(Le Prince de Sang-Mêlé) L'invitation au club


Les semaines de cours s'écoulaient, où Lavande se montrait toujours excitée aux alentours de Ron et soupirait pour lui. Parvati continuait de se parer de la plus belle manière tous les mardi, et plusieurs jeunes hommes curieux et séduits par sa beauté se demandaient qui elle cherchait à rencontrer en secret dans l'après-midi où elle n'avait aucun cours, au contraire de sa sœur qui suivait les potions. Draco se montrait plus souvent calme et silencieux auprès de ses amis, qui attribuaient cela à sa grande charge de travail, puisqu'il suivait deux cours de plus qu'Hermione, y compris la difficile alchimie.

Chaque week-end, Harry essayait de trouver un moment pour que toute l'équipe de Quidditch puisse s'entraîner sur le terrain. À ces occasions, Hermione décidait souvent de rejoindre les gradins pour les observer, toujours équipée de son livre au cas où elle se lasserait. Draco, quant à lui, prétendait aussi rejoindre les entraînements de son équipe quand ils avaient lieu, mais partait au lieu de cela travailler sur son projet au septième étage.

Harry s'absorbait toujours autant dans le livre du Prince de Sang-Mêlé, pas du tout rebuté par le résultat du premier sort qu'il avait testé. Après avoir lancé son premier sort informulé, il réussit beaucoup mieux en classe, commençant ainsi à s'entraîner plus efficacement avec Draco lors des séances de duel en défense contre les forces du mal. Le premier éclat avait eu lieu dès le cours suivant sa découverte du Levicorpus. Aucun d'eux n'en avait encore discuté avec le Serpentard, qui ignorait donc que son ami le maîtrisait à présent. Severus avait une fois de plus exigé qu'ils se mettent en binôme, et Draco avait conservé, encore, sa table. Il était bien évidemment le seul à qui le professeur permettait un tel comportement.

« Tu vas y arriver, cette fois ? » nargua Draco sans entrain alors qu'il s'asseyait à sa place choisie après avoir fait léviter ses affaires, table et chaise.

« Juge par toi-même. », répliqua Harry, juste avant de pointer sa baguette et de penser au Levicorpus. Draco se retrouva soudainement suspendu, comme attendu, et le professeur s'approcha rapidement, agitant sa baguette pour retourner le Serpentard assis sur sa chaise. Le blond n'avait même pas pu sortir sa baguette, et semblait autant abasourdi que choqué.

« Où avez-vous appris ce sort, Monsieur Potter ? » requit le professeur durement.

« N'est-ce pas un sortilège, professeur ? »

Severus se calma rapidement, et le toisa avec indifférence. « Il s'agit en effet d'un sortilège, Potter. Vous le tenez de votre parrain ou de Draco, c'est cela ? »

Harry hocha la tête, bien qu'il s'assura de regarder ailleurs, et afin d'éviter toute suspicion, en direction de Draco. Severus se tourna également vers le Serpentard surpris.

« Monsieur Malfoy, puisque vous vous êtes montré incapable de vous défendre comme exigé, alors que vous vous vantiez que vous y parviendriez, vous serez en retenue avec moi samedi matin. Vous y réfléchirez à votre attitude en classe. »

« Oui, professeur. », accepta respectueusement Draco. Le reste de la salle se montra étonnée de la punition du Serpentard. Ils ne pensaient pas qu'elle aurait lieu.

« Potter, vous obtiendrez dix points si vous parvenez à lancer un autre sortilège informulé à monsieur Malfoy qui va se remettre debout, avec sa baguette, pour vous affronter. »

« Par autre… », commença à demander Harry.

« Un différent, Potter. », insista le professeur.

Harry pouvait deviner que Severus n'appréciait pas de le voir lancer en tout premier ce même sort avec lequel James l'avait attaqué tant d'années auparavant. « D'accord. » Il se plaça en position de duel, et attendit que Draco soit installé. Le professeur restait à côté, tel un arbitre entre les deux. Harry songea d'abord à un simple sortilège d'entrave, qui ne blesserait pas, mais songea qu'après avoir employé le Levicorpus, ce serait un peu inapproprié avec Severus juste à côté à observer. Alors il opta pour un sortilège du Repoustout. Il pensa Flipendo, et exécuta le mouvement. Le sort partit dans son rayon de lumière usuel, et les réflexes de Draco fonctionnèrent avec prudence, dressant un simple charme de bouclier en face. Cela décevait de la part du Serpentard qui savait depuis longtemps bloquer spécifiquement, de manière informulée, de nombreux sortilèges.

« 5 points, Potter, pour présenter une maîtrise acceptable des sortilèges informulés. À présent, voyons si vous pouvez les bloquer. »

Sans attendre un instant de plus, le sort de Draco partit, et Harry réagit de justesse. « Protego ! » s'écria-t-il en un souffle de surprise.

« Décevant, Potter. Réalisez-vous que si vous n'aviez pas perdu du temps à prononcer la formule, vous auriez arrêté ce sortilège plus tôt, et auriez eu l'occasion de contre-attaquer dans un véritable affrontement ? Vous avez presque manqué de vous protéger. »

« J'ai de bons réflexes. »

« Avez-vous oublié le premier cours, Potter ? Celui qui exécutera ses sorts sans le moindre son aura un avantage. Recommencez. »

Le professeur s'éloigna après ces mots, mais ne manqua pas le premier charme de bouclier réussi en informulé de Harry puisqu'il lui accorda cinq nouveaux points à cela.

Après ce cours, Harry parvenait également à lancer les charmes en informulé, au plus grand plaisir de Flitwick, et reprenait ainsi sa place en tête de classe aux côtés d'Hermione et Draco. Cependant, la métamorphose demeurait trop compliquée pour Harry quand il s'agissait de lancer les sorts en informulés.

Draco ne questionna aucun membre du groupe au sujet de la soudaine connaissance de Harry pour le Levicorpus. Il continuait de suivre ses cours avec application, sans perdre son temps pour les quelques plaisanteries auquel il avait habitué tout le monde, même en métamorphose où il réussissait toujours chaque sort avec talent sans sembler s'en soucier vraiment. McGonagall lâcha un jour qu'il n'était pas le seul talentueux jeune homme arrogant à mûrir de façon remarquable durant ses années d'ASPIC.

Une étrangeté semblait avoir lieu au repas, ou du moins les bruits commençaient à circuler que Mademoiselle Evans et le professeur Snape s'évitaient. En effet, ils n'étaient jamais vus au même moment à table, et beaucoup avaient pu voir l'expression de déception, et aussi d'étonnement, sur le visage de Slughorn qui ne parvenait jamais à obtenir les deux dans une même discussion, même en en tirant un au moment où un autre s'y trouvait. Le second partait simplement, de la manière la plus naturelle qui soit, comme s'il avait terminé et avait des choses plus importantes à faire que de rester discuter. Neville était le premier du groupe à entendre la remarque de la part de quelques Poufsouffle attentifs au sujet de l'apparente fuite réciproque entre ceux que beaucoup avaient cru être un couple. Harry jugea que ce devait être dû à une règle de prudence, qu'il n'approuvait pas forcément, pour n'éveiller aucun soupçon en tant qu'espion. D'un autre côté, il pouvait comprendre que si la loyauté de Severus était remise en cause par Bellatrix, l'espion ferait mieux de montrer un certain détachement concernant celle qu'il avait protégée de la folle sadique. Harry se demandait parfois si l'animal intérieur de Bellatrix était un chat si commun, à cause de cette tendance à préférer jouer cruellement avec sa proie avant de la tuer.

Neville et Harry n'avaient parlé à aucun de leurs amis de la charge que Dumbledore leur avait confiée. Ils se contentaient d'afficher toujours des sourires, ce qui n'était pas très compliqué, à Slughorn lorsque l'homme leur parlait, et ils s'efforçaient, là encore avec facilité, de se montrer agréables. Slughorn était sympathique, parfois un peu envahissant, mais jamais insultant, et si Harry pouvait parfois perdre patience pour certaines attitudes semblables à celles de l'homme, le fait que l'ancien professeur de potion aimait sa mère, et appréciait aussi Severus l'aidait beaucoup à le supporter. Ils utilisaient autant qu'ils pouvaient les conseils du Prince de Sang-Mêlé en cours de potion pour se démarquer tous les deux en pratique. Lors de la théorie, ils s'efforçaient également de répondre autant que possible, bien aidés, certes, par le manuel, néanmoins ils avaient acquis la plupart de leurs connaissances avec Severus. Harry était heureux de constater que les ajouts du Prince de Sang-Mêlé ne contredisaient jamais l'enseignement de son non-beau-père.

Sur le premier trajet vers Pré-au-Lard de l'année, Hermione expliquait à Neville, Harry et Ron qu'elle effectuait quelques recherches à la bibliothèque, mais n'avait jusqu'à présent rien trouvé sur un Prince de Sang-Mêlé. Elle s'en montrait très frustrée, et tenta d'employer cet argument pour convaincre Harry que l'auteur n'était peut-être pas digne de confiance, et qu'il devrait arrêter de dormir avec. Le garçon tenta de nier qu'il "dormait avec son livre", mais à la fois Neville et Ron assurèrent qu'il le faisait bel et bien.

« Si Ginny apprend ça, elle sera furieuse. », informa Neville.

« Elle est où d'ailleurs ? » s'étonna Ron.

« Je l'ai vue partir avec Draco plus tôt. », renseigna Harry.

Ron s'étrangla à moitié alors que l'attention de Neville et Harry était retenue par le professeur Slughorn parlant avec Flitwick plus loin. « Pourquoi elle partirait avec Draco en avance, seule ? »

« Je ne sais pas… », prononça très lentement Harry afin d'avoir plus de temps pour entendre Slughorn et Flitwick. Il sourit soudainement et accéléra. « Ils sont peut-être aux trois balais. Et si nous y allions ? »

Ron semblait presque énervé, et très déterminé. « Allons-y. » Et ce fut lui qui traîna les trois autres à sa suite vers les trois balais. Neville et Harry durent forcer pour qu'il ralentisse le pas, afin de ne pas dépasser Slughorn qui s'y rendait nonchalamment.


Draco n'avait pas le cœur à porter d'autres vêtements que du noir. Et plusieurs personnes attendaient de lui qu'il se montre dans des costumes nobles et sombres, puisqu'il était un Malfoy et un Mangemort. Toutefois, il optait pour se vêtir avec les anciens habits de Regulus Black. Il se trouvait que Kreattur insistait avec force et supplication pour qu'il s'en serve, et s'en prouve digne. Depuis Dobby, le jeune Serpentard avait appris qu'il fallait prendre garde à respecter les vœux des elfes de maison. Il revoyait encore parfois dans son esprit son père tenter d'attaquer ses amis, et Dobby les protéger. Il repensait aussi aux manifestations dangereuses d'affection de l'elfe simplet. Kreattur s'avérait bien plus raisonnable, et désireux de servir une grande famille de Sang-Pur, même s'il ne semblait vouloir s'occuper que des Black. Apparemment, le vieil elfe attentionné avait jugé bon de modifier ses bagages pour qu'il emporte à Poudlard bon nombre d'anciennes affaires du frère de Sirius. Notamment, pour ce qui était des vêtements, Draco ne pouvait trouver aucun de ce que ses parents lui avaient acheté. Heureusement, les costumes de Regulus lui allaient à merveille, comme s'ils étaient taillés pour lui, ou s'adaptaient à lui.

Pour se rendre à Pré-au-Lard, il avait choisi un costume sombre, bien évidemment d'aussi bonne qualité qu'attendu pour un Malfoy, aux teintes vertes ornées de quelques broderies argentées, belles mais discrètes. Le vêtement confortable et chaud le protégeait correctement de la fraîcheur de fin octobre agrémentée de neige. Il n'oublia pas de se saisir d'une sacoche discrète afin de contenir son précieux "cadeau", sélectionné avec soin. Une délicate attention que quelqu'un porterait pour lui au directeur. Le plan finement élaboré convaincrait plus d'un que quelqu'un, quelque part, désirait attenter à la vie du vieil homme.

Fidèle à la parole donnée aux jumeaux Weasley, Draco embarqua Ginny pour une aventure trépidante à l'auberge des trois balais. La belle rousse, qui attirait les convoitises de beaucoup, honorait le Serpentard de sa présence par les vêtements les plus communs qui soient, accordés à la saison, avec notamment un gilet très rouge Gryffondor. Surtout, elle restait accompagnée de son boursoufflet violet, posé confortablement sur son épaule. Ils s'installèrent tous deux à une table dans un coin de la taverne, choisie par Draco. Ginny l'observa étrangement alors qu'il lui indiquait de prendre place en première.

« Tu ignores les rumeurs qui courent ? Cet endroit est très utilisé par les couples. » L'adolescent ne semblait pas penser qu'il y avait un problème. « Pour s'embrasser. », insista-t-elle. Cette fois, il grimaça.

« Pour une fois, les tourtereaux iront voir ailleurs. Cet endroit est isolé du reste, et c'est exactement ce dont nous avons besoin pour notre petite affaire. »

Elle soupira, et s'assit, imitée ensuite par Draco sans le soupir. « Quelle affaire ? Dois-je conclure que tu ne veux pas que les autres nous rejoignent ? »

« Nous n'avons pas besoin d'eux tout de suite. Même s'il serait appréciable qu'à un moment un certain Neville Longbottom fasse son apparition. » Draco se montra très sérieux. « Tes frères, les seuls vraiment dignes d'intérêt pour ce que j'en connais, m'ont chargé d'une petite mission. Il s'agit tout simplement de t'aider. »

« M'aider à quoi ? »

« Tu comptes choisir parmi le troupeau qui voudrait se ruer à tes pieds, ou aller directement à ta cible ? Je te déconseille de piocher dans ses camarades les plus proches — et encore moins les amis — ces petites tentatives de rendre le plus jaloux possible finissent souvent mal. »

Elle croisa les bras sur la table et s'y appuya pour le toiser durement. « De quoi parles-tu ? »

« Que tu deviens une adolescente assez charmante, il y en a beaucoup qui voudraient sortir avec toi, mais un seul t'intéresse et tu lui tournes autour sans jamais t'approcher assez. Votre amourette n'avance pas. Fred et George ont conscience que tu finiras avec quelqu'un, et ils préféreraient que seule une personne correcte puisse te toucher. Donc, ils aimeraient que lui et toi soyez ensemble sans passer par des intermédiaires douteux. Ce qui inclut les philtres d'amour. Ils ont pensé que faire appel à moi n'était pas douteux. Donc, nous sommes là pour parler de cette histoire. »

« Et avec qui penses-tu, enfin, pensez-vous, eux et toi, que je voudrais sortir ? »

Il rit un peu. « Je n'ai pas été assez clair ? Tu es très clairement attirée par Neville Longbottom. À moins que je ne me trompe ? »

Elle se redressa. « Admettons que ce soit vrai. Que pourrais-tu bien y faire ? »

« Les jumeaux vous approuvent, c'est déjà un bon début. Connaissant vos attitudes respectives, tu dois faire le premier pas. Toutefois, il serait préférable que tu évites toute maladresse. Imagine que tu veuilles lui déclarer ta flamme, là, maintenant, comment tu lui dirais ? »

Elle sourit avec dérision. « C'est ridicule. »

« C'est ton unique occasion de t'entraîner avec moi, avant de sauter directement dans le grand bain à côté de lui. Je t'assure que je te pousserais, de force s'il faut, que tu sois prête ou non. Avant la fin du week-end, vous serez ensemble. »

« T'es pas sérieux. »

« Très. » Et en effet, le Serpentard n'affichait rien d'autre que le plus grand sérieux, accompagné de gravité et de détermination. Il ne plaisantait pas le moins du monde. Il s'adossa bien confortablement dans son siège, et l'observa intensément, empruntant un nouveau ton, imposant une ambiance, aux confidences amoureuses. « Alors, raconte-moi en détail, comme si tu t'adressais à Nev, ce que tu aimes chez lui, ce qui t'attire, ce qui t'a fait le… désirer. »

Elle l'étudia longuement, réfléchissant, avant de se lancer, yeux dans les yeux. Il lui demandait du théâtre, et elle pouvait bien s'y plier. « Neville, je t'aime depuis le premier jour où je t'ai vu, depuis… » Elle sembla hésiter. « … euh, depuis… tu es sage, calme, courageux, héroïque… tu es un héros, le garçon-qui-a-survécu qui remplissait nos enfances de légende, tu es quelqu'un de brave, et un leader qui n'a pas peur d'affronter les plus graves dangers pour nous sauver tous. Je sais que je t'aime depuis… que… tu, tu m'as sauvé dans la Chambre des Secrets. Tu es un formidable ami que tout le monde rêverait d'avoir. Quand tu m'as invitée au bal de Noël, j'ai été plus heureuse que jamais, et le moment que nous avons passé était enchanteur, tu… »

Draco la coupa, plus abasourdi qu'il ne l'avait jamais été. « Ce n'est pas de l'amour, Gin. C'est de l'obsession. »

« Je ne suis pas obsédée. »

« Non, mais… tu t'es entendue ? Je veux dire… oh, tu l'aimes parce qu'il t'a sauvé la vie, c'est ça ? Ah, pardon, mais c'est moi qui aie détruit ce stupide journal qui aspirait ton énergie vitale. Tuer le basilic, ce n'était pas te sauver la vie. Les nôtres, plutôt. Le bal de Noël, tu sais qui a dansé au bal de Noël ? Beaucoup de monde. Doivent-ils finir ensemble ? Prends Harry et Mione, ils ont valsé d'une des manières les plus douces, d'accord, un peu comme toi et Neville avez partagé de la tendresse toute la soirée, et donc, tu penses qu'ils sont faits l'un pour l'autre ? Alors, c'est bien qu'il soit ton ami, mais de là à… s'il faut sortir avec nos meilleurs amis, Harry et Nev sont parfaits. Tu l'aimes parce qu'il est le garçon-qui-a-survécu ? Tu l'aimes du premier regard ? C'est pas comme ça. »

« Tu ne crois pas au coup de foudre, c'est ça ? Je ne vois pas le problème. »

« C'est toute ta manière de le dire qui me pose problème. Prends Ronald, par exemple, tu penses qu'il décrirait Mione comme ça ? Non, il dirait que… il ne l'appréciait pas au début, il est vrai, elle était agaçante, et loin d'être la plus attirante. Et puis, il l'a côtoyé, et petit à petit, il s'est rendu compte que son rire enjolivait l'air d'un son cristallin, que son sourire brillait tel un diamant, son intelligence vive ne cesse d'impressionner, qu'elle peut être énergique et douce, et même si elle est très bornée, et refuse souvent de reconnaître ses erreurs ou celles des livres qu'elle tient en main, elle a toujours cet esprit époustouflant qui nous ferait aimer les plus grands laiderons. Elle a toujours ses défauts, et elle veut toujours être meilleure que les autres, très fière, mais on l'aime autant pour ces mauvais caractères que pour les bons. Elle est aussi devenue une jeune femme qu'un œil masculin ne pourrait que vouloir contempler, et ses cheveux hirsutes qu'on croirait repoussants lui donnent le caractère d'une vraie sorcière. »

Ginny posa sa main sur celle de Draco. « Tu peux t'arrêter là. », s'amusa-t-elle. « Pourquoi essayes-tu de me dire que je n'aime pas Neville ? Il est parfait. Et j'ai toujours tout fait pour le comprendre au mieux, savoir ce dont il avait besoin et… »

« Gin, je ne peux nier que Nev soit extraordinaire, mais ça ne veut pas dire que toutes les filles l'auront. Tu penses vraiment le connaître de bout en bout ? Où sera alors le plaisir de découvrir de nouvelles petites facettes, en bien ou en mal ? Quel point commun as-tu avec Nev ? »

« Des… points communs ? »

Draco enleva soudainement sa main, excédé. « Oui, des points communs ! Comment veux-tu construire une relation si vous n'avez aucun intérêt à partager ? Il est passionné de botanique, et passerait s'il le pouvait tout son temps avec les plantes ou avec les créatures les plus dangereuses que Hagrid pourrait lui avoir présenté. C'est un autre acabit qu'Arnold. Et toi, qu'est-ce que tu aimes vraiment ? Quelque chose qui te correspond, pas ce à quoi tu te plies pour t'associer avec un coup de cœur. »

Ginny réfléchit un moment. Son boursoufflet vint se frotter à la main de Draco, à la recherche de caresse. Le blond toisa l'animal. « Arnold, je vais te lancer un sort. », déclara-t-il très sérieusement. La petite boule de poil ne bougea plus, et le fixa. N'y tenant plus, les deux adolescents rirent un peu. « N'importe quoi. », soupira le Malfoy en récupérant l'animal dans ses mains. Il la déposa sur le sommet du crâne de Ginny. « Couronne parfaite. », prétendit-il, fier de lui.

Elle le regarda de travers, luttant entre l'envie de rire ou de lui lancer un sort. « Le Quidditch. », déclara-t-elle enfin.

« Le Quidditch ? » Il n'en revenait pas de l'écart qu'il y avait entre les intérêts de l'un et de l'autre. Et ils avaient tous pensé qu'ils étaient le couple parfait. « Misère. Alors tu sais ce qu'il te reste à faire. Trouve quelqu'un qui partage la même passion que toi, avec qui tu peux voler vers la liberté, ou qu'importe les sensations que le vol te procure. Cherche par là, et pas par le talent du sorcier ou sa célébrité. Tu es plus intelligente qu'une de ces poules caquetantes. Même si tu ne rattraperas jamais Hermione. »

« On va dire que je n'ai pas entendu ce dernier commentaire, n'est-ce pas ? » Soudainement, elle se pencha pour déposer un baiser sur sa joue. « Merci, Drac. » Elle se leva, toute guillerette. « Je vais voir Harry. »

Elle s'éloigna, sous le regard stupéfié de Draco.


Les quatre Gryffondor entrèrent dans l'auberge, où Slughorn discutait au comptoir. Harry choisit lui-même la table, où il se plaça face au bar là où il jugeait que le professeur pourrait le voir, et demanda à Neville de se mettre en face de lui. Ron et Hermione semblèrent intrigués par la dernière requête, mais n'en dirent rien. Le roux se mit à côté du nouveau prodige de potion, et la première de classe à gauche du garçon-qui-avait-survécu.

« Commençons par nous prendre des boissons avant de chercher Draco et Ginny. », proposa Harry.

Ron persistait dans ses râleries. « Ils ne se joindront pas à une table de quatre. Ils sont où d'ailleurs ? »

« On les trouvera. Mais il n'y a pas d'urgences. »

Neville se leva pour aller chercher les boissons de tout le monde.

« Et rapporte une bouteille, aussi ! » appela Ron après quelques pas de Neville. Harry et Hermione le toisèrent. « Bah quoi ? Il fait froid, faut bien trouver des moyens de se réchauffer. » Alors que son regard passait à l'un et l'autre de ses amis, il s'échauffa soudainement. « Oh le fils de… »

« Ronald ! » s'outragea Hermione à voix bien forte. « Qu'est-ce qui te prend ? »

Les yeux de l'adolescent ne quittaient pas le coin reculé qu'il avait en visuel direct en diagonale de leur table. Il ne l'aurait sans doute pas remarqué si Neville était encore là. « Je les ai trouvés. », informa-t-il avec une sombre expression sur le visage. Ses deux amis tournèrent la tête. Harry rit. Ron tourna la tête vers lui avec énervement.

« Désolé. », s'excusa le brun. « Il faut admettre que ta réaction est excessive : ils discutent, c'est tout. »

« Ils discutent ? Tu sais pas où ils sont ? C'est le coin des amoureux ! »

« Oh. »

« Oh, oui ! »

« Il n'y a pas de problèmes. », prétendit doucement Hermione avec un regard hésitant sans cesse attiré par le duo plus loin, et un pincement au cœur. « Ils discutent, c'est tout. »

« Ils discutent, c'est tout ? » répéta Ron, sidéré.

À cet instant, Neville posait le plateau rempli des boisons de chacun, des bièraubeurres bien chaudes, servies dans des chopes débordantes de mousses, ainsi que deux bouteilles supplémentaires. « Que s'est-il passé ? » demanda-t-il calmement tout en distribuant la commande, les deux bouteilles au centre de la table.

« Malfoy tripote ma sœur. Tu peux te décaler un peu que je puisse voir ? »

Neville se retourna. « Ginny a la main posée sur celle de Draco, pas l'inverse. », commenta-t-il.

« Quoi ?! » s'étrangla Ron. Ils furent soudainement interrompus par l'arrivée surprenante de Slughorn.

« Oh, ça par exemple. Je suis heureux de vous trouver ici. »

Neville et Harry lui sourirent, et répondirent d'une même voix. « Bonjour professeur Slughorn. »

Harry alla plus loin. « C'est une surprise de vous voir ici, monsieur. »

« Les trois balais et moi sommes une histoire plus longue que je voudrais bien l'admettre. Pour tout dire, je l'ai connu quand c'était un balai ! Enfin, il y a une chose dont je voulais vous parler. J'ai l'habitude d'organiser des dîners pour quelques élèves triés sur le volet. J'ai déjà Melinda Bobbin, je ne sais pas si vous la connaissez ; sa famille possède une large chaîne d'apothicaires. Et saviez-vous que la mère de votre camarade Blaise Zabini était une très belle sorcière, qui a été mariée et veuve sept fois !, héritant à chaque fois d'une belle fortune. Mais ne parlons pas de ces choses-là. Harry, Neville, ça vous intéresserait de venir ? »

« Oui, bien sûr. », accepta sans difficulté Harry, même si l'idée de passer une soirée avec Zabini ne l'enchantait pas du tout.

« Ce serait avec plaisir, professeur. », déclara ensuite Neville. Il ne voyait pas vraiment ce qui intéressait Slughorn en Zabini, mais n'allait pas commenter.

« Merveilleux ! » L'homme se tourna vers Hermione. « Oh, et vous aussi, Granger. »

Elle faillit s'étouffer avec sa bièreaubeurre. Elle n'allait cependant pas laisser échapper l'occasion de se démarquer, surtout si Harry et Neville étaient conviés et avaient accepté. « J'en serais honorée. », déclara-t-elle.

« Très bien, je vous dis à… »

« Elle l'a embrassé ! » s'exclama Ron. Ils tournèrent tous leur attention, même Slughorn, vers l'endroit que le roux fixait. Ginny s'approchait en sautillant vers eux, son boursoufflet sur son épaule gauche. Elle regardait Harry, mais n'eut pas l'occasion de dire un mot avant que Ron ne se lève, saisissant une des bouteilles dans sa main et la levant bien haut. « Je vais lui apprendre à bécoter ma sœur ! Viens te battre, Malfoy ! » cria-t-il, ce qui attira l'attention de plusieurs personnes alentour.

Draco, qui s'apprêtait à partir s'occuper de ses affaires urgentes, se retourna vers le roux, éberlué.

« Reducto ! » lança Ginny avec force. La bouteille fut réduite en très fine poussière, et Ron ouvrit sa main en panique, de peur d'être réduit lui aussi en cendre. Il devint blême d'un coup. « Il me donnait juste des conseils ! » riposta-t-elle. Draco en profita pour s'éloigner discrètement, aperçu uniquement par Harry.

Slughorn tenta de calmer le frère et la sœur, sans grand succès. En désespoir de cause, il eut recours à la menace. « Wallenbee, vous devriez vous ressaisir, ou je serais contraint d'informer le professeur McGonagall de votre comportement à Pré-au-lard, et elle vous enlèvera le privilège de vous y rendre sans hésitation. » À cela, Ron se renfrogna enfin, assis dans son siège, bras croisés. Slughorn se retourna vers Ginny, grand sourire. « C'était un sort très impressionnant, mademoiselle… désolé, j'ai oublié votre nom. »

« Ginny Weasley, la sœur de Wallenbee. »

« J'ai rarement vu cette malédiction aussi bien performée. Vous êtes très douée de votre baguette. Vous savez en faire d'autres ? »

« Je sais très bien me battre en duel, monsieur. »

Harry approuva. « Les sorts de Ginny sont extraordinaires. Même ses frères ont peur d'elle. »

« C'est pas vrai ! » protesta Ron.

La rousse lui lança un regard noir. « Tu veux tester mon maléfice de chauve-furie ? »

Ron blêmit. « Sans façon. », admit-il précipitamment. Les jumeaux en avaient déjà été victimes, et ce n'était pas le genre d'expérience qu'il souhaitait.

Slughorn la regarda attentivement. « Je suis surpris, Miss Weasley, vous étiez avec Draco Malfoy, c'est cela ? Le fils de Lucius. »

« Oui, mais nous discutions simplement de… certains conseils qu'il pouvait me donner, et il n'y a strictement rien entre nous. Nous sommes juste amis, je ne vois pas ce qui pourrait faire penser le contraire à Ronald. »

« Que diriez-vous de vous joindre à un dîner que j'organise avec certains étudiants. Harry, Neville et Granger font partie de la fête. »

« Oh, ce serait avec plaisir. »

« Tout le monde va y aller sauf moi ?! » s'étrangla Ron.

« Oh, non, pas Draco. Vous aurez l'occasion de vous tenir compagnie tous les deux. », le provoqua Harry. « Et de vous expliquer. »

Draco arrivait par le côté, et se plaça debout en bout de table entre Hermione et Ron. « Si Weasley le veut vraiment, je peux me battre contre lui. À un duel de sorcier, par contre, pas de poireau de taverne. Je pense que nous savons tous déjà le résultat. Je gagne. »

« Où tu étais ? » inquisitionna Ron.

« Aux toilettes. Vomir. À cause de tes allégations. »

Slughorn décida que c'était le moment pour lui de partir. « Bon, eh bien, je vais vous laisser. Évitez de causer du chahut dans les parages, sinon vous aurez des ennuis à l'école. Et attendez mon hibou pour la date de la soirée. »

Sur ce, l'homme s'éloigna. Draco jugea également qu'il n'avait plus rien à faire ici, et annonça quitter les lieux pour rentrer à Poudlard, ce que Ginny approuva. Bièreaubeurres terminées, les autres décidèrent tous de sortir se promener, et donc d'accompagner les deux autres sur un bout de chemin.