(Le maraudeur fugitif) Le professeur Trelawney
Neville et Harry étaient en train de se diriger vers leur premier cours de divination lorsque Ron courut dans le couloir pour les rattraper. Il ralentit lorsqu'il fut juste dans leur dos, entre eux.
« Tu as pris divination aussi, Harry ? Nous serons ensemble alors ! »
Harry grogna. « Oui, je l'ai pris. Mais je ne compte pas m'installer près de toi. Qu'est-ce que tu veux ? »
« Harry, s'il te plaît… laisse-lui une chance, comme tu en as laissé une à Draco. », plaida Neville.
« J'aimerais simplement être votre ami. », répondit Ron.
« N'as-tu pas déjà les tiens ? », poursuivit Harry.
Ron haussa les épaules. « J'essayais juste d'être aimable. Je pensais que nous pourrions partir sur un nouveau départ. »
« Tu t'es excusé auprès de Draco ? »
La gêne apparaissant sur le visage du roux voulait tout dire. Harry se détourna et entraîna Neville plus rapidement vers la salle qu'ils avaient presque atteinte.
Ils s'installèrent par groupe de deux aux petites tables circulaires.
Harry et Neville restèrent ensemble. Dean et Seamus se placèrent au même endroit, et Ron alla vers Lavande… tout le monde s'installait tranquillement.
Le professeur, une dame avec d'immenses lunettes, arriva.
« Vous avez donc choisi d'étudier la Divination, le plus difficile des arts magiques. Je dois vous avertir dès le début que si vous n'avez pas le don de double vue, il y a peu de chance que je puisse vous enseigner quoi que ce soit. Les livres ne permettent pas d'aller bien loin dans ce domaine… »
Le professeur commença à divaguer en parlant du programme, parsemant son discours de propos incohérents qui se voulaient probablement être des paroles divinatoires de la femme.
Harry ne l'écoutait déjà plus que d'une oreille. Il voulait tellement regretter son choix de matière, mais il savait que s'il pouvait recommencer et changer sa sélection, il referait la même.
Il n'avait pas voulu de la divination. Il voulait suivre l'arithmancie. Mais Neville ne s'était pas senti rassuré à l'idée d'étudier cette autre discipline, et avait préféré prendre divination. Harry avait alors fait le même choix, afin d'accompagner son meilleur ami.
Mais dès qu'il vit le professeur, il fut méfiant. Dès qu'il l'entendit parler, il sut qu'il ne l'aimerait pas. Pis, il la trouvait absolument ridicule et caricaturale. Elle était tellement grotesque qu'il avait plus envie de se prendre la tête dans les mains de désespoir que de rire.
Il avait été prévenu par Severus, lorsque le professeur avait su son choix de matière, qu'il ferait mieux de se tenir éloigner d'elle. Elle n'apportait que la misère mentale.
Harry trouvait que l'homme avait quelques bonnes raisons cachées de dire ça, mais il ne l'avait pas interrogé. Il savait juste que Severus se tenait le plus loin possible d'elle. Severus n'aurait pas peur d'une sorcière, surtout de cet acabit. Alors il y avait forcément une histoire obscure qui entourait mystérieusement ces choix.
Harry n'était pas pressé de savoir ce qui s'était passé si le professeur Snape jugeait qu'il serait mieux dans l'ignorance. Severus n'était pas comme Remus, il disait les choses. Donc lorsqu'il se taisait, il y avait de bonnes raisons. C'était du moins ce dont Harry était persuadé.
Harry revint à la réalité du cours qui s'écoulait lorsque la femme s'approcha de leur table en leur adressant la parole.
« Toi, mon garçon, tu vis avec Hagrid, n'est-ce pas ? »
« O-oui… », répondit timidement Neville. Même s'il avait toujours connu les murs de Poudlard, il avait également fait bien attention à éviter la femme, aussi sûrement qu'il avait évité le chef Serpentard.
« Non, non, ne m'interromps pas… laisse-moi deviner… oh, mon pauvre garçon… » La femme semblait le prendre en pitié. Harry détestait ça. « un grand malheur… une terrible perte, pauvre Hagrid. Il sera le plus à plaindre cette année… »
Neville était blême alors qu'elle se tournait à présent vers Harry.
« Et toi… tu n'as plus de famille… à partir de maintenant, elle ne sera plus jamais comme avant… »
« On peut commencer le cours ? » demanda Harry avec impatience, « Je veux dire, commencer à faire des exercices nous-même ? »
« Oh, oui, oui, certainement ! »
« Elle raconte n'importe quoi. », souffla Hermione.
Les deux garçons sursautèrent et observèrent la fille qui était assise entre eux.
« Tu… tu es là depuis combien de temps ? » questionna Harry, ignorant ce que racontait Trelawney.
« Depuis le début, pourquoi ? » répondit son amie tout en glissant son pendentif dans son col.
Leur attention se reporta sur le professeur. « Bien, vous avez tous une tasse devant vous. Que chacun prenne celle de son voisin. Vous avez tous votre livre pour interpréter les symboles ? Bien… Dites-moi, mon garçon, que voyez-vous ? »
Elle interrogeait encore Neville, qui avait pris la tasse d'Harry. Hermione sortait le livre avec impatience, pendant qu'Harry observait curieusement l'intérieur de la tasse de son meilleur ami. Ce n'était que des taches noires mal séchées. Cet exercice était stupide. Il se demanda pourquoi Hermione avait choisi cette matière plutôt que l'arithmancie.
« Euh… je… je vois… une… une sorte de croix ? »
« Une sorte de croix ? Tu pourrais préciser ? » demanda Hermione avec agacement.
« Euh… celle-là. », pointa-t-il sur la page ouverte du livre de la fille.
Hermione fut un instant surprise, puis soupira. « Des épreuves et des souffrances. »
« Super. », râla Harry.
« Continue. », encouragea le professeur.
« Alors, euh, Harry va subir des épreuves et de la souffrance… et… euh… il y a un soleil… ce qui veut dire… »
Hermione tournait les pages activement. Elle ne sembla même plus surprise par ce qu'elle lisait. Elle s'était résignée à l'idée que tout ceci était idiot. « Un grand bonheur. »
Neville, déjà incertain par ces interprétations, ne savait plus quoi penser. Il tenta d'assembler les morceaux. « Donc Harry va… souffrir, mais il sera heureux de souffrir… »
Harry se retint d'annoncer ce qu'il pensait de cela, car c'était Neville qui prendrait la remarque acerbe, et il ne voulait pas le blesser.
Du reste, il était plutôt content que personne ne rie ou ne se moqua. Il songea que le fait qu'ils aient sauvé Ginny et vaincu un basilic l'année précédente devait jouer à leur faire gagner un peu de respect.
Trelawney observa rapidement Harry, comme si elle cherchait à voir sur son visage s'il était du genre masochiste. Harry roula des yeux, et appuya sa joue sur son poing, le coude posé sur la table.
Le professeur décida alors de vérifier la tasse. « Laisse-moi voir… »
Elle hurla et manqua de faire tomber le morceau de porcelaine après avoir regardé dedans. Tous les élèves la scrutèrent avec appréhension.
« Le sinistros… Il a le sinistros… »
Harry était le seul à ne pas se montrer impressionné. Il souffla d'agacement. « Et qu'est-ce que c'est ? » Il tendait la main pour récupérer sa tasse, ce qu'il put faire sans grande difficulté.
« C'est un présage de mort prochaine. », expliqua Dean, « symbolisé par un gros chien noir. »
Harry regardait dans sa tasse. Il commençait à croire que ce cours n'était peut-être pas aussi stupide qu'il ne le pensait. Dans sa tasse, tout ce qu'il pouvait voir en cette marque modifiée par l'agitation de la vaisselle, était une gueule de canidé.
Et il repensait à ce chien qu'il avait vu durant l'été quand il fuguait de chez sa tante.
Après le cours de divination, ils se dirigèrent vers le cours de soin aux créatures magiques. Hermione, qui pourtant de manière générale avait un grand respect pour les professeurs, n'arrêtait pas de critiquer Trelawney, et de décrire la divination comme inutile.
« … contrairement à l'arithmancie, qui est ma matière préférée d'ailleurs. Il ne s'agit pas de "deviner" avec l'arithmancie. On trouve la vérité scientifiquement, avec des nombres. »
« Ça reste de la magie, non ? » s'enquit Neville.
« Tu suis combien de cours ! » s'étrangla Ron qui les suivait de près.
« Un certain nombre. », éluda-t-elle rapidement la question, toujours un peu sèche envers Ron. « L'arithmancie est une vraie discipline, un art. La divination n'a aucun sens. Surtout, ce professeur est… »
Hermione réfléchit à un mot qu'elle n'aurait pas encore employé. Harry profita de ce silence pour interrompre. « Mais, Hermione… ces deux matières sont en même temps. Comment peux-tu suivre l'une et l'autre à la fois ? »
Harry savait parfaitement qu'il existait cette incompatibilité d'emploi du temps ; c'était ce qui l'avait empêché de prendre les deux matières à la fois.
Avant qu'elle ne puisse répondre, Draco les rattrapait, avec un air de surprise absolument divin sur son visage. « Mione ?! »
Neville accueillit le nouvel arrivant avec le sourire. « Bonjour Draco. Comment était ton cours ? »
Draco ne quittait pas la fille des yeux. « C'était… intéressant… »
L'esprit de Draco était plus occupé à chercher une explication à la présence rapide d'Hermione qu'à se souvenir de son cours passionnant pour le raconter à ses amis.
Il était allé en cours d'arithmancie avec la plupart des Serpentards qui avaient aussi choisi cette option. Il s'était installé avec Hermione, et le cours s'était déroulé à merveille.
Cependant, à la fin, Hermione était partie rapidement. Elle avait décidé d'aller rejoindre Harry et Neville sans lui, prétendant avoir l'intention de les attraper à la sortie de leur cours de divination.
Draco n'avait pas insisté pour la suivre : non seulement elle filait déjà à l'extérieur de la salle presque en courant alors qu'il n'avait aucune intention de faire de même, mais il ne voyait pas l'intérêt d'aller à la rencontre des autres. Il préférait se diriger directement vers leur cours suivant.
Ils venaient tout juste de sortir d'arithmancie… elle avait été bien trop rapide. Elle ne semblait pas avoir couru récemment non plus. Et il était évident que le cours de divination s'était terminé plus tôt.
Hermione ne le quittait pas des yeux non plus, et elle semblait presque anxieuse.
« Pourquoi étais-tu surpris de voir Hermione ? » questionna soudainement Harry alors qu'ils arrivaient presque à la clairière où ils auraient cours avec Hagrid.
Discrètement, Hermione secouait la tête. Draco était interloqué maintenant. « Je… elle m'a dit qu'elle était malade et ne pourrait pas rejoindre notre cours d'arithmancie… elle voulait que je prenne des notes pour elle. »
Il commençait à reprendre en assurance, et poursuivit avec un ton plus dur, afin de rendre plus vrai son discours. « Il faudra que nous ayons une petite discussion tous les deux à ce sujet. »
Harry haussa les épaules. « Alors il semble que la divination ne soit pas si mauvaise que cela après tout. Si Hermione se donne la peine de sécher un cours pour aller à un autre. »
Harry lança un regard appuyé vers la fille, qui lui répondit avec un léger sourire.
« Je comprends… » Le ton de réalisation pur et simple de Draco fit remonter la catastrophe d'un coup dans l'esprit d'Hermione. Elle comprit elle-même sans difficulté qu'il avait en effet deviné correctement.
Elle lui fit signe de ne rien dire avec un geste de la main alors qu'il regardait vers elle, mais qu'il était le seul, les autres l'observant lui, en tentant de saisir ce qu'il avait voulu dire.
« Qu'as-tu compris, Draco ? » questionna Harry.
Draco se retourna vers son autre ami. « Que Mione est un peu menteuse quand elle veut, et pas si sérieuse que cela. Elle pourrait faire une bonne Serpentard. »
« Ne l'insulte pas, Malfoy. », cracha Ron derrière lui.
« Ronald ! » crièrent Hermione et Harry à la fois.
Draco garda son calme, presque narquois. « Weasley, je suis bien mieux placé que toi pour défendre Mione. … Et pour défendre ta propre sœur aussi. »
Draco avait dit la fin dans le seul but d'énerver le roux, mais il avait encore du mal à admettre qu'entre tous les élèves c'était une Weasley qu'il avait dû aider à secourir. Et par-dessus tout, son père était au courant. De même, Lucius avait appris pour l'amitié entre Draco et les Gryffondor, en particulier la née-Moldue.
L'été avait été particulièrement déplaisant. Un grand froid avait régné sur le manoir Malfoy. Le père et le fils n'avaient plus jamais été dans la même pièce sans la présence de la mère. Draco s'était alors enfermé dans ses devoirs d'été, qu'il terminât rapidement, puis dans des lectures supplémentaires en s'enfermant dans sa chambre ou dans la bibliothèque.
Il avait aussi passé du temps à voler sur son balai, mais trouvait moins d'excitation que s'il affrontait Harry sur un terrain.
Suite à leur désobéissance « irréfléchie » et à leur absence d'un bon sens qui aurait dû les pousser à aller chercher un professeur, un vrai professeur, son parrain avait refusé de lui rendre visite.
Severus n'était venu qu'une seule fois de l'été au manoir, et s'était enfermé dans le bureau de Lucius pour parler de Merlin sait quoi.
La mère de Draco n'avait pas semblé surprise de l'arrivée inattendue du maître des potions ce jour-là. Elle n'avait pas non plus paru s'inquiéter de l'air sombre et énervé de l'homme alors qu'elle le laissait aller directement au bureau de son époux.
Tout ce que Draco savait, c'était qu'après le départ de son parrain, son père lui avait à nouveau adressé la parole. Mais Draco avait entendu le mépris de son père pour lui et en avait été profondément blessé.
Son père lui en voulait évidemment pour son choix d'entretenir une relation avec une née-Moldue. Draco avait de son côté laissé partir sa colère contre son géniteur. L'homme avait mis en danger l'école, mais n'avait pas été conscient de ce que ferait le journal. Quant à la décision de faire quitter Poudlard à Dumbledore, Draco ne s'en souciait pas.
À la fin de l'été, Draco avait tellement lu qu'il connaissait intégralement les programmes de nombreux cours. Le cours de soins aux créatures magiques n'en faisait pas partie. Il n'avait pas voulu ouvrir ce monstrueux livre des monstres.
Draco nota l'absence de réplique du Wealsey avec de la satisfaction d'avoir gagné, mais aussi une certaine curiosité quant à savoir pourquoi le roux ne répondait pas. Il décida que c'était une question pour un autre jour et sortit une pomme verte de son sac pour croquer dedans.
S'ils avaient cours à l'air frais et dans les bois, autant en profiter. Ce n'était pas le demi-géant qui imposerait une discipline interdisant de manger des fruits.
Hagrid arrivait justement.
