(Le maraudeur fugitif) Les cours d'option
Pomfresh dut ouvrir son infirmerie pour accueillir le Serpentard plaintif, le professeur indécis et la Gryffondor inquiète.
Elle fit s'installer le garçon sur son « lit habituel », une appellation qui en elle-même était mauvais signe, et renvoya Hagrid. Elle prenait les choses en main. Il pourrait venir plus tard pour faire un rapport sur l'incident, mais il avait encore une classe à gérer pour le moment, et les deux adolescents seraient pleinement capables de tout lui raconter par eux-mêmes.
Si Draco pouvait être prêt à mentir, ce ne serait pas le cas d'Hermione.
Elle les interrogea après avoir soigné le garçon. « Ce qui s'est passé ? »
Hermione passa soudainement à la colère. « Cet idiot a ouvertement insulté un hippogriffe après l'avertissement expresse d'Hagrid de ne jamais le faire ! »
Pomfresh regarda durement l'adolescent qui s'asseyait. « J'aimerais bien que vous n'essayiez pas de devenir un patient plus récurent que Neville, monsieur Malfoy. »
Draco gémit. « Je n'essaye pas ! », protesta-t-il.
Hermione posa ses poings sur les hanches. « Ah, vraiment ? Alors qu'est-ce que c'était que cela ? Je te croyais intelligent, Draco ! Comment peux-tu être aussi stupide ! Tu l'as provoqué ouvertement, exprès ! Tu le cherchais, Draco, mais qu'est-ce qui t'a pris ! »
Pendant que Pomfresh s'éloignait, Hermione continuait de crier sur son camarade et de lui faire la morale. Ils étaient les seules personnes présentes dans l'infirmerie, et l'adulte était d'accord que le Serpentard méritait un bon sermon, alors elle laissa passer et alla dans son bureau.
Harry arriva en courant, libéré de ses obligations, et comprit rapidement la scène. Il s'approcha et rejoignit Hermione dans ses propos.
« Tu es vraiment idiot, Draco. Hagrid avait dit qu'il était dangereux d'insulter un hippogriffe. Pourquoi as-tu fait ça ? »
« Après un cerbère et un basilic, je ne trouvais pas un hippogriffe très effrayant. », rétorqua le Serpentard, qui pouvait enfin trouver le temps de placer une réplique. Il avait été impossible de le faire pendant qu'Hermione criait.
« Sans Neville, nous aurions eu de gros ennuis de Touffu. Et ça n'a pas été beaucoup mieux avec le basilic. Tu n'as aucun talent avec les créatures, tu es irrespectueux au possible. À se demander même pourquoi tu as choisi de suivre ce cours. »
« Si j'avais su qu'il était mené par Hagrid, je me serais abstenu, crois-moi. Mon père serait tellement en colère s'il apprenait que cet irresponsable a été nommé professeur. »
« Tu dois du respect à Hagrid ! » intervint Hermione.
« Il ne sait pas comment tenir une classe, Mione. »
Harry reprit, « Tu as vraiment fait ça juste parce que tu as survécu, grâce à Neville, à un cerbère, une acromantule et un basilic ? »
« Vous vous êtes donné en spectacle tous les trois à vous montrer intimidés. Comment pouvez-vous avoir peur de ça, après tout ce que vous avez vu ? »
« J'ai été respectueux des consignes données par Hagrid. », se justifia Harry.
« Il est normal d'avoir peur quand un ami est en danger, Draco ! » houspilla Hermione, « Ce n'est pas parce que nous avons croisé des créatures plus dangereuses que les autres sont inoffensives. Buck est fier, et tu l'as insulté ! Tu aurais réagi comme lui si quelqu'un était venu t'aborder comme ça. »
« Je n'aurais pas donné un coup de griffe ! » s'insurgea Draco.
« Tu te serais senti offensé, et tu aurais agi en conséquence ! Tu n'es certainement pas inoffensif, Draco. Que va-t-il se passer maintenant ? Tu vas signaler à ton père qu'Hagrid est professeur ? Ou tu vas continuer à te rebeller durant ses cours quitte à finir ici toutes les semaines ? »
« Je ne le dirais pas. », trancha Draco, catégorique, « Et je ne veux certainement pas venir ici "plus souvent que Neville". Si lui réussit ce cours, il n'y a pas de raisons pour que je ne puisse pas. »
Harry sourit. « Neville a beaucoup de talents, et de bien meilleures qualités que toi. Essaye de le surpasser en botanique, et on en reparle. »
Draco grimaça. « Il n'y a que lui pour être capable de parler aux oreilles des plantes et des animaux. »
Les trois adolescents partirent pour la grande salle à midi. Ils s'installèrent à la table de Poufsouffle sans que personne ne leur fasse de remarques. Neville les rejoignit peu après, sans avoir eu le moindre mal à les localiser. C'était surtout grâce à l'aide de Ron qui lui indiqua, mais les cheveux du trio étaient assez visibles de loin.
« Tu devras t'excuser auprès de Buck. », entama le garçon en s'installant.
« Que je quoi ? » fit le blond qui s'était, à raison, senti visé.
« Quand on insulte un hippogriffe, la moindre des choses, c'est de s'excuser. »
« Quand on survit… », marmonna Harry.
Neville ne se laissa pas interrompre, « Surtout lorsque c'est fait gratuitement, sans la moindre raison. C'était juste méchant. Buck n'avait rien fait de mal, il n'était pas juste de ta part de le provoquer. Et si ton but était de décrédibiliser Hagrid, tu dois des excuses à Buck et Hagrid. »
Draco souffla d'agacement avant de répondre. « D'accord, j'irais. … Satisfait ? »
Neville hocha la tête tout en coupant sa viande. « Oui. »
Une partie du repas se passa en silence. Il semblait clair que seul Neville avait le pouvoir de relancer les discussions. Le garçon était généralement doux, complaisant et aimable. À partir du moment où il apparaissait sec, aucun n'avait envie de le contrarier davantage. Ce n'était pas une question de crainte, mais d'amitié. Aucun n'aimait voir Neville déçu.
Et ce fut en effet Neville qui rouvrit une discussion au milieu du déjeuner. Sa voix était à nouveau amicale, ce qui était un soulagement. « Quel était le problème avec Zabini ? »
« Aucun. », répondit immédiatement Draco.
« Draco, nous sommes amis. Ce qui veut dire que tes ennuis sont nos ennuis. Nous sommes prêts à t'aider, quoi qu'il y ait. »
« Les problèmes de Serpentard restent à Serpentard, Nev, quoi qu'il s'y passe. »
« Je ne veux pas que ce qui s'est produit en première année recommence. »
« Je te promets que j'avertirais Oncle Sev s'il y a quelque chose qui dépasse le raisonnable. »
Hermione le regarda de biais. « Draco, si cela te pousse à tenter une méchanceté suicidaire, ça dépasse le raisonnable. »
Draco la fusilla de ses yeux d'acier. « Il n'y avait aucun rapport. J'agis toujours selon mon propre chef et ce n'est pas quelqu'un d'aussi méprisable que Zabini qui va me pousser à faire autre chose. »
Harry soupira. « Draco, il faudrait que tu apprennes que les gens ne sont pas que des relations. Il n'y a pas une hiérarchie intrinsèque qui fait que certains dirigent — comme Nott et toi — et que d'autres obéissent — comme Crabbe et Goyle. La nature humaine est complexe et les évolutions dans les développements d'interaction sont infinies. »
« Ne vois pas Zabini comme un objet, il est dangereux. », précisa Hermione.
« Je tâcherais de m'en souvenir. », répondit le Serpentard sans conviction. Il ne voyait pas de raisons pour que son arrangement avec Nott ne le protège pas. Il avait beau détester l'autre garçon, ce dernier n'en était pas moins intelligent, observateur et rusé autant que vicieux. Si Nott tenait parole, il empêcherait que quoi que ce soit de fâcheux se produise dans le dos de Draco.
Neville passa le reste du repas à parler avec intérêt de Buck et Hagrid.
À la fin, Harry se tourna vers son meilleur ami avec un large sourire excité à l'idée d'un cours prochain enfin satisfaisant en défense contre les forces du mal. « Neville, ça te dirait de rejoindre Oncle Remus un peu avant le cours ? »
« Je ne sais pas, il avait l'air pas mal malade ces derniers temps. », hésita-t-il.
« Justement ! Ça lui ferait du bien de nous voir. »
« Allez-y, Hermione et moi avons quelque chose à discuter… à propos des cours d'Arithmancie. », encouragea Draco.
Pendant que le premier duo se levait pour partir avec engouement vers la salle de cours, et que le Serpentard les suivait du regard avec un sourire, Hermione se tordait les mains sous la table.
Dès que les deux garçons furent à l'extérieur de la grande salle, Draco se retourna vers la fille, tout sourire disparut, laissant place à une expression de sérieux.
« Je crois que nous avons quelque chose à discuter. Pas ici peut-être… allons près du clocher. »
Il se leva sans attendre qu'elle accepte et commença à partir. Hermione soupira et le suivit.
« Je te préviens, il n'est pas question que j'arrive en retard à mon cours de défense contre les forces du mal. », précisa-t-elle lorsqu'ils furent dans le couloir qui était actuellement vide.
« Tu aurais toujours un moyen de rattraper le temps perdu. », rétorqua-t-il.
Ils se turent jusqu'à ce qu'ils furent arrivés, et certains que personne n'était dans les alentours. Puis, Draco plaqua presque Hermione contre le mur et appuya ses deux mains sur la pierre chacune d'un côté de la tête de la Gryffondor.
« Tu as un retourneur de temps ! » siffla-t-il.
« Oui. Le professeur McGonagall me l'a donné hier pour que je puisse suivre tous les cours. », répondit-elle avec provocation, appréciant peu de s'être fait pousser de la sorte, ou d'être coincée entre le mur et le garçon, même si l'endroit était étroit.
« Et tu ne comptais pas nous le dire ?! »
« Non. », fit-elle comme s'il était idiot, « C'est un secret absolu. »
« Pas des plus facile à garder. Je me demande même comment Harry n'a pas encore compris. »
« Tes mensonges pour me couvrir doivent y être pour quelque chose. », répondit-elle en levant les yeux au ciel. Elle poussa ensuite Draco avec force et il recula de quelques pas.
Hermione ne comprenait pas pourquoi il avait tellement l'air en colère, mais elle s'en fichait actuellement. Il l'avait tout autant énervée en la traitant comme ça. Elle sortit sa baguette et la pointa vers lui.
« Ne t'avise pas de recommencer. »
Il ne sembla pas impressionné et fit une grimace agacée. Il ne répondit pas tout de suite. Il semblait prendre le temps de réfléchir à la suite. Il avait plusieurs options pour faire avancer cette discussion, et surtout beaucoup de possibilités de la mener vers une impasse. Répondre directement à la menace n'était pas une bonne option. Il fit un effort pour se calmer un peu, et reprit sombrement mais posément.
« D'accord, je ne dirais rien sur tout secret, et j'éviterais tout malentendu, mais à certaines conditions seulement. »
« Lesquelles serait-ce ? » interrogea-t-elle avec autorité. Intérieurement, elle craignait qu'il ne dévoile la chose, même à Neville ou Harry, mais elle ne comptait pas montrer sa faiblesse. Cela pourrait le pousser à rendre le chantage encore plus contraignant.
« La prochaine fois, tu suis ton cours de divination avant celui d'arithmancie. »
De toutes les choses qu'elle n'était pas parvenue à imaginer, elle ne s'attendait certainement pas à celle-ci. Et sa surprise fut impossible à cacher. « Quoi, mais pourquoi ? »
« Que je ne sorte pas de la classe tout seul ! » répondit-il avec colère. Il prit une respiration et s'expliqua normalement, comme tout bon Serpentard — spécialement ceux qui maîtrisaient la technique de méditation de l'occlumancie — ferait.
« Harry et Nev sont ensemble avec la folle. Je ne veux pas que tu m'abonnes moi, qui suis seul sans toi, pour les rejoindre alors qu'ils sont tous les deux. J'ai le droit de ne pas être isolé. »
« Oh, je t'en prie, Draco, la plupart des Serpentard suivent ce cours. Tu ne seras jamais seul. »
« Ils ne sont pas mes amis, eux. », rétorqua-t-il avec dureté et sincérité.
Hermione fut à la fois choquée et touchée. Elle le savait pourtant. Mais quelque part, elle appréciait qu'il le dise. Elle appréciait particulièrement qu'il se détache ouvertement d'eux et admette qu'il préférait sa compagnie et celle de Neville et Harry. Il acceptait de le reconnaître, et il était enfin prêt à abandonner toute idée de diriger la bande de Serpentard pour être avec ses vrais amis.
Elle passa un temps qu'elle sut juger avant de répondre.
Draco restait entièrement silencieux, et la scrutait dans l'ombre du coin où ils s'étaient cachés. Il attendait la décision de sa camarade avec angoisse, mais il conservait l'allure noble que son père et son parrain lui avaient appris à montrer. Il devait toujours être capable d'imposer le respect lorsqu'il voulait obtenir une chose importante.
Il ne se rendait pas compte qu'Hermione préférerait toujours la franchise de quelques mots à la superficialité de sa belle apparence travaillée pour impressionner les plus faibles d'esprit.
Dans l'endroit calme, alors qu'il observait son amie, il ne remarquait pas non plus le temps qui s'écoulait. L'instant était posé et méditatif ; et cela ne leur apportait que du bien. Il n'était pas nécessaire de parler ou de faire grand-chose pour profiter d'un moment loin de toute agitation.
Hermione semblait réfléchir, bien que Draco n'ait pas la moindre idée de ce qui pouvait lui traverser l'esprit, et lui-même attendait qu'elle adhère en sa faveur. Ce n'était pas rien, cela signifiait beaucoup pour lui. Et pourtant, il pouvait avoir l'impression que le temps figé était une pause dans la journée stressante de cours ou d'aventures. Il n'avait pas besoin de réfléchir. Tout était dans les mains de la fille.
Elle lui sourit doucement et posa une main sur son bras. « D'accord, Draco. Je ferais comme ça. »
Draco lui rendit son sourire, et ils quittèrent l'endroit. Dès qu'ils furent dans un couloir plus lumineux, ils se sentirent revenir dans le présent, où Hermione avait un cours sous peu. Draco choisit de l'escorter jusqu'à la salle de classe, n'ayant pas cours lui-même pour le moment.
« Cependant, je dois t'avertir. », reprit la fille avec son ton habituel alors qu'ils avançaient rapidement, « C'est un secret absolu, vraiment. Les professeurs McGonagall et Dumbledore m'ont donné leur confiance, et tu pourrais bien en pâtir autant que moi si tu le dévoilais. Je suis censée rester discrète, mais ils n'apprécieront pas que tu le dévoiles. »
« Je tâcherais de m'en souvenir. », fit le garçon avec légèreté, comme s'il prenait la menace comme une plaisanterie sans importance.
