(La chambre des secrets) Une nuit à l'infirmerie


« Arrêtez de vous plaindre, monsieur Malfoy ! »

Draco ferma sa bouche au passage de Madame Pomfresh. Il lança un regard noir au dos de la femme, puis regarda ses équipiers. Il savait que le capitaine allait rejeter la faute sur lui qu'ils aient perdu.

Pendant que Lockhart s'occupait de manière pathétique de Harry, Flint avait déjà pris le temps de le critiquer sur le fait qu'il n'aurait pas vu le vif d'or quand il était juste à côté.

C'était vrai, bien sûr. Mais Draco n'aimait pas les reproches. Il avait tellement essayé d'attraper cette maudite petite balle dorée qu'il avait failli se faire percuter par un Cognard totalement fou, et qu'il avait fait une très mauvaise cascade.

Sa chute avait vraiment été douloureuse, quoi qu'en dise Pomfresh. Draco n'avait certainement pas l'habitude de se blesser. Ça faisait mal. Pomfresh le savait assurément, mais elle devait être trop occupée à gérer Harry. Il fallait admettre qu'un os en moins était peut-être plus problématique.

Si Draco s'était tu, c'était davantage par le fait que Neville, qui était blessé aussi, ne se plaignait pas. Draco ne pouvait pas passer pour plus geignard que le maladroit en chef.

Draco était sur le même lit qu'il avait occupé l'année précédente. Il attendait que Neville rejoigne la place à ses côtés, mais l'autre garçon était trop occupé à vouloir se tenir au chevet de Harry.

Pourtant, un os en moins, ce n'était pas la mort ! Draco était plutôt vexé de ce net affichage de préférence. Il avait envie de congédier les Serpentard qui lui tenaient compagnie juste pour pouvoir rester seul avec ses vrais amis.

Pomfresh réprimandait encore Lockhart alors qu'elle préparait une bonne cuillère d'une substance pas du tout attirante pour la présenter à Harry.

Harry observa la chose noire visqueuse qui bullait. Il eut envie de vomir avant même de l'avaler. Il entendit un petit ricanement derrière l'agitation de mécontentement que Pomfresh offrait à Lockhart. Il releva le regard et vit Draco le fixant très clairement amusé.

Il lui lança un regard noir en réponse, et décida d'accepter la potion exécrable, juste par défis pour lui prouver qu'il n'en aurait pas peur.

Immédiatement après avoir mis la chose dans la bouche, Harry voulut la recracher.

« Avalez, monsieur Potter. », lui signala Pomfresh.

Le garçon se força à déglutir. C'était pire qu'attendu. Juste après avoir avalé, il fit une mine de dégoût écœuré au plus haut point. « On pourrait penser qu'un maître de potion est capable de rendre ses potions plus attrayantes ! Est-ce qu'ils mettent des points d'honneur à faire le plus dégoûtant possible ! »

« Du respect, monsieur Potter. Soyez reconnaissant qu'une telle potion existe, et que mon infirmerie en dispose en premier lieu. Faire repousser un bras est une chose bien plus douloureuse. Vous en avez pour une bonne nuit désagréable. »

« Je pourrais avoir une potion pour la douleur ? »

« Assurément. Allez, je ne veux plus voir personne de superflu dans mon infirmerie ! Regardez ces garçons pleins de sueurs encore en équipement de Quidditch ! Allez tous vous changer maintenant. Et je m'adresse autant aux Gryffondor qu'aux Serpentard, jeunes gens. »

Tous les joueurs de Quidditch battirent en retraite face à la figure intimidante de madame Pomfresh. Quand elle défendait ses malades et imposait le repos et le calme pour eux, elle était toujours très sérieuse, et mieux valait ne pas la contrarier.

Pomfresh posa son regard sur Neville. Un regard sévère. « Puis-je savoir, Neville, quand exactement comptais-tu m'informer que tu avais été blessé ? Je te demanderais de ne pas chercher à passer maître dans le camouflage de ta douleur. »

Neville eut la bonne réaction de paraître contrit.

« Va dans ton lit. Et laisse-moi regarder ça. »

Neville se dépêcha de rejoindre sa place voisine à celle de Draco. Il s'assit sur le lit et Pomfresh lui enleva avec précaution sa chemise pour voir la blessure correctement. Elle fit apparaître les rideaux de confidentialité, de sorte que les autres adolescents ne puissent plus les observer.

Hermione s'assit à côté de Harry. « Il y a quelque chose que je peux faire ? »

« Oui, partir. », ricana Draco. Elle lui lança un regard noir en réponse.

Il eut l'intelligence de perdre son sourire narquois. « Honnêtement, tu pourrais avouer que Lockhart s'est avéré pire qu'inutile. »

« D'accord, vous aviez raison depuis le début. Ça te va ? »

« Pas tout à fait. Je veux l'entendre plus souvent. »

« Tu es insupportable. »

« Je suis blessé. »

Harry eut du mal à cacher son sourire moqueur. « Tu n'avais qu'à me laisser poursuivre le vif tout seul. »

« S'il n'y avait pas eu ce Cognard, j'aurais été celui qui remportait le match. Et même comme ça, j'ai réussi à l'éviter, moi. »

« À l'éviter ? Sois franc, il me visait moi. C'est normal que tu n'aies rien reçu ! »

« Et toi, tu es encore tombé quand tu as attrapé le vif d'or. »

« Tu es tombé avant moi ! »

Pomfresh retourna vers eux. « Silence ! Vous êtes ici dans mon infirmerie, alors vous vous tairez tant que vous y serez. Vous resterez tous les trois ici jusqu'à demain matin, mais je ne veux plus vous entendre. Mademoiselle Granger, vous pouvez les laisser maintenant. Ils ont besoin de repos. »

Hermione acquiesça et partit. Les trois garçons soupirèrent. Ils sentaient que ça allait être une très longue et pénible nuit. Autant commencer à se reposer dès maintenant, même s'il était encore excessivement tôt pour cela.


Neville se réveilla avec une étrange sensation. Il faisait si sombre qu'il était persuadé que la nuit était encore là.

« Coucou ! »

Neville cligna des yeux, fixa la petite créature debout sur son lit, face à lui. Il ouvrit grand la bouche de surprise, et s'apprêta à crier le nom de son meilleur ami. « Ha… ! »

« Non, non, non, s'il vous plaît, Neville Longbottom ne doit pas crier. »

La douleur infernale donnait un sommeil léger à Harry. Le cri rapide de Neville avait suffi à le réveiller. Il mit ses lunettes, et regarda l'elfe de maison infernal. Ils n'en avaient donc pas fini avec lui ?!

Il siffla. « Qu'est-ce que vous faites là, Dobby. »

Dobby tourna la tête vers Harry. « Dobby ne voulait pas réveiller Harry Potter. Dobby voulait parler à Neville Longbottom, l'avertir. »

Dobby reporta à nouveau son attention sur Neville. « Dobby avait dit à Neville Longbottom qu'il ne devait pas retourner à Poudlard. Neville Longbottom n'aurait pas dû venir après avoir raté le train. »

Harry était blême de colère. « C'était vraiment toi. »

« Oui, Dobby espérait que s'il manquait le train, Neville Longbottom ne reviendrait pas à Poudlard. »

Neville n'était pas vraiment en colère. Il voyait bien que l'elfe voulait juste l'aider. La question était pourquoi. « Tu nous as pourtant toi-même aidés à rejoindre le train. »

« Dobby ne voulait pas ! Mais Dobby avait fait une promesse ! Dobby devait aider au moins une fois Allen-Timus Dupertuis quand il lui demanderait son aide. Dobby ne voulait pas, mais Allen-Timus Dupertuis a toujours su convaincre Dobby. »

Harry en avait marre de cet elfe. « Pourquoi es-tu là, cette fois, Dobby. »

« Dobby veut convaincre Neville Longbottom de partir. Pourdlard est dangereux cette année. Dobby espérait que le Cognard convaincrait… »

Harry sauta hors de son lit. « C'était toi ! Tu as de la chance que mes os n'aient pas encore repoussés, parce que j'ai bien envie de t'étrangler ! »

Harry commença à vouloir attraper Dobby, mais l'elfe sauta de l'autre côté du lit de Draco pour s'enfuir. Draco qui s'était redressé, réveillé par les cris de son camarade.

« Harry ! » crièrent Neville et Draco en même temps, l'un avec frayeur, l'autre avec plus d'autorité.

Le Gryffondor se tourna vers ses deux camarades. « Quoi ?! »

Neville secoua la tête. « Tu ne peux pas t'en prendre à lui comme ça. »

Pendant que le garçon-qui-a-survécu expliquait son point de vue à son meilleur ami, le Serpentard lança un regard dur vers l'elfe de maison. Quand Neville eut terminé, Draco se tourna vers ses amis.

« Je peux savoir ce qui s'est passé ? »

« J'aimerais bien que tu l'étrangles pour moi, Draco, vu que tu as tes deux bras de valides. »

« J'ai tout de valide, y compris ma tête, Harry. Neville, pourquoi ton ami est devenu aussi violent ? »

Ce fut Dobby qui répondit, avec beaucoup de crainte dans la voix. « Dobby voulait convaincre Neville Longbottom que l'école était dangereuse. Dobby espérait que si l'ami de Neville Longbottom était blessé, Neville Longbottom comprendrait. Dobby a lancé le Cognar contre Harry Potter. Harry Potter est le meilleur ami du garçon qui a grand cœur. »

« Tu as fait quoi ! »

Dobby sauta en arrière, tremblant de terreur, mais tendit timidement les bras devant lui pour montrer ses mains blessées. « Dobby s'est déjà puni, Dobby a dû se repasser les mains. »

« Je ne suis pas certain que ce soit suffisant, Dobby. »

Neville n'en revenait pas, et surtout, il ne pouvait pas laisser Draco dire ça, il savait comment réagirait l'elfe. « Draco ! Ne l'incite pas à… »

« Laisse-moi faire, Nev. Dobby, est-ce que tu te rends compte du danger dans lequel tu nous as mis ? »

« Dobby ne mettrait jamais Neville Longbottom en danger ! »

« Je me fiche de ça, Dobby ! Et moi, et Harry, tu ne nous as pas mis en danger ?! Tu as toi-même dit que tu l'avais fait dans le but de convaincre Nev que l'école était dangereuse ! D'où tiens-tu de telles informations de toute façon ? »

« Dobby ne peut pas le dire ! Méchant Dobby ! »

L'elfe s'accroupit, et commença à se frapper le crâne contre le sol, sous le regard devenu impassible de Draco. Harry était encore très en colère, mais commençait à être un peu gêné. Neville ne pouvait pas l'accepter. « Dobby arrête ça ! »

L'elfe l'ignora et continua. Draco soupira. « Dobby, c'est bon. Comment peux-tu nous répondre si tu te punis comme ça maintenant ? »

Cette fois, l'elfe s'arrêta, pendant que Neville se tournait vers Draco. « Mais je ne veux pas qu'il se blesse ! »

« Il l'a déjà fait. Alors Dobby… ce Cognard… »

« Après avoir touché une fois Harry Potter, Dobby ne voulait pas le blesser davantage. Dobby a vu Neville Longbottom arriver. Alors Dobby l'a lancé contre Neville Longbottom pour que Neville Longbottom comprenne bien le message. »

Harry cria à nouveau. « C'est ce que j'appelle nous mettre en danger ! Je vais te… »

« Mais laissez-moi le gérer à la fin ! » l'interrompit Draco avant de fixer à nouveau l'elfe. « Cependant, si Harry désire t'étrangler, je ne suis pas certain que je le retiendrais. »

Dobby était assurément terrifié et horrifié. Il prenait la menace très au sérieux. Neville tenta de calmer ses deux amis. « S'il vous plaît, il cherche juste à m'aider. Il s'y prend très mal, mais… »

Harry n'en revenait pas. « Il s'y prend mal ?! »

Draco regardait Neville comme s'il était le dernier des abrutis. « Il a envoyé un Cognard nous poursuivre Harry et moi pendant qu'on poursuivait le vif d'or ! Qu'on le faisait dans un endroit déjà dangereux en temps normal ! »

Dobby paniqua encore. « Dobby ne l'a pas lancé contre le petit-maître, Dobby le jure ! »

Harry devint livide, et Neville n'en était pas loin non plus. Draco sembla les ignorer.

« Quoi que tu aies voulu faire, Dobby, tu l'as fait. Si ton but était d'atteindre Harry, j'étais juste à côté de lui la plupart du temps. »

Le regard de Harry allait de Dobby à Draco à plusieurs reprises. « C'est… ton elfe, Draco ? Tu… c'était ta nouvelle manière de te venger ? Tu ne pouvais pas utiliser de sorts alors tu as envoyé ton elfe s'en charger ?! »

« Mais tu n'écoutes rien, Harry ! Je n'y suis pour rien ! Il y va de sa propre initiative, et je risquais autant que toi ! »

« Dobby n'a fait prendre aucun risque à sa famille, Dobby le jure ! »

Draco lui lança un regard assassin. « Dobby jure mal. J'ai chuté à cause de ce Cognard, moi aussi. C'est ce que tu voulais, Dobby, tu as pris du plaisir à ce que je déçoive mon père ? Il était là, lui aussi ! Il m'observait ! Maintenant il pense que je suis inutile sur un balai ! »

Harry se moqua. « Oh, pauvre Draco, sa fierté a été blessée. »

« Harry, arrête. », appela Neville doucement.

Il ne voulait pas que ses amis se battent, et il avait vu la réaction du père de Draco. C'était gravé dans sa mémoire. L'homme avait été dédaigneux. Il espérait que Draco ne verrait jamais la première réaction de son père. Il imaginait bien que la seconde était déjà bien suffisante pour que Draco soit blessé émotionnellement plus profondément qu'il ne l'avait déjà été physiquement.

« Que j'arrête ? Tu prends le parti de Draco ?! Alors que son elfe nous a… »

« Ce n'est pas moi qui l'ai envoyé. », siffla Draco.

Neville était au bord des larmes. « S'il vous plaît, arrêtez. J'aimerais juste savoir pourquoi Dobby fait ça. Quel est le… danger dont il parle ? »

Les trois garçons regardèrent l'elfe, dans l'attente d'une réponse. Mais au moment où Dobby ouvrit la bouche, ils entendirent des pas rapides. Alors l'elfe claqua des doigts pour disparaître.

Harry se précipita sous sa couverture, et ses deux amis se cachèrent également pour feindre le sommeil.

Discrètement, ils observèrent. McGonagall, Pomfresh et Dumbledore arrivaient.

« Mettez-le là. », ordonna l'infirmière.

Ils déposèrent la silhouette sombre dans un lit.

McGonagall se tourna avec inquiétude vers le directeur. « C'était donc vrai, la chambre a été réouverte. »

« J'en ai bien peur, Minerva, j'en ai bien peur. »


Quand les trois adultes furent repartis, les garçons observèrent l'autre occupant de l'infirmerie. C'était Colin, le jeune photographe né de moldu, pétrifié.

Harry fut le premier à prendre la parole, dans un murmure. « Dans d'autres circonstances, je t'accuserais, Draco. »

« Ça ne m'étonne pas, mais tu ferais fausse route, Harry. »

« Qu'est-ce qu'elle voulait dire par "réouverte" ? » questionna Neville.

« Qu'elle a déjà été ouverte dans le passé. Mon père sait certainement quelque chose à ce sujet, je l'interrogerais. »

Harry n'était plus d'humeur à être très en colère, mais son expression devint tout de même plus dure. « C'est Dobby que j'aimerais pouvoir interroger à nouveau. »

« Il semble plus utile à nous mettre en danger qu'à répondre aux questions. »

« Tu devrais pouvoir obtenir des réponses de sa part. » se risqua Neville.

« Probablement. Mais si je le recroise dans les jours qui viennent, je ne sais pas si j'arriverais à me retenir de demander à Harry de finir ce qu'il avait commencé. »

« Je saurais me retenir de le finir. »

« Dans tous les cas, je ne suis pas pressé de le revoir. »

« Est-ce que tu vas en parler à ton père ? » s'enquit à nouveau Neville.

Draco observa son ami calmement, et réfléchit. Il était clair que Neville s'inquiétait pour le sort de l'elfe. Après un long moment, il prit sa décision. « Non. »

« Merci. »