Le retour à Beacon Hills fut plus compliqué que prévu pour Isaac. Ébranlé par son enlèvement, il demeura cloîtré chez les McCall pendant plus d'une semaine, refusant parfois de sortir de sa propre chambre...
— Je suis inquiète pour Isaac.
— Moi aussi, mais je ne peux pas le forcer à sortir.
Melissa se mordit la lèvre. Elle déposa les assiettes du petit-déjeuner dans l'évier et leva les yeux vers le plafond en entendant du bruit.
— Scott est déjà parti ? demanda-t-elle.
— Non, Anise et lui sont rentrés vers sept heures, ils devraient dormir encore quelques heures.
Melissa opina. Que son fils dorme chez elle avec sa copine, elle n'y voyait pas d'inconvénient, mais elle songeait de plus en plus à lui demander de se prendre un appartement ou bien de s'installer à la savonnerie qui avait un appartement tout aménagé dans les combles.
— Je sais à quoi tu penses... dit soudain Christopher. Et même si j'aimerai bien que mes fils prennent leur indépendance, je te connais et je sais que tu passeras ton temps à t'inquiéter pour eux.
Melissa se mordit la lèvre avec un sourire et posa ses mains sur le torse de l'ancien Chasseur.
— J'aime quand tu les désignes comme tes fils alors que tu n'as aucun lien de sang avec eux... Ni moi avec Isaac.
— Scott le considère comme son frère, c'est normal que vous en fassions autant, tu ne crois pas ?
Melissa sourit. Le couple échangea un baiser et ce fut un raclement de gorge qui les interrompit.
— Pardon, mon grand, sourit Melissa. Nous ne t'avons pas entendu descendre.
— Ce n'est rien, répondit Isaac avec un petit sourire. Dis Chris, je... Est-ce que tu peux me conduire à la savonnerie ce matin ?
Argent haussa un sourcil ; Isaac, les mains dans les poches de son jean, semblait ennuyé. Melissa posa ses mains sur ses bras.
— Ça va aller, chéri, d'accord ? Tu vas t'en sortir et dans quelques semaines, tu n'y penseras plus comme a une chose négative.
— J'en fais des cauchemars...
— Je ne le sais que trop bien, je te veilles chaque nuit quand je t'entends...
Isaac baissa le nez. Melissa lui caressa la joue puis il se redressa et observa Chris qui opina. Il tourna ensuite les talons et remonta dans sa chambre.
— Je suis tellement agacée de ne rien pouvoir faire pour l'aider...
— Tu es là, chérie, c'est déjà énorme, tu ne crois pas ? Tu es sa mère et tu es là quand il a besoin d'aide, même silencieusement.
Melissa plissa le nez. Avec les années, elle avait appris à se faire à l'idée qu'elle n'avait plus un seul fils adulte, mais deux, et elle aimait Isaac autant que Scott, donc le voir dans un tel état de détresse la faisait souffrir.
— Allez, tu va être en retard, dit alors Chris après un coup d'œil sur la pendule du four. Je viens te chercher ce soir ?
— Non, je suis de garde continue, on manque de personnel en ce moment.
— Comment ça se fait ?
— C'est l'hiver, Chris, les gens prennent froid et sont cloués au lit, et un hôpital étant un nid à microbes, c'est très vite fait.
— C'est une sacrée pirouette quand même, tu vas à l'hôpital parce que tu es malade, et si tu ne l'est pas, tu en ressors malade. C'est un comble !
Melissa rigola puis s'empara de ses affaires et des clefs de sa voiture avant de quitter la maison. Fermant la porte à clef, Chris monta à l'étage, passa devant la chambre silencieuse de Scott et s'approcha de celle d'Isaac. Il le trouva assis au bout de son lit et toqua doucement contre la porte ouverte.
— Tu es prêt ? demanda-t-il.
— Je ne vais pas y aller, en fin de compte, je...
— Isaac...
Chris traversa la chambre et tira un tabouret. Isaac leva les yeux vers lui.
— Ça fait une semaine que tu es rentré, il est temps de te secouer. Tu n'as pas été maltraité, battu ou quoi que ce soit d'autre ; tu as eu très peur, d'accord, mais Scott serait allé te chercher à l'autre bout du monde s'il avait fallu...
— Oui, mais...
— Je sais, je connais ton passé, mais tu n'as rien à craindre, personne ne te fera de mal dans cette famille et encore moins dans la meute...
— Chris, s'il te plaît, ne...
Le jeune homme fut coupé par la sonnette de la maison qui résonna. Chris soupira et comme on insistait, il descendit en maugréant et Isaac l'écouta discuter avec la personne. Soudain, une odeur lui parvint aux narines et il renifla avidement en fronçant les sourcils avant de reconnaître et se jeter dans les escaliers.
— Papa, non ! s'exclama-t-il.
Surpris Chris pivota et Isaac s'empara de l'enveloppe et la jeta dans le jardin par la baie ouverte. Elle explosa la seconde suivante en soufflant les vitres dans un grand fracas. Isaac et Chris furent projetés au sol dans une pluie de verre pilé et, après quelques secondes, l'ancien Chasseur se releva en titubant pour monter dans la chambre de son fils, les oreilles sifflantes. Il tomba nez à nez avec Scott dans le couloir.
— Timothy...
Chris s'adossa alors au mur et Anise se jeta sur lui en parlant à Scott ; déjà au loin, des sirènes se faisaient entendre...
.
— Chris ! Chéri !
Melissa se jeta sur les ambulanciers quand ils apparurent avec son mari.
— Qu'est-ce qui s'est passé ?
— Une enveloppe piégée... Mais je vais bien, je suis juste assourdi...
— Et nos enfants ?
— Ils vont bien... C'est Isaac qui m'a sauvé la vie, d'ailleurs...
Il grogna ensuite et l'ambulancier le conduisit dans une salle où une equipe l'attendait. Isaac, Scott et Anise apparurent ensuite, celle-ci transportant Timothy, le petit frère de Scott.
— Oh, mes garçons ! s'exclama Melissa. Tout va bien ? Personne n'est blessé ? Anise ?
— Réveillés en sursaut, mais tout va bien, répondit la jeune femme.
Elle tendit le petit garçon à sa mère qui l'emporta aussitôt avec elle. Scott passa alors un bras autour des épaules de sa compagne qui soupira avant de se tourner vers Isaac.
— Ça va, toi ?
— Je...
Elle lui prit le bras et le fit asseoir. Scott alla récupérer des cafés dans la machine proche puis revint et en tendit un à Isaac.
— Merci...
— Ça va aller. Bois un peu, conseilla Anise. Tu veux quelque chose de plus fort ?
—Non, ça ira, merci...
Anise s'assit alors à côté de lui et lui frotta le dos un moment sous le regard inquiet de Scott.
— Qui ? demanda soudain Isaac.
— Des Chasseurs. C'est leur mode d'avertissement.
— Un avertissement ? s'étonna Anise. Mais pourquoi ?
— Aucune idée, mais c'était clairement destiné à lui... Si tu étais allé ouvrir, Isaac, la personne n'aurait sans doute pas remis le colis...
— Je n'ai pas eu le temps, Chris était déjà en bas et...
Isaac soupira et se frotta le visage. Il regarda alors autour de lui et réalisa que c'était la première fois qu'il mettait les pieds hors de la maison depuis qu'ils étaient revenus de Los Angeles.
— On peut rentrer ? demanda-t-il.
Anise leva alors la tête et indiqua un médecin qui semblait chercher quelqu'un. Quand il croisa le regard de la jeune femme, il rejoignit le trio, les mains dans les poches de sa blouse blanche.
— Monsieur McCall ?
— C'est moi. Comment va mon beau-père ?
— Bien, il n'aura que des tintements dans les oreilles pendant quelques jours, ils devraient disparaître avec le temps, et quelques coupures au visage et aux mains. Il m'a dit que son fils était avec lui ? Lequel...?
— Moi, répondit Isaac. J'ai senti la bombe dans l'enveloppe et je la lui ai prise avant qui ne l'ouvre, elle a explosé en heurtant quelque chose dans le jardin...
— Et vous lui avez sauvé la vie... La police voudrait vous interroger, est-ce que vous êtes en état ?
— Je... Je ne sais pas trop...
Le médecin haussa un sourcil et Scott fit alors signe à Anise d'emmener Isaac prendre l'air. La jeune femme obéit puis l'Alpha se tourna vers le médecin.
— Mon frère a été kidnappé il y a deux semaines, dit-il. Nous l'avons ramené il y a quelques jours seulement et il est encore en état de choc. Je ne pense pas qu'il soit en état de parler à la police, mais je le ferais à sa place. Je suis son Alpha.
— Peu m'importe qui vous êtes, Monsieur, si la police...
— Je suis son Alpha, répéta Scott. Isaac ne parlera à personne sans mon autorisation.
Le médecin plissa les yeux puis Scott releva le menton en serrant les mâchoires.
— Alpha ! s'exclama alors un infirmier. Excusez le docteur Focus, il est nouveau, il ne sait pas...
— Je ne sais pas quoi, Infirmier ?
— Vous... Vous ne savez pas qui est Monsieur McCall et...
— Il pourrait être le président que ça me ferait ni chaud ni froid ! Il fait opposition à la police et...
Un grondement monta soudain et Scott serra les poings. Il se tourna alors vers le médecin et ses yeux rouges luisirent. Focus laissa échapper un son de surprise et recula. Aussitôt la moitié des infirmiers présents se jeta sur Scott pour l'empêcher de croquer le médecin.
— Alpha, tout va bien, dit le premier Infirmier. Il ne sait pas qui vous êtes, il est nouveau...
— Cela m'est égal ! gronda Scott. Beacon Hills m'appartient ainsi que tous les loups qui s'y trouvent ! Christophe Argent est mon père et Isaac est mon frère, celui qui s'en est pris à eux est mort !
— D'accord, Alpha, mais ne vous en prenez pas au docteur Focus...
— Mais qu'est-ce que vous êtes ? demanda alors celui-ci. Quel genre de monstre...
Scott serra le poing et ses griffes percèrent sa peau. Quelques gouttes de sang tombèrent sur le sol clair et l'infirmier prit le poignet de Scott qui lui darda un regard rouge.
— Allez chercher Melissa et éloignez le docteur Focus... dit-il sans lâcher Scott des yeux. Vite...
Deux personnes s'éloignèrent en courant et deux autres entraînaient le docteur Focus dans l'autre sens.
— Alpha, je vais lâcher votre poignet, vous allez vous calmer et redevenir humain, d'accord ? Je sais que vous êtes en colère, mais vous n'avez pas le droit de shifter dans cet hôpital.
— Je sais... gronda Scott.
Il brisa soudain le contact et se détourna en levant les mains. Il s'approcha d'un mur et abattit ses deux poings contre en y laissant une traînée de sang. Le bruit résonna comme un gong et fit trembler le sol.
— Alpha ?
— Chéri ?
L'infirmier se tourna et avisa Melissa qui approchait vivement.
— Pourquoi est-il dans cet état, Marco ?
— Le docteur Focus... Il ne sait pas...
— Et merde. Il ne lui à pas fait de mal ?
— Non, j'ai fait comme vous avez dit, je l'ai regardé dans les yeux et j'ai donné les ordres...
Melissa opina en posant une main sur l'épaule de Marco. Elle se tourna ensuite vers son fils et le fit asseoir sur une des chaises en plastique le long des murs...
.
Chris rentra chez lui dès le soir-même et s'étonna que les baies brisées aient déjà été remplacées. Il trouva un mot sur le comptoir et sourit : Stiles avait fait le nécessaire ; l'enquête était également en cours afin de savoir qui avait envoyé cette lettre.
— Après toi.
— Merci.
Chris pivota et sourit au jeune couple. Scott et Anise l'avaient raccompagné à la maison et allaient ensuite passer la nuit à la savonnerie. En apprenant cela, Chris avait été un peu inquiet, mais Scott lui laissait quatre loups en faction autour de la maison, à la moindre chose suspecte, il serait prévenu.
— Ça va aller ? Tu veux qu'on reste ce soir ?
— Je suis un grand garçon, Scott, je saurais me défendre au cas où...
— On ne peut pas se défendre contre ce genre d'attaque, répondit Anise. Vous voulez que je reste, Monsieur Argent ?
— Je vous ai dit non, les enfanrs, allez vaquer à vos affaires, j'ai suffisamment des quatre loups dans le jardin. Occupez-vous d'Isaac, il en a besoin. Moi je vais manger quelque chose puis j'irais me coucher, j'ai ces cloches dans les oreilles, c'est épuisant...
Scott esquisse un sourire, ils se serrèrent ensuite la main et le jeune couple remonta dans la voiture où Isaac était pelotonné.
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L'aube trouva Isaac roulé en boule dans le canapé défoncé, endormi. Anise était à sa tête, elle-même endormie. Non loin de là, Scott était déjà au travail, entouré de six loups et ils parlaient à voix basse.
— Je veux que vous me recensiez tous les clans de chasseurs de la région, souffla-t-il en regardant la carte étalée devant lui. Stiles n'aura pas les résultats du laboratoire avant deux ou trois jours, d'ici là, je veux que tous soient recensés. Cette bombe était clairement destinée à Argent, mais le livreur ne savait pas qu'il y avait des loups dans la maison sinon il n'aurait pas livré son paquet.
— On fait quoi si on trouve un nouveau clan de chasseurs ? chuchota une femme.
— Vous restez à distance, vous faites gaffe aux éventuels pièges qu'il pourrait y avoir et vous comptez chaque individu. Prenez les en photos si possible et essayez de connaître leurs itinéraires habituels.
— Ça va nous prendre des jours... commenta Liam.
— Demandez à Derek et Jared de vous aider. Jarvis doit encore être en ville, s'il le faut, recrutez le.
— C'est un bébé encore, il pourrait être dépassé par les événements... souffla une louve. Mieux vaut le laisser en dehors.
— De toute manière, c'est à Derek de décider, répondit Liam.
— Partagez-vous la région, vous partez à deux ou trois, mais personne en solo, compris Liam ?
— Oui, Alpha...
Le jeune homme baissa le nez en serrant les mâchoires. Il ne protesta pas et Scott chassa tout le monde. Il observa ensuite Anise et Isaac qui dormaient, et il s'approcha pour réveiller sa compagne qui ouvrit les yeux en sursautant légèrement.
— Que...?
— Chut... Viens.
Anise baissa les yeux sur Isaac qui dormait près d'elle, puis elle quitta le canapé et Scott l'entraina dans la petite cuisine.
— J'ai envoyé mes loups recenser les familles de chasseurs de la région, dit-il en attrapant le cafetière.
— Il y en a combien ?
— Une vingtaine au dernier comptage, l'année dernière. S'il y en a une ou deux de plus, alors nous saurons qui est le responsable de l'attaque.
— Ça ne pourrait pas être une autre famille ?
— Si. Argent s'est retourné contre les chasseurs après la mort de sa fille, et les siens ne le lui pardonnent pas, surtout depuis qu'il est marié à ma mère.
— Parce qu'elle est ta mère, j'imagine ?
Scott opina et s'adossa contre le comptoir pour boire une gorgée de café. Il soupira ensuite et observa Anise un moment.
— Ne me regarde pas ainsi, j'ai l'impression que tu peux voir à travers mes vêtements...
Scott rigola doucement.
— Ça, c'est réservé à Superman ! Et encore, je n'en suis pas sûr... Les rayons X voient à travers tout... Pas seulement les vêtements...
— Trêve de bavardages, tu m'as vraiment réveillée juste pour ça ?
Scott jeta un coup d'œil à son amie avant de secouer la tête. Quand il tendit les bras, Anise comprit que son compagnon avait besoin de réconfort et elle se précipita dans ses bras pour l'enlacer aussi fort que possible...
