(La coupe de feu) Les dragons et la fouine


Depuis la sélection des champions, le quatuor n'appréciait pas beaucoup l'ambiance au château.

La présence de ces badges stupides n'était que peu plaisante. Ils se moquaient tous de Neville. Des badges qui devaient valoriser le vrai champion de Poudlard, Cédric Diggory, et discréditer Longbottom le tricheur.

Harry avait décidé que rien ne le ferait bouger du côté de son meilleur ami. Merlin savait combien Neville avait besoin de soutien.

Neville agissait comme s'il ignorait ce qui se passait. Il restait le plus clair de son temps en extérieur avec Harry.

Hermione et Draco travaillaient davantage à la bibliothèque, mais le Serpentard refusait catégoriquement la compagnie de Ronald tant que ce dernier n'aurait pas admis que Neville et Harry n'avaient rien fait de mal, et tant qu'il ne se serait pas excusé.

Harry ne voulait plus non plus parler au roux. Il était furieux contre lui. Neville était néanmoins prêt à pardonner au garçon dès que celui-ci accepterait de leur parler avec autre chose que des reproches.

Hermione était partagée. Elle mentirait si elle disait qu'elle n'appréciait pas la compagnie de Ron. Mais Draco était intransigeant, et de toute manière Ronald accusait également le Serpentard d'avoir participé à la supercherie des deux autres garçons.

Seule Hermione trouvait grâce aux yeux du garçon Weasley, parce qu'il était vraiment trop évident qu'elle ne ferait ni ne cautionnerait jamais une telle entorse à un règlement.

Ginny était cependant acceptée à la table de travail d'Hermione et Draco. Elle n'avait pas vraiment d'ami de sa propre année, et avait décidé qu'elle ne dépendrait pas des décisions de son frère aîné. Depuis la coupe du monde de Quidditch, elle restait le plus souvent avec leur groupe.

Ron était donc retourné passer son temps avec Seamus et Dean.

Cependant, quand il apprit que son frère Charlie amenait des dragons de Roumanie pour la première tâche… il alla voir Hagrid pour en parler. Il aimait bien Hagrid. Et il savait qu'Hagrid était très proche de Neville. Le garde-chasse était bien sûr au courant pour les dragons, puisqu'ils étaient cachés dans la forêt.

Ron ne regretta pas pour autant son temps passé avec le demi-géant. Il n'avait pas vraiment pu fournir des informations, mais il avait passé un bon moment. D'autant qu'Hagrid avait même accepté de le mener jusqu'à la cache des dragons. Ron put alors discuter avec son frère Charlie qui leur expliqua avec précision et enthousiasme comment ils avaient amené les dragons jusqu'ici.


Harry et Neville passaient le plus clair de leur temps en extérieur, loin de tous, mais n'allaient pas toujours se réfugier dans la cabane d'Hagrid car Neville savait que son tuteur flirtait avec la directrice de Beauxbâtons.

Mais ils y allaient de temps en temps quand même.

C'est ainsi qu'ils eurent cette discussion pendant que Hagrid se peignait les cheveux.

« C'soir, j'vois Olympe. »

Les deux garçons furent surpris qu'il leur dise. Harry recracha même son thé dans sa tasse.

Neville sourit. « C'est merveilleux Hagrid ! »

« J'aimerais qu'Neville m'accompagne. »

Cette fois, les deux garçons s'écrièrent en cœur. « Quoi ?! »

« Discrètement, bien sûr. C't'important qu'tu voix c'qu'on va voir. Pis j'suis sûr qu'ça t'plaira. Sauf qu'c'est un r'dez-vous entre moi et Olympe. J'voudrais pas qu'elle t'vois. C'pour ça qu'j'ai b'soin d'ton aide, Harry. »

« Mon aide ? En quoi… tu veux que je prête ma cape à Neville ?! »

« Pourquoi, Hagrid ? » questionna Neville.

« Tu verras. »

Harry plissa les yeux et croisa les bras. « D'accord, Neville profitera de la discrétion de ma cape. Mais je viens avec lui. »

Hagrid haussa les épaules. « Si tu veux, Harry. Mais souv'nez vous, discrétion. »

« Oui, oui. »

Le soir, après le couvre-feu, Harry et Neville étaient donc en train de se promener dans la forêt avec Hagrid.

Quand ils entendirent Madame Maxime appeler le demi-géant, ils se cachèrent immédiatement sous la cape.

Harry décida qu'il n'avait pas envie d'écouter leur conversation à l'eau de rose. C'était, selon lui, totalement ridicule.

Neville, au contraire, était émerveillé de voir Hagrid si extatique.

Mais son bonheur diminua d'un coup lorsqu'ils virent ce qu'Hagrid voulait lui montrer.

Des dragons.

Pas des dragons en liberté, non. Des dragons dangereux et crachant le feu, dans des caisses, avec des dizaines d'hommes par créature pour les maintenir au calme.

Madame Maxime était émerveillée par cette découverte, et Hagrid très satisfait.

Neville était totalement affolé, et Harry très en colère. Il savait pourquoi il était en colère : c'est parce qu'il était inquiet pour Neville. Il savait ce que cela signifiait, des dragons ici. C'était pour la première tâche.

L'un des dragons en particulier donnait du fil à retordre aux dresseurs. Ce fut le seul dragon dont les garçons purent voir l'apparence. Marron et plein d'épines. Et n'hésitant pas à cracher du feu.

Respectueux de leurs promesses, Harry et Neville restèrent discrets.

Mais dès que le rendez-vous fut terminé, et que les deux garçons trouvèrent une occasion de discuter avec Hagrid, il ne la perdirent pas.

« Des dragons ! » s'écria Harry. « C'est ça la première tâche, des dragons ?! »

« Allons, Harry. Ce sont des créatures méconnues et incomprises. Cela dit, je dois reconnaître que ce Magyar à pointe est une vraie saleté. Pauvre Ron, il a failli tourner de l'œil en le voyant. »

« Ron est venu ici ?! » s'étrangla Harry.

« Bien sûr. Son frère Charlie a aidé à les amener de Roumanie. Ron ne vous l'a pas dit ? »

« Non, Hagrid. Il ne nous a rien dit du tout. », rétorqua froidement le garçon à lunettes.

Neville écoutait en silence. Pour une fois, il n'était que trop heureux de laisser Harry tout gérer. Des dragons. Il ne voyait pas comment il allait pouvoir s'en sortir. Il était bon avec les animaux, mais même Hagrid n'avait jamais pu lui apprendre à se débrouiller avec un tel animal.


Après délibération, Neville et Harry en étaient venus à une conclusion simple, par fair-play : Madame Maxime savait pour les dragons. Donc Fleur Delacour aussi. De plus, Igor Karkaroff semblait fouiner partout, et il était certain que tôt ou tard son champion serait alors averti.

Ils n'allaient pas laisser le vrai champion de Poudlard dans l'ignorance.

Ils cherchèrent Cédric une bonne partie de la journée samedi, pour finalement le trouver dans la cour.

Il était entouré de Poufsouffle très désagréables qui se moquaient de Neville.

« Je peux te parler ? » demanda Neville à l'intention de Cédric alors qu'Harry lançait un regard noir aux amis du garçon.

« Bien sûr. », accepta le champion.

Ils s'éloignèrent tout les trois du groupe de sixième année.

« La première tâche… », commença Neville. Il inspira. Harry le devança.

« Des dragons. »

« Il y en a un pour chacun de nous. », poursuivit Neville.

Cédric perdit tout de suite son sourire. « Vous… vous en êtes sûr ? »

« Oui. »

« Et… Fleur et Krum, ils le savent ? »

« Oui. »

« Très bien. »

Le duo s'apprêtait à se séparer du plus grand garçon quand Cédric prit la décision de retenir Neville. « Écoute, au sujet des badges… Je leur ai dit de pas les porter. »

« Ils s'amusent comme ils peuvent. Ça ne me fait rien. »

« Rejoins tes amis, Cédric. », fit Harry avant de s'éloigner avec son meilleur ami.

Il était convaincu que les remords ne venaient que maintenant pour le champion de Poudlard. Le garçon riait avec ses amis, même s'il ne portait pas le badge et ne disait rien de méchant. Il avait dû se sentir désolé parce qu'ils lui apportaient une information.

Neville n'était pas de cet avis. Il était convaincu que Cédric était sincèrement gêné par cela.

Le sixième année était toujours aimable, et il était évident qu'il était perturbé par les rires et les moqueries que leurs camarades continuaient de faire pendant qu'ils discutaient tout les trois.

Cédric était particulièrement connu et apprécié pour son fair-play. Et il ne supportait pas les tricheurs. Il ne ferait pas de faux sourire à quelqu'un qu'il considérerait comme contrevenant, surtout pas face à une situation aussi grave.

Alors que Neville et Harry s'éloignaient du Pousouffle, le second repéra Ron, Seamus et Dean marchant dans l'allée. Le trio de Gryffondor discutait tranquillement.

Harry accéléra le pas pour les intercepter à l'entrée de la cour la plus proche avant qu'ils ne la dépassent, ne sachant pas s'ils comptaient sortir ou non.

Il était de plus en plus en colère contre le roux, et la discussion avec Hagrid ne l'avait pas calmé.

Ils avaient été amis, et maintenant le garçon cachait des informations qui pourraient sauver la vie de Neville. Le timide garçon-qui-avait-survécu aurait bien plus de chance de continuer à survivre s'il était informé de ce qu'il affronterait et pouvait se préparer.

En gardant l'information pour lui-même, Ron aurait tout aussi bien pu condamner Neville. Harry ne pouvait pas l'accepter ni le tolérer.

Il se planta devant le roux. Il savait pertinemment que Neville l'avait suivi et ne cautionnerait pas la dispute, mais il s'en fichait.

« Tu es vraiment con, tu le sais, ça ? » demanda-t-il agressivement au roux.

« Harry, non… », tenta de contredire Neville, mais les deux autres garçons l'ignoraient.

« C'est ce que tu penses ? » rétorqua Ron en fixant Harry dans les yeux.

« Parfaitement. »

« Autre chose à dire ? »

Neville tenta une fois de plus de les stopper. « Rien du tout… »

Harry ne se préoccupa pas de l'avis de son meilleur ami. « Oui. Reste loin de nous. Si tu insultes Neville une fois, ne serait-ce qu'une seule fois, avec la plus infime des remarques, je te le ferais regretter de sorte que tu aurais préféré être surpris par le professeur Snape en train de frapper Draco. »

« Parfais. », déclara Ron, avant de leur passer à côté en les bousculant tous les deux, suivis par ses amis du moment.

Harry se retourna avec la ferme intention de les poursuivre et d'exiger des excuses de Ron, mais Neville le retint par le bras.

« Laisse, Harry. Ça n'en vaut certainement pas la peine. »

« Il nous a bousculés ! »

« Et tu l'as insulté en premier. Ne… »

« Hey ! » appela une voix reconnaissable entre toute.

Neville et Harry levèrent la tête. Draco semblait ne rien avoir trouvé de plus intéressant que de se percher en haut d'un arbre, comme s'il s'agissait d'un trône.

Ron s'était également retourné, ne sachant pas si le blond s'adressait à lui ou aux deux autres. Il n'allait certainement pas ignorer le Serpentard si celui-ci cherchait la bagarre. Il ne fuyait jamais devant lui.

Draco sourit avec narquois, très satisfait d'avoir l'attention de tous les garçons de Gryffondor de leur année. Il laissa tomber le trognon de ce qui avait dû être une pomme verte.

« Je te sens un peu à cran, Longbottom. »

« Ça te surprend ? » demanda Harry plus agressivement qu'il ne l'aurait voulu. Il était stressé, et même si sa colère était principalement dirigée vers Ron et qu'il était plus que lassé par la stupidité de l'ensemble de leurs camarades, Draco était parfois une véritable épine des plus irritantes.

Et Harry n'avait aucun problème à identifier qu'à l'heure actuelle, Draco avait décidé de les titiller sur les points sensibles. Honnêtement, il savait rarement lorsque le blond viendrait prendre leur défense ou les insulter.

Le Serpentard avait trop souvent l'habitude de faire des entrées en scènes remarquables, et ses véritables intentions étaient en générale indiscernables jusqu'à la chute de sa manœuvre préparée.

Harry n'était pas d'humeur à le supporter aujourd'hui. Mais il avait quand même l'impression d'être plus "à cran" que Neville.

« Qu'est-ce que tu veux, Draco ? » demanda Neville bien plus calmement. Il laissait entendre toute sa fatigue dans sa voix. Ça ne servait à rien de cacher à ses amis qu'il n'en pouvait plus de tous ces regards et de toute cette discorde.

« Nous avons parié, mon père et moi. »

« Tu as parié avec ton père ? » Harry cracha le dernier mot avec colère. Il n'aimait vraiment pas l'homme.

Draco se laissa tomber de l'arbre, et atterrit de manière pleinement contrôlée au sol.

« Il pense que Neville ne tiendra pas cinq minutes dans le tournoi. »

Harry vit rouge. Il ne repéra pas le sourire presque amusé de Ron et Seamus, ni le coup d'œil attentif que le blond jeta pendant un instant au roux.

« Nous nous fichons éperdument de ce que pense ton père, Draco ! Il est vil, et cruel. Et toi tu es… »

« Moi, je pense qu'il gagnera la coupe. »

Cela eut le mérite de faire taire Harry.

Ron écarquilla les yeux.

Neville répondit doucement. « Draco, je ne pense pas que… »

Mais le Serpentard fixait son regard haineux sur le Weasley. « Alors que Weasley ne tiendrait pas dix secondes. »

« Connard. », lâcha le roux entre ses dents.

« À quel point faut-il être pathétique pour penser avoir la moindre chance de survie dans un tournoi opposant le meilleur élève de chaque école, majeur, quand on est un Gryffondor ridicule qui sait à peine tenir sa baguette ? Neville est une graine de héros, et il est humble. Il ne risquera aucune action imprudente. Mais toi, Weasley, si tu avais été sélectionné, ton arrogance te ferait tuer en quelques instants. Mione pense qu'il te faudrait dix minutes avant de t'effondrer en pleurant qu'on te sorte de là et en criant forfait. »

C'était trop pour Ron. La mention d'Hermione pariant contre lui à ce point, probablement fausse, le fit totalement craquer. Il se jeta sur le blond avec la ferme intention de lui casser le nez, mais le Serpentard esquiva et sortit sa baguette.

« Arrêtez ! » cria Neville.

Ron s'était retrouvé étalé au sol, face contre terre, mordant la poussière, et cela ne sembla pas perturber Draco. Le Serpentard pointa sa baguette vers son camarade, un sort sur le bout des lèvres, lorsque le monde tourna soudainement pour lui.

Le professeur Maugrey était sorti subitement de sa cachette, métamorphosant l'adolescent en fouine d'un blanc impeccable, tout en criant. « Oh, sûrement pas mon vieux ! »

Seamus aida Ron à se relever, riant à perdre haleine du retournement de situation. Le roux ne parvint pas à retenir également son amusement et sourit à pleine dent.

Neville et Harry étaient horrifiés.

Le professeur faisait s'élever et redescendre la fouine dans les airs, encore et encore, tout en proférant son sermon, qui aurait pu se résumer à un débit d'insulte.

« Je vais t'apprendre à jeter un sort à quelqu'un qui est désarmé et déjà à terre. Espèce de lâche. Petite vermine, sournoise, répugnante… »

Neville s'était enfui chercher le professeur McGonagall qu'il avait vu plus loin dans la cour.

Toute la colère d'Harry semblait avoir disparu alors qu'il voyait son ami se faire ballotter de la sorte par un professeur. Il avait envie de vomir à la place de Draco, non pas de mal de mer, mais de dégoût.

Le professeur McGonagall arriva en courant avec Neville et le reste des élèves de la cour qui étaient également attirés par l'agitation.

Neville n'avait pas pris le temps d'expliquer exactement ce qui se passait à sa cheffe de maison. Il lui avait simplement demandé précipitamment de venir, paniqué, et elle n'avait pas posé de question, tant il était évident que la situation devait nécessiter son intervention immédiate.

« Professeur Maugrey, qu'est-ce que… qu'est-ce que vous faites ?! » questionna la vieille femme.

« J'enseigne ! »

« Est.. est-ce que c'est… est-ce que c'est un élève ?! » Elle n'en revenait pas.

« En principe, c'est une fouine. »

Harry ne put se retenir, qu'importe s'il parlait à un professeur, et en présence d'une autre. « Arrêtez ça, professeur Maugrey ! »

Maugrey tourna la tête vers le garçon, et vit Neville qui rejoignait Harry et approuvait à son tour. « C'est immoral ! »

L'homme fit se poser la fouine au sol, et McGonagall redonna sa forme humaine à l'élève.

La directrice adjointe ne semblait pas dérangée par le manque de respect flagrant que ses deux Gryffondor avaient montré. Elle connaissait assez bien ses priorités, et l'attitude de Maugrey était intolérable.

Déboussolé un instant, Draco se releva, chancela, et tourna un peu sur lui-même pour s'y retrouver. Quand il fit face à la foule, il vit les rires de tous ces étudiants tournés vers lui.

« Mon père en entendra parler ! » cria-t-il avant de s'enfuir, momentanément poursuivi par un Maugrey courroucé.

« C'est une menace ? Est-ce que c'est une menace ?! Je pourrais te raconter des histoires sur ton père qui ferait boucler tes cheveux gominés ! »

McGonagall arrêta Maugrey en pointant sa baguette vers son nez. Draco courait se réfugier à l'intérieur du bâtiment, suivit par Harry, puis Neville.

« Reste-là, Longbottom ! » appela Maugrey. Neville s'arrêta.

« Alastor ! » réprimanda McGonagall pour enfin obtenir l'attention de l'ancien auror. « Nous n'utilisons jamais la métamorphose comme punition. Dumbledore vous l'a certainement dit. »

« C'est possible, oui. », avoua Maugrey, les yeux fixés sur la baguette, comme un enfant fautif.

« Vous feriez bien de vous en souvenir. »

McGonagall se détourna et appela les étudiants à quitter la zone de spectacle. Neville vit l'homme tirer la langue au dos de la sorcière respectable.

Maugrey récupéra son bâton qu'il avait précédemment planté dans le sol et passa à côté du garçon-qui-avait-survécu.

« Toi, viens avec moi. », ordonna-t-il.

Neville sentait qu'aucun refus ne serait le bienvenu.