(Le maraudeur fugitif) Méfait accompli


Il n'ouvrit pas les yeux quand il entendit ce son qu'il connaissait si bien de balai. Il ne bougea pas au son lourd de deux pieds qui sautaient au sol, puis au son des pas qui s'approchaient.

Une main se posa sur son épaule et le secoua.

« Harry ? » Il reconnut la voix de Draco alors que son ami parlait avec une douceur qu'il employait rarement. Il ouvrit les yeux, et un sourire narquois se dessina sur le visage du Serpentard. « Toujours vivant ? »

Harry sourit, amusé, et repoussa sa main. « Plutôt deux fois qu'une. »

Il se releva et son ami appela son balai dans sa main.

Harry haussa les sourcils alors que le nimbus trouvait sa place dans la paume de Draco. « Pourquoi as-tu un balai ? »

« C'est plus pratique pour voler. »

Draco se remit en vol. « Tu montes ? »

« Quoi, voler avec toi ? Sur le même balai ? »

« Il faut bien rejoindre Nev et Mione. Ils occupent encore Remus pendant que je te récupère. Le principe est simple : voler suffisamment haut pour ne pas se faire attraper. »

Harry haussa les épaules. « Alors va les prévenir que je vais bien, et revenez tous ensemble ici après. »

« Accordé. »

Draco fila avec une rapidité d'attrapeur.

Harry guetta son retour tranquillement. Quand le Serpentard revint, il était accompagné des deux Gryffondors qui chevauchaient un hippogriffe.

Le garçon aux yeux verts ne put cacher sa surprise.

« Neville ? Hermione ? Vous… vous volez ? Sur Buck. »

Neville secoua la tête avec anxiété. Il était presque allongé sur la créature pour s'accrocher autour de son cou, et Hermione le tenait fermement par la taille, serrée contre son dos.

Harry rit. « D'accord, vous permettez que je monte ? Devant vous ? »

« Si Buck l'accepte, je t'en prie, fais comme tu l'entends. »

Pendant que les trois Gryffondors se réinstallaient au mieux, Hermione répétait l'information de Dumbledore.

« Sirius est dans la plus haute cellule de la tour noire. Nous l'atteindrons facilement en volant. »

« Parfais. Draco, tu ne m'as pas dit comment tu t'étais retrouvé avec ton balai. », répondit Harry alors qu'ils commençaient à voler vers l'endroit.

« Sortilège d'Attraction, aussi simple que bonjour. »

« Pourquoi ne pourrais-je pas le faire moi-même ? »

« Parce que tu "conduis" pour nous. », informa Hermione, clairement peu rassurée.

Ils arrivèrent au sommet de la tour où Sirius était enfermé. Ils posèrent tous le pied au sol.

« Peut-être… », commença Draco.

« Bombarda ! » cria Hermione, explosant la porte de prison.

« Autant pour moi. Mais je me dois de dénoter qu'il s'agissait là d'une élégance toute particulière. »

Harry avait déjà couru pour sauter au cou de son parrain. Pendant leurs retrouvailles chaleureuses, Hermione se tourna vers le Serpentard.

« L'approche directe est parfois plus efficace. »

« C'est Hermione Granger qui me dit ça ? » plaisanta Draco.

« Moi aussi je suis content de vous revoir. », appela Sirius, amusé aux côtés de son filleul.

« Ouais, salut Sirius. », répondit le Serpentard. « Vraiment, Mione, c'était juste bruyant. »

« C'était efficace, c'est l'important. Tu ne crois tout de même pas qu'un simple sortilège de déverrouillage aurait fonctionné ? »

« Nous devrions partir. », conseilla Neville. L'explosion était une solution efficace, mais le son produit était surtout parfait pour attirer l'attention.

« Quel est votre plan ? » s'enquit l'évadé.

« Commençons par redescendre dans la cour. », décida Hermione.

« Vous allez tous monter sur Buck, ou quelqu'un vient avec moi ? » demanda le Serpentard.

« Je monte avec toi. », répondit la fille.

Draco hocha la tête et remonta sur son balais, puis invita Hermione à le rejoindre pendant que les trois autres s'arrangeaient pour monter sur le dos de l'hippogriffe.

Pendant le court vol qu'ils effectuèrent vers le bas, Sirius trouva l'occasion de complimenter l'exaltation qu'il ressentait à monter à dos d'hippogriffe. Si Harry partageait son avis, ce n'était certainement pas le cas de Neville.

Une fois dans la cour, ils posèrent tous à nouveau les pieds sur la terre ferme.

« Et maintenant ? » demanda Harry en observant son parrain.

« Maintenant, je vais devoir repartir. Je vais m'éloigner quelque temps de tout ça. Je pourrais même quitter momentanément l'Angleterre. »

« Je ne veux pas que tu t'en ailles ! »

Sirius ébouriffa les cheveux de son filleul.

« Ne t'inquiète pas, Harry. Tout ira bien, et je serais toujours là pour veiller sur toi. S'il arrive quoi que ce soit, demande à Remus ou à Snape de me contacter, ils sauront comment faire… »

« Pourquoi ne puis-je pas moi-même le faire directement ? »

Sirius sourit. « Tu sauras. Un jour. Je reviendrais, Harry. Je te le promets. En attendant, même si je ne l'aime pas, je suis convaincu que Snape veillera bien sur toi. Mais s'il devient mauvais avec Remus, n'hésite pas à lui faire payer, promis ? »

« Sirius… »

« Promis ? »

« Tout ira bien. »

« Harry ne promettra pas. », commenta Draco.

Sirius tourna un œil vers son petit cousin. « Et toi, passe le bonjour à ta mère de ma part. Et tu peux aussi transmettre mes vœux de malheur à ton père si ça t'amuse. Et l'informer que je suis fier de toi aussi. »

Pour conclure, Sirius fit un clin d'œil au Serpentard qui l'observait avec horreur.

L'idée d'annoncer à son père que Sirius Black était fier de lui était excellente pour perdre davantage encore son estime.

« Tu peux prendre Buck avec toi. Je suis sûr qu'Hagrid serait d'accord. Je lui expliquerais. », annonça Neville.

Sirius hocha la tête de reconnaissance. « Prends soin de toi, Neville. Hermione, ce fut un plaisir de te rencontrer, encore. Tu es vraiment une sorcière brillante, ne laisses pas ce Serpentard trop t'embêter. »

Lorsqu'il pointa Draco, celui-ci fit mine de s'offusquer, mais Sirius l'ignora en riant. L'homme remonta sur le dos de Buck et s'envola.

« Et maintenant… ? » demanda Harry.

« Il faut retourner à l'infirmerie ! Vite ! » déclara Hermione.

« Tout doux, nous avons encore le temps d'aller ranger mon balai. Il ne faudrait pas qu'on y retourne avec. »


Le quatuor courut enfin vers l'infirmerie et croisa Severus et Dumbledore.

Harry et Draco se jetèrent dans les bras du maître des potions surpris de les réceptionner ainsi dans un couloir.

« C'est fait ! » s'exclama le garçon aux yeux verts.

Le professeur les regarda avec dureté. « Vous… », commença-t-il seulement pour se faire couper la parole par le directeur.

« Nous ne voyons absolument pas de quoi vous parlez. »

Le vieil homme posa ses yeux pétillants avec insistance sur le jeune professeur qui lui rendit un air sombre et furieux, mais hocha la tête.

« En effet… et aux dernières nouvelles vous étiez tous les quatre à l'infirmerie. Bien entendu nous ne vous avons absolument pas vu passer par ce couloir. »

Harry et Draco se détachèrent à contrecœur du professeur, et les quatre adolescents terminèrent leur chemin vers l'infirmerie.

Ils entrèrent à l'instant où ils disparaissaient.

« Timing parfait. », chuchota Draco.

Ron les observa avec des yeux ronds. « Co-comment… vous étiez là… et maintenant vous êtes là… »

Hermione plissa les yeux avec un sourire amusé. « Comment Ronald, de quoi parles-tu ? »

« Comment pouvons-nous être à deux endroits à la fois ? » questionna Harry.

Draco ricana. « Tu as dû te cogner la tête, ou alors la fatigue te fait halluciner, Ronald. »

Avant qu'ils n'aient pu s'en rendre compte, les quatre adolescents furent pris dans une étreinte par Lily.

« Vous allez bien, c'est merveilleux. Mais plus un mot sur ce qui s'est passé. », chuchota-t-elle.

« Oui, bien sûr. », approuva doucement Neville.

Lily s'écarta. « Harry, Neville, je crois que Sev va vouloir vous punir pour vous être délibérément approché d'un loup-garou transformé. »

« Et pour être allé dans la cabane hurlante ? » demanda Neville.

Lily le regarda avec un sourire maternel. « Comment peut-il vous reprocher les actions de Sirius ? »


Le quatuor ne parla pas de son aventure à Ron, ni n'évoqua le retourneur de temps d'Hermione.

Le ministre avait été furieux de découvrir l'évasion de Sirius Black, mais il ne pouvait rien y faire.

En revanche, dès le lendemain matin, Draco put bien saisir qu'en oubliant de prendre sa potion une fois, Remus avait rompu une sorte de contrat tacite avec Severus, puisque ce dernier laissa glisser, par pure erreur c'était certain, devant tout les élèves de Serpentard dans leur salle commune, que leur professeur de défense contre les forces du mal était un loup-garou, alors qu'il expliquait qu'il allait une fois de plus, comme à chaque pleine-lune, assurer les cours du loup et devrait donc encore une fois modifier le programme des séances de potions et de défense.

L'adolescent ne doutait pas que son parrain allait refaire son glissement devant chaque groupe dont il assurerait un cours durant la journée, aussi bien en potion qu'en défense contre les forces du mal.

Ainsi, à la fin de la journée, au moins la moitié de l'école serait au courant, et plus probablement la totalité.

Cela revenait à annoncer haut et fort dans la grande salle que Remus était un loup-garou.

Draco était certain qu'Harry serait très énervé lorsqu'il découvrirait cela.


Ni Harry ni Neville n'avaient cours le vendredi matin.

Ils profitèrent donc de ce temps pour dormir, un repos bien mérité après leur aventure de la veille.

Leur cours de l'après-midi était botanique, pour le plus grand plaisir de Neville.

Dès que le cours fut terminé, Harry se sépara de ses amis dans l'intention d'aller voir comment se portait Remus. Il devait l'informer de ce qui était arrivé à Sirius, et probablement le rassurer qu'ils allaient tous bien malgré leur petite mésaventure.

Malheureusement, Peter avait fui. Mais Harry était content que ni Sirius ni Remus ne soient devenus de vrais meurtriers.

« Entre Harry », l'invita Remus avant même qu'il n'ait pu frapper à la porte.

Harry trouva Remus en train de faire ses bagages.

« Qu'est-ce que tu fais ?! »

« J'ai démissionné. »

« Mais tu es le meilleur professeur que nous ayons eu ! »

« Je doute que les parents prennent cela en compte lorsqu'ils apprendront que quelqu'un comme moi enseigne à leurs enfants. »

« Quelqu'un comme toi ? Mais tu as été formidable ! »

« J'ai oublié ma potion hier, et je vous ai mis en grave danger. », souligna le professeur.

« Nous allons bien ! Ce n'est rien qui justifie… »

« Ce n'est apparemment pas l'avis de tout le monde, Harry. Quelqu'un a, accidentellement je suis sûr, dévoilé ma condition. Le professeur Dumbledore a pris assez de risque pour moi, et je préfère ne pas être là quand les parents d'élèves viendront réclamer des explications. »

« Ce n'est pas juste ! J'ai déjà perdu Sirius… »

Rems s'approcha du garçon et le prit dans une étreinte. « Harry, je ne quitte que mon poste de Poudlard. Je resterais avec toi, du moins si Severus le permet. Et il a raison, même si ça s'est bien terminé, ça aurait aussi pu être une catastrophe. Si j'oublie ma potion, il vaudrait peut-être mieux que je ne sois pas près des élèves. »

Il s'écarta de l'adolescent. « Cela étant dit, maintenant que je ne suis plus ton professeur, je peux sans scrupule te rendre ceci. »

Il pointa sa baguette vers la carte ouverte sur son bureau. « Méfait accompli. »

La carte se replia d'elle-même, et il l'a remis à son ancien élève.

« N'en veux pas à Severus, il a fait ce qu'il jugeait le mieux pour protéger l'école. »

Harry acquiesça et accompagna Remus jusqu'à la sortie de l'école.

« On se verra pendant les vacances ? »

« Ça dépend de Severus, mais je pense que c'est très probable. Concentre-toi bien sur tes examens d'ici là. »

« Et là, je croyais que tu n'étais plus mon professeur. », s'amusa le garçon.

« Mais je suis toujours ton Oncle Remus. »


La fin de l'année arriva rapidement. Le lendemain du départ du professeur Lupin, Remus observait la finale de Quidditch aux côtés du professeur Snape et de Mademoiselle Evans.

Remus en profita pour saluer Neville, Draco et Hermione, et insista auprès de cette dernière pour qu'elle arrête de l'appeler "Professeur Lupin", mais "Remus" à la place.

Harry fut satisfait d'obtenir la coupe de Quidditch pour la dernière année de son capitaine.

Quand les jumeaux Weasley virent le féliciter, et que personne n'y prêtait attention, il leur chuchota, « Je sais que vous savez. Evans. »

Les jumeaux lui répondirent avec un sourire malicieux.

« Nous savons qu'elle est l'assistante du professeur Snape. »

« Et une belle femme. »

« Nous ne voyons pas de quoi d'autre tu peux vouloir parler. »

Lorsque Severus décida d'enlever 100 points chacun à Neville et Harry pour avoir "poursuivit un loup-garou après le couvre-feu", Dumbledore accorda à chacun de Neville, Harry, Hermione, Draco et Ron 50 points pour avoir "découvert un meurtrier bien caché, même s'il s'est enfui".

Les examens passèrent, et la coupe des quatre maisons fut accordée à Gryffondor.

Ron, lui, n'était pas trop content d'avoir dû manquer la finale de Quidditch parce qu'il était coincé à l'infirmerie, mais qu'il put en revanche se rendre à ses examens.

Enfin, le moment de partir en vacances fut là.

Et tandis que Neville rejoignait Hagrid dans sa cabane, et que le train amenait Hermione, Draco et Ron à leurs parents, Harry se demandait comment serait un été avec Severus et sa mère.


Après avoir laissé les adolescents qu'il avait pu ramener aux soins de Poppy, Severus quitta l'infirmerie avec Lily.

« Sev, nous devons aider Harry ! »

« Pas si fort, Lily. Nous allons commencer par informer le directeur. »

« Chaque instant que nous perdons… »

Il se retourna vers la femme qu'il aimait et la prit dans ses bras pour la rassurer. « Tout ira bien, Lily, nous le retrouverons et il ira bien. Tu me fais confiance ? »

« Te fais-tu confiance à toi-même ? Sev, j'ai peur pour mon fils. Il est seul dans le noir, et je ne peux ni l'atteindre ni le guider. Je… »

Elle éclata en sanglots contre l'épaule de l'homme.

Severus la laissa faire un peu, avant de sortir finalement sa baguette.

« Expecto Patronum. », appela-t-il doucement.

Aussi délicatement qu'il avait prononcé la formule, son patronus sortit de sa baguette et marcha à côté d'eux. Lily regarda l'animal de lumière en séchant ses larmes.

Severus tourna la tête vers le produit du charme.

« Trouve Harry, et assure-toi qu'il va bien et reste en sécurité. »

« Attends. » Et miraculeusement, le patronus de Severus attendit, comme s'il obéissait aussi bien à elle qu'à lui.

Lily sortit sa propre baguette. « Expecto patronum. »

Sa biche bondit de leur autre côté, les baignant dans la lumière alors qu'ils étaient encerclés par leurs deux patronus.

Lily posa ses yeux sur ceux de sa biche. « Trouve Harry et guide-le. Où qu'il soit, protège-le des ténèbres. S'il court le moindre danger, reviens à nous et guide-nous à lui. »

Severus hocha la tête et les deux patronus sautèrent par la fenêtre.

« Leurs lumières devraient écarter Remus, aussi bien que toutes créatures sombres. », informa Severus.

« Merci. Merci pour tout, Sev. »

« Toujours, Lily, toujours. »