(La chambre des secrets) La mémoire de Tom Jedusor
Une semaine après le match, dimanche soir, Harry était encore absorbé et intrigué par le journal à la couverture si noire qu'il avait ramassé après l'inondation causée par Mimi Geignarde.
Le journal avait fini de sécher depuis longtemps maintenant.
Tom Elvis Jedusor
C'était le nom d'un préfet de Serpentard qui avait obtenu une médaille pour service rendu à l'école. Il y a 50 ans.
Qu'avait-il bien pu faire, et pourquoi son journal avait-il été en possession de quelqu'un. Pourquoi quelqu'un s'en était-il débarrassé sur Mimi comme ça ? Était-ce à cause du journal lui-même, ou l'objet avait-il juste été la chose la plus proche à disposition d'une personne en colère ?
Pourquoi venir jusqu'aux toilettes de Mimi pour le jeter ? Elle n'avait vu personne. L'individu était venu, avait lancé le journal, et été reparti aussitôt.
Harry feuilleta encore ses pages. Elles étaient indéniablement vides.
Il décida qu'il n'avait pas besoin de ce mystère. Le meilleur moyen de ne plus s'embêter avec était de commencer à écrire quelque chose dedans.
Alors il posa le journal sur sa table, et l'ouvrit. Lorsqu'il passa sa plume pleine d'encre au-dessus, une goutte tomba.
Elle se fit absorber par le papier.
Harry observa la page pendant un petit moment, éberlué. C'était comme s'il n'y avait jamais rien eu.
Il réalisa alors que l'objet était indéniablement magique. Draco n'était pas si loin de la vérité avec sa proposition d'encre invisible.
Harry décida de tenter d'écrire une phrase dedans. N'importe quoi, pour voir ce que cela ferait.
Mon nom est Harry Potter.
Les lettres s'effacèrent, et sous la stupeur incrédule du garçon, d'autres lettres se formèrent sous l'endroit où il avait écrit. C'était une autre écriture, belle, fine et bouclée.
Bonjour Harry. Je suis Tom Jedusor.
Le journal répondait !
Harry sut immédiatement ce qu'il voudrait en faire.
Il avait vécu il y a 50 ans.
Il avait même obtenu une médaille, il avait aidé l'école.
Le jeune garçon reprit sa plume et s'empressa, tout en s'appliquant, d'écrire sa question.
Savez-vous quelque chose à propos de la Chambre des Secrets.
Le même manège recommença : ses propres mots s'estompèrent, et un message se forma.
Oui.
Harry était dans un mélange d'excitation heureuse et de crainte. Neville avait supposé que Tom pouvait être le premier à avoir ouvert la Chambre, et son descendant aurait pu utiliser ce journal pour savoir où était l'endroit et comment l'ouvrir.
Maintenant, il semblait qu'il était possible d'obtenir des informations sur la Chambre par le journal.
Mais Harry ne parvenait pas à oublier ce que Draco avait dit aussi. Tom avait aidé l'école.
Pouvez-vous me le dire ?
Quand Harry vit la réponse, il crut désespérer.
Non.
Il était également agacé. Il avait cru avoir de nouvelles informations à portée de main, mais il semblait qu'il ne les obtiendrait pas.
Quand de nouvelles lettres se formèrent, il prit le livre à deux mains, afin de vérifier qu'il n'hallucinait pas.
Mais je peux vous le montrer.
Il vit alors une fente de lumière percer entre les pages, puis les envahir. En un instant, Harry se trouva absorbé par le journal, et fut dans un décor gris.
C'était Poudlard. En noir et blanc, comme une photo.
Il repéra les escaliers, et vit un jeune homme qui regardait vers le haut.
« C'est vous, Tom Jedusor ? » demanda-t-il. Mais l'inconnu ne réagit pas. Il insista. « Ohé ! » Il était toujours sans réponse.
Il vit alors des personnes transporter quelque chose en descendant les escaliers. Le jeune homme et Harry suivirent du regard la chose.
C'était un brancard, avec un corps recouvert d'un linge blanc, dont une main dépassait.
Alors Harry compris. C'était ce qui s'était passé. C'était l'élève morte.
C'est alors qu'il entendit une voix étrangement familière.
« Tom ? Viens là. »
Le jeune homme releva la tête. « Professeur Dumbledore. »
Tom monta les marches, suivit par Harry qui vit le directeur. Mais l'était-il seulement à l'époque ? Il avait l'air bien plus jeune, avec une barbe moins longue et plus brune. Sa voix aussi était plus jeune, légèrement.
« Ce n'est pas prudent de se promener à une heure si tardive, Tom. »
« Pardon, professeur, mais il fallait… il fallait que je voie si ce qu'on raconte est vrai. »
« Oui, malheureusement. »
Le jeune homme commença à parler une fois devant le professeur. « Je me demandais… l'école va-t-elle vraiment fermer ? Je n'ai pas d'endroit où aller. »
Le professeur sembla compatir. « Je comprends, Tom, mais je crains que le professeur Dippet n'ait pas le choix. »
« Les choses seraient-elles différentes si… le coupable était attrapé ? »
Dumbledore regarda Tom avec insistance. « Y a-t-il quelque chose dont tu voudrais me faire part ? »
Le jeune homme haussa les sourcils, totalement détendu. « Non, professeur. Il n'y a rien. »
Il parlait d'une belle voix, douce. Il n'était pas difficile de le croire. Pourtant, il ne semblait pas vrai dans cette réponse.
Les deux hommes restèrent un temps l'un en face de l'autre, à se regarder chacun droit dans les yeux, calmement, neutres, mais sans rompre le contact visuel.
Finalement, Dumbledore concéda. « Très bien, tu peux y aller. »
« Merci, professeur. »
Le jeune homme s'éloigna. Harry suivit. Il commença ensuite à avancer à grands pas dans les couloirs sombres, et Harry dut se mettre à courir.
Tom arriva devant une porte assez discrète placée dans un renfoncement du mur. Il sortit sa baguette et regarda autour de lui avant d'ouvrir d'un coup en pointant sa baguette vers un grand homme qui chuchotait à une caisse.
Tom parla d'une voix forte pendant que son camarade se retournait vivement. « C'est terminé Hagrid ! »
Tom reprit sa voix douce et calme. « Je sais que tu ne voulais faire de mal à personne, mais cette jeune fille est morte maintenant. Le moins que l'on puisse faire, c'est arrêter la chose qui a fait ça. »
« Tu ne comprends pas, Aragog n'y est pour rien. », se défendit Hagrid.
Il semblait que Tom était la personne raisonnable, et qu'il devait faire entendre raison à l'autre élève. « Un monstre n'est pas un animal de compagnie Hagrid. »
Tom fit un grand mouvement de baguette et cria avec force une formule, qu'il dirigea vers le coffre qui s'ouvrit immédiatement dans un bruit grondant.
Vivement, une araignée dont le corps était aussi grand que celui d'un chat en sortit. Hagrid cria. « Fuis, Aragog ! »
Mais il semblait déjà que l'avertissement était inutile et l'araignée partait le plus vite possible. Trop vite pour que le sort de Tom ne l'atteigne lorsqu'il cria sa formule. « Arania Exumai ! »
Le sort percuta le sol. Tom ne poursuivit pas la chose et se retourna vers Hagrid en pointant sa baguette vers lui avant que le Gryffondor ne puisse faire un pas de plus.
« Je vais te dénoncer. On va te prendre ta baguette, et tu seras expulsé… »
Le souvenir commençait à s'éteindre. Harry se sentit tirer en arrière.
Soudainement, il se retrouva projeté dans sa chaise, et parvint à ne pas basculer de justesse.
« Harry ! »
Harry reconnut la voix de Neville et remarqua que son ami se précipitait vers lui.
« Tu vas bien Harry ? »
« O-oui. »
Neville semblait immensément inquiet. Harry reprit ses esprits complètement en libérant un souffle.
Neville le questionna. « Que s'est-il passé, Harry ? Quand je suis entré dans le dortoir, tu disparaissais. Les autres sont encore en train de fêter en bas pour la Saint-Valentin, mais les préfets ne tarderont pas à les faire monter. »
« Le journal est magique, Neville. »
Harry était tenté de tout expliquer maintenant, mais Ron et Seamus entraient déjà dans la salle, bientôt suivis sans doute par Dean.
« Je te raconterais plus tard, avec Hermione et Draco. »
Neville hocha la tête. Ron s'était arrêté en entendant la mention du Serpentard et les regardait. « Malfoy ? Vous en avez toujours pas fini avec lui ? Franchement, c'est sûr que c'est lui l'héritier de Serpentard. Si vous ne voulez pas vous sentir accuser, vous devriez vous écarter de lui. »
Harry posa un regard sombre vers le roux. « Weasley, il n'y a pratiquement que toi pour penser que c'est Draco. Les autres pensent tous que c'est Neville. En quoi nous écarter de Draco changera-t-il quelque chose ? »
« Eh bien, vous ne serez plus vu avec un des pires puristes Sang-Pur de Serpentard. Ce serait plutôt un bon début pour qu'on ne pense pas que vous êtes coupables. »
« Nous sommes aussi souvent avec Hermione, et c'est une née-Moldue. Si quoi que ce soit dans cette relation, c'est la réputation "puriste" de Draco qui en prend un coup, pas la nôtre. »
Ron insista. Il ne supportait pas que ses camarades pardonnent si facilement au Serpentard. « Il a traité son amie de Sang-de-Bourbe, et ça ne dérange aucun de vous ? »
Harry haussa les épaules. « Il s'est excusé sincèrement. C'est l'affaire de Hermione de savoir si elle peut lui faire confiance. Crois-moi, elle ne prend pas ses décisions à la légère. Tu as autre chose à dire, quelque chose d'intéressant, ou on peut tous aller nous coucher ? »
« Vous devriez vraiment arrêter de le fréquenter ! »
« Tu l'as déjà dit. »
Harry se leva et enleva le pull qu'il avait revêtu au-dessus de son pyjama.
Neville tenta doucement de comprendre l'aversion de Ron. « Pourquoi es-tu à ce point contre notre amitié avec lui ? »
« Parce qu'il est mauvais. Que vous ne le voyiez pas, je ne le comprends pas. Vous avez vraiment oublié toutes ces choses qu'il a faites l'année dernière ? »
Harry devint plus sec. « Non, nous n'avons rien oublié. Ni ce que toi tu as fait. »
« Et qu'ai-je fait de si mal, moi ? En comparaison à lui, ce n'est… »
« Tu as harcelé et insulté Hermione. Tu nous as critiqués toute l'année sur nos choix. Tu n'arrêtes pas de montrer à quel point tu hais le professeur Snape. »
« C'est vous qui êtes fou de l'admirer ! Et Neville qui manque de s'évanouir la moitié du temps en cours de potion ! »
Ce que Neville chuchota attira les regards de tous, même de ceux qui commençaient à se glisser sous leurs couvertures. « La pire peur de Voldemort devrait être le professeur Snape. Il terrifiait même Quirrell avec… »
La voix de Neville s'éteignit dans sa gorge alors qu'il visualisait leur affrontement face à l'homme aux deux visages. Snape avait pu intimider Quirrell alors que celui-ci avait Voldemort à l'arrière du crâne. C'était assez démonstratif du pouvoir inquiétant de l'austère maître des potions. Mais les autres ne savaient pas pour cette histoire.
Ron était incrédule. « Inquiéter Quirrell n'est franchement pas un exploit. »
Harry croisa les bras. « Tu as oublié ce qu'a dit Dumbledore l'année dernière ? Quirrell était un mage noir. »
Ron fit face à Harry dans la même posture. « Oui, on se demande comment vous avez fait pour trouver qu'il en était un. Et pourquoi Dumbledore vous a donné autant de points. L'intimidant Snape pouvait effrayer Quirrell mais pas se rendre compte que c'était un mage noir ? »
« Tu veux vraiment savoir la différence entre Draco et toi, Weasley ? »
Neville appela doucement. « S'il vous plaît, nous devrions nous coucher… »
Dean et Seamus approuvèrent. « Nous avons cours demain, avec Snape justement. »
Ron les ignora. « J'aimerais bien l'entendre. Il y en a de grandes, toutes en ma faveur, mais je me demande quelle tromperie tu vas sortir pour le valoriser. »
« Eh bien, il a été capable de reconnaître ses erreurs, contrairement à toi. Et il a été capable de comprendre pourquoi le professeur Snape a commencé à agir différemment avec Quirrell après le coup du troll. Particulièrement, il a été capable de prouver que Quirrell était doué en magie noire, très sombre et très puissante, et que son air r-r-ridicul n'était qu'un acte. »
Ron reste momentanément sans voix.
Harry alla à son lit, mais se détourna pour rajouter quelque chose. « Oh, et il n'a pas mené un groupe pour agresser un camarade, lui. »
« Il a fait beaucoup de choses similaires à ça ! » s'insurgea Ron.
« Pas que je sache. »
« Tu plaisantes ?! Vous deux et Granger étiez ses principaux adversaires ! Attends, c'est à cause de cette histoire de troll que vous lui avez tout pardonné ?! »
« Un peu long à la détente, n'est-ce pas, Weasley. Oui, pendant que Hermione pleurait aux toilettes à cause de toi et que tu ne semblais même pas t'en soucier, Draco nous a accompagnés pour la protéger sans hésiter. Depuis, il a fait beaucoup mieux. Alors que toi, tu as juste fait moins pire, et c'est seulement si je ne compte pas le combat que vous avez déclenché plus tard. »
Harry se tourna vers Seamus et Dean. « Et pour lequel vous êtes tous coupables ! »
Seamus lui fit la grimace avant de prendre la parole de manière provocante. « On regrette, d'accord ? Et ce sont les Serpentard qui ont initié ça. »
Percy ouvrit la porte. « Dépêchez-vous ! Je ne veux plus voir cette lumière allumée, et plus vous entendre. »
Ron tourna le regard vers son frère. « Eh, t'es pas notre mère, d'accord. »
« Non, je suis votre préfet. Et toi, je suis ton frère aîné, et Maman m'a délégué ton éducation quand nous sommes à Poudlard. Allez tous vous coucher maintenant ! »
Harry et Neville se dépêchèrent de se glisser sous leurs couvertures pendant que Ron traînait la patte. Quand ils furent enfin tous installés, le préfet éteignit les lumières et referma la porte.
Dans le noir de la nuit, Neville chuchota à Harry, dans l'espoir de ne pas être entendu par Ron. « Tu devrais essayer de t'entendre un peu mieux avec lui. »
« Pas tant qu'il sera autant un con avec mon beau-père. »
