Liam explosa de rire.

— J'aurais adoré voir ça ! Franchement, t'assures.
— Merci. Et je dois avouer que me servir de mes pouvoirs de la sorte est plutôt plaisant. Je ne fais de mal à personne et ça fait toujours son petit effet devant les mortels. Tu aurais du voir ce gamin remorquer le policier dehors pour être aussi loin de moi que possible !

Liam sourit. Anise était de retour à la savonnerie pour une partie de la nuit, le temps de distribuer les missions de surveillance.

— Allez, assez rigolé. Isaac, tu vas avec Samuel, il y a deux nouvelles maisons vides sur Spanish Road à surveiller jusqu'à samedi prochain, dit-elle alors. Allez y faire un tour, histoire de repérer les environs.
— Noté, répondit le dénommé Samuel.
— Derek, Marina, Carlos et John, vous allez au stade Primrose, il y a un match de foot ce soir et j'ai entendu à la pharmacie qu'il pourrait y avoir du grabuge...
— On en est, répondit Derek.
— Les autres, rien de particulier, reprit la jeune femme. Prenez une maison à surveiller sur le tableau, comme d'habitude, et passez une bonne nuit.

Elle s'écarta alors du grand tableau représentant la carte de Beacon Hills ou des punaises étaient plantées aux endroits à surveiller durant les rondes de nuit ou de jour. Liam observa le tableau un moment puis se tourna vers Anise.

— Une question ? lui demanda-t-elle.
— Non... En fait si.
— Laquelle ? Tu peux tout me dire, d'accord ?
— Oui, je sais... En fait, c'est pas personnel, enfin pas tellement... Je voudrais juste savoir si tu serais capable de localiser Gustave dans le monde...?

Anise pencha la tête.

— Je ne peux pas le localiser comme tu sembles l'imaginer, mais je peux contacter un convent dans un des pays d'Europe pour essayer de savoir s'ils ont croisé la route de Dracula récemment. Il te manque ?
— Si tu savais... C'est terrible, j'en ai mal au ventre parfois...

Anise sourit doucement.

— Un être cher vous manque et tout est dépeuplé, récita-t-elle alors.
— C'est tout à fait ça. Je me sens seul alors que je suis constamment entouré... Comment tu fais, sérieux ?
— Scott est...
— Je parle des tiens. Vous vivez tous à Salem ou à Portland, c'est à des centaines de kilomètres d'ici, pourtant tu n'as pas l'air de souffrir de leur absence...

Anise pencha la tête.

— Nous autres magiciens sommes reliés les uns aux autres par les lignes de force qui parcoururent la Terre, répondit-elle. C'est à travers ces lignes que nous puisons notre magie, certains la transforment, d'autres l'utilisent brute, comme moi. Les Salem sont suffisamment puissantes pour absorber cette magie, et je pourrais facilement réduire la ville entière en cendres si je pouvais...
— Scott aussi hein... Mais c'est plus salissant, pour nous autres.

Anise rigola.

— Allez va bosser !
— Oui, Maman !

Le jeune loup lui tira ensuite la langue puis rejoignit ses compagnons devant la carte de la ville. Anise croisa les bras et soupira.

— Tu l'aimes bien hein ?
— Ouais. Et il me le rend bien.

Stiles sourit.

— Qu'est-ce que tu fais ici ? demanda alors la jeune femme en se dirigeant vers le bureau.
— J'ai accompagné Derek, mais je vais rentrer, je suis KO. Franchement, je ne pensais pas qu'être directeur de département c'était aussi difficile.

Anise haussa un sourcil ; Stiles lui expliqua alors que le DPCS, du moins la branche qu'il avait ouverte ici, à Beacon Hills, rencontrait un succès dont il n'avait pas eu idée au début. Des dizaines d'agents venus des grandes villes de tout le pays voulaient venir suivre une formation expresse dans le bastion des lycans, là où régnait le Maître en personne...

— Et c'est pas moi qui le dis, acheva Stiles, les mains sur les hanches. Même le patron voudrait venir faire un stage !
— Bah dis donc... Dis-moi quand tu voudras intégrer des agents, que je puisse les mettre avec un loup pas trop agité.
— Justement je suis venu pour ça. Comme Scott est encore à l'hosto, il m'a dit de t'en parler.
— D'accord. Tu veux commencer quand ?
— Demain matin, je voudrais que tu me prêtes six loups de jour, et demain soir, une dizaine de loups de nuit.

Anise fronça les légèrement les sourcils puis attrapa un grand carnet sur le bureau.

— Demain matin, j'ai quatre loups de prévus, quatre autres demain après-midi... Et la meute de nuit me semble complète. Tu voudrais des profils spécifiques ?
— Évite de me donner Isaac, Liam ou Derek, je n'ai pas envie que mes agents soient traumatisés dès le début...

La jeune femme rigola. Elle saisit ensuite un stylo et cocha six noms sur la journée, puis dix pour la soirée et la nuit.

— Je les mets au courant et je t'envoie un message, dit-elle ensuite. Première patrouille à six heures, rendez-vous ici. Pas de talons ou de jupe, survêtement accepté.
— Okay, ils seront là. Merci Anise. Tu te débrouilles très bien, tu sais ?
— Je fais de mon mieux, je...

La jeune femme s'appuya soudain sur le bureau, le visage crispé.

— Hé... Ça va ? demanda Stiles. Anise ?
— Ouais, je... Une crampe d'estomac, ce n'est rien, j'ai du manger un truc qui passe pas.

Elle s'assit au bout de la chaise derrière elle et massa son flanc. Stiles lui souhaita ensuite une bonne soirée et la jeune femme le remercia ; quand il fut parti, elle déporta sa main et serra son pull.

— Tu me fais quoi ? demanda-t-elle à voix basse. T'as pas intérêt à faire des conneries avant que j'ai pris une décision, compris ?

La douleur diffuse s'estompa alors et Anise souffla. Elle savait très bien que ce n'était pas une crampe d'estomac, mais elle ne parvenait pas à déterminer si cette douleur venait du fœtus de trois semaines niché dans son utérus, ou bien de la magie hybride qu'il avait dans le sang... Ou encore de sa propre magie.
Inspirant, elle se releva, nota les noms des loups qu'elle avait choisis et entreprit ensuite de chercher leurs numéros dans le gros Rolodex que Scott avait sur le bureau et qui tronait là fièrement comme une antiquité. Il avait bien évidemment toutes ces données dans son téléphone et son ordinateur, mais il aimait aussi les avoir sur papier juste au cas où.

Deux bonnes heures plus tard, la jeune femme avait envoyé les SMS aux concernés et, avisant l'heure, elle quitta le bureau pour se faire une tasse de thé dans la cuisine adjacente. L'entrepôt était totalement vide, la nuit, quand tous les loups disponibles étaient en patrouille dans la banlieue. Certains se rendaient également en ville, dans les quartiers risqués où les policiers n'étaient pas les bienvenus, mais en général, ils demeuraient autour de Beacon Hills.

Appuyée contre l'évier, Anise attendait que la bouilloire se mette à siffler tout en lisant les instructions inutiles pour préparer un thé convenable imprimées sur la boîte. Personne ne lis ces instructions, songea-t-elle en la reposant. Elle soupira ensuite ; la bouilloire émit soudain un son strident et elle coupa la plaque électrique dessous. Elle se servit l'eau bouillante et y plongea un sachet ainsi que deux sucres avant de s'emparer de la tasse pour retourner dans le bureau. Elle n'avait pas fait deux pas qu'une fulgurante douleur, comme un coup de couteau dans le ventre, la figea sur place, le souffle coupé.

— Qu'est-ce que... souffla-t-elle. Ah!

Nouveau coup de poignard. Elle fléchit les genoux en posant la tasse sur le comptoir. Lentement, elle tomba les genoux en serrant sa main libre contre son ventre.

— Non... haleta-t-elle. Pas ça...

Un troisième coup de poignard la fit crier de couleur et elle tomba au sol, sur le côté, en se roulant en boule. Elle sentit alors une chaleur anormale au niveau de ses cuisses et vit trouble. La seconde suivante, elle tombait dans les pommes.

.

— Punaise, encore une nuit bien chiante !

Liam rigola et entra dans l'entrepôt, mais à peine avait-il poussé la porte qu'il se figea, tout comme Jasmina et Laurel, les deux louves croisées en chemin pour rentrer.

— Du sang, dit Jasmina en reniflant. Ça sent le sang frais.
— Anise...! lâcha alors Liam.

Tous les trois se ruèrent dans le bâtiment en appelant la jeune femme, mais tout était vide.

— Elle est là ! s'exclama soudain Laurel.

Liam et Jasmina la rejoignirent dans la cuisine et trouvèrent la compagne de leur chef sur le sol, inconsciente.

— Recule, Liam, dit alors Laurel. Ce n'est pas ta place...

Le jeune loup fronça les sourcils et Jasmina s'approcha en retirant la chemise qu'elle avait en guise de veste. Elle l'a déposa sur la jeune femme.

— Tu le savais ? demanda-t-elle a Liam.
— Je...
— Li ! Est-ce que tu savais...?!
— Je... Je ne...

Il recula soudain, les larmes aux yeux, et Laurel amorça le mouvement pour le suivre, mais Jasmina la retint.

— On s'en occupera plus tard, dit-elle. Faut l'amener à l'hosto.
— Merde, Jas, il est là-bas... Et sa mère aussi...
— Je sais, mais elle vient de faire une fausse couche, il faut qu'elle soit vue par quelqu'un...

Laurel renifla en caressant les cheveux d'Anise. Elle passa ensuite ses mains sur ses joues et se releva en passant ses bras sous les genoux et le dos de la jeune femme. Elle l'enleva du sol puis toutes deux prirent la direction de l'hôpital en courant...

.

— Personne ne doit savoir, pas même Mme McCall, compris ?
— C'est ma chef, elle...
— Donnez un faux nom. La patronne s'occupera de leur dire la vérité plus tard. Ou pas.

Le médecin devant les deux jeunes femmes, au service des urgences, hésita. Il observa Anise puis hocha la tête.

— Très bien, dit-il. Vous l'avez trouvée quand ?
— Il y a une moins de dix minutes. Elle venait de se faire de thé apparement, la tasse était encore brûlante. Elle doit pas être dans cet état depuis longtemps.
— Bon, on va s'occuper d'elle, répondit le médecin. Vous pouvez aller attendre dans la salle d'attente.
— Je vais rester, dit Jasmina. Toi, va t'occuper de Liam.

Laurel opina et quitta aussitôt les urgences. Passant à quatre pattes elle détala dans les rues vivement éclairées de la ville et se faufila rapidement dans les ruelles plus sombres pour rejoindre la savonnerie. Quand elle y entra, par les quais de chargement, l'odeur de sang frais lui prit la gorge et elle plissa le nez. Elle repéra ensuite l'odeur de Liam et le trouva à l'étage, dans le dortoir, recroquevillé dans un coin.

— Oh, mon lapin... dit-elle doucement en se baissant devant lui.

Âgée de quarante deux ans, Laurel était l'une des louves les plus âgées de la meute et pour elle, tout ce qui avait moins de quarante était sujet à obtenir un surnom affectueux. Sauf Scott, bien évidemment.

— Laurel, elle... Elle va bien ? demanda le jeune loup.

Il avait les bras autour des genoux et ses mains tremblaient. Laurel posa les siennes dessus.

— Elle ira bien, dit-elle. Dans quelques jours, quelques semaines, mais elle ira bien. Depuis quand le savais tu ?
— Quelques jours... C'est moi qui lui ait annoncé, je l'ai senti... Je n'arrive pas y croire, elle... Comment c'est possible ? Est-ce que c'est parce que c'est une sorcière ?
— Non, je ne pense pas, des hybrides, il y en a tout au long de l'Histoire, répondit la louve. C'est un coup du sort, c'est tout. Ce n'était pas le moment et l'inconscient de la patronne l'a su avant même qu'elle ne s'en rende compte...

Liam se passa une main sous le nez. Il renifla et serra les lèvres.

— Qui d'autre le savait ? demanda alors Laurel.
— Derek, Beth et... Chris, je crois. Je leur dirais demain...
— Donc Scott n'était pas au courant ?
— Pas encore, elle avait planifié de le lui dire mais avant elle devait tâter le terrain ; ils n'en ont pas encore parlé et... Enfin voilà quoi.

Laurel hocha la tête. Elle soupira ensuite et s'assit en tailleurs en regardant dehors.

— J'en ai fait deux, dit-elle alors. Des fausses couches... Une fois quand j'avais dix-neuf ans, et une deuxième à trente huit ans...
— On s'en remet ?
— Jamais complètement, mais avec le temps, la douleur s'estompe. J'ai eu quatre enfants entre ces deux fausses couches, j'ai eu peur, à chaque fois, mais finalement tout s'est bien passé. La dernière a été plutôt bénéfique car à trente huit ans, je ne me voyais pas recommencer encore tout ce cirque pour un cinquième bébé... Mon mari a très bien compris et m'a soutenue jusqu'à ce que j'aille mieux.
— Ça fait longtemps que tu es une louve ?
— De naissance, répondit la femme. Quand j'ai découvert mes capacités, mes parents adoptifs ont prit peur et m'ont chassée de la maison, j'avais seize ans. Je suis alors partie et j'ai fini par trouver une meute d'Omegas, je me suis intégrée à eux, mais j'ai vite regretté. Quand je suis tombée enceinte, je suis repartie. J'ai perdu le fœtus quelques jours plus tard. J'ai alors décidé de quitter les États-Unis et je suis allée au Mexique.
— C'est pas très loin depuis ici...
— Justement. J'y suis restée douze ans, j'ai trouvé un mari, j'ai eu une fille, et nous sommes revenus aux USA. j'ai ensuite eut mes trois autres enfants et quand j'ai entendu parlé du garçon qui était devenu le Vrai Alpha, j'ai bassiné mon mari pour qu'on aille habiter à Beacon Hills, qu'on y serait en sécurité. Je n'ai pas menti. La meute de Scott McCall est crainte dans tout le pays, Liam, surtout avec ton homme qui en parle partout...

Liam esquissa un sourire. Il n'avait pas vraiment de nouvelles de Gustave, mais il savait à peu près où il avait été des dernières semaines rien qu'en lisant la presse spécialisée qui relatait de la présence du vieux vampire et de sa fille...

— J'avais demandé à Anise de localiser Gustave, dit-il alors. Il me manque et j'aurais bien voulu qu'il soit là, ce soir...
— Il n'aurait rien pu faire.
— Je sais, mais...

Le jeune loup soupira et secoua la tête. Laurel se déporta alors vers lui et il se laissa glisser sur ses genoux en soupirant. Elle lui caressa les cheveux un moment dans le silence de la colle paisible, et il finit pas s'endormir. Elle l'enleva alors dans ses bras et le déposa sur son lit en décidant de demeurer sur place pour la nuit, qu'il ne reste pas seul.