Ça fera bientôt 4 ans déjà depuis la dernière mise à jour ! Ça me semble fou. Mais aujourd'hui, ce sont les 70 ans de Kevin Costner ! Il méritait bien un cadeau à la hauteur de cet événement et ça me fait plaisir de reprendre cette fanfic pour lui rendre honneur.

Merci d'être le Robin des Bois le plus adorable de tous les Robin des Bois, encore une fois !

Cette histoire est """bientôt""" arrivée à sa fin, donc ça fera parti de mes objectifs de complétion de fics de cette année 2025: la reprendre pour la terminer !


Robin arriva avec ses compagnons sur le versant arrière de la ville. La porte principale serait bientôt envahie de spectres, qui flottaient lentement à quelques lieues d'eux, sur la lande. Une danse macabre tout autant qu'hypnotisante.

« Ils s'arrêteront là où Gilles se trouvera, dit le jeune comte d'une voix sourde. J'aimerais pouvoir m'y rendre séance tenante pour l'aider.

-Tu sais que ça causerait plus de mal que de bien, Chrétien, le tranquillisa Azeem en menant son cheval près du sien. L'arme que t'a fourni frère Tuck ne sera peut-être pas suffisante devant tant de monstres. Il vaut mieux d'abord compter sur la ruse.

-Je sais, répondit son ami en éperonnant son cheval. De même que si c'est un enlèvement qui a mené mon frère ici. Le potentiel ravisseur ne doit pas nous voir venir… Mais peu importe qui ou quoi menace Gilles, je leur ferai payer. »

Nottingham paraissait si proche sous le ciel pâle, dominant la vaste campagne, mais Robin savait qu'il leur faudrait encore de longues minutes de cavale avant de l'atteindre. Il lui semblait presque voir se superposer devant lui les images de cette lande verte et des déserts rocailleux de la Terre Sainte. Là-bas aussi, les distances jouaient avec la réalité et la tension rendait d'autant plus insupportable le fait de ne pas savoir vraiment, combien de temps on mettrait à atteindre l'autre bout de sa destination. La tension et la peur faisaient partie de ces longues chevauchées à cette époque-là aussi; ils ne savaient jamais vraiment ce qu'ils allaient trouver lorsqu'ils arriveraient à destination… La plupart du temps, bien sûr, c'était des échauffourées avec les Maure qui vivaient là et de combats sanglants, mais ils n'étaient pas certains de leur conclusion.

Aujourd'hui, la question n'était pas tellement la nature de ses ennemis, mais la personne qu'il comptait retrouver au milieu de cette bataille. Lorsqu'il combattait en Terre Sainte, il avait ses amis à ses côtés et ils avaient la certitude de s'engager pour la même chose… Enfin, en apparence. Chevaliers anglais, jeunes, d'affiliation noble, chrétiens dévoués, c'était évident pour tout le monde que leur but était uniquement de rendre sa gloire au tombeau du Christ. Ils n'auraient jamais maille à partir avec des hérétiques ou des magiciens en tout genre, même pas dans leur propre royaume, où la perversion était plus pernicieuse et plus subtile!

Et pourtant, Robin allait récupérer son petit frère dans ce guêpier, cette ville pleine de fantômes. Et il allait le protéger, quelles que fussent les retombées de son crime. Quand il était en Terre Sainte, déjà, il n'était pas un héros défenseur de la Chrétienté. Il était parti par provocation pour son père. Il lui importait bien davantage de protéger ses amis.

« Père, je vous laisserai vous occuper de fouiller la caverne de la sorcière avec Azeem, si c'est ce que vous préférez, proposa le jeune noble sans se retourner. Je traverserai la nuée de fantômes à la recherche de mon frère.

-Il n'est pas dit que je ferai preuve de déshonneur en ne portant pas secours à mon fils, répliqua Lord Locksley. Nous aviserons une fois sur place, Robin. Nous avons pu voir durant ces quelques jours ce dont ces créatures sont capables, mais nul ne sait exactement ce que nous allons trouver à Nottingham. Qui sait ? S'il y a encore des substances et des objets maléfiques sous ces fondations, peut-être qu'ils vont exacerber leurs pouvoirs. »

Robin n'eut pas le cœur de demander à quel fils il faisait allusion. Il avait sincèrement envie de croire que leur père se souciait encore de Gilles, mais son comportement ces derniers jours lui laissait quelques doutes sur la question.

Lui, en tout cas, il ne laisserait jamais tomber son frère. Il se l'était promis.

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L'intéressé, de son côté, était loin de s'attendre à un sauvetage soudain et glorieux de son frère – et son père, à cause de tout ce qui s'était passé entre eux, encore moins. Il était sûr que les deux hommes se trouvaient toujours à Nottingham, en train de débattre des derniers événements. Peut-être que Robin se rendrait compte assez vite que, s'il n'était pas avec eux, ni avec leurs amis de Sherwood – Petit Jean et sa famille, Bouc… – ça ne voulait pas non plus dire qu'il avait décidé de s'isoler pour avoir la paix. Oui, son frère le connaissait assez bien, maintenant. Il allait peut-être essayer de le retrouver et si c'était le cas…

… alors, le jeune homme voulait pouvoir sortir de ce débarras vivant. Il entreprendrait ensuite de renvoyer d'où ils venaient ces spectres qui menaçaient sa famille. Et après… peut-être qu'il pourrait de nouveau regarder son père dans les yeux.

Gilles se plaqua contre la porte verrouillée et entreprit de ne faire qu'un avec le bois un peu vermoulu. Les fantômes pourraient bien se mettre tous contre lui, le saisir et le soulever pour le mettre sur ce tabouret, lui passer la corde autour du cou… mais ils se gêneraient les uns les autres et, pendant ce temps, ses outils de voleur travailleraient dans la serrure.

Gilles espérait que ce serait suffisant. Il manquait de forces, depuis que les événements s'étaient enchaînés. La violente culpabilité qui en résultait l'avait poussé à se surmener pour rattraper son erreur et il passait son peu de temps de sommeil à se tourmenter pour Robin et Lord Locksley. Ce serait difficile de résister à la force d'attraction de ces fantômes mais, son espoir, c'était le côté hautement intuitif du forçage de serrure pour lui. Il n'avait pas vraiment besoin de voir l'objet pour le déverrouiller, d'autant plus que c'était un loquet de cagibi… certes pas de salle au trésor !

Les premières mains fantomatiques se posèrent sur les épaules du jeune homme. Par réflexe incontrôlé, il jeta devant lui la main droite, qui tenait une épingle brillante presque enfoncée dans la serrure. L'arme de fortune griffa le visage inconsistant du spectre… et le fit disparaître.

Un instant de perplexité figea Gilles dans son plan de fuite et d'autres revenants se rapprochèrent de lui pour l'empoigner. Ils commencèrent à le tirer pour le faire aller sous une poutre, où était déjà attachée la corde avec son nœud coulant. Mais il arqua le dos et tira de toutes ses forces dans l'autre sens pour regagner les planches râpeuses de la porte. Il donna un nouveau coup avec son crochet à serrure : les deux fantômes qui entrèrent dans le champ se volatilisèrent eux aussi.

Un espèce de sourire un peu sardonique se dessina sur le visage du jeune homme. Bien ! L'avantage s'était renversé et ce n'était pas pour lui déplaire ! Au contraire ! Avec un plaisir certain – mû par la peur, la culpabilité, l'impuissance qui l'épuisaient depuis trop de jours –, le jeune voleur se débarrassa des esprits enfermés dans la remise. Puis, il s'activa sur la porte et parvint assez facilement à débloquer la serrure.

Il s'enfuit dans la cour, mais dans un coin de son champ de vision, il eut le temps d'apercevoir une forme floue qui reprenait vie au fond de la pièce.

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Ce ne fut pas facile d'entrer à Nottingham par le versant arrière de la ville. Il n'y avait personne pour ouvrir les poternes et un seul coup d'œil au ciel gris permettait d'en deviner la cause. La nuée de spectres était arrivée, elle aussi. Ils tourbillonnaient lentement en une longue colonne pâle près des tours du château.

« Nous allons utiliser les grappins, déclara Robin, qui dénouait déjà la longue corde. Vous sentez-vous capable de monter, Père ? Je ne doute pas de votre force physique et de vos compétences. Mais il y a longtemps que vous n'avez pas pratiqué ce genre d'exercice.

-J'y parviendrai, affirma Geoffrey tranquillement. Mais Messire Azeem et toi, vous devriez quand même grimper en premier. Vos yeux sont meilleurs que les miens. Vous aurez le loisir d'observer ce qui se passe et d'établir un plan d'action. »

Robin hocha la tête. Il regarda vers le haut des murailles, impatient d'y grimper, impatient de retrouver son frère. Quelques mois auparavant, lorsqu'il était revenu de Terre Sainte, il avait pensé que sa priorité serait de seconder et de prendre soin de son père, quoi qu'il fût encore un homme fort et capable; par tendresse filiale, tout simplement. Force était de constater que les liens fraternels étaient beaucoup plus puissant qu'il l'aurait jamais imaginé et que, à une vitesse vertigineuse, Gilles s'était imposé comme la première de toutes ses pensées.

C'était déstabilisant. Mais, depuis le premier instant, ses amis, n'avaient-ils pas toujours été ses frères aussi? Ce qu'il vivait ici n'était pas très différent de ce qu'il avait enduré pour eux alors, à cette exception que Gilles était lié à lui par le sang. Il lui devait cette protection. C'était plus important de prendre soin de lui que de son père; il était plus jeune; il était plus proche de lui sur leur arbre familial; et Robin sentait que, avec le temps, il deviendrait également plus proche de lui dans leur cœur.

À penser à tout cela, le jeune comte parvint au sommet du mur presque sans s'en apercevoir. Il escalada les créneaux avec une jambe, jeta un coup d'œil en bas pour voir comment ses compagnons se débrouillaient. Lord Locksley était toujours au pied de la muraille; Azeem testait le jeu de la corde pour voir s'il pouvait grimper. Robin lui en lesta un peu plus.

Au-delà des murs et des tours du château, un long panache de fumée commençait de s'élever dans le ciel pâle. Robin le regarda en se demandant d'où il pouvait venir et, à ce moment-là, son ami maure le rejoignit sur les remparts. Il avait toujours une jambe dans le vide et lui désigna la fumée d'un signe de tête.

« D'où est-ce que ça peut venir, à ton avis? demanda-t-il. La colonne a l'air propre et nette. Tu crois que quelqu'un l'a allumé ?

-Je ne sais pas, Chrétien, répondit Azeem. Peut-être que nous devrions envoyer ton père vérifier.

-Azeem ! Je ne veux pas laisser mon père tout seul alors que la situation est si grave !

-Nous ne pouvons pas laisser ce feu allumé. Si ce n'est pas un foyer maîtrisé, il risquerait de se répandre à toute la ville. Les gens se sont barricadés. Ils ne sortiront pas pour aller voir. Et, de toi à moi, ajouta le Maure d'une voix plus basse tandis que Lord Locksley arrivait sur les créneaux, je crois que c'est celui qui court le moins de risques, de nous tous. »

À contrecœur, Robin acquiesça. Il expliqua l'idée à Lord Locksley et, avant de se séparer de lui, il prit ses mains dans les siennes.

« Soyez prudent, murmura-t-il. S'il vous plaît… ne vous lancez pas dans des combats perdus d'avance.

-J'essaierai de ne pas faire quoi que ce soit qui puisse te causer de la peine, lui promit son père. Mais tu sais que je ne peux pas laisser des innocents souffrir sans raison.

-Et pour mon frère ? ne put s'empêcher d'insister, frondeur, le jeune comte.

-Fais en sorte qu'il ne lui arrive rien. Nous parlerons du reste plus tard. »

Robin lui jeta un long regard, puis tapa dans l'épaule d'Azeem et l'entraîna vers la basse-cour du château. Les fantômes commençaient à se concentrer près des bâtiments de l'entrée. C'était là que Gilles se trouvait.

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Le jeune homme tailladait dans tous les sens avec une belle vivacité. Son crochet brillant fendait les ombres pâles des fantômes et les faisait disparaître comme des pans de brume. Ils réapparaissaient au bout d'un moment, mais il était assez long pour que Gilles puisse prendre de la distance avec eux.

Heureusement, car son bras commençait à fatiguer. Mais, alors qu'il se tournait pour prendre une nouvelle bouffée de courage, affronter la masse hurlante et gémissante qui s'agglutinait derrière lui, les spectres se mirent soudain à disparaître. Le jeune voleur fronça les sourcils, étonné. Les revenants s'évaporaient vraiment, se fondant comme des tourbillons dans l'air froid de Nottingham, alors qu'il ne les avait pas touchés.

Gilles recula. Et encore un peu plus, lorsqu'il aperçut une lame crever les ombres! Il dégaina aussitôt la sienne, sur la défensive. Mais il se relâcha aussitôt. Le visage de Robin se découpait nettement sur le décor de pierre et de terre de la basse-cour du château.

« Robin ! s'exclama-t-il.

-Gilles ! répondit l'archer. »

D'un seul mouvement, les deux frères se jetèrent dans les bras l'un de l'autre.

Gilles, pourtant, aurait préféré que son aîné ne soit pas là. Il s'était enfui sans l'avertir exprès pour ne plus le mettre en danger, pour ne pas le perdre. Mais en à peine quelques jours, la présence de l'archer était devenue synonyme de réconfort, de compréhension et de protection. Il ne pouvait pas s'empêcher de rechercher tout cela quand il était avec lui et, après tout, au milieu d'une nuée de fantômes qui voulaient votre peau… c'était bien naturel de céder à l'anxiété, non ?

« Cher Dieu, souffla Robin en le serrant plus fort, le visage enfoui contre ses cheveux. Je suis tellement soulagé. Je ne savais pas ce que j'allais trouver en arrivant ici aussi tard... »

Il laissa son cadet s'appuyer contre lui encore quelques instants, puis essaya de le pousser pour le réprimander.

« Mais que t'est-il passé par la tête, pour partir ainsi sans rien me dire ? lui reprocha-t-il. Pouvais-tu vraiment penser que je parviendrais à me remettre de t'avoir perdu dans de telles conditions ?

-Chut, lui souffla Gilles, encore pelotonné contre lui. Je suis seulement heureux que tu sois là. »

L'émotion monta sous forme de larmes dans les yeux bleus de Robin, mais elles ne coulèrent pas. Il se contenta de tenir son petit frère un peu plus fort, encore un moment.

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Enfin, les deux frères se séparèrent. Azeem bataillait ferme, un peu plus loin, pour tenir en respect une partie des spectres qui n'avaient pas disparu.

« Tu arrives à neutraliser les fantômes, toi ? s'étonna d'ailleurs Gilles en fronçant les sourcils. »

Il fit une moue outragée et croisa les bras, cherchant à se donner une contenance au milieu de la tourmente d'émotions qui l'agitait.

« Je pensais que j'étais le seul, ajouta-t-il.

-Comment ça ? Comment t'es-tu débrouillé pour faire fuir ces revenants ? interrogea son frère.

-J'ai utilisé ça. L'épingle en cuivre dont je me sers pour forcer certaines serrures.

-Elle était bénie ?

-Non, pourquoi ?

-Fais-moi voir. »

Robin prit l'objet dans ses mains et l'examina. C'était du bon travail. Solide, fin et délicatement ouvragé – bien que usé par les années d'utilisation. Enchâssée sur le haut de l'épingle, un peu plus large pour dessiner une forme élégante, se trouvait une minuscule pierre transparente.

« Où as-tu encore volé ça ? soupira l'archer en levant les yeux au ciel. Je pense que c'est la pierre qui a un effet de repoussoir sur ces démons. C'est un morceau de sélénite, non ?

-Je ne sais pas, répondit Gilles en haussant les épaules. Qu'est-ce que ça change ?

-Le sélénite a la faculté de chasser les esprits, paraît-il. Comme le fer… mais les outils que nous avons utilisés dans le campement n'ont pas eu l'air d'avoir ce type d'effet. Ça m'était sorti de la tête. Je croyais qu'il s'agissait de contes de fée. »

Robin resta un instant songeur, sa main caressant l'épaule de son frère qu'il tenait toujours près de lui. Naturellement, ses yeux bleus suivirent la courbe des murs de la cour, les toits carrés et enfin le ciel. Le panage de fumée qu'ils avaient vus en venant était de plus en plus noir. Le cœur de Robin s'emballa. Mais que faisait-donc son père ?