(La coupe de feu) L'invitation de cavalière


Ils avaient une vingtaine de jours pour se trouver des cavalières.

Hermione n'était pas très à l'aise avec les pas de danse, mais comme à chaque obstacle qu'elle trouvait, elle désirait à présent réussir à la perfection.

Draco n'avait pas hésité un instant à enseigner à ceux qui le voulaient, et leur faisait travailler tous les types de danse qu'un Sang-Pur devait connaître dans la société sorcière.

Il n'omettait certainement pas de raconter l'histoire et l'origine de chaque danse, son importance dans la société et à quelles occasions l'une ou l'autre était utilisée.

Neville se trouvait une passion pour la danse, et le Serpentard était impressionné par les talents du garçon-qui-avait-survécu. Les deux garçons, Hermione et Ginny passaient beaucoup de temps dans ce tutorat particulier dans une salle de classe déserte comme le château en regorgeait.

Ron n'était pas du tout intéressé par cela, et Harry n'était pas assez motivé pour supporter autant d'heures de pratique et encore moins d'histoire. Les deux jeunes adolescents étaient bien plus préoccupés à l'idée de devoir inviter une cavalière. Où donc pourraient-ils en trouver ?

Depuis la première tâche, il n'y avait plus de moqueries ni de regards haineux, mais depuis l'annonce du bal, les groupes de filles lançaient des regards méprisants aux pauvres garçons qui tentaient de les approcher. Elles ne faisaient certainement pas cela avec tout le monde, mais tout du moins vis-à-vis de Harry et Ron quand ils étaient à la recherche de cavalières.

Les deux amis ne comprenaient pas comment ils étaient censés en inviter une. Ron avait tenté de faire valoir le point que ce devrait être une tâche facile pour Harry puisque celui-ci était capable de battre un basilic, mais le garçon à lunettes avait rétorqué qu'il préférerait encore affronter un Magyar à pointe que les filles, qu'elles soient de Poudlard ou de Beauxbâtons.

Les jours filaient, et aucun des garçons du groupe n'avait encore trouvé de cavalière.

Krum était sans conteste l'homme convoité par une grande partie des adolescentes de Poudlard.

Quand le groupe était, par exemple, aux alentours du lac, Krum passait devant eux, s'entraînant comme le sportif qu'il était, et suivi par un groupe de groupies dont il ne semblait pas vouloir l'attention.

Il souriait toujours à Hermione, à qui il arrivait de rougir sous le sourire léger qu'elle lui renvoyait. Elle était toujours déconcentrée quand il passait, et avait du mal à détacher son regard.

Cela ne passait jamais inaperçu aux yeux de Draco qui surveillait d'un œil très mécontent toute la démonstration du jeune homme, même si Hermione faisait mine d'être agacée et de trouver le champion ridicule.


Draco laissa intentionnellement passer quelques jours après l'annonce du bal prochain. Il avait hésité à laisser deux semaines entières, mais il ne voulait pas trop attendre. À la fin de la deuxième semaine de décembre, il se décida.

Il était relativement aisé pour lui de parler à Hermione en privé. Il se contenta de la coincer dans un coin de bibliothèque alors qu'ils étaient tous deux allés chercher des livres. Enfin, elle plutôt que lui, étant donné qu'il s'était levé avec une autre idée en tête.

« Nous devrons nous rendre à ce bal ridicule, et il vaudrait mieux être accompagné. », engagea-t-il la conversation sur un ton désinvolte alors qu'il passait son doigt sur les reliures de quelques livres du rayon où Hermione s'attardait.

« Alors dépêchez-vous de vous trouver quelqu'un, chacun d'entre vous. », répondit-elle avec agacement. Elle s'accroupissait pour regarder le rayon du bas.

« Tu devrais aussi avoir quelqu'un, Mione. », rétorqua-t-il sans intérêt apparent.

Il était dans son dos, et ne pouvait pas dire qu'il gardait pleinement ses yeux sur les livres. Son œil dérivait bien trop vers la chevelure de sa camarade, et sur ses mains qui parcouraient les titres.

« N'est-ce pas toi qui nous expliquerais que c'est à l'homme d'inviter sa cavalière ? »

« Ce n'est pas vraiment sérieux, Mione. Je veux dire, ce bal n'est pas sérieux, ce n'est qu'une… parodie pour adolescents immatures. Dans la haute société, ce serait toujours à l'homme de demander à sa dame, mais ici, comment voudrais-tu que cela soit fait ? »

« Comment ça ? » Hermione devenait vraiment irritée par l'attitude de Draco.

« Eh bien, nous pourrions simplement faire un arrangement entre amis. Cela suffira amplement. Tu ne vas quand même pas attendre qu'un "prince charmant" vienne te demander, n'est-ce pas ? C'est au-dessus de tes capacités intellectuelles tout de même. »

Elle se redressa et le regarda. « Pardon, tu me demandes ? »

Il ne parvenait pas à comprendre l'expression qu'elle avait, mais il pouvait dire qu'elle n'était pas calmée et exigeait vraiment une réponse claire. Il parvint de justesse à se retenir de grimacer.

« Inutile de chercher quelqu'un qu'on aime avec de l'amour… romantique. Un ami suffirait amplement pour cette farce, n'es-tu pas d'accord ? Viens avec moi, tu n'auras pas besoin d'attendre qu'un garçon s'intéresse à toi. Ce n'est pas comme si cela arriverait vraiment. »

« Je te demande pardon ? »

Plus il parlait, et plus Hermione était blessée. Mais il ne semblait pas s'en rendre compte. Il restait totalement désinvolte, comme totalement désintéressé par le sujet. Comme si rien ne l'affectait. Comme si leur relation n'avait rien de sérieux.

Oh, Hermione savait qu'ils n'avaient certainement pas de relation de ce type, mais elle aurait espéré un peu plus de considération et de respect de la part de Draco que ce qu'il affichait actuellement.

« Même si quelqu'un t'invitait, il serait vite déçu. Moi, je sais à quoi m'attendre. Après tout, c'est moi qui t'ai appris à danser, et je connais chacun de tes mouvements disons souvent maladroits. Je sais comment tu vas me marcher sur les pieds. Krum serait juste surpris comme un idiot. Vous auriez l'air parfaitement ridicule ensemble. »

Hermione devait lutter pour ne pas montrer la faiblesse de ses sentiments, ne pas laisser les larmes visibles dans ses yeux. Sa voix était brisée derrière sa fureur, alors qu'elle pointait un doigt pour le frapper au torse afin d'appuyer ses propos suivants.

« Je te signalerais, Draco Malfoy, que je n'aurais aucun mal à me trouver quelqu'un. Quelqu'un qui sera plus que ravi d'y aller avec moi. Quelqu'un qui m'invitera parce qu'il m'apprécie vraiment et non pas juste pour boucher un trou ! Et si tu continues à te comporter comme ça, Draco Lucius Malfoy, tu seras seul à ce bal ! Comme l'idiot prétentieux odieux que tu es ! »

Sans chercher plus de livres, elle s'enfuit de la bibliothèque.

Draco retourna à la table de travail. Les trois garçons et Ginny lui lançaient des regards curieux. Il ne se rendait pas compte qu'il affichait un air très contrarié.

« Où est passée Hermione ? » questionna Harry.

« Elle est partie. », déclara Draco.

Ils le regardaient dans l'attente de plus de détail. Il s'agaça et agita la main pour le leur signifier avec humeur. « Elle est juste partie parce qu'elle avait mieux à faire ! Ça ne vous concerne pas, alors retournons simplement travailler, d'accord ? »

Il était évident que les deux s'étaient disputés. Et il était évident qu'ils ne pourraient rien obtenir du blond dans cet état.


Hermione fit de son mieux pour ne pas courir dans les couloirs, mais elle marchait assurément très vite.

Comment Draco pouvait-il être un imbécile aussi complet ! Lui demander comme ça d'être sa cavalière !

Non, pardon, pas sa cavalière. Juste de l'accompagner parce qu'ils ne pourraient pas se permettre d'aller seuls au bal de Noël.

Et il disait qu'elle marcherait sur leurs pieds ! Eh bien, peut-être que ç'aurait été le cas il y a quelque temps, mais il savait très bien maintenant qu'elle dansait à la perfection, merci bien.

Elle n'en revenait pas. Il était juste jaloux de Krum, n'est-ce pas ? Parce que Krum était un célèbre et talentueux attrapeur, de renommée internationale, alors que lui n'arrivait même pas à gagner un match face à Harry ?

Et puis, Krum était bien plus mature que Draco. Et il avait été sélectionné pour le tournoi, lui. Bien qu'à y réfléchir, Draco n'aurait sans doute pas apprécié participer aux épreuves, même s'il devait être attiré par la gloire éternelle.

Hermione devait admettre que son regard était parfois attiré par le corps bien bâti du bulgare. Il était musclé, grand, et ressemblait bien plus à un homme que Draco à l'heure actuelle.

D'un autre côté, il était effectivement adulte, en tout cas dans la loi, avec 17 ans, alors que Draco n'en avait que 14.

Mais même si Krum n'était pas très intelligent, il n'était pas un crétin comme Draco actuellement. Et il était aimable ! Merlin pardonne à Draco de ne l'être qu'occasionnellement.

Sortie du château, elle aperçut Krum en train de s'entraîner au bord du lac, toujours entouré par un large groupe de filles stupides et ridicules. Mais comment pouvaient-elles avoir si peu de dignités pour se comporter de la sorte, même s'il était vraiment attirant ?

Prenant une résolution, elle s'avança avec détermination à grands pas vers le groupe. Elle se fraya un chemin jusqu'au jeune homme.

Draco pensait que Krum serait surpris si elle lui marchait sur les pieds ? Comme s'il pensait qu'il l'aurait invité ! Eh bien, son hypothèse allait être vérifiée assez rapidement.

« Viktor Krum, je peux te parler un moment. Seul. »

Il sourit. « Bien sûr. », accepta-t-il facilement avec son accent exotique. Elle aimait bien comment il roulait les « r ».

Il lança un regard dur aux autres filles, et entraîna Hermione sous un arbre plus loin. Les groupies semblaient avoir compris qu'elles n'étaient pas les bienvenues et ne les suivirent pas.

« Qu'est-ce que tu veux, Hermione ? »

La manière dont il prononçait son nom avait vraiment quelque chose de charmant. Elle ne devait pas se laisser attendrir de trop.

« J'ai comme l'impression que tu passes très souvent là où je suis. Je me trouve à beaucoup d'endroits différents selon le moment, mais d'une manière ou d'une autre, tu y passes toujours, et tu me souris, alors que je n'ai pas pu m'empêcher de remarquer que ce n'est pas ce que tu adresses à celles-là. »

Elle désignait les filles plus loin.

« Je n'aime pas trop toute cette attention. », expliqua-t-il. « Mais toi, tu es différente, Hermione. »

« Est-ce que tout ce cirque, où tu cherches clairement mon attention, signifie que tu vas m'inviter ? Ou vais-je devoir accepter la demande d'un idiot ? »

Elle était désolée pour Krum qu'il subisse son énervement, mais elle ne pouvait pas chasser de son esprit l'air arrogant de Draco qui l'irritait tellement aujourd'hui.

Merlin, elle n'obtiendrait jamais l'invitation de Krum si elle continuait comme ça.

Il fronçait légèrement les sourcils, mais pas comme quand il était énervé par Skeeter. Il semblait soucieux. Avait-il compris qu'un idiot l'avait justement blessée avec une demande ?

« Tu me crois stupide, Hermione ? C'est pour ça que tu ne fais pas comme les autres ? »

Elle se força à se détendre et parvint même à sourire. « Oh non, pas du tout. Je ne suis pas dans les clichés des filles intellectuelles qui pensent qu'être sportif veut dire crétin. Tu sais, deux de mes meilleurs amis sont des attrapeurs. Je dois… être attirée par ça. »

Elle voulait lui faire un numéro de charme, mais c'est elle qui se retrouva à rougir. Et le regard doux et perçant que le jeune homme posait sur elle ne l'aidait pas à contrôler la couleur de ses joues.

« Tu es attirée par moi ? » demanda l'attrapeur avec sa belle voix calme.

« Euh… eh bien… oui ? » fit-elle d'une toute petite voix.

Il lui prit la main avec douceur. « Alors, veux-tu être ma cavalière pour le bal de Noël ? »

« Est-ce une vraie demande, ou juste une question ? »

« C'est une proposition. Une invitation. Acceptes-tu ? »

« Oui. », murmura-t-elle, gênée.

Il lui baisa la main. « Alors c'est décidé, Hermione. Nous irons ensemble. Et appelle-moi Viktor. »

Alors que Krum repartait, Hermione sentait ses jambes trembler. Eh bien, c'était fait. Draco allait voir ce qu'il allait voir. Et elle comptait bien qu'il reste sans voix.


Hermione ne parla à personne de ce qu'elle avait fait, et encore moins que Viktor l'avait réellement invitée.

Deux jours plus tard, au soir, Ginny entrait dans son dortoir, toute rouge, et la tirait hors de son lit où elle lisait pour l'emmener dans un coin isolé. Une fois qu'elles furent face à face dans ce qui ressemblait à un placard à balais, Ginny annonça de but en blanc sa nouvelle.

« Neville m'a invité. », lâcha-t-elle. Elle ne semblait pas énervée, bien au contraire. Horriblement gênée, peut-être. Mais elle semblait plus… impatiente que mécontente.

Seuls les quatrièmes années et plus devaient se rendre au bal de Noël. Les autres ne pouvaient que s'ils étaient invités. Et Hermione savait que Ginny avait très envie de participer à ce bal.

L'invitation de Neville semblait être une occasion parfaite. Probablement l'avait-il d'ailleurs fait dans ce but précis. Ce n'était pas un secret que la troisième année voulait y danser.

« Et ? Tu lui as répondu ? »

« Bien sûr ! C'était oui ! Tu aurais dû le voir. Il y a mis les formes. Il m'a emmené dans un endroit magique de la forêt interdite, vraiment. C'était magnifique. Nous avons même vu une licorne. Et là, il m'a sorti un bouquet de fleurs, a demandé si c'était bien comme ça qu'on faisait, tu sais comment il est, un peu timide en général. Et sans même attendre ma réponse, il a gagné une assurance magistrale et m'a demandé de but en blanc si je voulais être sa cavalière ! »

« Wouah. C'est… wouah. »

Hermione était sans voix. Elle imaginait Neville tiré sur son trente et un, demander romantiquement à Ginny dans une clairière herbeuse, comme un véritable prince charmant.

Ce n'était probablement pas ce qui s'était passé, mais la perspective restait bien meilleure que sa propre expérience avec Draco. Draco ne comptait pas. Mais c'était mieux que son entretien avec Viktor.

Ginny semblait euphorique à l'idée d'y aller avec Neville. Il semblait que le garçon avait vraiment réussi à la marquer.

« N'est-ce pas ! Il faut vraiment que la robe que je mettrais soit parfaite. Je dois être géniale. C'est le meilleur danseur de Gryffondor, tu imagines ! Avec lui, je suis certaine de ne pas être mise de côté. Sans oublié que c'est un formidable ami, et un champion du tournoi, et le garçon-qui-a-survécu, et il m'a sauvé de la chambre des secrets et de Tom, il a battu un basilic pour moi, enfin pour l'école, et… »

« Ginny, je pense que j'ai compris l'idée… mais Ron ne va pas être content. »

« On s'en fiche de Ron ! Il le découvrira à ce moment-là et c'est tout. Je n'ai pas besoin de son avis pour savoir avec qui je sors. Je ne sors même pas, je vais juste au bal avec Neville. Tout le monde doit y aller avec quelqu'un. Et ce n'est certainement pas à Ron de donner son opinion sur mon entourage. Ce n'est à aucun de mes frères de décider, et même si c'était le cas, Ron est le moins bien placé de tous. »

« Tu me le dis juste à moi alors ? »

« Oui. Je devais le dire à quelqu'un ! Mais garde ça secret, s'il te plaît. Je veux faire la surprise. Neville est d'accord. Il ne voit pas l'intérêt d'informer tout le monde, et c'est mon choix de décider qui prévenir. »

« Eh bien, il semblerait que Neville sache comment faire. Il doit être le seul garçon de notre âge capable de ça. »

Ginny sembla se calmer, et parla avec plus d'incertitude et moins d'excitation.

« En fait… je voulais te demander… mais il s'est passé quelque chose avec Draco, n'est-ce pas ? Depuis l'autre jour à la bibliothèque, tu ne lui parles presque plus. Tu fais tout pour l'ignorer… Est-ce que… est-ce qu'il a fait quelque chose ? J'imagine mal que ce serait une invitation de sa part qui te mettrait dans cet état. »

Hermione sentait venir l'irritation, mais entièrement dirigée contre Draco.

« Si tu veux tout savoir, si, il m'a proposé. Je n'aurais jamais pensé qu'il puisse être aussi maladroit. À croire qu'il essayait de m'insulter. De toute manière, maintenant, j'ai aussi un cavalier. Et puis, je n'aurais jamais voulu y aller avec un tel imbécile. »

Ginny était sceptique. Elle avait plus l'impression que le refus d'Hermione était dû à des mots malencontreux qu'à une véritable aversion pour l'idée d'y aller avec le Serpentard. Mais elle choisit sagement de ne pas commenter.

« Espérons qu'il saura se montrer plus doué pour demander à quelqu'un d'autre… »

« Oui, à Parkinson par exemple. Elle se ferait un plaisir d'escorter Drakie. », coupa Hermione.

Ginny grimaça. « Ouais… il faudrait surtout que mon frère et Harry se dépêchent de trouver quelqu'un. »

Hermione soupira. « Merlin, ces deux-là sont des cas désespérés. »

« Pire que Draco ? »

« Pire. »