Drago


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Drago avait passé une mauvaise journée.

En fait, maintenant qu'il y pensait, toutes ses journées du mois de Décembre avaient été atroces. Les conséquences de ses erreurs le soir du match étaient encore douloureusement inscrites dans son quotidien, comme s'il ne pouvait pas s'échapper de ce cercle infernal qui le tirait vers le bas. Il regrettait amèrement chaque mot qu'il avait prononcé avec Granger, parce qu'elle semblait déterminée à le faire payer en lui rappelant de quel garçon elle était censée être amoureuse : Weasley.

Non seulement Drago devait assister à chacun de leurs rapprochements, mais il devait aussi supporter l'air ébahi qu'affichait Weasley à chaque fois que Granger lui donnait la moindre attention. C'était comme s'il était témoin d'un amour naissant entre Crabbe et Pansy, c'était révoltant, immonde, et c'était lui qui avait commencé ça. C'était à cause de lui que Granger avait voulu se venger de la sorte. Et il n'aurait jamais pensé qu'elle puisse être aussi forte à ce jeu. La jalousie consumait Drago un peu plus chaque jour, écourtant ses nuits et rendant ses journées de plus en plus difficiles. Il sécha le plus de classes possibles, malgré le travail qui s'accumulait en vue des BUSES.

La veille, un évènement étrange avait troublé le quotidien misérable de Drago. Théo avait fait tomber son livre moldu, et à la surprise générale, Granger l'avait aidé. Pas par intérêt, pas même pour rendre jaloux Drago. Il savait qu'elle avait eu pitié pour Théo, et qu'elle s'était tout de suite rendu responsable pour le décharger de l'embarras qu'il avait dû ressentir. Elle l'avait aidé, sauvé.

Drago n'arrivait pas à définir ce qu'il ressentait en y repensant. Il était à la fois énervé que Théo et Granger puissent construire un lien mystérieux où il n'était pas impliqué, parce qu'il détestait l'idée que Théo puisse la connaître d'une autre manière qu'il la connaissait. Qu'il puisse se vanter d'avoir une amitié avec Granger, alors que la sienne s'effaçait au fil des jours. Il imaginait ça comme la punition que Merlin ne cessait de lui infliger : devoir regarder son meilleur ami vivre ce qu'il aurait pu vivre s'il n'avait pas été aussi lâche, aussi terrifié par sa propre famille que Théo avait réussi à rejeter bien avant lui.

Mais d'un autre côté, Drago n'arrivait pas à imaginer un autre scénario que celui-là. C'était Granger. Évidemment qu'elle ramassait le livre. Évidemment qu'elle s'opposait à Crabbe et Goyle, même si c'était eux qui lui avaient lancé le sort qui lui avait mutilé la nuque. C'était Granger, la généreuse, l'intrépide, l'altruiste Granger. Celle qui aidait ceux qui en avaient besoin. Celle qui n'avait pas peur de se battre quand la cause lui semblait juste. Drago ne pouvait pas imaginer une autre réaction que celle qu'elle avait eu. Si elle n'avait pas porté secours à Théo, cela aurait voulu dire qu'il l'avait lui-même contaminé de Serpentard, et Drago ne pouvait pas imaginer ça, parce qu'il était tombé amoureux de la Granger de Gryffondor, aussi étrange que cela puisse paraître.

Drago n'avait cependant pas apprécié à la Bibliothèque, lorsque Granger avait rendu le livre à Théo et discuté avec lui comme s'il n'était pas juste là. Comme si elle ne remarquait même pas sa présence. Ça avait été aussi pénible que douloureux. Drago n'avait pas arrêté de penser, le soir dans son lit, à l'alternative. S'il ne l'avait pas embrassée, peut-être qu'ils auraient passé la soirée à leur table, à réviser tous les deux, sans Théo, sans Fleurs du Mal, sans aucune interférence qu'eux deux, dans leur bulle.

Le mardi, après le dîner, Drago réussit à s'échapper subtilement de la corvée de sortie d'Eris en prétextant un devoir urgent à faire à la Bibliothèque. Ce n'était pas tant une excuse, car la montagne de devoirs menaçante sur son bureau ne cessait de grandir au fil des jours, mais il était bien trop épuisé mentalement pour faire un travail correct.

Il se rendit tout de même à la Bibliothèque pour maintenir son mensonge, laissant à Blaise la lourde tâche de sortir le chien, une dette qu'il devra sans doute rembourser tôt ou tard au vu du regard noir que lui lança Blaise quand Drago sortit de la Salle Commune.

Il monta les escaliers et traversa le couloir de la Bibliothèque en traînant des pieds. Il n'avait pas vraiment envie d'y aller, parce que s'asseoir à une autre table que celle qui était cachée par des étagères était presque cruel, comme un rappel tentant permanent de ce qu'il ratait à cause de sa propre stupidité. Mais il y allait quand même, en espérant que Granger soit assise à son endroit sous la fenêtre, le nez plongé dans un bouquin, ou en train d'écrire à toute vitesse sur un parchemin bien trop long. S'il ne pouvait pas lui parler, au moins, il pourrait la regarder travailler et rêver d'être assis en face d'elle.

Drago était en train de se consoler à cette idée quand il tourna vers les doubles portes, inconscient que sa journée allait devenir encore plus mauvaise qu'elle ne l'était déjà.

À peine passa-t-il le palier que ses yeux la cherchèrent, comme un réflexe, un automatisme inscrit dans son ADN. Il la trouva bel et bien sous la fenêtre, entourée d'un halo orangé de crépuscule qui faisait briller ses boucles châtains sous le soleil.

Pendant une brève seconde, Drago fut frappé par sa beauté naturelle.

Pourquoi Merlin essayait-il de le tenter avec une table reculée, alors qu'elle était juste là ? Suffisante pour remettre en question tous ses principes, ses valeurs, ses décisions ? Comment avait-il pu la rejeter, alors qu'il oubliait tout quand il la voyait comme ça, quand elle ne savait pas qu'il la regardait, quand elle riait ?

Il resta accroché à son sourire, puis tourna la tête vers la personne avec qui elle riait. Drago était tellement fixé sur Granger qu'il avait cru que le garçon avec elle était Potter.

Le choc qu'il ressentit quand il reconnut les cheveux châtains et les yeux bleus de son meilleur ami fut indescriptible. Drago se figea. Son sang se glaça.

Granger et Théo étaient assis à la même table, l'un en face de l'autre, un manuel posé au centre, mais aucun des deux ne travaillaient. Ils discutaient. Drago assista à la scène comme s'il n'était plus dans son propre corps, comme s'il était très loin, comme dans un rêve éveillé. Il regarda avec horreur Théo tendre un livre à Granger, le même que celui qu'elle avait ramassé devant la classe d'Arithmancie, le recueil de poésies moldues. Elle le prit dans ses mains avec un air de pure adoration sur son visage. Et même s'il était bien trop loin pour entendre la moindre phrase, Drago n'eut aucun mal à lire sur ses lèvres : "Mon Dieu, Théo, il est magnifique !"

Chaque muscle de son corps était lourd. Il était comme cloué au sol, incapable de s'arracher de cette vision cauchemardesque devant ses yeux. Il regarda Théo, qui contemplait Granger, qui observait le livre comme si Merlin en personne l'avait créé, et quand un sourire attendri remonta la commissure des lèvres de Théo, Drago ressentit cette émotion familière parcourir ses veines : la jalousie. Comme une brûlure, une gifle qui le pétrifia, un mélange de colère et de peur déroutant.

Ils rièrent de quelque chose que Drago n'entendit pas, certainement une blague de Mr. et Miss-On-Sait-Tout qu'il n'aurait pas compris, puis Théo se lança dans une longue phrase, une explication, ou une demande, et Drago fut surpris de le voir converser aussi aisément avec Granger qu'avec Blaise ou Pansy. Comme s'ils se connaissaient déjà depuis des années, alors qu'il savait qu'ils ne s'étaient jamais parlés directement avant l'histoire de la potion.

Puis, Granger fit quelque chose qui acheva Drago. Elle lui tendit sa main, et Théo la prit sans hésiter, et ils se serrèrent la main, comme pour sceller un accord, comme toutes les fois où ils l'avaient fait, et le geste fit tourner la tête de Drago dans un vertige douloureux. Il avait envie de courir vers eux, d'hurler, de les arracher l'un de l'autre, mais il resta fixé là, les membres toujours autant engourdis et la tête vidée.

Il avait dû bouger sans s'en rendre compte, parce que l'attention de Granger fut brièvement dirigée vers l'entrée de la Bibliothèque. Ses yeux chocolat se posèrent sur lui une seconde, mais il n'y avait aucune expression dedans, ni de la colère, ni de la pitié. C'était comme s'il était un pilier de la pièce, comme s'il n'existait plus. Elle retourna la tête vers Théo et lui fit un sourire qui serra le cœur de Drago dans sa poitrine, bien plus que n'importe quel Vif d'Or dans la main de Potter, ou que n'importe quel coup dans le nez.

Quand Drago fit un pas en avant, sa jambe était raide et lourde, mais il fit comme s'il ne sentait rien et s'approcha de la table sous la fenêtre. Il fut tenté de les interrompre, juste pour leur rappeler qu'il existait, mais n'ayant aucune idée de quoi leur dire, il alla plutôt s'installer à la table la plus proche d'eux bruyamment. Il avait pensé que si Théo le voyait, il sursauterait et s'échapperait le plus loin possible de Granger, mais il ne remarqua même pas la présence de Drago derrière lui et continua de discuter gaiement avec elle.

Drago sortit ses affaires sans avoir la moindre intention de lire une seule ligne de cours et entendit Granger ouvrir le manuel et expliquer d'une voix douce, la même qu'elle prenait quand elle expliquait une notion compliquée à Londubat :

"C'est très simple, en fait. Professeure Vector a dit que pour les tableaux numériques basés sur la numérologie védique, il fallait calculer par colonne, et non pas par ligne. Donc, si tu prends ce diagramme là, il faut que tu alignes les numéros de la colonne au tableau, donc ici, tu as la lune, qui représente le 2, et l'étoile, qui représente le 5…"

"Mais si on suit cette logique, comment est-ce que le résultat peut-être si proche de la prédiction de fin ?" demanda Théo, et Drago pouvait deviner ses sourcils froncés par la concentration.

"Parce que tu alignes par colonne, comme ça !"

Elle griffonna quelque chose sur son parchemin et Théo posa plusieurs questions, auxquelles Granger répondit toujours de ce ton calme et doux, qui pourrait sans doute apaiser Drago s'il n'avait pas été aussi agité, et surtout, s'il avait dirigé à lui, et non pas à Théo.

Pendant une heure, Drago dû écouter le cours le plus ennuyeux d'Arithmancie qu'il n'avait jamais entendu. Pourtant, il était inconcevable pour lui de partir maintenant. Il était rassuré par la nature purement académique de l'échange entre les deux, mais il voulait être certain que ça en reste là. De temps en temps, quand ils levaient la tête au même moment, Drago croisait le regard de Granger, et même si elle le détournait précipitamment à chaque fois, ça ne l'empêcha pas de ressentir un petit soubresaut d'adrénaline, cette sensation addictive qu'il avait dès qu'elle le regardait.

Quand il faisait nuit noire dehors, et que Madame Pince se leva de son bureau pour fermer les fenêtres et demander aux élèves restants de regagner leurs Salles Communes, Théo remercia chaleureusement Granger pour son aide et l'invita à venir vers lui si elle avait des problèmes en Astronomie. Drago préférait sincèrement mourir plutôt que d'entendre Théo et Granger travailler sur la constellation de Drago.

Ils se levèrent en même temps en se souhaitant une bonne nuit, et Drago se hâta de remettre ses affaires en vrac dans son sac, puis patienta devant les grandes portes de la Bibliothèque en attendant que Théo sorte. Cela prit une minute entière, où Drago eut le temps de parcourir dix-sept fois l'espace entre les deux portes. Quand il arriva, il n'arrivait même pas à dissimuler son sourire satisfait.

"Oh, hey Drago." dit-il en le voyant. "Je t'avais pas vu, t'étais à la Bibliothèque ?"

"Ouais, je l'étais." grogna le blond. "J'ai eu tout le loisir de te voir discuter avec ta nouvelle amie."

À cet instant, Granger sortit à son tour. Elle fit un petit geste de la main cordial à Théo puis s'en alla, en ignorant Drago qui dû se retenir de ne pas se précipiter vers elle pour qu'elle lui reparle enfin.

"Calme-toi, Drago." dit Théo avec un petit soupir irrité. "Si tu veux t'énerver contre quelqu'un, énerve-toi contre moi. Hermione n'a rien fait."

Il tiqua en entendant son prénom de sa bouche et cessa de contempler le dos de Granger s'éloigner pour regarder son meilleur ami.

"Quoi ?"

"C'est moi qui suis allé la voir." confessa Théo, clairement mal à l'aise. "C'est moi qui lui ai demandé de l'aide en Arithmancie."

"Et qui lui a offert un livre." pointa Drago, sentant la colère bouillonnante remonter le long de sa gorge, menaçant de cracher des mots qu'il ne voulait pas dire.

"Ouais, aussi." admit Théo, surpris qu'il ait remarqué ce détail. "Je voulais la remercier de m'avoir aidé, et elle a accepté de mettre de côté cette compétition entre nous deux pour allier nos forces pour réviser les BUSES. Pas de quoi te mettre dans tous tes états."

"Non, elle…" commença Drago en pointant un doigt accusateur vers l'endroit où Granger venait de disparaître.

"Elle n'a rien fait." coupa Théo. "C'est moi. Ne t'en prends pas à elle. D'ailleurs, je suis sûr que si tu apprenais à la connaître, vous pourriez bien vous entendre." ajouta-t-il avec un semblant de sagesse, comme s'il essayait d'imiter Blaise, sans succès.

En entendant cette phrase, la colère stagna. Théo n'avait aucune idée de leur passif, de leur lien. Il ne savait pas que Granger était tout aussi impliquée que lui dans cette animosité, qu'elle l'avait utilisé pour le rendre jaloux, et que ça avait marché. Il détestait ça. Il détestait qu'elle puisse avoir le dessus, qu'elle le manipule de la sorte. Maudite Granger et sa Serpentardise.

Il tourna la tête férocement vers Théo :

"Tu es amoureux d'elle ?"

Théo secoua la tête comme s'il venait d'entendre quelque chose de particulièrement stupide.

"Tu as bu l'hydromel de Blaise avant de venir ?" demanda-t-il sarcastiquement.

Mais Drago ne riait pas du tout.

"Réponds à la question." ordonna-t-il entre ses dents.

Théo leva les yeux au ciel :

"Non, espèce d'idiot. Je la connais à peine."

Drago pouvait voir la sincérité dans son regard, mais comment le croire réellement ? Comment savoir s'il disait la vérité, après avoir montré tant de fois qu'il pouvait mentir sans éprouver le moindre remord ?

Théo eut un rire moqueur :

"Pourquoi, tu as peur que ma lignée pure sang de Nott soit tâchée par un bâtard ?"

Drago grimaça et Théo le prit comme du dégoût pour son sang, sans savoir qu'il était lui-même éperdument amoureux de Granger, et qu'il était en fait terrifié que Théo puisse l'être aussi.

Ce dernier posa une main fraternelle sur son épaule et le guida gentiment vers les escaliers :

"Allez, viens, je crois que t'as besoin de repos. T'as vraiment pas l'air bien."

Et Drago se laissa faire, réconforté par le garçon qu'il avait haï toute la soirée.

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Hermione


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Avoir Théo à sa table de révisions n'était définitivement pas aussi bien qu'avoir Drago, mais c'était tout de même un bon remplacement. Théo était intelligent, cultivé et drôle, tout comme Drago. Elle ne voyait pas le temps passer avec lui, comme avec Drago. Elle avait l'impression de partager des connaissances avec un égal, quelqu'un à qui elle pouvait parler de tout sans avoir peur qu'il ne comprenne pas son raisonnement, comme avec Drago. Son esprit était aussi vif que le sien, et leurs discussions toujours fluides et pertinentes, comme avec Drago.

Mais il manquait quelque chose de crucial avec Théo : ce n'était pas Drago.

Hermione n'avait jamais voulu remplacer l'un avec l'autre, elle ne ressentait rien pour Théodore d'autre que de l'amitié. Mais réviser avec lui avait ses avantages, comme le fait qu'elle pensait moins au garçon quelques tables plus loin, ou qu'elle avançait dans son travail bien plus vite qu'avant, ou qu'elle avait quelqu'un à qui parler autre qu'Harry ou Ron. Mais ça avait aussi ses inconvénients : le rappel douloureux de moments qu'elle avait partagé avec Drago dans ce même endroit, notamment. Parfois, Théo dirait une phrase, et ça rappelait un souvenir chez Hermione qui lui coupait le souffle. Elle en voulait un peu à Théo de lui ressembler autant, et parfois, elle lui en voulait de ne pas lui ressembler assez. Ils avaient le même accent, les mêmes intonations sophistiquées, mais ce n'était pas pareil. Théo ne parlait pas comme Drago, il parlait comme Théo, et Hermione ne savait pas si elle adorait la différence ou détestait la ressemblance.

Théo vint à sa table tous les soirs de cette semaine, et à chaque fois, Drago s'asseyait une ou deux tables plus loin. Hermione savait qu'il écoutait. Elle aurait pu en profiter pour le rendre jaloux, pour flirter avec Théo sans vergogne juste pour qu'il s'énerve, ou qu'il la fusille du regard, mais elle n'en fit rien. Elle ne voulait pas détériorer une jolie amitié en devenir avec Théo juste pour un jeu aussi puéril. En plus, Drago n'avait pas l'air d'avoir besoin de ça pour être jaloux. La simple idée qu'ils partagent une table suffisait à le rendre fou, elle le voyait à la manière dont ses doigts accrochaient le rebord en bois à chaque fois qu'ils riaient, ou que sa nuque se contractait dès que leurs mains s'effleuraient quand ils prenaient un parchemin ou un livre.

Le jeudi soir, Drago ne vint pas. Il devait être à son cours d'Alchimie avec Rogue. Son absence piqua Hermione, même si elle essayait de ne pas montrer à quel point elle en était affectée. Théo prit place en face d'elle et lui montra ses dernières fiches de révisions d'Histoire de la Magie.

"Est-ce que tu en as fait pour la Défense Contre les Forces du Mal ?" demanda Hermione en voyant la quantité impressionnante de fiches de Théo pour les BUSES.

Son visage s'assombrit aussitôt :

"Non. À quoi bon ? On n'apprend strictement rien dans sa classe."

Hermione hocha la tête pour montrer qu'elle était du même avis.

"Je suis obligé de réviser avec les notes de l'année dernière, mais il nous manque tellement de matière !" s'écria Théo, soudain un peu paniqué. "Je n'arrive pas à bien lancer un Maléfice d'Entrave, mon Reducto manque clairement de practice, et cette satané Ombrage nous laissera jamais nous entraîner avant les examens, sans compter qu'elle a abrogé toute une partie du programme sur les sorts paralysants…"

Hermione eut soudain un peu de peine pour Théo : tous les sorts qu'il avait cité avaient été pratiqués pendant les réunions de l'AD par Harry. Sans ça, elle aurait été dans le même cas que lui, et probablement bien plus anxieuse à l'idée d'échouer ses BUSES à cause d'un manque d'enseignement.

"Pourquoi tu ne t'entraînes pas dans ta Salle Commune ?" proposa-t-elle gentiment.

"Blaise veut bien de temps en temps, mais il refuse de le faire trop de fois d'affilée à cause des courbatures du lendemain." expliqua Théo. "Et Pansy m'a menacé de me transformer en sac à main si j'osais lui jeter un Maléfice d'Entrave."

"Voudrais-tu t'entraîner sur moi ?" tenta Hermione.

Théo secoua la tête immédiatement :

"Non, je ne veux pas te blesser. Ou plutôt, je ne veux pas que tu me blesses." corrigea-t-il avec un petit rire. "Et en plus, je ne crois pas que Madame Pince serait contente qu'on se jette des sorts en plein milieu de la Bibliothèque."

"Tu trouveras bien un moyen de réviser, ne t'en fais pas." dit Hermione pour le rassurer, mais sans y croire réellement elle-même.

Il hocha la tête et retourna à ses fiches de révision, un pli soucieux entre ses deux sourcils cachés par ses boucles qui tombaient sur son front. Hermione se mordit la lèvre en voyant son inquiétude : elle regrettait d'avoir parlé de ça. Maintenant, Théo allait angoisser à cause d'elle.

Quand la Bibliothèque ferma, Drago attendait devant les portes. C'était une nouvelle habitude qu'il avait prise depuis le début de semaine, et Hermione était persuadée que c'était uniquement pour vérifier qu'ils ne rentraient pas ensemble. D'habitude, elle levait les yeux au ciel, ou l'ignorait en saluant Théo, mais cette fois-ci, quelque chose retint son attention. Drago n'était pas dans son état normal.

D'habitude, il avait toujours cette manière de se tenir, presque noble, même quand il était adossé nonchalamment contre un mur. Il avait toujours cette… prestance, qui n'appartenait qu'à lui. Toujours la tête haute, les épaules carrées, le corps droit et élancé. Ce soir-là, il n'y avait aucune trace de cette posture aristocratique. Il était à moitié courbé, appuyé contre le rebord d'une fenêtre plutôt qu'adossé, comme s'il risquait de tomber s'il ne s'accrochait pas à quelque chose. Ses mains tremblaient, son teint était cireux, creusé, comme s'il était malade, et sa respiration haletante.

Théo devait l'avoir remarqué aussi, parce qu'il s'approcha rapidement de son meilleur ami en s'écriant :

"Drago, Merlin, qu'est-ce qui t'arrive ?"

Hermione oublia un instant qu'elle était censée ignorer Drago, elle resta plantée là, à attendre une réponse. Ses doigts eurent un spasme, avides de s'emparer de sa baguette pour lui porter secours.

"Rien." cracha Drago, puis il grimaça, comme si le simple fait de parler lui faisait mal. "T'es prêt, on rentre ?"

"Mais tu tiens à peine debout !" contesta Théo en montrant sa main agrippée sur le rebord. "Qu'est-ce qui te prend ?"

Drago essaya de se redresser, mais le mouvement lui arracha un râle de douleur.

"Je vais très bien." répliqua-t-il froidement, en fixant Théo dans les yeux en lui disant. "Tu es prêt, ou tu veux souhaiter une bonne nuit à ta meilleure copine ?"

Hermione plissa les lèvres en entendant l'appellation, mais Théo ne se vexa pas. En fait, c'était comme s'il n'avait pas entendu. Pendant une minute entière, les deux garçons se fixèrent silencieusement, et Hermione se demanda s'ils n'avaient pas appris à communiquer par télépathie tant leurs regards étaient chargés de sens. Elle se sentait extérieure à une conversation qui n'avait même pas lieu.

Puis, soudain, les yeux de Théo s'illuminèrent, comme s'il venait de comprendre quelque chose, et ses traits s'affaissèrent :

"Oh, putain, Drago… Je…"

Il termina sa phrase bizarrement et tourna la tête vers Hermione, se rappelant soudain de sa présence. Drago laissa passer un gémissement plein de souffrance entre ses lèvres et Hermione plongea sa main dans sa cape pour saisir sa baguette.

"Et bien… Bonne nuit, Hermione." dit Théo, l'air soudain pressé qu'elle s'en aille.

Manifestement, il venait de comprendre quelque chose sur l'état de Drago qui ne la concernait pas. Ou pire, qu'elle ne comprenait pas, et Hermione Granger détestait ne pas comprendre quelque chose. Surtout quand ça concernait quelqu'un qu'elle aimait.

Avant même de juger le poids de ses paroles, elle demanda à l'adresse de Drago :

"Tu as besoin d'aide ?"

Théo fit les gros yeux, choqué de les voir s'adresser l'un à l'autre sans s'insulter, mais ceux de Drago s'adoucirent. Bleu océan. Il passa son regard sur elle, dans un éclair de rapidité, à peine le temps de s'accrocher, de plonger dans l'océan, avant qu'il ne secoue la tête :

"Non."

"Tu es sûr ? Tu as l'air… Épuisé." constata-t-elle en analysant ses jambes qui peinaient à supporter son poids.

"Il va bien." dit Théo, et sans savoir comment, Hermione savait qu'il mentait. "C'est juste… le Quidditch. Viens, je vais t'aider."

Théo prit l'un des bras du garçon pour le poser sur sa nuque, et pour la première fois de sa vie, Drago ne se plaignit pas : au contraire, il s'affaissa pratiquement sur son meilleur ami, visiblement assez endommagé pour ne pas pouvoir rester debout trop longtemps. Il s'appuya sur Théo et ils commencèrent à marcher lentement, chaque pas tirant une grimace de douleur à Drago.

"Tu pourrais la remercier." suggéra Théo tandis qu'ils passaient devant une Hermione dubitative. "Elle vient de te proposer de l'aider alors que tu es un gros con avec elle depuis des années."

Hermione vit presque un sourire sur le visage de Drago, avant qu'il ne soit effacé par l'effort :

"Ouais. Merci, Granger."

Quand il ne roulait pas exagérément le "R" avec sa langue ou quand son nom n'était pas accompagné d'un sourire en coin, il avait moins de saveur venant de sa bouche.

Hermione regarda les deux garçons tituber jusqu'à l'escalier, puis Théo aida Drago à descendre marche par marche. Il avait l'air sur le point de s'effondrer à chaque seconde.

Juste avant qu'ils ne disparaissent dans les cachots, Hermione crut entendre Théo lui demander :

"Pourquoi t'es venu me chercher si t'es dans cet état ?"

Hermione dût se pencher par-dessus la rambarde de l'escalier pour entendre la réponse de Drago :

"J'avais besoin de voir si… si tout allait bien."

Des bruits de pas, un juron, des chuchotements intelligibles, puis Drago et Théo atteignirent les cachots et Hermione n'entendit plus rien. La baguette toujours en main, elle analysa la situation étrange sans comprendre. Elle n'avait jamais vu Drago si épuisé.

Et elle ne savait pas pourquoi il était dans cet état, mais une chose était sûre : ce n'était définitivement pas un cours d'Alchimie auquel il avait assisté ce soir.

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Le lendemain, Drago ne se montra pas au petit-déjeuner. Ce n'était pas un comportement inhabituel, il séchait souvent les repas, mais cette fois-ci, son absence inquiéta davantage Hermione. Elle savait que ça avait un lien avec son apparence de la veille, mais elle ne comprenait toujours pas à quoi c'était dû. Zabini, Parkinson et Théo étaient assis, et le fait que la place de Drago était vide ne semblait pas les inquiéter plus que ça. Parkinson mangeait ses toasts au miel, Zabini était caché derrière la Gazette, et Théo lisait son roman avec avidité.

Quelque chose dans la poche d'Hermione brûla alors contre sa cuisse et elle retira discrètement la pièce pour consulter la date de la nouvelle réunion de l'AD : demain, à 20h.

"Pré-Au-Lard demain." chantonna Ginny en s'asseyant à table. "Qui veut venir ?"

"Pas moi." grommela Ron avec mauvaise humeur, à la droite d'Hermione. "J'ai tellement de devoirs à faire que je risque de me noyer littéralement dedans."

"Pareil." dit Harry, qui mangeait ses œufs à gauche d'Hermione.

"Vous vous souvenez de notre offre de la rentrée, pas vrai ?" intervint George, un peu plus loin sur la table, un grand sourire commercial aux lèvres.

"Et risquer de se faire hurler dessus par la préfète ?" demanda Ron sarcastiquement, en pointant Hermione de la tête pas très subtilement. "Non merci."

"Je fais ça pour ton bien, je te signale." répliqua sèchement Hermione. "Je veux simplement que vous réussissiez sans l'aide de gadgets inutiles."

"Ouch !" s'indigna Fred.

"La réunion de l'AD est prévue pour demain soir." chuchota Harry, de sorte à ce que seulement les Gryffondors les plus proches de lui puissent l'entendre. "Ça sera notre pause bien méritée."

Ginny hocha la tête, et Hermione réalisa à quel point elle était devenue douée pour cacher sa déception.

"Moi, je viendrai demain." dit Hermione à l'adresse de sa meilleure amie. "J'ai terminé mes devoirs pour la semaine prochaine…"

"... prévisible…" marmonna George.

"... Et je veux acheter des chocolats pour mon père. Il adore ceux d'Honeydukes." termina-elle en lançant un regard peu amène au jumeau.

"Tu ne restes pas avec nous pour Noël, cette année ?" demanda Ron avec une pointe de chagrin qui réchauffa le cœur d'Hermione.

"Non, je retourne à Londres. En fait, je vais dans les Alpes cette année."

"Aux Alpes ? Pourquoi faire ?" demanda Fred.

"Pour faire du ski." expliqua Hermione. "J'y allais tous les ans avant, mais avec Poudlard, la tradition s'est un peu arrêtée. Mes parents en raffolent, alors j'y retourne avec eux cette année."

"Qu'est-ce que c'est que ça, le squi ?" demanda Ron.

Harry et Hermione échangèrent un regard.

"Ah non, c'est toi qui explique." dit-il aussitôt, en reprenant sa fourchette pour continuer de manger.

"Bon, et bien…" commença Hermione. "Le ski est un sport de montagne. C'est… comment dire… pour descendre le flanc d'une montagne, euh, recouvert de neige…"

Hermione fit des gestes avec ses mains mais les Weasley la regardaient avec quatre airs d'incompréhension sur leurs visages constellés de tâches de rousseur.

"Les Moldus s'attachent des sortes de planches en bois aux pieds, et…"

"Je te demande pardon ?" interrompit Fred, soudain horrifié. "Ils font quoi ?"

"Ils s'accrochent des planches de bois à leurs bottes pour pouvoir glisser sur la neige."

"Mais pourquoi ?"

"Pour descendre plus ou moins vite." dit Hermione, pas trop sûre de la manière d'expliquer un tel concept à des sorciers. "Après, ils remontent sur des grandes tiges automatisées pour retourner au sommet, et ils redescendent, encore et encore."

Un long silence accompagna cette fin d'explication.

"Et… Toi, tu vas faire ça ?" demanda Ron, ahuri.

"Oui, avec mes parents. C'est eux qui m'ont appris à en faire."

Ron éclata de rire tandis que Fred et George la contemplaient comme si elle venait de leur avouer qu'elle était amoureuse de Severus Rogue.

"Mais c'est génial !" dit Hermione, qui se sentait obligée de défendre le sport parce qu'il était moldu, alors qu'elle n'en était secrètement pas une grande adepte. "C'est très sportif, surtout quand on va vite !"

Étrangement, cela fit redoubler le fou rire de Ron.

"Prends ta caméra." conseilla George. "Je veux absolument voir ça à ton retour."

"Moi aussi." dit Ginny, qui oscillait entre la réaction de Ron et des jumeaux. "Donc, nous quatre pour Pré-Au-Lard demain ? On se retrouve après le petit-déjeuner ?"

"Parfait pour nous." dit Fred, qui fit semblant de consulter un planning imaginaire. "On comptait justement reprendre des feux d'artifice chez Zonko. Pas de quoi t'inquiéter, Mione…" ajouta-t-il prestement.

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Drago réapparut qu'au cours de Potions, qui était partagé avec les Gryffondors. Quand il entra dans la salle de classe, Hermione eut l'impression qu'il boitait toujours, mais quand elle regarda sa démarche de plus près, il ne laissa rien paraître. Elle le suspectait de le camoufler pour ne pas que les autres remarquent.

"Ça va, Drago ?" demanda la petite voix de Parkinson empreinte d'inquiétude, qui hérissa les poils d'Hermione le long de ses bras.

"Ça va." répondit-il simplement.

Hermione le chercha du regard, avant de se souvenir de ce qu'il avait fait, et retourna à la contemplation de son chaudron vide. Elle nota la recette que Rogue inscrivit au tableau et se mit au travail. Ron et Harry perdirent très vite leur attention et firent semblant de feuilleter le manuel en la laissant faire tout le travail.

Et entre deux ingrédients, les yeux d'Hermione retournèrent vite vers Drago. Qu'est-ce qu'il l'avait mis dans cet état ? Elle doutait que ça soit le Quidditch. Même après ses entraînements les plus intenses, il n'avait jamais été aussi harassé. Elle ne connaissait pas grand-chose en Alchimie, mais elle savait que ce n'était pas une activité particulièrement physique. Peut-être qu'il était simplement malade ? Mais pourquoi avait-il l'air blessé ? Peut-être s'était-il battu ?

"Il vous reste trente minute." annonça la voix grave du professeur vers le fond de la classe.

À vrai dire, Drago avait toujours l'air mal en point les vendredis matins. Peut-être que les cours d'Alchimie lui demandaient des efforts particuliers, qui l'affaiblissaient… Ou peut-être que Rogue l'entraînait aussi aux duels, une perspective bizarre mais pas tout à fait improbable… Peut-être qu'il lui avait proposé de remplacer Ombrage, de l'entraîner à la défense pour ne pas qu'il rate ses examens ? Mais alors dans ce cas-là, pourquoi ne pas ajouter Théo aussi, qui en avait grandement besoin ?

Hermione analysa les mains de Drago qui versaient les ingrédients dans son chaudron dans des gestes experts. Elles ne tressaillaient plus. Pourtant, la veille, elle avait été persuadée de les voir trembler… Peut-être qu'il avait trop usé de magie, jusqu'au surmenage…?

"Miss Granger, votre potion n'est pas censée être aussi violette." lança Rogue, qui s'était rapproché de son pupitre sans qu'elle ne le remarque. "Concentrez-vous !"

Hermione retourna brusquement la tête vers son chaudron et cessa de mélanger, les joues brûlantes de honte. Harry baissa le feu et s'excusa auprès du professeur à sa place.

Quand elle osa relever la tête de nouveau, Rogue s'était remis à son bureau, et Drago la fixait.

Et Hermione aurait pu jurer voir un sourire sur ses lèvres.

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"Quel est ton petit-déjeuner préféré ?" demanda Harry, en prenant place face à Hermione le lendemain matin.

Elle le regarda d'un drôle d'air.

"Une question par jour, tu te souviens ?" dit-il en se servant une assiette. "Tu connais le mien, mais je ne connais pas le tien."

"Le tien est facile, tu manges des oeufs sur des toasts tous les jours depuis le lendemain de la rentrée de première année." remarqua Hermione.

"De quoi vous parlez ?" demanda Ron, en s'asseyant à côté d'Harry.

"J'essaye d'en apprendre un peu plus sur Hermione en lui posant des questions sur elle tous les jours." expliqua Harry. "Hier, je lui ai demandé quel était son sport préféré, et elle m'a répondu le ski…"

Ron s'esclaffa à ce souvenir et Hermione le fusilla du regard.

"... Et aujourd'hui, je lui demande quel est son petit-déjeuner préféré."

"Facile." dit Ron avec un haussement d'épaules désintéressé. "L'omelette."

Ce fut au tour de Ginny de rire. Ron la regarda bizarrement.

"Euh, non, pas vraiment." dit Hermione avec un rire gêné. "C'est le porridge à la cannelle."

Harry hocha la tête avec un sourire, notant cette information quelque part dans sa tête. Ron, lui, sembla irrité par cette réponse :

"N'importe quoi, t'en manges jamais."

"Elle en mange tous les matins, espèce de crétin." intervint Ginny. "Tu ne vois jamais rien."

"Pourtant je vois bien l'énorme bouton sur ton nez aujourd'hui." dit Ron d'un ton moqueur.

Il n'eut pas le temps d'esquiver le sort que lui lança sa sœur. Son nez tripla de volume, et il poussa un hurlement paniqué.

"Miss Weasley !" s'écria McGonagall en descendant de l'estrade à toute vitesse. "Pour l'amour du Ciel, qu'est-ce que vous faites ?!"

"Je m'entraîne au sortilège de Gonflement, Professeure." dit Ginny d'une voix toute innocente.

"Il est interdit de lancer des sortilèges au visage de ses camarades, Miss Weasley, même s'ils font partie de la même fratrie !" cria la directrice de Maison, affolée.

Elle fit tournoyer sa baguette en direction du visage de Ron et son nez se dégonfla comme un ballon, reprenant sa forme normale. Il était devenu tout pâle.

"Je retire cinq points à Gryffondor." annonça sèchement McGonagall. "Je ne tolère pas ce genre de comportement dans ma Maison. J'aurais pu imaginer une telle attitude de la part de vos deux frères aînés, mais certainement pas d'une fille aussi raisonnable que vous, Miss Weasley."

"Hé !" s'indignèrent Fred et George d'une même voix. "On est juste là !"

"Je le sais bien." dit McGonagall en les jaugeant d'un œil sévère par-dessus ses lunettes.

Puis, elle s'éloigna. Quelques rubis tombèrent dans le sablier, et Ginny se rassit sur le banc avec colère.

"Je vais le dire à Maman." prévint Ron en se tenant dramatiquement le nez comme s'il pouvait tomber à tout instant.

"Ose." dit Ginny, d'une voix tremblante de menace qui sembla effrayer son frère autant qu'Harry à côté d'Hermione.

"Donc… Le porridge à la cannelle, c'est ça ?" dit-il, pour changer de sujet.

Hermione aperçut George faire un high-five à sa sœur en cachette.

"Oui, c'est ça. Le porridge à la cannelle." répéta Hermione avec un sourire.

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Hermione était en train d'écouter l'explication de George sur les options que proposait sa caméra "de luxe" quand Harry et Ron s'excusèrent pour aller travailler, l'air plus malheureux que jamais. Hermione les regarda partir vers les portes de la Grande Salle, en essayant de contrôler sa tête pour ne pas qu'elle se tourne vers la table des Serpentards, et d'un en particulier. Elle pouvait sentir son regard sur elle et ça lui donnait chaud.

"T'as vu ça, Mione ? C'est pour régler la rapidité de mouvement de la photo." dit George en tournant un bouton, l'air plus surexcité que jamais. "Et ça, c'est pour la distance plus ou moins importante du sujet, donc par exemple, si je prends ce sapin de Noël en photo, je réglerais à cinq…"

"Tu sais quoi George ?" dit Hermione, amusée de le voir aussi passionné par la caméra. "Tu n'as qu'à la prendre pour aujourd'hui. Fais des belles photos de Pré-Au-Lard et je les enverrai à mes parents dans ma prochaine lettre."

Les yeux de George étincelèrent d'anticipation. Il avait déjà passé le cordon autour de son cou quand il demanda :

"Tu es sûre, je peux ?"

Hermione approuva d'un signe de tête et George lui fit un bisou spontané sur le front pour la remercier. Il s'entraîna à faire quelques clichés des décorations de la Grande Salle, et même une photo discrète d'Ombrage en train de manger ses haricots.

Hermione vit alors Michael Corner se lever de la table des Serdaigles et se diriger timidement vers Ginny.

"Euh… Tu es prête, Gin' ?" demanda-t-il doucement en arrivant à sa hauteur.

"J'ai presque fini." dit la rouquine avec un sourire. "Tu peux t'asseoir là en attendant, si tu veux. Fred, George et Hermione viennent avec nous."

Hermione remarqua distinctement la pomme d'Adam de Michael remonter péniblement en entendant cette information.

"Ah, euh… Je croyais que…" dit-il, clairement embarrassé.

"Ginny a raison, assieds-toi là." dit Fred avec un grand sourire, en tapotant la place vide à côté de lui, d'une voix presque menaçante.

"Nous avions justement quelques questions à te poser…" dit George, qui avait lâché la caméra pour analyser le petit ami de sa sœur avec un sourire qui n'augurait rien de bon.

Michael déglutit de nouveau et obéit, non sans lancer un regard implorant en direction des deux filles.

"Fred, George, ne soyez pas mauvais…" avertit Ginny.

"Relax, petite soeur, rien de bien méchant !" s'exclama Fred. "Nous voulions simplement vérifier que tu n'as pas choisi un psychopathe..."

"... Maman nous a demandé de surveiller tes fréquentations, et c'est une responsabilité que nous prenons très au sérieux…" dit George en posant ses coudes sur la table, sans quitter le pauvre Michael des yeux.

"La seule que vous prenez très au sérieux." corrigea Ginny d'un ton amer.

Les jumeaux l'ignorèrent et se penchèrent tous les deux vers le Serdaigle d'un mouvement coordonné.

"Alors… C'est toi, Michael ?" demanda Fred en scrutant le visage du garçon.

"Fred, tu le vois à chaque séance de l'AD depuis deux mois !" s'impatienta Ginny.

"Quelles sont tes intentions envers Ginevra ?" demanda George en arquant un sourcil.

"Euh… Et bien…" bredouilla Michael, clairement déboussolé. "Je… Je l'aime beaucoup. Je veux… sortir avec elle, j'imagine."

Il sembla se ratatiner de plus en plus à mesure que George le transperçait du regard.

"Mais vous sortez déjà ensemble." pointa Fred, d'un ton très factuel. "On veut savoir ce que tu prévois pour le futur."

"Oh, euh… je…"

"Pas l'air très vivace…" commenta George dans un murmure parfaitement audible.

"Quel métier voudrais-tu faire plus tard ?" continua Fred.

"Bon, arrêtez avec votre interrogatoire !" s'écria Ginny.

"Tu préfères que ça soit nous, ou Maman ?" demanda George, et Ginny se tut aussitôt.

"Euh… J'aimerais bien travailler avec les créatures magiques…" balbutia Michael du ton le plus convaincant possible.

"Garde-chasse, comme Hagrid ?" demanda Fred avec un visage si grave qu'il était pratiquement méconnaissable.

"Non, plutôt comme un Magizoologiste, je pense…"

"Tu aimes le Quidditch ?" demanda George, coupant court aux ambitions professionnelles du garçon.

Hermione leva les yeux au ciel en entendant une question aussi triviale. Michael, pour la première fois de la discussion, sembla retrouver un semblant d'énergie et se redressa :

"Et comment !" dit-il avec enthousiasme.

"Pour quelle équipe étais-tu, pendant la finale de la Coupe du Monde de Quidditch ?" demanda George, d'une voix si sérieuse qu'on aurait cru qu'il lui posait un dilemme de vie ou de mort.

La réponse de Michael fusa.

"L'Irlande, évidemment !"

Fred et George hochèrent la tête en même temps, puis déclarèrent d'une même voix :

"Ok, tu es officiellement accepté dans la famille."

Michael gonfla la poitrine de fierté mais Ginny lâcha un petit cri surpris :

"Pardon ? Et comment son équipe préférée peut-il vous aider à savoir si c'est un psychopathe ou non ?"

"Il supporte l'Irlande." répondit George, comme une évidence. "Il est forcément sain d'esprit."

"Tu viens avec nous à Pré-Au-Lard." asséna Fred à l'adresse du Serdaigle. "Tu aimes les farces et attrapes, Mich' ?"

Hermione et Ginny soupirèrent à l'unisson.

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Drago


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Drago était en train de regarder Granger manger son petit-déjeuner préféré, le porridge à la cannelle, quand Pansy s'assit en face de lui, l'air fatiguée mais les yeux brillants d'excitation.

"Quelle fête hier !" s'exclama-t-elle en prenant un toast qu'elle recouvrit d'une épaisse couche de miel. "J'ai rarement autant dansé, c'était génial !"

Plusieurs Serpentards approuvèrent, dont Blaise. Théo et Drago restèrent silencieux. Théo parce qu'il n'avait bien entendu pas assisté à la fête et avait préféré réviser ses BUSES, et Drago parce qu'il s'était endormi juste après le dîner.

Il ne s'était visiblement pas remis de la séance d'Occlumancie difficile du jeudi dernier. Même deux jours après, ses bras étaient encore endoloris, et il avait un mal de tête persistant qui tapait furieusement contre ses tempes. Rogue avait voulu forcer un peu pour l'encourager à se défendre, en cherchant dans des forces mentales que Drago n'avait plus. Il avait vite abandonné, mais le corps de Drago en avait pris un coup : il était épuisé.

Il prit une gorgée de café noir et grimaça dans sa tasse quand le mouvement lui fit mal.

Pansy et Blaise discutèrent des moments majeurs de la soirée dans des chuchotements surexcités, et Drago profita de leur inattention pour observer la table des Gryffondors. Granger parlait avec Potter et Weasley en face d'elle en sirotant un thé. Tout était normal, jusqu'à ce qu'une explosion retentisse soudainement dans la salle. Tous les yeux se tournèrent vers la source du bruit, y compris Blaise et Pansy qui s'interrompirent pour se retourner vers les Gryffondors.

Drago fut choqué de voir que la baguette concernée n'appartenait pas aux jumeaux Weasley, mais à Weaslette, qui avait lancé un sort sur son propre frère. Ce dernier poussa un hurlement terrifié en voyant son nez gonfler de plus en plus. Weaslette n'en éprouva aucun remord. Elle rangea sa baguette encore fumante dans sa poche et le défia du regard. Drago sourit malgré lui. Toute personne qui emmerdait Weasley montait dans son estime.

McGonagall bondit de son siège et se précipita sur eux.

"Miss Weasley !" hurla-t-elle, les yeux écarquillés derrière ses lunettes. "Pour l'amour du Ciel, qu'est-ce que vous faites ?!"

Pansy leva les yeux au ciel et Blaise eut un petit rire, puis ils reprirent leurs conversations. Drago regarda Granger, qui n'avait pas l'air si surprise par cette dispute familiale. Ça devait souvent arriver. McGonagall retourna vers l'estrade des professeurs et plusieurs rubis tombèrent du sablier des Gryffondors, mais aucun d'entre eux n'avaient l'air particulièrement peinés.

Pour la première fois de sa vie, Drago ressentit un émerveillement à l'égard d'un Weasley. D'une Weaslette, plus précisément. Elle ne regarda même pas son frère et fit un high-five à l'un des jumeaux. Badass.

Weasley continua de se toucher le nez tout le long du repas, et Drago dû se retenir de rire en voyant à quel point il était pathétique.

Le temps que Drago termine son café, il sentait déjà le sommeil picoter ses yeux de nouveau. Ses membres étaient courbaturés, faibles, comme si le simple fait de soulever la tasse représentait un effort physique colossal. Drago jeta un regard noir à Rogue, mais ce dernier était plongé dans une revue de Potions et ne fit pas attention à lui.

Granger sortit alors quelque chose de son sac, et le cœur de Drago fit un bond dans sa poitrine quand il réalisa que c'était sa caméra. La caméra. Celle qu'il lui avait offert, le jour de son anniversaire. Si elle l'utilisait toujours, c'était qu'elle ne le détestait pas tant que ça, si ?

Il la regarda rêveusement en train de la montrer à l'un des jumeaux, soupesant l'idée d'aller se recoucher, quand la voix de Pansy le sortit de ses pensées :

"On va à Pré-Au-Lard, Blaise et moi. Tu veux venir, Drago ?"

Il fut sur le point de dire non, parce que l'idée de son oreiller frais et de sa couette chaude était beaucoup plus tentante que d'aller se cailler dans une rue qu'il connaissait par coeur, mais Granger se leva à cet instant en mettant son écharpe autour de son cou, et il répondit mécaniquement :

"Ouais, d'accord."

"Super, alors je vais dire à Daphné que…" commença Pansy en se levant elle aussi.

"Moi aussi, je viens." coupa Théo en terminant son lait d'une traite.

Les trois Serpentards le regardèrent d'un air perplexe. Même Crabbe et Goyle avaient levé les yeux de leurs assiettes pour le jauger.

"Quoi ?" demanda le garçon en voyant tous les regards sur lui.

"Théo, lève la tête." conseilla Blaise, railleur. "Regarde le ciel. Souviens-toi quel mois on est."

Théo leva les yeux au ciel, et Drago y vit le reflet des flocons de neige du plafond magique dedans.

"Je ne suis pas si frileux que ça." contesta-t-il, recevant trois rires de Blaise, Pansy et Drago. "Sérieusement ! Et je veux absolument vous acheter des cadeaux cette année. J'ai fait des économies à cause de ces deux abrutis…" (il désigna Crabbe et Goyle de la main comme s'ils n'étaient pas assis juste en face de lui) "et je veux vous rendre un peu la pareille, ce Noël."

"Théo, c'est très gentil, mais ce n'est pas vraiment la peine de…" commença Blaise.

"Et je dois acheter trois nouvelles plumes…" continua Théo.

"Encore ?!" s'exclama Pansy. "Mais tu m'en as déjà demandé deux la semaine dernière !"

"Elles n'arrêtent pas de se casser…" dit Théo.

"Si tu arrêtais d'écrire comme si t'étais poursuivi par un troupeau d'éléphants à chaque fois…" marmonna Pansy.

"Tu n'as qu'à prendre une des miennes." suggéra Drago en haussant les épaules, mais le geste lui arracha une grimace de douleur.

"Certainement pas." dit Théo fermement. "Tes plumes de paon valent plus que mes maigres économies. Si je la casse, je serai endetté sur trois ans."

Drago fut sur le point de contester, mais Blaise se leva avec un sourire.

"T'es qu'un menteur. On sait tous que tu veux juste aller t'acheter des chocolats."

Théo eut un sourire penaud, et Drago espéra sincèrement que c'était la véritable raison, et non pas un date prévu avec Granger.

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Le temps qu'ils atteignent la file d'attente pour les calèches, Théo eut le temps de se plaindre du froid quatre fois.

"Personne ne t'oblige à venir, si tu as si froid que ça !" dit Blaise en soufflant dans la paume de ses mains.

"Je ne voulais pas rester tout seul dans le Château, c'est déprimant sans vous !" se plaignit Théo en dansant d'un pied sur l'autre, un bonnet vissé sur sa tête et deux écharpes autour de son cou.

"Ce n'est pas comme si tu nous parlais, tu passes ton temps à réviser tes BUSES ces temps-ci." répliqua Pansy d'un ton acerbe.

Eris jappa, comme pour montrer qu'il était d'accord avec sa maîtresse. Cette dernière avait vêtu la pauvre bête d'un pull-over vert, d'un manteau assorti, d'un bonnet qui faisait dépasser ses oreilles, et de petits chaussons pour ne pas que ses pattes touchent la neige. Il était encore plus affublé que Théo.

Pansy avait arrêté de recouvrir Eris de la petite cape d'invisibilité bon marché de Blaise depuis un bout de temps. Personne n'avait jamais fait de remarque sur la présence d'un chien dans la Salle Commune, ni même dans les couloirs du Château. Tout le monde pensait que c'était un chat très poilu. Cela convenait parfaitement à Pansy, qui pouvait pavaner son chien partout où elle allait, de la cour de Métamorphose le matin aux repas dans la Grande Salle le soir. Eris se laissait faire, se roulant en boule sur ses genoux dès qu'elle lui demandait. Drago avait toujours du mal à le considérer comme un chien à proprement parler, mais même lui devait admettre qu'il était très obéissant.

Et… mignon, parfois.

"Merlin, encore ces trucs !" hurla soudain Théo, faisant sursauter les autres.

"Putain, tu m'as fait peur !" cria Blaise de surprise. "De quoi tu parles ?!"

Pour toute réponse, Théo pointa l'espace vide devant la calèche, le teint blême. Son doigt tremblait.

"Quoi, la calèche ?" demanda Pansy en regardant l'endroit en question.

"Non… Il y a un Sombral, juste là." chuchota Théo, la voix tremblotante.

Drago fit un bond en arrière par réflexe.

"Oh…" dit Blaise, en plissant les yeux, comme si ça pouvait l'aider à voir la créature dont Théo parlait. "C'est un Sombral qui tire la calèche ?"

"Oui." répondit-il. "Je les vois à chaque fois, mais je pensais que tout le monde les voyait aussi… C'est pas comme si Poudlard ne regorgeait pas d'animaux flippants. Maintenant que je sais ce que c'est, par contre…"

Il frissonna sous son manteau et Drago ne put le blâmer : il avait la chair de poule, lui aussi, bien qu'il n'avait aucune idée d'à quoi pouvait ressembler un Sombral.

Théo resta planté là quelques secondes, transfixé par la vision que personne d'autre ne partageait. Eris grogna dans les bras de Pansy, sentant probablement la présence de la créature sombre à quelques centimètres de lui, et Pansy le serra mécaniquement contre elle :

"Rentrons."

Elle ouvrit la porte de la calèche et entra à l'intérieur. Tout le monde la suivit sans dire un mot. Pendant le trajet, Théo resta distant, ne prenant pas part à la conversation, préférant fixer la fenêtre de devant d'un œil vitreux.

Drago avait été tellement secoué par la réaction de Théo en voyant le Sombral qu'il en avait oublié la raison de sa présence à Pré-Au-Lard. Elle lui revint dès qu'il posa un pied par terre. Elle était au milieu de la rue pavée du village, en train de montrer quelque chose dans une vitrine à Weaslette et les jumeaux, un grand sourire animant son visage. Ça faisait tellement longtemps qu'il ne l'avait pas vue aussi heureuse que Drago resta là à l'observer, un demi sourire absent aux lèvres.

"Hé, bouge de là !" s'écria Blaise quand il vit Drago immobile devant la porte de la calèche.

Drago s'excusa et fit un pas sur le côté pour laisser passer son meilleur ami. Granger continua d'avancer sur la rue, plus étincelante encore que la neige à ses pieds ou le soleil sur ses joues.

Pansy sauta de la calèche, terminant la marche, et Théo regarda encore quelques secondes le Sombral s'éloigner avant de revenir à ses pensées.

"J'ai froid." dit-il en grelottant.

Et là-dessus, tout le monde sut qu'il allait mieux.

Les Serpentards commencèrent leur tournée des magasins par Honeydukes, pour remonter le moral de Théo. Une belle coïncidence pour Drago, parce que ce fut aussi le premier magasin de Granger. Il la repéra dès qu'ils entrèrent. Elle était au rayon des chocolats, en train de comparer deux boîtes énormes remplies de petits carrés qui fondaient dans la bouche. Ses cheveux dépassaient de son bonnet, et malgré sa maigre tentative de les coincer sous son écharpe, quelques mèches s'en échappaient encore. Ses joues étaient rosées à cause du froid, et Drago la trouva encore plus mignonne que d'habitude, si c'était possible.

Théo se précipita vers le rayon des chocolats et Drago lui emboîta le pas aussitôt.

"Hey Hermione !" salua Théo avec un grand sourire placardé sur son visage bleuté.

"Oh, hey Théo." répondit-elle chaleureusement.

Drago ne manqua pas la manière dont elle chercha autour de lui. Dès qu'elle croisa le regard de Drago, elle fit semblant de regarder de nouveau ses boîtes.

"Tu fais ton shopping de Noël ?" demanda Théo, et Drago trouva cette question stupide. Ça avait l'air évident.

Mais Granger, toujours aussi gentille, acquiesça avec un sourire.

"Oui. Cette boîte est pour Ron, tu sais, le garçon avec qui je suis tout le temps ?" demanda-t-elle, en insistant bien sur le prénom pour que Drago l'entende parfaitement.

Il grinça des dents en faisant semblant de regarder les boîtes de dragées un peu plus loin. Théo fronça les sourcils. Les mèches qui dépassaient de son bonnet étaient recouvertes de particules de neige.

"Euh, oui, je vois très bien… Ron Weasley." dit-il lentement.

"Oui, hum, c'est ça." dit Granger, se souvenant soudain de son interlocuteur principal. "Et cette boîte-là est pour mon papa. Il adore les chocolats d'Honeydukes, mais je n'arrive pas à voir si c'est celle qui ne contient pas de sucres…"

"Pourquoi ?" demanda Théo, étonné. "C'est justement ça qui est bon, le sucre."

Drago devina la réponse de Granger avant même qu'elle n'ouvre la bouche.

"Oh, parce qu'il est dentiste." expliqua-t-elle. "C'est le médecin moldu qui s'occupe des dents, et le sucre est un peu son ennemi juré."

Les yeux bleus de Théo s'agrandirent d'extase :

"Dentiste, vraiment ? Oh, mais c'est passionnant ! J'ai lu quelque part qu'ils pouvaient redresser les dents sans magie, comment ça se passe ? Ça doit faire mal, non ?"

Granger expliqua calmement la fonction d'un "appareil dentaire", que Drago n'entendit qu'à moitié, sa voix camouflée par le brouhaha du magasin. Il se rapprocha d'eux en prétextant être très intéressé par un flacon de caramels salés qui se trouvait par hasard à côté du coude de Théo.

"Et combien de temps on doit le garder ?" demanda Théo, profondément intéressé par la tournure de la conversation.

"Oh, ça dépend de la dentition de chacun." dit Granger. "Mon ami Danny a dû le garder presque un an…"

Drago ne put s'empêcher de lever les yeux au ciel. Si en plus elle allait parler du Poufsouffle

"Mione ?" appela Weaslette depuis la caisse. "Tu viens ?"

"Oui, j'arrive !" lança Granger à son amie. "Désolée, je dois filer. On a plein de courses à faire… À tout à l'heure, Théo !"

Elle se fraya un chemin parmi les clients, les deux boîtes de chocolat serrées contre sa poitrine.

"À tout à l'heure !" répondit Théo en lui faisant un geste amical de la main pour la saluer.

"Pourquoi "à tout à l'heure" ?" demanda Drago, en même temps que Pansy qui s'était approchée derrière eux sans qu'ils ne la remarquent.

"Oh, euh…" bredouilla Théo, le bleu de son visage remplacé par du rouge sur ses joues et son nez. "Elle m'a proposé d'acheter… euh, une plume, avec elle, tout à l'heure."

Pansy écarquilla les yeux.

Drago serra trop fort le flacon de caramels, et il explosa dans sa main.

"Quoi ?!" dit Pansy, insensible à ce que Drago venait de faire au flacon. "Mais… Tu… Quoi ?"

"Je te l'ai dit, Pans', on est juste amis !" dit Théo avec un soupir. "Drago, qu'est-ce que t'as foutu ?!"

"Rien." grommela-t-il, en essuyant grossièrement ses mains ensanglantées sur sa cape d'hiver. "Je l'ai trop… agité."

"Depuis quand es-tu passée d'être ami avec elle à acheter une plume avec elle ?" continua Pansy d'une voix stridente.

"Ce n'est pas un si grand écart que ça." pointa Théo. "C'est juste une plume. Je lui ai dit que la mienne s'était cassée et elle m'a proposé de me montrer les meilleures du magasin."

"Mais…" s'insurgea Pansy, scandalisée. "J'aurais pu t'aider à choisir, moi !"

"Pansy, tu n'as pas acheté de plume depuis 1991." fit remarquer Théo d'un ton sarcastique.

Drago avait tellement contracté la mâchoire que ses dents lui faisaient mal. Une ironie, pensa-t-il, quand les parents de la fille qu'il aimait soignait justement ça.

Théo se retourna pour prendre sept boîtes de chocolat, puis se mit sur la pointe des pieds pour essayer d'apercevoir quelque chose par-dessus la foule.

"Je vais chercher Blaise pour voir s'il peut me prendre mes chocolats…" marmonna-t-il avant de s'éloigner.

Pansy avait toujours la bouche grande ouverte de stupeur. Elle se tourna vers Drago et le fusilla du regard :

"Et tu es ok avec ça ?" demanda-t-elle impétueusement.

"Tu n'as pas vu ce que je viens de faire à ce flacon ?!" protesta Drago en montrant les bouts de verre qui jonchaient le sol.

Pansy soupira de protestation et prit sa baguette pour lui soigner la main.

"Je suis étonnée que tu ne sois pas en train de lui casser la gueule." dit Pansy après une seconde.

Elle posa le bout de sa baguette sur la paume ouverte de Drago et chuchota un sort qui éclaira sa peau. Eris, qu'elle tenait avec son autre bras, contempla la scène, la langue pendue.

"Je ne peux pas." soupira Drago. "Comment je pourrais faire ça ? C'est Théo."

"Je sais. Mais c'est… tu sais, Granger."

Drago n'aurait jamais pensé avoir cette conversation avec Pansy au milieu d'un Honeydukes bondé.

"Je suis furieux, mais je ne peux rien faire." expliqua-t-il à voix basse, plus à lui-même qu'à l'adresse de sa meilleure amie. "Avec Granger, c'est… compliqué. On ne se parle plus."

Pansy arqua un sourcil, en traçant calmement la ligne de sang de sa main avec sa baguette.

"Qu'est-ce que t'as fait ?"

"Quoi ? Qu'est-ce qui te fait dire que j'ai fait quelque chose, et pas elle ?" questionna-t-il, outré par son insinuation.

Pansy leva vers lui deux pupilles noires blasés.

"Parce que je te connais. Qu'est-ce que t'as fait ?"

Drago utilisa sa main valide pour la passer dans ses cheveux.

"C'est… Je ne pense pas que ça soit le bon endroit pour en parler. Ou la bonne personne." dit-il.

Pansy haussa les épaules :

"Ça va." dit-elle, comme pour le rassurer. "Ça fait moins mal qu'avant."

Elle ferma sa paume et tapota gentiment dessus.

"Merci." dit-il, avec le plus de sincérité possible.

"MERLIN ! Jeune homme, vous savez que vous allez payer pour ça j'espère ?!" hurla le propriétaire quand il vit ce qu'il restait du flacon de caramels.

Drago alla donc payer à la caisse sous les hurlements du patron, puis il ressortit d'Honeydukes avec Pansy. Théo et Blaise attendaient dehors. Théo avait une pile de neuf boîtes de chocolats empilées sous son menton, et Blaise semblait positivement agacé.

"On va déjeuner ?" proposa Pansy, probablement pour diffuser la tension.

Étonnamment, ça marcha. Le déjeuner fit du bien à tout le monde. Drago ne sentait plus ses jambes, non pas à cause du froid, mais plutôt à cause de Rogue et ses martèlements d'aiguilles du jeudi. Pansy donna de l'eau à Eris et passa le déjeuner à le caresser affectueusement. Théo ouvrit une boîte de chocolats en guise de dessert. Chacun digéra son plat en silence, et Drago oublia presque que Théo avait rendez-vous avec Granger plus tard, jusqu'à ce que la porte des Trois Balais s'ouvre.

Quand Granger et les Weasley entrèrent, trois têtes se tournèrent vers eux : Drago, Théo, et Blaise.

"Trois fish and chips, et trois Bièraubeurres s'il vous plaît." commanda Granger au comptoir.

Madame Rosmerta lui montra une table où ils prirent place. Drago remarqua que c'était l'un des jumeaux Weasley qui avait la caméra autour du cou, et non pas elle. Il se demanda si Granger lui avait demandé de la prendre juste pour montrer à Drago qu'elle était énervée contre lui.

"Je n'en reviens pas que t'aies un date avec Granger." dit Blaise à l'adresse de Théo.

Drago se raidit contre la chaise du pub. Pansy lui lança un regard anxieux par-dessus son verre d'eau, mais Drago n'y fit pas attention : il était plutôt concentré sur l'expression effarée du concerné.

"Ce n'est pas un date ! Vous allez arrêter avec ça ?!" se lamenta Théo d'une voix bien trop aigüe pour être naturelle.

"Excuse nous d'être surpris." continua Blaise. "Tu ne parles avec personne à part nous depuis cinq ans, et d'un coup, on est censés accepter le fait que tu sois pote avec Hermione Granger ?"

"Qu'est-ce que ça peut faire que je sois ami avec elle ? On s'aide juste pour les BUSES, c'est tout."

Drago sentit ses épaules se détendre légèrement en entendant ça. La voix de Granger passait en boucle dans sa tête : "Je ne lui ai jamais parlé de ma vie avant hier soir ! C'était la première fois qu'on échangeait ne serait-ce qu'un mot ! Comment peux-tu honnêtement penser qu'il y avait quelque chose entre nous ?! Drago, c'est censé être ton ami ! Comment peux-tu penser que je suis attirée par lui ? Tu ne nous connais donc vraiment pas, tous les deux ? Tu ne me fais donc pas confiance à ce point-là ?"

Drago tourna subtilement la tête vers elle. Elle riait avec Weaslette. Elle avait un film de crème de bière au-dessus de la lèvre. Son nez était tout rouge à cause du froid. Est-ce qu'il lui faisait confiance ? Est-ce qu'elle passait du temps avec Théo juste pour l'énerver, ou pouvait-elle vraiment ressentir quelque chose pour lui ?

La vérité, c'était que Drago n'en avait aucune idée. Toute son angoisse était remontée si haut qu'il n'arrivait plus à discerner le vrai du faux. La vengeance de Granger avait marché. Drago était complètement perdu.

C'est pourtant ce que tu lui as demandé, murmura sa petite voix intérieure. Tu lui as dit de sortir avec un autre garçon.

Drago l'avait bien dit, mais il n'avait jamais voulu parler de Théo. Il avait voulu parler de Weasley, de Danny, de Londubat, ou même de Goldstein, même si la pensée que Granger puisse sortir avec un de ces garçons lui envoya une décharge de colère dans le corps. Théo était hors limite. Théo était son meilleur ami, son frère. S'il se mettait à sortir avec Granger, Drago ne savait même pas comment il réagirait. Il perdrait toute envie de vivre. Puni par Merlin, encore. Obligé de regarder son meilleur ami embrasser la fille qu'il aimait.

"Vous êtes insupportables." asséna Théo. "C'est impossible pour vous d'être ami avec une fille sans forcément avoir des sentiments pour elle ? Je suis ami avec Pansy, ça ne veut pas dire que je suis amoureux d'elle, Merlin !"

Si, c'est possible, pensa Drago. Mais pas avec elle. Pas avec Granger. C'est impossible de ne pas tomber amoureux de Granger.

Après le déjeuner, les quatre Serpentards se séparèrent. Pansy et Blaise allèrent à l'animalerie pour acheter d'autres vêtements pour Eris, et Théo se dirigea suspicieusement vers le magasin de plumes. Drago le suivit le plus discrètement possible.

Granger l'attendait devant. Ni Weaslette ni les jumeaux ne l'accompagnaient, et cette constatation fit encore plus peur à Drago. Peut-être que Théo n'avait pas réalisé que c'était un date, mais que c'en était vraiment un ? Peut-être que Granger s'était prise à son propre jeu et qu'elle était vraiment en train de tomber amoureuse de Théo ? La panique lui fit oublier sa fatigue. Quand ils entrèrent dans le magasin, Drago les observa à travers la vitrine.

Ils arrivèrent au rayon des plumes de faisan, celles que Granger utilisait dernièrement. Elle montra à Théo un éventail de possibilités en comparant les plumes une par une, et Drago aurait pu payer pour être à la place de Théo et l'écouter parler de ça pendant des heures. Elle était tellement passionnée, expliquant chaque avantage avec des gestes excessifs des bras. Même s'il ne l'entendait pas à travers la vitre, il pouvait deviner ses expressions et ça le fit sourire, malgré l'étrangeté de la situation.

N'y tenant plus, Drago entra discrètement dans le magasin et se mit dans le rayon derrière eux pour entendre la conversation. Granger était en train d'expliquer la manière dont cette plume-là glissait plus vite sur le papier, mais que l'autre durait plus longtemps, et Drago écouta en prenant des pots d'encre au hasard.

"Je vais prendre celle-ci." dit finalement Théo, et Drago l'entendit retirer la plume du socle de présentation.

"Tu n'en prends qu'une ?" demanda Granger avec étonnement.

"Oui, pour l'instant, c'est la seule qui reste dans mes moyens." expliqua Théo, pas une once de honte dans sa voix.

"Oh." dit Granger, apparemment prise de court.

Il fallait dire qu'il la comprenait. Même s'il avait été renié de sa famille, Théo avait toujours cette "aura" autour de lui, celle que les enfants des Vingt-huit sacrés portait tous sans le vouloir. En le voyant de la sorte, avec ses vêtements parfaitement repassés et cette démarche distinguée, il était impossible de savoir que Théo était en fait fauché. Mais Granger, toujours aussi gentille, ne fit pas de commentaire et proposa plutôt :

"Donne-la moi, je te l'offre."

"Non, hors de question." riposta-t-il.

"Tu m'as bien offert le recueil, je peux t'offrir une plume. Donne." insista Granger.

"Tu m'as aidé pour l'Arithmancie, c'était ça mon cadeau de Noël."

Même s'il ne pouvait pas la voir, Drago était sûre qu'elle avait levé les yeux au ciel.

"N'importe quoi, je t'aide gratuitement. Laisse-moi payer pour ces plumes."

Théo parut surpris mais la laissa faire. Ils allèrent à la caisse pour payer, et Drago dû se dévisser le cou pour les voir, les mains serrant trop fort les pots d'encre. Puis, ils se dirent au revoir, et Théo sortit du magasin. Drago laissa échapper un soupir de soulagement qui lui comprimait la poitrine. Juste amis. Ils étaient juste amis. Granger voulait seulement le rendre jaloux. Elle n'avait pas embrassé Théo.

Drago agrippa l'étagère face à lui et prit plusieurs grandes inspirations pour se calmer.

Il était tellement focalisé là-dessus qu'il n'entendit même pas les pas de Granger se rapprocher du rayon dans lequel il était. Il eut à peine une seconde pour se faufiler dans l'aile des parchemins avant qu'elle ne s'approche des encriers.

Drago l'observa à travers l'embrasure de la bibliothèque. Sa main effleura plusieurs pots, clairement hésitante, puis elle finit par en prendre trois, deux bleus marine et un rouge, et se dirigea vers la caisse.

Une fois qu'il fut sûr qu'elle était bien repartie, Drago sortit de sa cachette et acheta une plume de paon, les deux pots d'encre qu'il avait dans la main, et dix rouleaux de parchemins, puis ressortit sur la rue de Pré-Au-Lard.

Honeydukes avait installé un stand dehors pour proposer des confiseries de Noël aux passants, et Pré-Au-Lard embaumait désormais une délicieuse odeur de pommes d'amour et de marrons chauds qui se répandait dans l'air festif. Drago remonta le long de la rue en observant les vitrines. Pansy et Blaise étaient introuvables, mais Théo était maintenant chez l'apothicaire, probablement pour remplir son kit de potions d'ingrédients manquants.

Drago s'arrêta dans la boutique de Quidditch pour se racheter des gants et zieuter les nouveaux balais, puis il ressortit et tomba sur une devanture de boutique qu'il n'avait jamais remarquée auparavant. Elle était peinte en rose pâle, la couleur qui lui rappelait maintenant Ombrage, et dégageait une odeur de citronnelle qui piquait un peu le nez.

Il aurait pu rebrousser chemin, mais il repéra Granger à l'intérieur, reconnaissable à ses cheveux indomptables sous son bonnet blanc, et sans le réaliser, Drago entra à l'intérieur.

C'était une boutique de thés. Plusieurs centaines de boîtes étaient posées sur les étagères dans une explosion de couleurs et d'odeurs qui fit presque sursauter Drago tant elles étaient vives. La vendeuse, une jeune fille avec de grosses lunettes rondes, était en train de noter quelque chose derrière sa caisse et ne fit pas attention à lui.

Granger était la seule cliente de la boutique. Elle était, sans surprise, postée devant l'étagère des "thés automnaux". Drago la regarda de dos, en train de choisir des boîtes dans des teintes marrons : noisette, gingembre, chaï, citrouille… Elle avait déjà trois boîtes de thé à la cannelle posées à côté d'elle.

Drago l'observa ouvrir les boîtes pour en sentir le parfum et les reposer une par une. Elle opta pour le thé à la pomme, mais reposa celui à la carotte avec une petite grimace dégoûtée qui faillit le faire rire.

En la voyant comme ça, Drago oublia presque la raison de leur dispute. Comment avait-elle pu lui hurler dessus quelques jours auparavant, alors qu'elle était si calme, si douce aujourd'hui ? Comment avait-il pu la rejeter ? Comment avait-il pu laisser sa peur prendre le dessus ? Il mourrait d'envie de la prendre dans ses bras. Il était furieux contre elle pour l'avoir rendu jaloux, pour avoir mis en place cette vengeance mesquine avec Théo. Mais étrangement, cette colère était apaisée dès qu'il la voyait choisir ses boîtes de thé. Elle était tellement belle qu'il fut hypnotisé par elle pendant une bonne dizaine de minutes.

Puis, pris d'une impulsion, Drago fouilla dans le sac de Scribenpenne et déchira un bout de parchemin, saisit sa nouvelle plume de paon et la trempa dans le pot d'encre. Puis, il écrivit :

Pourquoi tu fais ça ?

Il plia le parchemin pour en faire un avion en papier et le lança à travers la boutique, en veillant à ne pas se faire voir par la vendeuse à l'entrée. L'avion descendit en piqué sur l'épaule de Granger et elle eut un petit sursaut. Quand elle ouvrit le papier, Drago crut qu'elle allait se retourner brusquement pour le trouver, mais elle resta dos à lui et prit sa propre plume de faisan dans son sac pour répondre. Elle lança l'avion derrière elle, et le parchemin retrouva son destinataire aussitôt.

Arrête de me suivre.

Il sourit et marqua en dessous de son mot :

Impossible. Pourquoi tu fais ça ?

Il le renvoya à Granger qui déplia le papier rapidement, puis écrivit une courte phrase à toute vitesse.

Faire quoi ?

Drago n'avait aucun doute qu'elle faisait semblant de ne pas comprendre. Il répondit aussi vite qu'elle.

Tu sais très bien quoi.

Granger ouvrit le mot et prit à peine une dizaine de secondes pour répondre.

Tu sais très bien pourquoi.

Drago soupira. Il savait. Elle ne s'en cachait même pas. Elle voulait le rendre jaloux. Pour qu'il réalise ce qu'il ratait. Et Drago haïssait Hermione Granger à cet instant, parce qu'elle était bien trop intelligente. Il répondit la phrase la plus logique à ses yeux, même si elle le savait déjà, juste pour lui confirmer que son plan avait marché.

Ça me rend fou de te voir avec Théo.

Pour la première fois depuis le début de l'échange de l'avion, Granger se tourna vers lui. Ils se regardèrent longuement, et là où Drago aurait cru voir de la satisfaction sur ses traits, voire même de l'insolence d'avoir "gagné" contre lui, il ne vit qu'une profonde déception, comme si elle avait soudain pitié de lui. Elle nota deux mots et lui renvoya le papier avec un pâle sourire.

Je sais.

Drago ne sut quoi répondre à ça. Alors, il écrivit la première chose qui lui passa par l'esprit.

Tu es tellement belle aujourd'hui.

Parce que c'était vrai. Elle était trop belle, Drago sentait son cœur lui marteler la poitrine dès qu'il l'apercevait. Granger rougit contre son gré, un petit sourire au coin des lèvres.

Puis, elle glissa l'avion dans son sac, prit les boîtes de thé, et alla payer sans se retourner.

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Hermione


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Hermione apporta à Harry et Ron deux pommes d'amour d'Honeydukes pour leur remonter le moral après la "terrible journée de révisions", et ils dînèrent tous ensemble dans la Grande Salle. Tout le monde discutait joyeusement autour de la table des Gryffondors, énergisés par la perspective de la réunion de l'A.D prévue pour le soir-même, mais les pensées d'Hermione étaient loin d'être aussi réjouissantes.

Ça me rend fou de te voir avec Théo.

Hermione se mordit la lèvre en se souvenant avec précision des mots de Drago, comme si, à travers son écriture en italique parfaitement soignée, il avait pu lui transmettre toute sa peine. Hermione avait désespérément voulu le rejoindre, parler de ça à voix haute, mais elle s'était fait violence et avait préféré quitter la boutique.

C'était lui qui lui avait dit de partir. C'était lui qui l'avait rejeté, encore. Trop apeuré par les conséquences de leur amour naissant. Trop effrayé par son père. Tellement peur qu'il l'avait repoussée, lui avait dit de tomber amoureuse de Ron plutôt que lui. Jusque-là, Hermione avait vu ça comme un rejet pur et simple, infondé et frustrant. Mais maintenant que la dispute était loin derrière eux et que son absence était plus douloureuse qu'agaçante, Hermione comprit un peu plus sa réaction. Elle comprit qu'il avait fait ça pour la protéger. Il lui avait suggéré de sortir avec Ron, sa plus grande peur, plutôt que la possibilité de la voir souffrir des conséquences dramatiques si quelqu'un de mauvais venait à découvrir leur relation.

Hermione se rappela de la manière dont Théo, avec une désinvolture déconcertante, lui avait dit qu'il ne pouvait pas payer deux plumes. Qu'il n'avait pas les moyens. Elle savait qu'il vivait chez Zabini parce qu'il ne s'entendait pas avec son père, mais elle n'avait pas réalisé que ça impliquait aussi qu'il n'avait plus accès aux coffres de Gringotts des Nott. Que s'il n'avait pas eu ses amis pour le soutenir, il serait sûrement abandonné, orphelin, ruiné. Et avec cette nouvelle perspective, elle comprenait un peu mieux pourquoi Drago était si inquiet à l'idée que son père découvre la vérité. Ce qu'il mettait en jeu.

Comme à chaque fois qu'un problème concernait Drago Malefoy, Hermione ne savait pas sur quel pied danser. Elle lui en voulait toujours terriblement d'avoir insulté Harry et Ron sur le terrain de Quidditch, mais elle avait aussi l'envie irrépressible de lui reparler. De l'écouter. De comprendre. De le rassurer. Elle voulait retourner à la table de la Bibliothèque et parler avec lui pendant des heures et des heures de tout et de rien.

Hermione était perdue. Tiraillée entre l'éternel dilemme : amour ou raison ? Drago ou Harry ? Bonheur et culpabilité, ou malheur et bonne conscience ?

Drago, ou Malefoy ?

"Qui veut voir les photos que j'ai fait à Pré-Au-Lard ?" lança George, et quelques Gryffondors se rapprochèrent pour voir les clichés.

Hermione observa les toîts blancs des maisons, les confiseries d'Honeydukes et Fred glisser sur la neige en boucle sur la photo, et n'arriva pas complètement à partager le fou rire des autres.

.
.

Hermione avait encore la tête pleine d'interrogations sur Drago quand elle ouvrit la porte du dortoir pour se changer avant de se rendre dans la Salle sur Demande. Elle sursauta un peu, donc, quand elle tomba sur une Lavande Brown au visage légèrement bouffi, et une Parvati Patil en train de se moucher bruyamment.

"Oh, hey Hermione." dit Parvati d'une voix enrouée. "Tu pourrais dire à Harry qu'on ne pourra pas venir à la réunion de ce soir ? On a un rhume…"

"Oui, bien sûr." dit Hermione. "Vous devriez aller à l'infirmerie, Madame Pomfresh a refait quelques bouteilles de Pimentine."

"Non, ça va, on va juste dormir ici." dit Lavande, et sa langue était tellement pâteuse qu'Hermione eut du mal à comprendre ce qu'elle disait.

"D'accord, soignez-vous bien." dit Hermione, et Parvati la remercia tandis que Lavande alla s'enfermer dans la salle de bains pour prendre une douche brûlante.

Hermione enleva ses vêtements bien trop chauds de Pré-Au-Lard et se mit en tenue plus confortable, prit sa baguette et quelques livres pour trouver des sorts de défense à proposer à Harry, quand une idée lui traversa l'esprit. Si vite, d'abord, qu'elle resta simplement figée là, à se demander si elle n'avait pas perdu la tête.

Non, elle ne pouvait pas faire ça.

C'était interdit, et immoral. Harry et Ron seraient furieux s'ils l'apprenaient. C'était une mauvaise idée, à tous les niveaux. La liste de tout ce qu'il pouvait mal se passer défila devant les yeux d'Hermione et elle fut à deux doigts d'abandonner.

Mais elle pensa à Théo, à son désarroi dans sa voix quand il parlait d'Ombrage. "Peut-être que ce cadeau peut marquer la paix entre nous ? Ça serait bête qu'on se prive d'une amitié parce qu'on a pas été mis dans les mêmes Maisons quand on avait onze ans. Et je pense qu'on peut s'aider mutuellement."

Hermione éteignit sa raison et regarda autour d'elle. Lavande était dans la salle de bains, et Parvati était aux toilettes. Elle devait agir maintenant.

Sans prendre la peine de réfléchir à ce qu'elle faisait, Hermione se dirigea vers le lit de Lavande et souleva la couette. Elle inspecta l'oreiller, et trouva ce qu'elle cherchait : un long cheveu doré. Elle l'enferma dans un mouchoir propre et le rangea dans sa poche.

C'était idiot, idiot, idiot. Quel plan bancal, complètement imprévisible, l'opposé même d'Hermione ! Les paumes de ses mains devinrent moites quand elle réalisa ce qu'elle était en train de faire. Qu'est-ce qui lui prenait ?

Le doute s'insinua en elle et elle faillit jeter le mouchoir à la poubelle en se traitant d'idiote, mais quelque chose l'arrêta. C'était, fondamentalement, une mauvaise idée, mais la raison ne valait-elle pas le coup ?

Hermione était dans les escaliers du dortoir sans même se souvenir d'avoir ouvert la porte en premier lieu. Elle se dirigea vers le tableau de la Grosse Dame d'un pas déterminé malgré le bazar dans sa tête, quand elle se fit brutalement arrêtée dans sa course par une main qui lui attrapa le bras.

"Aïe !" s'écria-t-elle de surprise.

"Désolé, Mione, c'est nous !" chuchota la voix de Ron.

Hermione réalisa qu'ils étaient recouverts par la cape d'invisibilité.

"Viens, on y va !" dit Harry en soulevant un pan de la cape, révélant un peu le pull orange de Ron en dessous.

"Euh… Je dois juste faire quelque chose." bredouilla Hermione. "J'ai… Un livre, à la Bibliothèque, je dois absolument le chercher avant que ça ferme."

Elle entendit Ron soupirer d'agacement mais Harry lui dit simplement :

"D'accord, rejoins-nous quand tu as fini !"

Elle passa devant pour leur laisser le passage ouvert, puis se dirigea vers l'escalier qui menait aux étages inférieurs. Elle attendit une minute entière avant d'être sûre qu'Harry et Ron ne la voyaient plus, puis elle se dépêcha de descendre les marches, deux à la fois. Elle était pantelante quand elle arriva devant la Bibliothèque.

"Miss Granger, la Bibliothèque ferme dans quinze minutes !" avertit Madame Pince à peine Hermione avait posé un pied dans la pièce.

"Je sais, je venais simplement donner quelque chose à… à un ami." expliqua-t-elle, assez piteusement.

La bibliothécaire haussa ses sourcils par-dessus ses lunettes posées sur le bout de son nez, lui donnant une mine sévère, mais hocha la tête pour la laisser passer. Hermione se précipita sur la table que Théo occupait, seul.

"Hey Hermione." dit-il, un peu surpris par sa cadence. "La Biblio-"

"Je sais, je sais." coupa-t-elle abruptement. "Je suis venue te parler."

Elle s'assit en face de lui, et jaugea son expression dubitative. Il va me prendre pour une folle, pensa Hermione. Il va me prendre pour une folle et ne plus jamais me parler.

"J'ai eu… une idée." commença-t-elle à voix basse, en ayant du mal à contrôler son ton pour qu'il reste aussi posé qu'elle le voudrait.

Théo haussa les sourcils de la même manière que Madame Pince quelques secondes plus tôt.

"Je t'écoute ?"

"Et bien… voilà." dit Hermione, qui prit une grande inspiration avant de se lancer. "Pour t'expliquer mon idée, je dois te révéler un secret. Un secret extrêmement confidentiel. Je mets en jeu énormément d'amitiés en te le disant, alors s'il te plaît, tu ne dois le dire à personne d'autre."

Théo se pencha en avant sur la table, son devoir de Métamorphose complètement oublié.

"D'accord, promis, je ne dirai rien." dit-il instantanément, sans hésiter une seconde.

Hermione n'aurait su l'expliquer, mais elle ressentit un puissant sentiment de confiance à l'égard de ce garçon.

C'est pour ça qu'elle lui dit, sans le quitter des yeux :

"Harry organise des réunions secrètes avec les élèves de toutes les Maisons pour s'entraîner à la défense et remplacer Ombrage." dit-elle dans un souffle.

Hermione fut reconnaissante d'avoir exclu son propre prénom du maléfice qu'elle avait jeté sur le parchemin de l'A.D, si elle ne l'avait pas fait, son visage aurait aussitôt été marqué du mot "cafard" en lignées de boutons indélébiles.

Les yeux de Théo s'écarquillèrent, révélant ses deux pupilles d'un bleu ciel pénétrant. Hermione n'aurait jamais pu prédire la phrase qu'il sortit en apprenant l'existence de l'A.D :

"Trop stylé !"

Elle sourit, contente de voir qu'ils partageaient la même opinion.

"Je sais, et j'ai pensé plusieurs fois à proposer ton nom, mais…"

"... mais il n'y a pas de Serpentards." acheva Théo, soudain déçu. Son visage se referma complètement et il se remit droit contre le dossier de sa chaise. "C'est ça ?"

"Non, il n'y en a pas." dit Hermione. "Je ne pense pas qu'Harry ou Ron seraient affectés s'ils apprenaient qu'on était amis, tous les deux…" Elle désigna l'espace entre Théo et elle avec son doigt. "... Mais je ne pense pas qu'ils seraient partants pour que tu rejoignes l'A.D. À cause de ton amitié avec Malefoy, et tout ça."

Théo cacha sa déception par un air de défiance dès qu'il entendit la mention du nom de Drago.

"Si c'est ce que tu es venue me demander, Hermione, je suis désolé, mais je serai toujours ami avec Drago. Je n'arrêterai pas de l'être pour ça, je refuse de…"

"Non non non, je sais que tu es ami avec Drago, et je ne te demande pas d'arrêter de l'être, au contraire !" s'empressa-t-elle de dire. Théo arqua un sourcil et elle réalisa qu'elle l'avait appelé par son prénom sans faire exprès. Elle poursuivit pour cacher sa gêne : "Je te disais ça simplement pour t'expliquer pourquoi je n'ai pas pu proposer ton nom."

"C'est dommage." dit Théo avec un soupir plein d'amertume. "J'aurais aimé pouvoir en faire partie. Je déteste ça. La séparation entre les Serpentards et… le reste."

Il baissa tristement la tête vers son essai.

"Moi aussi." dit Hermione avec un sourire bienveillant. "C'est justement pour ça que je vais te proposer mon idée."

Théo releva brusquement la tête. Il attendait sa proposition, avec une curiosité dévorante sur ses traits, et Hermione eut beau retourner la phrase dans son esprit, elle n'arrivait pas à la dire à haute voix. Elle n'arrivait pas à s'imaginer briser le silence entre les deux avec une idée aussi farfelue. Elle n'avait aucune idée de comment il allait réagir : éclater de rire ? Partir en courant ? L'insulter de tous les noms ?

Alors, au lieu de lui expliquer à haute voix, elle sortit le mouchoir et l'étala sur la table entre les deux. Puis, elle l'ouvrit.

Théo se pencha et regarda le cheveu de Lavande, le visage d'abord crispé par l'incompréhension.

Puis, Hermione dit doucement :

"Lavande Brown est malade aujourd'hui."

Et quand Théo releva la tête, et qu'Hermione vit la compréhension détendre ses traits, et l'excitation pétiller dans ses pupilles, elle comprit qu'il allait dire oui.

.

"La réunion commence dans quinze minutes." avertit Hermione tandis que Théo rangeait ses affaires hâtivement dans son sac.

"Je serai prêt." dit-il avec une confiance insoupçonnée dans sa voix.

"Nous n'avons même pas de Polynectar…" marmonna Hermione, qui commençait à remettre en question sa propre idée stupide.

"J'en aurai d'ici dix minutes." promit-il.

"Tu vas encore voler dans la réserve de Rogue ?!" demanda Hermione dans un chuchotement anxieux. "Si tu te fais attraper…"

"Je ne risque rien." dit Théo pour la rassurer. "Il faut que tu me trouves des vêtements qu'elle pourrait porter, je suppose que ça choquerait tout le monde de la voir arriver avec ça sur le dos."

Il désigna son pull à l'effigie de Serpentard et Hermione hocha la tête :

"Oui, bien sûr. Je vais descendre à la buanderie…"

"Retrouve-moi dans les toilettes des filles des cachots." intima Théo en mettant son sac sur son épaule. "Celles en face de la réserve de Rogue. Cinq minutes."

Hermione hocha la tête et il sortit de la Bibliothèque d'un pas pressé. Hermione ramassa le mouchoir et sortit à son tour, en faisant un grand sourire à Madame Pince au passage pour ne pas éveiller les soupçons.

La buanderie était située à côté des cuisines, une salle remplie par des dizaines de cordes à linge d'où pendaient des vêtements plus ou moins trempés. Une délicieuse odeur de lessive emplit les narines d'Hermione, mais elle eut du mal à l'apprécier pleinement en pensant à tout le travail exténuant que devait subir les elfes de maison pour le bien-être des élèves. Elle n'en croisa aucun, probablement tous en train de débarrasser le dîner, alors elle prit une robe sèche de Gryffondor et sortit rapidement de la salle avant de se faire repérer.

Elle fut contente de ne croiser aucun Serpentard dans les cachots. Avec sa robe de Gryffondor sous le bras et son air inquiet imprégné sur son visage, ça aurait été difficile d'expliquer la raison de sa venue ici.

Elle ouvrit la porte des toilettes et trouva Théo là, en train de verser le Polynectar dans un chaudron posé dans l'un des lavabos.

"Tu vois ?" dit-il avec un sourire en coin plein de malice. "Je t'avais dit que je l'aurai dans dix minutes."

"Cinq même." dit Hermione en consultant sa montre, impressionnée.

Elle barricada la porte avec un sortilège avancé, puis tendit le mouchoir à Théo.

"Tu as déjà bu du Polynectar ?" demanda-t-elle en le voyant remuer la potion toute boueuse.

Il secoua la tête :

"Bien sûr que non."

Puis, il regarda Hermione et ses yeux s'agrandirent d'un coup :

"Parce que toi oui ?"

"C'est compliqué." dit-elle en balayant sa surprise d'un revers de la main. "Et… étrangement ressemblant à la fois où j'en ai pris."

"Je… Merlin." dit Théo, le souffle coupé par cette révélation. "Et alors, c'est comment ?"

Pour la première fois depuis qu'elle lui avait partagé son plan, il semblait un peu effrayé. Hermione sentait son propre cœur taper contre ses tympans tant l'angoisse montait. Il ne restait que cinq minutes avant le début de la réunion.

"C'est… Le goût dépend de la personnalité de la personne." dit Hermione, qui ne savait pas vraiment si c'était une perspective positive ou non.

"Et comment est cette… C'est quoi son prénom, déjà ?" demanda Théo.

"Lavande. Et elle est… gentille."

Elle ne savait pas vraiment comment la décrire autrement. Un peu peste sur les bords parfois, un peu naïve, et assez agaçante. Théo fronça les sourcils.

"On dirait que tu ne l'aimes pas trop."

"Ce n'est pas ma personne préférée sur Terre." concéda Hermione.

Théo transfigura un rouleau de papier toilettes en verre d'eau et y versa deux grosses louches de la potion à l'intérieur.

"Je vais remettre le reste dans la réserve de Rogue." dit-il en regardant le fond de Polynectar dans le chaudron. "Comme ça, il n'y verra que du feu."

Hermione acquiesça. Théo prit le cheveu avec précaution, et le posa à la surface. La potion devint légèrement plus rosée.

"Hmm. Appétissant." commenta le garçon avec une grimace dégoûtée.

"Allez." murmura Hermione, le cœur tambourinant et les mains toujours aussi moites. "Cul sec."

Théo inspira, se boucha le nez, et avala d'une traite la potion. Elle le vit déglutir avec difficulté. Quand il termina, il s'essuya la bouche avec une grimace écoeurée.

Pendant les dix premières secondes, il ne se passa rien. Théo regarda Hermione sans comprendre, et Hermione inspecta le visage de Théo dans l'espoir qu'il se mette à se transformer, mais rien ne changea.

"Putain." dit-il en regardant de nouveau le chaudron. "Pourquoi ça marche pas ?"

Il se pencha pour regarder le reste de Polynectar, et Hermione remarqua à cet instant que ses boucles châtains pâlissaient à vue d'œil.

"Théo."

"Quoi ?"

"Tu deviens… blonde." dit Hermione, estomaquée.

Théo passa une main dans ses cheveux, mais ils poussaient si vite qu'ils atteignaient maintenant son épaule. Il émit un gémissement d'inconfort, et Hermione se souvint de la sensation étrange qu'elle avait ressenti quand elle avait bu du Polynectar. L'impression que sa peau grattait de partout, ou que certains endroits fondaient, se malaxaient, brûlaient.

Le Serpentard se passa une main sur le visage et poussa un petit cri angoissé.

"Qu'est-ce que… Aïe !"

Hermione observa son visage se moduler, et prendre les mêmes aspects que celui de Lavande, petit à petit. Ses yeux en amende s'élargirent et prirent une teinte de bleu plus foncé, sa bouche gonfla légèrement, et tout son corps se mit à rétrécir, arrivant à la même hauteur qu'Hermione.

Cette dernière regarda le spectacle se jouer devant ses yeux sans rien dire, complètement ébahie par les effets de la magie, même après cinq ans à Poudlard.

La transformation se termina par le gonflement brutal de la poitrine de Théo qui lui arracha un énième grognement de détresse. Il baissa la tête sur son propre corps, puis leva la tête vers Hermione, une question dans ses yeux bleus.

"Alors… À quoi je ressemble ?" demanda-t-il d'un ton quelque peu effrayé.

Hermione ne répondit pas. Elle contempla, bouche-bée, Théodore Nott devant elle.

Ou plutôt, Lavande Brown.

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Désolée pour le retard, le traitement de texte du site a changé donc j'ai du remettre les italiques et les espaces à la main... trop bizarre?

Merci pour tous vos commentaires, je suis trop contente que cette fic vous plaise autant!