(La chambre des secrets) Hagrid et le monstre


Le lendemain, Harry repensait en boucle à la scène dont il avait été témoin jusqu'à ce qu'il puisse en parler avec les autres.

Il ne voulait pas se répéter, surtout qu'il imaginait la réaction folle que Neville aurait, alors il avait décidé de n'en parler que lorsque tout le groupe serait là.

Mais plus il y pensait, plus il était perturbé. Et il était rarement bon d'avoir la tête ailleurs lors d'un cours de potion.

Neville était aussi inquiet. Il voulait savoir ce qui était arrivé à son ami, et quelle était la magie employée par le journal.

Autrement dit, leurs potions à tous deux furent catastrophiques.

Et ils n'avaient pas l'air de s'en soucier. Aussi, le professeur se montra excédé et exaspéré.

« Monsieur Potter, pensez-vous que vous serez capable de lire les consignes les plus simples sans faire exactement le contraire de ce qui est écrit avant que vous ayez à passer vos ASPICs ? »

Harry eut au moins la réaction de paraître contrit. Mais sa voix calme et absente montrait qu'il n'écoutait même pas le quart, et qu'il avait l'esprit occupé par autre chose. « Désolé professeur. Quels venins peuvent pétrifier ? »

Il était aisé de comprendre à quoi il faisait allusion. Mais ce n'était certainement pas le moment.

Le professeur s'appuya à deux mains sur la table du garçon pour le regarder dans les yeux.

« Potter, concentrez-vous sur ce cours, ou vous pourriez bien servir de cobaye pour connaître la réponse à votre questionnement stupide. »

À la fin du cours de potion, Harry se demandait comment il allait pouvoir supporter d'attendre une heure de plus.

À la fin du cours de métamorphose, il ne savait pas comment il avait réussi.

Au déjeuner, ils mangèrent tous les quatre comme à leur habitude au bout de la table de Serpentard. Harry se contenta de les informer alors qu'il avait des informations à leur communiquer, mais qu'il ne le ferait que lorsqu'ils seraient un peu plus seuls, en allant se promener dans la cour par exemple.

Chacun avait ses propres discussions là-bas, et ne faisait certainement pas attention à ce que racontaient ceux qui passaient.

Quand ils sortirent, Harry commença enfin à leur raconter ce qu'il avait découvert au sujet du journal, puis ce que Tom lui avait montré.

« C'était Hagrid ! C'est lui qui a ouvert la Chambre des secrets il y a 50 ans. », conclut-il.

« C'est impossible ! » cria Neville. Neville criait rarement, et avait rarement des sautes d'humeur. Pas dans ce sens du moins.

Neville pouvait avoir peur, et il pouvait être désespéré, catastrophé, paniqué ou toutes sortes de choses. Il pouvait aussi être heureux, émerveillé, ou prendre une situation gênante ou sa maladresse et malchance répétitive avec lassitude ou sagesse. Mais il ne s'énervait, avec colère, pas.

Sauf cette fois. Il réfutait violemment l'idée que Hagrid ait déjà ouvert la chambre des secrets.

Hermione approuva. « Ça ne peut pas être Hagrid. »

Draco acquiesça. « Je ne pense pas qu'un gros balourd comme Hagrid puisse être coupable de ça. »

Neville se tourna vers le Serpentard. « Ne parle pas comme ça de Hagrid ! »

Hermione proposa une solution. « Hagrid est notre ami, on devrait aller le voir, et lui en parler. »

Draco rit. « Merveilleuse idée ! Ce sera sans moi, mais si tu pense que lui demander s'il a laissé s'échapper l'un de ses nombreux monstres poilus et féroces sans contrôle, et sans prévenir le directeur ou un professeur, tout en prenant la peine d'écrire un avertissement de mise en garde en lettre de sang dans un couloir inondé, est la bonne chose à faire, ne te gêne surtout pas pour aller frapper à sa porte. »

« Je ne parlais pas de ça. S'il était aussi élève il y a 50 ans, il sait peut-être quelque chose. »

« Plus de choses que Tom, tu veux dire ? »

« Oui. Ou autre chose, plus exactement. »

Harry insista. « Hagrid était présent il y a 50 ans, et il est présent maintenant. »

Draco se moqua. « Il fait vraiment le coupable idéal, n'est-ce pas ? »

« Il aime particulièrement les monstres les plus exotiques, et il sait y faire avec les bêtes. »

Neville haussa la voix. « Mais il ne ferait jamais de mal à personne ! »

Hermione appuya. « Et il le dirait à Dumbledore s'il avait un problème avec l'un de ses monstres. Et s'il savait quelque chose au sujet de la Chambre, il lui aurait dit aussi. »

« Sauf s'il est coupable. », rétorqua Harry.

Draco était lassé de cette insistance. « Tu imagines Hagrid, le gentil Gryffondor stupide et naïf ami des bêtes monstrueuses, digne d'être l'héritier de Salazar Serpentard ? Tu penses qu'il s'en prendrait à des élèves, et selon leur statut sanguin, rien de moins. Songes-tu qu'il puisse écrire avec des lettres de sang sur les murs du château un message menaçant ? »

« Ou qu'il tue les coqs. », précisa Neville.

Harry était penaud. « Il ne le voulait peut-être pas, mais… »

Hermione reprit. « Pour écrire un message, il faut le vouloir. Ce n'est pas le monstre qui as fait ça. »

« D'accord… ça ne lui correspond pas ; il n'y a que le fait qu'il aime les monstres qui colle. Mais alors pourquoi… »

Draco répondit simplement. « Bouc émissaire. Que Tom soit le vrai coupable ou non, ce n'est pas la question. Il avait une raison de vouloir qu'un coupable soit pris : tu as dit qu'il n'avait nulle part où aller si Poudlard fermait ses portes. Il avait besoin de trouver un coupable. Hagrid aime les monstres dangereux, et en avait même un à l'époque comme animal de compagnie. Qui était mieux placé que lui pour prendre la responsabilité de la mort de cette élève ?

« Être récompensé pour la capture du coupable-qui-n'en-est-pas-un n'était qu'un petit supplément appréciable pour un préfet de Serpentard et préfet-en-chef. Le choix de Tom était mûrement réfléchi et finement mené. C'était un usurpateur bien plus convaincant que ce Lockhart. »

Harry sourit avec narquois. « Il faut dire que Lockhart est un Serdaigle. »

Draco rit. « Ça doit jouer. »

« Tu avoues que les Serpentard sont de meilleurs menteurs. »

« Ils sont meilleurs pour beaucoup de choses. »

Hermione intervint. « Du coup, allons-nous voir Hagrid ? »

Draco la regarda avec surprise. « Que veux-tu qu'il nous dise ? Tu as toi-même dit qu'il aurait déjà raconté à Dumbledore tout ce qu'il savait. »

Harry haussa les épaules. « Eh bien, nous pourrions obtenir les informations par nous même pour les rapporter à Snape. Je ne pense pas que Dumbledore lui aurait parlé de ce qu'il sait. Mais Snape a fait plus de choses que Dumbledore pour Quirrell l'année dernière. Et cette année, si Dumbledore a engagé Quirrell pour montrer à tous qu'il est pathétique, c'est encore Snape qui fait en sorte de révéler la supercherie. Dumbledore n'agit jamais. »

Neville avait grande confiance envers le directeur. « Dumbledore sait ce qu'il fait. »

« Désolé, Neville, mais je trouve que le seul qui fait quoi que ce soit, qu'importe le problème rencontré, c'est Snape. »

Draco réfléchit en se souvenant de la punition qu'il avait reçue la dernière fois qu'il avait insulté le directeur devant son parrain. « Ils travaillent peut-être ensemble… Dumbledore pourrait avoir communiqué les informations au professeur Snape. »

« Je préfère m'en assurer. Et comme ça, nous saurons aussi, puisqu'aucun des deux ne nous dira quoi que ce soit. »

Hermione soupira en souriant. « Je pense que tu veux surtout savoir et avoir l'information pour toi, Harry. »

« J'aime être informé. Savoir c'est pouvoir. Le professeur Snape m'a appris qu'il fallait connaître ce dans quoi on met les pieds. Nous sommes mis de force dans cette situation où une créature rode dans le château et pétrifie des élèves. Même si nous ne réglons pas le problème nous-mêmes, il faut savoir comment se protéger. »

Neville tenta de raisonner ses amis trop curieux. « S'il y avait un moyen de se protéger, les professeurs nous en auraient déjà informés. Sinon, c'est que nous ne pouvons rien faire par nous-même. »

Harry regarda son meilleur ami avec malice. « Serais-tu en train de refuser une visite chez Hagrid ? Il s'agit simplement d'aller lui parler pour l'instant, pas de faire quoi que ce soit. »

Neville n'avait absolument rien contre l'idée de rendre visite à son tuteur pour prendre le thé.

Le quatuor se dirigea sur le sentier menant à la cabane de Hagrid.

C'était la quatrième fois que Draco prenait ce chemin.

La première fois, il avait suivi discrètement Harry et Neville alors qu'ils sortaient la nuit pour se rendre chez le demi-géant. Il les avait écouté à travers la porte, mais s'était fait prendre par Ronald Weasley. Ça s'était terminé par une douleur à la cheville pour lui, suivi d'une retenue pour eux quatre et de 25 points en moins. La retenue avait eu lieu dans la forêt interdite en pleine nuit, et il y avait fait la rencontre avec Neville de Voldemort s'abreuvant de sang de licorne.

Cette première fois ne s'était pas bien finie. Le peu d'interaction qu'il avait eu avec Hagrid montrait que le balourd ne lui faisait pas confiance, même s'il s'inquiétait pour sa santé.

La deuxième fois, il y était allé après avoir traité Hermione de Sang-de-Bourbe dans le but de s'excuser. Ce n'était pas un bon souvenir non plus, même si la fin était plus heureuse, puisqu'il avait conservé son amitié. Il avait été compréhensible que Hagrid soit plutôt austère vis-à-vis de lui à ce moment-là.

La troisième fois était avant le match Gryffondor/Poufsouffle de Harry. Il y était allé en plein jour et sans qu'une catastrophe ait eu lieu, accompagnant pour la première fois Hermione et Neville en attendant que Harry vienne leur dire le résultat de son idée. Hagrid l'avait presque ignoré, mais lui avait servi une boisson chaude comme aux autres. Ce n'avait en fait pas été un mauvais moment.

Cette fois-ci, il y allait encore en tant qu'ami. Ou plutôt, en tant qu'ami d'amis. Mais son père méprisait le demi-géant, et lui avait transmis cela. Et il savait bien que Hagrid ne l'aimait pas.

Mais Neville ne l'avait pas mis en garde contre lui comme Harry l'avait fait contre Sirius Black.

Mais il savait qu'il avait dû faire très mauvaise impression à cet individu, et ne pouvait pas lui en vouloir. Il avait lui-même du mal avec l'idée de tenter de se faire un ami de cette créature.

Ce n'était qu'une demi-créature, certes. Mais c'était un balourd.

Harry frappa à la porte. Draco se demandait à quoi servait de frapper à la porte alors que c'était un peu chez Neville aussi.

« Que s'est-il passé pour que vous soyez là tous les quatre ? » fit une voix dans leur dos.

Les enfants sursautèrent et se retournèrent. Neville sourit.

« Nous voulions juste te parler. »

« Tous les quatre ? » demanda le demi-géant en tournant le regard vers le Malfoy. Draco déglutit, mal à l'aise.

Hagrid les invita. « Ouais, bon, entrez. »

Aussitôt, Harry ouvrit la porte et pénétra dans les lieux, suivit par les autres.

« Où étais-tu ? » demanda Neville.

« J'étais allé apporter du produit contre les limaces à Madame Chourave. Elle dit que les mandragores sont encore jeunes, mais dès qu'elles n'auront plus d'acné nous pourrons les découper, les faire cuire, et comme ça, tous ceux qui ont été pétrifiés seront ramenés à la vie. »

« Ce serait bien si nous pouvions trouver ce qui cause ça et l'arrêter. »

« Ce n'est pas à vous de faire ça. Les professeurs et le professeur Dumbledore s'en occupe. Mais en attendant, je vous conseille de rester prudent. »

« Oui, Hagrid, compte sur nous. »

Draco n'avait pas la patience d'y aller par quatre chemins. Il sauta à pieds joints dans le plat : « Savez-vous quelque chose à propos de la chambre des secrets, Hagrid ? »

Hagrid sembla stressé par la question, et incertain de la réponse à employer. Il observa chacun des enfants.

Draco avait un regard insistant, les yeux de Harry déviaient ailleurs, Hermione le fixait dans l'attente d'une réponse, et Neville restait calme et innocent.

Hagrid se retourna vers le Serpentard. « Malfoy, est-ce que votre père vous… »

Draco le coupa. « Nous ne savons rien, Hagrid. Mis à part que vous avez été… injustement accusé il y a 50 ans pour le meurtre d'une élève. Tout vous accuse, sauf une chose : qui croirait que vous soyez l'héritier de Serpentard ! »

Draco se rendit compte du ton condescendant qu'il employait. Il décida de se rattraper. « Enfin… sauf votre respect… Hagrid. »

Hermione choisit de développer davantage. « Hagrid, nous savons que vous êtes innocents. Mais peut-être savez-vous quelque chose ? »

Harry tenta à son tour. « Sais-tu qui a ouvert la chambre des Secrets. »

Hagrid ne semblait pas savoir ce qu'il allait répondre, quand Neville choisit de poser une autre question. « Sais-tu pourquoi Tom Jedusor t'a accusé ? »

« Il voulait… il ne voulait pas que l'école ferme. Il pensait que c'était moi. »

Draco ricana. « Ça m'étonnerait qu'il le pensât vraiment. »

« Écoutez, le professeur Dumbledore sait déjà tout ce qu'i savoir. »

Hermione insista. « Ne pourrions-nous pas en savoir plus nous-même ? Nous pourrions aider. »

« Non, vous en avez assez fait l'année dernière. »

Harry voulait le contredire. « Cette fois, nous ne ferons qu'informer le professeur Snape de tout ce que nous découvrons. Mais nous pouvons faire des recherches dans la bibliothèque sans nous mettre en danger. »

Neville tenta de convaincre son tuteur de leur en dire plus. « Hagrid, penses-tu que Tom Jedusor fut celui qui avait ouvert la chambre il y a 50 ans ? »

Hagrid soupira. « Voulez-vous des boissons chaudes ? »

Draco croisa les bras. « Vous esquivez la question. »

Mais les autres acceptèrent facilement. Finalement, ils passèrent l'après-midi sans réponse.


Quelques jours plus tard, vendredi après leur cours d'histoire, Harry et Hermione s'attardaient dans la salle commune afin de débattre sur l'efficacité et l'utilité de prendre des notes ou non durant ce cours pendant que Neville les précédait pour aller poser son sac dans le dortoir avant le déjeuner.

Neville revint vers Harry, catastrophé.

« Harry, il faut que tu viennes ! »

Hermione et Harry le regardèrent avec étonnement. Il allait bien cinq minutes avant. Son état l'alarme avait aussi attiré l'attention de Ron.

« Que se passe-t-il, Neville ? » questionna Harry.

« Le dortoir est sens dessus dessous ! Viens vite ! »

Cela sembla en faire réagir certains. Neville, Harry, Hermione et Ron se précipitèrent vers le dortoir, accompagnés également de Seamus et Dean.

Pendant qu'ils couraient, Neville développa. « Tes affaires ont été fouillées, Harry. »

Quand ils entrèrent dans leur dortoir, les garçons n'osèrent pas trop s'avancer, observant le désastre mis dans la salle. On aurait dit qu'une tornade était passée.

« Woaw. », fit Seamus.

Hermione commenta. « C'est forcément un Gryffondor, personne d'autre ne connaît notre mot de passe. Ou alors, ce n'est pas un élève. »

Harry s'avança dans la salle pour regarder les dégâts de plus près, et vérifier s'il manquait quelque chose.

Et il trouva sa réponse.

Les cinq garçons entreprirent de ranger les lieux, avec l'aide magique de Hermione pour réparer tout ce qui devait l'être.

Lorsque le trio arriva à la bibliothèque, Draco les accueillit avec inquiétude.

« Enfin, où étiez-vous ? Je ne vous ai pas vu au déjeuner. »

« Nous avons été retardés. », expliqua Harry.

« Quelque a fouillé notre dortoir, et il a fallu réparer les dégâts. », précisa Neville.

Hermione compléta. « Celui qui a fait ça cherchait quelque chose. »

Harry se tourna vers elle. « Et il l'a trouvé… le journal de Tom a disparu. »