Aaron Hotchner était un homme de certitudes. Il croyait en la justice, en l'ordre, en la force des liens familiaux. Mais plus que tout, il croyait en Haley.
Ils s'étaient rencontrés jeunes, encore adolescents, et il n'avait jamais douté qu'elle serait la femme de sa vie. Elle était son amour, son ancre, la personne qui illuminait ses journées les plus sombres. Même lorsque son travail au BAU l'éloignait d'elle, même lorsqu'il rentrait tard, exténué, il savait qu'elle l'attendait. Qu'elle était là.
Jusqu'à ce soir-là.
Aaron venait de rentrer, fatigué mais heureux de retrouver sa femme. Haley l'accueillit avec un sourire hésitant, un de ceux qui annonçaient une conversation importante. Il posa sa mallette, s'approcha d'elle et caressa doucement son bras.
— Qu'est-ce qu'il y a ? demanda-t-il, cherchant à deviner l'émotion dans ses yeux.
Elle inspira profondément, comme pour rassembler son courage.
— Je suis enceinte.
Un silence tomba dans la pièce, dense, chargé d'émotions.
Aaron sentit son cœur bondir dans sa poitrine. De la joie, d'abord. Une joie pure, éclatante, qui balaya instantanément toute la fatigue de sa journée. Il allait être père. Il allait fonder une famille avec Haley, celle qu'il aimait depuis toujours.
— Oh mon Dieu… Haley, c'est merveilleux ! s'exclama-t-il en attrapant ses mains, un sourire sincère illuminant son visage.
Mais elle ne souriait pas.
Il sentit un frisson d'inquiétude lui parcourir l'échine alors qu'elle se dégageait doucement.
Puis, sans un mot, elle sortit une enveloppe de sa poche et la lui tendit.
Aaron fronça les sourcils et prit le document. Ses doigts tremblèrent légèrement en l'ouvrant.
Son regard parcourut les premières lignes, et son souffle se bloqua.
Demande de divorce.
Le monde s'effondra autour de lui.
— Quoi… ? souffla-t-il, incapable de comprendre.
Haley baissa les yeux, ses mains serrées l'une contre l'autre.
— Je suis désolée, Aaron.
Il secoua la tête, refusant d'accepter ce qu'il lisait.
— Non… Non, Haley, tu viens de m'annoncer qu'on va avoir un enfant. Pourquoi… Pourquoi tu fais ça ?
Elle releva les yeux vers lui, et il y vit la tristesse, mais aussi une détermination implacable.
— Parce que je refuse d'élever mon enfant dans la peur.
Le coup porta plus fort que tous ceux qu'il avait reçus dans sa carrière.
— La peur ? répéta-t-il d'une voix brisée.
— Oui, Aaron. Ton travail… Il te prend tout. Il te dévore. Et moi, je reste là, à me demander si tu rentreras vivant. J'ai supporté ça pour moi, mais je ne peux pas l'imposer à notre enfant.
Elle passa une main tremblante sur son ventre encore plat.
— Je veux qu'il ait un père présent, pas un homme qui court après des monstres et qui rentre avec du sang sur sa chemise.
— Haley, je… Je peux faire des efforts. Je peux…
— Non, Aaron. Tu ne peux pas.
Son ton était doux, mais sans appel.
— Ton travail est ta vie. Et je ne te demande pas de choisir, parce que je sais que tu ne pourrais pas l'abandonner. Mais moi, je choisis. Je choisis de protéger mon enfant.
Il sentit sa gorge se serrer. Il voulait crier, protester, lui dire qu'elle se trompait, qu'il pouvait être un bon père, qu'il pouvait être là pour elle et leur bébé. Mais au fond de lui, il savait qu'elle avait raison. Il savait qu'elle avait toujours été plus patiente qu'il ne le méritait.
Il baissa les yeux vers les papiers, ses mains crispées sur le bord de l'enveloppe.
— Tu l'as déjà signé, remarqua-t-il d'une voix rauque.
Elle hocha la tête.
— J'ai pris ma décision, Aaron.
Un silence pesant s'installa entre eux. Il était censé dire quelque chose, se battre, refuser. Mais que pouvait-il faire contre une décision déjà prise ?
Alors, lentement, il prit le stylo posé sur la table et signa à son tour.
Chaque lettre tracée était une déchirure dans son cœur.
Quand il reposa le stylo, il releva les yeux vers Haley. Elle pleurait en silence.
— Je suis désolée, murmura-t-elle une dernière fois avant de tourner les talons.
Il la regarda partir, incapable de bouger, incapable de respirer.
Ce soir-là, Aaron Hotchner perdit tout. L'amour de sa vie. Son avenir tel qu'il l'avait imaginé. Et, même s'il ne le savait pas encore, son fils.
