Lorsque Genzo ouvrit la porte de son appartement, il fut immédiatement frappé par l'atmosphère pesante. Le silence oppressant n'était interrompu que par des sanglots étouffés. Il posa son sac d'entraînement à terre et s'avança doucement dans le salon, où il aperçut Clara, recroquevillée dans un coin, ses bras autour de ses genoux, son visage caché.

Inquiet, il s'agenouilla près d'elle.

— Clara ? C'est moi, Genzo. Qu'est-ce qui se passe ?

Elle ne bougea pas, ses tremblements s'intensifiant à son approche.

— Clara, écoute-moi, c'est moi, Genzo, personne ne te fera de mal, murmura-t-il avec douceur, mais il pouvait voir qu'elle n'enregistrait pas ses paroles.

Quand il posa une main rassurante sur son épaule, Clara sursauta violemment, se recroquevillant encore davantage, comme si elle essayait de disparaître.

— Non, laisse-moi ! Pitié, laisse-moi tranquille ! balbutia-t-elle, terrorisée.

Genzo réalisa avec horreur qu'elle le confondait avec Gunther. Son cœur se serra en voyant la peur pure dans ses yeux, et il retira immédiatement sa main, reculant légèrement pour lui laisser de l'espace.

— Clara, regarde-moi, insista-t-il doucement. Ce n'est pas lui. C'est moi, Genzo. Tu es en sécurité ici, je te le promets.

Elle releva timidement la tête, ses yeux rougis par les larmes. Il lui fallut quelques secondes pour vraiment le voir, pour réaliser que ce n'était pas Gunther, mais bien Genzo.

— G-Genzo... ? murmura-t-elle, sa voix tremblante.

— Oui, c'est moi, répondit-il avec un sourire rassurant. Je suis revenu plus tôt que prévu. Personne n'est là, Clara. Tu es en sécurité.

Les sanglots de Clara redoublèrent, mais cette fois, ils semblaient plus liés à un soulagement qu'à de la peur. Genzo, toujours prudent, lui tendit un verre d'eau qu'il avait attrapé sur la table basse.

— Bois un peu, ça va t'aider à te calmer, dit-il doucement.

Clara saisit le verre de ses mains tremblantes et prit une petite gorgée.

— Je... j'ai entendu du bruit, expliqua-t-elle faiblement. Je pensais que c'était lui... qu'il m'avait retrouvée...

— Je comprends, mais je te jure, il n'y a personne. Je suis là, et je ne laisserai jamais rien t'arriver, affirma Genzo avec fermeté.

— Tu avais dit que tu ne reviendrais pas avant 16h alors... Ça m'a surpris d'entendre la porte.

Clara hocha la tête, mais ses épaules restaient tendues, comme si elle ne pouvait pas se détendre complètement.

— Je suis désolé, murmura-t-elle après un moment. Je suis désolé d'être comme ça, de tout compliquer...

— Eh, arrête ça, dit Genzo en la regardant droit dans les yeux. Tu n'as rien à te reprocher. Ce n'est pas de ta faute, Clara. Ce que tu ressens est normal après tout ce que tu as vécu. J'aurai dû te prévenir que je rentrais plus tôt. Mais je ne voulais pas te laisser seule trop longtemps.

Elle le regarda, émue par sa sincérité. Genzo lui tendit doucement la main.

— Viens, on va s'installer sur le canapé. Tu n'as pas besoin de rester par terre.

Clara hésita un instant, puis prit sa main et se laissa guider jusqu'au canapé.

Une fois installée, Genzo s'assit à une distance respectueuse et lui demanda :

— Qu'est-ce qui te ferait du bien maintenant ? Veux-tu qu'on parle, qu'on mette un film, ou peut-être juste que je reste là, silencieux ?

Clara esquissa un faible sourire, touchée par son attention.

— Juste... reste là, dit-elle doucement.

— Alors je reste, répondit-il avec un sourire apaisant.

Ils restèrent ainsi, dans un silence presque réconfortant, tandis que Clara commençait doucement à se détendre, rassurée par la présence protectrice de Genzo.

Alors que Genzo et Clara étaient assis dans le silence apaisant, le téléphone de Genzo se mit à vibrer sur la table basse. Il jeta un coup d'œil à l'écran et vit le nom de son avocat s'afficher.

— Excuse-moi, Clara. Je dois prendre cet appel, dit-il calmement avant de se lever.

Il se dirigea vers son bureau pour répondre.

— Oui, maître Tanaka, je vous écoute.

— Bonjour, Genzo. Je voulais vous informer que Gunther a été placé en garde à vue en début d'après midi. La police a agi rapidement, grâce aux preuves que Clara et vous avez fournies hier.

Genzo sentit un poids se lever de ses épaules, mais il resta concentré.

— C'est une bonne nouvelle. Et maintenant ?

— La garde à vue peut durer jusqu'à 48 heures, mais il est probable qu'il soit présenté à un juge rapidement. En attendant, je vous conseille de rester prudent et de ne pas relâcher votre vigilance, même s'il est temporairement hors d'état de nuire. Je vous tiendrai informé dès que j'aurai des nouvelles supplémentaires.

— Merci, maître. Je vais prévenir Clara.

Après avoir raccroché, Genzo retourna dans le salon, où Clara était toujours assise sur le canapé, l'air un peu plus détendue.

— Clara, j'ai une bonne nouvelle, annonça-t-il en s'asseyant à côté d'elle. Gunther est en garde à vue depuis ce matin.

Clara leva les yeux vers lui, un mélange d'étonnement et de soulagement traversant son visage.

— En garde à vue ? C'est vrai ?

— Oui, c'est vrai. Mon avocat m'a confirmé qu'il a été arrêté grâce à ce que tu as déclaré hier. Ça ne signifie pas que tout est réglé, mais c'est un grand pas en avant.

Clara hocha la tête, visiblement soulagée, même si une part d'inquiétude persistait.

— Merci, Genzo. Je... je n'aurais jamais pu faire ça seule.

— Tu n'es plus seule, Clara, répondit-il doucement. On va gérer ça ensemble, étape par étape.

Après un moment de silence, Genzo lui proposa :

— Écoute, je pense que tu devrais récupérer quelques affaires chez toi. Des vêtements, des objets personnels, tout ce dont tu pourrais avoir besoin ici. Tu te sentiras peut-être mieux avec des choses qui te rappellent un peu de normalité.

Clara hésita, la peur revenant brièvement dans ses yeux.

— Tu penses que c'est sûr ?

— Oui. Gunther est en garde à vue, et je serai avec toi tout le temps. Si tu ne te sens pas prête, on peut attendre, mais je pense que c'est important pour toi de reprendre un peu de contrôle sur ta vie.

Après un instant de réflexion, Clara acquiesça timidement.

— D'accord. Mais seulement si tu viens avec moi.

— Bien sûr. On y va quand tu te sens prête, répondit Genzo avec un sourire rassurant.

Clara se leva, toujours un peu nerveuse, mais déterminée à franchir cette étape. Et, le visage tendu, insista pour partir immédiatement.

— Je préfère qu'on y aille maintenant, dit-elle d'une voix basse, presque tremblante. J'ai peur qu'il soit relâché plus tôt que prévu.

Genzo hocha la tête sans hésitation.

— Très bien, on part tout de suite.

Il attrapa ses clés de voiture et guida Clara jusqu'à son imposante voiture de sport garé dans le parking sécurisé de la résidence. Le vrombissement du moteur semblait presque couvrir le silence pesant dans l'habitacle. Clara fixait nerveusement la route, se mordillant la lèvre.

Lorsqu'ils arrivèrent devant son immeuble, Genzo coupa le moteur et descendit. Clara hésita un instant, observant la façade défraîchie de l'immeuble.

— Tout ira bien, je suis avec toi, murmura-t-il en lui tendant la main pour l'aider à descendre.

Mais à peine arrivés devant la porte de son appartement, ils remarquèrent quelque chose qui glaça Clara sur place : la porte portait des marques évidentes de coups. Des éclats de peinture s'étaient détachés, et les traces profondes indiquaient que quelqu'un avait tenté de forcer l'entrée.

— Il a essayé d'entrer... murmura Clara, la voix brisée.

Genzo posa une main ferme mais rassurante sur son épaule.

— Il n'a pas réussi. Et il ne pourra plus rien faire. Tu n'as rien à craindre, Clara, je te le promets.

Elle déverrouilla la porte avec des mains tremblantes, puis entra lentement. L'intérieur de l'appartement était modeste, avec des meubles simples et usés. Clara semblait gênée que Genzo, habitué au luxe, puisse voir son logement si précaire.

— Désolée, ce n'est pas très... joli, murmura-t-elle en détournant les yeux.

Genzo fronça les sourcils, non pas à cause de l'état des lieux, mais parce qu'il ne pouvait s'empêcher de penser qu'un tel quartier n'était pas sûr pour elle.

— Clara, ne t'inquiète pas pour ça, dit-il doucement. L'important, c'est que tu prennes ce dont tu as besoin.

Clara hocha la tête et s'activa rapidement, ouvrant des tiroirs et un placard pour remplir une valise avec des vêtements et quelques effets personnels. Ses gestes étaient précipités, presque fébriles, comme si elle voulait partir au plus vite.

Genzo récupéra la valise pleine et la porta jusqu'à la voiture, tandis que Clara, appuyée sur ses béquilles, le suivait péniblement. Il l'attendit patiemment, toujours vigilant.

Alors qu'il refermait le coffre de la voiture, il jeta un coup d'œil autour de lui. Les rues étaient désertes, mais le quartier était clairement délabré et peu accueillant. Des fenêtres cassées, des graffitis sur les murs, et des ruelles sombres donnaient à l'endroit une atmosphère oppressante.

Il serra les dents, se promettant intérieurement de ne jamais laisser Clara revenir ici seule.

— C'est bon, on peut y aller, dit Clara en s'installant dans la voiture, un soupir de soulagement échappant de ses lèvres.

— Oui, répondit Genzo en démarrant.

Sur le chemin du retour, il jeta un coup d'œil vers elle.

— Clara, une fois tout ça terminé, tu ne devrais plus jamais avoir à revenir ici, murmura-t-il. Ce quartier n'est pas fait pour toi.

Elle baissa les yeux, silencieuse, mais au fond, elle savait qu'il avait raison.

Clara regardait la route défiler sans vraiment y prêter attention, ses pensées s'égarant. Elle sentait la pression monter, comme si tout ce qu'elle avait traversé ces derniers temps devenait une montagne insurmontable. Après quelques minutes de silence, elle brisa finalement celui-ci, sa voix faible mais déterminée.

— Je n'ai pas les moyens de changer d'appartement, Genzo... Je sais que je devrais, pour être en sécurité, mais...

Elle marqua une pause, luttant contre l'angoisse qui la gagnait à l'idée de toutes ces démarches.

— Mais en réalité... j'espérais que Gunther serait tenu à distance un moment, et je pourrais peut-être en profiter pour trouver un endroit plus sûr, mais ça demandera de l'argent et du temps...

Genzo tourna les yeux vers elle, son regard se durcissant légèrement à l'entendre parler de tout ce qu'elle devait affronter. Il pouvait presque entendre le poids de ses mots dans la manière dont elle les avait prononcés.

— Clara, je comprends que ça te semble être une montagne à franchir. Mais tu n'es pas seule. Tu n'as pas à tout affronter seule, tu sais.

Clara détourna le regard, la gorge nouée, incapable de répondre tout de suite. Elle savait qu'il avait raison, qu'elle n'était pas seule. Mais il y avait cette part d'elle-même, la part vulnérable, qui avait du mal à se détacher de ses inquiétudes.

— Je ne sais même pas si j'ai la force d'aller jusqu'au bout de tout ça... ajouta-t-elle dans un souffle.

Genzo serra brièvement le volant, ses doigts se crispant. Il voulait qu'elle sache qu'elle pouvait compter sur lui, mais il savait que ce n'était pas aussi simple. Ce qu'elle traversait était bien plus complexe, bien plus lourd.

— Clara, je ne vais pas te mentir, ça ne sera pas facile. Mais je suis là. Et je te promets qu'on ira jusqu'au bout, ensemble.

Il marqua une pause, avant d'ajouter, plus doucement :

— Et tu sais quoi ? Je ferai tout ce que je peux pour t'aider à t'en sortir. Pour que tu sois en sécurité, pour que tu puisses respirer enfin.

Clara tourna enfin son regard vers lui, une lueur de gratitude dans les yeux, bien que ses pensées soient encore un tourbillon.

— Merci... merci de ne pas me laisser seule.

Genzo lui sourit doucement, une tendresse dans le regard, tout en gardant les yeux fixés sur la route. Il savait que la route serait longue pour elle, mais il avait la ferme intention de l'accompagner à chaque étape. Peu importe combien de montagnes il faudrait franchir.

Clara était en train de préparer le repas avec Genzo, une ambiance détendue et agréable s'était installée dans la cuisine. Elle avait retrouvé un peu de sérénité après toute cette agitation. Les bruits de la maison étaient apaisants, et elle se sentait presque normale, entourée de la gentillesse de Genzo. Elle avait hâte de le remercier pour toute l'aide qu'il lui avait apportée. Après tout ce qu'elle avait traversé, cela lui semblait bien peu en comparaison.

Lorsqu'elle fit tomber une cuillère, ce fut un geste habituel, presque anodin. Mais en se penchant pour la ramasser, son pull se releva légèrement, laissant apparaître un bleu monstrueux sur le bas de son dos. Genzo, qui avait été distrait par la conversation jusque-là, ne s'attendait pas à cette vision. Un frisson de choc le parcourut en voyant l'étendue des dégâts.

Il resta figé un instant, incapable de détourner les yeux de la marque violacée qui traversait le bas du dos de Clara. Cela allait bien au-delà de ce qu'il imaginait, et bien au-delà des simples bleus que Jun lui avait décrits. C'était bien plus grave. Le silence qui suivit fut lourd de sous-entendus.

Clara, apercevant son regard fixe sur son dos, se redressa précipitamment, se sentant soudainement vulnérable. Elle chercha ses mots, sentant l'inconfort se mêler à la gêne.

— C'est... rien... ça... ça va. C'est juste un bleu, rien de grave...

Mais sa voix trahissait l'inconfort. Genzo, toujours sous le choc, n'eut pas besoin de plus pour comprendre. Sa mâchoire se crispa, et il tourna la tête, incapable de la regarder en ce moment précis. Il savait qu'il devait intervenir, que l'impunité de Gunther était inacceptable. Il s'avança lentement vers Clara, sans un mot.

— Clara, je suis vraiment désolé que tu aies dû supporter ça.

Sa voix était calme, mais ferme, et ses yeux trahissaient une profonde colère qu'il cachait du mieux qu'il pouvait. Il n'était plus question de simplement l'aider à faire face à Gunther. Il était prêt à tout pour l'empêcher de revivre ça.

— Je vais m'assurer que ce genre de choses ne se reproduise plus. Tu as mon engagement là-dessus.

Clara, surprise par la gravité de ses mots, croisa ses bras autour de son corps, comme pour se protéger. Mais en même temps, une sensation de soulagement s'empara d'elle, une sensation de sécurité qu'elle n'avait pas connue depuis bien longtemps. Elle s'efforça de sourire, bien qu'une émotion qu'elle n'avait pas encore acceptée emplissait ses yeux.

— Merci, Genzo... mais je ne veux pas être un fardeau pour toi.

Elle murmura ces mots, mais dans ses yeux brillait une lumière nouvelle, une lueur d'espoir, même si tout restait fragile. Genzo, touché par sa gratitude malgré la douleur qu'elle portait, lui répondit d'une voix assurée.

— Tu n'es pas un fardeau, Clara. Je serai toujours là pour toi.

Il n'ajouta rien de plus, car tout était dit. Ils n'avaient pas besoin de plus de mots, juste d'un soutien mutuel et d'une promesse que cette épreuve serait bientôt derrière elle.

Clara se sentit soudainement submergée par la honte. Le regard de Genzo sur son dos, ce bleu qui témoigna d'une violence passée qu'elle n'avait pas osée affronter, était comme un miroir qui lui renvoyait une image d'elle-même qu'elle détestait. Elle avait laissé Gunther la briser petit à petit, sans jamais trouver le courage de riposter. Ce fardeau qu'elle portait en silence depuis si longtemps la frappait de plein fouet.

Genzo, malgré son regard inquiet et bienveillant, ne faisait qu'accentuer son malaise. Il était trop gentil, trop généreux. Elle se sentait indigne de toute cette attention, et pourtant, elle n'avait jamais été aussi démunie de toute force pour repousser ce sentiment. Il l'avait vue dans sa plus grande faiblesse, et cela la déstabilisait plus que tout. Elle s'en voulait, profondément, de ne pas avoir été plus forte, de ne pas avoir su se protéger.

Son cœur battait plus fort dans sa poitrine, et ses pensées se tournaient en boucle, tentant de trouver un moyen de remettre de la distance entre elle et Genzo. Si elle s'approchait trop de lui, si elle s'ouvrait trop, elle risquait de tout gâcher. De nouveau, les murs qu'elle avait érigés autour de son cœur se remettaient en place, solidement ancrés. Elle ne voulait pas lui montrer à quel point elle était vulnérable. Elle refusait de le laisser voir à quel point elle se sentait perdue.

Clara détourna les yeux, se sentant envahie par la honte. Elle aurait préféré que Genzo ne voit jamais ce qu'elle cachait sous ses vêtements. Cette faiblesse, cette douleur, tout ce qu'elle aurait dû affronter plus tôt mais n'avait pas osé. Les papillons dans son ventre se transformèrent en nœuds douloureux. Comment pourrait-elle lui faire face maintenant, après avoir vu son regard sur elle ? Elle aurait aimé tout effacer, tout recommencer. Mais c'était trop tard.

Elle se força à reprendre un air détaché, tout en sachant que son sourire était fragile, qu'il ne cachait pas ses émotions. Sa voix tremblait légèrement lorsqu'elle parla, mais elle tenta de dissimuler son malaise.

— Ce n'est rien, Genzo. C'est juste un bleu. Je vais... je vais finir le repas.

Elle se remit à préparer le repas, les mains légèrement tremblantes. Elle ne pouvait plus regarder Genzo comme avant. Il avait vu la vérité, et ça lui faisait trop mal. Elle avait besoin de reprendre le contrôle, de remettre les choses en place. Et pour cela, il valait mieux garder une distance.

Pourtant, au fond d'elle, une petite voix lui disait que Genzo n'était pas comme Gunther. Mais cette petite voix se noyait dans le tumulte de ses pensées et de ses peurs.

Le repas se déroula dans une atmosphère lourde, presque oppressante. Genzo tenta à plusieurs reprises d'engager la conversation, posant des questions anodines ou partageant des anecdotes légères pour détendre l'atmosphère. Mais Clara se contentait de répondre par des phrases courtes et mécaniques, sans vraiment s'investir.

— Oui, c'est bon, merci.
— Ah oui ?
— Non, rien de spécial.

Ses réponses, toujours succinctes, fermaient la porte à toute tentative de discussion. Genzo, frustré, sentit son impuissance grandir à mesure que le silence s'installait. Elle ne levait même plus les yeux vers lui, se concentrant uniquement sur son assiette. C'était comme si un mur invisible s'était dressé entre eux.

Quand le repas fut terminé, Clara posa ses couverts avec un soupir à peine audible. Elle releva brièvement la tête et dit d'un ton neutre :
— Merci pour le repas, Genzo. Je suis fatiguée... Je vais aller me reposer.

Sans attendre de réponse, elle se leva et disparut dans la chambre qu'elle occupait, refermant doucement la porte derrière elle.

Genzo resta là, assis à la table, incapable de bouger. Il fixait l'endroit où Clara s'était tenue quelques instants plus tôt, se demandant ce qui avait bien pu provoquer ce changement brutal. Tout se passait bien avant... Alors pourquoi s'était-elle refermée d'un coup ? Il repassa la soirée dans sa tête, cherchant désespérément une explication. Rien ne lui semblait logique.

Au bout de quelques minutes, il se leva et se dirigea vers le canapé. Il s'assit lourdement, passant une main dans ses cheveux, frustré et démuni. Il détestait cette situation, cette distance soudaine qu'il ne comprenait pas. Après un moment d'hésitation, il saisit son téléphone et appela Jun.

— Genzo ? Quelque chose ne va pas ? demanda Jun, la voix légèrement inquiète.

— Clara, elle s'est renfermée d'un coup... Elle ne veut plus parler. Elle s'est retirée dans sa chambre, et je ne comprends pas pourquoi, expliqua Genzo, la voix teintée de frustration.

— Ça ne m'étonne pas, répondit Jun calmement. Son parcours ne sera pas simple, Genzo. Ce qu'elle traverse, c'est un mélange d'émotions qu'elle a réprimées pendant longtemps. Il y aura des hauts et des bas. Et parfois, des choses que tu feras, même sans mauvaise intention, pourront la faire se sentir vulnérable ou en danger. Tu dois être prêt à ça.

Les mots de Jun résonnèrent dans l'esprit de Genzo. Il repensa à la soirée, cherchant ce qu'il aurait pu dire ou faire pour la bouleverser à ce point. Puis, soudain, tout devint clair. Les bleus. Il avait vu les marques sur son dos. Ces preuves tangibles de la violence qu'elle avait subie. Elle s'était fermée immédiatement après cet incident.

Il serra les poings, une colère sourde montant en lui. Pas contre Clara, mais contre Gunther. Contre tout ce qu'il lui avait fait subir, la peur qu'il avait semée en elle. Et contre lui-même, pour ne pas avoir réalisé plus tôt à quel point cela pouvait la mettre mal à l'aise.

— Elle n'a pas à se cacher de moi, murmura-t-il, presque pour lui-même. Je veux qu'elle sache que je ferai tout pour elle, qu'elle n'a pas à avoir honte ou peur.

Jun, ayant entendu sa déclaration, répondit doucement :
— Alors montre-lui, Genzo. Pas en paroles, mais en actes. Sois patient. Sois là pour elle, quoi qu'il arrive.

Genzo acquiesça, même si Jun ne pouvait le voir. Il raccrocha peu après et resta quelques instants à réfléchir. Il savait que ce serait un chemin long et compliqué, mais il était prêt, il ferait tout ce qu'il fallait pour lui prouver qu'elle pouvait compter sur lui.