(Introduction) Rendez-vous secret


Il envoya un message par hiboux au directeur. Il savait une chose. Il en était persuadé. Lily Evans était courageuse, la femme la plus forte qu'il est rencontré, et elle avait un cœur. Un grand cœur plein d'amour. Elle devait pour avoir, à une époque, vu quelque chose en lui.

Elle avait aussi vu quelque chose en James semblait-il, alors qu'il n'y avait pas pire homme sur Terre. Elle protégerait leur enfant jusqu'au bout. Elle ne laissera jamais le Seigneur des Ténèbres prendre son enfant. Son maître n'aura pas le choix. S'il veut tuer le garçon, il devra tuer Lily. Et Severus ne pouvait pas permettre cela.

Tout ce à quoi il aspirait, toutes ces tentations, ses passions, ne valaient rien si le monde s'écroulait. Et sans Lily, il n'y aurait plus de monde. Car elle était son monde. Ils ne se voyaient plus, et elle le détestait. Elle avait bien raison de le détester. Mais il continuait de l'aimer. Toujours, à jamais.

Et s'il devait tout abandonner au nom de cet amour qui jamais ne lui sera retourné, qu'à cela ne tienne. Il était prêt à accepter qu'elle soit avec James, qu'elle soit heureuse avec lui. Mais il ne pouvait pas la perdre par la mort. Il pouvait la laisser le détester, la laisser adorer son pire ennemi, son persécuteur, mais il ne pouvait pas la laisser mourir.

Il transplana sur la colline. Et il attendit son rendez-vous. Dumbledore ne tarda pas à se montrer. Il avait transplané dans un coup de tonnerre, et la tempête se leva d'un coup, même si elle menaçait déjà, le coup de théâtre le mit à genoux. Le plus puissant ennemi de son maître le méprisait. Mais il était là.

« De tous, il a fallu que ce soit vous ! » tonna-t-il.

Severus ne chercha pas à comprendre. C'était le soir même du jour où son Seigneur avait accepté d'épargner Lily, mais Severus voulait prendre toutes les précautions pour assurer la sécurité du seul être qu'il aimait égoïstement. Il était un Serpentard. Il savait préparer les choses.

Il ignora la remarque incomprise et commença. « Un enfant né fin juillet… »

« Vous lui avez dit, n'est-ce pas ? » gronda le directeur

Severus ressenti le besoin de monter ses boucliers d'occlumens aussi haut qu'il le faisait pour le Seigneur des Ténèbres. « Oui. Il cherchera la fin. Il voudra savoir. »

« Et quoi cela vous concerne ! »

« C'est Lily. »

« La prophétie ne parlait pas d'une femme. Et je vous assure qu'elle n'a rien à voir avec vous ou Voldemort. »

« Non, vous m'avez compris. Vous savez pour son enfant. Vous savez forcément. Vous avez dû vous renseigner. Vous le saviez même peut-être déjà avant. Il pense que ça peut être son fils ! »

« Pourquoi m'en parler. Que cherche votre maître. Que je vous révèle les précautions que je prends ? Quel message a-t-il à faire passer. »

« Aucun. Il ne sait pas que je suis là. Il me tuerait. Protéger là, je vous en prie. » Il sentait faiblir ses boucliers. La discussion, l'interrogatoire, le poussait à bout. Il n'avait pas fini d'avoir ses émotions de la journée. Il les lâcha un instant.

Il savait que Dumbledore était un puissant Legilimens. En fait, dans le monde connu, nul ne savait vraiment lequel était le plus grande entre Voldemort et Dumbledore. Bien sûr, chaque partisan soutiendrait que c'était son maître. Mais Severus savait qu'ils étaient tous hypocrites, dans les deux cas.

Il n'y avait aucun moyen de savoir vraiment. Il concentra ses pensées sur la discussion qu'il avait eue avec Voldemort. Si Dumbledore voulait prendre le plaisir de le lire, ce serait tout ce qu'il verrait.

Mais il ne prit pas le risque que le vieil homme décide de fouiller son esprit. Il lui expliqua ce qu'il avait entendu de Trelawney. Il lui dit qu'il avait transmis au Seigneur des Ténèbres. Lui avoua qu'il avait supplié pour la vie de Lily, sans pitié pour celle de l'enfant.

Cela révulsa Dumbledore, qui entra dans une rage froide. Aussi dangereuse que la tempête que faisait rage, que les éclairs qui vibraient à deux pas d'eux alors qu'ils étaient en haut d'une colline. Il supplia Dumbledore de tout faire pour protéger la famille Potter.

« Protégez-les, tous. Cachez-les ! Rendez les inaccessible au Seigneur des Ténèbres, qu'ils ne les trouvent jamais. »

« Et l'autre famille ? Vous êtes toujours avec votre Maître ? »

La question interpella Severus. Il lui demandait… de choisir son camp ? Était-il avec le Seigneur des Ténèbres ? Était-il avec Dumbledore ? Était-il pour quelqu'un ? Il regarda le vieux sorcier. Il plongea son regard noir dans ces yeux bleu clair. C'était un sorcier puissant.

Et Severus savait qu'être un sorcier puissant impliquait des choses. Si le Seigneur des Ténèbres était ce qu'il était, qu'était Dumbledore ? Il était vieux. Quels sombres secrets cachait-il ? Non, si Severus lâchait le Seigneur des Ténèbres, il ne voudrait pas être soumis au vieil homme. Mais avait-il le choix ?

C'était un vieux manipulateur, il en était certain. Il ne pouvait pas être tout blanc en opposition à la noirceur du Seigneur des Ténèbres. Les deux avaient forcément du gris quelque part. Cela se trouverait certainement dans leurs passés, mais ils avaient probablement des traces encore maintenant. Et cela se verrait dans leurs attitudes.

Voldemort ne supporterait pas les traîtres, mais tout indiquait que Dumbledore non plus. Et lorsqu'il le voyait devant lui, maintenant, avec cette colère froide, Severus savait que Dumbledore n'était pas un bon grand-père gâteau. C'était un sorcier puissant, et dangereux pour ses ennemis.

Quoi qu'il fasse, quoi qu'il choisisse, Severus était coincé. Il ferma les yeux. Il souffrirait dans tous les cas. Il mourrait assurément. Il ne serait jamais heureux, et sa situation serait difficile. Il détesterait sa vie encore plus qu'il ne l'avait fait jusqu'alors. Ne se méprisait-il pas déjà assez ? Apparemment pas. Tout empirerait. Quoi qu'il fasse, quoi qu'il choisisse.

Alors le choix s'avéra immensément simple. Si simple. Il ne choisissait pas un camp. Il ne choisissait pas une idéologie. Il ne choisissait pas un savoir ou un pouvoir. Il choisissait son amour. Quoi qu'il fasse, Lily le détesterait. Que ce soit pour ses actions passées, ou futures. Elle le méprisait déjà. Elle le haïrait. Mais il y avait une chance pour qu'elle reste en vie s'il faisait le bon choix pour elle.

Il regarda à nouveau le vieux sorcier. Il pensait à temps de choses, il voyait les conséquences dans tous les choix possibles, il étudiait ce qui se passerait s'il disait ou faisait telle ou telle chose. Car entre dire et faire, il y a plusieurs pas important.

Son regard semblait sonder le vieil homme, mais ce n'est pas ce qu'il faisait, il se dévoilait. « Je serais pour Lily. Toujours. À jamais. » Ces paroles étaient prononcées avec toute la pesée de son âme. Ça sortait du plus profond de son être.

Dumbledore ne dit rien. Il semblait chercher la sincérité dans l'attitude de Severus. Il n'était pas convaincu. Severus avait toujours été attiré par la magie noire, et par le Seigneur des Ténèbres. Ce n'était pas surprenant qu'il ait fini mangemort. C'était logique, normal. Mais ce qu'il faisait maintenant ne correspondait pas à ce que le directeur pensait de cet ancien élève.

Severus poursuivit calmement, sincère, devant le silence et le regard inquisiteur du vieil homme. « Je ferais tout ce que vous me demanderez, tout ce que vous voudrez. Tant qu'il me restera un souffle de vie, et même après si j'ai le choix, je ferais tout ce que je pourrais pour qu'elle vive. Tout. Absolument tout. Tout ce qu'il faudra. »

« Vous me révulsez Severus. Vous êtes un homme si sombre, et répugnant. Être prêt à mettre à mort un enfant innocent. Mais je serais stupide de refuser un atout. L'occasion est trop belle de faire plier Voldemort pour être ignorée. Cependant, il faut que je m'assure que je peux vous faire confiance, et que vous pouvez exécuter les tâches que je vous confierais. »

« Comment ? »

« Eh bien, déjà, je vais vouloir garder un œil sur vous. Vous êtes le plus jeune maître de potion diplômé de l'histoire. Et Horace se fait vieux. De plus, vous êtes aussi un Serpentard. Si je peux vous faire confiance, vous faites le remplaçant idéal. »

Severus réprima une moue de dégoût. Lui, enseigner ? Dumbledore l'avait-il bien regardé avant de proposer cela ? Et enseigner les potions ? Il était doué pour les potions, mais il était passionné par les forces du mal.

Pour enseigner, pour transmettre l'envie d'apprendre, comment faire si on n'est pas soi-même vraiment intéressé. S'il devait enseigner, ce devrait être la défense contre les forces du mal, là où il pourrait transmettre sa passion.

Et puis, déjà élève, il trouvait ses camarades stupides, sot et ignorant, et ne comprenait pas comment ils pouvaient être aussi mauvais avec une chose aussi simple que les potions. C'était un art délicat, mais suivre une simple recette ne devait pas être compliqué. N'importe qui devrait en être capable. Au lieu de cela, les chaudrons fondaient et les explosions se répétaient autour de lui lorsqu'il était en classe.

Et Dumbledore voulait qu'il remette ça ? Qu'en étant plus âgé, plus mature, en ayant plus de savoir qu'à l'époque, il apprenne à mieux supporter cette même stupidité qui ne ferait que lui paraître de plus en plus évidente au fil des ans ?

Et puis, il songea à Lily. À son sourire flamboyant lorsqu'ils étaient enfants. Lorsque pour la première fois elle avait réussi une potion. Lorsqu'ils avaient étudié ensemble toutes leurs matières. Lorsqu'ils avaient concouru pour obtenir le prix de Slugorn.

Comment son sourire s'était illuminé lorsqu'il lui avait offert le prix qu'il avait remporté, en disant que c'était pour elle qu'il l'avait obtenu. De comment elle l'avait réprimandé lorsqu'il avait plus tard fait mine de saboter sa potion pour qu'en réalité elle soit meilleure que si elle suivait simplement le manuel.

Un sourire timide et sincère, empli de tristesse, s'afficha discrètement sur son visage tandis qu'il repensait à tous ces moments. Si c'était pour Lily, il pourrait supporter n'importe quoi. Il pouvait supporter d'être détesté pour elle, même par elle, pour elle.

« Je vous l'ai dit, je ferais tout ce que vous voudrez. Dites-moi juste ce qu'il faut pour que vous me fassiez confiance. Pour que vous me croyiez. »

« Montrez-moi que vous l'aimez. Montrez-moi un moment où vous lui avez dit, un moment de tendresse que vous avez eu envers elle. Juste un. » Le ton accusateur de vieil homme trahissait sa pensée. Il était persuadé qu'il n'y avait jamais eu de moment pareil.

Et il avait raison. Severus parut au plus grand désespoir. Si c'était ce qu'il fallait, il ne pourrait jamais gagner la confiance du vieil homme. Cela signifiait-il qu'il ne pourrait pas aider Lily ? Que ces chances de la sauver s'atténuaient déjà. Il devait faire tout ce qui était dans ses capacités pour la sauver.

Mais la déclaration ou la preuve d'amour n'avait jamais été dans ses capacités. « Je… Je n'ai rien de cela. Je ne lui ai jamais dit. Je n'ai jamais osé, jusqu'au… je n'ai eu qu'un dernier moment pour tenter de lui avouer. Je n'ai pas réussi. Je n'ai jamais pu ensuite. Une fois qu'elle fut avec Potter, c'était trop tard. Je ne voulais pas savoir comment elle réagirait. »

Dumbledore parut moins en colère. Plus doux. « Alors vous l'avez laissé avec l'homme que vous détestez le plus au monde ? Vous avez eu une occasion de lui dire une fois qu'elle fut fiancée, peut avant de prendre la marque. Je le sais. Vous ne l'avez alors pas fait. Pourquoi ? Si ce que vous dîtes est vrai, si votre amour est sincère, pourquoi lui cacher lorsqu'elle part avec l'homme qui vous a déjà fait tant souffrir. »

« Parce que… elle me détestait alors. Je ne cherchais plus que son pardon. J'étais venu pour m'excuser. Mais Potter n'a pas voulu me laisser tranquille l'attendre. Et j'ai fini par céder à ses demandes de duels.

« Comme ce sont de si courageux gryffondors, ils se sont mis à quatre contre moi, et j'ai… j'ai agi encore une fois de manière impardonnable. Je les avais battus, plusieurs fois, mais ils revenaient toujours, lançaient d'autres offensives. J'ai fini par décider d'en finir avec eux. Avec Potter surtout.

« Je les ai tous mis à terre une dernière fois, de manière à ce qu'ils ne se relèvent plus. J'ai utilisé la magie noire pour ça. Je les ai fait souffrir, je voulais qu'ils payent pour ce qu'ils m'avaient fait. Mais Potter. Potter, j'étais sur le point de l'empêcher de souffrir, de le mettre au sol de manière définitive.

« Si elle n'était pas apparue à ce moment-là, je l'aurais tué. J'étais désespéré. J'ai vu ce que j'avais fait. Et elle était devant moi, au milieu de cette horreur. Alors j'ai juste fait ce pour quoi j'étais venu. Je lui ai demandé pardon. Et sa réponse… Je n'ai pas eu le courage de lui dire quoi que ce soit d'autres. »

« Charmant discours. Mais c'est un discours. Je n'ai, encore une fois, aucune preuve de votre amour. Juste des aveux de mage noir méprisable qui mériterait de séjourner à Azhkaban. »

Severus parla si doucement, si honnêtement. Rien ne paraissait plus mauvais dans son être lors de son aveu. Seul la tristesse et la sincérité. « Mais je ne prétends pas ne pas le mériter. Je ne prétends pas être un homme bon. Tout ce qui était bon dans ma vie m'a été enlevé, et ce n'était déjà pas grand-chose. »

Le jeune sorcier marqua une pause. Il réfléchit. Il savait ce qu'il pouvait faire. Il ferait tout ce qu'il pouvait, il se battrait jusqu'au bout pour obtenir la protection de Lily. Il serra les poings, et son expression se durcit à nouveau.

« Avez-vous une pensine ? »

« J'ai. »

« Alors je pense pouvoir vous montrer. Mais vous n'aurez pas de preuves d'amour. Je n'ai jamais su faire. » Il eut à nouveau son air si doux : « Mais vous la verrez elle. »

Dumbledore acquiesça. Le jeune sorcier faisait des efforts pour s'ouvrir. S'il n'aidait pas, ils ne trouveraient jamais l'arrangement. Il avait sous la main un mangemort possiblement prêt à retourner sa veste. Et à le faire au nom de l'amour pour une né-moldu.

Si cela était vrai, le jeune sorcier ne risquait pas d'approuver vraiment les plans de Voldemort. Pas s'il aimait vraiment cette femme. De plus, Lily Evans appartenait à son fidèle Ordre du phénix.

Severus avait été un excellent élève. Brillant dans bien des matières, mais un esprit faible finalement, qui s'était laissé embarquer dans cette obscure magie noire. Quelque part, il lui rappelait un certain Tom Jedusor. Si Severus pouvait vraiment être la nouvelle génération de puissant sorcier, Dumbledore ne pouvait pas se permettre de le laisser du côté de Voldemort.

Mais il devait être prudent. Il ne pouvait pas prendre le moindre risque que le jeune sorcier tourne dans un camp adverse. Ce jeune homme avait été un étudiant renfermé. Et de ce que Dumbledore pouvait observer, certainement avait-il appris d'une manière ou d'une autre l'occlumancie. Alors qu'il soit prêt à s'ouvrir, à partager ses souvenirs. Il y avait une faible chance pour qu'il retourne vraiment sa veste. Et définitivement.

« Allons à mon bureau. »

Severus ne trahit pas le moindre sentiment à cette annonce. Ses boucliers étaient à nouveau montés. Et il ne comptait plus les descendre.