(Le Prince de Sang-Mêlé) L'authenticité du Prince
« Ce livre est génial. »
Ce fut la première chose que Harry trouva à dire auprès de ses amis après le cours de potion.
Les yeux de Ron allèrent sur l'ouvrage que Harry conservait dans la main. « Mais, c'est le vieux truc décrépit qu'il y avait dans le placard. »
« On a échangé. », informa Neville. « C'est annoté de partout. Il ne faudra pas le sortir devant Madame Pince. »
Hermione s'insurgea. « Quoi ? C'est de la triche. Si quelqu'un a amélioré la recette, tu voles son travail, Harry. »
Draco réfuta. « Le livre était à disposition, non ? C'est peut-être celui de Slughorn, et il n'aura pas fait attention. Ce serait idiot de ne pas utiliser une version améliorée si on l'a sous la main. »
« Tu veux le livre pour toi ! » s'indigna Hermione.
« On peut partager. »
« Non ! Mais où est votre amour propre ? Ce n'est pas votre réussite, c'est celle de celui à qui appartient ce livre. Vous devriez le rendre. »
« Non. », refusa Harry. « Tu ne réalises pas la quantité de connaissances qu'il pourrait y avoir dedans ? C'est prodigieux. Il a sûrement appartenu à celui qui a… »
Harry se stoppa, stupéfait. Il rouvrit rapidement le livre pour en chercher l'édition.
« Qu'est-ce qui se passe, Harry ? » s'enquit Draco.
Les yeux sur l'année, le Gryffondor murmura. « Rien, j'ai dû me tromper. Cette recette est de toute évidence celle de celui que Slughorn a évoqué, qui aurait obtenu la récompense. Et comme… eh bien, il avait dit quelque chose d'étrange, mais ça ne colle pas. Le livre est daté de 1945. »
« Et s'il appartenait à Voldemort ? » questionna Neville.
Harry secoua la tête. « Peu probable. Neville, tu veux bien que je le garde ? »
« C'est pas vraiment le mien, fais comme tu veux. Si je l'utilise, je ne saurais jamais choisir entre la recette originale et la variation. Autant qu'il serve à quelqu'un de plus compétent. »
« Et moi, alors ? » protesta Draco.
Harry émit un sourire narquois. « Tu n'as qu'à trouver toi-même les améliorations, non ? Tu es le meilleur élève de Sev. Et moi, j'ai enfin de quoi équilibrer avec vous. Il arrêtera de me critiquer sur le fait qu'Hermione est meilleure que moi. »
« Parce qu'il dit ça ?! » s'emporta la fille, blessée.
« Tu ne devrais pas être surprise. Allez, Hermione, de toute façon tu ne suis la matière que parce que c'est un cours, et que tu veux exceller partout. Pour moi, c'est une passion, une attirance irrésistible et le lien le plus fort que j'ai avec mes parents. »
Draco se racla la gorge, et chuchota. « Fais attention à ce que tu dis, quand même. »
« Quoi ? »
« Tes parents. », répéta Hermione.
Ron haussa les épaules. « De toute façon, cette rumeur risque de circuler dans toute l'école d'ici la fin de l'année. »
Soudainement, Harry s'excita, une idée lui ayant traversé l'esprit. Pour être tout à fait honnête, il y songeait déjà durant le cours, la première fois lorsqu'il avait vu toutes ces annotations, la deuxième fois lorsque Hermione avait demandé l'avis d'un expert… « Draco, tu veux m'accompagner voir Sev ? Hermione, je vais faire vérifier la potion à Sev, ça te va comme ça ? »
« Et tu vas lui montrer le livre aussi ? Et en changer ? » questionna l'adolescente.
« Non. Je ne vais pas en parler. J'ai déjà une idée de comment aborder ça sans avoir besoin de lui montrer ce livre. »
« Bien sûr, je viens. », accepta Draco avant qu'Hermione ne puisse riposter.
Les deux adolescents s'esquivèrent rapidement, et se hâtèrent de rejoindre le bureau du chef Serpentard qui n'avait pas changé de place malgré son nouveau poste. Après tout, il devait rester disponible pour les élèves de sa Maison. Harry et Draco frappèrent, puis s'invitèrent quand le professeur leur permit d'entrer.
L'homme paru désabusé en les reconnaissant. Il se levait de son siège, une pile de parchemin dans la main. « Quelle surprise, dites-moi. Pourquoi est-ce toujours vous deux ? »
Harry s'approcha, et entra de suite dans le vif du sujet. Il avait préalablement rangé le livre dans son sac, afin de s'assurer qu'il ne soit pas vu, et s'était mentalement préparé pour enfermer ses pensées. Les cours d'occlumancie ne servaient pas à rien. « J'avais une question au sujet du cours de potion. »
« Je ne suis plus votre professeur. »
« Oui, bien sûr, mais je m'interrogeais sur… tu m'as parfois laissé entendre qu'il fallait adapter la recette selon certaines situations… »
« J'ai fait plus que le laisser entendre, Harry. Les ingrédients n'ont pas toujours la même qualité. »
« … certes, mais tu disais que je devrais me montrer plus compétent qu'Hermione parce que j'étais moins académique, moins obnubilé par l'absolue vérité des livres, et bien plus imaginatif. Alors… aujourd'hui, nous avons préparé un philtre de mort vivante… coupée ou écrasée ? »
Le regard du professeur ne trahit rien. Il répondit à la question comme il répondrait à n'importe quelle question d'un élève qui n'avait pas épuisé sa patience. « Si tu parles des fèves soporifiques, écrasées. »
« Le livre dit "couper". »
« Alors ce livre a tort. », coupa le professeur.
« Comment sais-tu qu'il faut écraser ? »
« Parce que je suis un maître des potions compétent, Harry. Où as-tu entendu la possibilité d'écraser à la place ? »
Harry sentait la suspicion arriver, et espérait que ses boucliers d'occlumancie tiendraient si le professeur décidait d'effleurer la surface, ou au moins cacherait le mensonge, même s'il omettait plus qu'il ne mentait.
« J'ai commencé un peu en retard, et j'ai eu l'occasion de voir tout le monde lamentablement échouer cette étape. Alors… ça, plus tes commentaires, je me suis… risqué à tenter de l'écraser. Donc j'ai bien fait ? »
Quelqu'un d'autre frappa à la porte.
Severus baissa d'un ton en regardant le Gryffondor. « Commence à faire l'inventaire de ces étagères d'ingrédients, Harry. »
Habitué, le Gryffondor évita de râler avant de se dépêcher de se mettre au travail. Draco, sans consignes, décida de s'approcher d'une étagère remplie de potions.
« Entrez. », appela Severus.
Il s'attendait à un étudiant de Serpentard, les seuls qui viendraient le voir. À la limite Rusard si une bêtise avait déjà été commise. Il ne pensait pas que Slughorn entrerait, tout souriant.
« Ah, Severus, c'est tellement plaisant de te voir… »
« Malheureusement, Horace, j'ai du travail. Nous nous verrons au banquet. »
Les yeux du bonhomme se posèrent sur la pile de parchemin que son ancien élève tenait. « Qu'est-ce que c'est ? »
« Quelques-unes de mes recherches, que j'allais justement aller approfondir dans un laboratoire, si tu veux bien m'excuser. »
Harry ne parvint à s'empêcher de pouffer. Même s'il était vrai que Severus comptait aller expérimenter quand ils étaient arrivés, il était clair qu'il voulait seulement esquiver une discussion avec l'homme. Ce dernier, d'ailleurs, tourna son attention vers Harry et Draco, même si les deux se trouvaient à des murs différents.
« Oh, les garçons, je ne m'attendais pas à vous trouver ici. »
« Tu apprendras rapidement que Potter se montre particulièrement doué pour trouver les punitions. Draco, repose ça immédiatement. Je ne t'ai pas permis de te fournir. On dirait ta tante. »
Le Serpentard rangea le flacon de sommeil sans rêves, et se retourna vers son parrain. « Je dors mal. », lui dit-il durement.
« Tu as déjà un flacon, dont tu ne devrais pas abuser. Je te l'ai donné il y a deux jours. Même Ombrage n'aurait pas pu le finir en si peu de temps, et tu connais les doses, contrairement à elle. »
« Ma nuit ne porte pas assez conseil, professeur. », glissa-t-il sarcastiquement.
« Le sommeil sans rêves te permet de dormir et de te reposer afin de pouvoir réfléchir à tête tranquille le lendemain. Il ne permet pas de songer et de ressasser durant sa nuit, bien au contraire. »
Harry coupa. « Professeur, pourrais-je faire l'inventaire plus tard ? Nous n'avons pas encore mangé. Et je m'excuse pour avoir traité Draco de livre sans réflexion. S'il dort mal, ça peut expliquer pourquoi il a été si médiocre en potions aujourd'hui. »
« Traître. », lâcha Draco entre ses dents.
« Alors, je ne suis plus puni ? »
Severus les toisait d'un air peu amusé. « Sortez de mon bureau tous les deux. »
Les deux adolescents commencèrent à se faufiler rapidement.
« Draco. »
Le garçon s'arrêta.
« Sans cette potion. »
« Quelle potion ? »
« Va reposer ce polynectar immédiatement. »
L'adolescent obéit en rechignant. « Depuis combien d'années traîne-t-il dans la poussière de ce bureau, de toute façon. Ce n'est pas comme si tu allais t'en servir. »
Une fois les élèves partis, Severus esquiva également la discussion avec Slughorn, sous prétexte que si l'homme avait besoin de quoi que ce soit, il pouvait demander à Lily.
Le lendemain, au cours de métamorphose de la première période, Draco se garda bien de discuter. Il se montra même plutôt distrait, et particulièrement inattentif, ce qui lui valut à la fois une remontrance du professeur, et un air particulièrement étonné de la femme. C'était la première fois que les Gryffondor pouvaient voir comment se débrouillaient les Serpentard et les Poufsouffle à ce cours, et il semblerait que Draco était usuellement un élève assez studieux au vu de la réaction de la vieille sorcière. Toutefois, elle parut d'autant plus soucieuse lorsqu'il lui répondit sobrement, comme s'il n'avait aucune réplique narquoise à lui faire. Vers la fin de la matinée, elle évoqua même de l'envoyer à l'infirmerie s'il ne se sentait pas bien, ce à quoi il assura vivement que tout allait bien, tout en agitant sa baguette pour effectuer en informulé le sort d'apparition de serpent, ce Serpensortia qu'il maîtrisait déjà en deuxième année. La créature qui apparut, extrêmement chétive, possédait une toute petite aile en plume bleue semblable à celle d'un occamy, et un trou dans son corps comme s'il avait été mordu par un prédateur. McGonagall évapora la monstruosité d'un prompt mouvement de baguette, puis mit poings sur les hanches et les i.
« Monsieur Malfoy, vous devriez savoir qu'on ne pratique pas la métamorphose dans certaines conditions tels un énervement ou une trop grande fatigue. Heureusement pour vous, le cours est presque terminé, vous ne manquerez donc pas grand-chose. Sortez, et veillez à manger suffisamment pour retrouver des forces. 10 points en moins à Serpentard pour ce geste de colère et irresponsable. »
Draco s'étant installé avec Théodore Nott, Hermione s'était retrouvée à côté de Ron. Elle chuchota. « Comment peut-il déjà maîtriser l'informulé sur les sorts d'apparitions ? Les plus compliqués qui soient ! »
Ron murmura en réponse. « J'ai pas trouvé sa métamorphose très réussie. »
Draco quittait la salle vivement, son sac dans la main, sans adresser le moindre regard à ses amis. Il se dirigea directement à la table de Serdaigle dans la grande salle pour le déjeuner, et jeta son sac sur la table. Une fois assis, il se prit la tête dans les mains, et tenta de retrouver son calme. Des pas légers s'approchaient de lui.
« Tu as l'air de beaucoup t'inquiéter, Draco. », déclara doucement la voix de Luna.
Il tourna son regard clair vers la fille qui s'installait à sa gauche. « Qu'est-ce qui te fait dire ça ? »
« Tu regardes souvent nulle part, comme si tu restais plongé dans tes pensées. Tu étais très sombre dimanche. Tu restais maussade lundi, et peu patient. Tu avais l'air bien hier, beaucoup trop exagéré en fait. Tes provocations et ton sourire étaient forcés. Et aujourd'hui, tu es là en avance, seul, et tu n'as même pas fait d'effort pour bien te tenir. » Les yeux de Luna se levèrent un peu. « Tes cheveux sont en batailles. »
Il ricana amèrement. « Dommage, je n'ai pas de peigne pour les remettre en place. »
« Tu es très doué en métamorphose. »
En silence, impassible, Draco sortit sa baguette et fit apparaître un peigne dans sa main gauche, puis un miroir en lévitation devant lui. Il posa ensuite sa baguette sur la table et entreprit de se recoiffer avant de tout faire disparaître et de ranger sa baguette.
« Ça te va mieux. Crois-le ou non, l'aspect mauvais garçon ne te correspond pas. Ça convient à Ron, et un peu à Harry, mais pas à toi ou à Neville. »
« Tu n'as pas cours, ce matin ? » demanda-t-il, curieux. Il commençait à se calmer, et devait reconnaître que la présence de Luna aidait pour beaucoup. C'était la personne idéale à rencontrer dans ces moments sombres.
« Non. Ginny a botanique. Moi, j'ai potions très tard, aujourd'hui. J'ai cours tout l'après-midi jusqu'à la dernière plage horaire. »
« Avec Poufsouffle ? »
« Oui, pour botanique et potions. »
« Vous êtes tous des monstres de travail, non ? C'est normal que vous ayez des cours tardifs. Ça vous habituera pour les classes d'ASPIC. »
« Quand tu as besoin, tu peux prendre une potion calmante. Tu peux aussi te rassurer avec ton patronus. Il sert à chasser les idées noires. »
« J'ai l'occlumancie. », affirma-t-il plus durement.
« Je ne sais pas ce que c'est. Ça doit être utile. »
Draco ricana. « Ce n'est pas une créature, tu peux difficilement connaître. »
« Tu es un très bon sorcier, Draco Malfoy, tu n'as pas besoin de t'inquiéter pour tes cours. Tu es confiant en toi, donc tu le sais. Tu as peur pour ton père à Azkaban ? »
« Il n'y restera pas. C'est plutôt mon cours d'alchimie de demain qui m'inquiète. »
« Mais c'est demain. Inquiète-toi demain. »
Il rit. « T'es pas croyable. » Il récupéra son sac et le posa à sa droite sur le banc. « Il y a quelque chose que tu voudrais travailler en attendant le repas ? Il est encore tôt. »
« Non, tout va bien. Merci pour le sort du pendule. Il m'a été utile l'année dernière, dans le département des mystères. »
« Ravi qu'il t'ait plu. Si tu veux, j'en connais un autre. Il a une tout autre utilité : faire bourdonner les oreilles de ceux qui voudraient entendre une conversation privée, et les empêcher de l'entendre. »
« Ça doit être très désagréable. »
« Et très pratique. Tu connais un autre sort de confidentialité ? »
« Non. », répondit-elle tout en sortant sa baguette pour la tenir dans une parfaite verticale devant son visage. « Par quoi on commence ? »
Draco s'en amusa. « Je commence par le lancer, pour tout t'expliquer sans que qui que ce soit puisse nous entendre. »
La petite séance ne dura que quelques minutes avant que les autres n'arrivent et que Draco ne décide donc d'enlever son sort et de faire comme si de rien n'était. Quand Hermione lui demanda ce qui lui arrivait, il prétendit sommairement que McGonagall l'avait agacée avec un cours qu'il connaissait déjà par cœur, et donc totalement inutile pour lui.
Après le déjeuner, la seconde période de la journée était réservée aux soins aux créatures magiques. Seuls Neville, Harry et étonnamment Théodore Nott avaient choisi de poursuivre cette matière. Pour fêter la présence de ceux-là, et quelque peu malheureux que personne d'autre n'ait continué, pas même Hermione dont l'objectif était d'intégrer le département de régulation des créatures magiques, le demi-géant leur fit s'occuper de la colonie de Sombral. Ce choix déplut fortement à Théodore, qui l'exprima clairement au début de la séance. À la fin, pourtant, il souriait presque en caressant l'une de ces créatures dans un coin tranquille, une expression qui ne passa pas inaperçue à l'œil attentif du professeur. Hagrid s'en satisfaisait avec bonheur que ce second cours sur les plus merveilleuses des créatures soit venu à bout des réticences du Serpentard. Bien sûr, le garçon nia tout en bloc lorsque Hagrid tenta de prétendre que ça avait marché. Harry requit toutefois qu'au prochain cours ils découvrent de nouvelles créatures plutôt que de refaire les cours des années précédentes.
Le cours de botanique, auquel tout le groupe assistait en troisième période, se déroula à merveille. Cependant, tous pouvaient bien comprendre que tous leurs cours — du moins les sérieux, ce qui n'incluait pas soins aux créatures magiques — seraient d'un tout autre niveau que les années précédentes. Draco se montra bien plus calme qu'en métamorphose, après avoir déjà travaillé tout le reste de l'après-midi sur le devoir de métamorphose au sujet de plusieurs lois de la magie, et notamment la "loi de Gamp sur la métamorphose élémentaire" et le "principe de quasi-dominance des êtres artificiels". Hermione avait déjà élaboré un emploi du temps personnalisé pour chacun d'eux avec leurs cours respectifs, et les périodes de temps libre avec les matières qu'ils devraient y travailler. Neville l'en avait chaleureusement remercié, Ron avait râlé, Draco n'avait pas commenté et s'était contenté de le ranger dans son sac d'un air absent, et Harry s'en était plutôt amusé. Pour simplifier, elle avait attribué à chaque jour une matière. Néanmoins, comme ils n'avaient pas tous exactement les mêmes cours, notamment Harry et Neville qui avaient soins aux créatures magiques, elle et Draco qui avaient études des runes, plus arithmancie avancée pour sa part, et arithmancie ainsi qu'astronomie pour Draco ; ils ne travailleraient pas tous tout leurs cours en même temps, ce qui changerait leur habitude d'entraide et de soutien. Toutefois, ces séances n'étaient pas impossibles à réaliser pour autant.
Elle avait juste omis que Draco avait alchimie le jeudi matin.
