— Comment tu te sens, Malia ?
— Bien. C'est vraiment étrange comme sensation, mais depuis que la douleur est partie, je me sens bien. Je vais pouvoir sortir d'ici ?
Melissa hocha la tête. Elle déposa le carnet au pied du lit de la jeune femme puis l'observa un moment.
— Derek va t'accompagner à Oshawa, dit-elle ensuite. Peter est déjà là-haut depuis deux semaines, pour tout préparer. J'ose espérer que tu es prête à changer. Dans six mois, Anise et Scott vous rejoindront, si tu n'as pas changé, elle te remettra six mois de pénitence, et ce sera ainsi jusqu'à ce que tu cèdes.
Malia baissa le nez. Cela faisait un mois maintenant qu'elle était seule dans son corps. La potion qui lui avait été injectée Anise avait totalement inhibé son coyote, elle ne le sentait même plus au fond d'elle, prêt à bondir, et cela la perturbait.
— Je vais essayer, répondit elle. Je suis tellement désolée de tout ce que j'ai fait... Mon coyote était furieux après le monde entier, j'en voulais à Scott de m'avoir mise enceinte, à mon père d'avoir voulu m'en débarrasser en m'amenant en Suisse pour cela, aux médecins pour leur travail de sagouin... Et à Anise surtout. Pour avoir pris ma place après de Scott.
— Est-ce que tu lui ferais des excuses ?
Malia baissa le nez et resta silencieuse ; Melissa n'insista pas et lui proprosa de se reposer, qu'elle signerait sa décharge dans la matinée. Elle rejoignit ensuite le bureau des infirmières et trouva son fils l'attendant, sans surprise.
— Tu viens contempler ton œuvre ? demanda-t-elle, un peu acide.
— Arrête. Je n'ai pas eu le choix tu le sais, répondit Scott.
— Peut-être, mais Malia souffre énormément depuis des années et la punir en la privant d'une moitié de son être, c'est barbare.
— Maman, je suis le maître incontesté de la région, si je me laisse marcher dessus par un coyote alors qu'elle s'en est prise à ma femme et à mon père, je passe pour quoi ?
— Un chef clément.
Scott serra les mâchoires. Il se détourna soudain et quitta le bâtiment ; Melissa soupira.
— Tu as vraiment besoin de le charger comme ça ? demanda Anies, sa collègue.
— Je ne suis pas d'accord avec sa manière de faire, c'est tout. Ils auraient dû s'asseoir autour d'une table et tout mettre à plat plutôt que d'en venir aux mesures coercitives tout de suite.
— Mel, ton fils est la créature la plus puissante de la région, il fait la pluie et le beau temps et nous sommes en sécurité grâce à lui...
— Tu es de quel côté ? répondit Melissa en fronçant les sourcils.
— Aucun, mais il a raison sur un point, répondit Anies.
— Lequel ?
— Il est l'Alpha, cette gamine n'est qu'un Omega... Ce n'est même pas un Bêta, elle n'a aucun droit sur la meute.
Melissa pinça la bouche et souffla par le nez. Elle adorait son fils aîné, là n'était pas le problème, simplement, parfois, ses décisions se heurtaient à l'altruisme inné de sa mère, qui n'était pas devenue infirmière sur un coup de tête...
.
À l'autre bout de la ville, chez les McCall, quand bien même la boîte à lettres avait été renommé avec le patronyme Argent depuis plusieurs années maintenant, la maison était silencieuse. Timothy était au jardin d'enfants, Chris à la mairie où il officiait comme garde forestier depuis qu'il avait épousé Melissa, et seuls Anise, Scott et Isaac demeuraient à la maison, tous trois dormant encore après une longue nuit de garde à la Savonnerie.
Quand Anise ouvrit un œil, elle soupira et se frotta le nez. Le bras passé sur sa taille se replia soudain et Scott se tourna de l'autre côté en grognant. La jeune femme lui jeta un coup d'œil puis reporta son attention sur le radio réveil et grimaça. Elle décida de se lever et s'enroula dans un sweat de son compagnon avant de descendre préparer un petit-déjeuner.
La porte d'entrée se fit entendre alors qu'elle surveillait les œufs, et Derek apparut. Anise lui décocha un sourire.
— Je vois que tu te lèves seulement... dit-il.
— Couchée à quatre heures du matin, je n'ai plus habitude, moi ! répliqua la jeune femme, amusée. Des œufs ?
— Je sors de table avec Stiles, mais merci. Si tu as du café, par contre... ?
— Sers-toi.
Derek récupéra donc une tasse propre sur l'évier et se servit le liquide noir avant de s'appuyer contre le comptoir.
— Si tu es là alors que les gars pioncent, c'est pour me parler de cette expérience que tu veux faire sur Jared ? dit alors Anise.
— Ouais. Je sais que Scott t'en a touché deux mots le soir où Malia a pété un câble, mais on n'en a pas reparlé et j'ai l'impression que Jared est en train de déprimer...
Anise se servit les œufs brouillés et s'assit sur un des tabourets du comptoir.
— Je veux bien essayer, mais je n'ai aucun matériel pour faire les tests, dit-elle. Il me faudrait un laboratoire moderne...
— Le DPCE doit bien avoir ça quelque part, répondit Derek. Tu comprends, Jared est mon meilleur ami, le voir mourir de sa morsure de panthère m'a brisé le cœur et même si j'aimerai qu'il soit un loup aussi, j'ai peur que si je le mords, il meure encore une fois par ma faute.
— La première fois...
— Si, c'était ma faute, parce que si je lui avait dit que j'étais un loup-garou dès le début, il n'aurait pas tenté de s'en prendre aux panthères... Je lui aurait appris à fuir quand les choses se gâtent et à se cacher...
Anise pinça les lèvres.
— Tu l'aimes, hein ?
— Ouais. C'est mon meilleur ami, sans lui je ne pense pas que j'aurais réussi à rester loin de Beacon Hills et de Stiles aussi longtemps.
— Tu... Est-ce-que s'il n'avait pas été tué, tu aurais pu transformer cette amitié ?
Derek demeura silencieux puis opina. Anise hocha la tête en retour puis un silence s'installa.
— Je vais voir avec Stiles si le DPCE peut me fournir un laboratoire, dit-elle ensuite. Je n'ai aucune idée de comment le sang de Jared va réagir avec ton venin, ou celui de n'importe quel loup-garou, mais je vais essayé de faire quelque chose.
— Si ça ne donne rien, Jared comprendra et reprendra le dessus, mais mon odeur le rend malade et il n'aime pas être inutile.
— Je pourrais toujours fabriquer une potion qui masquera l'odeur des loups à son nez, si vraiment.
Derek esquissa un sourire puis laissa la jeune femme qui termina son petit déjeuner, pensive. Elle sursauta quand une porte se fit entendre à l'étage ; Isaac apparut torse nu, en train d'enfiler un t-shirt, et l'embrassa sur la joue en passant.
— Bien dormi ?
— Oui, merci et toi ?
— Bien, merci. Pourquoi est-ce que l'odeur de Derek flotte dans la cuisine ?
— Il est passé dire bonjour, répondit Anise avec un sourire. Il voulait me parler de son idée pour aider Jared.
— Oui, j'en ai entendu parler... Tu crois que c'est faisable ? Je veux dire, une fois qu'on est transforme en un type de garou, on ne peut plus changer, notre ADN est profondément altéré et...
— Pour le commun des mortels, oui, mais je suis une sorcière de Salem, et la chasse au garou, c'est notre leitmotiv, Isaac... répondit Anise en plissant le nez.
Le jeune homme grimaça à son tour et tourna alors la tête. Scott entra dans la cuisine, posa une main sur son épaule puis contournant le comptoir et embrassa sa compagne.
— Bien dormi ? leur demanda-t-il.
— Ça va, j'ai connu pire, répondit Isaac avec un sourire. Je vais voir Malia à l'hôpital ce matin, quelqu'un veut venir ?
— Non, je dois appeller Stiles pour lui demander un laboratoire moderne... répondit Anise.
— Ah, tu as parlé avec Derek, c'est ça ? demanda Scott.
— Il a fait un saut rapide ici ce matin, mais je lui ai dit que sans laboratoire, je ne pourrais rien faire...
— Compréhensible. Peut-être que ma mère pourrait t'aider ? Les laboratoires de l'hôpital sont en général à la pointe de la technologie...
Anise hocha la tête. Elle assura poser la question à Melissa puis prépara des œufs pour les deux garçons qui la laissèrent rapidement pour se rendre à la Savonnerie. La jeune femme, elle, demeura seule à la maison et, une fois habillée, se permit de faire les lits et de passer un coup de balai rapide avant de partir à son tour en laissant un mot sur le frigo pour le premier qui rentrerait, disant qu'il y avait une lessive à étendre...
.
Assis dans le bureau de son père, Stiles était silencieux. Il venait de contacter son supérieur du DPCE pour avoir des nouvelles de la création d'une branche à Beacon Hills, puisque l'immersion des agents avait été un franc succès, mais il n'avait pas obtenu de réponse concrète et cela le dérangeait un peu.
— Ne fais pas cette tête, fiston, c'était couru d'avance. Beacon Hills est trop dangereuse pour que le FBI risque d'y perdre de l'argent plutôt qu'en gagner...
— Peut-être, mais moi je préférerai que les monstres du pays restent en Californie, et ne soient pas dispersés à tous vents sans qu'on puisse les recenser, si tu vois ce que je veux dire.
— Tu penses aux panthères en disant ça ?
— Les vampires aussi... Ceux qui étaient au nord sont partis sans un mot, en pleine nuit, et j'ignore où ils sont partis...
— C'est peut-être mieux, non ?
Noah déposa une tasse de café devant son fils qui le remercia d'un signe de tête.
— Oui et non parce que ce sont les premiers vampires qu'on rencontre, que je n'ai rien dans ma base de données sur eux et que j'aurais aimé pouvoir en cataloguer au moins un, répondit-il ensuite.
— Dans ce cas, je suis votre homme.
Les deux hommes tournèrent la tête et un troisième homme fit un pas en avant en sortant des ombres du couloir.
— Je peux vous aider ? demanda le Shérif.
— Je l'espère. Je m'appelle Gustave Von Dermer, je suis un vampire, et je viens d'Allemagne.
— Avec un nom pareil, le contraire aurait été compliqué, ricana Noah. Que puis-je faire pour vous aider ? redemanda-t-il.
— Eh bien... Comme je viens de le dire, je débarque d'Allemagne, le seul problème, c'est que j'en suis parti il y a deux cents ans...
Le père et le fils se regardèrent.
— Vous voulez dire que... commença Stiles.
— Oui, mon cher... Ma caisse de transport s'est retrouvée dans un musée de la marine depuis qu'elle a été débarquée, il y a deux siècles, maintenant. Je suis parti du Danemark le trois septembre mille sept cent quarante trois, endormi dans une caisse de bois, stockée dans la soute avec d'autres vampires et le matériel qui était envoyé alors au Nouveau-Monde. Pour une raison que j'ignore, ma caisse à été entreposée dans le stockage d'un musée de New-York et oubliée. Mes compagnons, eux, ont tous été réveilles, comme nous l'avions demandé à l'équipage avant de partir, moyennant un petit pécule, bien entendu.
Stiles pencha la tête d'un air évident.
— Vous cherchez quelqu'un ? demanda-t-il ensuite.
— À vrai dire, je cherche une famille, tout simplement. J'ai été réveillé accidentellement il y a quatre mois suite au déménagement du stockage et j'erre dans ce pays depuis, terrorisé par la vitesse à laquelle ce monde a évolué. Je vis littéralement dans la rue et, à force d'écouter des conversations qui ne m'étaient pas destinée, j'ai fini par entendre parler de Beacon Hills, comme quoi il s'y passerait des choses étranges, surnaturelles...
— Disons que nous avons notre lot de distractions magiques, en effet, répondit Noah. Je suis un loup-garou, mon fils est un humain, son mari est un loup-garou supérieur, et le Vrai Alpha dirige la meute de Beacon Hills depuis plus de dix ans maintenant... Avec sa femme qui est une sorcière de Salem.
Le vampire cligna puis s'assit lentement sur un banc.
— Oserais-je espérer pouvoir trouver une petite place dans tout ce petit monde hétéroclite...? souffla-t-il.
— Possible. N'avez-vous pas recherché vos compagnons de voyage ? demanda Stiles.
— Si, mais la majorité sont morts, quant aux autres, ils ont vécu leur vie depuis deux siècles et je doute qu'ils aient envie de s'encombrer avec... un fossile.
Le vampire baissa le nez ; le père et le fils se jetèrent un regard.
— Venez avec moi, dit soudain Stiles en se levant. Je vais vous présenter à Scott McCall.
— McCall... L'Alpha ?
— Lui-même. Vous avez déjà entendu parler de lui ?
— Oui, plusieurs fois... J'ai fait la rencontre d'une louve il y a deux mois, chez qui j'ai vécu quelques jours avant de repartir.
— Qui donc ?
— Sabine ?
Stiles eut un sourire.
— Nous les avons aides à démanteler un trafic de créatures surnaturelles, à destination de l'Allemagne, d'ailleurs, il y a quelques mois, répondit-il.
— Oh... Elle ne m'en a pas parlé.
— C'était une grosse opération, tout s'est bien passé, heureusement. Allez, venez, allons-y avant qu'il ne fasse nuit et que... D'ailleurs, il fait jour, pourquoi vous ne dormez pas ?
Gustave sourit puis leva sa main gauche et Stiles observa la grosses chevalière à son majeur.
— Sabine me l'a faite faire, dit ensuite le vampire. Une sorcière l'a enchantée pour me permettre de profiter du soleil... C'est tellement magnifique...
— Quel âge avez-vous ? demanda alors Noah.
Gustave lui coula un regard presque triste.
— Six cent cinquante trois ans et six mois, répondit-il. Je suis né à l'aube de l'humanité moderne telle que nous la connaissons, ou presque, avant d'être pourchassé par des sorcières et de fuir l'Europe. J'ai quitté l'Allemagne alors que j'avais été condamné à mort pour sorcellerie, un comble pour une créature de la nuit...
— Vous n'êtes pas un sorcier, mais un démon, répondit Stiles. J'ai bouquiné depuis qu'on a rencontré une famille de vampires, il y a quelques semaines, et je sais que même si c'est la magie qui vous ramène à la vie, c'est un être démoniaque qui s'installe dans votre corps et votre esprit.
— En effet... souffla Gustave. Et parfois, c'est le pire fardeau de l'univers, mais me donner la mort est au-dessus de mes forces, et croyez-moi, j'ai essayé des dizaines de fois.
Un silence s'installa alors puis Stiles souhaita une bonne journée à son père et quitta le commissariat avec le vampire sur les talons.
