(L'Ordre du Phénix) Le renvoie de Trelawney


Dans l'après-midi d'Halloween, un grand attroupement eut lieu dans la cour. Certains élèves allaient dans les couloirs en appeler d'autres à venir voir. Draco, ayant eu le privilège d'obtenir l'information au sortir de son cours de défense contre les forces du mal, se précipita vers la bibliothèque après avoir réclamé à Théodore de lui garder une place.

« Une ou six ? » avait sarcastiquement demandé le Sang-Pur alors que son camarade s'élançait déjà dans le corridor.

Draco entra en trombe dans la bibliothèque, ignorant le regard sévère de la bibliothécaire. « Il faut que vous veniez voir. », déclara-t-il arrivé à côté de la table où les quatre Gryffondor de cinquième année travaillaient depuis plus d'une heure.

Neville releva le nez de son essai d'histoire. « Que se passe-t-il ? » s'enquit-il.

« La dame en rose nous a dit de réunir le plus de personnes possible dans la cour pendant qu'elle allait faire prendre ses valises à Trelawney. »

Harry bondit de sa chaise. « Quoi ?! »

Ron ricana. « Bon débarras. Même Hermione la déteste. »

« Je ne la déteste pas. C'est juste un très mauvais professeur. »

« Tu vas pas dire qu'elle est pire que Snape ! » Le roux se reçut quatre regards noirs, et se ratatina. « Ouais, bon, d'accord. Garder ça pour Lavande et Parvati. »

Draco croisa les bras. « Je crains que si tu leur dis cela, elles ne décident de t'écharper pour avoir déprécié leur professeur préférée. Elles adorent Trelawney, ce que je ne comprends pas de Patil puisqu'elle est bien meilleure. »

« Tu ne connais pas Trelawney. », argumenta Harry.

« Je connais sa réputation, et ce que pense Oncle Sev d'elle. Oh, j'oubliais, Patil ne prédit pas la mort de quelqu'un tous les ans, à tort soit dit en passant. »

« Ce serait bien si elle avait raison pour Ombrage. », grogna Ron.

Harry désapprouva. « Oui, sauf qu'elle n'a pas prédit sa mort. Seulement un grave danger. »

« Quel dommage. », glissa Draco sarcastiquement. « Bon, pouvons-nous y aller ? Le spectacle ne va pas nous attendre. »

Sans les attendre pendant qu'ils rangeaient leurs affaires, il retourna devant le bureau de Madame Pince. « Si cela vous intéresse, la Grande Inquisitrice va renvoyer Trelawney. L'événement a lieu dans la cour intérieure. »

Pince parut intéressée, et prévint tous les étudiants de la bibliothèque.

Les cinq amis se précipitèrent dans les couloirs, employant les meilleurs raccourcis connus de Neville. Aux alentours de la cour, se frayer un chemin devint plus compliqué ; beaucoup d'élèves avaient eu vent de l'événement ou apprenaient simplement qu'une certaine agitation était en cours, et avaient décidé de venir jeter un œil. Les élèves restaient simplement sous le préau qui encadrait toute la cour intérieure. Seule Trelawney se tenait là, au centre de l'espace de pause vidé. Draco conduisit ses amis auprès de Théodore et donc des autres Serpentard de l'année qui avaient une vision de choix sur la scène. À côté de Trelawney, à ses pieds, avaient été déposés ses bagages. Ombrage se trouvait face à elle, droite, et extrêmement satisfaite.

« Seize ans… », geignait Trelawney. « Voilà seize ans que je vis et j'enseigne ici. Poudlard est ma maison. Vous ne pouvez pas faire ça. » Sa voix timide implorait avec hésitation.

Ombrage leva un papier plié, sûrement un décret ou une lettre de licenciement. « Si. », contredit-elle avec délectation.

McGonagall arriva, et s'avança auprès de sa collègue de longue date pour la prendre dans ses bras. « Allons, allons. »

« Quelque chose à dire, très chère ? » s'enquit Ombrage d'une voix toujours hypocrite.

McGonagall n'était certainement pas amusée. « Il y a un certain nombre de choses que je voudrais dire. »

Draco, bras croisés, chuchota, moqueur. « Dommage, elle ne peut pas. »

« Ce n'est pas drôle, Draco. », réprimanda Neville très sérieusement.

« Trelawney ne manquera à personne. », se justifia-t-il. Il allait en dire davantage, puisque cette partie-là ne concernait pas les possibilités d'action de la directrice adjointe, mais les portes s'étaient ouvertes en grand dans un claquement, et Dumbledore se fraya un chemin sans la moindre difficulté, d'un pas hâtif, vers les trois dames.

« Professeur McGonagall, pourriez-vous raccompagner Sybile à l'intérieur ? »

« À quoi il joue ? » cracha Draco.

« On dirait que ça te dérange. », commenta Hermione.

« Je suis surpris, c'est tout. »

McGonagall escortait l'ancienne professeur de divination vers l'intérieur, tandis qu'Ombrage se retournait vers le directeur.

« Professeur Dumbledore, selon le décret vingt-trois… »

Il la coupa. « Vous avez le droit de renvoyer mes professeurs. En revanche, vous n'avez pas le pouvoir de les expulser du château. »

« Pour l'instant. », ajouta-t-elle, hautaine.

Dumbledore se détourna, donnant ainsi le signal que la discussion était close, et appela d'une voix forte et énervée ses élèves. « Vous n'avez donc pas de travail ? »

Neville prit cela pour un signal. Il avait l'occasion, enfin, de pouvoir s'adresser au directeur. Luna avait tant raison quand elle disait qu'il ne devrait pas être seul. Il ne pouvait que tenter. Il avait besoin de Dumbledore. C'était son mentor de toujours. Il se précipita comme il put, l'appelant. « Professeur Dumbledore ! » L'homme ne se retourna pas. « Professeur Dumbledore ! » Une foule les séparait, et il avait du mal à s'y frayer un chemin. Pourtant, il était persuadé que l'homme l'entendait. Il continuait d'appeler alors qu'il avançait péniblement au travers des étudiants dont seuls quelques-uns acceptaient de s'écarter un tant soit peu. « Il faut que je vous parle ! Professeur Dumbledore ! C'est important ! Mes cauch… » Il cessa en arrivant dans l'intersection des couloirs, bien plus dégagée. Il avait vu où Dumbledore avait tourné mais l'homme n'était pas visible à l'horizon de ce couloir. Il s'était volatilisé. Neville resta là, et finit par être rejoint par ses amis, dont seul Harry ne montra aucune surprise.

« Déjà fini ? » s'étonna Draco.

« Il ne veut pas me parler. » Il regardait toujours là où Dumbledore avait disparu.

« Il te l'a dit ?! » s'ébaubit Hermione.

« Non. » Il se tourna vers eux. « Mais il me fuit délibérément. »

Harry le regarda durement. « Je te l'ai dit : il joue le jeu de Voldemort. De toute manière, nous n'avons pas besoin de lui. »

« De qui, alors ? Nous sommes des enfants, des adolescents si tu préfères. Que pourrions-nous faire, seuls ? Seuls, nous sommes faibles. »

« Alors soyons ensemble. Nous n'avons pas besoin de Dumbledore pour être ensemble. Ni pour faire de grandes choses. Nous étions quatre adolescents en première année. Trois en deuxième. Cinq, ou plutôt quatre encore, en troisième, et c'est lui qui nous a dit d'y aller ! »

« Il nous l'a dit, oui, en nous précisant comment, avec des conseils. Nous avons failli avoir de gros ennuis en première et deuxième, nous avons failli mourir ! L'année dernière, Cédric est mort. » Neville cria le décès de ce camarade qu'il avait apprécié. Il ne parvint à retenir ses larmes par la suite. « Je l'ai vu, Harry, je l'ai vu se faire tuer ! Et j'ai vu bien plus que ça. J'ai une longue cicatrice sur mon bras pour le prouver. Je fais des cauchemars à tout temps, je ne dors plus correctement depuis qu'il est mort, j'avais déjà des cauchemars avant où il était dedans. Je ne vois toujours que Cédric et l'Avada, ou Voldemort. C'était comme s'il était vraiment là, s'insinuant dans mes rêves. Je vois ce qu'il fait, ce qu'il dit, je sens ses humeurs, je vis ses humeurs ! Ou parfois il s'insinue dans mes souvenirs que je visionne à nouveau, modifiés par sa présence. Dumbledore le sait ! Je lui en ai parlé, du moins de l'ampleur que cela prenait l'année dernière. La plupart de ce que je viens de dire n'en faisaient pas partie. Il m'a promis son aide, que je pourrais en profiter dès la rentrée, et il m'ignore sans cesse ! Je pense que je deviens fou, Harry, en permanence. Pas du fait de voir les Sombrals, pas d'être traité de menteur par tous alors que je sais à quoi j'ai assisté cette nuit-là, mais bien de ces cauchemars qui me hantent, toujours les mêmes ressassés encore et encore, et de mon manque de sommeil constant ! Comment pourrais-je me concentrer sur mes études dans ces conditions ? »

« Demandons à Oncle Sev. », proposa Draco, calmement, comme une évidence.

Neville tourna son attention vers lui. Quelque part au milieu de son discours, ses larmes avaient cessé. À présent, il était d'un sérieux redoutable et froid. « Tu crois que je n'ai pas essayé ? »

Draco ne trouva rien à répondre, déconcerté.

Neville poursuivit. « Je l'ai fait. Il m'a renvoyé. Il prétendit même qu'il n'avait jamais eu vent de mon problème alors que le professeur Dumbledore m'avait assuré qu'il en discuterait avec lui pour trouver une solution. Voilà notre problème, Draco, nous sommes entièrement livrés à nous même cette année. Aucun professeur, aucun adulte ne nous soutient. »

« Il y a Sirius. », contredit Harry.

« Sirius n'est pas disponible. Et avec les mesures prises par Ombrage, il est injoignable. »

« Sans compter qu'il aurait des ennuis s'il communiquait avec nous. », ajouta Hermione.

« Je suis sûr que je peux lui écrire une lettre sans que cela soit intercepté par Ombrage. », assura le Gryffondor aux yeux verts.

Draco proposa son soutien. « Je pourrais l'envoyer. »

Il se fit fixer par les autres.

« Quoi ? Il s'agit de mon cousin, et du parrain d'un ami, bien sûr que je suis volontaire pour aider. Et la dame en rose ne refuserait pas de laisser "le fils Malfoy écrire à sa famille". Sans vérification, bien entendu. Mais je ne suis pas un de ces Gryffondor, qu'est-ce qu'elle risque ? »

Ron le dévisagea. « Je pense qu'elle est au courant que tu es notre ami. »

« Et elle pourrait avoir des ennuis si elle contrariait le fils de Lucius Malfoy. En plus, elle lui est sympathique. Tu n'as pas remarqué quand elle l'a utilisé comme référence ? Au pire, j'enverrais Dobby. »

« Qu'est-ce que c'est ? »

« Un elfe de maison de Poudlard, libre. », expliqua Neville.

« Que Draco utilise toujours pour quelques commissions. », ajouta Harry, blasé.

« On peut utiliser les elfes de Poudlard pour faire ça ?! » s'ébahit Ron.

Draco le fixa. « Non, on ne peut pas. Je peux demander quelques menus services à Dobby, parce qu'il est un cas spécial, et qu'il va sortir de derrière ce pilier et cesser de me faire ses yeux de cocker dans l'attente de savoir ce que je veux lui demander. » Il avait terminé en accélérant sa diction et en toisant un pilier vers lequel les autres se retournèrent.

Un elfe de maison sortit de derrière, timidement et contrit. Il tirait sur ses oreilles pour les baisser alors qu'il s'approchait.

« Dobby ne voulait pas énerver Maître Draco. Dobby voulait juste rendre service. Maître Draco est fâché ? »

Hermione, Neville et Harry observaient Draco d'un air sombre, qui lui faisait entendre implicitement qu'il avait intérêt à répondre avec attention.

« Seulement un peu agacé, Dobby. Je te présente Hermione Granger, je n'ai pas eu l'occasion de le faire correctement la dernière fois. Hermione, voici Dobby. »

Dobby sautilla sur place. « Dobby est content de rencontrer Hermione Granger ! Dobby espère que l'écharpe a plu à Hermione Granger ! »

« L'é.. l'écharpe ? » Elle se tourna vers Draco. « Celle de troisième année ? »

« Hum… Oui, Dobby s'est occupé de la livrer. »

« Eh bien merci Dobby. »

« Quelle écharpe ? » voulut savoir Ron.

« Ce ne sont pas tes affaires. », déclara extrêmement froidement Draco. Il gardait très bien en tête que ce rouquin était du genre jaloux pour ce qui concernait Hermione, un sacré comble en sachant son mépris pour les têtes de classes et les travailleurs acharnés.

Hermione n'apprécia pas beaucoup le ton de Draco. « Non, en effet. Ce sont mes affaires plutôt. »

Dobby sautillait à nouveau avec de grands yeux illuminés vers Draco. Ce dernier baissa le regard, puis soupira.

« Et lui, c'est Ronald Weasley. Tu peux t'abstenir de le saluer. »

Dobby se tournait vers Ron. « C'est un plaisir pour Dobby de rencontrer Ronald Weasley. »

« Juste Ron, ça ira. », remercia Ron, tandis que Draco grognait à voix basse « Et évidemment, il le fait quand même. »

« Il est libre. », rappela Harry à l'intention du Serpentard.

« Heureusement. », lâcha Draco trop vite pour s'en rendre compte.

« Sérieux, c'est quoi cet elfe ? » questionna Ron.

« Ronald ! » s'écria Hermione, indignée. « Ne parle pas ainsi d'un elfe de maison ! »

Draco coupa, les mains en l'air. « Avant que Mione ne se lance dans un de ses discours, Dobby était un elfe de maison de ma famille, que Neville a fait libérer. »

« J'ai participé. », rappela Harry, comme d'habitude sans plus de bonne humeur en présence de cet elfe irresponsable.

« Draco l'a fait libérer. », corrigea Neville.

« C'est ta chaussette que Dobby ne quitte plus. »

Dobby souriait de toute joie. « Dobby sait que c'était Maître Draco. »

« Je ne suis plus ton Maître. »

Harry haussa les sourcils, bras croisé. « Draco, est-ce la peine de continuer cette discussion lorsque tu sais déjà où cela va déboucher ? » Il baissa le regard vers l'elfe. « Dobby, c'est moi qui ai un service à te demander. Tu veux bien m'aider, s'il te plaît ? »

« Est-ce que Harry Potter promet à Dobby de ne pas étrangler Dobby ? »

Harry s'empourpra immédiatement, tandis que Draco éclata de rire. « Euh, hum, je… »

« Qu'est-ce que c'est censé vouloir dire ? » exigea Hermione.

Neville intercéda en la faveur de son meilleur ami. « Simplement que Harry est parfois un peu vif et que… Dobby a mis nos vies en danger alors… il s'est un peu énervé, mais rien n'allait dégénérer à ce point. »

« Tu sais bien que je suis non violent. », affirma Harry.

Hermione resta sceptique, mais le groupe put expliquer correctement ce qu'ils attendaient de Dobby. Seulement, Dobby secoua la tête.

« Dobby ne peut pas entrer au manoir Black sans être invité. Dobby ne peut pas aider. Dobby est désolé. » Dobby tira à nouveau sur ses oreilles.

« Euh, Dobby, tu ne vas pas te blesser, n'est-ce pas ? » s'inquiéta Draco.

« Dobby est un elfe libre, Dobby n'a pas besoin de se punir, alors Dobby ne le fait pas. Mais Dobby est malheureux de ne pas pouvoir aider ses amis. »

« Peux-tu transplaner avec la chouette de Potter à l'extérieur de Poudlard pour l'envoyer porter le courrier ? »

Dobby sauta sur place, tout joyeux. « Oui ! Ça, Dobby peut le faire ! »

Un sourire mauvais se dessina sur le visage de Harry. « Parfait. Ombrage ne pourra pas l'intercepter celui-là. »

Draco congédia l'elfe. « Merci Dobby, tu peux partir pour l'instant. Harry t'appellera lorsqu'il sera prêt. »

Neville contredit. « Ou alors, Harry fera un tour en cuisine. Ne dérangeons pas Dobby plus que nécessaire. »

« Tu as faim, Neville ? » questionna malicieusement Harry.

Neville sourit timidement. « Peut-être… je prendrais bien un croissant. »

Harry hocha la tête, amusé.

« Suis-je le seul à avoir manqué quelque chose ? » s'enquit Draco. Hermione et Ron répondirent que non.