Assise sur une chaise en plastique de l'aéroport, Anise attendait son avion pour Portland, afin de se rendre à Salem, la capitale de l'Oregon et aussi là où elle était née et où vivaient ses parents.
Malgré le fait qu'elle allait revoir les siens pour la première fois depuis sept ans, elle était silencieuse, un peu éteinte. Elle n'avait pas beaucoup dormi les dernières nuits ; elle n'avait pas cessé de penser à Scott et à toutes ces discussions à double sens, ces rencontres en demi-teinte, ces non-dits... Elle avait le cœur brisé à l'idée de partir et risquer de ne jamais revenir. Sa voiture l'avait même conduite à la savonnerie à plusieurs reprises, mais elle avait immédiatement fait demi-tour en s'en rendant compte. Elle n'avait aucune envie de revoir Scott et de ne pas savoir quoi lui dire...

Les passagers en partance pour Portland, Oregon, sont priés de se présenter Porte 7, dit soudain une femme dans les haut-parleurs.

Clignant, Anise récupéra son bagage à main et se leva mais, alors qu'elle pivotait pour vérifier qu'elle n'oubliait rien, elle éprouva une sensation habituelle qui lui hérissa l'échine et elle leva les yeux : Scott se tenait là, à trois mètres d'elle, les mains dans les poches, immobile. Quand ses yeux rougirent, la jeune femme sentir ses entrailles se tordre et, mue par son instinct, elle contourna les chaises et se jeta au cou du loup qui l'enveloppa solidement en pressant son visage contre son épaule.

— Mais qu'est-ce que tu fais ici ?
— Tu pensais vraiment partir sans me dire au revoir ? dit-il alors.
— Je suis désolée... Je ne sais plus où j'en suis, partir me fait mal, mais rester tout autant... Je suis perdue, j'ai besoin de m'éloigner de toi, de la meute et de toute cette magie.

Elle recula et posa son front contre celui du loup. Elle lui caressa la joue et il l'embrassa. Quand il brisa le baiser, il recula d'un pas et fouilla ses poches pour en sortir un bracelet en mailles.

— Ton poignet.
— Scott, c'est ta mère qui te l'a offert pour ton anniversaire, je ne...
— Donne ton poignet, maintenant, et ne discute pas.
— Mais...?

La jeune femme finit par obéir et Scott noua le bracelet autour du fin poignet. Elle l'observa un moment puis souffla et regarda son compagnon.

— Je vais revenir, dit-elle doucement en posant sa main sa joue. Quand, je ne sais pas, mais je vais revenir, c'est promis.
— Prends ton temps ; Stiles a raison, entre ses Agents et Chris, je n'aurais pas le temps de m'occuper de toi et tu en souffriras.
— Je n'ai pas vu mes parents depuis sept ans, ils ne savent pas que j'ai quitté un boulot d'agent fédéral pour... toi.

Scott sourit.

— S'ils demandent, dis-leur que tu es mon adjointe.
— L'adjointe de qui ?
— Shérif.

Anise secoua aussitôt la tête.

— Pas question que tu me fasses mentir de la sorte. Techniquement, je suis toujours un agent fédéral, donc je vais le rester et... Je ne sais pas encore pour qui je vais travailler dans cette microscopique ville de Beacon Hills, mais je trouverai bien !
— Je te fais confiance. Tu vas leur parler de moi ?
— Uniquement s'ils demandent.

Scott opina puis la femme du haut-parleur fit un deuxième appel pour Portland et le couple s'étreignit une dernière fois avant sur la jeune femme ne parte au petit trot jusqu'au portique d'embarquement. Scott agita la main derrière la vitre quand elle longea le corridor menant à l'avion, puis elle disparut et il soupira.

— T'as encore le temps de la suivre...

Scott tourna la tête et Liam s'approcha.

— C'est tentant, mais non. J'ai trop à faire pour m'autoriser des vacances maintenant et cette séparation ne peut nous faire que du bien.
— Tu en es sur sûr ?
— Tu m'as poussé à venir à l'aéroport, Liam, je ne voulais pas parce que je croyais qu'elle ne voulait plus me voir, mais c'était le contraire et je sais qu'elle va revenir.

Liam grimaça.

— Mouais. D'ici là, j'espère que tu auras fait le point avec tes sentiments pour elle, parce que c'est cruel de la laisser comme ça.
— Je sais... Allez, rentrons.

Liam opina, Scott lui lança alors les clefs de son camion puis ils quittèrent l'aéroport en silence.

.

Les loups de Scott et les agents de Stiles eurent l'impression de ne pas toucher terre durant les semaines qui suivirent le départ d'Anise. Tous les jours, des pistes sur l'agresseur de Christophe Argent arrivaient sur le bureau de l'Alpha et il avait bien du mal à démêler le vrai du faux et à couvrir tout.

— Scott, on vient de recevoir une nouvelle piste...
— Non. Stop, j'en peux plus.
— Mais ?

La louve qui venait d'arriver observa le groupe à la dérobée et déglutit.

— Vous êtes combien ? demanda-t-il alors.
— Seize duos loup agent, pourquoi ? répondit Stiles.
— Vous allez chacun piocher une famille de Chasseurs et les camper pendant deux jours et une nuit.
— Scott, c'est bien trop dangereux, commenta Derek.

Le concerné lui jeta un regard aigu et Derek grimaça en se redressant. Il s'approcha de la table couverte de cartes et de papiers en tous genres et s'empara, sans un mot, de la photo d'une femme.

— Mathilda Carven. Viens Stiles, allons-y.

Surpris, celui-ci croisa le regard de son meilleur ami, mais il n'y vit que du noir et il s'empressa alors de suivre son amant. Dans un silence pesant ensuite, chaque duo de loup et agent s'empara d'une photo au hasard sur la table avant de quitter la savonnerie...

— Voilà une bien étrange manière de procéder...

Scott leva les yeux et reconnut son beau-père sortant des ombres.

— Est-ce que l'absence d'Anise commence à se faire sentir ? reprit Argent.
— C'est toute cette histoire d'attentat surtout qui commence à me porter sur les nerfs...
— Alors arrête. Écoute, depuis cette attaque, j'ai en permanence deux loups qui me surveillent de loin et Isaac quand je suis à la maison... Si quelqu'un veut à nouveau s'en prendre à moi, il va devoir franchir un des systèmes de sécurité les plus efficaces au monde...

Scott posa ses mains sur la table et soupira. Il saisit alors une photo, la dernière, et la retourna. Argent plissa le nez.

— Gregory Fonteroy... J'ai déjà travaillé avec sa famille, mais ils ne sont pas belliqueux...
— Crois-tu ? Pas plus tard que le mois dernier, il a menacé son voisin de lui tirer dessus avec son fusil si jamais il voyait encore une ronce grimper sur sa palissade...

Argent serra les lèvres.

— Très bien... On y va ? demanda-t-il.
— Je vais y aller seul, ce n'est pas prudent pour toi.
— Scott, je suis un ancien Chasseur...
— Et tu es le père de trois garçons dont deux qui ont déjà perdu une leur père de façon brutale, rétorqua le loup, les sourcils froncés. Alors tu m'excuseras du peu !

Argent préféra ne rien répondre et Scott quitta la savonnerie sans un mot de plus. L'ancien Chasseur soupira alors et observa la table. Il décida ensuite de faire un peu de rangement puis il se prépara du thé et décida d'attendre les rapports des premiers duos...

.

— J'ai froid.
— Moi aussi...

Stiles eut un violent frisson et Derek l'enveloppa un peu plus entre ses bras, rabattant la couverture sur eux. Ils se tenaient entre les racines d'un chêne immense, juste en face de la maison abritant la famille de Chasseurs qu'ils avaient choisie.
Les Carven avaient tout l'air d'une famille normale, de prime abord, mais quand on tendait un peu l'oreille, il devenait clair qu'ils n'avaient pas les mêmes discussions vespérales qu'une famille lambda...

— Ils vont se coucher, dit soudain Stiles.

Il baissa une petite paire de jumelles nocturnes et soupira. Il sentit alors le souffle brûlant de son compagnon dans son cou et appuya sa tête contre son épaule.

— L'absence d'Anise commence à peser sur Scott... dit-il doucement. Je ne pensais pas...
— Leur lien est fragile, mais ce n'est pas l'imprégnation qui parle, là, répondit Derek.
— Ils sont vraiment amoureux, alors ?
— Sans doute pas encore, mais Scott est très attaché à elle, peu importe ce qu'il dira pour te contredire.

Stiles soupira.

— Franchement, plus le temps passe et plus je me demande ce qu'elle pourrait lui apporter. Pas que je remette en question leurs liens, hein, mais voilà, elle n'est pas grand-monde... Elle est juste une laborantine du gouvernement qui a bossé pour un Colonel stupide qui aimait découper de la créature surnaturelle...

Derek grimaça et releva la tête.

— Elle m'a empêché de mourir, chéri... répondit-il. Sans Anise, je serais mort sous leurs scalpels bien avant que tu ne puisses venir me chercher...

Stiles ferma les jeux. Les bras de Derek se resserrèrent autour de lui et il soupira. Il avisa alors quelque chose du coin de l'œil et tourna la tête.

— Derek, la lumière s'est rallumée dans la maison... souffla-t-il.
— Où elle va ? Elle est en pyjamas ?

Stiles opina. La femme blonde qu'ils avaient sur leur photo, le chef de la famille Carven, enveloppée dans un gilet, jambes nues et en savates, quitta la maison sans faire de bruits, une lampe sourde à la main. Elle contourna le perron et quand elle eut disparu derrière la maison, Derek se tendit. Stiles posa une main sur sa cuisse.

— Attendons qu'elle revienne, elle est peut-être juste aller pisser...
— Les cabinets au fond du jardin n'existent plus, Stiles... grommela le loup.

Celui-ci leva les yeux au ciel puis soupira. Il jeta un coup d'œil à sa montre et nota qu'il était une heure du matin. Ils étaient là depuis l'aube, ils n'avaient pas bougé, cachés dans leur recoin à une vingtaine de mètres de la maison isolée.
Avec un reniflement, Stiles opina ; Derek resserra sa prise autour de lui, et ils ne détachèrent ensuite plus leur regard de l'endroit où la femme était partie.

Une éternité sembla s'écouler avant qu'elle ne revienne enfin et Derek nota immédiatement que son attitude avait changé. Elle tenait son gilet serré sur sa gorge et marchait bizarrement.

— Elle a dû tomber... suggéra Stiles. Allons voir.

Un coup de vent passa alors sur eux et Derek huma l'air avant de plisser le nez.

— Ça sent les hormones... dit-il.
— Les quoi ?
— Cette femme... Je sais ce qu'elle a fait.

Stiles se tourna vers son compagnon sans comprendre et le trouva soudain sombre et fermé.

— Chéri ? demanda-t-il.
— Cette femme est l'amante d'un loup.

Le jeune agent fédéral ouvrir de grands yeux surpris et déglutit.

— L'un de Scott ?
— Non, je ne connais pas son odeur. Mais elle n'est pas la femme qui a attaqué Argent... Partons.

Après un dernier regard sur la maison de nouveau silencieuse, Stiles opina et ils reprirent la direction de Beacon Hills. En chemin, Stiles demanda a son compagnon ce qu'il pensait de la relation entre Scott et Anise.

— Anise est ce que j'ai de plus proche d'une meilleure amie, je suis très mal placé pour donner mon avis, si tu veux savoir.
— Ouais, je sais, mais quand même... Je veux dire, elle t'a sauvé la vie et...
— Et rien, Stiles, d'accord ? Anise est une gentille fille un peu paumée qui a tout abandonné pour suivre un loup-garou qui l'a griffée malencontreusement. Le venin n'a cependant pas fonctionné autant que prévu et cela les met tous les deux dans une situation de "je t'aime moi non plus" qui mets tout le monde mal à l'aise...
— Scott devrait la mordre ?
— Non. Mais quand elle reviendra, parce qu'elle reviendra, Deaton devra s'occuper d'elle et faire en sorte de la couper de Scott. Si les sentiments qu'ils partagent sont suffisamment solides, alors ils resteront ensemble, sinon elle reprendra sa vie comme avant...

Stiles serra les lèvres. Derek appuya soudain sur un petit appareil collé au pare-brise devant lui et la porte du garage souterrain de l'immeuble où ils vivaient s'ouvrit. La voiture s'y engouffra tandis que toutes les lampes s'allumaient.

Quelques minutes plus tard, ils étaient à l'appartement et ils retrouvèrent Jared endormi sur le canapé.

— Laisse-le dormir, souffla Stiles. Viens, allons nous coucher, je suis frigorifié et épuisé.

Derek opina, déposa une couverture sur le dos de la jeune panthère puis rejoignit son amant dans leur chambre.