Quelques instants plus tard, Dudley était de retour dans le garage après avoir fait un détour par la cuisine pour prendre deux canettes de bière. Tout en tendant une à son Père, il s'installa tranquillement sur l'une des malles.
-« Harry ne devrait pas tarder, je pense ».
-« Oui j'aimerais autant qu'il ne tarde pas parce que si Allison arrive, je crois qu'on va se faire engueuler. Et heureusement que j'ai profité que ta mère était occupée. Sinon, je ne te fait pas de dessin. Enfin bon, ce qui est fait est fait. Maintenant, c'est à la grâce de Dieu, comme on dit ».
Mais les choses se déroulait plus vite que ne l'aurait souhaité Vernon Dursley, beaucoup plus vite même. Le hibou devait voler jusqu'à Londres. Et même aidé par la magie, il était certain en lui-même qu'il arriverait bien trop tard à Londres, que la situation allait rapidement devenir gênante et qu'il allait devoir la gérer sans l'aide de Harry.
Le destin était décidemment facétieux, se dit-il. Pendant toutes ces années, depuis ce soir de novembre 1981 où il avait découvert son neveu déposé sur le seuil de sa porte, enveloppé dans d'épaisses couvertures et le front zébré d'une cicatrice sanguinolente, il avait tout fait pour chasser la magie de sa vie, n'hésitant pas à nier les évidences les plus criantes. Et maintenant, sa petite fille adorée était une sorcière et lui, après avoir passé des années à clamer haut et fort que la magie, çà n'existait pas, en quelques mois il avait demandé à son neveu de faire usage de la magie pour protéger Dudley et sa famille, vu son fils devenir un autre homme et ses petits-enfants, tous ses petits-enfants, ses précieux trésors comme ils les appelaient, présenter des signes objectifs de pouvoirs magiques. Et aujourd'hui, en toute conscience, il avait enfreint une loi magique et se trouvait piégé comme une mouche prise sur du papier attrape-mouches.
Malgré ses prières muettes, Harry n'arrivait toujours pas. Et tout aussi impatient, ou inquiet, Dudley venait pour la dixième fois de ressortir pour guetter l'arrivée de son cousin. Et enfin, seul dans le garage, Vernon sut que l'heure de vérité avait sonné.
Tout d'abord, ce fut Majestic qui jusqu'à présent c'était installé sur ses genoux et ronronnait a qui mieux-mieux, comme pour le tranquilliser et qui sauta soudainement pour se diriger vers l'entrée et la chatière qui lui permettait d'aller et de venir à sa guise. Devant la maison, une voiture venait de se garer et il entendit le claquement des portières, puis plusieurs voix. Tout d'abord la voix cristalline d'Agatha, celle de sa maman qui interpellait Dudley, et en arrière plan une voix féminine qui lui disait quelque chose mais qu'il ne parvenait pas à identifier
-« C'est vraiment une drôle de coïncidence. Tiens Dudley, regarde qui nous avons rencontré près de Leadenhall Market ».
-« Ginny ! Ma cousine adorée ! Vraiment tu ne pouvais tomber mieux. Je viens d'envoyer un message à Harry, mais j'ai peur qu'il ne lui faille un peu de temps pour nous rejoindre ».
Et pour Vernon, tout devint subitement clair. Sa belle fille avait rencontré par hasard l'épouse d'Harry pendant qu'elle faisait des courses à Londres. Dans quelques minutes, Harry allait arriver. Il ne manquait plus que Pétunia pour que le tableau soit complet. Heureusement, il s'en souvenait bien car il en avait profité pour planifier la récupération des malles, elle devait passer la journée à aider avec d'autres bénévoles de la paroisse une famille qui venait de tout perdre dans un incendie. Donc de ce côté-là, il était tranquille, du moins pour un moment.
Pendant ce temps, Lily et Agatha, à qui Majestic avait expliqué en quelques miaulements la situation, avaient traversé le hall d'entrée pour se diriger vers le garage. Précairement installé sur caisse posée devant la malle, Vernon semblait en proie à la plus grande des confusions et cherchait désespérément les mots pour expliquer à sa petite fille ce qu'il avait voulu faire. Mais ce fut Agatha qui sut trouver les mots.
-« C'est les affaires de la sœur de Mamy, n'est-ce pas ». Le ton de la fillette était plus affirmatif qu'interrogatif tandis qu'elle regardait les deux grosses malles cerclées de bandages de cuivre ternis par le temps. « Mais pourquoi t'es resté coincé en essayant de l'ouvrir ? Elles n'étaient quand même pas piégée ces malles ? »
-« Non, ne t'inquiète pas, elles n'étaient pas piégées. Non, Je pense que ta grand-tante avait simplement pris quelques précautions élémentaires contre un voleur ou une personne mal attentionnée. Mais la mère de Lily va pouvoir arranger tout çà en deux coups de baguette magique » et il ponctua sa phrase d'un clin d'œil, histoire de rassurer Agatha qui restait néanmoins perplexe.
Dans le hall, Dudley avait expliqué en quelques mots la situation à Ginny qui le suivi dans le garage, aussitôt rejoint par Allison.
Toujours assis sur sa caisse, la main toujours désespérément collée à la perceuse, la perceuse toujours coincée dans le minuscule cadenas, Vernon n'en menait pas large devant toute la famille réunie. Mais Ginny s'était aussi avancée et de sa baguette elle avait successivement tapoté le cadenas, puis la perceuse et enfin la main de Vernon.
-« Vous allez sentir la chaleur revenir dans votre main. J'ai fait çà pour éviter que les fourmillements ne deviennent par trop désagréables », puis répondant au regard interrogatif de Vernon « C'est tout ce que je peux faire pour l'heure. Même si je suis l'épouse d'Harry, lui seul peut lever le sortilège de protection que sa Mère avait mis en place ».
Mémé s'il se sentait effectivement soudainement beaucoup mieux, Vernon aurait quand même beaucoup donné pour que cette situation gênante prenne fin. Et pour la première fois de sa vie, il était impatient de l'arrivée d'Harry.
-« Il faut le temps que le hibou de Dudley arrive jusqu'à lui. Je sais que cet après-midi il avait des dossiers à régler au Ministère. Donc à moins d'une surprise de dernière minute, il ne devrait pas tarder ». Elle allait ajouter que parfois son travail l'obligeait parfois à se rendre jusqu'à Azkaban quand la sonnette retentit. Quelques secondes plus tard, Dudley accompagné de Harry étaient devant un Vernon qui se sentait rougir jusqu'à la pointe des cheveux.
-« Harry, je crois que je n'ai pas encore complètement assimilé vos règles, et j'ai oublié toute mon éducation au point de me comporter comme un vulgaire voleur. Ton cousin avait raison depuis le départ. J'aurais dû te demander plutôt que de prendre cette regrettable initiative » marmonna Vernon. « Mais je t'assure que je ne voulais pas te voler quoique ce soit. C'est pour Agatha que je m'inquiète. Elle ne connait rien à ton monde, rien à la magie. Elle qui était si brillante en classe. Et pour lui éviter d'arriver dans votre école comme un de ses enfants qui arrivent du bout du monde sans parler ne serait-ce qu'un mot de notre langue, je me retrouve piégé comme ce crétin de Polkiss. D'après ce que m'a dit ton épouse, ta mère avait mis en place une forme d'antivol magique. C'est çà ? ».
Harry pouvait sentir le désespoir de son oncle, et à ses côté, Ginny eu une petit geste du coude pour le forcer à réagir car elle sentait bien que lui aussi était quelque peu décontenancé par la situation et par la tournure que prenaient les évènements. Son oncle n'était décidément plus le magicophobe primaire, secondaire, tertiaire, technique et viscéral qu'il avait côtoyé et dont il avait subit les brimades pendant toute son enfance.
Après un bref instant, il sorti enfin sa baguette pour tapoter le cadenas qui s'ouvrit avec un claquement étonnamment sonore pour un si petit morceau de métal. Dans le même temps, la perceuse tombait sur le sol tandis que Vernon enfin libéré faisait bouger ses doigts engourdis après ces longues minutes d'attente tout en se redressant pour faire face à Harry avant de designer les malles d'un geste de la main tout en restant silencieux, comme s'il cherchait les mots justes. Quand il ouvrit la bouche, sa voix était étrange, comme si tout se bousculait dans son esprit.
-« On aurait dû commencer par là. On aurait pu commencer par là si je n'avais pas été le roi des imbéciles. Mais maintenant, quelque soit ton choix, je ne te jugerai pas ». Tandis qu'il s'écartait pour laisser Harry face à la malle, Agatha s'était serré contre lui et il sentait sa main qui serrait la sienne, comme pour le rassurer.
Harry restât de longues secondes les mains posées sur le couvercle de la malle, les yeux fermés. Après un bref instant, il prit une profonde inspiration puis fit jouer les verrous avant de relever le couvercle. La première chose qu'il vit, c'est une grande enveloppe avec simplement écris dessus « Pour Harry ». Machinalement, il fit sauter le cachet de cire rouge et allait pour ouvrir l'enveloppe d'une main tremblante lorsqu'il réalisa que ce n'était peut être pas le moment. A ses côtés, Ginny avait aussi remarqué son trouble et lui murmura à l'oreille « Attendons d'être rentrés à la maison. Je sais combien cette lettre est importante pour toi, mais pour l'instant il faut penser à Lily, et aussi à Agatha ».
Harry ne dit rien mais acquiesça simplement d'un bref hochement de la tête avant de glisser l'enveloppe dans la poche intérieure de sa veste. Reportant son attention sur la malle et son contenu, la première chose qu'il remarquât, au dessus des livres et de plusieurs boites soigneusement fermées, ce fut une boite oblongue d'une trentaine de centimètres. En caractères dorés patinés par le temps, on pouvait lire « Ollivander, fabricant de baguettes magiques à Londres, depuis 382 av. JC ».
Harry ce tourna vers Ginny, en proie à la plus grande confusion. A cet instant, il ne savait plus quoi faire. Cet étui, il en était certain, contenait la baguette de sa Mère. « Saule, 25,6 cm, souple et rapide (excellente pour les enchantements) » comme le lui avait dit Ollivander bien des années auparavant lors de sa première visite au Chemin de Traverse. Mais il retenait son geste tant il avait peur de craquer et fondre en larme. Pourtant il devait être fort, fort pour Ginny, fort pour Lily, fort pour Agatha.
Finalement, ce fut la petite Lily qui prit la décision d'ouvrir la boite. Avant qu'Harry et Ginny n'aient pu faire un geste, elle l'ouvrit précautionneusement. A l'intérieur, posée sur un rembourrage de tissus gris, la baguette semblait avoir été rangée seulement quelques instants auparavant. Elle brillait légèrement à la lumière de l'ampoule du garage et le bois clair dégageait une délicate odeur de cire, comme si la baguette avait été cirée peu de temps auparavant. Après un instant d'hésitation, elle sortit délicatement la baguette avant de l'empoigner fermement de sa main droite. A peine avait elle esquissé un geste qu'une pluie d'étincelles de mit à jaillir de la baguette. A la fois surprise et émerveillée, elle restât un instant bouche bée.
-« Mince alors ! La baguette ! Elle m'a choisie ? » Fit-elle en se tournant vers ses parents, puis vers Agatha, puis Vernon et enfin ses parents qui essayaient de comprendre ce qui se passait exactement.
Vernon, lui, avait remarqué qu'Harry était en proie à une forte émotion et à ses côtés, Ginny s'était accroupie pour serrer fort sa fille dans ses bras.
-« Je ne comprends rien à cette histoire de baguettes. Normalement, un objet ne peut pas choisir. C'est inanimé, non ? Cette baguette aurait tout aussi bien pu convenir à Agatha. Mais j'imagine, Harry tu m'arrêtes si je dis n'importe quoi, j'imagine que toutes ces histoires de magie, c'est un peu comme des connexions qui se font ou pas dans une machine. Non ? Un peu comme des gènes qui vont ensemble. »
Harry ne put balbutier qu'un « Oui, mais c'est un peu plus complexe, surtout la question des baguettes » tandis que Dudley essayer de réprimer un fou-rire. Son père avait beau enfin accepter la magie, il avait encore beaucoup à apprendre. Mais tout cela viendrait en temps et en heure, il en était persuadé.
