoi aurait-il son balai sous le bras ?" dit Granger.
Drago ne savait pas vraiment si c'était une vraie question ou juste une pensée dite à voix haute. Il lâcha un ricanement dédaigneux.
"Probablement pour devenir Gardien, vu que votre ancien capitaine est parti." devina Drago. "Pathétique."
"Il n'est pas pathétique !" répliqua Granger, qui s'arracha enfin de la contemplation du chemin pour jeter un regard noir à Drago.
"Il joue bien, au moins ?" demanda-t-il.
"Je ne sais pas, je n'y connais rien en Quidditch…"
Drago leva les yeux au ciel : il était sûr qu'elle pensait le contraire, mais qu'elle n'osait pas le dire devant lui. Il se renfrogna contre le dossier du banc. Après plusieurs minutes, il lui demanda :
"Tu te souviens de ce que tu m'as dit en deuxième année, le jour où j'ai intégré l'équipe des Serpentards ?"
"Non, je ne me souviens que du moment où tu m'as traitée de Sang-de…" commença Granger avec colère.
"Avant ça." coupa Drago, peu désireux d'entendre cette insulte de sa bouche. "J'ai annoncé que je faisais partie de l'équipe, et tu as dit que chez les Gryffondors, personne n'avait payé pour intégrer l'équipe, et qu'ils étaient tous choisis pour "leurs talents.""
Granger fronça les sourcils et hocha la tête sans rien dire. Drago pointa du doigt le terrain de Quidditch, tellement plongé dans le noir qu'il était difficile de distinguer les six cerceaux.
"Si Weasley est pris dans l'équipe, c'est uniquement parce que c'est le meilleur ami de Potter. Tu le sais, non ?"
"Tu n'en sais rien, tu ne l'as jamais vu jouer !" contesta-t-elle.
"Je n'ai pas besoin, je sais déjà qu'il est nul !" objecta Drago d'une voix forte.
"N'importe quoi. C'est pour ça que je déteste ce sport, il crée des rivalités inutiles entre vous !" se lamenta Granger en croisant les bras obstinément.
Drago n'insista pas. Il savait qu'il avait raison. Weasley avait autant de talent en Quidditch que Théo. S'il était pris en tant que Gardien, c'était une injustice, et Granger était bien trop loyale pour s'en apercevoir.
Après plusieurs minutes, elle se leva. Elle paraissait troublée, comme si la quantité d'informations qu'ils avaient partagé ce soir-là était particulièrement difficile à porter. Il devait admettre que sa tête menaçait d'exploser aussi.
"Je vais remonter." l'informa-t-elle sèchement. "Harry doit avoir terminé sa retenue avec Ombrage maintenant et j'aimerais le voir avant qu'il ne monte se coucher."
Drago hocha la tête.
"Bonne nuit, Granger."
Elle acquiesça, se retourna, fit quelques pas, et s'arrêta soudain, hésitante. Elle trépigna un instant d'un pied sur l'autre, visiblement plongée dans une nouvelle réflexion, avant de se retourner pour marcher vers le banc de nouveau :
"Drago, je…"
"Je ne dirai rien." lui assura-t-il une dernière fois, certain que c'était ça qui l'angoissait. "Je t'ai promis que je ne dirai rien, Granger. Tu me fais confiance, non ?"
Il ne trahit rien sur son visage, mais son cœur tambourinait contre ses côtes en attendant la réponse à cette question. Granger pinça les lèvres, les sourcils froncés, avant d'hocher la tête :
"Oui. Évidemment que je te fais confiance."
Et elle retourna au Château sans un mot de plus.
.
.
Hermione
.
.
Le lendemain, quand Hermione avait demandé à Harry ce qu'il avait dû faire pendant sa retenue de la veille avec Ombrage, il avait simplement répondu "Des lignes." Cela aurait pu être une réponse convenable, si Harry n'avait pas regardé le sol en répondant ça, une preuve évidente qu'il mentait.
Elle n'avait pas insisté, cependant, certaine qu'il finirait par lui dire quand il serait prêt à le faire.
Le mercredi soir, Hermione passa sa soirée à la Bibliothèque en compagnie de Drago, et termina son essai de Potions. Elle rentra juste après Ron, qui s'était changé et avait prétexté avoir passé la soirée dans la Salle Commune alors qu'elle savait pertinemment qu'il s'était entraîné sur le terrain de Quidditch toute la soirée.
Le jeudi soir, Drago avait son cours particulier d'Alchimie, alors elle préféra rester à la Salle Commune. Elle tricota des chapeaux pour les elfes dans le canapé, à côté de Ginny, en discutant des dernières nouvelles de Poudlard. Elle était en train de terminer son petit bob bleu ciel quand Harry et Ron entrèrent dans la Salle en même temps. Ron s'empressa de monter dans le dortoir des garçons en cachant quelque chose dans son dos, et Harry prit place à côté d'Hermione.
"Harry, tu as l'air épuisé." constata Hermione en voyant les cernes sous les yeux verts de son meilleur ami.
"C'est parce que je le suis." maugréa-t-il. "Cette Ombrage me garde toujours jusqu'à des heures indécentes, je suis sûr qu'elle fait ça pour que je n'ai pas le temps de faire mes devoirs…"
Il se frotta les yeux en bâillant.
"Où est parti Ron ?" demanda Ginny.
"Déposer quelque chose dans le dortoir." répondit Harry. Il regarda autour de lui, et se pencha suffisamment pour que seules les deux filles puissent l'entendre. "En fait, ne le dites pas aux autres, mais… Ron s'entraîne pour devenir Gardien."
Ginny eut une petite exclamation de surprise, mais Hermione resta impassible :
"Oui, je l'avais deviné." dit-elle.
"Quoi ?" s'étonna Harry. "Hermione, comment fais-tu pour tout savoir ?"
"Je ne sais pas tout, loin de là." affirma-t-elle à voix basse. "Harry, est-ce qu'il… est-ce qu'il a ses chances ?" demanda-t-elle dans un murmure.
"Je ne sais pas." admit Harry. "Je ne l'ai jamais vu jouer en tant que Gardien."
"Je l'ai déjà vu jouer quelques fois, et il est assez bon." dit Ginny, pensive. "Fred et George le mettaient là pour s'entraîner pendant les vacances, au Terrier."
Hermione hocha la tête, soulagée. Elle ne voulait pas que Ron souffre d'un rejet, il le prendrait terriblement mal. À cet instant, le rouquin arriva et s'assit sur l'accoudoir du canapé :
"Vous parlez de quoi ?" demanda-t-il.
"Des chapeaux d'Hermione." répondit instantanément Ginny. "Ils sont jolis, non ?"
Ron se garda bien de faire un commentaire, et Hermione agita frénétiquement ses aiguilles pour cacher son agacement face à ce manque de réaction.
.
.
.
Le lendemain, après les cours, Harry se rendit dans le bureau d'Ombrage avec un air maussade sur ses traits tandis qu'Hermione et Ron se dirigèrent vers le terrain de Quidditch.
Hermione n'avait jamais vu Ron aussi stressé, même pour les examens. Elle ne cessa de lui jeter des regards en biais pendant tout le trajet. Il serrait le manche de son balai si fort que ses phalanges étaient blanches.
"Ne t'en fais pas, Ron." l'encouragea-t-elle doucement quand elle vit son teint blafard. "Tu vas y arriver."
Il se tourna vers elle et parut se détendre très légèrement en entendant ça.
"Tu crois ?" demanda-t-il d'une voix tremblante.
"Mais oui ! Essaie de garder la tête froide. Ne laisse pas le stress monter, et concentre toi sur ta performance. Prends des grandes inspirations, et ne regarde pas les autres, ça va te déconcentrer." conseilla-t-elle avec un sourire réconfortant.
"Merci, Hermione." dit-il honnêtement. "Je tâcherai d'y penser."
Elle lui serra affectueusement la main, puis alla s'installer dans les gradins. Elle était la seule à assister aux essais. Elle vit Ron se placer dans la ligne composée de plusieurs autres élèves, juste sous les buts.
L'équipe de Gryffondor arriva sur le terrain quelques minutes plus tard, menée par Angelina, la nouvelle capitaine. Fred et George ne cachèrent pas leur choc de voir leur frère.
"Bien, nous allons commencer !" annonça Angelina d'une voix forte. "On va jouer normalement, et chacun d'entre vous passera devant les cerceaux pendant une dizaine de minutes chacun. Votre but est évidemment d'encaisser le moins de buts possibles. Tout le monde est prêt ?"
Les Gardiens potentiels acquiescèrent. Les joueurs enfourchèrent leur balai et se mirent en position pour commencer à jouer.
"Hooper, tu commences !" annonça Angelina.
Le garçon tremblait tellement qu'il mit une bonne minute à monter sur son balai. Hermione vit Angelina jeter un regard éloquent à Katie Bell. Il prit le poste de Gardien pendant dix minutes et ne rata qu'un seul Souaffle. Il termina cependant son essai en larmes, sans raison apparente.
Hermione observa chacun des essais en calculant leur nombre d'arrêts à chaque fois. Un élève de première année ne réussit pas à contrer le moindre Souaffle et termina son essai sur le banc à sangloter. Une fille de sixième année, qu'Hermione reconnaissait vaguement pour l'avoir vue réviser dans la Salle Commune plusieurs fois, réussit cependant à arrêter toutes les balles, et fit même un petit looping dans les airs pour célébrer son succès. Hermione vit distinctement Ron vaciller en voyant ça.
Ron passa en avant dernier. Il enfourcha son balai et vola jusqu'aux cerceaux. Il paraissait toujours aussi stressé, mais il avait aussi revêtu une expression tellement concentrée sur son visage pâle que même Fred et George n'osèrent pas se moquer de lui.
"Allez, Ron…" murmura Hermione entre ses dents sans s'en rendre compte. "Concentre-toi…"
C'était la première fois qu'Hermione était aussi captivée par une partie de Quidditch. L'équipe envoya huit Souaffles pendant les dix minutes, et Ron réussit à en arrêter six. À chaque fois, Hermione ne pouvait s'empêcher d'étouffer un cri perçant de joie. Plus la partie avançait, plus Ron retrouvait des couleurs. Il envoya même un sourire confiant à Hermione, vers la fin de son essai.
"Ok, ça suffit !" lança Angelina après son coup de sifflet. "Bien joué Ron, tu peux redescendre."
Ron atterrit, les oreilles toutes rouges. Tandis que le dernier Gardien potentiel se mettait en place, Hermione et Ron échangèrent un sourire excité.
Angelina finit par terminer la partie plus tôt et renvoya le dernier Gardien avant même qu'il eut atteint la pelouse. Il restait trois joueurs de l'essai dans l'herbe, dont la sixième année qui avait tout réussi. Angelina se posa à son tour et discuta à voix basse avec chacun d'entre eux. Hermione croisait tellement les doigts dans sa poche que ça en était douloureux. Ron et les deux autres finirent par hocher la tête, et Angelina repartit vers les vestiaires.
Quand le rouquin grimpa les marches de l'escalier des gradins, Hermione était incapable de savoir s'il avait été pris avec son expression faciale. Il était indéchiffrable. Elle se leva, le cœur battant à tout rompre, pratiquement sûre qu'il allait lui annoncer que la sixième année avait été prise à sa place. Mais quand il arriva devant elle, son visage parsemé de tâches de rousseur s'anima d'un grand sourire éclatant :
"C'est moi ! Hermione, c'est moi ! Je suis pris !"
"Oh !" s'exclama-t-elle avec joie. "Oh, Ron, je suis tellement contente !"
Le soulagement était tellement puissant qu'Hermione se hissa sur la pointe des pieds pour l'enlacer, faisant tomber le balai de Ron au passage. Il la serra automatiquement dans ses bras en retour, et elle se sentit comprimée contre sa poitrine avec la force de son étreinte.
"Je suis tellement soulagé ! Oh, quand je vais l'annoncer à Harry !" s'écria-t-il, la joie déferlant dans sa voix.
Hermione sourit contre le pull de Ron. Il sentait comme le Terrier, l'odeur des Weasley : de feu de bois, de laine et de confort. Elle s'attendait à ce qu'il desserre son emprise, mais Ron fit quelque chose qu'elle n'avait pas du tout prévu : il posa son menton sur ses cheveux et la berça légèrement contre lui, sans relâcher ses bras autour d'elle qui la serrait fort contre lui.
Hermione avait fait des dizaines de câlins à Harry dans sa vie, mais très peu à Ron. C'était un contact tellement inédit que ça lui donna des frissons dans la colonne vertébrale. Pourquoi ressentait-elle des sensations différentes quand c'était lui, et pas Harry ?
C'était agréable, et ça lui donnait des sensations étranges dans son bas-ventre. Mais cette étreinte lui en rappela une autre, dans un parc moldu, sous le soleil.
Hermione ne put s'empêcher de comparer les deux.
Les bras de Ron étaient plus forts. Il la comprimait contre lui, l'empêchant presque de respirer convenablement, et ce contact lui donnait des petits papillons dans le ventre. Elle pouvait sentir sa peau chaude de l'effort à travers sa robe de Quidditch. C'était un câlin réconfortant, presque familier malgré sa rareté.
Celui de Drago avait été radicalement opposé. Il ne l'avait pas serrée contre lui comme ça, mais ses mains s'étaient naturellement posées sur sa taille, et Hermione se souvint de la traînée de frissons que ses doigts lui avaient procurées. Elle se souvint de son odeur mentholée accrochée à ses vêtements, à sa peau froide qui lui avait donné des frissons malgré la chaleur de l'été. Elle se souvint d'à quel point, à travers son câlin, Drago avait réussi à lui transmettre toutes ses émotions sans parler, comme si leurs corps n'avaient formé qu'un pendant ce laps de temps. Elle se souvint de la manière qu'il eut de poser sa joue sur le haut de son crâne et inspiré l'odeur de ses cheveux, et d'à quel point elle avait eu envie de rester dans ses bras pendant des heures, même si elle ne l'aurait jamais admis.
Hermione se détestait de penser à lui à ce moment-là. C'était un moment avec Ron. Elle était censée profiter de ce genre de rapprochement, c'était lui qu'elle était censée aimer. Depuis toujours.
Mais Drago ne quittait plus son esprit, ces derniers temps.
Ils finirent par se détacher l'un de l'autre et se firent un petit sourire gêné. Ron était tout rouge, et Hermione devait probablement l'être aussi. Ses mains étaient moites et elle se rendit compte qu'elle entendait le battement de son propre cœur contre sa peau, quelque chose qu'elle ne sentait que très rarement.
"On retourne au Château ?" proposa Ron en ramassant son balai.
"Oui, allons-y !" dit-elle d'un ton un peu trop enjoué.
Heureusement, le moment d'embarras ne dura que quelques secondes. Ron parvint à détendre l'atmosphère dès qu'ils marchèrent côte à côte sur le chemin du retour. Il lui raconta chaque essai comme si elle n'y avait pas assisté et elle l'écouta avec attention. Il paraissait tellement content de lui que ça en était contagieux : elle sourit tendrement en l'écoutant parler, les paroles de Drago sur les compétences de Ron au Quidditch s'évaporant de sa tête en même temps. Elle ne ressentait qu'un profond soulagement pour Ron, et de la joie de le voir si heureux.
.
.
.
Le soir, dans la Salle Commune, Fred et George organisèrent une grande fête pour célébrer l'entrée de Ron dans l'équipe. Ce dernier était rouge de plaisir. Hermione savait qu'il plaçait une grande importance dans l'opinion de ses frères, et que le fait qu'ils le félicite était un honneur qu'il prenait avec le plus grand respect.
Ginny se chargea de la musique avec sa radio sorcière qui diffusait un son de rock tonitruant. Elle secouait sa tignasse au rythme de la musique, un mouvement presque hypnotisant qui faisait tomber les paupières d'Hermione malgré ses efforts pour rester éveillée.
Mais très vite, Hermione piqua du nez malgré tout. Il fallait dire qu'elle avait passé la soirée de la veille à tricoter jusqu'à bien trop tard, et que la journée avait été longue. Elle s'endormit contre sa paume de main, dans le fauteuil en face du feu qui la réchauffait agréablement. Fred et George lui avaient (évidemment) donné une bouteille de Bièraubeurre, mais Hermione n'avait pas voulu la boire : le goût du caramel lui rappelait toujours une soirée qu'elle essayait désespérément d'oublier.
Elle se réveilla en sursaut en entendant un bruit à côté d'elle. C'était Harry, qui venait de revenir de sa dernière retenue avec Ombrage. Il avait posé son sac et s'assit lourdement dans le fauteuil à côté d'elle.
"Oh, Harry, c'est toi…" marmonna-t-elle d'une voix ensommeillée. "Bonne chose pour Ron, hein ? Je suis tellement… Tellement fatiguée !" ajouta-t-elle en bâillant. "J'ai travaillé jusqu'à une heure du matin pour faire d'autres chapeaux. Ils disparaissent à une vitesse folle !"
"Tant mieux." répondit Harry avec un hochement de tête.
Elle focalisa sa vision sur le garçon en face d'elle. Il était assis dans son fauteuil préféré, les yeux posés sur le feu en face de lui et l'air passablement agité. Sa jambe tremblait et son œil gauche tiquait derrière ses lunettes.
"Harry ? Tout va bien ?" demanda-t-elle précautionneusement.
Il détourna son regard du feu et se tourna vers Hermione, l'air préoccupé.
"Il m'est arrivé un truc bizarre, tout à l'heure." avoua-t-il d'une petite voix. "J'étais dans le bureau d'Ombrage pour ma retenue, et elle s'est approchée de moi pour me prendre le bras… Et quand elle m'a touché, j'ai ressenti une douleur atroce sur mon front, au niveau de ma cicatrice. C'est étrange, non ?" demanda-t-il en voyant la tête perplexe d'Hermione en face de lui. "Pile au moment où elle me touche, j'ai mal à ma cicatrice…"
"Tu as peur que Tu-Sais-Qui la contrôle comme il contrôlait Quirrell ?"
"C'est une possibilité, non ?" répondit Harry en baissant la voix.
"J'imagine…" dit Hermione lentement. "Mais je ne pense pas qu'il puisse la posséder de la même manière qu'il possédait Quirrell. Tu comprends, il a retrouvé une vie à part entière, maintenant, il dispose de son propre corps, donc il n'a plus besoin de partager celui d'un autre. Bien sûr il pourrait la dominer par le sortilège de l'Imperium…"
Harry détourna le regard. Visiblement, il était déçu par son manque de conviction face à sa théorie.
"L'année dernière…" poursuivit-t-elle. "Ta cicatrice te faisait mal alors que personne ne te touchait et Dumbledore a dit que c'était en rapport avec les émotions que Tu-Sais-Qui ressentait à ce moment-là, tu te souviens ? Peut-être que ça n'a rien à voir avec Ombrage, peut-être s'agit-il d'une simple coïncidence ?"
"Elle est malfaisante." trancha Harry d'un ton sans réplique. "Elle est tordue…"
"C'est vrai, elle est horrible." concéda Hermione avec une grimace. "Harry, je crois que tu devrais aller dire à Dumbledore que ta cicatrice te fait mal."
"Je ne veux pas le déranger avec ça." marmonna Harry. "Comme tu viens de le dire, ce n'est pas très grave. J'ai senti la douleur aller et venir pendant tout l'été… J'ai eu un peu plus mal ce soir, voilà tout."
"Harry, je suis sûre que Dumbledore voudrait que tu le déranges pour lui en parler." affirma Hermione.
"Oui, c'est la seule chose chez moi qui intéresse Dumbledore : ma cicatrice."
"Ne dis pas ça, ce n'est pas vrai !" répondit-elle d'un ton effaré.
"Je crois plutôt que je vais écrire à Sirius et lui demander ce qu'il en pense…" commença Harry.
"Harry, tu ne peux pas écrire ça dans une lettre !" s'exclama Hermione. "Souviens-toi, Maugrey nous a bien recommandé de faire attention à ce qu'on écrivait ! On ne peut pas être sûrs que nos hiboux ne seront pas interceptés !"
"D'accord, d'accord, dans ce cas, je ne lui raconterai rien !" répliqua Harry avec mauvaise humeur.
Il se passa une main dans les cheveux nerveusement, et Hermione remarqua alors une traînée de sang sur sa main et elle laissa échapper un cri scandalisé.
"Mon Dieu, Harry ! Ta main !"
Sans qu'il puisse esquisser le moindre mouvement de recul, elle lui prit le poignet et tira sa main vers elle pour la regarder. Au début, elle pensait que c'était la blessure que le Botruc lui avait faite en Botanique qui s'était rouverte. Mais elle vit alors avec horreur que ce n'était pas le cas du tout.
""Je ne dois pas dire de mensonges" ?" lut-elle d'une voix paniquée. "Harry, qu'est-ce que c'est que ça ?"
Sur le dos de la main d'Harry, une phrase était marquée dans sa chair, comme si quelqu'un lui avait écrite au fer blanc. Hermione reconnut l'écriture d'Harry, où les lettres s'entassaient un peu les unes contre les autres. Sa main était mutilée, avec des tâches de sang le long de sa peau, où chaque lettre était ancrée dans sa chair à vif.
"C'est rien." maugréa-t-il en essayant de reprendre sa main.
"Comment ça, rien ?" s'exclama Hermione, d'une voix qui montait dangereusement dans les aiguës. "Qui a écrit ça sur ta main ?!"
Harry soupira, et céda à lui dire :
"C'est Ombrage." annonça-t-il gravement. "Elle me fait recopier cette phrase tous les soirs en retenue, et au lieu de s'écrire sur le parchemin, ça s'écrit sur ma main… Avec mon sang."
Hermione eut aussitôt un haut-le-cœur.
"Harry, tu dois te plaindre à quelqu'un." dit-elle fermement. "À McGonagall, ou Dumble…"
"Je te l'ai déjà dit. Dumbledore a d'autres choses à faire." asséna Harry.
Il arracha sa main de celle d'Hermione et massa inconsciemment l'endroit où sa peau était boursouflée par les mutilations. Hermione plissa les lèvres mais ne dit rien, sachant pertinemment comment réagirait Harry si elle insistait. Elle observa plutôt le dos de sa main et sentit une vague de fureur s'écraser en elle à l'égard d'Ombrage. Cette femme était tellement vicieuse…
Alors, pendant qu'Harry contemplait le feu en silence, Hermione réfléchit donc à un moyen de se venger.
.
.
.
Le lendemain matin, Hermione était en train de remplir son planning de devoirs pour la journée à la table des Gryffondors quand Drago entra dans la Grande Salle. Sans savoir pourquoi, Hermione sentit que c'était lui avant même de le voir. Elle leva machinalement les yeux pour l'observer s'asseoir avec ses amis. Il se servit un café noir qu'il avala d'une traite, puis coupa une pomme verte en quartiers. Il discutait avec Zabini et Nott, et ne se rendit pas compte que Parkinson lui piqua un morceau de pomme de son assiette.
"Hermione ?"
Hermione tourna précipitamment la tête vers Ron, qui la regardait comme quelqu'un qui avait répété sa phrase plusieurs fois.
"Tu vas bien ?"
"Hum, oui, juste un peu fatiguée." mentit-elle en se servant un second café.
"M'en parle pas, je suis épuisé." renchérit Ron en fourrant une énorme bouchée d'œufs brouillés dans sa bouche en même temps. "Entre le Quidditch, les cours et les devoirs, j'ai l'impression que ça fait déjà deux mois qu'on est là !"
"Tu as terminé l'essai sur les lunes de Jupiter, en Astronomie ?" demanda-t-elle en consultant son planning.
Ron grogna dans sa barbe :
"Pourrais-tu éviter de me parler de travail quand je suis en train de manger ? Je viens à peine de me réveiller !" se plaignit-il.
Hermione claqua sa langue dans un bruit désapprobateur. Harry arriva à la table des Gryffondors à ce moment, tout sourire.
"Bonjour !" lança-t-il d'un ton claironnant.
Hermione haussa les sourcils, peu habituée à cet enthousiasme dès le matin de la part d'Harry.
"Qu'est-ce qui te met de si bonne humeur ?" demanda Ron en le dévisageant avec surprise.
"Euh… de jouer au Quidditch tout à l'heure." répondit Harry en se servant à manger.
Hermione savait qu'il mentait, et son instinct lui disait que ça devait être en rapport avec Cho, la fille dont Harry était amoureux depuis l'année précédente. Elle ne fit pas de commentaire et but une gorgée de café.
Ron s'éclaircit alors la gorge et demanda à Harry d'une voix peu assurée :
"Écoute… Est-ce que ça te dirait d'y aller un peu plus tôt avec moi pour… Euh… Que je m'habitue un peu avant la séance ? Que je puisse me mettre au niveau, tu vois ?"
"Oui, bien sûr." répondit Harry.
"Et bien, moi, je crois que tu ne devrais pas." fit remarquer Hermione. "Vous avez tous les deux beaucoup de retard dans vos devoirs et je pense que…"
Sa phrase fut interrompue par l'arrivée quotidienne des hiboux dans la Grande Salle. Les garçons en profitèrent pour ne pas ramener le sujet des devoirs sur le tapis de nouveau, ce qui agaçait Hermione au plus haut point.
"Rien d'intéressant ?" demanda Ron lorsqu'elle eut ouvert la Gazette du jour.
Hermione balaya du regard les titres du journal sans conviction. Elle vit une photo d'un homme aux yeux maquillés de noir, qui agitait des bâtons dans les airs en hurlant.
"Non, juste des idioties sur la bassiste des Bizarr' Sisters qui va se marier…" dit-elle en même temps que ses yeux parcouraient le reste de la page.
Elle ouvrit le journal et lut les premiers articles. Elle ne s'attarda pas longtemps sur le mariage du bassiste, ou sur les conseils astrologiques de Celestia Valpan. Hermione lut plutôt quelques articles sur l'actualité, quand soudain, ses yeux se posèrent sur un nom familier qui fit tomber son cœur dans son estomac.
"Oh non, Sirius !" s'exclama-t-elle impulsivement.
"Quoi ? Qu'est-ce qu'il s'est passé ?!" glapit Harry en tendant une main vers le journal.
Il l'attrapa mais la poigne d'Hermione était si ferme qu'il arracha la moitié de la page du journal.
"Le Ministère de la Magie a reçu d'une source digne de foi une information selon laquelle Sirius Black, l'assassin de sinistre réputation… bla, bla, bla… se cacherait actuellement à Londres !" lut Hermione dans un murmure angoissé.
"Ça, je suis prêt à parier n'importe quoi que c'est un coup de Lucius Malefoy." gronda Harry furieusement. "Il a dû reconnaître Sirius sur le quai de la gare…"
Le cœur d'Hermione refit une chute colossale et elle étouffa une petite exclamation de surprise. En une fraction de seconde, elle monta son regard et observa Drago, qui mangeait toujours tranquillement avec ses amis sans la voir. Est-ce qu'il aurait pu faire ça ? Aurait-il pu prévenir son père, le Ministère, trahir sa confiance ?
"Quoi ?" s'écria Ron, affolé. "Mais vous ne m'avez pas dit…"
"Chut !" ordonna Hermione, qui ne voulait pas attirer l'attention des autres Gryffondors sur eux. Elle continua de lire à voix basse : "Le Ministère a le devoir d'avertir l'ensemble de la communauté des sorciers que Black est un homme très dangereux… a tué treize personnes… s'est évadé d'Azkaban…" Les imbécilités habituelles."
Elle reposa le journal et poussa un petit soupir de soulagement. Il n'y avait aucune information sur la forme d'Animagus, ou sur les informations qu'elle avait partagé à Drago la veille. Harry avait raison, c'était probablement une initiative de Lucius Malefoy. Elle avait confiance en Drago, elle savait, au fond d'elle, qu'il ne ferait rien pour briser leur promesse.
"Hé !" dit soudain Harry, en posant le bout de journal qu'il avait déchiré sur la table. "Regardez !"
Il montrait une pub pour le magasin de prêt à porter de Madame Guipure qui proposait des articles en solde. Hermione fronça les sourcils, sans comprendre pourquoi Harry était aussi excité par cette perspective.
"Euh… Je n'ai pas besoin de robes, j'ai tout ce qu'il me faut." répondit Ron, tout aussi surpris qu'elle.
"Non, pas ça ! Regardez, là, cet entrefilet…"
Il montra un tout petit article, en bas d'une colonne. Hermione et Ron se penchèrent pour lire :
Sturgis Podmore, trente-huit ans, domicilié au 2, Laburnum Gardens, à Clapham, a été déféré devant le Magenmagot pour effraction et tentative de vol au ministère de la Magie, le 31 août dernier. Podmore a été appréhendé par le sorcier-vigile du ministère, Éric Munch, qui l'a surpris à une heure du matin alors qu'il essayait de forcer une porte de haute sécurité. Podmore, qui a refusé de présenter sa défense, a été condamné pour ces deux chefs d'accusation à six mois de prison au pénitencier d'Azkaban.
"Sturgis Podmore ?" répéta lentement Ron. "C'est celui qui avait un toît de chaume sur la tête, non ? Il fait partie de l'Ord…"
"Ron ! Chut !" interrompit Hermione en regardant autour d'eux pour vérifier que personne n'écoutait leur conversation.
"Six mois à Azkaban !" murmura Harry, choqué. "Simplement pour avoir essayé d'ouvrir une porte !"
"Ne sois pas stupide, ce n'était pas seulement pour ça. Que pouvait-il faire à une heure du matin au ministère de la Magie ?" souffla Hermione.
"Tu crois qu'il était en mission pour le compte de l'Ordre ?" chuchota Ron.
"Attendez un peu…" dit Harry, pensif. "Sturgis devait nous accompagner l'autre jour, vous vous souvenez ? Il devait faire partie de notre escorte pour aller à King's Cross, c'est bien ça ? Et Maugrey n'était pas content parce qu'il n'est pas venu. Donc, il n'était pas en mission pour eux."
"Peut-être ne savaient-ils pas encore qu'il s'était fait prendre ?" proposa Hermione.
"Ou peut-être que c'est une machination !" s'exclama Ron, surexcité. "Le Ministère le soupçonne d'être un allié de Dumbledore, alors, ils l'attirent là-bas, mais en fait il n'a pas du tout essayé de forcer cette porte ! C'était tout simplement un piège pour pouvoir l'arrêter !"
Hermione baissa les yeux en réfléchissant à cette théorie, qui ne lui paraissait pas si inconcevable que ça.
"Je ne serais pas surprise que ça soit vrai." admit-elle.
Elle reposa les yeux sur son planning et reprit sa plume :
"Bon, je pense qu'on devrait s'occuper d'abord du devoir pour Chourave sur les arbrisseaux autofertilisants." dit-elle en même temps que les lignes s'inscrivaient dans son planning. "Avec un peu de chance, nous aurons peut-être le temps de commencer celui pour McGonagall sur le sortilège de Disparition avant l'heure du déjeuner…"
Harry se mordit la lèvre et Ron se pencha tellement que ses cheveux tombèrent sur son assiette.
"Euh… En fait, Hermione, je crois qu'on va aller s'entraîner au Quidditch…" confessa timidement Harry.
Hermione leva brusquement les yeux vers eux.
"Toute la matinée ?" dit-elle de sa voix haut perchée. "Mais vous avez déjà entraînement à 14h !"
"Je dois me remettre à niveau…" marmonna Ron sans grande conviction.
Elle observa les deux garçons successivement, tous les deux tout penauds.
"Très bien." annonça Hermione en refermant brutalement son planning, faisant sursauter Harry et Ron. "Si vous préférez mettre le Quidditch -un jeu, je tiens à le rappeler- au-dessus des devoirs, c'est votre problème. Ce n'est pas mon affaire si vous échouez vos BUSES parce que vous avez accumulé trop de retard ! Et ne pensez pas un seul instant que je vous aiderai !"
"Désolé, Mione…" dit Ron en quittant le banc de la table des Gryffondors précautionneusement.
"On ne rentrera pas tard, c'est promis…" assura Harry en suivant le mouvement de Ron.
"Harry Potter et Ronald Weasley, vous revenez ici tout de suite !"
Mais ils avaient déjà pris la fuite. Hermione fulmina intérieurement et reposa sa main sur la table, évitant soigneusement de croiser les regards amusés de Fred et George à sa gauche.
Quelques minutes plus tard, Ginny s'installa en face d'Hermione, à la place qu'Harry occupait juste avant qu'il ne s'enfuie lamentablement.
"Bonjo-, oh." dit-elle simplement en voyant le visage d'Hermione.
"Quoi ?" demanda la concernée d'un ton un peu trop agressif.
"Rien, tu as simplement l'air de vouloir jeter un sortilège à la première personne qui ose t'adresser la parole." commenta Ginny avec un petit rire. "Qu'est-ce qui te met dans cet état ?"
"Ton frère, évidemment." grommela Hermione en mangeant un morceau d'omelette. "Et Harry. Ils préfèrent s'entraîner au Quidditch plutôt que de travailler."
"Je ne peux pas les blâmer." répondit Ginny avec un haussement d'épaules.
"Mais toi, tu n'as pas tes BUSES à la fin de l'année." pointa Hermione. "Ils sont complètement irresponsables."
Derrière l'épaule de Ginny, elle aperçut Drago éclater de rire à quelque chose que venait de dire Zabini. Elle eut l'envie curieuse de savoir ce qu'il venait de dire. Mais elle se renconcentra vite sur Ginny en face d'elle qui lui répondait :
"- viendront te demander de l'aide et réaliseront à quel point ils auraient dû travailler avant."
Hermione hocha la tête, bien qu'elle n'avait pas saisi le début de la phrase. Ginny se servit un grand verre de jus de citrouille, puis ouvrit la Gazette déchirée d'Hermione d'une main pour lire les titres de la journée.
Hermione était sur le point de lui demander si Luna allait se joindre à elles quand Ginny recracha sa gorgée de jus et plaqua une main sur sa bouche avec une lourde exclamation. Hermione leva la tête et contempla les yeux écarquillés d'horreur de sa meilleure amie qui lisait la première page du journal.
"Oui, on a vu pour Sirius." commença Hermione. "Mais ne t'en fais pas, il ne risque pas de quitter la maison main…"
"Donaghan Tremlett !" hurla Ginny avec stupeur. "Oh, Merlin, non, non, non !"
"... maintenant qu'il a été aper… Quoi ?"
"Donaghan Tremlett !" répéta Ginny, les yeux écarquillés.
"De quoi tu parles ?" demanda Hermione, perplexe.
"Le bassiste des Bizarr' Sisters ! Il va se marier ! Oh, Merlin, non !"
Hermione ferma la bouche, soudainement à court de mots. Elle ne s'était absolument pas attendue à une réaction aussi dramatique de la part de Ginny. Elle lut l'article en quelques secondes, un air de pure panique incrusté sur son visage, puis arracha son regard de la photo qui l'accompagnait pour le poser sur Hermione. On aurait pu penser qu'elle venait de découvrir qu'un membre de sa famille était porté disparu.
"Non, non, non ! Je suis dégoûtée !" cria-t-elle avec rage.
"À cause… Du… Mariage… Du bassiste ?" demanda tentativement Hermione, qui ne comprenait rien à la tournure des événements.
"Oui !" répondit Ginny avec horreur. "Pourquoi se marier si tôt ?!"
"Hum… Je n'en sais rien… Pourquoi ça t'énerve tant que ça, Gin' ?" demanda la brune, en essayant tant bien que mal de modérer sa voix pour ne pas l'énerver davantage.
"Parce que je suis amoureuse de lui depuis mes 10 ans !" s'écria Ginny en piquant rageusement son assiette avec sa fourchette. "On était censés se marier ! J'ai des posters de lui dans ma chambre, et j'écoute son album sept fois par jour…"
Hermione ravala un rire qu'elle dissimula par une toux.
"Oh… Mais, Ginny, tu sais qu'il doit avoir… dix ans de plus que toi ?" dit timidement Hermione.
La rouquine grogna en guise de réponse. Ce n'était visiblement pas la bonne chose à dire.
"Et euh… Tu ne sors plus avec Michael ?" demanda Hermione dans un murmure, pour ne pas que Fred ou George entende.
"Si, si, bien sûr…" répondit-elle avec un geste évasif de la main. "Il est très gentil, mais ce n'est pas… Je veux dire, Donaghan ! Merlin, c'est le plus beau garçon que j'ai vu de ma vie, on serait parfait ensemble…"
Hermione risqua un coup d'œil vers la photo du bassiste, qu'elle trouvait particulièrement repoussant. Elle plissa les lèvres et préféra ne rien répondre.
"Qu'est-ce qu'il se passe, Gin' ?" demanda George d'un ton inquiet en voyant Ginny se prendre la tête entre les mains.
Elle préféra lui jeter la Gazette au lieu de répondre. George fronça les sourcils et lut l'article, puis ses yeux s'agrandirent considérablement :
"Nooon, il n'a pas fait ça…" murmura-t-il, scandalisé.
Il tendit le journal à Fred qui eut la même réaction. Les deux jumeaux se levèrent pour aller enlacer leur soeur :
"Oh, Ginny, on est vraiment désolés…"
Hermione resta interdite. Elle savait que Ginny était une grande fan du groupe, mais elle n'aurait jamais pensé que ça puisse l'affecter à ce point-là.
"Si tu veux, on peut lui envoyer une lettre pleine de pus de Bubobulb…" proposa Fred.
Ginny hocha la tête contre l'épaule de George qui lui caressa les cheveux pour la consoler.
"J'en ai reçu l'année dernière, et je peux confirmer que ça fait très mal." dit Hermione, ce qui fit un peu sourire Ginny.
Une fille de Gryffondor, probablement de la même année que Ginny, passa à ce moment-là, le visage empli de compassion. Elle tenait un exemplaire de la Gazette dans la main.
"Hey, Ginny…" dit-elle doucement. "Je viens de lire la nouvelle… Je suis vraiment désolée…"
"Merci, Dorothy…" répondit Ginny en réprimant un sanglot.
La fille posa une main sur son épaule en réconfort et retourna s'asseoir.
"Euh… Gin', ça te dit de prendre un peu l'air ?" proposa Hermione. "Pour te changer les idées…"
"Oui, bonne idée." répondit-elle d'une voix pleine de tristesse.
George la lâcha et l'aida à se relever du banc.
"Nous allons travailler cette idée de pus de Bubobulb…" promit-il à voix basse. "Il va s'en vouloir, ne t'en fais pas…"
Ils sortirent du Château en même temps : Fred et George se dirigèrent (suspicieusement) vers les serres de Botanique, tandis qu'Hermione et Ginny allaient s'asseoir sur un banc de la cour de Métamorphose, qui était déserte. Il faisait assez frais, alors Hermione jeta un sortilège de Chaleur autour d'elles.
"Si ça peut te consoler…" dit Hermione. "Je trouve sa fiancée particulièrement affreuse."
"C'est vrai ?" demanda Ginny, plein d'espoir.
"Oh oui." dit Hermione, bien qu'elle n'avait même pas regardé la photo. "Vous formeriez un bien meilleur couple."
"Merci, Mione. Je le pense aussi." Ginny eut un petit rire étranglé. "C'est un peu idiot de me mettre dans tous mes états pour ça." admit-elle. "Je suppose que c'est ça, quand on a une obsession pour une célébrité depuis des années… Est-ce que tu as quelqu'un comme ça, toi ? Une star dont tu es amoureuse depuis toujours ?"
Hermione réfléchit à la question mais secoua la tête.
"Non, pas vraiment... Quand j'étais petite, les seules personnes que j'admirais vraiment étaient les auteurs de livres moldus, et ils sont tous pratiquement morts, donc…"
Ginny éclata de rire et Hermione ne put s'empêcher de l'imiter.
"Vraiment ?" demanda Ginny avec curiosité. "Tu n'as jamais eu ça ? Une admiration secrète pour un garçon ?"
Le cerveau trop rapide d'Hermione fusa. Drago. Elle s'étrangla à moitié sur son rire.
"Non." répondit-elle un peu trop vite.
"Menteuse, tu es toute rouge !" dit Ginny en pointant ses joues du doigt avec un rire. "Allez, tu peux me le dire, je te jure que je ne le répéterai pas !"
Hermione se mordit la lèvre. En fait, elle avait désespérément envie d'en parler à Ginny. C'était la seule personne qui savait pour les séances de révisions à la Bibliothèque, et elle savait qu'elle ne la jugerait jamais, ou qu'elle ne poserait pas trop de questions indiscrètes. Elle mourrait d'envie de lui confesser ses tracas et d'avoir des réponses à des questions intérieures qui animaient sa tête depuis des semaines.
"Et bien… Maintenant que tu en parles, il y a bel et bien quelqu'un." murmura Hermione en baissant le regard. "Mais ce n'est pas une célébrité."
"Ah bon ?" s'étonna Ginny. "Qui ça ?"
Hermione prit une grande inspiration et observa la fontaine de la cour de Métamorphose pour formuler sa phrase.
"C'est… Quelqu'un de Poudlard." confessa-t-elle. "Et je crois que… Ginny, je crois que je l'aime bien. Vraiment beaucoup."
.
.
J'aurais pu appeler ce chapitre "Drago Malefoy et Ginny Weasley les dramaqueens de Poudlard"
(Pour la scène de Ginny, je me suis inspirée de moi-même quand j'ai vu que Taylor Lautner allait se marier, j'ai pleuré pendant deux jours)
