(La coupe de feu) L'enchantement brisé


La soirée était bien plus calme la prochaine fois que Ron et Hermione discutèrent. Discuter était un bien petit mot, étant donné qu'ils se criaient surtout l'un sur l'autre en sortant de la salle où peu dansaient encore.

Draco, Pansy, Théodore, et les deux sœurs Greengrass discutaient dans un coin de rafraîchissement, proche de l'entrée de la Grande Salle, et étonnamment Harry les avait rejoints.

Ils entendirent les cris d'Hermione qui venaient de l'escalier à l'extérieur de la salle.

« Dans ce cas-là, tu sais ce que tu auras à faire la prochaine fois ! »

« Ah oui, et qu'est-ce que j'aurais à faire ? » rétorquait le roux.

« La prochaine fois, invite-moi avant que quelqu'un d'autre ne le fasse, et pas parce que tu n'auras personne d'autre ! »

Draco et Harry se dépêchèrent d'aller voir ce qui se passait tandis que Théodore retenait les filles : ce n'était pas les affaires de Serpentard.

« Harry ? » appela Ron en les voyant. Il était au milieu de l'escalier. Hermione, plus bas, se retourna vers les deux nouveaux venus.

« Où étiez-vous tous les deux ? » Elle ne leur laissa pas le temps de parler. « Peut importe, je m'en fiche ! Allez vous coucher tous les trois ! »

Harry s'avança vers Ron pour lui demander ce qui s'était passé. Après qu'il ait contourné la fille, elle se retourna vers eux et cria. « Ron, tu as tout gâché ! »

Le roux ne se fit pas prier pour partir précipitamment, lui-même fort contrarié. Hermione se laissait tomber au milieu des marches pendant qu'Harry tentait de rejoindre Ron.

« Laisse-le tomber, Harry ! » rappela Draco alors qu'il s'approchait de la fille.

Harry se stoppa et se retourna. Hermione semblait avoir bien plus besoin de son soutien que Ron, mais il n'arrivait pas à imaginer ce qu'il pourrait faire.

Draco s'agenouilla à côté d'elle, et posa doucement une main sur l'épaule de la fille qui tenait son visage dans ses mains en pleurant.

« Hey, Mione… »

« C'est ta faute aussi, Draco ! »

« Mione, tu peux être en colère contre moi pour ma maladresse de l'autre jour, mais c'est toi qui m'as provoqué toute la soirée, en me passant à côté, en nous frôlant Pansy et moi avec Krum, en lançant des remarques en l'air à mon intention chaque fois qu'on s'éloignait pour se rafraîchir. Tu as gâché cette partie toute seule. J'ai essayé de t'inviter ! »

« Tu ne l'as pas fait ! » cria-t-elle en relevant un visage couvert de larmes vers lui. Il faillit reculer un instant, mais se contenta d'enlever sa main. Il resta à genoux face à elle.

« J'ai fait. Dans la bibliothèque, c'est ce que j'ai fait. », déclara-t-il froidement.

Quand il vit la douleur sur le visage d'Hermione, il se rattrapa plus doucement. « Je suis désolé, Mione. Je ne voulais pas t'offenser avec ma demande. »

« Tu ne prends jamais rien au sérieux, Draco ! Les relations ne sont rien pour toi ! Viktor m'apprécie vraiment ! C'était une bonne soirée avant que toi et… avant que Ron ne veniez tout gâcher. »

Harry s'assit sur les marches de l'autre côté d'Hermione. « Hermione, ils sont tous les deux stupides, ne les laisse pas t'atteindre. Si tu veux retourner danser, je suis prêt à t'accompagner. Je pense que ça te ferait du bien. Une petite danse entre amis, avec la musique calme. Je sais que je n'en ai pas l'air, mais je sais danser, je t'assure. »

Hermione lui sourit timidement. Elle savait qu'elle s'était énervée contre lui inutilement. Il n'y était pour rien. Elle hocha la tête en silence. Il se releva et tendit les mains pour l'aider à se mettre debout à son tour. Elle se mordit la lèvre et baissa le regard vers ses pieds.

« J'ai… j'ai lancé ma chaussure. »

Harry ne put se retenir, il laissa un échapper un petit rire. Et il eut l'impression que l'atmosphère se détendait. Il se tourna vers le Serpentard. « Draco ? »

Il hocha la tête et alla ramasser le soulier. Il l'enfila au pied d'Hermione qui le laissa docilement faire.

Harry et Hermione retournèrent dans la salle de bal, Draco à leur côté. Mais le Serpentard savait qu'il n'était pas le bienvenu.

Il alla s'asseoir à une place isolée. Il ne comptait pas revenir auprès de ses camarades de maison. Il savait quel regard il trouverait sur le visage de Pansy, et il préférait franchement s'en passer ce soir.

Sur la piste de danse, seuls restaient Ginny et Neville, Fred et Angelina, et Hagrid avec Olympe.

La musique était douce, et le calme de la salle aidait à calmer doucement Hermione. Le toucher d'Harry était doux et calme. Amicalement, il la conduisit sur la piste, et se positionna. Il lui sourit, et elle sourit en retour. Elle hocha la tête pour annoncer qu'elle était prête. Ils se mirent à danser.

Draco les observait. Ils allaient bien. Aurait-il dû être contrarié que seul Harry donne ce réconfort à Hermione ? Il ne saurait dire, il ne l'était pas. Il était mélancolique, tristement heureux. Hermione souriait sous un visage baigné de larmes. Harry arrivait à la transporter, à lui faire oublier le mauvais comportement de Ron, et Draco devait l'avouer, de lui-même également.

Harry chuchota. « Tu es très belle, ce soir. Est-ce que quelqu'un te l'a déjà dit ? »

Elle sourit davantage. « Non. »

« Maintenant c'est fait. Même les évidences et les plus petites choses ont parfois besoin d'être dites pour soulager les cœurs, non ? »

« Harry Potter, quand êtes-vous devenu si sage ? »

« Quand mes amis en ont eu besoin. Je ne peux pas toujours laisser ce rôle à Neville. »

Ils firent une danse complète. Après quoi, Harry salua respectueusement sa cavalière. « Ça va mieux ? » demanda-t-il toujours doucement.

« Oui, merci Harry. »

« Tant mieux alors. »

Ils s'éloignèrent un peu de la piste, incertains de s'ils devaient s'arrêter ou reprendre.

La musique continuait.

Draco fut le premier à le voir, puisqu'il n'était pas absorbé dans une discussion ou par la contemplation d'un partenaire. Il ne retint pas son visage de choc.

Il fut le premier, mais pas le seul. Petit à petit, rapidement, le peu de personnes resté dans la salle vit le mouvement.

Severus entraîna Lily au centre de la piste de danse.

Quand ils commencèrent à danser, tous les regards, à l'exception du couple Hagrid et Olympe, étaient fixés sur eux.

La jupe de Lily tournaillait comme une fleur épanouie. Son visage rayonnait comme un astre lunaire.

Qui s'attendait à ce que le terrible chef Serpentard, maître des potions dans les donjons et les cachots de Poudlard, puisse danser aussi naturellement avec la femme dont les longs cheveux orange détachés accompagnaient les mouvements avec une grâce féerique ?

Certainement pas Fred Weasley et Angelina Johnson, qui restèrent stupéfaits.

Il était tard, et Lily était resplendissante. Alors Severus s'autorisait même à lui sourire tendrement, heureux de pouvoir la satisfaire si pleinement juste en lui offrant cette danse au milieu de la nuit.

Il déchanta immédiatement lorsqu'à la fin de la danse, emportée par l'euphorie, Lily lui vola un baisé.

Il s'écarta immédiatement d'elle, horrifié.

Fred voulait éclater de rire, mais il n'avait pas entièrement le cœur à se moquer après ce spectacle, alors il se contenta d'applaudir bien fort.

Neville invita à nouveau, en silence, Ginny à danser avec lui. Severus et Lily n'avaient pas besoin d'être observés. Tous les autres de la pièce étaient choqués, et Neville savait que ce ne serait pas apprécié que la scène soit considérée par les autres comme un spectacle. Ginny préférait également infiniment plus danser avec son cavalier qu'observer la suite.

Lily fit un pas vers Sev, le bras tendu, l'expression attristée par la réaction vive de ce qu'elle prenait toujours pour son mari. « Sev… »

Il recula d'un pas de plus. « Non. »

Elle baissa le bras, presque découragée.

Fred cessa d'applaudir, et grimaça. Ça avait vraiment l'air sérieux. Le professeur le prenait très mal.

Severus dut se forcer à ignorer la présence des autres, il devait s'occuper de Lily. Elle était sa priorité, toujours. « Ne le fais pas. Nous sommes amis, Lily. Rien de plus. Il faut que tu le comprennes. Rien. De. Plus. »

Le visage de Lily était un torrent d'expression. Ce qui ressortait le mieux était le désespoir.

Severus avait terriblement envie de se rapprocher pour la consoler, mais il savait qu'il ne pouvait pas. « Il ne peut rien y avoir. »

Il sortit sa baguette, qu'il avait toujours sur lui, et l'agita pour placer un Muffliato sur eux. Personne ne devait les entendre.

« Tu es mariée, Lily. Et ce n'est pas à moi. »

Severus sentit son cœur se déchirer une fois de plus quand il vit les larmes dans les yeux de Lily. Davantage encore quand elles coulèrent.

Sa douce voix était à peine plus qu'un murmure, un espoir vacillant emporté par le vent, sur le point de se briser.

« Bien sûr que si, Sev. C'est toi qui es là. Tu es toujours avec moi. Tu prends soin de moi, et de mon fils. Tu es là pour nous. »

« Je ne suis pas ton mari, Lily. Nous ne sommes pas ensemble, nous ne l'avons jamais été. Tu l'imagines. Et ça ne te fait que du mal. »

La voix de Lily gagna en volume, et elle était plus désolée qu'il ne l'avait jamais entendue. Elle voulait des réponses. Elle avait besoin d'un mur pour ne pas s'effondrer. Le mur qu'elle avait choisi était Sev, et il refusait de rester pour la soutenir aussi loin qu'elle l'espérerait.

« Alors qui ?! Qui, Sev ?! Il n'y a que toi ! Qui serait mon mari s'il n'est jamais là ! »

Il n'y avait rien qu'il puisse lui dire.

« Je suis désolé, Lily. Vraiment désolé. »

« Qui, Severus ! »

« Il ne peut pas être là, Lily. Il est… malade. »

« Il n'y a que toi ! »

Il secoua la tête. « Il faut arrêter ça, Lily. Je m'occuperais toujours de toi et d'Harry, mais plus jamais ça. Cette danse était une méprisable erreur. Je n'aurais pas dû. Pardonne-moi… si tu le peux. Je comprendrais si ce n'est pas possible. »

Il s'en alla, et agita sa baguette pour enlever le Muffliato. Pour une fois, il partait sans Lily. Sans s'assurer qu'elle irait bien sans lui, parce qu'elle devait l'être. Elle allait suffisamment bien pour se débrouiller sans lui. Au moins pour quitter le bal et rentrer seule. Elle irait bien. Sans lui.

Il ignora son appel déchirant alors qu'il quittait la salle et qu'elle tombait à genoux. Il ignora quand elle appela son nom avec plus de malheur qu'il n'en avait ressenti quand il avait cru la perdre il y a treize ans.

« Severus ! » cria-t-elle une seule fois, de toute la force de ses poumons. Il devait revenir. Il ne pouvait pas partir. Il était toujours là, toujours. C'était lui qui la sauvait des ténèbres. Il avait promis, et l'avait prouvé. Il serait toujours là, et ne la quitterais jamais.

Pourquoi aurait-il menti, alors qu'il l'avait sauvé de la douleur ?

Hagrid s'éloigna d'Olympe pour prendre soin de Lily. Il s'avança à ses côtés, et l'aida à se relever. Il commença à la conduire vers l'extérieur, et croisa le regard d'Harry. Le pauvre garçon ne savait ni quoi faire ni quoi penser.

« Dis-lui qu'elle est avec moi. », déclara le demi-géant.

Fred prit l'initiative d'aller vers Harry, et Angelina l'accompagna.

« Je pense qu'il est tard, tu ne crois pas ? » demanda le roux au garçon aux cheveux noirs et aux yeux verts.

Harry ne savait pas quoi répondre. Il se souvenait vaguement que les jumeaux Weasley étaient au courant pour sa mère, grâce à la carte du Maraudeur.

« Que suis-je censé faire ? »

« Y'a que toi qui peux le savoir, Harry. George dirait de laisser faire, et je le convaincrais de faire le bazar pour arranger les choses. Au final, on ferait rire la moitié des personnes, on se ferait détester par l'autre, et on se ferait punir très fort, mais quelque chose en serait ressorti, et on n'aurait rien regretté. »

Draco s'approcha d'Harry. « Je suis d'accord avec Weasley, tu devrais aller te coucher. Je vais prévenir le professeur Snape de l'initiative d'Hagrid. »

Harry se laissa entraîner jusqu'à la tour Gryffondor par Hermione.

« Quelle soirée. », dit-elle une fois dans la salle commune. « Nous ne sommes pas prêts de l'oublier. »

Harry se contenta d'acquiescer. Il ne voulait pas raviver les souvenirs d'Hermione au sujet de Ron, Krum et Draco.


Neville et Ginny ne quittèrent le bal qu'au petit matin. Ils avaient fini par danser sans leurs chaussures, et Neville avait accroché les siennes ensemble par leurs lacets pour les transporter à son cou. Ginny en rit comme ça le faisait ressembler à cette Luna Lovegood. Elle le trouvait touchant.