Hello tout le monde!
J'aime beaucoup le chapitre du jour, plein de petites scènes cutes dans la Bibliothèque pour votre plus grand plaisir 3
quelques petites notes avant de commencer :
- il y a un petit problème chronologique avec le cours de Rogue qui est décalé d'une semaine par rapport au livre (je crois)
- il y a une "longue" scène qui se passe pendant le cours de Potions, et comme j'écoute souvent des playlists en rapport avec le lieu où se déroule l'action de l'histoire, j'ai mis une playlist avec des bruits de chaudron que j'adore, je vous mets le lien ici si vous voulez vous mettre dans l'ambiance : /hnYt0Eq0P1M?si=zfwwa2pmw9_aSLwa
- d'ailleurs, en parlant de musique, je vous rappelle qu'il existe une playlist crée avec amour et soin dans laquelle j'ai mis toutes les musiques qui me font penser à Mon Ange Gardien, je vous remets le lien : /playlist?list=PLQ7Uei7CzLYdXbsMLJb75-2D2M-F26sl-&si=EECDViufXkKa_ash
- même si ce chapitre est très mignon avec plein de fluffy scenes, il y a tout de même un passage où Harry parle de Cedric et où il mentionne sa mort. Je ne mets pas de tw parce que ce n'est pas très détaillé mais je préfère prévenir tout de même!
- dernier point, j'ai réalisé en écrivant ce chapitre que les élèves n'ont en fait pas de lettres à la place de leurs notes depuis le début de Poudlard. En fait, c'est juste pendant les BUSES qu'ils ont des O, E, A… Étant donné que je leur ai donné des lettres depuis la première année et que je n'ai pas très envie d'aller tout corriger, j'ai préféré faire comme si Rogue disait ça pour leur dire qu'il a noté avec sévérité, et j'ai ignoré la scène où Fred explique le fonctionnement des notes à Hermione… Désolée!
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Drago
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Drago n'eut pas le temps de demander à Granger si ses suspicions sur Rita Skeeter étaient vraies, parce qu'il avait le cours d'Occlumancie avec Rogue et qu'il ne pouvait pas se rendre à la Bibliothèque. Mais pendant tout le cours partagé de Soins aux Créatures Magiques, Drago l'observa, la tête pleine de théories.
Il avait un pressentiment. Un peu comme avec le Retourneur de Temps, en troisième année. Il savait qu'elle avait quelque chose à voir là-dedans. Tout concordait : Skeeter n'avait pas donné de nouvelles depuis trois mois, ce qui correspondait exactement au moment où Granger l'avait surpris en train de lui révéler des secrets, sous l'arbre de la cour de Métamorphose. Trois mois, ça correspondait aussi à la mort de Diggory, et pourquoi Rita Skeeter, la plus grande journaliste à scandales du monde des sorciers, n'écrirait rien sur le plus gros événement de la dernière décennie ?
Drago n'avait pas besoin de relire les lettres de Granger de cet été, il les connaissait par cœur à force de les avoir relues tous les soirs. Il se souvint parfaitement que Granger avait été furieuse qu'il ne lui ait pas révélé le secret de l'Animagus plus tôt, ou qu'il dévoile des informations confidentielles sur son précieux Potter.
Mais maintenant que Drago y repensait, il ne lui avait jamais explicitement demandé comment elle avait su.
Il regarda Granger prendre des notes sur la classe, et se demanda si cette fille, la première élève de Poudlard, la plus grande Miss-Je-Sais-Tout d'Angleterre, la meilleure amie des deux garçons les plus lamentables de l'école (en comptant Crabbe et Goyle), puisse avoir quelque chose à voir avec la disparition de Rita Skeeter.
Un Drago de deuxième année aurait répondu un non catégorique. Comment cette fille insupportable, intello et pleurnicheuse pourrait avoir menacé une journaliste si renommée ?
Aujourd'hui, Drago n'en avait aucun doute.
Granger était impliquée, d'une manière ou d'une autre.
Sa tête bourdonnait toujours de questions quand il alla frapper dans le bureau de Rogue, à 18h tapantes. Ce fut la voix gutturale de son professeur qui le fit brusquement revenir à la réalité.
"Entrez !"
Avant d'ouvrir la porte, Drago ferma son esprit.
La pièce était exactement comme l'année précédente : l'immense bureau noir était au centre de la pièce, à côté d'une antre de cheminée en granit où était allumé un feu aux reflets verts. La pièce était sombre, la seule source de lumière provenait d'un chandelier posé sur le rebord de la cheminée, et qui éclairait à peine les parchemins sur lesquels Rogue était penché. Il invita Drago à s'asseoir et continua d'écrire une bonne minute.
Il finit par reposer sa plume, puis passa son regard, aussi sombre que son bureau, sur le visage de Drago.
"Je vois que vous Occludez." dit-il.
Drago haussa les sourcils, étonné par ce début de conversation.
"Ça se voit tant que ça ?" demanda-t-il.
"Quand on connaît les effets de l'Occlumancie, oui, ça peut se voir facilement." dit Rogue, calmement. "Mais les expressions faciales peuvent être corrigées, avec le temps."
Rogue l'analysa encore quelques secondes, puis parut satisfait : il se leva, et Drago fit de même.
"Vous êtes-vous entraîné, cet été ?" demanda Rogue en remontant sa manche.
"Oui, tous les soirs." dit Drago, avec une pointe de fierté dans la voix. "J'ai médité et j'ai rangé mes souvenirs, puis je me suis entraîné à fermer mon esprit rapidement."
"Et votre mère ? A t-elle remarqué quelque chose ?" demanda Rogue.
Drago fut surpris par cette question. Il réfléchit, ne voyant pas très bien ce que son professeur voulait dire.
"Hum… Oui, je suppose." dit-il honnêtement. "Nous n'en avons pas parlé directement, mais si vous arrivez à voir que j'Occlude, je suppose que ma mère aussi…"
"Comme je vous l'ai dit la première fois, votre mère a suivi des enseignements de Légilimancie et d'Occlumancie depuis son plus jeune âge, en accord avec l'éducation de la lignée des Black depuis des années. Certains disent que les descendants de cette lignée auraient un don, une faculté pour fermer son esprit."
Maintenant qu'il savait que sa mère était une Occlumens, il avait en effet remarqué les changements sur son visage quand elle fermait son esprit. Elle était encore plus glacée. Il hocha la tête et Rogue ne rajouta rien de plus sur Narcissa. À la place, il brandit sa baguette sur Drago :
"Legilimens !"
Contrairement aux premières fois où Rogue était entré dans sa tête, Drago sentit à peine l'intrusion. Il s'y était préparé. L'aiguille qui lui avait martelé le cerveau n'était plus qu'une petite pique légère. Tous ses secrets étaient bien rangés, au fin fond de son esprit, et hors d'accès.
Rogue ne se laissa pas décourager. Il entra sans ménagement, et fit ressurgir des souvenirs aléatoires.
Drago sur le banc en train d'observer le coucher de soleil sur la vallée de Poudlard. Le maudit hippogriffe d'Hagrid qui lui entaille le bras, et la douleur qu'il avait ressenti à ce moment-là. Blaise endormi sur son pupitre, en Histoire de la Magie. Pansy qui éclate de rire au dîner. Potter qui lui lance un regard noir, perché sur son balai.
L'aiguille se retira doucement et Drago inspira. Les souvenirs qu'avaient pris Rogue étaient inoffensifs. Il n'essaya pas de le repousser, ou de cacher les images qui défilaient devant ses pupilles. "La première qualité d'un bon Occlumens est de ne pas l'être."
Rogue attendit quelques secondes, et soudain, l'aiguille revint de nouveau, bien plus pressante. Il inspecta chaque recoin de son esprit avec hargne, et Drago sentit les battements de son cœur s'accélérer. Mais il resta calme. Il savait où étaient les souvenirs, et il savait que Rogue n'y accèderait jamais. L'intrusion dura plusieurs minutes, et Drago se laissa faire. Il savait que le repousser le dévoilerait.
Quand Drago ne sentit plus l'aiguille, il ouvrit les yeux. Rogue avait abaissé sa baguette et le regardait avec un froncement de sourcils. Drago fut pris d'un léger vertige et toussa plusieurs fois, en sentant le familier mal de tête cogner contre sa tempe droite.
"Je dois saluer votre persévérance, Drago." dit Rogue avec gravité. "Vous savez parfaitement Occluder, maintenant. Une science que peu de sorciers arrivent à maîtriser, et encore moins en si peu de temps, et à un si jeune âge."
Drago hocha la tête, sans savoir quoi répondre. Il n'était pas habitué à ce que Rogue lui fasse des compliments.
Quelque part dans sa bibliothèque mentale, la raison de son acharnement lui souriait, avec des boucles châtains qui encadraient son visage.
"Maintenant, je veux voir à quelle vitesse vous pouvez fermer votre esprit." annonça Rogue. "Arrêtez d'Occluder."
Drago obéit. Rogue patienta quelques minutes, complètement silencieux. Sa main était dans sa poche, et Drago savait qu'il tenait sa baguette du bout des doigts. Il attendit, son cœur battant de plus en plus vite. Ses mains étaient moites. Il attendit, et les minutes s'étirèrent, inexorablement, et Drago fixait la main de Rogue cachée dans sa poche.
Et soudain, Rogue murmura :
"Legilimens !"
Drago avait été tellement sûr qu'il brandirait sa baguette qu'il fut pris de court. Il n'avait pas réalisé que Rogue pouvait faire des sortilèges sans. Il ferma son esprit deux secondes après que l'aiguille de Rogue soit entrée.
"Trop tard." annonça Rogue. "J'ai pu voir une porte. C'est là que vous avez rangé vos souvenirs, je présume ?"
Drago, qui haletait sans raison, acquiesça. Rogue lui conjura un verre d'eau qu'il but d'une traite, et attendit patiemment qu'il retrouve son souffle.
Ils refirent ça une dizaine de fois. À chaque fois, Drago mettait une ou deux secondes de trop pour fermer son esprit, et ça le frustrait énormément. Rogue ne réussit pas à entrer dans sa bibliothèque, mais chaque intrusion était plus perçante, plus pénible que la précédente.
Quand Rogue s'approcha un peu trop près de la porte de sa bibliothèque, Drago le repoussa de toute sa force mentale et laissa échapper un râle de douleur.
"C'est très bien, Drago." encouragea Rogue en sortant de son esprit.
"Non, je n'y arrive pas !" s'exclama Drago, frustré. "Je n'arrive pas à fermer mon esprit assez vite !"
"Nous nous entraînerons à faire ça les prochaines fois." décida Rogue. "Mais vous n'avez pratiquement plus besoin de moi, vous avez réuni toutes les techniques pour être un bon Occlumens. N'oubliez pas de continuer à méditer, et de vous entraîner à fermer vos esprits à des moments hasardeux dans vos journées."
Drago acquiesça, ce qui augmenta la douleur lancinante de sa tempe. Il fut sur le point de sortir quand Rogue le rappela. Drago se retourna, et vit Rogue fouiller quelque chose dans son tiroir de bureau. Il posa une fiole sur le bureau.
"Est-ce que vous pourriez donner ceci à Mr. Nott ?" demanda le professeur.
Drago resta immobile. Il observa la potion et reconnut l'Essence de Murlap à sa couleur jaunâtre.
"Pourquoi ne lui donnez-vous pas vous-même ?" demanda Drago d'une voix sèche.
"Parce que je pense qu'il vaille mieux que ça vient d'une personne en qui il a confiance." répondit Rogue du tac au tac, insensible à la colère soudaine de Drago. "Et je sais qu'il vous fait confiance."
Drago analysa la situation plusieurs fois, incertain des intentions de Rogue. Ce dernier était debout derrière son bureau, et le regardait à travers le voile de ses cheveux noirs. Un pli entre ses deux sourcils creusait son visage d'habitude fermé.
Il s'imagina partir sans prendre la potion, juste pour faire chier Rogue. Juste pour le forcer à trouver une autre solution.
Puis, il pensa aux cicatrices sur le corps de Théo qui serpentaient sur la peau de son torse, et il céda. Il s'approcha du bureau rapidement, et prit la potion d'un mouvement brusque. Il tourna sur ses talons, et prit la poignée de la porte entre ses doigts, mais il s'arrêta quand Rogue murmura :
"Vous savez, Drago, j'essaye simplement de l'aider."
Drago sentit la colère piquer sa peau. Il serra ses doigts contre la poignée et vit ses phalanges devenir blanches, mais il ne desserra pas sa prise. Il se retourna à peine pour lui répondre :
"Avec tout mon respect, Professeur," cracha-t-il. "Je crois que vous avez deux ans de retard pour ça."
Et il s'échappa du bureau de Rogue avant d'avoir une réponse.
Il parcourut les quelques mètres qui séparaient le bureau de la Salle Commune des Serpentards et marmonna le mot de passe entre ses dents. Il n'avait, comme après chaque séance d'Occlumancie avec Rogue, aucune envie de manger. La fête n'avait pas encore commencé, alors Drago retrouva ses amis dans le dortoir. Théo était en train de lire sur son fauteuil, Pansy était assise dans le lit de Blaise et se coiffait avec son miroir, et Blaise se préparait dans la salle de bains.
"Alors ? Comment ça s'est passé ?" demanda-t-il en passant sa tête dans l'embrasure de la porte.
"Il a dit que j'arrivais à bien Occluder, mais je n'arrive pas à fermer mon esprit assez rapidement, ça me rend dingue." dit Drago avec un soupir fatigué.
"C'est-à-dire ?" demanda Pansy en fronçant le nez.
"Il m'attaque sans que je m'y attende, et je dois fermer mon esprit assez vite pour ne pas qu'il puisse entrer." expliqua Drago.
Pansy écarquilla les yeux, exactement comme Théo, qui sortit enfin la tête de son bouquin.
"Quoi ? Mais ça a l'air horrible !"
"C'est surtout frustrant." grommela Drago. "Et ça me donne un mal de tête…"
Il se massa la tempe en fermant les yeux, sans voir les trois regards inquiets posés sur lui.
"Tu es sûr que… Que ça vaut le coup, cette Occlumancie ?" demanda Théo, soucieux. "Ça a l'air épuisant."
"Oui, je suis sûr." répondit-il fermement, malgré la faiblesse de sa voix.
"Qu'est-ce que tu tiens dans la main ?" demanda Pansy.
Drago retira sa main de son front brûlant et montra la fiole d'Essence de Murlap.
"C'est Rogue qui m'a donné ça. C'est pour toi, Théo."
Il lui tendit, et le garçon se redressa dans son fauteuil sans comprendre.
"Pour moi ? Pourquoi ?"
"J'sais pas, Rogue m'a juste dit de te donner ça."
Théo prit la fiole, et analysa son contenu. Dès qu'il comprit, il la rangea hâtivement dans sa poche avant que Pansy puisse la regarder trop longtemps.
"Qu'est-ce que c'est ?" demanda-t-elle.
"Une potion." répondit Théo.
"J'avais compris." répliqua-t-elle d'une voix aiguë. "Pourquoi Rogue te donnerait une potion ?"
"Parce que c'est un professeur de Potions." répondit Théo en reprenant son livre.
Pansy se leva du lit, les bras croisés de mécontentement.
"Théo !" s'écria-t-elle d'un ton perçant qui accentua la migraine de Drago.
Théo soupira, et finit par avouer sans la regarder :
"Parce que c'est celle que j'étais en train de lui voler dans sa réserve quand il m'a surpris, lundi dernier."
"Quoi ?" s'étonna Blaise depuis la salle de bains. "Tu volais une potion ?"
"Ouais, dans sa réserve. Je le fais souvent." marmonna Théo en faisant semblant de continuer de lire, les joues légèrement rosées.
"Mais pourquoi ?" demanda Pansy avec insistance.
Théo dû comprendre qu'elle ne lâcherait pas l'affaire, parce qu'il soupira une seconde fois et expliqua avec réluctance :
"C'est de l'Essence de Murlap. Je l'utilise pour mes cicatrices. Ça fait moins mal que l'Essence de Dictame, et c'est censé partir plus vite."
Pansy se figea. Blaise arrêta de se regarder dans le miroir et observa Théo par l'ouverture de la porte.
"C'est ça que tu faisais, avec Granger ?" devina le brun après plusieurs secondes de silence gêné.
"Ouais." dit Théo avec un haussement d'épaules. "Elle m'a surpris en train de fouiller dans la réserve, et elle m'a défendu quand Rogue a voulu savoir ce que j'avais volé. Je lui ai dit que c'était pour soigner des cicatrices que mon père m'a fait, et je pense qu'il se sent mal de ne pas avoir remarqué que j'avais été renié, alors il se repentit en me faisant des potions."
Pansy et Blaise eurent tous les deux la même expression de compassion sur leurs visages, et ils changèrent vite de sujet, pour ne pas mettre Théo dans l'embarras.
Mais Drago n'était pas dupe.
Il savait qu'il mentait.
Il n'avait jamais entendu Théo mentir aussi frontalement, et c'était un peu déconcertant. Mais Granger lui avait dit la vraie version, elle lui avait dit que c'était elle qui avait volé dans la réserve, pour soigner Potter. Pourquoi Théo mentirait ? Pour la protéger ? Pour protéger Potter ?
Drago n'aurait jamais pensé que Théo, un garçon aussi sincère, puisse mentir aussi effrontément. Il réalisa, une nouvelle fois, à quel point il appartenait bien à sa Maison.
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En sortant de la serre numéro trois après le cours de Botanique le lendemain, il pleuvait des cordes. Drago, Pansy, Blaise, Théo, Crabbe et Goyle dûrent courir jusqu'au Château en s'abritant du mieux qu'il pouvait avec leurs capes. En entrant dans la classe de Potions, Pansy lâcha une plainte exaspérée :
"Vous voyez ! Célestia Valpan est vraiment nulle, elle n'a même pas prévenu qu'il pleuvrait aujourd'hui !"
Elle essora ses cheveux dégoulinant de pluie.
"À cause d'elle, je vais probablement tomber malade." dit Théo, mais Pansy ne remarqua pas la pointe de sarcasme dans sa phrase. "Et l'humidité des cachots ne va pas aider…"
Blaise sortit sa baguette et appliqua un sortilège de Séchage et de Chaleur sur tout le monde, sauf Crabbe et Goyle, qui grelottaient derrière leurs pupitres.
Drago, lui, accepta l'humidité de la salle de Potions avec plaisir. Il savait que la plupart des gens détestait ça, mais Drago adorait cette ambiance. Le froid, l'odeur, le bruit des potions dans les chaudrons qui frémissaient…
"Prenez place et commencez à noter les ingrédients de l'antidote du venin de morsures de dragon." annonça Rogue, lorsque les élèves de Gryffondors prirent place à leur tour dans la classe. "J'ai volontairement oublié de noter quelques ingrédients essentiels… C'est à vous de les retrouver, ou alors, vous vous retrouverez avec du venin de dragon dans les veines, ce qui est loin d'être agréable."
Drago entendit distinctement le petit cri d'horreur que poussa Londubat. Granger lui tapota l'épaule de sympathie.
"Commencez." aboya Rogue.
Drago sortit un parchemin et roula presque des yeux en voyant la facilité de l'exercice. Il nota les ingrédients essentiels, et ajouta même quelques idées supplémentaires, puis, il patienta le temps que la classe termine, en observant autour de lui.
En observant une personne en particulier, pour être exact.
Granger avait les cheveux attachés avec une pince pour éviter qu'ils gonflent à cause de l'humidité. Elle avait les sourcils froncés par la concentration, alors que Drago était sûr qu'elle connaissait toutes les réponses. Elle nota chaque ingrédient avidement, dans cette même frénésie qu'elle avait parfois à la Bibliothèque quand elle écrivait ses essais. Weasley, à côté d'elle, était complètement perdu. Il jetait des regards pas très subtils vers la copie de Granger.
"Vous devriez avoir terminé, maintenant." avertit Rogue après plusieurs minutes.
Blaise et Pansy avaient bien terminé, mais Théo et Granger écrivaient toujours, leurs plumes grattant le papier au même rythme effréné.
"Accio."
Toutes les copies volèrent vers le bureau de Rogue, qui remit sa baguette dans sa poche. Granger était presque essoufflée.
"Nous allons maintenant passer à la préparation de la solution de Force, que vous devriez connaître d'ici la fin de l'année, car elle sera sûrement demandée aux BUSES."
Drago vit Granger sortir son chaudron avant tout le monde du coin de l'œil.
"Mais avant ça, je vais vous rendre vos devoirs sur la pierre de lune."
Rogue prit une pile de copies et passa entre les rangs pour distribuer les devoirs.
"Je vous ai mis les notes que vous auriez obtenues si vous aviez rendu ces copies-là à l'épreuve de BUSE." continua le professeur. "Voilà qui devrait vous donner une idée assez réaliste de ce qui vous attend le jour de l'examen."
Rogue glissa le parchemin sur le pupitre de Drago, où était étalé un grand "O" sur le coin de la feuille. Il sentit un sourire fier étirer ses lèvres.
"Excellent, Mr. Malefoy." dit Rogue à voix basse. "Vous avez parfaitement compris ce devoir. Et cette addition sur l'utilité paralysante des pierres de lune était une très bonne initiative de votre part."
La poitrine de Drago se gonfla de fierté. Visiblement, Granger avait entendu : elle était toute rouge, et le fusilla du regard. Quand Rogue déposa son devoir, Drago crut apercevoir un "A".
"Travail satisfaisant." déclara sèchement le professeur.
Quand il donna les devoirs à Potter et Weasley, il ne dit rien. Drago comprit tout de suite qu'ils avaient eu des notes pitoyables.
"La moyenne générale de ce devoir se situe à des profondeurs abyssales." déclara Rogue quand il retourna derrière son bureau. "Si ce sujet vous avait été soumis à l'examen, la plupart d'entre vous auraient été recalés. J'espère que vous ferez un plus grand effort pour votre devoir de cette semaine qui portera sur les divers types d'antidotes aux venins, sinon, je serai obligé de donner des retenues aux ânes qui n'arrivent pas à obtenir plus qu'un D."
"Ah, il y en a eu qui ont eu un D ?" murmura Drago avec un rire mesquin.
Sa phrase eut l'effet escompté : Potter lui lança un regard noir. Drago lui fit le sourire le plus innocent possible.
"T'as eu combien, Dray ?" demanda Blaise, qui s'était retourné.
"Optimal." répondit-il, assez fort pour que Granger réentende sa note. "Et toi ?"
"Acceptable." dit Blaise en lui montrant sa note. "Théo a eu un effort Exceptionnel."
Le concerné se retourna une seconde pour échanger un sourire avec Drago et Pansy, qui étaient assis sur le pupitre derrière eux.
"Et toi, Pans' ?" demanda Drago.
"Acceptable aussi." répondit-elle.
Drago était persuadé que Théo lui avait fait son devoir, mais il la félicita tout de même.
"Vous allez maintenant passer à la préparation de votre solution de Force en silence, et individuellement." annonça Rogue.
Drago installa son chaudron sur les flammes avec un sourire. Il avait hâte de dire à sa mère qu'il avait eu un Optimal pour son premier devoir de Potions de l'année. Il commença sa solution sans même regarder les instructions au tableau : il connaissait déjà tous les ingrédients.
Drago était en train de verser le sang de salamandre dans son chaudron, en rêvassant d'un futur où il était l'alchimiste le plus célèbre du monde des sorciers, quand il sentit soudain quelque chose lui taper le crâne. Surpris, il leva la tête, mais tout le monde était concentré et ne lui portait pas la moindre attention.
Drago se massa la tempe, en se demandant ce qui pouvait bien avoir causé une telle douleur.
Quelques minutes plus tard, il la sentit de nouveau. C'était une sensation étrange, comme…
Comme une aiguille.
Drago releva brusquement la tête et observa son professeur de Potions, assis à son bureau. Il ignorait complètement Drago.
Est-ce que Rogue pouvait faire ça ?
Est-ce qu'il réussissait à entrer dans sa tête sans même le regarder ?
Quand il sentit de nouveau l'intrusion, Drago vit la porte de sa bibliothèque mentale.
Il repoussa l'aiguille férocement, et dès qu'elle fut sortie de son esprit, il le referma précautionneusement. Il Occluda plusieurs minutes, en essayant de ne pas céder à la panique. Dès qu'il fut sûr que sa bibliothèque était fermée et sécurisée, il rouvrit les yeux et regarda Rogue avec fureur. Mais son professeur ne le vit pas : il faisait toujours semblant d'écrire à son bureau.
Quand Drago tourna la tête, il vit que Pansy le regardait bizarrement.
"Quoi ?" siffla-t-il entre ses dents.
"Ça fait cinq minutes que tu halètes comme si tu avais fait le tour de Poudlard en courant." dit-elle d'un ton pratiquement accusateur. "Qu'est-ce qui t'arrive ?!"
Drago ne répondit rien, et Pansy n'insista pas, mais continua de lui jeter des coups d'œil fréquents.
L'esprit de Drago resta fermé jusqu'à la fin du cours. Sa main tremblait quand il tendit le flacon d'échantillon de sa solution de Force, mais Rogue fit semblant de ne pas remarquer. Pansy, Théo et Blaise l'attendaient à l'entrée de la classe.
"Allez-y, je vous rejoins." dit Drago.
"Pourquoi ?" demanda Pansy, les sourcils froncés.
"Je dois parler avec Rogue. De mon devoir." mentit-il.
Ils sortirent tous les trois de la classe pour aller dans la classe de Sortilèges, la dernière de la journée. Drago fit exprès de ranger ses affaires le plus lentement possible, et quand il fut enfin seul avec Rogue, il se dirigea droit vers son bureau :
"Je peux savoir ce que vous foutiez dans ma tête ?!" hurla-t-il, sans même prendre la peine de vérifier que personne ne pouvait les entendre depuis le couloir. "En plein milieu d'un putain de cours ?!"
Rogue ne répondit rien, et resta impassible, ce qui énerva Drago encore plus. Il voulait qu'il hurle aussi, pour pouvoir faire exploser sa colère comme il en avait envie. Rogue prit sa baguette et lança un sortilège sur la porte de la classe, avant de la reposer calmement.
"L'Occlumancie n'est pas une matière à étudier une heure par semaine, Drago." dit le professeur de sa voix caverneuse, qui avait le don de s'incruster dans Drago de la même manière que l'aiguille dans sa tête. "J'ai fait ça pour vous montrer que vous devez être tout le temps préparé."
"Ce n'est pas une raison pour le faire en plein milieu de la classe !" continua Drago d'une voix forte. "J'étais entouré d'élèves ! Pansy a remarqué que quelque chose n'allait pas, comment je…"
"Vous pensez vraiment que le Seigneur des Ténèbres vous accorderait quelques minutes pour vous préparer, Malefoy ?" demanda Rogue froidement, et Drago ferma brutalement la bouche.
Entendre cette appellation déguisée lui donna des frissons le long des bras et de la colonne vertébrale. Comme si, de la bouche de Rogue, le nom sonnait encore plus menaçant.
"Vous pensez que le Seigneur des Ténèbres, le plus grand Occlumens de tous les temps, serait clément avec vous ? Doux ? Patient ?" demanda Rogue, fixant Drago de ses yeux noirs et perçants. "Si c'est le cas, vous vous trompez, Malefoy. Il ne sera rien de tout ça. Si un jour, vous avez le malheur de vous faire inspecter l'esprit par Lui, il ne sera pas aussi doucereux que moi. Son intrusion sera brutale, venimeuse, elle écrasera, détruira toutes vos pensées pour sélectionner celles qui l'intéressent. S'il n'aperçoit, ne serait-ce qu'une seconde, la porte de vos pensées cachées, il ne l'ignora pas comme je le fais. Il l'enfonçera, pillera, marquera votre cerveau à jamais. Ça sera encore pire que quand vous vous êtes évanoui de fatigue. Vous serez vidé, laissé pour mort, et Il aura tout vu. Et Il a tué pour moins que ça."
Drago encaissa cette tirade avec horreur. Les mots de Rogue s'insinuèrent en lui comme du venin de serpent. Rogue se tut, et Drago crut percevoir un éclair de douleur passer sur son visage figé. Il eut alors l'impression que Rogue n'imaginait pas ce qu'il venait de dire. Peut-être l'avait-il déjà vécu.
Drago frissonna sans le vouloir, et Rogue continua d'un ton plus apaisé :
"C'est pour cela que je vous entraîne, Drago. Dans toutes les situations. Pour vous habituer. Pour qu'un jour, si vous êtes confronté à cette situation, vous soyez prêt."
Il n'eut pas d'autre choix que d'hocher la tête, trop hébété pour parler. Rogue lui fit un signe de la main, et Drago sortit de la salle sans ajouter un mot de plus. Il marcha jusqu'à la classe de Sortilèges d'un pas automatique. Il ne regarda aucun portrait, aucun élève qui passait à côté de lui, ses yeux perdus dans le vide, la tête encore dans la salle de Potions. Chaque mot de Rogue était ancré dans son crâne, et se répétait, encore et encore. Il entendit à peine la voix fluette de Flitwick lui reprocher son retard et lui ordonner de s'asseoir. Il ne remarqua pas le regard interloqué de Pansy dans sa direction.
Il continua de penser à ce que Rogue lui avait dit, plus déterminé que jamais à pratiquer l'Occlumancie.
Drago passa le cours de Sortilèges à fermer et rouvrir son esprit le plus vite possible. Il était tellement concentré qu'il en rata le sortilège de Croissance, que Flitwick lui donna à faire en devoir supplémentaire.
Il dîna en silence, toujours tourmenté par le discours terrifiant de Rogue. Drago avait toujours su qu'il lui avait appris l'Occlumancie en cas de défense, mais il l'avait toujours utilisée pour son père. Il n'avait pas vraiment imaginé que le Seigneur des Ténèbres en personne puisse entrer dans son esprit un jour, et cette perspective était terriblement angoissante.
Rogue recommença à lui piquer le cerveau pendant le dîner.
Il n'avait même pas remarqué que son directeur de Maison avait pris place à la table des professeurs. Drago sentit juste une sensation désagréable contre son lobe frontal, et il comprit tout de suite que c'était Rogue qui essayait d'entrer dans sa tête. Il Occluda rapidement, chassant l'aiguille au passage.
Quand son esprit fut totalement fermé, il risqua un regard vers son professeur de Potions. Rogue mangeait en silence, insensible au regard de Drago. Pourtant, il aurait pu jurer voir un rictus étirer sa lèvre une seconde, avant de s'effacer.
"Tu viens à la fête de ce soir, Dray ?" demanda Blaise, ce qui ramena son attention sur la table.
"Euh, non, je ne peux pas." répondit-il, passablement agité. "Je dois… Je dois absolument réviser le Sortilège de Croissance que Flitwick m'a donné en devoirs…"
Blaise eut un petit rire qui fit secouer ses épaules :
"Putain, tu deviens encore plus studieux que Théo !"
"Non, pas du tout." contesta Drago, qui trouvait que ce compliment sonnait comme une insulte dans la bouche de Blaise. "J'ai juste pris du retard. D'ailleurs, vous ne trouvez pas que les professeurs donnent dix fois plus de devoirs que l'année dernière ?"
Théo sauta aussitôt sur l'occasion pour expliquer une nouvelle fois l'importance des BUSES, et rappeler qu'il les avait prévenus qu'ils allaient devoir travailler beaucoup plus qu'avant, et Drago écouta d'une oreille, heureux d'avoir trouvé une porte de sortie.
Quand Blaise, Pansy et Théo allèrent à la fête dans la Salle Commune, Drago se faufila donc plutôt vers le couloir de la Bibliothèque. En réalité, il n'avait aucune envie de réviser : c'était vendredi, et il avait mal à la tête à cause de toute l'Occlumancie qu'il avait dû faire pendant la journée. Mais il allait à la Bibliothèque pour une raison particulière.
Il la trouva assise là, en train d'écrire avec son stypo. Elle avait enlevé la pince qui retenait ses cheveux et se passait une main dedans sans s'en rendre compte. Les volutes de vapeur de son thé fumant lui caressait doucement les joues.
Quand elle l'entendit arriver, Granger leva la tête, surprise.
"Oh, je ne pensais pas que tu viendrais." dit-elle en le regardant avec des yeux ronds.
"Je viens pratiquement tous les soirs, Granger." répliqua-t-il en s'asseyant en face d'elle.
"Pas tous les vendredis." contredit-elle, et elle rougit, probablement à l'idée qu'il puisse savoir qu'elle analysait autant son emploi du temps. "Enfin, je veux dire… C'est… Plutôt rare."
Voir Granger rougir était probablement l'une des activités préférées de Drago. Toute l'inquiétude que Rogue lui avait donnée depuis son discours s'effaça d'un coup. Dans sa bulle de la Bibliothèque, c'était difficile de penser au Seigneur des Ténèbres.
En plus, voir Granger lui rappelait ce qu'il devait cacher, et il trouvait que c'était une assez bonne raison pour souffrir.
"Qu'est-ce que tu fais ?" demanda-t-il en essayant de voir ce qu'elle écrivait.
"Une fiche de révisions d'Histoire de la Magie." répondit-elle en lui montrant son parchemin.
Drago pensa que c'était la pire activité à faire un vendredi soir.
"Et toi ?" demanda Granger.
"Je… Je ne sais pas trop." avoua Drago.
Généralement, quand il n'avait rien à faire, il lisait un livre de Potions. Mais il savait qu'une pile de devoirs l'attendait et qu'il ferait bien de s'avancer pour le week-end. Il voulut prendre son sac, mais réalisa qu'il avait laissé ses affaires dans son dortoir.
"Je n'ai pas pris mes affaires." continua-t-il. Granger fronça les sourcils. Il essaya de trouver quelque chose à faire sans ses livres et bredouilla : "Je… Je pensais que tu pourrais m'aider pour… Pour les sortilèges de Disparition, en Métamorphose."
En entendant ça, les yeux de Granger s'illuminèrent littéralement de joie.
"Oh, oui, bien sûr !" s'écria-t-elle, heureuse de pouvoir mettre son savoir en pratique.
Elle poussa ses affaires d'Histoire de la Magie pour libérer le centre de la table ronde, puis sortit sa baguette en même temps que Drago.
"Est-ce que tu aurais un objet à faire disparaître ?" demanda-t-elle en fouillant dans son sac. "Je crois avoir une vieille plume là-dedans…"
Drago sortit une pomme verte de sa poche, qu'il avait piqué de la table des Serpentards en cas de petit creux. Granger approuva et pointa sa baguette dessus quand il la posa devant elle. Elle toussota, et ce son lui fit tellement penser à McGonagall qu'il faillit éclater de rire.
"C'est très simple, en réalité." expliqua Granger, comme à chaque fois qu'elle s'apprêtait à expliquer la chose la plus complexe que Drago ait pu entendre de sa vie. "Il te suffit de considérer l'objet, et de le visualiser dans son entièreté."
Drago, qui n'avait aucune idée de comment "considérer un objet" et de le "visualiser dans son entièreté", se contenta d'arquer un sourcil arrogant en fixant la pomme en face de lui.
Le silence s'étira, et la pomme restait : une pomme.
"Tu l'as visualisée ?" demanda Granger à voix basse, comme si elle avait peur de déranger sa concentration.
Il hocha la tête, bien qu'il n'avait aucune idée de quoi elle pouvait parler.
"Alors, maintenant, prononce le sort, et n'oublie pas de poser ta baguette sur la pomme." conseilla-t-elle d'une voix excitée.
"Evanesco." lança Drago, sans grande conviction.
La pomme resta fermement posée sur la table.
"Non, non, tu n'as pas vu l'objet !" dit Granger, cette fois à voix haute.
"Si, je l'ai vu, c'est juste une putain de pomme." s'écria Drago, touché dans son égo.
Granger écarquilla les yeux, comme à chaque fois qu'il prononçait un mot vulgaire devant elle. Elle secoua la tête et montra la pomme avec sa baguette :
"Regarde la pomme." instructa-t-elle, et il obéit. "Regarde la dans son entièreté. De quelle couleur est-elle ? Quel goût aurait-elle, si tu la croquais ? Quelle texture ? Quelle taille fait-elle ? De quelle forme est-elle ? Est-ce qu'elle a des imperfections ? Des bosses ? Est-ce qu'elle tient dans ta main ?"
Drago analysa la pomme, la voyant soudain avec beaucoup plus de détails qu'avant : elle était un peu plus grosse que les pommes ordinaires, d'un vert criant, et légèrement bosselée à cause de son voyage dans sa poche. Il s'imagina la croquer, sentant presque l'acidité sur le bout de sa langue.
"Maintenant…" poursuivit Granger, dans un murmure presque hypnotique. "Imagine que tous les atomes qui composent cette pomme disparaissent subitement. Qu'est-ce qu'il y aurait, sous la pomme ? Qu'est-ce que tu verrais à la place ?"
Drago imagina le bois de la table, sa couleur foncée. Il se concentra tellement qu'il pouvait sentir la pression de son mal de tête appuyer entre ses deux yeux.
"Et maintenant, lance le sort." souffla Granger.
Drago posa le bout de sa baguette sur la pomme, et murmura :
"Evanesco."
La pomme disparut. Une seconde, elle était là, et la seconde d'après, il n'y avait plus rien sur la table. Drago ressentit alors une sensation bizarre, comme une vibration le long de son bras.
"Tu as réussi !" s'exclama la Gryffondor, aussi heureuse que lui.
"Ce n'est pas grand chose." grommela-t-il, bien qu'intérieurement, il jubilait. "Tu arrives à Conjurer des objets je te rappelle, et ce n'est pas avant la sixième année !"
"Ma réussite ne change pas la tienne, Drago." dit-elle sagement. "Ce n'est pas parce que quelqu'un réussit quelque chose qu'il est meilleur que toi."
Drago n'était pas vraiment d'accord, mais il n'insista pas. Il regarda Granger agiter sa baguette et rematérialiser la pomme, et ressentit une vague d'admiration à son égard. S'il avait été capable de faire ce genre d'exploit, il le crierait sur tous les toîts. Mais elle sourit simplement, et croqua dans le fruit, avant de le lui rendre.
Le jus dégoulina sur son menton, et Drago se dit qu'elle avait rarement été aussi mignonne.
"Tu veux recommencer ?" proposa-t-elle en reposant la pomme au milieu de la table.
Drago se massa inconsciemment les paupières et Granger l'observa en perdant son sourire.
"Qu'est-ce que tu as ?" questionna-t-elle.
"Rien."
"Si. Tu as quelque chose dans l'œil ?" tenta-t-elle.
"Non, j'ai juste mal à la tête."
"Oh." répondit-elle, visiblement prise de court. "Oh, je ne savais pas…"
"Comment aurais-tu pu le savoir ?" demanda-t-il, amusé par une telle réaction.
"Tu es fatigué ?"
"Non, j'ai juste eu… Une longue journée." admit Drago.
Notre professeur de Potions est entré dans ma tête sans mon accord pendant la journée et j'ai dû le repousser avec ma force mentale jusqu'à m'épuiser.
"Oh." répéta Granger. "Je ne connais pas de sort pour soigner les maux de tête, je crois…" ajouta-t-elle, un peu piteusement, comme si Drago avait espéré qu'elle puisse s'y connaître en magie médicinale.
Elle fronça les sourcils, et regarda partout autour d'elle, dans l'espoir de trouver quelque chose pour le soigner. Elle s'arrêta sur sa tasse de thé et s'empressa de pointer sa baguette dessus :
"Calefactorius." énonça-t-elle, et aussitôt, de la fumée s'échappa de nouveau de sa tasse de thé.
Puis, elle prit la tasse, et la tendit vers Drago. Il mit quelques secondes à comprendre qu'elle lui était destinée.
"Tu veux du thé ?" proposa-t-elle avec un petit sourire penaud. "Ça te fera du bien."
Drago regarda la tasse, perplexe.
"Granger, ça fait presque un an qu'on se retrouve pratiquement tous les soirs à cette table, et c'est la première fois que tu m'offres du thé."
Sa phrase n'eut pas d'autre effet que d'agrandir le sourire de la brune.
"Vraiment ? Quelle impolie je fais." dit-elle d'un ton léger. "Et bien, je t'en propose maintenant."
"Je croyais que tu étais la seule à avoir le droit de boire du thé à côté des précieux livres de Pince ?"
Elle haussa les épaules, son sourire toujours accroché aux lèvres.
"Tu as un laissez-passer pour ce soir. Mais uniquement parce que tu as mal à la tête, et que je surveille que tu n'abîmes pas les précieux livres en question."
Il prit la tasse avec deux mains hésitantes.
"J'ai l'impression de faire quelque chose de mal." confessa-t-il, un peu amusé.
"Je te ferais dire que nous avons mangé, non pas un, mais deux oeufs en chocolat énormes sur cette même table." fit-elle remarquer avec une pointe d'austérité dans sa voix.
"Oui, mais c'est toi qui m'avait incitée à le faire…" dit Drago avec un air faussement craintif.
Granger roula des yeux.
"Bois le thé, Drago."
Il porta la tasse à sa bouche en cachant son sourire derrière. Il avala une gorgée, et fut soudain frappé par la ressemblance entre ce thé et Granger. Il avait toujours associé l'odeur qui émanait de ses tasses au confort de leurs séances de révisions. C'était comme s'il avait bu son Amortentia, l'essence même de Granger, la substance de l'amour qu'il ressentait pour elle.
Il n'avait jamais bu de thé aussi délicieux de sa vie.
Il vola quelques gorgées supplémentaires, et ne put retenir un soupir apaisé s'échapper de ses lèvres.
"Il est bon ?" demanda Granger.
"Délicieux." avoua Drago, qui n'arrivait pas à cacher son adoration.
"Garde-le, ça te fera du bien à la tête." avisa-t-elle. "Il est à la cannelle, mon préféré."
Drago éclata de rire en entendant ça.
"J'ai remarqué. L'odeur de Granger."
Elle rit en entendant ça, sans relever. Si elle savait ce que la cannelle représentait pour lui…
"Tu pourrais être professeure, tu sais." annonça-t-il, pour changer de sujet.
Elle le regarda sans comprendre. Il montra la pomme du doigt :
"Ça fait des mois que je m'entraîne à faire Disparaître des objets, et je n'ai jamais réussi avant que tu m'expliques."
Granger coinça une mèche de cheveux derrière son oreille, un geste qu'elle faisait souvent quand elle était gênée.
"Oh, euh… Non, je ne pense pas, je suis beaucoup trop impatiente."
"Pourtant, tu étais patiente, quand tu m'as expliqué comment faire." objecta-t-il.
"Parce que toi, tu comprends vite. Je pense que je ne pourrais pas garder mon calme face à un élève qui n'y arrive pas, j'aurais envie de le faire à sa place."
"Comme Londubat, par exemple ?" demanda Drago avec sarcasme.
Granger le fusilla aussitôt du regard, piquée à l'idée qu'il puisse oser se moquer de son ami.
"Non, je pensais plutôt à Crabbe et Goyle." siffla-t-elle, en espérant sûrement être méchante.
Drago haussa les épaules : il trouvait aussi que Crabbe et Goyle étaient stupides, ça ne le touchait pas particulièrement.
"Si tu ne veux pas être professeure, qu'est-ce que tu veux faire, alors ?" demanda Drago, sincèrement curieux. "Après Poudlard ?"
Il s'attendait à ce qu'elle dise une réponse d'emblée, qu'elle ait prévu sa carrière depuis des années. Il fut donc surpris de la voir prendre le temps de réfléchir.
"Je ne sais pas trop." admit-elle, pensive. "Je suis intéressée par quelques métiers, mais je ne sais pas vraiment lequel me plairait le plus…"
"Lesquels ?"
"Au début de Poudlard, je voulais étudier la Médicomagie, mais j'ai réalisé qu'il fallait faire beaucoup de potions et ce n'est pas un sujet qui me passionne particulièrement." lista Granger, en comptant sur ses doigts. "Quand j'étais petite, je voulais tenir une librairie, et je pense que ça m'irait beaucoup mieux, mais c'est moldu… Alors, j'avais pensé à travailler à Fleury et Botts. Mais depuis quelques temps, je commence à m'intéresser au Ministère, surtout le département de Contrôle et de Régulation des Créatures Magiques, et je me dis que je pourrais utiliser les idées de la S.A.L.E. pour continuer à revendiquer le droit des elfes de maison… J'étais plutôt décidée à faire ça, mais avec tout ce qu'il se passe avec cette horrible Ombrage… Mon estime pour le Ministère en a vraiment pris un coup."
Elle termina sa liste avec une mine soucieuse, comme si elle craignait sa réaction. Pourtant, il trouvait que c'était trois métiers assez logiques et qui lui correspondaient beaucoup.
"Je pense que ce sont des bonnes idées." dit-il, et cette phrase apporta un nouveau sourire sur le visage de Granger, celui qui creusait des petites fossettes dans ses joues et qui montrait ses dents trop courtes. "Et je ne pense pas qu'Ombrage représente tout le Ministère…"
"Peut-être, mais je ne veux certainement pas travailler dans un endroit qui peut tolérer ce genre de pratiques. Je trouve ça déplorable."
Drago sentit les coins de sa bouche se relever. Il aurait pu jurer que Théo lui avait dit la même chose au déjeuner.
"Et toi ? Tu veux toujours faire de l'Alchimie ?" demanda-t-elle en reprenant la pomme pour la croquer de nouveau.
Drago fut étonné de voir qu'elle se souvenait de ça.
"Ouais, pourquoi pas. C'est ce qui m'intéresse le plus, en tout cas." affirma-t-il en haussant nonchalamment les épaules.
"Si Rogue pense que tu as des prédispositions dans cette matière, c'est que tu dois être vraiment bon." remarqua-t-elle d'un ton encourageant.
Mais cette remarque mit Drago mal à l'aise : ça lui rappelait qu'il lui mentait, et il détestait ça. Il aurait aimé lui dire qu'il ne pratiquait pas vraiment l'Alchimie les jeudis soirs, mais il savait qu'à l'instant où il lui parlerait de l'Occlumancie, elle voudrait apprendre, et il n'était pas encore prêt à lui enseigner.
Drago montra le papier qu'elle avait délaissé pour l'entraîner aux sorts de Disparition :
"Je t'empêche de travailler."
Elle regarda sa fiche de révisions avec étonnement, comme si elle en avait oublié l'existence jusqu'à maintenant.
"Oh. Et bien, en réalité, je connais déjà le cours." dit-elle timidement. "C'est un chapitre qu'on a pas encore étudié, sur la Grande Grève des Gargouilles de 1911, mais j'ai déjà lu un livre sur le sujet… Tu veux me faire réviser ? Comme ça, tu apprendras aussi."
Elle lui tendit le papier, avec son écriture ronde écrite à l'encre bizarre de stypo, et Drago le prit.
"D'accord. Alors… Quelles sont les trois revendications principales des gargouilles pendant la grève ?"
"La première était la volonté de pouvoir choisir sa place sur le monument, mur ou fontaine où la gargouille était attribuée, la deuxième était d'être nettoyée au moins deux fois par mois par un sorcier compétent, et la troisième était la demande de congés payés." récita Granger sans la moindre hésitation.
"Quel sorcier s'est opposé à la grève en 1912 et pourquoi ?" demanda Drago, qui lisait les notes de Granger en même temps.
"Boyd Crooks." répondit-elle instantanément. "Il a écrit un article dans la Gazette pour demander à ce que la grève cesse parce qu'aucune gargouille ne pouvait indiquer le chemin aux sorciers, et ça a causé des grands embouteillages dans les rues…"
Drago l'écouta avec attention, lui posant plusieurs questions sur son cours, auxquelles elle répondit avec une précision à couper le souffle.
Et là, avec son thé à la cannelle, en écoutant la voix fluette de Granger lui réciter ses notes, Drago se fit la réflexion qu'étudier l'Histoire de la Magie un vendredi soir n'était peut-être pas si terrible, finalement.
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Hermione
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Hermione n'osa pas reparler de son idée de leçons de Défense Contre les Forces du Mal à Harry, de peur qu'il s'énerve de nouveau. Il resta maussade tout le week-end, puis la semaine d'après. En plus, avec les retenues d'Ombrage, il n'avait pas le temps de faire ses devoirs, ce qui avait l'air de le faire stresser énormément. Hermione l'aida du mieux qu'elle put en lui corrigeant ses essais pendant qu'il somnolait à moitié dans le canapé, épuisé.
Sa main était toujours aussi lacérée, mais Hermione se retint d'aller piquer de l'Essence de Murlap de nouveau. Si elle croisait Rogue une nouvelle fois, il n'aurait aucun mal à comprendre ce qu'il s'était vraiment passé la dernière fois.
Elle préféra donc continuer dans ce rythme infernal, en enchaînant les cours, les révisions, l'aide aux devoirs des garçons, et le tricot. Le seul moment où Hermione pouvait vraiment se détendre était les séances de révisions à la Bibliothèque avec Drago. Là-bas, elle riait, une habitude qu'elle avait perdu depuis plusieurs semaines.
Mais à chaque fois qu'elle rentrait, la culpabilité revenait et la rongeait lentement de l'intérieur. Comment pouvait-elle profiter de ces moments avec Drago, alors qu'Harry souffrait en permanence ?
Une nuit de Septembre, Hermione était en train d'étudier dans la Salle Commune. Le feu crépitait dans la cheminée, un son qu'elle adorait et qui l'aidait à se concentrer sur les runes sous ses yeux. La fatigue faisait peser ses paupières, mais elle voulait à tout prix terminer de traduire ce texte avant d'aller dormir.
Quand elle entendit des pas dans l'escalier des dortoirs, elle n'eut même pas besoin de tourner la tête pour deviner qui c'était. Elle pouvait reconnaître le son de ses pas partout.
Harry s'installa à côté d'elle sur le canapé avec un grognement fatigué. Il portait un bas de pyjama quadrillé et un sweat bleu marine, et ses cheveux étaient tout décoiffés. Il se frotta l'arête du nez et remit bien ses lunettes en étouffant un bâillement.
"Je n'arrive pas à dormir." marmonna-t-il.
Il évitait de poser son regard sur elle. Il avait l'air troublé.
"Oh." dit Hermione, qui ne savait pas s'il voulait en parler.
Il contempla le feu, comme souvent quand il était pensif, et Hermione le laissa faire en silence. Elle continua de lire ses runes.
Au bout d'un moment, Harry lança dans un murmure quasi inaudible :
"Je fais toujours des cauchemars."
Hermione leva la tête, surprise par un tel aveu. D'habitude, il fallait toujours qu'elle insiste pour qu'il lui dévoile ce qui lui trottait dans la tête. Le fait qu'il lui révèle ses tourments de lui-même était une preuve qu'il avait grand besoin d'être rassuré.
"Des cauchemars sur quoi ?" demanda-t-elle doucement, en prenant soin de ne pas le regarder pour ne pas qu'il se sente scruté.
"De… De cette nuit-là. Au cimetière." dit Harry dans un souffle.
Elle ne montra pas sa surprise d'entendre ces mots, pourtant, c'était la première fois qu'il en reparlait depuis la fois où il s'était énervé au Square Grimmaurd.
"Tu… Tu revis la même scène ?" demanda-t-elle d'un ton légèrement effrayé.
"En quelque sorte, oui." répondit Harry, les yeux toujours fixés sur les flammes. "Je… Je revois le cimetière, et je ressens l'appréhension qui s'était emparé de moi quand je l'avais vu la première fois. Je revois Pettigrow, et je ressens la colère, la haine que j'ai pour lui, et je m'en veux de ne pas avoir pris ma baguette plus tôt, de ne pas l'avoir…"
Il ne continua pas sa phrase, toujours plongé dans ses souvenirs douloureux. Hermione l'écouta parler sans rien dire, les muscles paralysés par son récit.
"Je revois Voldemort…" poursuivit-il, ignorant le frisson qui le parcourut en le disant à voix haute. "Je revois Voldemort, et je ressens… La terreur que j'ai ressenti en le voyant, dans les bras de Pettigrow, je ressens les ondes de pouvoir qui émanaient de son corps, l'odeur de magie noire qui semblait embaumer l'endroit… Je revois Cedric, et…"
Un sanglot éclata au fond de sa gorge, et Hermione posa aussitôt une main sur son épaule. Toujours sans la regarder, il continua malgré sa voix tremblante :
"Je revois Cedric, et je ressens le désespoir, l'envie viscérale de l'aider, mais je ne peux pas. J'essaye de lui hurler de se défendre, de viser Queudver avec ma baguette pour l'empêcher de le tuer, mais je ne peux pas, je n'ai jamais le temps ou la force, et je regarde une nouvelle fois Cedric mourir devant moi… Je n'arrive pas à y échapper, Hermione. Je le vois toujours tomber, chaque nuit. Toutes les nuits depuis la troisième Tâche."
Hermione sentit une larme couler le long de sa joue, mais elle n'y fit pas attention, trop portée par le désarroi d'Harry. Elle agrippa la manche de son pull dans un geste réconfortant.
"Pourquoi est-ce que je lui ai dit de prendre le trophée, Hermione ?" demanda Harry d'une voix larmoyante.
"Oh, Harry…"
"Et je revois mes parents." dit-il, la voix rauque. "Quand nos baguettes se sont connectées, tu sais ? J'ai vu mes parents, et Cedric, et Bertha Jorkins, et mes parents… Ils étaient plus réels que jamais. Je sais qu'ils n'étaient que des fantômes, ou des apparitions, ou peu importe." dit-il en la voyant prête à le contredire. "Mais d'une certaine manière, ils étaient encore plus réels que dans le Miroir du Rised, parce que je pouvais entendre leurs voix. Je n'avais jamais entendu leurs voix, avant."
"Comment étaient-ils ?" demanda Hermione, curieuse.
"Ma mère a les mêmes cheveux roux que Ginny, en plus longs, et elle a un sourire tendre, et mon père a les mêmes cheveux que moi, presque aussi décoiffés que maintenant." répondit-il avec l'ombre d'un sourire. "Ils sont beaux. Mais ils avaient peur, je crois. Ils étaient confiants que j'allais réussir à m'échapper, mais ils avaient de la terreur dans les yeux."
"Je suppose que tous les parents seraient terrifiés." dit Hermione.
"Peut-être." approuva Harry. "Mais c'était la première fois que je voyais ça. De l'inquiétude de la part de mes parents. J'ai vu mon oncle et ma tante être inquiets pour Dudley des centaines de fois quand on était petits, dès qu'il avait le moindre bobo, mais moi, je n'avais jamais eu ça. Quelque part, je pense que c'est ça qui m'a fait tenir."
"Tu sais qu'ils sont toujours là, n'est-ce-pas ?" demanda Hermione.
Pour la première fois depuis qu'il s'était assis, Harry plongea son regard dans celui d'Hermione. Ses yeux verts étaient brillants de larmes.
Elle posa sa main à l'endroit de son cœur, et sentit les battements effrénés contre le bout de ses doigts.
"Ils veillent sur toi, Harry." murmura-t-elle doucement.
Il sourit, et Hermione fit de même. Elle garda sa main contre son sweat quelques secondes.
"Tu sais, avec tout ce qu'il s'est passé ensuite, je n'ai même pas eu le temps de te le dire, mais… Je suis tellement heureuse que tu sois revenu de ce cimetière, Harry."
Elle pensa qu'il allait céder aux sanglots, mais il hocha simplement la tête, toujours avec son demi-sourire triste :
"Tu sais que tu es la première personne à me dire ça ?"
Harry porta sa main sur les joues chaudes d'Hermione pour essuyer ses larmes. Ils se regardèrent longuement, et quand la charge émotionnelle autour d'eux pesa un peu trop, Harry renifla et pointa du doigt le manuel de runes :
"Qu'est-ce que tu lis ?"
"Oh, euh…" balbutia Hermione en regardant le livre à son tour. "C'est simplement mon manuel d'Étude de Runes, désolée, ce n'est pas très intéressant…"
"Tu arrives à réviser et à tricoter en même temps ?" s'étonna Harry.
"Il faut simplement traduire." expliqua Hermione en lui montrant la page de symboles. "Je le pose en face de moi, et je tricote en essayant de me souvenir de mon alphabet de runes."
"Hermione, tu ne cesseras jamais de m'impressionner."
De nouveaux bruits de pas se firent entendre dans l'escalier et Ron arriva dans la Salle Commune, les yeux à moitié fermés par le sommeil, en bâillant sans retenue.
"Qu'se v'faites ?"
"Je n'arrivais pas à dormir, donc je suis descendu pour tenir compagnie à Hermione." expliqua Harry en l'observant par-dessus le rebord du canapé. "Et toi, qu'est-ce que tu fais ? Tu dormais comme un loir quand je suis parti."
"Je t'ai entendu partir et je ne t'entendais pas revenir, j'ai cru que tu étais parti avec la cape d'invisibilité… Merlin, Hermione, ne me dis pas que tu es en train de travailler ?! On est au beau milieu de la nuit !"
Il contourna le canapé pour s'asseoir à la gauche d'Hermione, et comme dans un réflexe, il leva ses jambes pour les reposer sur ses cuisses. C'était un geste complètement anodin, que Fred faisait souvent et qui n'avait jamais dérangé Hermione jusqu'alors. Mais quand c'était Ron qui le faisait, ça déclenchait une série de frissons dans ses jambes qui étaient difficiles à ignorer.
"Je traduis toujours des runes quand je n'arrive pas à dormir !" s'écria-t-elle en guise de justification.
"Et tu as encore laissé tes vêtements tricotés partout dans la Salle Commune ?!" continua Ron en pointant du doigt une paire de chaussettes roulées en boule sur l'une des tables. "Hermione…"
Elle fut sur le point de répliquer quand Harry les interrompit d'une voix accablée :
"Arrêtez de vous disputer, tous les deux."
Ils obéirent, non sans se jeter un dernier regard furieux. C'était très contradictoire : il l'énervait autant qu'elle l'aimait, parfois.
"Donc, qu'est-ce que tu traduisais, Hermione ?" demanda Harry en regardant le manuel ouvert sur la table.
"C'est un texte sur des femmes vikings qui deviennent pirates pour échapper au mariage." expliqua Hermione.
"Effectivement, ça doit bien t'aider à t'endormir." remarqua Ron qui essayait de déchiffrer le texte en fronçant le nez.
"Pas du tout, c'est très intéressant." protesta Hermione. "Mais en ce moment, je relis les légendes des Chevaliers de la Table Ronde…"
"Ça, je connais !" s'exclama soudain Ron. "Maman nous les lisait, quand on était petits."
"Je les ai lues l'année avant d'entrer à Poudlard, mais j'ai décidé de les relire pour comprendre le personnage de Merlin." expliqua Hermione en montrant l'énorme livre qu'elle avait posé à côté de son manuel.
Ron fronça les sourcils :
"Quoi ? Mais comment tu pouvais connaître les Chevaliers de la Table Ronde avant d'aller à Poudlard ? Ce sont des légendes sorcières !"
"Ça existe aussi chez les Moldus." expliqua Hermione.
"Comment c'est possible ?" demanda Ron, abasourdi. "Il y a de la magie dedans !"
"Je te l'ai déjà dit, la magie existe chez les Moldus, mais que dans les contes de fées ou les histoires fantastiques." expliqua Harry en posant sa tête contre le rebord du canapé.
"J'ai du mal à comprendre comment vous avez fait pour ne pas comprendre que la magie existait vraiment, si vous aviez des livres sur le sujet…"
Hermione et Harry levèrent les yeux au ciel en même temps. Ils avaient déjà expliqué le concept de magie pour les Moldus à Ron des centaines de fois, mais il faisait toujours semblant de ne pas comprendre.
"Est-ce que tu veux bien lire un peu, Mione ?" demanda Harry d'une voix ensommeillée. "Je n'ai jamais lu ce livre, avant."
Hermione tourna la tête vers lui et vit qu'il avait les yeux fermés, la joue collée contre le coussin. Ron hocha la tête pour montrer son approbation et s'enfonça dans le canapé à son tour.
"D'accord, je peux lire un peu." concéda Hermione en prenant l'énorme livre qu'elle cala contre ses jambes relevées.
Elle commença à lire à voix basse :
"Chapitre un : l'épreuve de Messire Ivain. C'était il y a bien, bien longtemps, alors que l'Angleterre n'était pas gouvernée par un seul Roi comme elle l'est maintenant, mais par plusieurs, qui se partageaient le pays et qui étaient toujours en guerre les uns contre les autres. De tous ces Rois, le plus noble était le Roi Arthur…"
Pattenrond sauta sur le canapé pour se caler dans la jointure entre les jambes de Ron et celles d'Hermione, qui étaient toujours entremêlées. Il se roula en boule et ronronna aussitôt, créant des vibrations agréables contre la peau d'Hermione. Ron lui caressa le cou distraitement, déjà plongé dans l'histoire.
Hermione continua sa lecture d'une voix douce, comme le faisait sa mère quand elle lui lisait une histoire. Harry s'endormit bien vite, probablement bercé par sa voix, le crépitement du feu, et les ronronnements de Pattenrond. Ron garda les yeux à demi-ouverts, et continua de caresser le chat en écoutant l'histoire.
Ils s'arrêtèrent quand les premières lueurs de la journée firent irruption dans la pièce. Hermione se leva, toute endolorie d'être restée dans la même position pendant plusieurs heures. Quand elle prit le livre pour l'emmener dans son dortoir, Ron l'arrêta en lui effleurant le poignet :
"Non, laisse-le là." chuchota-t-il, pour ne pas réveiller Harry. "Je veux entendre la suite ce soir."
Hermione hocha la tête et posa le livre sur la table, puis regarda son meilleur ami. Ses lunettes pendaient dangereusement de son nez, et son bras sur lequel il dormait devait être tout ankylosé. Pourtant, Hermione ne l'avait pas vu si apaisé depuis des mois.
Elle continua de leur lire les histoires du Roi Arthur tous les soirs de cette semaine-là.
Et Harry ne fit aucun cauchemar.
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Hermione était tellement préoccupée que quand elle arriva dans la Salle Commune le matin du jeudi suivant, elle ne comprit pas tout de suite pourquoi Harry, Ron, Ginny et Neville l'attendaient en bas des escaliers.
"Joyeux anniversaire Hermione !" s'écrièrent-ils tous en chœur.
"Oh, merci tout le monde !"
"Tu avais encore oublié, c'est ça ?" devina Ron avec un sourire amusé.
"Oui, un peu." admit Hermione.
"Tiens, ouvre mon cadeau en premier !" s'écria Ginny d'un ton pressé.
Hermione prit le cadeau qu'elle lui tendait, joliment emballé dans un papier cadeau rose dont les motifs fleuris se mouvaient magiquement. Hermione le déballa et fut ravie d'y trouver des bougies parfumées, pour égayer ses séances de révisions nocturnes dans la Salle Commune. Harry lui offrit un télescope portatif doré, et Ron lui avait acheté L'Histoire de Poudlard dans une jolie édition reliée. Bien qu'elle adorait ce livre, Hermione ne put s'empêcher de ressentir une pointe de déception en ouvrant son cadeau. Elle avait l'impression qu'il lui offrait des livres chaque année.
Neville lui tendit son cadeau avec les joues cramoisies. C'était un magnifique carnet aux pages épaisses pour leurs séances de révisions, et Hermione trouva cette attention particulièrement touchante.
Quand ils descendirent prendre leur petit-déjeuner dans la Grande Salle, un grand hibou brun lui apporta le reste de ses cadeaux : sa maman lui avait envoyé un livre sur le tricot pour les débutants, qui tomba à pic. Son père avait ajouté des pelotes de laine des couleurs préférées d'Hermione, avec un mot lui demandant de lui confectionner des chaussettes pour Noël. Danny, quant à lui, avait envoyé un petit paquet avec des Cadbury fingers au chocolat et du papier à lettres. Il avait aussi ajouté une lettre, et Hermione profita que tout le monde discutait pour la lire discrètement :
Joyeux anniversaire Mimi !
Je ne t'ai même pas envoyé de lettres depuis que tu es partie, honte à moi ! J'ai réalisé la date qu'hier, donc je n'ai pu te prendre que des Cadbury. Je suis désolé, quel mauvais ami je fais. Mais je me rattraperai, promis ! Je t'enverrai un dessin à l'aquarelle dès que je trouverai du temps, pour que tu puisses l'ajouter à ta "collection personnelle des dessins de Danny."
En tout cas, j'espère que tu passeras une bonne journée. Qu'elle soit remplie de classes et de révisions difficiles, comme tu les aime. D'ailleurs, est-ce que tu te souviens du livre que je t'ai offert pour le Noël de 1992 ? "Comment ne pas se faire submerger de travail en cinq étapes" ? Tu devrais le relire, de temps en temps, juste pour te rafraîchir la mémoire… :)
Rien à voir, mais tu ne devineras jamais sur qui je suis tombée, l'autre jour ! Mary ! Je ne sais pas pour toi, mais moi, ça fait des années que je ne lui ai pas parlé. Elle ne m'a même pas reconnu quand je l'ai arrêté. On a pas mal discuté, elle m'a dit qu'elle avait changé de collège pour aller vers l'Est de Londres. Elle veut travailler dans la mode après ses études. Elle m'a demandé de tes nouvelles, et elle m'a demandé de te souhaiter un joyeux anniversaire, alors je le fais : encore joyeux anniversaire, Mimi.
Sinon, à part ça, pas grand chose à raconter. Il pleut pratiquement tous les jours. Léonie a fait sa première représentation de piano au conservatoire, elle joue vraiment bien. Thomas a commencé ses études d'ingénieur, mais je crois qu'il n'aime pas trop ça. Et moi, je me tâte à prendre des cours de musique, peut-être de guitare, mais je ne pense pas que mes parents accepteraient que je fasse du dessin et de la musique, alors ça ne sera pas pour tout de suite.
Tes parents vont bien, j'ai pris le thé avec eux le week-end dernier. Ils m'ont dit que tu commençais à t'entraîner au tricot, je n'en avais aucune idée ! Qu'est-ce qui t'as donné envie de le faire ? Je croyais que tu te trouvais trop impatiente pour tricoter. Je réclame donc une paire de gants pour l'hiver, s'il te plaît :)
J'attends ta réponse avec impatience. J'espère qu'Harry, Ron et Ginny vont bien. Pareil pour Drago, le garçon que j'ai croisé cet été. Est-ce qu'il a aimé sa visite de Londres, au fait ?
Encore un joyeux anniversaire, il me tarde déjà de te revoir.
Avec amour,
Danny.
Hermione replia la lettre en souriant, préparant déjà sa réponse mentalement. Elle la rangea, tout comme la lettre que Viktor avait envoyée et qu'elle ne voulait pas montrer à Ron, au risque qu'il lui pose une centaine de questions sur sa correspondance. En parcourant le reste du colis que ses parents avaient envoyé, elle remarqua qu'il restait quelques livres au fond. Il y avait un petit mot avec, et Hermione reconnut tout de suite l'écriture de sa mère :
J'ai retrouvé ces livres en faisant du rangement et je crois qu'ils t'appartiennent. Je te les envoie au cas où tu en aurais besoin.
Je t'embrasse,
Maman.
Hermione prit la pile de livres : c'était surtout des manuels des années précédentes, ou des lectures complémentaires à ses cours qu'elle n'avait pas pu prendre par manque de place. Le dernier livre, cependant, n'avait rien à voir avec un manuel : c'était un joli herbier à la couverture verte.
"Merlin, Hermione, qu'est-ce que c'est ?" demanda Neville, qui était en face d'elle et avait aperçu le livre, lui aussi.
"C'est un herbier que ma grand-mère m'a offert pour le Noël de la première année." expliqua-t-elle en reconnaissant le livre. "Je n'ai jamais eu le temps de le compléter…"
"Je peux le voir ?" demanda Neville, ébahi.
Hermione lui tendit et Neville l'ouvrit avec précaution, inspectant chaque page comme si elles étaient extrêmement fragiles.
"C'est moldu ?" demanda Neville, la tête toujours penchée sur le carnet.
"Oui, ma grand-mère ne sait pas que je suis une sorcière. Elle m'a envoyé ça il y a cinq ans, avec une encyclopédie sur les plantes médicinales. Il est dans mon dortoir, si tu veux, je peux te le montrer demain."
Neville accepta d'un vif hochement de tête. Hermione savait qu'il avait une affection particulière pour la Botanique, mais elle n'avait pas pensé qu'il puisse être si intéressé. Elle le regarda inspecter chaque recoin du cahier.
"On peut le faire ensemble, si tu veux." proposa-t-elle avec enthousiasme.
Le garçon leva la tête vers elle sans comprendre.
"Faire quoi ?"
"Collectionner les plantes pour les mettre dans l'herbier." dit Hermione. "On pourrait mettre un nom de fleurs ou de plantes sur chaque page, et essayer d'en trouver autour de Poudlard ?"
Hermione avait rarement vu Neville aussi surexcité.
"Oh oui, avec plaisir ! Oh, on pourrait peut-être même trouver de la moly, on dit qu'il y en a dans la vallée !" s'écria-t-il, les joues rouges d'euphorie. "Et je pourrais peut-être arracher une feuille ou deux de mon Mimbulus mimbletonia… Mais, tu es sûre que ça ne te dérange pas ? Tu ne voulais pas le faire toute seule ?" demanda-t-il soudain, en lui redonnant l'herbier à contrecœur.
"Non, pas du tout, je serais ravie de le faire avec toi." affirma Hermione. "En plus, tu t'y connais bien mieux que moi, j'aurais besoin de ton expertise pour localiser les plantes."
Neville rougit intensément et fixa sa serviette pour lui répondre dans un bredouillement :
"Oh, euh, merci, Hermione… Et bien, j'accepte, avec plaisir… Quand veux-tu faire ça ?"
"Samedi, après notre séance de révisions ?" proposa-t-elle.
"Parfait." répondit Neville avec un sourire sincère.
Hermione posa la montagne de cadeaux à côté d'elle et se joignit à la conversation des Gryffondors. Quand Fred et George arrivèrent et qu'ils firent exploser leurs tubes de confettis au-dessus de sa tête, Hermione ne put s'empêcher d'éclater de rire avec les autres. Ça faisait tellement du bien d'avoir un peu de divertissement dans cette période sombre qu'elle ne ressentait même pas de honte. Ils chantèrent tous "Joyeux anniversaire" en boucle, de plus en plus fort pour irriter Ombrage qui mangeait à la table des professeurs.
Et Hermione sourit et chanta avec eux, en essayant de ne pas penser au fait que cette année était la première depuis qu'elle était à Poudlard où elle n'avait pas reçu les habituels biscuits à la citrouille d'Hagrid.
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"Qu'est-ce que vous voulez faire maintenant ?" demanda Ron quand ils remontèrent dans la Salle Commune ce soir-là, après le dîner. "Est-ce qu'on entame les devoirs, ou est-ce qu'on célèbre l'anniversaire d'Hermione avec une partie d'échecs ?"
"Je préférerais largement faire les devoirs." dit Hermione, et Ron éclata de rire. "Mais ça sera sans moi. J'ai la ronde des préfets ce soir, tu te souviens ?"
"C'est vrai, j'avais oublié !" s'exclama Ron, affligé. "Pauvre Hermione, tu vas devoir te taper une ronde de préfets avec Malefoy, et le jour de ton anniversaire en plus !"
Hermione passa dans l'ouverture du tableau et haussa les épaules en essayant de paraître détachée :
"Ça ne va pas être si terrible…"
"Tu plaisantes ?" intervint Harry, les sourcils haussés au-dessus de ses lunettes. "Déjà que passer la soirée avec Malefoy est pire que d'aller en Enfer, mais le jour de ton anniversaire…"
Hermione plissa les lèvres, en essayant de ne pas penser au nombre de soirées qu'elle avait passées en compagnie de "Malefoy" depuis l'année précédente.
Ron eut une mine interloquée :
"C'est quoi ça, l'Enfer ?"
Harry lui expliqua en deux mots la conception des Enfers pour les Moldus tandis qu'Hermione remontait dans son dortoir pour se changer avant de partir en ronde. Elle s'était attendue à être seule, alors quand elle entra et qu'elle vit Lavande au milieu de la pièce, elle recula de surprise.
"Oh, euh. Désolée, je ne savais pas que tu étais là."
Lavande baissa les yeux d'embarras.
"Hum, je ne reste pas longtemps, j'étais simplement venue chercher mon tarot…"
Hermione hocha la tête sans savoir quoi dire. Sa relation avec ses colocataires s'était gravement détériorée depuis que Lavande avait accusé Harry d'avoir menti sur le retour du Seigneur des Ténèbres. Maintenant, elles s'échangeaient à peine quelques mots, ou communiquaient à travers Parvati qui n'en pouvait plus de faire la messagère entre les deux.
Mais quand Hermione s'approcha de la salle de bains avec la ferme intention de s'y enfermer le temps que Lavande s'en aille, elle fut surprise de se faire arrêter par la voix timide de la blonde :
"Euh, Hermione ?"
"Oui ?" répondit-elle, un peu trop sèchement.
"Je voulais juste te dire, hum… Joyeux anniversaire."
"Ah. Merci."
Elle n'avait toujours pas digéré ce que Lavande avait dit sur Harry, mais elle lui sourit tout de même, parce qu'elle avait fait un pas de côté et qu'elle ne voulait pas plomber l'ambiance en l'envoyant balader. Lavande acquiesça, fit tourner le jeu de tarot dans ses mains plusieurs fois, puis se dirigea vers la porte :
"Hum, à plus tard, alors."
Et elle s'en alla rapidement, probablement pour s'éloigner de la tension de la pièce. Hermione se changea rapidement en jean et pull blanc, attacha ses cheveux et se hâta de descendre pour ne pas arriver en retard à sa ronde. Harry et Ron avaient commencé une partie d'échecs.
"J'y vais. Vous serez réveillés à mon retour ?" demanda-t-elle.
"Probablement. Tour en A6." dit Ron, qui regardait sa pièce avancer le long de l'échiquier.
"Est-ce que tu veux qu'on vienne, pour t'aider au cas où si Malefoy t'embête ?" proposa Harry d'une voix pleine d'inquiétude.
"Non, ne t'en fais pas, il n'est pas aussi… Atroce qu'avant." assura Hermione. "Je pense qu'il va simplement m'ignorer."
"N'hésite pas à le menacer de le transformer de nouveau en fouine s'il te dit un truc de travers." avisa Ron, les yeux toujours rivés sur ses pièces.
"Bonne idée." répondit-elle, un peu amusée en imaginant la réaction de Drago si elle osait utiliser cette menace.
"Bonne ronde, Mione !" lança Harry en la voyant partir, à moitié concentré sur ses pièces qui se faisaient déchiqueter par les assauts de Ron. "Appelle-nous si besoin !"
Hermione sortit par le tableau qui se referma derrière elle, et emprunta les escaliers pour descendre au rez-de-chaussée. Étant donné qu'on était jeudi, elle savait qu'il y avait une chance qu'un autre élève ait remplacé Drago pour qu'il puisse aller en Alchimie. Il n'avait jamais raté un seul cours particulier avec Rogue. Pourtant, elle espérait que non. Elle ne voulait passer la soirée qu'avec Drago.
Elle n'avait aucune idée d'où elle devait le retrouver, alors elle se rendit vers la Grande Salle dans l'espoir qu'il aille au même endroit. Elle descendit les escaliers et le vit, adossé contre le mur en pierre et entièrement vêtu de noir. Le cœur d'Hermione bondit dans sa poitrine.
"Bonsoir Granger." salua-t-il de sa voix traînante.
En le voyant comme ça, Hermione aurait pu vraiment croire qu'elle s'apprêtait à passer les trois prochaines heures avec Malefoy, et non pas Drago. Il avait son sourire en coin arrogant, le même qu'il utilisait pour l'insulter, avant. Sa voix était désintéressée, plate, et ses yeux avaient ce voile inexplicable qui cachaient ses émotions. Il agissait exactement comme Malefoy, sauf qu'il n'était pas Malefoy.
Cette bivalence était troublante.
"Bonsoir Malefoy." dit-elle, pour que les élèves qui sortaient d'un dîner tardif ne se doutent de rien.
Ils commencèrent par inspecter le premier étage du Château, à la recherche de quelques première ou deuxième années qui auraient dépassé le couvre-feu. Ils vérifièrent chaque recoin dans un silence de mort, ce qui avait le don de mettre Hermione mal à l'aise. Elle haïssait le silence.
Drago, lui, était parfaitement calme. Il marchait un peu devant elle, les mains dans les poches de sa cape noire. De temps en temps, elle risquait un regard vers lui, mais il fit comme s'il ne remarquait pas et continuait d'avancer sans dire un mot.
Même s'ils ne se parlaient pas, Hermione trouvait ça très étrange de se balader à côté de Drago en plein milieu de Poudlard. Aux yeux de tous. C'était la première fois qu'ils pouvaient se montrer de la sorte sans avoir peur d'être découverts. Elle avait déjà vécu ça quand il était venu la voir à Londres, et qu'ils avaient pu marcher côte à côte dans les rues sans que personne ne les arrête. Ici, ça n'était encore jamais arrivé, et mis à part quelques regards étonnés dans leur direction, personne n'y fit vraiment attention.
À 21h, les derniers élèves qui traînaient dans les couloirs regagnèrent leur Salle Commune. Mis à part un groupe d'élèves de quatrième années qui jouaient aux cartes dans un couloir du quatrième étage, Drago et Hermione ne croisèrent plus personne. Ils continuèrent de marcher inlassablement, sans s'échanger le moindre mot. Peut-être que Drago avait peur de lui parler, quand ils étaient exposés comme ça. Elle n'osa pas commencer la conversation.
Au bout d'un -très- long moment, Drago ralentit enfin le pas et vint se placer à côté d'elle. Quand elle tourna la tête vers lui, elle vit qu'il souriait. Pas le sourire narquois de Malefoy, le vrai sourire sincère de Drago, celui qu'elle adorait.
"Joyeux anniversaire, Granger." chuchota-t-il.
Elle ne put s'empêcher d'écarquiller les yeux de surprise : elle ne réalisait toujours pas qu'il puisse retenir ce genre d'informations sur elle.
"Oh, merci, Drago." dit-elle sincèrement. "Je suppose que tu as entendu les chants d'anniversaire de ce matin."
"Effectivement, je suis arrivé au moment où les jumeaux Weasley te lançaient le deuxième sceau de confettis sur tes cheveux." dit-il avec un petit rire. "Mais je savais déjà que c'était le 19 Septembre. Comme dirait Pansy, tu es Vierge. Comme Théo."
"Oui, mais je n'ai aucune idée de ce que ça signifie." admit-elle. Elle était peu intéressée par l'Astrologie. "Et toi tu es… Gémeaux ?" essaya-t-elle de deviner.
"C'est exact. Et je ne sais pas vraiment ce que ça signifie non plus."
Ils montèrent quelques marches pour arriver au cinquième étage, et partirent vers la gauche, au pied de la tour des Serdaigles. Il n'y avait personne, mais ils arrêtèrent de parler tout de même, au cas où les tableaux environnants écouteraient leur conversation. Ils firent le tour des escaliers, Hermione vérifia les toilettes des filles, et quand ils ne trouvèrent personne, ils montèrent au sixième étage.
Cet étage était beaucoup plus vide. Même les murs étaient dénués de peintures, seules des tapisseries apportaient un peu de couleurs dans ces couloirs sombres. Le seul bruit qu'ils entendaient était leurs pas contre le sol en pierre, et le léger pépiement d'un oiseau lointain.
Drago profita de l'absence de vie pour briser de nouveau le silence :
"En parlant d'Astrologie…"
Il jeta un regard vers Hermione, mi-amusé, mi-agacé.
"J'ai découvert un nouveau secret à toi." annonça-t-il gravement.
"Tu dis ça comme si j'en avais des centaines !" dit Hermione, feignant l'exaspération alors que son cœur s'était mis à s'accélérer soudainement.
"Tu en as des centaines." répliqua Drago automatiquement. "Tu as beau dire le contraire, Granger, mais je pense que tu es une des personnes les plus mystérieuses que je connaisse. Peut-être à égalité avec Blaise."
Elle roula des yeux, secrètement flattée par le compliment.
"En tout cas, j'en ai découvert un autre." reprit Drago très sérieusement. "L'un de tes nombreux secrets."
"En rapport avec l'Astrologie ?" répéta Hermione sans comprendre.
"Oui."
"Est-ce que tu veux parler du fait que j'ai quitté le cours de Divination ?" demanda Hermione, qui se creusait la tête pour essayer de comprendre de quoi il voulait parler.
Drago roula des yeux à son tour, comme si elle venait de le sous-estimer.
"Non, je sais ça depuis la troisième année. Je suis toujours convaincu que c'était à cause de ton Retourneur de Temps, d'ailleurs… Et tu n'as pas seulement "quittée" la Divination." ajouta Drago, en coupant la phrase d'Hermione qui s'apprêtait à nier son insinuation sur son collier. "Tu es partie comme une furie en balançant une boule de cristal par terre, nuance."
"Comment est-ce que tu peux possiblement savoir ça ?!" questionna Hermione, surprise d'entendre autant de détails.
"Parce que je sais tout." dit Drago d'un air fier. Puis, il compléta plus doucement : "Et parce que Pansy me l'a raconté."
"Ah, Parkinson, bien sûr. Mais alors, si ce n'était pas la Divination, de quel secret veux-tu parler ?"
"Tu n'en as vraiment aucune idée ?" demanda-t-il.
Hermione réfléchit. Elle n'avait rien caché à Drago ces dernières semaines, excepté peut-être son câlin avec Ron et sa correspondance avec Viktor, mais elle ne voyait pas trop le rapport avec l'Astrologie, et elle ne savait pas comment il aurait pu apprendre ça. Tandis qu'elle se remémorait ce qu'il s'était passé dernièrement, ils montèrent un étage supplémentaire, et arrivèrent dans les couloirs obscurs du septième étage.
"Merlin, tu me caches autant de trucs ?" s'exclama Drago avec une pointe de panique en voyant le temps qu'elle prenait.
"Non, je n'ai simplement aucune idée de quoi tu veux parler !" s'impatienta Hermione en s'arrêtant brutalement dans le couloir.
"Ah oui ? Vraiment ? Aucune idée ? Est-ce que le nom de "Skeeter" pourrait t'aider à te souvenir ?"
Son éclat de voix fit ouvrir un œil paresseux à un tableau à sa gauche.
En un éclair, Hermione vit le scarabée enfermé dans le bocal, et laissa échapper un hoquet de surprise.
Drago reprit sa marche d'un pas rapide et Hermione se dépêcha de le suivre.
"Skeeter ?" demanda-t-elle, dans une faible tentative d'indifférence.
"Oui, Skeeter." répéta Drago, qui avait baissé d'un ton mais semblait toujours agacé. "Je sais que tu as quelque chose à voir avec son absence."
"Je ne sais pas de quoi tu parles."
"Tu sais très bien que si." dit Drago, le regard dur.
Hermione s'était habituée aux disputes avec Drago, à sa répartie tellement rapide qu'elle avait parfois du mal à suivre leurs propres discussions. Mais celle-ci était différente de toutes celles qu'elle avait connu : normalement, ils étaient assis, et se renvoyaient la phrase de l'autre comme dans un intemporel jeu de ping-pong. Là, ils marchaient, et Hermione devait à la fois suivre le rythme de marche de Drago, qui était bien plus pressé que le sien, et la conversation qui prenait un tournant accusateur qu'elle n'avait pas anticipé.
Elle était captivée par la manière de Drago de la décontenancer. C'était la seule personne qui arrivait à le faire.
"Qu'est-ce qui te fait dire que je suis impliquée ?" demanda-t-elle en essayant de détourner le sujet.
"Tu es toujours impliquée." rétorqua-t-il aussitôt, comme s'il avait déjà deviné sa question avant même qu'elle ne la pose.
Il tourna la tête vers elle et ils échangèrent un regard, la plongeant un instant dans ses yeux bleus glacés qui la pétrifiaient presque sur place. Elle avait du mal à déterminer s'il était irrité, ou s'il était ravi d'avoir réussi à percer un nouveau mystère sur son compte.
"Je la déteste, c'est tout." asséna Hermione en guise d'explications. "Son absence est une heureuse coïncidence, et je ne la regrette absolument pas. Satisfait ?"
Drago fit alors un geste auquel elle ne s'était pas du tout attendu : il la dépassa d'un pas, et lui coupa le chemin en se mettant face à elle pour l'arrêter dans sa marche. Il était près, trop près. Elle pouvait sentir les effluves de sa cologne à la pomme verte et de menthe émaner de sa peau.
"Tu es en train de me mentir, Granger." murmura-t-il, comme un avertissement. "Dis-moi ce que tu as fait à Skeeter."
"Je n'ai rien fait à Skeeter."
"Encore un mensonge." remarqua Drago d'un ton soudain léger.
Il leva sa main et effleura sa joue, balayant une mèche de cheveux au passage. Le souffle d'Hermione se coupa au fond de sa poitrine.
"Dis-moi ce que tu as fait à Skeeter." répéta-t-il, plus doucement encore. Il la regarda et Hermione se perdit dans ses prunelles agitées.
"Je n'ai rien fait à Skeeter." répéta-t-elle obstinément.
"Tu m'as dit dans ta lettre que tu connaissais son secret." énonça-t-il très lentement, comme s'il essayait de remettre les pièces d'un puzzle en bazar. "Donc, entre la troisième Tâche et cet été, tu as découvert son secret. Quelqu'un te l'a dit ?"
"Non." répondit-elle sur un ton de défi.
"Tu l'as compris en me voyant lui parler sous l'arbre ?" demanda Drago.
"Pas seulement." objecta-t-elle, incapable de ne pas partager son savoir. "J'ai compris qu'elle était un Animagus parce que c'était la seule explication possible après qu'elle ait pu écouter des conversations si privées : Hagrid qui parle de sa mère, Viktor qui me prend à part pendant la deuxième Tâche, Harry qui fait un cauchemar en Divination… (Drago avait froncé les sourcils en entendant la mention du prénom de Krum, mais Hermione accéléra son récit pour ne pas qu'il puisse lui poser de questions.) Au début, je pensais que c'était un cafard, mais j'ai compris qu'elle pouvait se transformer en scarabée quand je l'ai trouvée sur le rebord de la fenêtre de l'infirmerie."
"Et qu'est-ce que tu as fait ?" demanda le Serpentard, les yeux pétillants d'avidité.
Il s'approcha d'elle encore plus près et Hermione sentit l'alcôve contre son dos. Drago posa une main à côté de sa tête et attendit sa réponse avec un sourcil haussé.
Hermione hésita en se mordant inconsciemment la lèvre.
"Si je te le dis, tu me promets de ne pas le répéter ?" demanda-t-elle d'une petite voix.
C'était difficile de penser clairement quand il la regardait comme ça. Son visage était trop proche du sien, exactement comme lorsqu'ils s'étaient hurlés dessus pendant le Bal. Ses yeux étaient rivés sur elle et la détaillait doucement, faisant glisser son regard de ses yeux à sa bouche, et Hermione entrouvrit les lèvres sans même s'en rendre compte.
À chacune des expirations de Drago, elle pouvait sentir la menthe lui rafraîchir le bout de la langue.
"Promis." chuchota-t-il, et Hermione le crut sur le champ, sans savoir pourquoi.
"Je l'ai enfermée dans un bocal." confessa-t-elle, si bas qu'elle se demanda si Drago l'avait entendue.
Mais en voyant ses yeux s'agrandir, elle comprit qu'il avait bel et bien entendu.
"Qu- Quoi ?" s'écria-t-il sans même plus prendre la peine de chuchoter.
"Je l'ai enfermée dans un bocal et je l'ai ramenée à Londres avec moi." expliqua-t-elle très calmement.
Drago la regarda soudain comme s'il la voyait pour la première fois.
"Tu plaisantes ?" demanda-t-il après plusieurs secondes de silence.
"Non, pas du tout. Je l'ai enfermée dans un bocal, j'ai jeté un sortilège Incassable dessus pour ne pas qu'elle se transforme de nouveau, et je l'ai menacée de tout révéler au Ministère si elle écrivait le moindre article pendant au moins un an. Quand elle a accepté mon accord, je l'ai libérée dans le parc d'Hampstead, à Londres."
Drago était visiblement en train d'évaluer si elle inventait une histoire ou si elle disait la vérité. Il dût opter pour la seconde option, parce qu'il relâcha une exclamation étouffée qui envoya une bouffée d'air mentholé sur la bouche d'Hermione.
"Merlin… Putain, Granger, c'est…" dit-il en cherchant ses mots.
"Digne d'une Serpentarde ?" compléta-t-elle avec un sourire espiègle.
"Ouais, putain." souffla-t-il, à la fois choqué et admiratif. "C'est vraiment… Putain."
Il s'éloigna soudain d'elle et se passa une main dans les cheveux, le geste qui témoignait de sa nervosité. Ça lui rappela le Bal, quand ils s'étaient hurlés dessus puis soudainement rapprochés, qu'à quelques centimètres l'un de l'autre…
Elle secoua la tête, se forçant à mettre ce souvenir dans un coin de sa tête.
"Tu ne diras rien ?" insista-t-elle.
"Non, évidemment que non, et de toute manière, qui me croirait ?" questionna Drago avec un rire hésitant. "Putain, Granger, c'est vraiment…"
Elle s'avança vers lui :
"Drago, tu es préfet !" rappela-t-elle de sa voix aiguë qu'elle ne contrôlait pas. "Ton langage !"
"C'est toi qui me dit ça ?!" s'exclama-t-il, les yeux arrondis. "Putain, Granger, tu as enfermé une putain de journaliste dans un putain de bocal !"
"Chuuut !" intima-t-elle.
Elle inspecta le couloir, mais il n'y avait personne dans les tableaux aux alentours.
"Je ne pensais pas… Je n'aurais jamais pensé que…" avoua-t-il en reprenant hasardeusement sa marche, les yeux perdus dans le vide.
"À quoi tu t'attendais ?"
"Je n'en sais rien ! Que tu lui aies envoyé une lettre pour lui dire que t'avais compris son secret, ou que tu l'avais révélé à la Gazette pour qu'ils arrêtent de la publier, à la rigueur… Je n'aurais jamais pu imaginer que tu l'avais enfermée dans un putain de bocal ! Tu l'as emmenée à Londres ?!"
Soudain, il se tourna vers elle, frappé par l'horreur :
"Ne me dis pas qu'elle était sur toi quand je suis venu ?!"
Hermione sentit une petite bouffée de chaleur à l'évocation de ce souvenir.
"Non, bien sûr que non." dit la Gryffondor avec une grimace. "Tu crois vraiment que j'ai une collection de bocaux d'insectes que je garde en permanence dans ma poche ? Je ne suis pas Luna Lovegood !"
"Qui ?" demanda Drago, perplexe.
"Rien, laisse tomber."
Ils empruntèrent l'escalier qui menait à la tour d'Astronomie et patrouillèrent autour : de la salle de théories jusqu'à la plateforme glaciale où ils avaient cours à minuit. Hermione n'aimait pas trop cet endroit, parce qu'elle avait le vertige et que les rafales de vent la fouettaient si fort qu'elle était toujours persuadée qu'elle pouvait passer par-dessus le rebord. Drago, lui, s'approcha tout de suite des barrières autour de la plateforme et observa une seconde le paysage plongé dans le noir, avant de descendre les escaliers. Il paraissait toujours troublé par l'aveu d'Hermione, qui ne pouvait pas s'empêcher de ressentir une petite dosé de fierté à l'idée d'avoir impressionné Drago Malefoy.
Ils passèrent devant le bureau de la professeure Sinistra et se turent d'un accord tacite. Dès qu'ils retrouvèrent les couloirs déserts, Hermione demanda :
"Au fait, comment est-ce que tu as réalisé que Skeeter était absente ?"
Il tourna la tête vers elle avec une expression dédaigneuse sur ses traits.
"À ton avis ? Qui aurait bien pu remarquer l'absence de sa précieuse Rita Skeeter ?"
Hermione cessa de froncer les sourcils en comprenant soudainement.
"Bien sûr…" soupira-t-elle. "Parkinson, comment ai-je pu oublier…"
"Inutile de te dire qu'elle est complètement dévastée." renchérit Drago. "Plus d'horoscopes les matins… Son enfer personnel."
"J'en suis désolée, alors." dit Hermione, d'une voix faussement attristée. "J'ai complètement oublié la passion de Pansy Parkinson pour les horoscopes quand j'ai arrêté la journaliste la plus abominable de tous les temps de révéler les secrets d'Harry. Comment ai-je pu ?"
"Elle accepte les excuses écrites." dit Drago avec un rire.
Hermione sourit et tourna dans le couloir adjacent du septième étage, qui menait vers la Tour des Gryffondors. Drago ne s'arrêta pas et continua sa route, sans passer par le couloir de la Grosse Dame.
"Comment as-tu réussi à échapper au cours particulier de Rogue, ce soir ?" demanda-t-elle, pour ne pas laisser un énième silence.
Le sourire de Drago s'effaça quand il entendit le nom de Rogue. Hermione eut l'impression que ses yeux s'assombrirent tout à coup, mais c'était probablement à cause d'un jeu de lumière des torches du couloir.
"C'est décalé à demain." dit-il, d'une voix beaucoup plus tendue qu'avant. "Je lui ai expliqué que j'avais une ronde et que mes devoirs de préfets étaient plus importants que l'Alchimie."
Hermione haussa les sourcils, surprise par cette réponse. Elle ne savait pas que Drago prenait tant à cœur ses responsabilités de préfet.
Il tourna alors la tête vers elle avec un sourire narquois :
"Et puis, je ne voulais pas rater ta soirée d'anniversaire."
Hermione essaya tant bien que mal de cacher les rougeurs de son cou que lui procura cette phrase, sans succès.
"Mais je pensais que tu aurais annulé." admit-il en montrant la tour des Gryffondors d'un geste approximatif de la main. "Je pensais qu'il y aurait une soirée pour célébrer et que tu n'aurais pas pu te libérer…"
"Oh, non, il n'y a pas de soirée…" bredouilla-t-elle.
"Ah bon ?" dit-il, étonné. "Ils ne font pas la fête, là-bas ?"
"Non, pas vraiment. Ron et Harry jouaient aux échecs quand je suis partie, je pense qu'ils dormiront quand je serais revenue."
Il la regarda d'un drôle d'air.
"Sérieusement ?" demanda-t-il, avec une pique de dédain. "Personne n'organise de fêtes, chez les Gryffondors ?"
"Pas en semaine !" dit-elle de sa voix la plus sévère, mais qui rendit toute fluette. "Et puis, je ne veux pas de fête d'anniversaire, je ne le fête pas vraiment. J'ai soufflé les bougies pour faire plaisir à Ginny, j'ai ouvert mes cadeaux, et c'est déjà bien suffisant."
"Je pensais que Potter et Weasley te kidnapperaient pour te forcer à faire la fête." dit-il, et Hermione comprit qu'il faisait référence à sa soirée alcoolisée de Bièraubeurres.
"Non, pas du tout, ils ne sont pas comme ça. Ils savent que je me fiche un peu de cette journée. Mais… Je dois avouer que j'aime bien fêter mon anniversaire avec toi." confia-t-elle timidement.
Un sourire creusa les joues de Drago et elle l'imita sans pouvoir s'en empêcher.
"C'est vrai ?" demanda-t-il.
Sa main effleura celle d'Hermione en marchant.
"Oui."
"Viens." dit-il soudain en lui prenant le poignet.
Le contact l'élécrifia. Il lui tenait le poignet exactement comme lors de cette fameuse soirée. Ses doigts étaient refermés contre son bras, et sa peau froide envoyait des pulsions enflammées contre la peau fine du poignet d'Hermione. Il l'emmena un peu plus loin dans le couloir plongé dans la pénombre.
Avec son autre main, il sortit sa baguette et la posa sur la poignée de la porte la plus proche :
"Alohomora."
La serrure cliqueta et s'ouvrit. Drago guida Hermione à l'intérieur et referma silencieusement la porte derrière lui. Puis, il agita sa baguette, et toutes les torches de la pièce s'allumèrent d'un coup.
Hermione se rendit compte qu'ils étaient dans la salle de classe d'Arithmancie, elle pouvait reconnaître la disposition des pupitres et les chartes accrochées aux murs.
"Drago, qu'est-ce que tu fais ?!" chuchota Hermione. "On est préfets !"
"Justement, si on nous trouve, on a qu'à dire qu'on pensait avoir entendu des gens squatter la classe." répondit-il tout bas.
Hermione tordit la bouche en entendant un tel propos. Il avait vraiment un don pour briser le règlement, il était pire qu'Harry.
Pourtant, elle ne fit rien pour sortir de la classe. La curiosité l'avait piquée.
"Pourquoi tu m'as emmenée ici ?" demanda-t-elle.
Il rangea sa baguette dans sa poche et s'approcha d'elle, un sourire accroché aux lèvres.
"J'ai un cadeau pour toi." dit-il d'un ton fier.
Elle ne s'était absolument pas attendue à ça. Elle recula un peu, surprise.
"Quoi ? Oh, mais il ne fallait pas…" commença-t-elle.
"J'étais sûr que tu allais dire ça."
Il paraissait très amusé par sa réaction. Elle devait irradier de rougeurs.
"Je te l'ai dit, je ne fête pas vraiment mon anniversaire." dit Hermione.
"Mais tu as reçu plein de cadeaux toute la journée." objecta Drago. "Je n'ai pas le droit de t'en faire, moi ? Tu m'as offert des partitions, je te rappelle."
"Je ne t'ai pas offert des partitions pour avoir un cadeau en échange !"
"C'est pourtant comme ça que ça marche, je crois." dit Drago d'un ton sarcastique. "Tu m'offres un cadeau à mon anniversaire, et moi, je t'en offre au tien, et ainsi de suite…"
"Je sais comment fonctionnent les anniversaires !" soupira Hermione d'un air agacé.
"Parfait, alors, laisse-moi t'offrir mon cadeau." dit-il avec un petit sourire satisfait.
Elle savait qu'il avait eu le dernier mot et elle faillit piétiner le sol d'indignation. Mais Drago sortit un paquet de la poche de sa cape, et toute leur conversation se dissipa pour laisser place à la curiosité.
Le papier-cadeau était blanc, avec des motifs de fleurs qui ondulaient sur le papier. Hermione trouva le cadeau tellement beau qu'elle ferma automatiquement la bouche, incapable de répliquer davantage.
"Encore joyeux anniversaire, Hermione." murmura Drago avec un sourire.
Ignorant son coeur qui loupa un battement en l'entendant prononcer son prénom, elle leva la tête vers lui, les yeux déjà imbibés de larmes :
"Oh, Drago…"
"Il faut l'ouvrir." dit-il, toujours aussi sarcastique.
Elle souffla du nez, mi-rire mi-soupir, et déballa soigneusement le papier. Imaginer Drago emballer un cadeau pour elle était une vision aussi étrange que plaisante. Ses doigts tremblaient un peu en retirant le papier blanc.
Elle s'était tellement attendue à un livre que quand elle se retrouva face à une boîte noire, sans aucune indication dessus, elle fronça les sourcils. Elle leva la tête vers Drago, qui la regardait avec son petit sourire en coin.
Hermione ouvrit la boîte, et tomba nez à nez avec un appareil qu'elle n'avait jamais vu : c'était une petite machine carrée et noire, qui faisait la taille de sa main, avec un gros cercle noir au centre. Dans l'écrin de la boîte noire, il y avait aussi une grande sphère d'un blanc éclatant.
Il y eut un flottement où Hermione analysa l'appareil en se remuant les méninges pour comprendre ce que Drago venait de lui offrir.
"Tu sais ce que c'est ?" demanda-t-il.
"... Non." admit Hermione, penaude.
"C'est probablement la première fois que je t'entends dire ça." dit Drago avec un petit rire. "Ceci… Est un appareil photo."
Hermione fronça encore plus les sourcils en observant la petite machine au fond de la boîte.
"Les appareils photos ne marchent pas à Poudlard." contesta-t-elle aussitôt.
"Les appareils photos moldus, peut-être." concéda-t-il. "Ça, c'est un appareil photo sorcier."
Hermione leva brutalement la tête pour le regarder. Elle vit alors quelque chose qu'elle n'avait jamais vu jusqu'à cet instant : Drago rougissait.
Visiblement, son manque de réaction l'avait troublé. Il avait perdu son sourire et l'observait avec appréhension, les joues légèrement rosies par le stress. Hermione avait pu voir toutes sortes d'humeur chez Drago, ces dernières années. Elle avait longuement côtoyé Malefoy, avant de croiser Drago mystérieux, taquin, sarcastique, parfois colérique, parfois froid, souvent compétiteur, puis, Drago jaloux, Drago attentionné, Drago gentil…
En tout cas, Drago avait toujours été confiant, peu importe son humeur. Il avait toujours débordé de cette confiance en soi, parfois tirant même vers l'arrogance. Hermione fut confrontée à une nouvelle version de Drago, pour la première fois depuis qu'elle le connaissait : Drago timide.
Et elle devait admettre qu'elle adorait particulièrement le voir rougir. Ça prouvait à quel point il s'était ouvert à elle, s'était rendu vulnérable pour lui faire plaisir.
"Tu m'as acheté… Un appareil photo sorcier ?" demanda-t-elle d'une petite voix.
"Oui, je me suis dit…" commença-t-il en bredouillant légèrement. Elle n'avait jamais entendu Drago buter sur un mot avant. "La dernière fois, tu m'as dit que tu ne pouvais pas montrer Poudlard à tes parents, parce que les appareils moldus ne marchent pas ici. Alors, j'ai pensé… Que ça pourrait être bien de… Peut-être que si tu peux leur montrer ta vie d'ici, ils comprendront mieux, et cette barrière entre vous pourrait diminuer."
Il s'arrêta pour se passer une main dans les cheveux. Elle fixa ses lèvres pour écouter le reste de son explication :
"Tu avais l'air vraiment peinée par cette séparation avec tes parents, tu en as parlé dans tes lettres plusieurs fois, et je sais que c'est quelque chose qui te peine beaucoup, alors… Je ne sais pas, je pensais que ça te ferait plaisir de pouvoir leur partager des moments de ta vie avec eux."
Hermione était sidérée. Non seulement c'était un très beau cadeau original, mais en plus, il était extrêmement personnalisé. Drago l'avait écoutée et avait pensé à elle, d'une manière qu'elle n'aurait jamais cru possible.
Elle était tellement submergée d'émotions qu'elle n'arrivait pas à exprimer sa reconnaissance. Drago, au bord de la nervosité, se recula légèrement :
"Désolé, je pensais vraiment que ça te ferait plaisir…"
"Drago, c'est…"
Elle observa la boîte et sentit les larmes monter en pensant à toute la symbolique cachée derrière ce cadeau. Elle releva la tête et plongea son regard dans le sien, couleur tempête.
"Je ne peux pas te dire à quel point je suis touchée par ton cadeau. C'est… C'est… C'est un putain de cadeau." lâcha-t-elle franchement.
Il écarquilla les yeux en l'entendant prononcer ce mot.
"Ton langage, Granger."
Pour toute réponse, elle se jeta dans ses bras.
Elle n'avait pas prévu de l'enlacer, mais Hermione se rendit compte à cet instant qu'elle en mourrait d'envie. Elle passa ses deux bras autour de son cou et il répondit tout de suite à son étreinte en lui encerclant la taille, pour la serrer fort contre lui. La cage thoracique comprimée, Hermione relâcha un petit soupir qui se mêla à celui de Drago, un souffle plein de soulagement qu'elle sentit dans ses cheveux.
"Merlin, je suis tellement soulagé, j'ai cru que tu l'avais mal pris…"
"Comment pourrais-je mal le prendre ?" demanda-t-elle sincèrement. "C'est l'un des plus beaux cadeaux que j'ai reçu, Drago. Merci. Je vais enfin pouvoir leur montrer cette partie de ma vie qu'ils ont tant de mal à comprendre, et mes amis, et Poudlard…"
Les larmes roulaient librement sur ses joues, désormais. Drago serra encore plus sa prise contre elle et Hermione inspira l'odeur de menthe qui émanait de lui en permanence, et qu'elle avait l'impression de sentir sur le bout de sa langue à chaque fois qu'il lui parlait.
Ils restèrent enlacés plusieurs minutes, et Hermione espérait que toute la gratitude d'avoir reçu un cadeau si attentionné se transmettait à travers ce contact. Elle avait l'impression que leurs cœurs battaient à l'unisson.
Elle se détacha finalement, et avant qu'elle ne puisse essuyer ses larmes, il porta sa main à son visage et passa son pouce sur ses joues doucement. Ses doigts glacés contre la peau fiévreuse d'Hermione étaient divins.
"Merci, Drago. C'est un très beau cadeau." dit-elle sincèrement.
"Tu veux l'essayer ?"
Hermione acquiesça et posa la boîte pour en sortir l'appareil délicatement. Il était un peu plus gros que les appareils photos moldus, et un peu plus lourd. Elle le posa sur son œil et observa la salle de classe à travers l'objectif légèrement arrondi.
"Tu dois prendre ça et la mettre à côté de ton visage, à droite." indiqua Drago en lui donnant la grande sphère blanche. "C'est pour capturer la photo et la faire bouger."
Hermione suivit ses instructions et prit la sphère, en la mettant à hauteur de son visage.
"Qu'est-ce que tu veux prendre en photo ?" demanda Drago en regardant les chartes d'Arithmancie autour de lui.
"Toi, bien sûr." dit-elle, sans hésiter.
Il se tourna vers elle et Hermione put voir son froncement de sourcils à travers la caméra.
"Tu es sûre…?"
"Je la cacherai." promit-elle.
"Je déteste les photos." dit Drago.
"Pourtant, tu en as pris une avec Parkinson, au Bal de Noël."
Elle avait dit ça comme une observation, mais réalisa sa phrase qu'une seconde après l'avoir dite. Drago avait arrondi les yeux :
"Tu m'observais ?"
Elle ne répondit rien, parce qu'il avait raison. Elle l'avait observé. En fait, maintenant qu'elle y pensait, elle l'observait bien plus que nécessaire.
"Alors qu'on se parlait plus ?" demanda-t-il avec un sourire comblé. "Tu m'observais au Bal ?"
"Je…" commença Hermione.
"Oh, je ne te blâme pas." dit-il. "Je t'observais aussi, Merlin, tu étais la plus belle fille de la soirée."
Il avait retrouvé sa confiance débordante, parce qu'il avait dit ça d'un ton détaché, comme si c'était une évidence et non pas un compliment. Hermione flamba et balbutia un "merci" timide, et colla l'appareil photo à son oeil pour ne pas qu'il voit ses rougeurs :
"Allez, pose !"
Il roula des yeux d'un air faussement excédé, mais consentit tout de même. Il croisa les bras sur sa poitrine et releva la lèvre dans son sourire typique. Avec ses cheveux blonds qui tombaient sur son front et ses yeux d'un bleu profond, il était extrêmement beau.
Hermione appuya sur le bouton, et le flash éclata de la sphère avec un petit "pouf" de fumée violette. La photo sortit par la fente de l'appareil instantanément. Quand Hermione la prit entre ses mains, elle fut ravie de voir que le visage de Drago avait été retranscrit à la perfection : de ses traits gravés dans le marbre jusqu'à la couleur bleue océan de ses prunelles. Elle pouvait voir son sourire se dessiner sur la photo mouvante.
"C'est parfait ! Oh, je vais pouvoir prendre tellement de choses en photos !" s'exclama Hermione en pensant à toutes les choses qu'elle avait désespérément envie de montrer à ses parents depuis qu'elle était arrivée à Poudlard. "Tu penses que Madame Pince m'autoriserait à prendre la Bibliothèque ?"
Drago eut un petit rire en entendant une telle question.
"Je pense qu'elle ne refuserait rien à son élève préférée."
Hermione sautillait presque de joie.
"Tu as quarante pellicules là-dedans mais je t'ai acheté trois autres paquets pour que tu n'en manques pas." expliqua-t-il. "Si tu n'as plus de stock, tu peux toujours en acheter à Blue Retinae sur le Chemin de Traverse, c'est là que je l'ai acheté."
"Ça a dû te coûter atrocement cher…" réalisa Hermione en soupesant l'appareil. Il était étrangement léger.
Drago balaya sa remarque d'un revers de la main et consulta sa montre :
"Je te raccompagne." annonça-t-il.
"Et la ronde ?"
"La ronde est terminée, Granger. Il est presque minuit."
Hermione eut un hoquet de surprise. Le temps passait toujours extrêmement vite quand elle était avec Drago, elle ne voyait pas les heures passer. Elle hocha donc la tête et ils sortirent de la salle d'Arithmancie en silence, et il verrouilla la porte derrière eux.
La Salle Commune des Gryffondors n'était vraiment pas loin : ils marchèrent à peine cinq minutes, et se retrouvèrent en bas de la tour. La Grosse Dame était au fond du couloir. Hermione pouvait entendre ses ronflements résonner contre les murs en pierre.
"Encore joyeux anniversaire, Granger."
"Merci Drago, et merci pour ce cadeau, il est vraiment parfait." dit-elle en lui montrant la boîte.
Il haussa les épaules. Prise d'une impulsion, elle se mit sur la pointe des pieds pour lui faire un bisou sur la joue. Il se raidit dès qu'il sentit ses lèvres contre sa peau.
"Bonne nuit, Drago."
"Bonne nuit, Hermione."
Il se retourna et reprit les escaliers pendant qu'elle marchait le long du couloir. Elle cacha la boîte de l'appareil photo du mieux qu'elle pouvait sous son pull, puis toussota lourdement devant le tableau. Mais la Grosse Dame dormait profondément.
"Mimbulus mimbletonia !" dit Hermione d'une voix forte.
La femme se réveilla en sursaut et ouvrit un oeil, qu'elle baissa sur Hermione d'un air agacé.
"Et où étiez-vous ?" demanda-t-elle d'un ton impérieux.
"Je faisais ma ronde de préfète." répondit Hermione.
"Et pourquoi êtes-vous toute rouge, alors ?" demanda la Grosse Dame en se redressant pour l'observer de plus près.
"Les escaliers m'ont essoufflée !" mentit Hermione d'une petite voix fluette.
"Vraiment ?" dit la Grosse Dame, qui n'avait pas l'air d'y croire du tout. "Je dirais plutôt que vous êtes amoureuse, mademoiselle."
Hermione eut une exclamation scandalisée. Elle jeta un coup derrière elle pour vérifier que Drago était bien parti, puis se retourna vers le tableau, outrée :
"Absolument pas !" piailla-t-elle.
"Oh, un peu de sérieux." dit le tableau, dont les traits peints se contractèrent dans un sourire connaisseur. "Cela fait plus de cent ans que j'ai été accrochée ici, je fréquente des adolescents depuis cent ans, et je sais reconnaître les rougeurs de l'amour quand j'en vois."
"Et bien, vous avez tort, je suis simplement essoufflée !" contesta Hermione, indignée. "Maintenant, laissez-moi passer !"
La Grosse Dame n'insista pas mais ne perdit pas son sourire. Le tableau s'ouvrit, et Hermione s'y engouffra en sifflant le plus dédaigneusement possible.
La Salle Commune était vide. Ron et Harry ne l'avaient pas attendu, finalement. Un changement qui ne déplaisait pas à Hermione, qui put s'allonger de tout son long dans son canapé préféré, les méninges en feu. Elle enleva la boîte noire de sous son pull et l'observa longuement, les pensées un peu ailleurs.
Elle pensait à Drago.
À son attitude des derniers mois. À la manière dont il avait évolué. Ses convictions sur les Moldus avaient tellement changées que ça en était déroutant. Elle pensa à la manière dont elle le regardait en permanence. L'habitude qu'elle avait pris de le chercher dans la foule dès qu'elle pouvait. La volonté de le voir, de lui parler, de rire avec lui. Elle pensa à son envie d'être proche de lui, de le sentir contre elle et d'inspirer cette odeur addictive qui le définissait si bien.
Elle pensa à Ginny, qui lui avait demandé si elle était amoureuse de Malefoy, quelques jours auparavant. Elle avait répondu un non automatique, définitif.
Hermione réalisa à cet instant qu'elle venait de mentir à la Grosse Dame.
Elle avait menti à Ginny.
Parce qu'Hermione était bel et bien amoureuse de Drago Malefoy.
