— Tu sors demain, ça ira ?
— Oui, ne t'en fais pas, j'aurais des soins à domicile tous les jours, tout ira bien.
Scott déposa une valise sur une chaise et soupira. Anise lui sourit et lui fit signe d'approcher. Il lui prit la main et observa la cicatrice à l'intérieur de son bras.
— Je suis désolé de t'avoir embarquée dans tout ça, dit-il en passant son pouce dessus. Tu n'avais sans doute pas besoin de ça.
— Je ne suis qu'une laborantine condamnée à être célibataire toute ma vie parce que je préfère la compagnie des bactéries à celle des humains, répondit la jeune femme avec un sourire.
— Ne dis pas ça...
— Pourquoi ? Ça ne s'est pas réalisé, si ? Alors d'accord, c'est un accident, mais on s'entend bien, toi et moi, il n'y a aucune raison que le temps ne fasse pas son travail. De plus, je dois toujours trouver un moyen de rendre Liam moins agressif. Bon, je n'avais jamais imaginé que je tomberais sur ton ex et qu'elle serait aussi agressive, elle, mais...
Scott baissa le nez et Anise sourit doucement. Elle leva une main et la posa sur sa joue.
— Tu t'en veux, n'est-ce pas ?
— Tu n'imagines même pas à quel point...
— Tu ne pouvais pas savoir que Malia allait revenir et agir comme ça ; personne n'a jamais su pourquoi ils sont partis. Je suis d'accord, ce qu'elle a vécu est traumatisant, je l'ai vécu aussi, mais...
Scott regarda la jeune femme.
— Tu as dû avorter ?
— Non, j'ai fait une fausse-couche à quatre mois de grossesse, c'était mieux comme ça parce que c'était un accident, mais ça m'a perturbée pendant très longtemps, j'étais persuadée que j'étais un hôte hostile, qu'aucun enfant ne voudrait de moi comme mère parce que je travaillais soixante heures par semaine sous les ordres d'un Colonel de l'USAF plus que grincheux...
— C'était quand ?
— Il y a longtemps, près de dix ans maintenant, je venais d'être embauchée à Nellis, je ne savais pas ce que j'allais étudier encore et j'avais quitté mon petit ami de l'époque parce que le contrat stipulait que tout ce que je ferais serait confidentiel et Tomas ne supportait pas que je lui cache des choses. Je me suis découverte enceinte en arrivant à Colorado Springs et j'ai pris rendez-vous pour un avortement, mais deux jours avant, j'ai fait une fausse-couche...
Scott opina et lui prit les mains.
— Je ne te ferais pas subir à nouveau une telle épreuve, dit-il.
— Ne dis pas d'âneries, sourit la jeune femme. J'ai trente ans, tu en as vingt-huit, il est grand temps que tu imposes ta famille sur ta meute, tu ne crois pas ?
— J'ai déjà un fils.
— Liam n'est pas ton fils, tout le monde le considère comme ça parce qu'il est le premier que tu as mordu, mais il ne l'est pas et il n'héritera pas de la meute si tu meures. Attention, je ne te dis pas qu'on aura un enfant dans huit mois, hein, juste que tu pourrais y penser.
Scott sourit et laissa échapper un rire en secouant la tête.
— Pourquoi tu ne m'as rien dit ? demanda-t-il alors.
— On a déjà eu cette discussion.
— Je sais, mais si tu m'avais parlé plus tôt, il... Si, Malia aurait débarqué quand même et peut-être qu'elle t'aurait tuée, cette fois.
Anise secoua la tête.
— Je t'aime Scott, et ce n'est pas ta faute, ou plutôt si, mais du moins ce n'est pas parce que tu m'as malencontreusement griffée, ce jour-là sur la base de Nellis. Ça a peut-être contribué, je veux bien l'admettre, mais j'ai toujours aussi peur de toi et de tes loups !
Scott rigola. Il se releva alors, embrassa la jeune femme sur le front puis la laissa se reposer en disant qu'il reviendrait la chercher le lendemain pour la ramener chez elle.
.
Devant l'hôpital, le jeune Alpha tomba sur Derek et Stiles qui se promenaient en amoureux, bras-dessus-bras-dessous.
— Salut, vous deux.
— Bonsoir, Scott, tu étais avec Anise ? répondit Derek.
— Oui, elle va bien, elle sort demain.
— Elle rentre chez elle ? demanda Stiles.
— Oui, elle a refusé de s'installer chez mes parents ou à la savonnerie.
Stiles esquissa un sourire.
— T'as l'air plus serein qu'il y a deux semaines, nota-t-il. Elle te fait du bien, on dirait.
— Disons que j'accepte doucement ce qui nous lie...
Derek posa une main sur son épaule et serra les doigts.
— Crois-moi, je l'ai vécu, ça ira beaucoup mieux quand tu auras accepté les sentiments que tu as pour elle et que tu auras fait la paix avec ta conscience.
Le loup glissa un regard à Stiles qui lui sourit avant de l'embrasser.
— On se sent bien plus sereins, c'est un fait ! dit-il, amusé.
Scott laissa échapper un rire et soudain, se redressa.
— Je n'ai pas oublié Jarvis, Derek, tu veux toujours le mordre ?
— Oui. Je lui ai laissé ces deux dernières semaines pour qu'il réfléchisse bien, il a discuté avec Stilinski, avec Mélissa et même avec Argent, je n'attends que son appel pour finaliser la chose. Écoute, Scott, je sais que ce garçon est un enfant de Chasseurs, mais tu l'as vu, c'est au mieux un hippie, au pire un gars paumé. Lui offrir la morsure lui rendra ses jambes, certes difficilement, mais au moins il ne sera pas cloué à un fauteuil pour le reste de sa vie, et avec quelques efforts, il repartira sur les routes pour son tour du monde à moto.
— Il n'a pas l'intention de rester ?
— Pas plus que nécessaire.
Scott opina. Son téléphone sonna alors et il s'excusa en souhaitant une bonne soirée aux deux autres avant de s'éloigner.
— Tu crois vraiment que c'est une bonne idée de t'attacher Jarvis ? demanda alors Stiles.
— On en a déjà discuté, tu en as discuté avec lui, moi aussi, il comprend que je fais ça parce que je me sens redevable de son accident. C'est de ma faute s'il est paralysé, mais si je n'avais pas réagi, Anise et moi on serait morts et ce serait plus d'une dizaine de personnes dont la vie aurait été brisée.
Stiles pinça les lèvres et baissa le nez. Derek passa son bras sur ses épaules et l'embrassa sur la tempe.
— Tu dois aller à Washington quand ? demanda-t-il, désireux de changer de sujet.
— La semaine prochaine, mon idée de créer une branche du DPCS ici, à Beacon Hills, a beaucoup plu à mon chef, il me demande de retourner au siège pour finaliser les papiers, puis je sélectionnerai une partie de son personnel pour être mutés ici avec conjoints et enfants.
— Ça va les changer ! s'esclaffa le loup. On est bien loin de la grande ville, même si c'est quand même une ville d'une bonne taille, heureusement pour eux.
Stiles sourit puis il glissa sa main dans celle de Derek qui pendait sur son épaule et ils reprirent leur balade d'après dîner, ayant laissé Jared devant une émission télévisée qu'il ne manquait plus depuis quelques semaines.
.
De retour à la tanière, Scott trouva son entrepôt vide et soupira d'aise. Il n'aurait personne sur le dos pour le reste de la soirée et il se demandait s'il n'allait pas rester dormir ici quand une odeur lui chatouilla les narines, une odeur qu'il connaissait et qui provoqua immédiatement une sourde colère en lui.
— Malia...
Les yeux bleus de la louve apparurent dans les ombres du hangar et elle sortit ensuite à la lueur d'une lampe. Scott se tendit aussitôt, prêt à attaquer, mais la jeune femme baissa les yeux en approchant.
— Tu as vraiment du culot de revenir alors que je t'avais bannie, dit Scott en se levant.
— Je sais, mais je te dois des excuses. Peter m'attend sur le pont, je devais revenir, je ne dors plus depuis deux semaines, je...
Elle grimaça en posant ses mains sur le dossier d'un fauteuil et les frotta aussitôt.
— Cet endroit empeste l'humaine, tu devrais aérer...
— Tes excuses, lâcha Scott.
Malia tourna les yeux vers lui et baissa le menton.
— Je suis désolée de m'en être prise à ta copine, dit-elle alors. Je ne savais pas, je... Non, je savais, je savais qu'après toutes ces années, tu ne m'avais pas attendue. J'ai été naïve de vouloir croire encore à notre histoire... Je te demande pardon et j'irais bien m'excuser devant elle en personne, mais elle risque de...
— Elle t'a déjà pardonnée, répondit Scott. Contrairement à toi, Malia, Anise est une jeune femme extrêmement conciliante, gentille et douce. Elle travaillait dans la Zone 51 quand je l'ai connue, elle avait été embauchée pour étudier les créatures surnaturelles et quand je l'ai rencontrée pour la première fois, son travail avait été, pendant deux mois, de découper Derek en petits morceaux pour l'étudier.
Malia déglutit. Stiles avait expliqué l'histoire à Peter qui l'avait ensuite rapportée à sa fille et tous deux avaient été très choqués.
— Elle ne te mérite pas, Scott, dit alors Malia. Moi non plus. Je le pensais, mais je ne suis pas pour toi, je ne l'ai jamais été. Allison était pour toi, c'était elle qui aurait dû se trouver dans ce hangar, il y a deux semaines, par l'humaine.
— Anise, répondit alors Scott. Elle s'appelle Anise, arrête de l'appeler "l'humaine" comme si elle n'était qu'une chose.
Malia serra les mâchoires. Sa montre bipa alors et elle loucha dessus.
— Mon père m'attend, annonça-t-elle. Je... Je suis désolée, Scott, pour tout. Je ne pensais pas que les choses allaient se passer comme ça, que tu allais être aussi... véhément et encore moins que tu te serais entiché d'une humaine. Adieu, Scott.
Sous le regard dur du jeune homme, Malia se changea en coyote, inclina la tête puis sauta par une fenêtre et ses pas disparurent dans le silence de la nuit. Scott déglutit alors, soupira et s'écroula dans le canapé ; il avait retenu sa respiration pendant toute la durée de l'entrevue et lorsqu'il leva sa main droite, il grimaça en arrachant ses griffes plantées dans la chair de sa paume...
Saisissant son téléphone, il envoya un message à Anise qui lui répondit de se faire du thé et d'aller se coucher, que l'affaire était derrière lui désormais et qu'il avait autre chose à s'occuper maintenant, à savoir elle.
Cette marque de possession fit sourire le jeune homme. Il jeta son téléphone sur un coussin près de lui et posa sa tête sur le dossier du canapé. Cela faisait six mois qu'Anise avait débarqué, d'abord pour aider Liam à canaliser sa colère, puis elle s'était petit à petit fait une place dans la tanière et s'était liée avec Scott malgré elle, à tel point que tout le monde y allait de son petit pronostic pour savoir quand ils allaient enfin sortir ensemble.
— Je le savais, soupira alors Scott en se redressant. J'ai senti qu'il y avait quelque chose entre elle et moi... Je ne l'ai pas vu, mais mes gars ont commencé à avoir du respect pour elle, autant que pour moi et ça ne signifie qu'une seule chose...
— Qu'elle est la louve Alpha.
Scott bondit du canapé et se détendit aussitôt en reconnaissant Chris Argent.
— Annonce-toi, la prochaine fois, grogna le jeune homme en se rasseyant. Qu'est-ce qui se passe ?
— Rien, ta mère est à la maison, elle s'occupe de ton frère, Isaac est Dieu-sais-où et comme je ne savais pas si tu allais rentrer dormir à la maison ou pas, je suis passé ici. Qu'est-ce que tu fais tout seul ?
— Je cogite. Malia vient de partir, elle est venue me faire des excuses.
— Je croyais que tu les avais bannis...
Argent s'installa sur un fauteuil et Scott opina.
— Ils sont bannis de mon territoire, mais cela ne veut pas pour autant dire qu'ils doivent partir sur une autre continent, répondit-il. Ils vont s'installer à Fresno, Derek m'en a parlé, mais Peter lui a assuré qu'ils ne reviendraient pas dans le coin.
— Tant mieux alors, un souci de moins. Anise sort demain, ta mère m'a dit ?
— Oui, mais je ne sais toujours pas comment me comporter avec elle. Je suis à l'origine de son attirance pour moi, et même si je l'apprécie beaucoup plus que je ne devrais...
— Tu n'es pas amoureux, acheva Argent. Ne t'en fais pas, beaucoup de couples Alpha ne tombent pas amoureux l'un de l'autre avant des années... Tant que tu demeures à ses côtés et que tu réponds à ses demandes te concernant, alors ça lui suffira.
— Tu crois ?
— Elle sait, Scott, d'accord ? Elle m'a écouté parler pendant des jours en engrangeant tout ce qu'elle pouvait sur les loups et leurs mœurs, elle sait et elle comprend que, non seulement ton marquage sur elle est accidentel, mais aussi que tu ne pourrais te comporter comme son petit ami que dans des années. Ceci dit, tu n'es pas un loup normal, tu es encore un humain dans ton esprit, tu sais faire la part des choses, donc j'imagine que d'ici à la fin de l'année, tu auras accepté les hypothétiques sentiments que tu pourrais avoir pour elle d'ici là.
Scott demeura silencieux.
— On rentre à la maison ? demanda alors Argent.
— Ouais, j'ai pas envie de passer la nuit tout seul ici. Oh, et Isaac est de patrouille cette nuit, il rentrera demain matin.
Argent opina puis ils quittèrent l'entrepôt et Scott se hissa dans le SUV de Chris en soupirant profondément.
