Chouta venait d'arriver devant la maison deux façades de Rogue, collée par deux autres maisons aux volets blancs fermés.
Cette rue, elle la compara à l'allée des embrumes mais version moldue, car ici, pas le moindre brin d'herbe poussait dans les jardins aux clôtures rouillées. Les voisins qui venaient de se réveiller de bonne heure avaient tous le tient pâle, des casques oranges et des gilets fluorescents. ( la mode moldue était vraiment différente du monde magique ).
Ces petits gens dépourvu de pouvoirs magiques sortaient de chez eux et se rendaient tous devant un piquet jaune avec des chiffres dessus. Ça devait être un rituel ou quelque chose du style...
Son père apparut à son tour dans un mouvement de cape. Il avait atterri derrière un gros tas de fer avec des vitres et quatres roues en goudron.
- Rentrons avant de nous faire repérer, dit-il en sortant son gros trousseau.
Il y avait au moins trente clés, un véritable fouillis métallique. Comment pouvait-il se souvenir de laquelle correspondait à quelle serrure ?
Il ouvrit la porte, faisant bouger le tapis d'entrée tout usé. Chouta emboîta le pas.
Ils passèrent le petit couloir de l'entrée et ouvrirent la porte du salon. L'eau contenue dans un verre posé sur la table avait gelée tant qu'il faisait froid dans cette maison, au moins aussi froid qu'à l'extérieur.
L'endroit était propre, plutôt rangé, mais chaques meubles, chaques chaises, étaient dépareillées. Le sol était en petits carrelages couleur sable, et les murs couvert d'un papier peint en granol blanc.
Rogue posa sa cape sur le canapé en cuir et alluma la cheminée d'un coup de baguette. Il contrôla le robinet de la cuisine, mais toutes les tuyauteries avaient gelées. Ensuite, le frigidaire eût également le droit à un contrôle : c'était le grand vide, mise à part quelques cannettes de bière.
- Diantre! Grogna-t-il en se rendant compte qu'en plus, les ampoules du séjour étaient plates. Je vais aller en acheter d'autres, et prendre de quoi ne pas mourir de faim. Va à l'étage, tu peux aller dormir dans ma chambre pendant que je gère cette maison.
Elle le laissa dans ses frustrations et s'exécuta, montant les escaliers en bois face à la porte d'entrée. Celle-ci arriva dans un couloir avec la porte de la salle de bain ouverte. Elle alla se démaquiller dans l'évier de fortune, puis, elle tomba sur la chambre, recouverte de moquette bleue.
Là aussi, il faisait très froid. Il n'y avait qu'un lit une place, montrant la rigueur de la vie de son père. Elle ouvrit sa garde-robe : ses vêtements étaient tous les mêmes, avec quelques parures de lits bien pliées. Elle soupira en regardant par la porte vitrée, laissant partir de la buée par sa bouche. Le vent passait sous les vitres, le bâtiment n'était pas isolé.
L'adolescente s'installa dans le lit en baillant, les trois couvertures et les oreiller en plumes étaient heureusement bien chaud.
Un bruit de clés provenant du rez-de-chaussée se fit entendre, suivi d'un claquement sec et agacé de la porte. Rogue était parti acheter de quoi survivre pendant sept jours. Elle se demandait ce qui pouvait bien se passer dans sa tête. Elle soupçonnait qu'il éprouvait une certaine honte à l'accueillir dans une maison aussi mal entretenue. Il pouvait bien faire sous-entendre d'avoir une vie en dehors de Poudlard, Chouta savait pertinemment bien qu'il n'avait rien.
Toujours dans le lit, elle tourna le regard vers la porte et la table de nuit. Celle-ci était vide, à l'exception d'une lampe poussiéreuse, non branchée, et de deux tiroirs qu'elle ouvrit par curiosité. Le premier était rempli de papiers en désordre, principalement des factures et des rappels de paiement. Elle fronça les sourcils en voyant l'ampleur des tracas administratifs qu'exigeait la gestion d'une maison moldue. Quel cauchemar.
Dans le deuxième tiroir, il n'y avait qu'une seule chose : une photo cornée sur les bords. Ses doigts tremblèrent légèrement en la sortant. C'était une image de son père, Severus Rogue, bien plus jeune qu'elle ne l'avait jamais vu. Il devait avoir une vingtaine d'années tout au plus, vêtu d'un simple tee-shirt noir qui révélait clairement la Marque des Ténèbres tatouée sur son avant-bras.
Dans ses bras, il tenait un minuscule bébé, elle se reconnut.
Bien que vieillie, ce souvenir montrait un moment incroyablement normale.
Rogue esquissait un sourire rare et discret, son regard baissé vers le nourrisson. C'était avant que tout bascule. Avant la prophétie, avant qu'il soit destiné à tuer sa propre fille.
La photo fut reposée à sa place, et elle sombra dans un sommeil si profond qu'elle n'entendit même pas le bruit lointain du retour de son père...
Ce ne fut qu'au soir qu'elle émergea de son assoupissement, réveillée par l'odeur alléchante d'un repas chaud qui s'infiltrait sous l'embrasure de la porte.
La lumière du couloir passait à travers le trou de la serrure, dessinant de faibles halos dans l'obscurité.
Chouta s'étira lentement, ses muscles endoloris protestant contre tout. Tout compte fait, elle avait très bien dormi dans cette chambre toute simple.
Son regard dériva encore vers la porte vitrée donnant sur la rue. Elle se leva.
Dehors, les Moldus du matin revenaient chez eux avec leurs gilets fluorescents scintillant sous les réverbères qui clignotaient de manière aléatoire.
Quelques minutes plus tard, Rogue ouvrit la porte sans un bruit. Il lui dit simplement d'une voix grave et posée qu'il était l'heure de manger, avant de se diriger vers la fenêtre. Il resta là un moment, immobile avec elle.
- Que font-ils, ces moldus, de leurs journées? Demanda d'un coup Chouta. C'est étrange, les vêtements qu'ils portent...
Il murmura d'un ton presque absent que c'était une tenue réglementaire. Il expliqua ensuite, qu'ils travaillaient tous à l'usine de dentifrices. Douze heures par jour, cinq jours sur sept.
- Quelle triste vie, se lamenta-t-elle. Pourquoi est-ce qu'ils ne déménagent pas à la campagne?
- C'est un quartier pauvre, la moitié de ces maisons appartiennent à l'usine. Le patron loue le logement en échange de leurs travail, et quand ils tombent malade, le loyer est doublé par deux.
- Tous des chiffes molles! Jura Chouta. Ils sont vraiment sans volonté pour se plier à un seul homme. Sans ses employés, ce patron n'aurait rien! Si c'était moi, je...
- Tu imagines peut-être qu'ils ont le choix? Coupa Rogue d'un ton acide, un rictus méprisant étirant légèrement ses lèvres. À ton âge, tu crois encore que ce monde est juste? Ces Moldus n'ont même pas de quoi acheter des chaussures neuves à leurs enfants. Ils ont des dettes.
Tu n'arrives jamais ici par hasard.
Cette réponse calma immédiatement sa petite révolte. Elle croisa les bras.
- Donc...Tu n'avais pas le choix, toi? Demanda Chouta avec une voix désolée. Ma scolarité te coûtait cher à ce point?
Il tourna brièvement la tête vers elle, puis garda le silence quelques temps.
- Cela n'a rien à voir avec toi, dit-il d'une voix distante. Mon histoire est différente.
- Racontes-moi, papa. Racontes-moi le plus de choses possible, demanda-t-elle d'une voix ferme. Nous ne sommes plus très loin de cette guerre, rien ne dit que j'aurais un jour une autre occasion de connaître l'histoire de ta vie. On raconte tellement de choses sur toi, comment puis-je distinguer le vrai du faux? Il n'y a que toi qui sait!
- Très bien. C'était la maison de mes parents, s'ouvrit directement Rogue, à son plus grand étonnement. Ma mère était issue d'une famille fortunée. Elle possédait plusieurs maisons sur le Chemin de Traverse et dans l'Allée des Embrumes, des héritages. Il fut un temps où les Princes étaient une famille influente. Mais elle a tout abandonné pour épouser mon père, un moldu accro aux jeux d'argent qui méprisait la magie. Ses biens immobiliers ont pourri sur place pendant plus de trente ans, jusqu'à ce que je la ramène dans notre monde.
J'ai vécu dans cette maison jusqu'à mes dix-sept ans, continua-t-il, son ton plus dur. Un jour, en rentrant de l'usine, mon père a découvert que j'étais un sorcier. J'avais onze ans et je venais de battre ma mère aux échecs des sorciers. Nous avons été sévèrement punis, mais il a finit par accepter que j'aille à Poudlard pour ne plus me voir. Mais je n'avais pas d'autres choix que de revenir pendant les vacances...Cela ne me dérangeais pas qu'il me frappe ou me prive de nourriture. Ce qui était insupportable, c'était de le voir s'en prendre à ma mère et de la voir rester là, sans rien dire. Les années passaient et ma haine envers les personnes de sa nature ne fit que de grandir à cause de lui. Ma colère ne faisait que de décupler ma puissance, mon talent pour la magie noire.
Rogue marqua une pause, son reflet sombre dans la vitre.
- Mon père était un bon à rien, mais quelque part, c'est grâce à sa vie ratée que j'ai tout fait pour devenir quelqu'un.
- Était-ce vrai, ce que tu m'as dit la semaine passée? Se risqua Chouta. Tu as vraiment finit par le tuer?
- Je n'aurais jamais dû te le dire de cette manière, dit-il en frottant ses yeux. Cela s'est déroulé dans les premiers mois où j'ai rejoint le Seigneur des Ténèbres. J'avais dix-neuf ans. Il m'avait conseillé de tuer mon père et de ramener ma mère dans le monde magique, c'était mon devoir, en tant que sorcier. De plus, il m'avait juré que cela m'apporterait une satisfaction personnelle...C'est en tout cas ce que lui avait ressenti en tuant son père, moldu également.
Évidemment, cela n'a rien changé à mon mal-être de l'époque. Je n'étais pas comme lui...Ta mère ne m'a plus adressé la parole pendant longtemps après ce crime, elle venait de tomber enceinte de moi.
Il ouvrit la porte vitrée et alluma une cigarette avant de continuer.
- J'ai commencé à culpabiliser d'avoir ôté sa vie. Ma mère a sombré peu à peu dans la folie. Un an après ta naissance, elle a prononcé la prophétie, celle qui m'a tenu éloigné de toi pendant toutes ces années. Ce soir-là, je suis parti pour te protéger de moi, le meurtrier que j'étais devenu.
Je ne savais plus qui j'étais, ni où aller. Alors, j'ai fait ce qui me semblait être la seule option : je suis aller vivre auprès du seul sorcier qui avait un jour pris la peine d'écouter ma vie, de comprendre mon enfance : le Seigneur des Ténèbres.
Son quartier général était planté au Manoir des Malefoy, entouré de ses serviteurs et de ses prisonniers moldus. Ils étaient torturés, affamés. C'est à ce moment-là que j'ai compris que les activités des Mangemorts étaient injuste. J'ai trahi le Maître pour la première fois quelques mois après avoir monté en grade. J'ai sauvé des enfants retenus au manoir et les ai ramenés chez eux. Narcissa était ma complice. C'est ainsi que notre... liaison a commencé. Nous avons toujours imputé nos actes aux Mangemorts que nous savions déjà en disgrâce. Le Seigneur, aveuglé par son arrogance, préférait nous croire. Il ne pouvait concevoir que Narcissa et moi étions avant tout des parents, bien avant d'être ses serviteurs. Plus tard, le Seigneur des ténèbres à commis un acte...Un acte impardonnable...Tout cela n'a fait que de confirmer mes doutes à propos de sa morale...Depuis ce jour j'ai
promis de tout faire pour qu'il meurt pour de bon.
Avant même que Chouta puisse dire quoi que ce soit, ( Elle voulait évoquer Lily Evans ) il prit les devants, lui faisant comprendre que le sujet était clos :
- Maintenant, à table, dit-il en jetant son mégot par la fenêtre.
