Notes :

Miraculous repose sur le principe de l'équilibre.

Le bien et le mal.
Le Yin et le Yang.
L'émotion et la raison.

Dans la série, Adrien et Ladybug sont la raison et l'ordre, contrairement à Marinette et Chat Noir qui représentent l'émotion et le désordre.
En déroulant cette histoire sous mes doigts, il m'est apparu évident que l'émotion allait clairement prendre le pas sur la raison de chaque côté de cette balance bien équilibrée, et moi qui n'aime habituellement pas vraiment écrire des histoires qui ne sont pas "canon", j'ai dérogé à cette règle pour répandre le chaos. L'occasion était trop belle pour ne pas exploiter l'aspect de leurs personnalités qui ne transparaît normalement pas sous leur autre forme.

(Et surtout, j'adore les voir faire n'importe quoi).

On rentre dans le vif du sujet dans ce chapitre, accrochez-vous !


oOo

CHAPITRE 3

oOo

Marinette tomba dans le vide en poussant un cri d'horreur ; elle avait l'impression que son cœur était remonté dans sa gorge et elle agitait vivement ses bras et ses jambes tout en sachant pertinemment qu'il n'y avait rien pour la retenir de s'écraser 300 mètres plus bas. Elle se retrouva face à un problème de taille : devait-elle se transformer pour sauver sa peau, mais par la même occasion dévoiler son identité à Papillombre et à tout Paris ? Le sol se rapprochait à une vitesse vertigineuse et elle n'arrivait plus à être rationnelle. Que devait-elle faire ?

Avant qu'elle n'ait pu décider si elle devait se transformer, quelqu'un rentra en collision avec elle et la rattrapa, interrompant brutalement sa chute libre. Marinette sentit des bras se nouer fermement autour d'elle et elle fut entraînée d'un bond sur l'une des plateformes encore intacte de la Tour Eiffel.

Stupéfaite, elle leva les yeux et reconnut instantanément le visage masqué de son coéquipier.

- Ch-Chat N-Noir ?

Son cœur battait à tout rompre, mais à présent que son partenaire était là, la peur qu'elle avait ressentie quelques instants plus tôt s'était envolée. Haletante, elle ferma momentanément les yeux et posa sa tête contre lui pour reprendre son souffle.

Chat Noir atterrit sur la plateforme la plus proche encore intacte et tourna sa tête vers elle, sans la lâcher.

- Tout va bien Marinette ? lui demanda-t-il d'un air inquiet en resserrant son étreinte.

Il s'accroupit et la déposa délicatement à cheval sur ses genoux tout en la maintenant contre lui. Son cœur semblait vouloir fracasser sa cage thoracique pour s'en échapper ; l'idée qu'il aurait pu ne pas arriver à temps pour la rattraper lui provoqua un violent frisson qui parcourut sa colonne vertébrale.

Pour toute réponse, Marinette acquiesça en prenant de grandes inspirations ; elle passa sa main sur sa gorge à l'endroit où la ronce avait tenté de l'étrangler, et ce geste inquiéta encore plus Chat Noir.

- Je vais t'emmener à l'hôpital, décida-t-il tout en se redressant, un bras toujours autour de ses épaules.

Il s'apprêtait à bondir mais Marinette l'interrompit.

- Non Chat Noir, je t'assure que ça va, affirma-t-elle.

- Tu es sûre ? répondit-il, peu convaincu en la voyant respirer avec difficulté.

Marinette acquiesça fermement ; elle savait que son coéquipier pouvait se montrer têtu, et elle ne pouvait pas se permettre de lui faire perdre autant de temps avec un akuma qui semait la terreur autour d'eux.

- Certaine, acquiesça-t-elle avec une assurance qu'elle était loin de ressentir. Merci de m'avoir rattrapée, ajouta-t-elle avec un sourire reconnaissant.

Chat Noir acquiesça faiblement pour lui indiquer qu'il respectait sa décision, mais une lueur d'inquiétude persistait dans son regard d'un vert surnaturel. Il vérifia que l'akuma ne les avait pas suivis mais le super vilain semblait avoir momentanément perdu leur trace.

Marinette se redressa dans les bras de Chat Noir, et jeta un coup d'œil anxieux aux étages inférieurs. Ses craintes se confirmèrent lorsqu'elle repéra l'akuma en train de semer le chaos sur la plateforme sur laquelle était retenu Adrien. Son sang ne fit qu'un tour et elle se tourna vivement vers Chat Noir.

- Chat Noir, il faut que tu m'aides, s'il te plaît ! Il faut qu'on redescende !

Bien décidé à la mettre à l'abri, Chat Noir acquiesça d'un mouvement de tête hocha la tête, Il passa son bras autour de sa taille tandis que Marinette s'agrippait fermement à son cou.

Chat Noir ne pouvait s'empêcher d'admirer le sang froid dont Marinette faisait toujours preuve lorsqu'il la transportait à une si grande altitude. N'importe qui d'autre se retrouverait paralysé, terrifié par la hauteur. Mais Marinette, elle, semblait toujours à l'aise, même suspendue à 300 mètres au-dessus du sol. D'autant plus après une telle chute.

Inconsciemment, il resserra son étreinte autour de la taille de la jeune fille qui ne semblait pas le moins du monde perturbée par la hauteur à laquelle ils se trouvaient. Chat Noir eut un élan d'affection pour elle de voir à quel point elle lui faisait confiance alors qu'il n'y avait que son bras pour la retenir de s'écraser en contrebas.

En quelques bonds, Chat Noir descendit le long d'un pilier encore intact, pressé de mettre le plus de distance possible entre Marinette et l'akuma qui semblait lui en vouloir personnellement.

- Arrête-toi là ! s'écria soudain Marinette avec un mouvement de la main lorsqu'ils atteignirent le premier étage de la tour.

- Q-Quoi ? bégaya-t-il, complètement pris au dépourvu par sa demande. Non Marinette, c'est trop dangereux !

- Mes amis sont en danger, il faut que j'aille les aider !

- Marinette, je ne peux pas te laisser t'approcher plus, ce serait de la folie ! Surtout après ce qui vient de se passer ! Je te dépose plus loin. Rentre chez toi le plus vite possible.

- Non, laisse-moi sur cette plateforme. Je te promets que ça va aller ! insista Marinette, de plus en plus inquiète par la tournure que prenaient les choses.

La plateforme se désagrégeait de plus en plus ; il fallait qu'elle se dépêche si elle voulait sauver Adrien.

- Hors de question ! répondit fermement Chat Noir en resserrant son bras qui entourait sa taille.

Marinette lâcha un grognement de frustration, sentant la panique la gagner.

- Chat Noir, tu ne comprends pas, Adrien est en danger ! cria-t-elle, à la fois énervée et angoissée. C'est de ma faute s'il s'est retrouvé prisonnier de l'akuma, il faut que je le sorte de là avant qu'il ne s'en prenne à lui ! S'il te plaît Chat Noir !

Lorsqu'il entendit son nom, le coeur de Chat Noir manqua un battement : c'était lui l'ami qui inquiétait tant Marinette ?

- J'espère qu'il n'est pas déjà trop tard... Chat Noir, s'il te plaît, je dois y aller ! Je dois le retrouver avant qu'il ne lui arrive quelque chose !

Ne constatant aucune réaction de la part de Chat Noir, Marinette poussa un soupir de frustration. Elle n'avait plus la force d'argumenter. Adrien s'était obstiné à vouloir la mettre à l'abri au péril de sa vie, et voilà que maintenant Chat Noir s'entêtait à son tour. Elle appréciait l'opiniâtreté des deux garçons mais le temps pressait.

Elle se retourna vers Chat Noir qui ne l'avait pas lâchée et lui adressa un regard décidé. Mais son partenaire, lui, ne put que la fixer avec étonnement, soudain pleinement conscient des puissants battements de son cœur qui résonnaient dans ses oreilles humaines.

Adrien n'avait décidément pas l'habitude que quelqu'un s'inquiète pour lui, et de voir Marinette si déterminée à le retrouver pour l'aider diffusa une douce chaleur sous sa poitrine. Pris de court, il s'éclaircit la gorge pour masquer son trouble et feignit l'indifférence.

- Adrien Agreste ? Le mannequin qui est dans ta classe ? Oh ne t'inquiète pas pour lui, il doit être en lieu sûr.

- Mais qu'est-ce que tu en sais ? répliqua-t-elle vivement. Tu l'as vu ? Tu l'as mis à l'abri ?

Chat Noir ne sut quoi répondre ; son premier réflexe fut d'inventer un bobard pour lui expliquer qu'elle n'avait pas à s'en faire pour lui et qu'Adrien était bel et bien à l'abri, mais en la voyant aussi inquiète, il sut tout au fond de lui qu'il ne réussirait pas à lui mentir. Il se contenta de la fixer du regard, sans savoir quoi dire.

Son mutisme inquiéta d'autant plus Marinette qui s'agita à nouveau.

- Il faut absolument que je le retrouve, si l'akuma s'en prend à lui, je-

Elle s'interrompit en voyant Chat Noir hausser les épaules.

- Pourquoi est-ce que tu t'inquiètes autant pour lui ? demanda-t-il.

Sans vouloir se l'avouer, une petite part de lui était sincèrement curieuse d'avoir la réponse.

- Remarque je comprends que toutes les filles n'en aient que pour lui, il est beau, riche et célèbre, continua-t-il avec une désinvolture forcée.

Il regretta instantanément ses propos face à l'air choqué de Marinette. La jeune fille se redressa subitement, son regard d'azur lançant des éclairs.

- Tu crois vraiment que j'en ai quelque chose à faire de tout ça ? lui rétorqua-t-elle avec une fureur que Chat Noir lui avait rarement vue. Comment est-ce que tu peux le juger comme ça alors que tu ne le connais pas ? C'est un des garçons les plus gentils, sincères, intelligents et simples que je connaisse. Il a un cœur en or, il pense toujours aux autres avant de penser à lui. Ce n'est pas parce qu'il est beau, riche, et célèbre comme tu dis qu'il mérite d'être traité comme un mannequin superficiel et un fils à papa. Il n'est pas du tout comme ça !

Lorsque la tirade de Marinette prit sens dans son esprit, le cœur de Chat Noir manqua un battement et ses joues se colorèrent instantanément. Marinette pensait-elle réellement tout ce qu'elle venait de dire ? Comment la jeune fille habituellement si timide face à son alter ego pouvait-elle le défendre avec autant de ferveur et de conviction dans sa voix ?

Chat Noir se reprit rapidement : Marinette détestait les mensonges, et sa tirade était bien trop spontanée pour ne pas être complètement sincère. Mais il avait du mal à croire que son amie puisse avoir une aussi haute opinion de lui. Bien évidemment, Marinette ne pouvait pas savoir qu'Adrien Agreste se tenait présentement là, devant elle, et bien qu'il ait beaucoup de mal à comprendre comment elle pouvait lui trouver autant de qualités, sa plaidoirie en sa faveur lui remplit le coeur d'un sentiment de bonheur et de félicité qu'il n'avait jamais ressenti avant.

Sentant que Chat Noir avait baissé sa garde après son accès de fureur, Marinette en profita pour tenter de s'échapper de l'étreinte de son coéquipier et courir au secours d'Adrien. Ce mouvement eut le mérite de ramener Chat Noir à la réalité et il s'empressa de la rattraper avant qu'elle ne réussisse à s'éloigner et qu'elle ne se jette tête baissée dans la bagarre. Il était hors de question qu'il la laisse sciemment s'exposer à nouveau au danger. Il noua fermement ses deux bras autour d'elle et la plaqua contre lui, prêt à repartir dans l'autre sens.

- Non, non, Marinette ! Reste avec moi, je t'en prie. Il faut que je te dépose en lieu sûr.

Marinette se débattit, les yeux brillants de larmes qui ne demandaient qu'à couler le long de ses joues, et le coeur de Chat Noir se serra douloureusement sous sa poitrine de la voir dans cet état. Elle semblait terriblement inquiète et Chat Noir culpabilisait. Mais il savait qu'il ne devait pas céder, il devait la mettre à l'abri le plus vite possible.

Comme pour corroborer ses dires, une racine s'abattit à l'autre bout de la plateforme, faisant trembler l'édifice. Marinette s'accrocha à lui, le souffle court, et Chat Noir la serra plus fort contre lui pour la rassurer. Peut-être était-ce pour se rassurer lui-même ?

Il scanna rapidement les lieux du regard : l'akuma ne semblait pas les avoir repérés, ce qui était tout à son avantage, mais il était inquiet de ne pas voir Ladybug. Peut-être que sa coéquipière avait eu un empêchement de dernière minute ? Chat Noir priait pour que Ladybug arrive le plus rapidement possible : des centaines de personnes se trouvaient encore sur la Tour Eiffel - ou plutôt de ce qui en restait - et il ne savait plus comment gérer les urgences. L'édifice penchait dangereusement, et sans Ladybug pour réparer les dégâts, les conséquences de cette attaque d'akuma risquaient d'être dévastatrices.

Marinette s'agita à nouveau dans ses bras et Chat Noir reporta son attention sur elle.

- Marinette, je vais te déposer chez toi, lui dit-il d'un ton qui se voulait ferme.

- Je ne peux pas partir avant d'avoir retrouvé Adrien, s'écria-t-elle, la gorge nouée. S'il te plaît Chat Noir !

Chat Noir relâcha son étreinte et se tourna vers elle, en prenant bien garde à ce que son corps fasse écran entre son amie et le champ de bataille.

- Marinette, regarde-moi, lui demanda-t-il le plus posément et doucement possible pour ne pas la brusquer. Est-ce que tu me fais confiance ?

Le souffle court, Marinette acquiesça sans hésiter, et le visage de Chat Noir s'éclaira légèrement. Il posa ses deux mains sur ses épaules et plongea son regard dans le sien pour l'assurer de la sincérité de ses propos.

- Je te promets qu'on va mettre Adrien à l'abri, mais il faut que tu nous laisses nous en occuper avec Ladybug. Tu n'as pas de pouvoirs magiques, je ne veux pas qu'il t'arrive quelque chose. Reste à l'écart. S'il te plaît.

Les paroles de son coéquipier lui firent prendre brutalement conscience que, dans sa panique et sa confusion à l'idée qu'Adrien soit en grand danger, elle n'avait même pas songé à se transformer.

Elle lança un regard empli de culpabilité à Chat Noir : il avait raison. Elle était en train de faire n'importe quoi. Elle devait le laisser s'occuper de l'akuma et se transformer pour lui prêter main forte le plus vite possible.

Il y avait tellement d'inquiétude dans le regard de Chat Noir qu'elle sentit ses joues chauffer. Ce genre de regard profond et sincère était habituellement réservé à Ladybug, mais Chat Noir n'avait encore jamais regardé Marinette ainsi. Ce regard la troubla bien plus que raison et sema encore plus de confusion dans son esprit déjà bien éprouvé.

Alors que Marinette s'apprêtait à lui répondre, un mouvement dans sa vision périphérique l'obligea à redresser la tête : les ronces semblaient s'être remises en activité et attaquèrent de nouveau la Tour Eiffel. Marinette ne put retenir un hoquet de terreur. Tout son être se figea en comprenant ce qui allait se produire mais elle n'eut pas le temps de réagir : les racines s'abattirent violemment sur la plateforme où était retenu Adrien, réduisant ce qui en restait en poussière.

Le cœur de Marinette s'arrêta.

- Adrien... fit-elle d'une voix fantomatique, le visage blanc comme la craie.

La plateforme se détacha complètement de la structure métallique de la Tour Eiffel et s'écrasa en contrebas, emportant tout sur son passage.

Marinette sentit son estomac se tordre si violemment qu'elle était à deux doigts de rendre.

C'était un véritable cauchemar.

Ses oreilles bourdonnaient. Elle ne pouvait plus respirer.

- ADRIEN ! hurla-t-elle à en déchirer son âme, suffoquant à travers ses larmes qui coulaient à présent librement sur ses joues.

Le cri qu'elle poussa brisa le coeur de Chat Noir qui la serra le plus fort qu'il put contre lui pour la rassurer.

- Marinette, tu-

- POURQUOI ? le coupa-t-elle, le cœur en miettes. POURQUOI EST-CE QUE TU M'AS RETENUE ? Adrien... Il e-est-

- Marinette !

- T-Tout ça c'est d-de ta f-faute Chat N-Noir ! hoqueta-t-elle à travers ses larmes. Si t-tu ne m'av-avais pas retenue, j'aurais pu l-le sauver ! J'aurais p-pu...

- MARINETTE ! cria Chat Noir si fort que Marinette se tut, choquée.

- Marinette, reprit Chat Noir plus calmement à présent qu'il avait son attention. Regarde-moi. Écoute-moi s'il te plaît. S'il te plaît. Respire.

Pour toute réponse, Marinette se pinça les lèvres et fit une pause pour inspirer un grand coup. Chat Noir lui lança un regard encourageant ; l'akuma continuait de tout détruire autour d'eux mais Chat Noir n'en avait que faire. Plus rien n'existait d'autre que Marinette à l'instant présent. Il se devait de la consoler, de la rassurer. Il s'occuperait des dégâts plus tard.

Il posa tendrement les paumes de ses deux mains gantées sur les joues de Marinette qui se mit à pleurer de plus belle. Elle semblait réellement inconsolable à l'idée qu'Adrien ait disparu, (à l'idée qu'ilait disparu !), et son cœur se remplit douloureusement d'un mélange de bonheur et de tristesse de constater qu'il était la cause de son chagrin.

- J'aurais pu le sauver, répétait-t-elle en boucle. J'aurais dû le sauver. Tout est de ma faute, j'ai fait n'importe quoi et maintenant il est-

- Marinette, je t'assure que tout va bien se passer. Regarde-moi. Même s'il lui était arrivé quelque chose, le pouvoir de Ladybug va tout réparer, alors il n'y a pas de raison de s'inquiéter, argumenta-t-il d'une voix la plus douce possible pour ne pas la brusquer.

- Mais le pouvoir de Ladybug a ses limites, il ne peut pas ressusciter les gens ! objecta-t-elle, sa voix emplie de désespoir.

- Je te promets qu'il va bien et que tout va bien se passer, la rassura-t-il. On va s'occuper de l'akuma avec Ladybug et tu retrouveras Adrien.

Mais Marinette ne l'écoutait plus. Elle enfouit son visage dans ses deux mains, ses épaules secouées par de violents sanglots qui déchiraient chaque fois un peu plus le coeur de Chat Noir.

- Qu'est-ce q-que je vais d-devenir s-sans lui... hoqueta-t-elle d'une voix cassée, brisée par le chagrin qui lui étreignait la poitrine.

Le rythme cardiaque de Chat Noir accéléra.

- Je ne pensais pas que tu tenais à lui à ce point-là, s'étonna-t-il, les joues légèrement roses.

- Bien sûr que je tiens à lui, dit-elle du bout des lèvres, le regard fixé au sol.

Avant que Chat Noir n'ait pu ajouter quoi que ce soit, Marinette termina sa phrase d'un ton quasiment inaudible.

- ... Je l'aime.

.oOo.

Chat Noir en resta interdit.

« Je l'aime ».

Marinette avait prononcé ces mots si faiblement que sans son ouïe surdéveloppée, Chat Noir ne les aurait probablement pas entendus.

Cette déclaration lui coupa le souffle. Son rythme cardiaque accéléra d'un seul coup et il avait l'impression de ne plus savoir comment respirer. Il déglutit.

- Tu... Tu l'aimes ? risqua-t-il, les joues en feu.

Il voulait être certain que son ouïe ne lui avait pas joué des tours. Que Marinette avait bien prononcé ces mots.

Marinette, quant à elle, était dans un tel état de détresse qu'elle ne remarqua même pas les pommettes cramoisies et l'émotion de son coéquipier. Incapable d'émettre le moindre son, elle acquiesça avant de cacher son visage brûlant dans ses mains, troublée d'avoir osé avouer malgré elle ce secret à Chat Noir.

- Tu aimes Adrien Agreste, murmura Chat Noir pour lui-même, sonné comme s'il avait été victime d'un uppercut.

Marinette était amoureuse d'Adrien Agreste.

Marinette était amoureuse de lui.

C'était trop beau pour être vrai.

Une scène qui s'était déroulée sur la terrasse de son amie quelques jours plus tôt lui revint subitement en mémoire. Des papillons s'agitèrent dans son estomac.

- « Bouton d'or », lâcha-t-il dans un souffle en se remémorant la scène d'une toute autre façon à présent. C'est... m-... C'est Adrien ?

Marinette acquiesça à nouveau timidement, les joues toujours cramoisies et le visage baigné de larmes.

Le coeur de Chat Noir semblait vouloir fracasser sa cage thoracique pour s'échapper. Cette information diffusa une douce chaleur dans tout son corps et un immense sourire un peu idiot apparut sur ses lèvres.

Marinette l'aimait.

Il en était certain à présent.

La mystérieuse personne à qui Marinette n'arrivait pas à avouer ses sentiments n'était autre que... lui-même.

Comment ne s'était-il jamais rendu compte que son amie avait des sentiments pour lui ? Bien sûr, elle avait toujours été adorable avec lui, et d'un soutien sans faille, mais elle lui avait plusieurs fois assuré qu'elle le considérait uniquement comme un ami.

Adrien, quant à lui, n'était plus si sûr de la considérer uniquement comme une amie.

Ces dernières semaines lui avaient ouvert les yeux sur la nature de ses sentiments pour elle, et bien qu'il savait qu'il lui faudrait du temps avant de réussir à complètement tirer un trait sur ce qu'il ressentait pour Ladybug, Marinette avait pris tellement de place dans sa vie et dans son coeur depuis qu'il l'avait rencontrée qu'il lui était de plus en plus facile d'ignorer tout le reste et de se concentrer sur le doux sentiment de bonheur qui flottait sous sa poitrine à chaque fois qu'il pensait à elle. Plagg avait beau se moquer de lui, Adrien venait de réaliser que son kwami avait raison : Adrien avait toujours été intimement persuadé que Marinette n'était qu'une amie pour lui, mais elle était en réalité bien plus que ça à ses yeux. Ses sentiments plus que confus dernièrement semblaient enfin faire sens, et Adrien savait qu'il ne pouvait plus se voiler la face à présent : il était bel et bien tombé amoureux de Marinette sans s'en rendre compte.

De voir la jeune fille aussi anxieuse et de constater à quel point elle semblait tenir à lui fit accélérer son rythme cardiaque. Sans réfléchir, il l'attira un peu plus contre lui. Le cœur battant à mille à l'heure, il fit quelque chose qu'il rêvait de faire depuis longtemps sans oser se l'avouer : il déposa un baiser sur ses lèvres.

Ce baiser eut l'effet d'un Big Bang sous sa poitrine et retentit dans tout son corps. Un sentiment de félicité indescriptible le parcourut de la tête aux pieds, et il se sentit soudain flotter à mille pieds au-dessus du sol. C'était donc ça, l'amour ?

.oOo.

Lorsque les lèvres de Chat Noir se posèrent sur les siennes, Marinette se raidit de surprise dans une confusion la plus totale. En la sentant se figer dans ses bras, Chat Noir redescendit brutalement de son nuage. Il s'écarta d'elle et lui lança un regard incertain, une boule au ventre ; Marinette avait beau lui avoir indirectement avoué ses sentiments, Chat Noir réalisa avec horreur qu'il avait réagi de façon beaucoup trop impulsive et qu'il venait de commettre une grossière erreur : il n'était pas Adrien à l'instant présent, mais Chat Noir. Et Marinette n'était pas censée savoir que les deux garçons n'étaient en réalité qu'une seule et même personne. De l'avoir embrassée en tant que Chat Noir ne faisait aucun sens.

Un bloc de plomb tomba dans son estomac et son visage perdit toutes ses couleurs. Quel idiot ! Jamais il n'aurait dû embrasser Marinette. Il venait de tout ruiner entre eux. Jamais il n'allait pouvoir rattraper une telle bêtise.

De son côté, Marinette n'osait plus le regarder. Elle passa maladroitement ses doigts sur ses lèvres d'un air hébété, encore sous le choc de ce qui venait de se produire.

- ... C-Chat Noir... ? articula-t-elle d'une toute petite voix, ne comprenant visiblement pas son geste.

La couleur de ses joues n'avait rien à envier à celle du costume de son alter ego. Son cœur tambourinait sous sa poitrine et elle avait bien du mal à avoir les idées claires ; ce baiser avait fait fondre le peu de sens logique qui lui restait comme de la neige en plein soleil.

Chat Noir lui lança un regard soucieux, ne sachant plus du tout comment se comporter. Il regrettait de l'avoir embrassée à présent : Marinette semblait complètement perdue.

- Oh non, j'ai cassé Marinette, se dit-il, la panique le gagnant.

Un horrible craquement coupa court à leur tourment : la Tour Eiffel était en train de s'effondrer, et le sol s'affaissait petit à petit sous leurs pieds. Chat Noir vérifia d'un coup d'oeil que le public avait entièrement déserté les lieux et sans attendre, il prit Marinette dans ses bras et bondit en direction du Trocadéro pour la mettre à l'abri. Il était grand temps de s'occuper de cet akuma. Ses problèmes de cœur allaient devoir attendre.

Chat Noir déposa rapidement Marinette sur le toit du Palais de Chaillot sans un mot et s'apprêtait à repartir mais le visage plus qu'inquiet de son amie le stoppa dans son élan.

- Chat Noir, il faut... Adrien... Il est... Il faut... s'il te plaît... bégaya-t-elle, incapable de former une seule pensée cohérente.

Le coeur de Chat Noir se serra à nouveau ; il ne l'avait jamais vue dans un tel état. Il voulait la rassurer, lui dire qu'il allait bien et que tout ce qu'elle avait dit, ce qu'elle avait fait pour lui l'avait touché plus que raison, mais d'un autre côté, il avait déjà bien trop perdu de temps et il devait rejoindre le champ de bataille le plus rapidement possible.

- Où es-tu Ladybug ? pensa-t-il très fort, comme si le fait d'invoquer mentalement sa partenaire allait la faire apparaître.

Complètement indécis vis-à-vis de la situation, il lança un regard hésitant à Marinette. Il y avait tant de douleur dans ses grands yeux bleus que Chat Noir prit une décision : il ne pouvait pas la laisser s'inquiéter plus longtemps pour lui. Il prit sa main dans la sienne et lui adressa un tendre sourire qui se voulait rassurant.

- Je te promets qu'Adrien va bien.

Les yeux de Marinette s'écarquillèrent d'étonnement.

- T-tu en es sûr ? bégaya-t-elle.

Chat Noir acquiesça. Un maelström d'émotions lui étreignit le cœur.

- Et merci, ajouta-t-il en la serrant contre lui, le cœur battant. Merci de faire partie de ma vie. Tu es l'une des meilleures choses qui me soit arrivée. Toi aussi tu comptes plus que tout pour moi.

Marinette lui lança un regard empli d'incompréhension et le sourire de Chat Noir s'étira.

- Ladybug va me balancer du haut de la Tour Eiffel quand elle saura ce que j'ai fait, mais je ne peux pas te laisser dans cet état. Et puis j'ai une confiance absolue en toi, et je te promets de ne pas te mettre en danger.

Marinette comprenait de moins en moins.

Chat Noir prit une longue inspiration avec l'air de quelqu'un qui s'apprêtait à sauter du haut de la Tour Eiffel sans élastique ni pouvoirs magiques, et sans autre préambule, il se détransforma.

Marinette poussa un cri de surprise et voulut immédiatement fermer les yeux mais il était trop tard. Le costume de son coéquipier s'évanouit dans un flash de lumière verte et la jeune fille ne put retenir une nouvelle exclamation en découvrant l'identité du garçon qui se trouvait derrière le masque de Chat Noir.

Adrien se tenait à présent devant elle, ses deux mains dans les siennes, un sourire à la fois doux et vulnérable illuminant son visage.

Plagg apparut, et en découvrant Adrien et Marinette main dans la main, il se contenta de lancer un regard entendu à son porteur avant de plonger dans sa poche à la recherche d'un morceau de camembert.

.oOo.

Marinette était pétrifiée.

Elle ne comprenait plus rien.

Chat Noir ne pouvait pas être Adrien, cette histoire n'avait aucun sens.

Et pourtant Adrien se tenait bien là, devant elle, là où son coéquipier se tenait deux secondes plus tôt. Ses joues étaient légèrement rouges et il avait l'air à la fois embarrassé et empli d'espoir. Lorsqu'elle réalisa qu'il tenait toujours ses mains dans les siennes, sa respiration s'accéléra et elle se mit à rougir violemment. Il y eut un moment de flottement pendant lequel aucun des deux n'osa prendre la parole, jusqu'à ce qu'un détail ne revienne brutalement à l'esprit de Marinette : Adrien était vraiment là, devant elle, et surtout... il allait bien. Adrien était vivant et c'était tout ce qui comptait pour elle à l'instant présent.

Sentant un poids s'ôter de ses épaules, elle fondit en larmes et se jeta à son cou pour le serrer dans ses bras.

- T-tu vas b-bien, articula-t-elle, entre deux sanglots.

Plus que touché par sa réaction, Adrien referma ses bras autour d'elle et la serra tout contre son cœur, enivré par cette proximité. Tous deux avaient complètement oublié le monde alentour, bouleversés par ce moment totalement inattendu, et ni l'un ni l'autre ne souhaitait rompre ce contact.

.oOo.

Un énorme bruit retentit non loin d'eux, les obligeant à réagir. Adrien se redressa à contrecœur : il aurait largement préféré rester blotti dans les bras de Marinette, mais il avait un akuma à mettre hors d'état de nuire.

Il se tourna vers elle sans complètement la lâcher.

- Ça va aller Marinette ? lui demanda-t-il avec une infinie douceur.

Marinette semblait avoir beaucoup de mal à réagir : son visage avait pris une teinte de rouge encore plus soutenue et elle restait maladroitement plantée devant lui sans oser le regarder en face.

- Je dois vraiment m'occuper de l'akuma, dit-il à regret. Tu me promets de rester à l'abri ? On se retrouve après pour discuter, d'accord ? Tu ne bouges pas, je reviens. Plagg, tu es prêt ?

Son kwami lui fit un signe positif de la tête et Adrien se retransforma sans attendre. Clouée sur place, Marinette ne pouvait s'empêcher de dévisager Chat Noir comme si elle avait vu un fantôme. Elle avait beau avoir eu la preuve que Chat Noir et Adrien n'étaient qu'une seule et même personne, son cerveau semblait complètement hermétique à cette idée. La jeune fille se balançait d'un pied à l'autre, n'ayant plus aucune notion de la façon dont elle devait se comporter.

Chat Noir lui adressa un dernier regard et s'apprêtait à bondir mais une tension sur sa ceinture l'en empêcha. Il se retourna et se retrouva nez-à-nez avec une Marinette cramoisie qui fixait le bout de ses ballerines.

- ... Fais attention à toi, dit-elle d'une voix quasi-inaudible, et Chat Noir sentit son coeur fondre sous sa poitrine.

Il esquissa un sourire qui se voulait rassurant et lui déposa un baiser aérien sur le front avant de déplier son bâton et de disparaître vers ce qui restait de la structure de la Tour Eiffel avec un clin d'œil.

.oOo.

Marinette resta perchée sur le toit du Palais de Chaillot, complètement sonnée.

Elle était très certainement en train de rêver, elle ne voyait pas d'autre explication à ce qui venait de se passer. Son cerveau malade avait superposé deux informations contradictoires et elle avait eu une brève hallucination dans laquelle elle découvrait que son coéquipier était en réalité le garçon dont elle était amoureuse depuis le début de l'année.

Marinette essuya ses joues encore humides et secoua sa tête de droite à gauche, comme pour tenter de se remettre les idées en place ; elle avait eu beaucoup trop d'émotions pour avoir les idées claires.

Tikki apparut soudain.

- Marinette ! Chat Noir a besoin de Ladybug ! s'écria-t-elle de sa voix haut perchée.

- Chat Noir... répéta mécaniquement Marinette, complètement perdue dans ses pensées.

- Marinette ! répéta Tikki pour tenter de la faire réagir.

- Adri... Chat N-Noir, balbutia-t-elle pour toute réponse avant de lancer un regard perdu à son kwami qui commençait sérieusement à s'inquiéter : Marinette allait-elle être capable de gérer le combat qui se profilait à l'horizon dans son état ?

- MARINETTE ! cria-t-elle une nouvelle fois pour attirer son attention.

La voix de Tikki sembla enfin la sortir de sa spirale d'angoisse et Marinette se ressaisit.

- Oui Tikki. Je suis là. Je suis désolée, j'ai vraiment fait n'importe quoi. Il faut que je reste concentrée. On réglera tout ça plus tard.

Le regard bienveillant de son kwami lui donna du courage et la recentra.

Paris avait besoin de Ladybug. Elle avait une mission à remplir.

- TIKKI ! TRANSFORME-MOI !


Notes:

Et non, vous voilà rassuré.e.s, je n'ai pas laissé Marinette s'éclater comme une crêpe sur le parvis de la Tour Eiffel (mais j'avoue tout de même avoir considéré l'idée).

N'hésitez pas à me dire ce que vous en avez pensé, j'adore lire et répondre à vos commentaires !️

Les prochains chapitres arrivent vite !

Bug out!