(Le maraudeur fugitif) Son nom est Severus


La semaine suivant le désastreux match de Quidditch opposant Gryffondor à Serpentard, Harry décida de cesser de penser toujours à Sirius.

Si son parrain décidait de ne pas s'occuper de lui, il ferait de même. Il était temps qu'il se concentre davantage sur ses études et ses amis. Et puis, pourquoi se préoccuperait-il d'un parrain qui l'ignorait quand il avait sa mère et son beau-père à disposition ?

Harry avait hésité à passer du temps avec son oncle, mais après une semaine de réflexion, il décida que Remus était comme Sirius. Si son parrain n'avait pas pris la peine de venir le voir et avait préféré déchirer la grosse dame, son loup-garou d'oncle lui cachait toutes les informations qu'il aimerait connaître. Et il n'excluait pas l'idée que Remus ait pu aider Sirius à entrer dans le château et lui ait caché cela aussi.

C'est pourquoi, quand le week-end arriva et que Remus lui proposa de l'accompagner dans une promenade en forêt, il refusa et entraîna plutôt ses trois amis dans les quartiers de Sev et sa mère.

Hermione était un peu intimidée de se tenir là.

Harry avait fui le petit déjeuner, entraînant le groupe vers les cachots, au plus grand plaisir de Draco qui semblait avoir rapidement compris leur destination.

Neville avait également deviné, connaissant fort bien son meilleur ami, mais n'arborerait certainement pas de sourire tant qu'il ne serait pas en présence de Lily.

Et Hermione était beaucoup de choses, mais pas sotte : pour avoir déjà fait un certain nombre de fois le trajet vers le bureau du professeur, elle avait une petite idée de leur destination.

Harry ouvrit la porte du bureau sans frapper, et pénétra dans la salle vide, pour se diriger droit vers la porte du fond. Draco prit la peine de fermer la porte du bureau après que les deux autres soient entrés à leur tour.

Le Gryffondor aux yeux verts ne prit même pas la peine de toquer à la porte des quartiers du chef Serpentard. Il entra directement.

Hermione resta béate un instant, jusqu'à ce que Draco passe à côté d'elle pour suivre les autres garçons. « Tu vas attraper des moisissures, Mione. »

Cela la fit réagir. « Mais comment pouvez-vous… tu peux entrer comme ça ?! »

Draco souffla, fit deux pas en arrière, attrapa la fille par le poignet, et la tira avec lui vers les quartiers de son parrain. « Bien sûr qu'il peut, sa mère vit là ! »

« Oui, mais, ce sont les quartiers du professeur Snape. », commenta la fille alors que Draco refermait la porte derrière elle.

Harry et Neville étaient déjà sur le canapé aux côtés de Lily qui regarda aimablement Hermione. « Sev n'a aucun problème à la venue de mon fils chez lui. », déclara-t-elle, avant de chuchoter sur le ton de la confidence, « Ne le dites à personne, mais c'est un peu le sien aussi. »

« J'ai entendu ça. », fit la voix froide du professeur qui venait de quitter son laboratoire en s'essuyant les mains sur un torchon dont l'aspect doux et propre ne semblait pas correspondre à cette appellation.

Harry rougit, Neville baissa la tête pour observer ses pieds, et Draco regarda curieusement mais d'un air interdit entre son parrain et le trio du canapé. Hermione ne savait pas où se mettre. Elle envahissait la vie privée d'un de ses professeurs, et ne s'y sentait pas du tout à sa place. Ce n'était pas comme ça qu'elle avait été éduquée.

Lily se contenta de rire.

Harry fut le premier à tenter de changer de sujet. « Puis-je venir t'aider avec ta potion ? »

« Non. »

« Mais… »

« Même si tu étais mon meilleur élève, je ne te le permettrais pas avant que tu sois au niveau ASPIC, et même alors, il faudrait que tu me démontres des capacités bien supérieures à l'attendu. »

« J'aimerais apprendre à la faire. »

Draco, qui était allé chercher un livre dans une étagère, se laissa tomber sur le canapé. « Quand Oncle Sev juge qu'une potion est trop délicate à brasser pour nous, pauvre commun des mortels, nous devons simplement l'accepter, Harry. »

Le Gryffondor ne se renfrogna qu'une fraction de seconde avant de refuser d'abandonner. « Y a-t-il une autre potion que nous puissions faire pour t'aider ? »

Severus tourna son regard vers la fille qui était restée debout, immobile, à l'entrée de ses quartiers. « Ne restez pas stupéfiée ici, Miss Granger. Trouvez-vous quelque chose à faire. Et je peux vous assurer qu'aucun siège, fauteuil ou canapé ne mordra votre arrière si vous vous hasardiez à y prendre place. »

Hermione rougit. « Désolée, professeur. »

Lily rit. « Oh, je vous en prie, venez près de nous, Hermione. Et Sev n'est pas votre professeur ici… »

« Lily… », commença Severus sur un ton d'avertissement, que la femme ignora totalement.

« Allez, Sev, ce sont les amis d'Harry et Draco, ils ont droit à un peu de confort ici. Surtout s'ils veulent en faire leur refuge. »

« Je n'apprécierais pas que… »

« Ça me fera de la compagnie, surtout quand tu es si souvent occupé à brasser. Et puis, tu pourrais apprécier aussi d'avoir quelques assistants en potion. Arrête de vouloir toujours tout faire tout seul. Tu as au moins trois brillants élèves en potion qui sont prêts à t'aider pour tout ce que tu leur demanderas, et Neville sait préparer les plantes à la perfection. Tu pourrais aussi leur donner des cours avancés sur la préparation des potions pour Madame Pomfresh, afin qu'ils puissent m'assister, si tu ne veux vraiment pas qu'ils approchent de ton grand projet. »

« Quel projet ? » questionna Harry.

« Toujours le même : ses recherches sur le Doloris d'une part, et le traitement pour le rhume de Remus. »

« Tenace comme rhume. », commenta Draco, se méritant un coup sur le bras de la part d'Hermione.

« Pauvre Remus. », compatit Neville.

« C'est l'abus de chocolat. Un foie ne peut pas en supporter autant. », rétorqua le professeur avec désinvolture.

« Ne le critique pas. Il n'y est pour rien. », fit sévèrement Lily.

Severus attendit qu'elle ne le regarde plus pour rouler des yeux, faisant rire Harry qui l'observait toujours. Suspicieuse, Lily se retourna vers Severus, qui se contenta de lui sourire avec narquois. Lily souffla.

« Occupe-toi donc des enfants, puisque tu es assez disponible pour penser pouvoir te moquer de moi. » Elle se leva, posa son livre sur la table basse et commença à se diriger vers son propre laboratoire. « Madame Pomfresh m'a demandé de refaire son stock d'urgence pour Quidditch, et ça fait pas mal de travail. Je vais avoir besoin de toute ma concentration. »

Severus ne protesta pas. Il savait l'importance de la tâche de Lily, et n'était pas disposé à laisser quatre adolescents sans surveillance dans son salon. Il avait confiance en chacun d'eux, mais pas forcément quand ils étaient réunis ensemble.

« Harry, prends le deuxième livre sur les potions médicinales. Les autres, suivez-moi. »

Il se dirigea vers le même laboratoire que Lily, bien plus adapté pour ce qu'ils allaient faire. Il n'avait pas beaucoup besoin de surveiller la potion tue-loup pour l'instant.

Harry n'eut aucun mal à trouver sur quelle étagère de quelle bibliothèque se trouvait le livre dont parlait Severus. Il connaissait fort bien le classement bien ordonné des lieux.

Quand ils entrèrent dans le laboratoire, celui-ci était bien plus lumineux que l'autre, et Lily s'affairait déjà sur son plan de travail. D'autres plans de travail remplissaient la salle, et chacun des murs était recouvert d'étagères remplies de bocaux et d'ingrédients de toute sorte. Il y avait juste la porte qu'ils venaient d'emprunter, et une autre dans un coin qui menait à une réserve pour des ingrédients plus fragiles qui nécessitaient des conditions de conservations plus strictes.

« Page 201, Harry. Installez-vous ici. Draco, va chercher tous les ustensiles nécessaires. Neville, vous devriez être capable de récupérer toutes les plantes nécessaires. Miss Granger, occupez-vous des autres ingrédients. Harry, prépare le plan de travail correctement afin de vous permettre de tous travailler dessus. »

« Oui, professeur. », répondirent Neville et Hermione quand ils furent appelés. Draco se dirigea vers les chaudrons sans rien dire, et Harry se contenta de hocher la tête.

Severus observa d'un œil critique les quatre adolescents s'affairer.

« S'ils peuvent être ici, ce serait bien d'être un peu plus… personnel. », déclara soudainement Lily.

Severus haussa un sourcil vers elle. « Que veux-tu dire ? »

« Ce n'est pas donné à chaque élève de pouvoir entrer dans tes quartiers, encore moins jusqu'ici. Ce serait bien que vous soyez tous plus décontractés. Il n'y a vraiment qu'Harry et Draco qui semblent ignorer les barrières formelles qui vous sont imposées lors des cours. Tu devrais arrêter d'appeler Hermione par son nom de famille. Et elle et Neville devraient se sentir suffisamment à l'aise pour ne pas répondre au quart de tour avec des "monsieur" ou "professeur". »

« Que devrions-nous dire, alors ? » demanda timidement Neville alors qu'il surveillait du coin de l'œil le professeur en posant des ingrédients sur la table.

« Eh bien, son nom est Severus, tu sais. », répondit la femme.

Neville et Hermione se figèrent, et observèrent l'homme. Il n'était pas possible qu'il prenne ça bien…

« D'accord. »

Hermione fit tomber deux bocaux.

« Miss Granger ! »

« Désolée, professeur ! »

Lily rit. Harry et Neville observèrent avec appréhension, désireux de ne pas se faire remarquer. Et Draco se moqua. « Tu viens de dire "d'accord". Vous devriez commencer à respecter cet accord. »

Severus se pinça l'arrête du nez. Cela allait devenir une très longue journée. Et peut-être simplement un très long week-end. Ou une très longue année.