(La pierre philosophale) Retenues


Harry se rendait dans les cachots avec une angoisse grandissante dans le ventre. Son premier jour de cours avait été bien agité, et il avait dû passer la majorité de son temps sans Neville.

Il marchait en regardant le sol lorsqu'il entendit une voix douce et basse bien connue. Il sauta dans un coin, et décida d'espionner.

Snape était debout dans le couloir, face à un groupe de Serpentard de première année.

«… nouvel attrapeur. »

« Je ne sais pas monsieur. Personne n'en sait rien ! » faisait une voix féminine.

« Je n'en crois pas un mot, Mademoiselle Greengrass. Et j'attends la plus grande honnêteté de chacun de mes élèves. »

« C'est Draco. » faisait une voix de garçon, d'un air totalement désintéressé.

Snape aussi un sourcil. Le reste du groupe était choqué par l'intervention de leur camarade.

« Comment cela ? »

« Le golden-boy est apparemment très mauvais sur un balai. Il est tombé, et Bibine l'a accompagné à l'infirmerie. Alors Draco a ramassé une espèce de boule bizarre et s'est envolé ailleurs. C'est là que Potter est intervenu et que Draco a décidé de lancer la balle. Le temps que Potter la rattrape et que McGonagall le vit, Draco était déjà de retour parmi nous. McGonagall avait dû voir Potter récupérer la balle, et pour une raison quelconque, elle a dû être impressionnée. Donc elle l'a nommé attrapeur. Donc, c'est "grâce à" Draco. »

« Potter joue donc au héros. » cracha le professeur avec dégoût.

« Ouais, et Draco au petit con. »

Snape lança un regard noir au garçon.

« Vous venez de gagner un devoir supplémentaire, Monsieur Nott. Je croyais avoir été suffisamment clair hier soir sur la tenue exigée. Retournez dans la salle commune, je passerais plus tard pour vous informer de votre punition. »

« Et nous… nous ne sommes pas punis ? » demanda timidement l'autre fille présente.

« Et pourquoi Mademoiselle Parkinson ? »

« Parce que… parce que nous avons caché l'erreur de Draco. »

« Ce qui est tout à fait honorable. Cependant, je ne peux cautionner cela. Vous avez été pris à mentir à un professeur lorsqu'il vous posait explicitement la question. Je ferme les yeux pour cette fois, mais il n'y aura pas de seconde clémence. Me suis-je bien fait comprendre mesdemoiselles ? »

« Oui Professeur. » firent les deux filles

Snape releva le regard vers les deux autres garçons qui étaient restés silencieux. Ils s'empressèrent de dire qu'ils avaient aussi compris, puis le professeur congédia les cinq élèves, avec la demande de prévenir Draco qu'il était attendu dans son bureau.

Le professeur quitta également le couloir. Harry sortit alors de sa cachette, et se dirigea vers le bureau de son mentor… qui n'allait peut-être pas le rester longtemps. Il frappa à la porte.

« Entrez. »

Harry entra dans la salle, et referma derrière lui.

« Ah, Monsieur Potter. Où est votre petit camarade ? »

« Neville s'est blessé en cours de vol, il ne pourra pas venir ce soir. Il est coincé, encore à l'infirmerie. » Harry se retint de rappeler au professeur qu'il devait être déjà au courant.

Snape soupira. « Approche Harry. Rien de ce qui va être dit dans cette salle ne doit en sortir, est-ce clair ? »

« Limpide. » fit le garçon en s'asseyant en face du bureau.

« Ton attitude en cours n'est pas admissible. J'attends le respect de tous, et tu n'es pas abstenu. »

« Tu t'es acharné sur moi et Neville ! Il était terrorisé, tu le voyais bien, et tu as continué ! Même lorsqu'il était en larmes ! Alors donne-moi une raison pour accepter que tu nous traites comme ça ! »

« Un professeur n'a pas à s'expliquer à un élève, et un élève n'a certainement pas de leçon de morale ou de respect à faire à son professeur. »

« Je ne prendrais pas ça comme une raison valable. Un professeur doit bien traiter ses élèves. Tu nous as méprisés ouvertement, tu avais l'air de nous haïr ! »

« Et c'était bel et bien le cas, Harry. »

Harry resta scotché sur place. Il était totalement abasourdi, et rapidement ses yeux se mouillèrent. Lorsqu'il sentit l'humidité sur son visage, il reprit la parole.

« Mais qu'est-ce qu'on t'a fait ? »

« Absolument rien. » répondit tranquillement le professeur.

« Mais, mais alors pourquoi ? » Harry éclatait en sanglot.

Et ce fut à ce moment-là que la porte s'ouvrit.

« Oncle Sev ? Oh. »

Harry était trop perturbé pour broncher à la voix de Draco. Le blond se rendit compte de son erreur en apercevant Potter, suivit du regard noir de Snape. Il était entré sans frapper, sans prévenir, et il avait appelé familièrement le professeur devant un élève.

En plus, il était censé savoir que le Gryffondor était ici, il avait entendu lorsque Snape avait donné la retenue.

« Approchez Draco, et asseyez-vous. »

Draco obéit en silence, et s'installa à droite de Potter. Le Gryffondor se calma rapidement après avoir réalisé la présence de l'intrus. Il était hors de question qu'il se montre dans cet état devant le prétentieux moqueur.

De toutes les personnes devant qui il aurait pu montrer son moment de faiblesse, Draco était le pire. Harry se redressa, essuya vivement son visage avec le revers de la manche, et observa durement le professeur, attendant sa punition.

Snape concentra son attention sur le blond.

« Sais-tu pourquoi tu es là, Draco ? »

« Non, Monsieur. »

« Tes pieds ont été vus à une hauteur supérieure de ce que devrait être ta tête cet après-midi. As-tu une idée de ce qui s'est passé ? »

Draco grimaça. Il hésita entre avouer ou maintenir sa position. Il jeta un œil à Harry. Harry lui rendit un regard noir. Draco se renfrogna.

« Non, Monsieur. »

« Es-tu éclairé si je t'informe que les témoins auraient vu un balai à une hauteur déraisonnable lors du premier cours de vol, en absence du professeur Bibine, et après son interdiction expresse de voler. »

« Sans doute parlez-vous de l'exploit de Potter, Monsieur. »

Harry n'en revenait pas du manque d'honnêteté de son camarade et de son culot. Être le favori du professeur ne pouvait pas le protéger contre tout !

Si Harry n'avait pas échappé à la punition pour une petite impertinence justifiée, Draco ne pouvait pas bien s'en tirer. Mais… pourquoi l'avait-il appelé oncle tout à l'heure ? !

« J'attends votre version des faits au sujet de cet exploit, Draco Malfoy. »

Draco blêmit. Et ce n'était pas à cause de la demande elle-même. Mais sa dignité l'empêcha de s'excuser pour adoucir le tempérament du professeur.

« Longbottom a été assez maladroit pour se casser un bras. Potter s'est cru au-dessus des règles et a joué à voler à toute vitesse contre l'ordre de Madame Bibine. »

« Et pourquoi exactement Monsieur Potter s'est-il retrouvé sur son balai, alors qu'il n'en a jamais enfourché de sa vie. »

« Pour fanfaronner. »

« Tu mens ! » s'exclama Harry, n'y tenant plus.

« Silence, Monsieur Potter. » siffla Snape dangereusement.

Draco haussa les épaules.

« Absolument pas. C'est mon point de vue. »

« C'est toi qui fanfaronnais ! »

« J'ai dit silence, Potter. » Snape encouragea Draco a en dire davantage. « Nul doute que Monsieur Potter cherchait à se rendre intéressant. Cependant, il devrait y avoir une raison pour qu'il l'ait fait à ce moment-là et de cette manière. Et il devait y avoir quelque chose de particulier pour que le professeur McGonagall lui donne le rôle d'attrapeur. »

Draco fronça les sourcils, mécontent. « Peut-être. Il a rattrapé une petite sphère sous la fenêtre du professeur. »

« Quelle sphère, et comment s'est-elle retrouvée là ? »

Le visage de Draco devenait de plus en plus sombre. Sous son silence, Harry décida d'intervenir à nouveau.

« Il a pris le Rapeltout de Neville ! » cria-t-il avec un doigt pointé vers son camarade.

« Pour la dernière fois, Potter, infligez-vous le silence avant que je m'en charge. »

« Peut-être était-ce un Rapeltout, je ne l'ai pas bien vu. Potter l'a lancé vers la fenêtre, puis a foncé pour la rattraper. »

Le professeur plongea ses yeux sombres dans le regard clair de l'adolescent.

« Je ne souffrirais pas d'un mensonge de plus, Draco. »

Il y eut un silence de défis pendant un long moment avant que Draco ne décide d'expliquer sincèrement.

« J'ai pris le Rapeltout de Longbottom, et je l'ai lancé contre le mur, après que Potter ait essayé de me faire tomber de mon balai. »

Le professeur tourna son expression dure vers Harry.

« Dans cette histoire, je trouve moins dangereux et moins grave le fait de lancer un simple objet avec la possibilité qu'il casse par rapport à faire chuter un autre élève alors qu'il est à plusieurs mètres au-dessus du sol.

« Vous êtes tout les deux coupables d'avoir volé sans autorisation. Draco est coupable d'avoir tenté de malmener un objet appartenant à un autre. Et Harry d'avoir délibérément tenté de risquer la vie d'un camarade.

« Que vous soyez récompensé pour cela, Potter, est un fait que je vais m'assurer de corriger. »

« Vous ne pouvez pas m'empêcher d'être l'attrapeur de Gryffondor ! » cria Harry.

« Et je n'interviendrais pas contre cela. Car en effet, je ne pourrais pas convaincre le vieux fou qu'un première année n'a rien à faire dans un jeu aussi dangereux. Mais je vais veiller à ce que la série de punition que je vous imposerais compense votre récompense, et vous fasse comprendre la gravité de votre faute. »

Le professeur se tourna à nouveau vers le blond.

« Quant à vous, Draco… » Il émit un sourire inquiétant. « Vous tiendrez compagnie à votre camarade jusqu'à ce que vous soyez capables de vous entendre. »

Les deux garçons s'insurgèrent, surpris et scandalisé. Snape s'énerva et se fit incroyablement froid et autoritaire.

« Silence. J'ai participé à l'éducation de vous deux, et je ne tolérerais pas que vous vous fassiez la guerre. Que ce soit en ma présence ou non. »

Les adolescents l'observèrent, éberlué par son annonce. Aucun des deux n'avait soupçonné que le professeur se soit occupé d'un autre enfant. Et aucun des deux ne se serait attendu à ce que l'autre enfant soit la personne assise à ses côtés dans ce bureau.

L'expression de Snape, bien qu'encore rude et sévère, s'adoucit.

« Je reste un homme, avec des sentiments, et je ne suis pas un homme bien. Il est évident que tous les deux êtes mes favoris. Draco est déjà au courant qu'il sera fortement favorisé durant l'année. Je ne peux pas me permettre de t'offrir le même traitement, Harry.

« Tu es un Gryffondor, et aux yeux de beaucoup, tu es le fils de l'homme que j'ai le plus détesté dans ma vie. Ce qui est vrai. Personne ne sait pour ta mère. Les quelques qui savaient que j'avais été ami avec elle savent aussi qu'elle a coupé toutes relations avec moi pendant nos épreuves de BUSE. »

Il lança un regard vers Draco. Le garçon l'observait avec une expression entre l'horreur, la curiosité et une attention qu'il accordait lorsqu'il était très intéressé.

« Draco, ton père ne sait rien de l'histoire, et ne doit rien savoir. Mais je ne peux pas vous cacher les choses à partir du moment où il est décidé que vous vous entendrez tous les deux.

« Vous avez chacun vos défauts, et vous devrez apprendre à supporter ceux de l'autre. Et peut-être avec le temps, vos caractères bien trempés seront plus supportables, sans que vous perdiez vos forces de caractères. »

Il se tourna vers le Gryffondor.

« Harry, Draco est le fils d'un bon ami, et d'un homme froid. Son père a de nombreux défauts, et je mentirais si je disais que je le supporte vraiment. Mais il fut un ami, et le premier homme à me soutenir lorsque j'eus des problèmes. C'est aussi sa faute si j'ai fait mes plus grandes erreurs, mais nous sommes restés en contact, et il me fait grand confiance.

« Son épouse est une femme douce et forte que j'affectionne. Ils ont fait de moi le parrain de Draco. Ses parents l'aiment très fort, les Malfoy sont connus pour leur grand sens de la famille et la protection des uns des autres. Mais ce sont des gens fort occupés, et Draco a passé beaucoup de temps avec moi.

« C'est pour cela qu'il m'appelle "oncle Sev". »

Il lança un regard dur au blond. « Cependant, c'est une appellation qui doit rester entre nous, et ne doit parvenir aux oreilles de personne. Pas même de ses plus proches amis Serpentards. »

Il fit le même regard à Harry. « Ni aux oreilles des tiens à Gryffondor ou dans n'importe quelle autre maison. »

Il abandonna sa dureté pour observer à nouveau le blond.

« Draco, Harry est le fils de la femme qui m'accompagnait au banquet. Elle s'appelle Lily. Et c'était ma meilleure amie, avant même que je n'arrive à Poudlard. Nous nous sommes disputés lors de notre cinquième année, et elle a toujours refusé de me pardonner.

« J'ai alors sombré, et j'ai rejoint, grâce à ton père, » il lança un regard furtif à Harry. « et ceci doit rester confidentiel, » il reporta son attention sur son filleul. « le Seigneur des Ténèbres. Que ce soit clair, je ne te le dis que grâce à tes talents d'occlumencie, Draco, mais pas même ton père ou ta mère ne doivent savoir. »

Il fit une grimace avec un œil vers Harry, qui restait très attentif. « Et il serait mieux qu'Harry n'en sache rien, mais je crains qu'il soit impossible de lui cacher. »

Il soupira. « Ta tante, Draco, Bellatrix, a torturé pendant de longues heures les parents d'Harry. J'aimais encore Lily. Alors j'ai combattu Bella, et c'est à cause de moi qu'elle est à Azkaban. »

Draco ouvrit la bouche en "o" et des yeux ronds. Ce qu'il était en train d'apprendre était totalement inédit, et il ne savait pas comment réagir, ni quoi en penser. Il ne connaissait pas sa tante, et il aimait très fort son parrain.

« Lily est à présent en proie à une sorte de folie particulière. Elle n'est dangereuse pour personne, et a juste besoin de quelqu'un pour veiller sur elle. Je serais ce quelqu'un à partir de cette année. Il y a dix ans, elle m'a fait promettre de veiller sur Harry.

« Lorsque je n'étais ni avec toi, ni en cours, ni avec elle, je veillais sur son fils. Je ne voulais pas m'en approcher, mais l'incompétence de son propre parrain m'y a forcé. Je me suis donc retrouvé à veiller à son éducation à lui aussi.

« Vous n'avez pas eu les mêmes attentions de ma part, mais vous êtes très clairement les deux élèves que je préférerais dans toute ma carrière. Que vous soyez de la même année est une coïncidence fortuite. Que vous soyez répartis dans deux maisons opposées ne devraient pas s'interposer à une bonne relation. »

Il se leva et commença à faire apparaître des tables et chaises pour la retenue.

« Harry a appris la théorie sur les sortilèges et les maléfices, ainsi que le latin. Draco s'est avéré très doué en potion, et j'en suis fier. Harry, je ne connais pas vraiment encore tes capacités, et tu ne les connais pas toi-même. Nous les découvrirons lors de tes études. J'ai pu travailler de nombreuses choses avec Draco, et je ne lui ai pas trouvé de véritables faiblesses… mis à part ce trait particulièrement typique de Malfoy qu'est l'attitude supérieure et hautaine. »

Il se tourna vers les deux garçons.

« Le remède contre les furoncles d'Harry ayant été un misérable échec, vous allez vous atteler à vous entendre pour une séance de tutorat, seuls. Et gare à vous si vous abîmez la moindre chose. »

Sur ce, il partit de la salle pour aller voir Lily, laissant deux garçons qui se méprisaient mutuellement avec la charge de s'entendre pour faire la deuxième potion de la vie d'un des deux.