À l'autre bout de la ville, cependant.

— Stiles ? Ouvre-moi, mon grand...
— Je suis fatigué, Beth.

La femme baissa le nez et soupira avant de tourner les talons. Depuis que son père avait été ramené à l'hôpital, Stiles s'était bouclé dans sa chambre. Beth déposait un plateau repas devant sa porte chaque midi et chaque soir, mais il refusait d'ouvrir la porte ou de sortir.

— Je suis désolée, Melissa, il refuse d'ouvrir.
Ce n'est rien, je voulais juste m'assurer qu'il allait bien...
— Stiles et son père sont très proches, répondit Beth en laissant glisser sa main sur le comptoir avant de s'y accouder. Je sais bien que Stiles m'appelle maman parfois, mais je ne suis que la femme de son père et...
Ne dites pas ça, Stiles vous adore, vous le savez, mais pour le moment, il est meurtri, à la fois dans ses chairs et dans sa tête.
— Je sais, c'est dur pour tout le monde, les filles ne dorment plus depuis des jours, elles refusent d'être séparées de moi, elles ont peur que je disparaisse aussi... Qu'est-ce que je vais leur dire quand il va se réveiller, hein ?
La vérité. Ça fait mal au début, puis on s'habitue.

Beth souffla et un appel micro résonna derrière Melissa qui s'excusa et raccrocha. Elle observa le téléphone mural un moment puis se détourna et s'approcha du comptoir du service.

— C'est pour moi ? demanda-t-elle en prenant un dossier.
— Non, mais le médecin qui s'occupe du Shérif vous cherche, répondit l'infirmière derrière le meuble.
— Ah ? Merci.

Melissa abandonna le dossier sur le comptoir et rejoignit le couloir où se trouvait Stilinski. Elle trouva la porte de la chambre ouverte et entra.

— Docteur, vous me cherchiez ?
— Entrez, Infirmière McCall, j'ai quelque chose à vous demander, sur... vous-savez-quoi.

Melissa esquissa un sourire et repoussa la baie vitrée pour isoler la chambre.

— Je vous écoute ?
— Je viens d'examiner le Shérif, les contusions qu'il a eue grâce à Monsieur Hale et son propre fils ne semblent pas guérir.
— Et la morsure ?
— Elle si, mais pour avoir déjà eu quelques loups dans mon service, c'est très lent, pour le coup.
— Noah est ce qu'ils appellent un « nouveau-né », répondit Melissa. Outre le fait d'être enragés, ils sont également très fragiles. De plus, la pleine lune les affaiblis énormément et heureusement, cette nuit, ce sera la dernière.
— Faut-il fait quelque chose de particulier à ce sujet ?
— Non, il est dans le coma, il ne risque pas de se réveiller et de toute détruire.
— De toute manière, votre fils va traîner dans les environs, j'imagine ?
— Exactement.

La porte coulissa et Scott entra dans la chambre. Il toisa le médecin puis déporta son regard sur le Shérif.

— Comment il va ?
— Bien, pour ce que j'en sais, mais comme je le disais à votre mère, ses blessures ne guérissent pas.
— Cela ne fait pas vingt-quatre heures qu'il est neutralisé, répondit Scott. Laissons passer les effets de la pleine lune et demain, tout rentrera dans l'ordre.
— Derek a pourtant guéri en une nuit et ses blessures étaient bien plus graves, nota Melissa.
— Mais Derek n'est pas un loup normal, maman.
— C'est vrai... Tu as des nouvelles ?
— Nope, aucunes. Mais je ne m'en fais pas, j'ai du monde qui le surveille. Dès qu'il sortira de chez lui, je le saurai.
— Encore pire que la CIA... souffla le médecin.
— Peut-être bien mieux, même, répondit Scott avec un sourire. L'avantage des loups, c'est qu'ils n'ont pas besoin d'internet pour suivre une piste, un simple courant d'air suffit.

Melissa sourit puis le médecin quitta la chambre et Scott s'approcha du lit.

— Tu sens quelque chose sur lui ? demanda sa mère.
— Je n'ai reconnu aucune odeur sur ses vêtements sinon celle de Derek, je pense qu'il a été mordu par un Omega qui voulait juste s'amuser une nuit de pleine lune. C'est de loin le pire moment pour être transformé... J'en sais quelque chose...

Melissa serra les lèvres, annonça qu'elle allait rester un moment au chevet du Shérif, et qu'il devrait aller voir Stiles.

— Je ne pense pas qu'il veuille me voir, mais je peux toujours essayer.
— C'est ton meilleur ami après tout, sourit Melissa.

Scott opina et quitta la chambre à son tour puis l'hôpital, mais alors qu'il allait pour traverser la route, le vent lui apporta une odeur qu'il reconnut sans problèmes et il repéra Derek sortant d'une supérette avec un sac de commissions dans les bras. Le loup le repéra immédiatement et tourna les talons sans un mot ; Scott fut tenté de le rejoindre, mais se retint, il préféra plutôt récupérer sa voiture et se rendre chez les Stilinski. Si Liam avait raison, alors Derek n'allait pas repartir de sitôt et il aurait d'autres occasions de lui parler entre loups alphas.

.

Garant sa voiture dans l'allée des Stilinski, Scott huma l'air en posant le pied sur le béton et grimaça, l'air sentait la tristesse. Il contourna donc la maison et entra dans le jardin. Comme il l'avait toujours fait depuis qu'ils se connaissaient, il ramassa une poignée de cailloux et les lança un par un contre la fenêtre de la chambre de son meilleur ami. Un gravier, deux graviers, trois... La lampe s'alluma. Un gravier supplémentaire, le rideau se tira et un visage apparut. Scott sourit et Stiles baissa le nez avait de repousser le loquet de la fenêtre et de s'éloigner. Sans un bruit, le jeune alpha sauta sur l'avant-toit et s'agrippa au parement pour coulisser la fenêtre à guillotine et entrer dans la chambre.

— Hm, t'as pas pris de douche depuis quand ? demanda-t-il en guise de bonjour, le nez plissé.

Assis dans un fauteuil bas, Stiles était livide. Des cernes bleus lui mangeaient les joues et ses yeux étaient rouges, comme s'il n'avait pas cessé de pleurer depuis son retour du plateau rocheux. Il avait sur ses genoux le t-shirt rayé orange et bleu et Scott serra les lèvres.

— T'es amoureux de lui, n'est-ce pas ?

Stiles ferma les yeux et soupira.

— J'en sais rien... Mon cerveau est à plat, j'arrive plus à penser rationnellement, tout se mélange, papa, Derek, Lydia...
— Lydia ?

Scott se baissa devant son meilleur ami, intrigué.

— Elle m'a rejoint à Washington, comme tu le sais, il y a quatre ans, répondit ce dernier.
— Oui, elle était tellement contente que tu lui dises de venir... Qu'est-ce qu'il s'est passé ?
— On s'est séparés il y a six mois, elle... Non, on ne s'entendait plus. On ne s'est jamais disputés, hein, ni rien, mais je sentais que quelque chose avait changé depuis son arrivée, on avait chacun notre travail dans deux branches différentes du gouvernement, j'étais sur le terrain et pas elle, et petit à petit, une routine s'est installée et... Enfin bref, on a décidé un matin de se séparer, elle a fait ses bagages et elle s'est installée chez une amie dans la journée.
— Ah oui, c'était à ce point... Et concernant Derek ?

Stiles baissa les yeux et sa main gauche se serra sur le t-shirt qui semblait être devenu son doudou.

— Je peux comprendre si tu ne veux pas en parler, d'accord, mais faut pas rester tout seul comme ça à ruminer...
— Ce n'est pas que je ne veux pas en parler, Scott, c'est juste que je ne sais pas, d'accord ? Derek et moi, on a un passé commun, on s'est sauvé la vie mutuellement à plusieurs reprises et même si à l'époque j'étais qu'un gosse et lui une espèce de loup sauvage qui va et qui vient comme il veut, aujourd'hui les choses ont changé.
— Tu lui as encore sauvé la vie, et il a encore sauvé la tienne, dans la montagne, rappela Scott avec un mince sourire.
— Certes... Qu'est-ce que je dois faire, Scott ?
— Tu me demandes ça à moi alors que ma copine, du moins celle qui l'était il y a cinq ans, a disparut corps et âme avec son père et parcoure le monde sans donner de nouvelles ?
— T'as pas eu de nouvelles de Malia et Peter ?
— Aucune. Je ne pense pas qu'ils soient morts ou enfermés quelque part, comme Derek, Peter est trop malin pour ça, mais j'aurais bien aimé avoir un petit texto tous les deux trois mois quoi, genre « on est vivants, on est dans tel pays, bisous. »

Stiles rigola et gémit de douleur aussitôt. Scott tendit la main, mais son ami secoua la tête.

— Ça va, c'est supportable si je ne rigole pas, dit-il.

Il souffla en posant une main sur son côté gauche et secoua ensuite la tête.

— Comment va mon père ?
— J'ai laissé ma mère avec lui, il est stable, mais les plaies qu'il a mettent du temps à guérir. C'est sans doute à cause de la pleine lune et du fait qu'il ait été mordu récemment.
— Qui a fait ça, selon toi ?
— Un Omega. Ça ne peut être que ça, une meute aurait veillé sur lui, il ne serait pas resté comme ça, sans contrôle à errer dans les bois.
— Est-ce qu'il va encore vouloir me tuer quand il va se réveiller ?
— Non, je ne pense pas, la pleine lune sera passée, il aura recouvré ses esprits, mais il risque de passer son temps à s'excuser, par contre.

Stiles déglutit et porta une main à son cou où cinq plaies sèches se trouvaient, quatre d'un côté, une de l'autre.

— Quand il me tenait à la gorge... J'ai supplié Derek d'y mettre fin, je lui ai demandé de rugir, mais il a refusé...
— Il a refusé parce que s'il l'avait fait, ton père se serait attaché à lui et ce n'est pas ce qu'on veut. Le Shérif m'appartient, il devra se soumettre à mon autorité s'il veut rester à Beacon Hills.
— Il ne partira jamais, répondit Stiles en secouant la tête. Beth va l'aider à surmonter ça et la vie reprendra comme avant, ou presque. Qu'est-ce que ça va changer pour lui ? Je veux dire, il est plus tout jeune et...
— Il restera vieux, si j'ose dire, mais s'il avait des douleurs liées à son âge, elles auront disparu, de même qu'il vivra plus longtemps en meilleure santé, mais il vieillira comme tout le monde.

Stiles opina.

— Tu as pu voir ses yeux ? demanda alors Scott.
— Jaunes, t'en fais pas, il a tué personne, répondit Stiles en secouant la tête.
— Tant mieux.

Le téléphone de Scott sonna au même moment et il secoua la tête après avoir jeté un œil sur l'écran.

— Ce n'est rien, je dois rentrer au QG, apparemment, j'ai une demande pour entrer dans la meute.

Stiles fronça les sourcils.

— C'est fréquent ?
— Non, du tout, mais comme nous vivons en harmonie avec les humains, certains postulent chez les policiers, et d'autres chez moi, sourit Scott avec un haussement d'épaules.
— Tu m'as dit que tu avais une trentaine de loups, tu les as tous mordus ?

Scott opina. Stiles l'imita puis soupira en se frottant le visage et Scott décida de le laisser en lui conseillant de prendre une douche et d'aérer un peu sa chambre. Stiles lui tira la langue en retour puis le jeune Alpha quitta la maison par là où il était venu.