Prisonnier

Chapitre 01 : Plus d'un an

-Pitié, j… je ferais comme si je ne savais rien.

Je tranchai la gorge d'un coup de griffe et regardai le journaliste se vider de son sang sur le plancher de la maison. Avant que son corps ne s'écroule à côté de celui de son Pokémon. Il avait fouiné où il ne fallait pas et ils allaient en payer le prix.

Je me retournai vers sa femme et son enfant, terrorisés. La mère m'implora de lui laisser la vie sauve. Mais les ordres étaient les ordres, il ne fallait aucun survivant.

Une fois sûr qu'il n'y ait plus d'âme vivante dans le bâtiment, je jetai les corps sur le lit. J'y mis le feu, avant de faire de même avec le bureau. Enfin je pris la direction de la cuisine pour allumer la cuisinière et fermé la porte. Quand l'incendie atteindra la pièce remplis de gaz, l'explosion ferait partir en cendres le reste de la maison.

Je sortis rapidement par la porte de derrière et m'envolai aussitôt. Mes ailes et mes habits noirs me permettaient de me rendre invisible dans le ciel nocturne. Je me posai sur le toit d'un bâtiment voisin pour m'assurer de la destruction de l'habitation. Comme prévu, l'incendie gagna en intensité et bientôt une forte explosion fit voler les murs et le toit de la maison. Ma mission était accomplie, il était temps de rentrer. Je fis au plus vite en raison de la neige qui commençait à tomber.

J'avais fait comme l'on m'avait appris. J'étais entré, j'avais frappé et étais aussitôt repartis tel un courant d'air. Ils m'avaient façonné comme ils le voulaient, j'étais l'assassin dont ils avaient besoin.

Je me rappelai vaguement mon arrivée au centre, c'était il y a plus d'un an. J'étais stupide et faible à ce moment-là. Je repensais à mes tentatives désespérées d'évasions et des punitions qui avaient suivis. Heureusement, je m'étais vite calmé et que je m'étais plié à leur volonté.

Le début avait été difficile, mes journées étaient partagées entre l'entraînement, les soins et le repos. Je n'avais pas vu les mois passés, préoccupé à répondre aux ordres pour éviter de recevoir les contraintes de la Pokéball. Je n'avais pas eu le temps de me morfondre sur ce que j'avais laissé derrière moi. Et je ne voulais plus y songer aujourd'hui.

Ils avaient été plus malins, ils avaient enlevé mon Pokématos pour me relâcher avant de me capturer. J'ignorais ce qu'il était advenu de Néo et des autres. Ils avaient dû refaire leur vie depuis le temps. Sauf mon Nidoking, au moins il n'était pas avec Neil. Ce dernier il était venu me narguer à plusieurs reprises. Notamment pour se vanter d'être devenu Maitre de la Ligue et de pouvoir me donner des ordres pendant un combat. Comme si cela aller changer quelque chose pour moi. Ce n'était qu'un pantin, encore utile pour eux. Mais un jour, ils le remplaceront.

J'avais, au fur et à mesure de mes contacts avec Drake, récupéré par morceaux la mémoire de Dereck. Cela avait failli me rendre fou. Nos personnalités n'avaient pas arrêté de permuter, je ne savais plus ce qui était le présent, le passé, lui ou moi.

Puis il y avait eu notre première fois, celle que l'on n'oublie jamais. C'était un membre de la team Rocket qui semblait ne plus adhérer à leur valeur et s'était mis à leur mettre des bâtons dans les roues. J'avais beau avoir enfermé mes émotions au fond d'une boite depuis cet événement me troublait toujours. Je m'en souvenais comme si c'était hier.

On m'avait emmené dans sa cellule, le pauvre humain était déjà mal en point. Il avait été attaché à une chaise et son visage déformait été la preuve qu'ils avaient voulu le faire parler. Puis on m'avait demandé de le tuer. J'avais résisté, lutté, fait mon possible pour ne pas le faire. Mais la punition de la Pokéball pour mon refus été trop douloureuse et j'avais craqué. Depuis Dereck avait disparu, il ne restait que moi et ses souvenirs.

J'avais été créé pour être une arme. Une qui répondrait sans poser de question à son maître. Et des maîtres j'en avais, je devais obéir à tous les humains de la base. J'étais redevenu Dereck, leur hybride à tout faire, leur esclave. Rei n'avait été qu'un moment de liberté, un rêve.

Mes semblables m'enviaient pour cela et me rappelaient sans cesse que je n'étais pas un « Dieu » et que je devais toujours leur obéir. Car il n'y avait pas pire pour eux que de se prendre pour ce que l'on n'était pas.

Pendant les premiers mois, Drake m'ignorait sauf pendant les entraînements ou il prenait un malin plaisir à me montrer qu'il était le plus fort. Avec le temps, nos rapports s'étaient un peu amélioré, mais ce n'étais pas de mon initiative.

J'avais ensuite rencontré Flora, ses cheveux verts et sa jolie fleur rose sur le côté de sa tête lui donnaient une apparence avenante. La vérité était tout autre, c'était un véritable monstre. Elle se délectait de la souffrance de ses victimes, ce qui rendait ses interrogatoires terribles et atrocement longs. J'en savais quelque chose pour m'être retrouvé une fois dans ses lianes. Il ne lui avait pas fallu longtemps pour me faire cracher les Aspicot du nez. Je l'avais beaucoup crains, puis cela s'était arrêté le jour où j'étais arrivé à tout mettre dans une boite. Où j'étais devenu le monstre qu'ils voulaient.

Il y avait aussi Torky, un garçon chauve mais très costaud. Sûrement à cause de son dos qui formait une drôle de bosse marron plus dur que la pierre, lui donnant une posture de bossu. Ce qui me perturbait le plus était les deux canons gris qu'il sortait selon ses envies. Ils n'étaient pas très grands mais l'eau qui en sortait était d'une puissance redoutable.

Enfin la dernière que j'avais rencontrée jusque-là était Heia. Contrairement à nous, sa « Maman » ne l'avait jamais appelée Rouka, avec le temps tout le monde s'était habitué à l'appeler par cet autre prénom. Son caractère était tout l'opposé de Flora. Elle était toujours calme et parlait peu. J'appréciais justement pour ça sa compagnie, on pouvait rester des heures à ne rien dire. Elle avait de grandes ailes marrons sur l'extérieur et beiges à l'intérieur. Ce n'était pas le seul endroit où elle avait des plumes. Elle n'avait pas de bras mais savait se débrouiller avec ses trois excroissances griffues situées au niveau de l'articulation centrale de son aile. Ses cheveux longs présentaient deux mèches roses et jaunes de chaque côté de la tête alors que tout le reste était blond.

Nous aurions dû être sept, mais seul deux restaient encore perdu dans la nature. Sablo et Raika, je ne me féliciterais jamais assez d'avoir envoyé Chu prévenir cette dernière. Raika, ou plutôt Pixie pourrait continuer à vivre loin de cet enfer. J'avais tenté de ne rien dire mais les méthodes de Flora étaient à toute épreuve. Plus jamais, on ne me laissera à nouveau impuissant face à elle, plus jamais.

J'atterris en grelottant sur le toit de la base et entrai. La porte n'était jamais verrouillée, après tout qui serait assez fou pour venir dans ce trou perdu? Moi, j'avais juste la permission de sortir, si j'étais obéissant.

Dès que je fus à l'abri, je montais la température de mon corps pour me sécher, avant de descendre les marches. J'arrivais à l'étage réservé à l'humain. La planque était souterraine, cet étage était le seul visible de la surface mais aussi son seul accès. Celui du dessous était aussi réservé aux humains, c'était leurs logements de fonctions je crois … je n'ai jamais eu l'occasion de le voir. Le seul endroit où les hybrides avaient l'autorisation de circuler était le sous-sol.

Dire que les autres considéraient les humains comme des Dieux, les appelant Maître à chaque fois. Pour eux nous étions des monstres, sauf que c'était eux les véritables monstruosités sur cette planète. Ils se croyaient supérieurs, pouvoir nous apprendre, nous éduquer, alors qu'ils avaient tout faux.

Ils ne pensaient qu'à eux, ils étaient égoïstes, se donnant des excuses pour justifier leurs actes. Neil et Lyra n'avait pas contourné à la règle. Je me ferais une joie de les réduire en cendres le jour où j'en aurais l'autorisation.

Tel un robot, je me dirigeai vers le bureau de Laure, la responsable de la planification. Si quelqu'un savait ce que l'on faisait à toute heure de la journée, c'était elle. Ses ordres passaient par-dessus ceux des autres. C'était, par ce fait, ma plus grande ennemie. Une fois devant sa porte, je frappai malgré l'heure tardive.

-Entre.

Je pénétrai dans son bureau où les murs étaient tapissés d'étagères remplis de classeurs. Puis me mis à genoux, une de ses étranges lubies que je me ferais une joie de lui apprendre à coup de poing. Mon plus grand rêve serait qu'elle se fasse écraser par sa paperasse et qu'elle s'y noie dedans. Elle tapota un instant sur son clavier avant de concentrer son attention sur moi.

-Au rapport.

-La mission a été accomplie. J'ai neutralisé le journaliste ainsi que sa famille. A l'heure qu'il est, sa maison ne doit plus être qu'un tas de cendre.

-Et les documents ?

-J'ai mis le feu à son bureau, je doute que quelqu'un puisse retrouver quelque chose.

-Bien, c'est parfait. Des témoins ?

-Non, cela m'a pris moins de cinq minutes.

-Parfait. Demain après midi, tu iras à ta visite médicale et Vulcain t'entraînera.

-Oui, Maître.

-Tu peux disposer.

Je me relevai et quittai son bureau pour regagner le sous-sol, notre maison. Il ne s'agissait pas vraiment d'un lieu fait pour nous, mais plutôt pour nous donner un faux sentiment de liberté. La moitié était une salle d'entraînement avec une salle de soin et l'autre notre lieu de vie. Tout était blanc, hormis la salle commune dont les murs étaient peints en vert. L'extérieur avec ses couleurs et ses grands espaces étaient une récompense.

Le seul accès était une porte rouge. Nous pouvions sans problème la détruire avec nos pouvoirs mais … comme pour le reste nous avions pour ordre de ne pas la franchir si on ne nous y autorisait pas.

Je la regardai sachant que je ne pouvais rien faire d'autre et me résignai à rentrer à la « maison ». Je descendis le petit escalier et arrivai dans la salle commune. Elle était vide à cette heure de la nuit. Elle comportait une grande table centrale où l'on pouvait prendre nos repas, et le coin détente avec une bibliothèque remplie de livres d'images en mauvais état, deux grands canapés qui étaient bien usés et une télévision neuve. C'était l'unique animation ici, elle ne diffusait que des combats d'arène. Ils pariaient sur les dresseurs, les Pokémons, faisant souvent des commentaires plus ou moins morbide. En cas de mésentente, ils allaient régler leur compte dans la salle d'entraînement. Ils tentaient de s'occuper comme ils le pouvaient dans ce petit monde.

Je continuai ma route pour arriver dans le dortoir. L'endroit était aussi grand qu'un placard, mais contenait ce dont on avait besoin : nos Pokéballs. Elles quittaient rarement le meuble sur lequel elles étaient posées, c'était uniquement quand on devait accompagner un de nos Maîtres dans leur missions.

Pour moi, c'était le seul endroit accueillant où je me sentais bien. J'avais pendant un moment refusé de dormir à l'intérieur en raison de son contenu. Mais j'avais eu, un jour, l'envie d'y retourner.

Je posai un doigt sur le bouton central de la balle jaune et noire et me retrouvai dans ma forêt, la forêt de Jade. Je grimpai dans l'arbre où se trouvait ma cabane. Bien que j'eus beaucoup grandis, elle était toujours à ma taille, sûrement un truc de Pokéball. Je me jetai dans les coussins avant de me blottir sous le drap et de rêver du monde extérieur.


Je grognai après Drake qui m'avait éjecté d'un coup de queue alors que je le chatouillais.

-Drake ! Tu triches !

-Pas du tout, pendant les batailles de chatouilles on a tous les droits ! m'annonça le garçon balançant fièrement sa queue orange de gauche à droite.

Il se jeta sur moi, alors que je tentais de le repousser. Ses doigts grattèrent mon cou et je ne pus m'empêcher de rire.

-Les enfants ! s'exclama une voix féminine tout en tapant des mains.

Je me relevai aussitôt avec mon jumeau pour aller voir Maman. Elle était grande avec des cheveux bruns mais ce que j'aimais le plus c'était ses ronds sur les yeux. Quand elle me les prêtait, je m'amusais à regarder dedans pour voir tout déformé.

Elle n'était pas seule aujourd'hui, il y avait les papas et maman de tous mes frères et sœurs qui se réunissaient devant eux. Ils n'allaient pas encore leur faire du mal ?

-Bonjour tout le monde. On va faire une sortie dehors, je veux que vous soyez sages d'accord ?

-Oui ! répondîmes tous en cœur.

On allait enfin se promener ! C'était trop bien, il y avait plein de choses incroyables à l'extérieur ! C'était vert partout et les trucs … les arbres je crois … bougeaient tout seuls.

-Chacun va aller avec sa maman où son papa d'accord ?

Sans attendre, on se mit avec notre parent.

-Dereck, tu vas aller avec tonton Yuan.

-Oui. dis-je un peu déçu.

-Ne t'inquiète pas on va bien s'amuser tous les deux. me dit Yu en me prenant dans ses bras pendant que maman faisait rentrer Drake dans sa balle. D'ailleurs on va jouer à un jeu.

-Lequel ? demandai-je.

-On va jouer à cache-cache avec les autres.

-Tu es fort ?

-À ce jeu ? Oui très fort, le meilleur.

-Très bien, on fait équipe alors.

-C'est parfait, maintenant on y va. Surtout ne fais pas de bruit.

-Oui. murmurai-je.

On sortit de la maison et je pus voir un immense plafond remplis de points blancs dont un très gros. Je m'accrochais à Yu car il faisait froid. Lui se mit à courir pour aller se cacher. Je mordis son manteau pour ne pas rire. Il m'avait dit de rester silencieux. Et il fallait toujours faire ce qu'ils nous disaient. Il courait plus vite que tout le monde, même maman avait du mal à le suivre. Je me retins de lui demander qui aller nous chercher. On allait prendre la meilleure cachette et gagner ! C'était marrant ! Bien plus que les autres jeux qu'on faisait. On avait plein de cachettes ici.

Une sonnerie stridente retentit me réveillant en sursaut. J'avais encore eu un souvenir de Dereck, c'était toujours mieux qu'un cauchemar. Je m'étirais et me levai pour sortir de ma cabane, sachant que l'on allait me faire sortir pour manger.

Le meuble sur lequel se trouvaient nos balles était très sophistiqué. Il n'y avait pas besoin d'une présence humaine, quand c'était l'heure un bras mécanique venait appuyer sur le bouton central de nos balles pour nous permettre de sortir. Le problème était que l'on ne pouvait pas revenir sans risquer de passer la journée entière et la nuit dedans. Et se faire ensuite punir. Habituellement, on revenait uniquement pour utiliser la fonction soin car la machine nous libérait automatiquement une fois en forme.

Une fois à l'extérieur, je ne pris pas la peine de me retourner et me dirigeai tranquillement vers la salle commune.

Torky, Flora et Heia étaient déjà en train de regarder la télévision chacun dans un canapé. Je m'assis à la place qui m'avait été attribuée à table. Autrement dit à côté de la demi-oiseau, il aurait été impensable que je sois proche de celle aux cheveux verts. Elle faisait partie de ma liste de personnes à tuer et on ne mange pas à côté de sa proie.

Chacun avait sa spécialité, Flora était la pro des interrogatoires et les missions demandant quelqu'un ayant une apparence plus « humaine ». Heia les massacre en plein ciel. Torky était plutôt spécialisé dans les écroulements, il détruisait des bâtiments avec ses canons en canardant d'eau les fondations. Et il aimait ce « jeu », en revanche il agissait rarement seul. Il avait tendance à ne pas partir vite et avait failli se faire écraser par l'immeuble qui devait faire s'écrouler. Toutes les fois où les journalistes parlaient de problèmes dans les évacuations d'eau ou que la tuyauterie avait explosé … c'était lui.

Drake était leur assassin. Il arrivait, tuer sans un mot et repartait. Depuis la fin de mon « dressage » on m'avait recollé une partie de son boulot. Il agissait de jour comme moi de nuit. Mais ils avaient beaucoup plus confiance en lui et le laisser parcourir le pays pour trouver et massacrer ses proies. Tandis que je devais faire l'aller-retour dans la soirée. Il n'était toujours pas revenu de sa mission, conclus-je, en voyant son siège vide.

Je mangeai lentement mon plat composé de pâtes avec une sauce étrange et écoutai d'une oreille les bêtises des trois autres. Dès que j'eus fini je les rejoins sur le grand canapé. Un nouveau challenger affrontait Morgane. Celle-ci utilisais un Kadabra contre un Poissoroy qui tentait de blesser son adversaire avec son attaque Vibraqua. Mais le Pokémon psy était plus puissant et amena rapidement le jeune dresseur à rappeler le sien.

-La Championne va encore gagner. paria Torky.

-Pas forcément. Le Poissoroy a peut-être pas souvent touché son adversaire mais il a détrempé le sol de l'arène. Il prévoit sûrement d'envoyer un Pokémon élec…

Je n'eus pas le temps de finir qu'un Élektek se trouvait sur le terrain.

-Qu'est-ce que je disais.

-Tais-toi. m'ordonna Flora.

C'est vrai, je n'étais qu'un Pokémon et je ne devais pas être si intelligent. Je soupirai en regardant l'écran quand la porte d'entrée s'ouvrit. Comme tous les autres, je délaissais la boite électronique et regardait le nouveau venu.

-Draky ! s'exclama la plante verte sur patte en courant le rejoindre, avant de s'inquiéter de son état détrempé.

Il devait vraiment être fatigué s'il n'avait pas pris le temps de se sécher.

-Bonjour tout le monde ! Enfin au chaud à la maison. Vous ne savez pas ce que vous ratez là dehors. s'exclama-t-il joyeusement en essayant de cacher un truc derrière lui.

-Une averse de neige ? tentai-je.

-Une tempête plutôt.

-Va faire un tour à la machine.

-Oui. Mais avant. commença-t-il en venant vers moi. Garde ça. C'est un cadeau pour tout le monde.

Je regardais le sac plastique qu'il m'avait passé. Il était rempli de nourriture.

Tu parles d'un cadeau. J'étais devenu une cible de choix. À peine eut-il disparut dans le couloir qui amenait au dortoir que je me prenais une posture menaçante.

-On attend qu'il revienne. ordonnai-je.

-Tu sais à trois contre un. Je serais plus gentil à ta place. me menaça Flora.

Ils étaient impossibles ! Je n'attendis pas qu'ils avancent plus et d'un battement d'aile, m'envolai en direction de notre arène.

La fille fleurie m'attrapa une jambe avec les lianes qui sortaient de ses larges manches et m'attrapa une jambe. Je m'en débarrassai d'un bon coup de queue et traversai le couloir jusqu'à atteindre l'entrée de la grande salle. J'ouvris la porte à la volée sans me préoccuper des dégâts que cela allait occasionner et pris de la hauteur. Une fois au niveau des poutres métalliques qui supportaient le poids des autres étages je m'assis dessus. Je restai malgré tout alerte et surveillai les deux crétins en bas, rejoins un peu plus tard par la demi-Roucarnage.

-Heia va le sortir de là, s'il te plaît. Demanda Flora avec sa fausse gentillesse.

-… Drake ne va pas être content.

-… Dereck si tu descends, je te ferai profiter de mon savoir. me proposa-t-elle à la place.

-Non merci la nymphomane. Je préfère ma main.

-Tu ne sais pas ce que tu perds !

-Nuance, je sais tout ce que je gagne.

-Tu ...

-Je vais surveiller qu'il ne mange rien. annonça la fille aux cheveux tricolores en venant me rejoindre.

-N'en mange pas ! lui rappela Torky.

Je regardais Heia s'asseoir à une distance raisonnable, sachant que je ne faisais confiance à aucun d'entre eux.

Mon regard se reporta sur le duo d'en bas. L'hybride aquatique se proposant pour me remplacer quand l'acquisition de « nouvelles techniques ».

Tu parles, il allait encore se faire piéger et venir pleurer que Flora était méchante avec lui. Elle l'était avec tout le monde, sauf Drake. Elle devait le considérer comme notre chef et elle comme sa subalterne, quand il n'était pas là. Et vu qu'il m'avait confié la nourriture … cela remettait sa place en doute dans sa petite tête.

Bien que nous avions que peu d'endroits pour nous isoler entièrement, personne ne les avaient informé que certaines choses se faisaient discrètement. Quoi que … en tant que bête de foire cela devait leur sembler normal à nos Maîtres. Bien qu'aucun de nous ne pouvait procréer, ils s'étaient inquiétés de mon « introduction ». Après tous leurs sujets vivaient à quatre depuis plusieurs années, avec moi, il y avait un mâle de trop. À croire que nous ne pouvions pas nous contrôler, que nous étions que des hybrides sans cervelles suivant uniquement nos instincts.

Seule Flora voulu tester la nouveauté que j'étais mais … son interrogatoire m'avait dégoûté d'elle. Et quand j'entendais Torky, je me disais que je faisais bien de ne pas m'en approcher. Résultat la nympho m'avait pris en grippe avant de s'adoucir pour tenter de me convaincre du bien-fondé de sa pensée. Résultat, j'avais passé de nombreuses journées et nuits sur ses mêmes poutres à l'abri de ses lianes. Je n'avais regagné ma Pokéball qu'une fois que j'en eu envie et que je sois assez fort pour la carboniser si elle insistait trop. Et pour Heia … je la laissais à mon frère. Ça serait trop étrange de partager la même fille. À vrai dire passer après mon jumeau me dégoûtait … mais peu à peu cela me tentait.

À force de rester enfermer ici, je me demandais si je ne commençais pas à perdre la tête. Allais-je un jour finir comme eux ? Je n'espérais pas.

-Et si je le faisais descendre ? proposa Torky.

-Qu'est-ce que tu ne comprends pas dans le mot attendre ? répondis-je ne voulant pas me faire arroser.

-Pourquoi il te les passe à toi et pas à moi ? grogna-t-il.

-Car tu les aurais déjà tous mangés. dis-je d'une seule voix avec Drake.

Autant les premières fois, cela m'énervait que l'on parle comme si nous étions un, autant maintenant je m'en moquais. Je descendis lui redonner son sac. Celui-ci contenait des beignets en forme d'étoiles.

-Tu reviens d'Azuria ? dis-je un peu surpris.

Cela faisait un long vol sous la neige. Il devait avoir quelque chose d'urgent à faire pour ne pas avoir attendu une météo plus clémente.

-Oui, la femme de Léo me les a donnés avant mon départ.

Il en donna deux à chacun avant de réduire l'emballage en miette d'un souffre enflammé. Je réchauffais les miens avant de les manger. Je me rappelais vaguement quand on en avait mangé avec … non je ne devais pas y penser.

-Merci. dis-je avant d'aller en direction de la salle médicale.

L'endroit était encore vide, je devais être en avance. J'allais m'allonger sur un des lits pensant dormir un peu avant que le docteur vienne.

-Encore en train de dormir ? me demanda Drake.

J'ouvris les yeux pour le voir s'asseoir sur le lit parallèle au mien.

-Pas encore. répondis-je avant de me redresser. Qu'est-ce que tu veux ?

-… Un petit partage.

Il plaça sa queue orange entre nous et je vis sa flamme qui n'avait pas retrouvée sa hauteur habituelle. Comprenant ce qu'il voulait je fis de même et coller la mienne. Nos flammes fusionnèrent en une plus grande et, sans attendre, une douce chaleur m'envahit. Je l'entendis soupirer à côté de moi. Il avait vraiment du avoir froid pour venir me demander ça.

-Tu ne retournes pas te reposer ? lui demandai-je au bout d'un moment.

-Non, je dois faire un check up avant.

-Profite-en pour dormir.

-Hahaha, je ne sais pas m'endormir n'importe où comme toi.

-Mouais.

Un autre silence suivit qui dura plusieurs minutes.

-Je peux te poser une question ?

-Pose, on verra si je réponds.

-Tu penses qu'on aura une nouvelle chance de … partir ?

Je comprenais qu'il sous-entendait « échapper », un des mots interdits à dire.

-Non.

Ma réponse sembla le surprendre mais il continua.

-Pourtant on l'a déjà fait.

-Je ne peux que te conseiller de continuer d'être utile. Tu sors assez pour ne pas devenir fou comme Torky.

-Tu le trouve fou ?

-Totalement stupide.

-Ce n'est pas la même chose.

-…

-Tu es sorti cette nuit ?

-Oui, une petite mission à Céladopole.

-C'est pour ça que tu savais pour la neige.

-Oui … il y en a beaucoup ?

-J'en ai eu tout le trajet du retour et cela continuait quand je suis rentré. Il doit y avoir un bon mètre sur le sol maintenant. Ils vont diminuer nos sorties.

-Les fêtes de fin d'années arrivent. On aurait quand même eu moins d'activités. Tant mieux, je n'aime pas voler avec un temps aussi pourri.

-Ce n'est pas toi qui vient de dire, que sortir nous empêcherait de tous devenir fou ?

-Sortir par un temps pareil me rendrait plus vite fou.

Il rigola un peu avant de redevenir silencieux à son tour.

-D… dis-moi. Il parait que tu as rencontré Raika.

-Oui.

-Elle allait bien ? Elle arrivait à s'adapter ?

-Sans problème, elle tenait une boutique avec sa mère. Quand j'étais Rei … j'ignorais qui elle était, je n'y ai vu que du feu.

-C'est bien.

-Oui, l'autre bonne nouvelle c'est qu'elle n'est pas parmi nous. Autrement dit, elle a eu le temps de recevoir mon message.

-Un message ?

-J'ai envoyé Chu et Gryff l'avertir.

-Qui est-ce ? me demanda-t-il.

-C'était des amis … je n'ai pas envie d'en parler.

-Ah …

Il comprit que la conversation à ce sujet était close. Je ne voulais pas penser à ce que j'avais perdu. Cela risquait d'ouvrir ma « boite ».

Nous restâmes silencieux, nous réchauffant mutuellement avec nos flammes puis le docteur arriva.

-Comment ça va aujourd'hui ? commença l'humain de bonne humeur. Pas eu trop froid la nuit dernière ?

-Si. répondîmes en cœur.

-Je veux bien vous croire. J'ai eu du mal à venir aujourd'hui. Mais là n'est pas la question. Qui veut commencer ?

Je regardais Drake et lui fis signe de commencer. Il pourrait aller se reposer plus rapidement comme ça.

Le médecin roux alluma ses machines une à une, tout en continuant de parler du mauvais temps. Comme si cela nous importait. Une fois tout en marche, il fit passer une batterie de tests à mon frère avant de l'envoyer se reposer, puis ce fut mon tour.

-Et toi, tu n'as pas eu trop froid hier ?

-Non.

-Rien d'autre à signaler ?

-Non.

-… Tu pourrais développer tes réponses tu sais.

-Oui.

Quand j'en aurais envie l'humain. pensai-je.

Il soupira et m'invita à commencer ses tests. Ce n'était qu'une vérification de mon état de santé. Nous y avions droit une fois par semaine sauf en cas de sortie par temps exceptionnelle où on avait droit à un check-up dès notre retour.

-ça sera tout pour aujourd'hui. déclara-t-il. Ta température aussi baissé, tu as bien dormi ?

-Oui, Maître.

-Tu finis tous tes repas ?

-Oui, docteur.

-Rien d'autre à signaler ?

-Non, monsieur.

-… Oublie ce que j'ai dit à propos de développer tes réponses. Ce n'était pas une bonne idée finalement.

-D'accord.

Voyant que tout était bon, l'homme me laissa retourner à mes occupations. Il ne me restait plus qu'à attendre Vulcain.


-Non, non, non. Pas comme ça ! s'exclama le Dracaufeu en me faisant signe d'atterrir. Il faut que tu inclines ton aile comme ça avant de redresser.

Plus facile à dire qu'à faire, j'avais pris l'habitude de faire mes demi-tours dans le ciel et pas dans une cage. L'arène avait beau être grande, elle restait trop étroite de mon point de vue pour faire certaines manœuvres.

-Recommence. me demanda mon professeur.

Je repris de la hauteur et fis quelques tours pour prendre de la vitesse, avant de retenter le mouvement.

À mi-chemin de la salle, j'exécutai à nouveau ce qui m'était demandé et fis demi-tour … sans arriver à conserver ma vitesse. Je poussai un juron avant de faire une nouvelle tentative.

Pendant ce temps, sur la terre ferme Flora s'entraînait à améliorer la précision de son attaque Tranch'Herbe sur un morceau d'arbre.

Nos professeurs étaient les Pokémons correspond à notre côté non-humain. Ils avaient été entraîné comme des soldats et voyaient plus facilement que nos Maitres ce qu'il fallait améliorer et comment.

Celui qui s'occupait de moi pour le moment s'appelait Vulcain, d'après ce qu'on m'avait dit, j'avais été issue de ses cellules. C'était donc un simple géniteur, je laissais le rôle du père raté à Yu.

-Dereck, viens au bureau de planification. dit une voix dans un haut parleur.

Je m'arrêtai en plein vol suite à l'annonce avant de redescendre sur la terre ferme.

-On reprendra les demi-tour en un temps la prochaine fois. Entraînes-toi d'ici là. me conseilla mon professeur.

-Oui. répondis-je en inclinant la tête en signe de salut que l'on faisait au début et à la fin de chaque séance.

Je me dirigeai sans attendre vers la porte rouge et aller rejoindre la planificatrice. Je n'eus pas à entrer dans son bureau car on se croisa dans les couloirs.

-Viens. m'ordonna-t-elle.

Je la suivis sans rien dire fixant le sac qu'elle avait sur son dos. Vu sa tenue elle ne devait pas tarder à rentrer chez elle. Elle nous conduisit dans un des hangars qui donnait sur l'extérieur. Plusieurs personnes s'affairaient autour d'une petite caisse.

-Faites attention ! dit un homme d'une quarantaine d'années avec un casque jaune. -Maintenant posez-le, voila tout doucement. C'est bon. Garnissez-moi tout ça et on ferme.

-Michel, le colis est-il prêt ? demanda mon Maitre.

-Oui, on a plus que les fixations à mettre et il pourra partir. Ah, ce n'est pas Drake aujourd'hui.

-Non il se repose. Dereck le remplacera, il a déjà fait plusieurs fois le trajet et résistera mieux que Heia.

-Je veux bien le croire. La neige s'est arrêtée de tomber pour le moment, il vaut mieux en profiter.

-Parfait. Dereck va te préparer.

-Oui, Maître.

Je me dirigeai vers une des armoires qui se trouvait à côté de la porte d'entrée et l'ouvris pour récupérer un harnais spécial « hybride ». Une large sangle barrait notre dos en H et se fermait devant autour d'un anneau. J'attrapais aussi une paire de lunette de protection, le trajet allait être long et je ne voulais pas me reprendre une averse de neige à nouveau dans la figure.

Maintenant équipé je retournais auprès des deux humains. Entre temps, la caisse avait été fermée et harnachée. Je montai dessus et l'attachai à la boucle que j'avais devant moi, puis j'attendis les ordres.

-Tu fais très attention, c'est fragile. m'annonça le quarantenaire.

-Oui.

-La caisse est pour le Julien Seymour et ceci. ajouta-t-elle en me tendant le sac. Pour le Professeur Chen. Ils sont tous les deux au laboratoire du Bourg Palette.

-Compris. dis-je en attachant le sac à mon harnais.

-Reste là-bas jusqu'à mon appel.

-Entendu.

-Tu peux y aller.

Je commençais à prendre mon envol doucement après qu'ils se soient éloignés et que le portail du hangar eu été ouvert. Je montai doucement pour tendre les sangles avant de soulever mon colis pour évaluer son poids. Il n'était pas trop lourd mais pourrait me gêner s'il y avait des bourrasques de vent.

Je donnai un bon coup d'aile pour prendre plusieurs mètres de hauteur avant de me laisser glisser à l'extérieur. Là j'utilisais les courants aériens pour prendre de la hauteur avant de prendre la direction de Jadielle.

La base se trouvait dans la forêt de Jade entre la ville du Champion Blue et de Céladopole. Bien que nous soyons plus proches de la grande métropole, la densité de la forêt nous cachait des curieux trop téméraires. Peut-être même un peu trop. Je faisais principalement des vols nocturnes et je me repérais aux lumières des villes pour me diriger. J'avais eu à plusieurs reprises des difficultés à trouver le chemin du retour.

Je repérai rapidement les lumières de la petite ville dans les ténèbres de la nuit et accélérai dans leur direction. Une fois à proximité, je n'aurais qu'à suivre celle du Bourg Palette pour arriver à destination. Il n'y avait plus qu'à espérer que le temps resterait comme maintenant nuageux et rien de plus.