S'il était tout à fait honnête, cette déclaration d'amour fraternel envers Satoru l'embarrassait avec le recul, mais il pensait chacun des mots prononcés, malgré tout.

« Tu es Arashi Gojo, l'Enfant prodige, n'est-ce pas ? » une voix féminine parla, le ramenant au présent.

Il se détourna de l'eau calme sur laquelle reposaient de ravissantes fleurs écloses de Lotus sacré pour rencontrer le regard d'une jeune fille, habillée de manière élégante et traditionnelle, comme l'exigeait les codes sociaux du milieu des Trois Grands Clans et des autres familles d'exorcistes. Ses yeux ambrés étaient animés par une curiosité sincère, ne contenant aucun des sentiments négatifs auxquels il était habitué.

Instinctivement, il prit un court instant pour l'examiner, ses yeux écarlates prenant vie alors qu'ils transféraient à son cerveau toutes les informations que cette fille ne pouvait leur cacher.

Environ de trois ans son aînée, vêtue d'un kimono rose brodé de motifs floraux, une chevelure sombre aux reflets violacés coiffée en deux couettes lâches et un bracelet à grelots sur chaque poignet. Une force occulte considérable, mais peu impressionnante pour un exorciste de son acabit, semblable à une goutte d'eau dans un océan.

« Et je présume que tu es Utahime... L'héritière Iori. » dit-il d'un ton plus froid qu'il ne l'aurait voulu, se remémorant avec un soupçon de pitié leur rencontre du début de la journée. « Mes excuses pour le comportement de mon frère. Il n'a pas l'habitude que quelqu'un d'autre que moi le traite comme un enfant ordinaire. »

Elle parut surprise.

« Oh... Ce... Ce n'est rien ! » bafouilla-t-elle avec embarras, agitant les mains.

« Il t'a rabaissée publiquement, te traitant de "faible sorcière qui cherche à me séduire pour mon pouvoir"... » rétorqua-t-il. "Je dois te dire que je ne m'attendais pas à une gifle pour réponse. »

« Tu n'es pas furieux ? »

Sa voix contenait un mélange de crainte et de confusion.

« Pourquoi le serais-je ? » demanda-t-il avec sincérité, penchant la tête sur le côté.

« Et bien... Quand des enfants du clan Zenin l'ont insulté tout à l'heure, tu les a frappés. Assez durement, d'ailleurs... »

Il rit, amusé par le léger tremblement dans son ton. De toute évidence, son pouvoir l'avait quelque peu intimidée, même si elle faisait de son mieux pour le dissimuler. Dommage pour elle qu'il soit né avec des yeux qui pouvaient tout voir.

« Il y a une différence entre manquer de respect à Satoru, et le remettre à sa place comme tu l'as fait. Tant que tu demeures dans cette catégorie, il n'y rien à craindre de moi, petite fleur. »

« Ne m'appelle comme ça ! » s'écria-t-elle, le rouge colorant ses joues. « Je suis plus âgée que toi ! Tu me dois le respect ! »

Arashi souriait tel un loup, mais intérieurement une certaine joie l'emplissait. C'était agréable de converser avec quelqu'un qui semblait si... vivant. Utahime était tendre, rayonnante, si pleine de vie. Si opposée aux regards ternes qu'il connaissait et leurs insipides propriétaires... La clique de réactionnaires séniles à la tête du clan. Le caractère naturellement irritable d'Utahime, qu'elle tentait à l'évidence de maîtriser avec son éducation traditionnelle, ne nuisait en rien à son charme, loin sans faut. Pour leur part, les serviteurs étaient à peine mieux que les anciens, à l'exception d'Akiko, mais là encore la faute incombait auxdits anciens et à leur nature conservatrice.

Ces pensées le firent grincer des dents, et serrer le poing qui tenait une autre pierre.

« Mais le respect ne se doit pas, petite fleur. » répliqua-t-il, forçant toute émotion hors de son ton. « Il se gagne, au même titre que la confiance. Là est la nuance que ces momies décrépites qui nous servent de dirigeants sont incapables de saisir. »

Il l'entendit haleter de pur choc face à son insolence, amenant un nouveau sourire narquois sur ses lèvres.

« Puisque l'on parle des aînés, » commença-t-elle, sa voix tournant vers une désapprobation presque maternelle, « tu ne devrais pas assister à la réunion et la cérémonie ? »

« Ces formalités sont aussi longues qu'ennuyeuses. Je préfère profiter de ces jardins plutôt que perdre des heures de mon temps à écouter ces discussions insipides empestant la politique. » Il retourna à la contemplation des fleurs de Lotus dans l'étang. « De toute façon, je ne suis pas l'héritier et les vieux croulants ne me laisseront jamais occuper une place importante, pas que je m'en plaigne. Ce serait donc parfaitement futile d'y assister, surtout quand je peux me consacrer à des activités plus importantes. »

« Mais tu vas être puni pour cela ! »

Il lui jeta un regard ennuyé.

« Suis-je censé m'en soucier ? »

Utahime ouvrit la bouche pour rétorquer, mais aucun mot, et encore moins d'arguments ne lui vinrent, l'incitant à la refermer. Finalement, peut-être à force de rester debout, elle s'assit près de lui.

Au bout de plusieurs minutes, Arashi réengagea la conversation, surpris par la gêne à laquelle le silence entre eux l'induisait.

« Ton énergie occulte est particulière. » lâcha-t-il sans réfléchir, sa perception sensorielle lui ayant permis de détecter comme une sorte d'anormale chaleur douce dans cette essence trouvant pourtant sa source dans la négativité des sentiments.

« Je ne suis pas faible ! » lui cria-t-elle, le surprenant.

« Je n'ai rien dit de tel. » grogna-t-il, furieux de l'accusation implicite. Il la regarda de haut en bas, le menton levé. « Mais maintenant que tu l'as fait remarquer... »

Elle lui jeta de l'eau au visage, et partit en trombe, ses couettes se balançant derrière elle.

« Les femmes... » marmonna-t-il agacé, en jetant avec force une pierre dans l'étang.

« Arashi ! »

Une paire de bras s'enroula autour de son cou, alors que le ton enjoué de son jumeau chantait à ses oreilles sensibles.

« Tu as pris un bain ? » demanda Satoru avec confusion, sentant l'humidité de ses cheveux.

« Non, on m'a juste jeté de l'eau à la figure. »

Il sentit l'étreinte protectrice de son frère se resserrer autour de lui.

« Qui ? »

Il roula des yeux, mais souriait toujours. C'était à la fois amusant et attachant de voir Satoru jouer les protecteurs.

« Une fille très aimable avec un penchant à la violence. »

Satoru ne répondit pas, mais Arashi jura sentir ses joues gonfler contre son visage, le rendant confus et l'amenant à s'interroger sur sa présence.

« Tu ne devrais pas être à la réunion, à aider les vieux à ridiculiser le clan Zenin et recevoir des leçons civiques ? En tant qu'héritier et futur chef, c'est ta responsabilité d'apprendre la politique des Grandes Familles et à garder notre lignée sur le piédestal de l'exorcisme. »

« Mais c'est tellement ennuyeux ! Je préfère m'entraîner avec toi, petit frère ! »

Arashi sourit doucement. Satoru lui rappelait un peu Izuna à l'époque où celui-ci traînait encore dans les hakama de son frère aîné, littéralement : si innocent et joyeux. Il était sincèrement ravi que les instructeurs du clan ne parviennent pas à effacer la nature ludique et enjouée de son jumeau, une des rares choses que leur mère leur avait laissées.

Un nœud se forma dans sa gorge, et une larme solitaire coula sur sa joue.

Madara n'aurait pas pleuré pour une simple pensée sur l'un de ses parents défunts, par mépris de la "faiblesse", mais le fantôme des Uchiwa avait eu toute une vie pour apprendre à ne plus laisser ses émotions et ses sentiments paraître. Une vie avec laquelle Arashi ne s'était pas encore totalement réconcilié, souhaitant profiter encore un peu de cette enfance à laquelle il n'avait jamais eu droit en tant que shinobi. Madara, lui, avait appris à manier une arme dès l'instant où il avait été en âge de marcher. Arashi avait eu la chance de pouvoir profiter des cinq premières années de sa vie en compagnie de sa mère et son frère, sans avoir à réellement se soucier de son avenir de rempart protégeant l'humanité des fléaux, créant ainsi quelques souvenirs de joie auxquels s'accrocher dans un environnement aussi malsain que celui de leur clan. Les Uchiwa avaient au moins la décence de traiter leurs enfants comme des personnes, et non comme de simples armes vivantes ou objets de prestige.

« Maman me manque aussi. » murmura Satoru, comme s'il lisait dans ses pensées, si bas que Arashi n'aurait pu l'entendre s'ils n'étaient pas serrés l'un contre l'autre.

Peut-être que les mythes entourant ce lien profond qui unissait les jumeaux n'était pas que de simples légendes...

« Je ne lui pardonnerai jamais de l'avoir traitée comme il l'a fait lorsqu'elle nous a quittés. » jura-t-il, sa force occulte bouillonnant sous sa peau.

Satoru grogna en accord.


Leur séjour au sanctuaire Iori se rallongea. D'après Akiko, c'était une décision venant de Takarô Gojo, l'actuel chef du clan et donc grand-père des jumeaux, une mesure de sécurité en raison de ce que Arashi avait deviné être les primes placées sur sa tête et celle de son frère. Par conséquent, ils étaient tous deux devenus les cibles de choix des maîtres des fléaux de l'ensemble du Japon, des sorciers qui usaient de leurs pouvoirs pour vivre aisément du crime, et que les exorcistes opérant sous la direction du Haut Commandement occulte étaient essentiellement incapables d'appréhender, en raison de la charge à peine supportable que représentaient les fléaux et les esprits vengeurs à eux seuls.

Grâce à l'expérience de sa vie passée, Arashi comprenait parfaitement les raisons pour lesquels lui et Satoru étaient visés par ces misérables : leur potentiel en tant que futurs sorciers de Classe Spéciale et l'influence qu'ils finiraient inéluctablement par acquérir, de par leur statut social et leur puissance. Pour le moment, ils ne représentaient pas encore la force imparable qu'imaginaient déjà les anciens du clan – ils n'avaient que six ans, après tout –, mais ce n'était qu'une question de temps avant que leur existence ne fasse définitivement penchée la balance des pouvoirs du côté du Haut Commandement, privant ainsi les pratiquants criminels de l'exorcisme de leur autonomie et de cette vie paisible dont ils jouissaient depuis des décennies déjà.

Naturellement, ces derniers comptaient bien éviter qu'une telle chose se produise, et de leur côté, les dirigeants de la société occulte, plus particulièrement ceux appartenant au clan Gojo, avaient la ferme intention d'utiliser le Sixième Œil et les Yeux de Samsâra pour gagner en pouvoir et en influence, aussi bien sur la communauté exorciste que sur la société japonaise dans son ensemble.

Le prolongement de la durée de leur temps au sanctuaire ne dérangeait pas les jumeaux, et encore moins Satoru, qui avait beaucoup plus d'occasions d'échapper à ses instructeurs ennuyeux pour s'entraîner avec Arashi, au mécontentement de leur père, pas qu'aucun des deux ne s'en souciait le moins du monde. C'était également l'opportunité de connaître d'autres enfants, qui n'appartenaient pas à leur clan, comme la jeune prêtresse et héritière Utahime, qui semblait intensément fasciné Satoru depuis qu'elle l'avait giflé pour être un "petit morveux gâté et prétentieux".

Arashi avait conscience de l'origine de cet intérêt. Toutes les personnes que Satoru avait rencontrées avant elle ne souhaitait être ami avec lui que pour la simple raison qu'il était l'Honoré ; ils convoitaient son pouvoir ainsi que la gloire et la fortune dont il hériterait. Le monde entier désirait l'Honoré, mais personne ne connaissait Satoru Gojo, à l'exception de son frère, de sa mère et de sa nourrice, devenue comme une figure de sœur aînée. De plus, depuis sa naissance, le clan entier le traitait davantage comme leur objet de prestige le plus précieux que comme un être humain, sans jamais se soucier de ses sentiments, ne lui accordant de l'attention que pour des éloges ou des réprimandes quant à son comportement "enfantin".

Par les dieux, c'était précisément ce qu'était Satoru : un enfant ! Un jeune enfant sans père qui venait de perdre sa mère, et à qui l'on reprochait de ne pas prendre son devoir de protecteur du monde au sérieux.

Utahime avait été la première à le traiter comme une personne ordinaire en dehors de sa famille. Pour elle, il n'était qu'un enfant comme un autre, avec un orgueil déjà bien trop grand pour son âge, et elle n'avait de toute évidence aucun souci à répliquer et s'opposer à lui.

L'environnement dans lequel grandissaient les jumeaux était terne et insipide ; le domaine des Gojo était peut-être leur lieu de naissance, mais il n'avait rien d'un foyer, encore plus maintenant que leur mère, la seule lumière de leur vie, n'était plus. Malgré les dizaines de personnes qui y résidaient, c'était un endroit sans âme, où l'on ne vivait pas. On existait simplement.

Et Utahime, elle... Elle était rayonnante, pas seulement en raison de sa force occulte magnifique qui dansait autour de son corps comme la mélodie de la plus douce et harmonieuse des musiques, hypnotisant les deux frères car ils étaient les seuls à pouvoir la contempler, et si pleine de vie. Elle était une lueur dans la nuit qui les attirait tels des papillons avec une lanterne.

Hélas, la stratégie d'adaptation de Satoru pour gérer sa nervosité face à Utahime prenait la forme de taquineries plutôt malicieuses qui, couplées au caractère irritable de la jeune miko et ses réactions ridiculement émotives, ne faisaient que l'inciter davantage à se glisser sous sa peau, ce qui n'arrangeait pas l'opinion de la jeune fille à son égard. Pour sa part, Arashi trouvait leurs interactions particulièrement distrayantes, même s'il devait bien reconnaître que de temps à autre Satoru exagérait.

Ce qu'il trouvait amusant et même attachant, c'était que son jumeau ne recourait aux taquineries que lorsque Utahime conversait avec quelqu'un d'autre, était occupée par ses devoirs de jeune prêtresse ou lors de ses entraînements, comme s'il ne supportait pas que son attention soit tournée vers quelque chose d'autre que lui-même.


« Pourquoi ne peuvent-ils pas tout simplement accepter de nous entraîner tous les deux ? » se plaignit Satoru alors qu'il pratiquait quelques mouvements d'arts martiaux avec Arashi. « Tu es aussi bon que moi ! »

Et c'était vrai. Arashi n'avait peut-être pas hérité de l'Infini ou du Sixième Œil, mais son propre don oculaire ne pouvait envier quoi que ce soit à ses yeux, hormis la réduction de l'énergie occulte consommée lors du lancement d'un sort à un chiffre infiniment proche de zéro, chose qui importait peu en raison de l'immensité des réserves d'Arashi. La quantité d'énergie dont il disposait était absolument incalculable, surpassant de loin la sienne, ce qui constituait d'ailleurs un outil d'intimidation plutôt efficace. Son jumeau était un monstre en devenir, tout autant que lui.

Il l'avait prouvé plus tôt lors d'une séance avec un combattant expérimenté de presque deux fois sa taille et de plusieurs fois sa masse musculaire, en faisant essentiellement de celui-ci son mannequin d'entraînement personnel, sous les regards respectivement inquiet et calculateur d'Akiko et de leur grand-père, mais aussi l'œil attentif des aînés. Arashi avait compensé l'écart entre ses capacités physiques et celles de son adversaire par un renforcement parfait de son corps, le baignant dans un flux constant d'énergie occulte sans en gaspiller la moindre goutte ni laisser la possibilité à quiconque de prédire ses attaques, ce qui représentait un exploit que bon nombre de sorciers aguerris ayant des décennies d'avance sur lui dans l'exorcisme ne pouvaient même espérer reproduire. De plus, une autre chose que Satoru et certainement chaque spectateur du duel avec un minimum d'expérience en combat rapproché avaient pu remarqué était son instinct. Là où les autres enfants, y compris lui-même, hésitaient ou réfléchissaient encore de manière inconsciente à la meilleure façon de frapper et de bouger, Arashi lui avait sauté cette étape, comme s'il savait naturellement se battre. Ses mouvements étaient fluides, précis et majestueux, semblable à une rivière ou une danse. Une danse mortelle.

Bien entendu, cette danse n'avait pas été sans défaut, malgré les capacités prédictives des Yeux de Samsâra ; Arashi avait encaissé plusieurs coups, et manqué quelques rares fois sa cible, mais grâce à son Sixième Œil, Satoru comprenait la raison de ces petites imperfections, ou du moins il la théorisait comme étant les limites physiques actuelles de son jumeau, qui empêchaient son corps de suivre le rythme de ses yeux et de sa force occulte. Après tout, il n'était pas possible de renforcer un récipient de verre au point de le rendre aussi durable que du diamant.

Néanmoins, cela n'avait pas empêché Arashi de recevoir des éloges de la part d'adultes pour la première fois de sa vie, ce que Satoru considérait comme le premier pas vers la reconnaissance de la valeur de son frère par le clan.

« Peut-être, oui. » admit Arashi avec ennui, esquivant aisément la frappe de son frère. « Mais mon sort inné ne s'est pas encore manifesté, et ils attendent depuis si longtemps la renaissance du Sixième Œil ». Il dévia la suivante, avant de le repousser. « Alors, ça n'a rien de surprenant qu'ils s'intéressent davantage à toi qu'à moi. »

Satoru grommela alors qu'il se relevait. Son jumeau avait tellement changé au cours des deux dernières années. Auparavant, il fallait toujours qu'Arashi reproduise les réussites de Satoru pour prouver à tous qu'il pouvait lui aussi le faire, qu'il déploie chaque effort possible pour perfectionner ses compétences et gravir les échelons de la hiérarchie du clan, avec également l'intention d'obtenir des miettes de l'affection de leur père et l'approbation des anciens.

« Tu ne te soucies plus de prendre la tête du clan ? »

Arashi le regarda d'un air vide, avant de déclarer d'un ton monotone : « Non. Les vieux croulants et notre géniteur peuvent bien penser ce qu'ils veulent, ça m'est complètement égal. »

Surpris, Satoru baissa les yeux vers le sol, avant de demander d'une petite voix.

« Est-ce que ça veut dire que tu ne veux plus être exorciste avec moi ? »

Ce fut à cet instant qu'il sentit son frère l'enlacer avec force, lui déversant chaque once de son amour si profond.

« Te souviens-tu de notre serment fait à maman ? »

Il hocha la tête dans le cou de son jumeau, retenant à peine une larme.

« Alors, tu sais que je resterai toujours à tes côtés, quoi qu'il advienne. Si tu deviens exorciste, je le serai aussi. Si tu décides de fuir cette vie de pilier de la société, je te suivrai. Nous sommes frères, Satoru. Les frères se protègent et se soutiennent entre eux. Même si tu venais à devenir un maître des fléaux ou l'une de ces misérables ordures qui dirigent notre monde, je ne t'abandonnerai pas. »

Satoru sourit doucement, honteux de sa stupide peur irrationnelle.

« Arashi... » murmura-t-il timidement.

« Oui ? »

« Tu... Tu accepterais d'être mon ombre ? »

Le cadet se détacha juste assez pour regarder directement son aîné, son expression surprise avant qu'un doux sourire ne se forme sur son visage.

« Je le suis déjà. Tu es le Yang, et moi le Yin. Les deux parties d'une seule et même chose, liées ensemble à jamais. »

« Petit frère, tu es si mignon ! » s'écria Satoru avec béatitude, l'étouffant presque avec son étreinte. « Sois mon ombre pour toujours ! »

« J'aurai un peu de mal si tu m'empêches de respirer. » articula Arashi, désormais ennuyé.

Ils entendirent alors un rire amusée. Leur tête se tourna vers la source de ces expirations, ce qui fit rougir Satoru et l'incita alors à se détacher immédiatement d'Arashi.

« Qu'est-ce que tu fais là, Utahime ? »

« Je vis ici, au cas où tu l'aurais oublié, Honoré du monde. » répondit la miko, souriant jusqu'aux oreilles devant la gêne du Gojo. « Pourquoi t'es-tu éloigné de ton frère chéri ? Aurais-tu honte que le commun des mortels sache que tu es un petit garçon attaché à la hanche de sa moitié ? »

Arashi gloussa. Même si les taquineries pouvaient sembler plutôt blessantes, il savait que puisqu'elles venaient d'Utahime, Satoru les verrait simplement comme une revanche pour ses propres taquineries et un coup dur à son ego. De plus, la jeune prêtresse était trop gentille pour causer volontairement du mal à qui que ce soit.

Il n'avait pas honte d'admettre que voir quelqu'un d'autre que lui se glisser sous la peau de son frère de la sorte provoquait en lui un certain amusement.

Irrité, Satoru ne tarda pas à répliquer.

« Non, j'avais simplement oublié qu'une présence aussi faible que la tienne pouvait échapper à mon Sixième Œil. »

Le sourire d'Utahime disparut aussitôt, remplacé par un air renfrogné. Elle se dirigea vers l'Honoré, un brasier ardent brûlant dans son regard.

Alors que les deux se rendaient verbalement coup pour coup, Arashi s'était tranquillement assis pour profiter du spectacle, se sentant véritablement heureux pour la première fois depuis un siècle et souhaitant que cela puisse durer éternellement, malgré le pessimisme et le réalisme cynique de Madara développés par des décennies de guerre et de souffrance qui lui criaient cruellement qu'un tel désir était impossible.