Bonjour à tous,
Il semblerait que quelqu'un a des choses à se faire pardonner.
Chapitre 94: Rémission
Comme annoncé, Harold se retrouve seul dans la pièce et son esprit bouillonne après plus de quatre semaines d'inactivité. Gört ne l'a pas autorisé à quitter sa demeure, donc Harold prend son mal en patience et rumine en faisant les cent pas ou en observant le paysage via la fenêtre. Même Krokmou l'a abandonné et l'a laissé à son triste sort et en tête à tête avec son état maussade.
- Il semblerait que ta mauvaise humeur soit dérangeante, déclare une voix derrière lui.
Harold se retourne et découvre Gört sur le palier de la porte, l'observant tranquillement.
- Tu m'observes depuis combien temps?
- Suffisamment longtemps pour affirmer que tu deviens comme un de ces dragons que l'on retenait dans les cages. Le feu et les griffes en moins bien sûr.
- Ha Ha Ha Ha, hilarant. Je suis mort de rire.
- Même ton fidèle partenaire t'a quitté et il s'est installé sur le toit, je me demande comment il se débrouille pour ne pas tomber par terre. Mais ce n'est pas le problème, c'est plutôt toi.
- Tu m'a assuré que je pourrais bientôt partir.
- C'est vrai, à condition que tu fasses les exercices que je t'ai proscrit et que tu ne partes pas à la recherches de tes amis. Tu es encore blessé, et tu ne pourras pas te défendre en cas de bataille. Donc si tu es suicidaire et adepte des causes perdues, libre à toi. Mais évite d'entraîner du monde dans ta chute.
- Je n'emmènerai personne d'autre que ...
- ... ton dragon, continue Gört. C'est justement de lui que je parle. Je te rappelle que l'archipel est encore hostile aux dragons, et donc plus susceptible d'aider les chasseurs de dragons. Donc déjà que c'est extrêmement dangereux en tant normal, si en plus tu te rajoute des handicaps... je te laisse deviner la suite.
- Je ne donne pas cher de ma peau, conclut Harold.
- Exactement. Arrête de t'en vouloir, tu n'y es pour rien.
- Au contraire. Si j'avais été attentif, j'aurai évité cette attaque et j'aurai pu ...
Harold se tut, ne pouvant terminer sa phrase.
- Tu aurais fait quoi? demande Gört.
- Ce n'est pas important.
- J'ignore les conséquences qu'il y aurait eu si tu avais réussi à neutraliser ton adversaire, mais je sais ce qui a pu être sauvé grâce à toi: dragons et humains ont oublié leurs différents pour combattre ensembles et réparer les dégâts subis.
- Pour ensuite retomber dans les vieilles habitudes et se méfier les uns des autres.
- C'est principalement les familles qui composent le Conseil, mais elles sont gérables. De toute façon, c'est Haaken qui a le dernier mot et il est libre de suivre ou non leur conseil. Elles ont simplement peur de perdre leur place avec ce changement soudain d'attitude, et comme tu obtiens des résultats, Haaken a le luxe de ne pas prendre en compte leurs requêtes.
- Mais si je n'avais pas été là, il n'y aurai pas eu tout ces soucis.
- Ils seraient quand même arrivés. À partir du moment où Angus est revenu et qu'Haaken a accepté Fjord, le changement était déjà en route. Tu as juste contribué ... à son accélération, et à résoudre les problèmes liés à ce changement. La famille Hofferson t'en remercie grandement.
- Alors que depuis mon arrivée, on a eu droit à une incursion des Dévastères ainsi que la dernière attaque de Viggo et des Exilés.
- Puisque que tu amènes le sujet, regardons en quoi tu es impliqué: nulle part en étant le problème. De ce que j'ai compris, ils seraient quand même venu parce qu'Angus était présent sur l'île. Tu as défendu l'honneur des Hofferson en t'interposant et en battant le champion lors d'un duel, alors qu'Angus ne pouvait intervenir. Tu as été le seul qui a levé la main, contrairement aux autres. Quand à la bataille, tu as réussi à protéger Astrid et à déjouer son enlèvement. Ton combat contre Ivar devait être un plan de secours mais ta blessure ne devait pas en faire partie, ce n'est qu'un malheureux accident. Mas cela m'amène au véritable sujet de ma présence: la jeune Hofferson.
- Astrid? Pourquoi?
- Disons que sa dernière visite ne m'est pas parue inaudible, les murs ne sont pas assez épais pour ça. Malgré son apparence, elle a été blessée par tes paroles.
- Elle m'a caché des choses, comment je devais le prendre?
- Pour sa défense, elle n'aurait pas pensé à le faire si je n'avais pas abordé le sujet.
- Pardon? Alors, c'est vous qui êtes ...
- ... la cause de tout ça? finit Gört. Tout à fait.
- Mais vous êtes le guérisseur. Pourquoi avoir fait ça?
- J'ai bien réfléchi avant de suggérer cette idée, j'ai surtout privilégié la meilleure option possible. Mais de toute façon, tu l'aurais découvert par toi-même.
- Mais pourquoi Astrid a fait ça?
- Elle s'inquiète beaucoup pour toi, elle venait tous les jours m'aider dans tes soins et les autres tâches . Et quand tu t'es réveillée, elle a continué à te rendre visite. Tu comprends mieux pourquoi elle est partie complètement chamboulée et qu'elle ne te rend plus visite.
Harold baissa la tête, complètement honteux de n'avoir pensé qu'à sa petite personne.
- Astrid n'était pas dans la meilleure des positions, elle a longtemps redouté cette conversation et ta réaction. Elle a fait son choix, que je qualifierai de "judicieux". Donc, ne lui en veux pas pour ce petit détail.
- Petit détail, petit détail. Ça a quand même son importance.
- Si ça avait été Astrid à ta place, qu'est-ce que tu aurais fait?
- J'aurais accompagné Angus.
- Mais tu ne peux pas et tu dois veiller sur elle, ma question est la suivante: lui aurais tu dit la vérité? En sachant qu'elle t'aurais pesté d'être rester sur Stritz au lieu d'être avec son frère. Et saches que la vérité ne viendra que de ta bouche, pas celle de ses parents dans cette situation.
- Je ... je ... je ne sais pas.
- Alors, tu commences à comprendre une infime partie de la situation dans laquelle elle se trouve. Donc ne lui en veux pas, elle est assez perturbée pour ça.
- Je me sens désolé pour elle.
- Il faudra que tu le lui dises en face, tu va pouvoir quitter ma hutte. Je n'ai plus besoin de te mettre des cataplasmes, tu récupères vite. Il te faudra continuer tes exercices pour récupérer tes mouvements et bien sûr, interdiction de partir à la recherche des autres. Compris?
- Compris!
Après avoir passé tout ce temps au lit, Harold est heureux de pouvoir sortir et retrouver le goût de la liberté. Il sort de la hutte et regarde le toit: Krokmou se prélasser tranquillement au soleil, ignorant toute agitation aux alentours.
-Eh mon grand, ça te dirai de faire un petit tour?
Reconnaissant la voix de son ami, Krokmou ouvre les yeux, décolle et vient se poser aux pieds de son partenaire. Le Furie Nocturne vient se frotter contre lui comme un chat.
- Oui, moi aussi je suis content de te voir mon pote. Tu sais ce dont j'ai envie? De faire un tour de l'île depuis les airs, comme avant. Mais il faut que je passe chez moi d'abord.
Harold met donc le cap vers chez lui, Krokmou restant bien sagement à côté de lui. Le fait de revoir Harold circuler sur Stritz est un évènement en soit, particulièrement lorsque Göran et les mineurs le croisent alors qu'ils rentraient de la mine. Ils passent quelques minutes à discuter et chacun reprend ses activités. Harold continua sa route et arriva dans sa demeure. Il fouilla ses vêtements mais ne trouve pas sa clé, il tente donc d'ouvrir la porte et est surpris en constatant qu'elle n'est pas verrouillée. En rentrant de la maison, il constate que sa clé est posée sur la table. C'est logique, pense Harold. La dernière fois que je suis sorti, c'était lors de la nuit de l'attaque. Harold fouilla la maison et se rend compte que toutes ses affaires sont présentes, aucun objet ne manque à l'appel.
Soulagé que personne n'ai tenté de lui voler quoique ce soit, Harold ouvrit un coffre et troque ses habits actuels contre des vêtements plus adaptés pour un vol. Il chercha pendant un moment la selle et tente de la poser sur Krokmou.
- Arrête de bouger! Comment veux tu que j'arrive à la mettre si tu gigotes tout le temps? Et plus je galère à la fixer, plus longtemps nous attendrons pour voler. Même si je pense que tu t'es dégourdi les ailes entre-temps, mais ce n'est pas une raison pour autant.
Krokmou cesse de se débattre et laisse Harold tranquille jusqu'au moment où la dernière boucle de la selle est enfin fermée. Krokmou bondit dans toute la pièce, heureux de revoler avec son partenaire. Harold est obligé de le faire sortir pour qu'il ne casse rien, il prend la clé et verrouille sa porte. Il grimpe sur Krokmou qui décolle aussitôt: la sensation du vent sur le visage d'Harold, la possibilité de bouger dans tous les sens, la vue de l'île depuis une certaine hauteur. Tout ça lui avait manqué, ce vide commence à être comblé et Harold a l'impression de revivre.
- HHHHHHHHHHHHHAAAAAAAAAAAAAAA, ce que ça m'avait manqué. Évite les manoeuvres habituelles, mon côté gauche n'est pas entièrement opérationnel à 100%.
Krokmou effectue donc un vol tranquille, sans manoeuvres audacieuses. Il réalise un tour de l'île, comme à l'époque de Lisde. Même s'il a retrouvé des forces, Harold se sent faiblir et demande à Krokmou de se poser. Par un pur hasard, Krokmou se posa près de la forêt.
- Reste ici mon pote, j'ai quelqu'un à voir.
Harold descend de Krokmou et commence à s'enfoncer dans les bois tout en restant à proximité de quelque chose pour s'accrocher en cas de chute. Au bout de quelques minutes, il reconnaît le bruit caractéristique d'une lame qui vient s'enfoncer dans du bois.
- Dans le mille, elle est là.
Harold continue d'avancer et atteint la clairière rapidement, il y trouve Astrid en train de s'entraîner. Malgré sa faiblesse, il s'installe silencieusement contre un arbre et attend qu'Astrid ait lancé sa hache sur un mannequin avant de se manifester.
- J'espère que tu ne penses pas que c'est moi à la place du mannequin.
Astrid se retourne rapidement et est surprise de retrouver le beurkien sur son lieu d'entraînement.
- Harold. Mais que fais tu ici?
- Gört m'a autorisé à sortir, je suis passé chez moi pour me changer, effectué un vol avec Krokmou et nous avons atterri à la lisère des bois. J'ai entendu du bruit et me voilà.
- Sérieusement, qu'est-ce que tu fous ici? Tu ne devrais pas te reposer plutôt?
- Il est vrai, mais je devais te parler d'abord. Ouch.
Harold se releva péniblement, utilisant son côté blessé pour se remettre sur pied. Voyant la faiblesse de son invité, Astrid se précipita à ses côté et l'aide à s'installer sur un tronc d'arbre.
- Harold, je suis sérieuse. Tu devrais ...
- Astrid. Avant de me faire la morale, laisse moi te dire que ... je suis totalement désolé. Je m'excuse de mon comportement enfantin et de ma réaction complètement ... Je n'ai pas les mots pour décrire que ce que je t'ai fait est honteux. Gört m'a fait comprendre certaines choses, et j'ai fini par réalisé que j'aurai fait la même chose que toi. Je suis sincèrement désolé.
- Je suis désolée de t'avoir caché la vérité, mais je n'avais pas le choix.
- Si, tu l'avais. Tu pouvais soit me raconter la vérité ou me mentir tout le long, tu as fait un choix.
- Mais je me sentais mal, je ne pouvais pas me sortir ça de la tête.
- Qu'est-ce que je pourrais faire pour me racheter?
- À vrai dire, je ne sais pas. Est-ce que tu le mérites?
- La dernière fois, c'est toi qui m'a invité pour un rendez vous. À mon tour cette fois de te surprendre, donc je reviendrais vers toi dans quelques jours. Prévois juste des vêtements pour le froid et de quoi dormir.
- Pourquoi tant de choses?
- Si je te dévoile tous les détails, ce ne sera plus une surprise.
