Il était près de 3 heures du matin lorsque Minerva Mc Gonagall transplana vers Little Winging. Elle n'avait pas voulu attendre de recevoir l'éventuel dossier des traceurs pour se rendre compte par elle-même de la situation. Si la petite Agatha était traitée comme l'avait été traité Harry autrefois, et c'était là sa plus grande crainte, il allait falloir agir sans perdre de temps et mettre dans le tourbillon le Bureau de Protection des Enfants Nés-Moldus.
La petite rue était déserte et elle eut l'impression de revenir plus de trente ans en arrière, à cette nuit de novembre 1981 où elle avait à regret laissé Albus Dumbledore confier Harry à son oncle et sa tante. La seule famille qui lui restait et les plus horribles moldus qu'elle ait jamais vus.
Trente ans après, rien n'avait changé. Les voitures modernes misent à part, c'était toujours le même lotissement pour moldus, les mêmes alignements de maisons de briques toutes semblables les unes au autres. A première vue, le 4, Privett Drive lui aussi n'avait pas changé, mais à première vue seulement. En y regardant de plus prêt, elle vit que la maison n'était plus tout à fait la même. Ce n'était plus une banale maison accolée à sa voisine. Elle avait été réunie à sa voisine et un grand porche couvrait le devant de la porte d'entrée au linteau de laquelle - mais oui, c'était bien une sorcière – une sorcière stylisée était accrochée. C'était une sorcière de pacotille comme les aimaient les moldus. Une sorcière catalane sortie du folklore des moldus qui ignoraient tout de la réalité du monde de la magie.
Elle resta un long instant à contempler cette sorcière montée sur un balai dont les brindilles étaient peintes aux couleurs du drapeau Catalan. Pour un peu, on aurait pu croire que les occupants de la maison étaient supporters de l'équipe nationale de quidditch de Catalogne, les Dracs. Une évocation du monde magique sur la maison des moldus les plus magicophobes de tout le Royaume-Uni, c'était assurément une surprise pour la Directrice de Poudlard. Mais elle était loin d'imaginer que ce n'était que la première d'une longue série.
De la rue déserte à cette heure, et même en s'avançant jusqu'aux fenêtres de rez-de-chaussée, rien ne lui donnait une quelconque indication quant à ce qui se pouvait bien se passer dans la famille Dursley. Et profitant de l'obscurité, elle se métamorphosa en chat afin de pouvoir explorer les abords de la maison et en apprendre plus sur la petite Agatha.
Sous son apparence de chat, ses sens lui disaient qu'elle devait faire preuve de la plus grande prudence. De nombreux chats avaient leurs habitudes dans cette maison. Pour peu qu'ils aient la volonté ferme de chasser tout intrus de leur territoire, son inspection risquait de tourner court car elle n'avait pas envie de réveiller toute la maison, et le voisinage avec.
-« Plusieurs chats, mais pas seulement. Il y a autre chose qui a ses habitudes dans ce jardin, et peut-être cette maison » se dit-elle en elle-même. Une étrange odeur qu'elle n'arrivait pas à identifier clairement mais qui toutefois ne lui était pas totalement inconnue. « Quoiqu'il en soit, je vais devoir faire attention ». Et sur cette pensée, elle se détourna de la chatière qui, au bas de la porte-fenêtre, permettait d'entrer dans la maison pour entamer un tour des fenêtres du rez-de-chaussée. Mais ses premières observations ne lui apprirent rien de spécial, où pour être plus précis, aucun élément ne lui donnait d'information concrète sur le sort réservé à la petite Agatha. Certes, elle pouvait voir que l'escalier qui menait à l'étage avait été remanié de fond en comble et ne recelait plus de placard caché. Mais en y regardant de plus, une porte entrouverte dans la cuisine attira son attention car elle laissait voir l'amorce d'une descente d'escalier.
Une cave ! Harry n'avait jamais parlé d'une cave au 4, Privet Drive et qui sait ce que ces horribles moldus avaient bien pu imaginer si à nouveau la magie se manifestait dans la maison.
-« Par Merlin, il doit bien y avoir un soupirail, ou une aération quelque part. Toutes les caves en ont une » et elle entreprit d'explorer avec méticulosité le tour de la maison, se faufilant derrières les massifs de fleurs et les arbustes. Après quelques instants, elle découvrit une petite ouverture grillagée derrière un massif d'agapanthes. Le nez contre la grille, elle entreprit d'analyser les odeurs portées par l'air frais qui montait de la cave.
-« Des bouteilles de vin, c'est certain. Des fruits et des légumes aussi » puis après un instant de réflexion et un intense soupir de soulagement « Et pas d'enfant enfermé contre son gré dans cette cave, c'est déjà ça. Le placard sous l'escalier n'existant plus, j'ose espérer que cette petite est traitée convenablement. Maintenant, voyons ce qui se passe à l'étage ». Et sur ce, elle entreprit d'escalader la pergola que recouvrait une glycine pour accéder à la terrasse et aux fenêtres du premier étage tout en se disant qu'elle avait passé l'âge de faire ce genre de cascade.
Une fois franchi l'enchevêtrement de feuilles et de fleurs bleues qui emplissaient l'air de leur doux parfum, la terrasse lui réservait une nouvelle surprise. Sur la partie gauche, une volière était installée, profitant de l'ombre des arbres avoisinants. Contre toute attente, elle ne servait pas d'abri aux habituels oiseaux prisés par les moldus, perruches et autres tourterelles. A la place, elle regroupait plusieurs niches de tailles variables et contrairement aux volières moldues, elle n'était pas complètement grillagée, permettant aux occupants d'aller et venir à leur guise. Et le premier occupant qu'elle vit était une petite chouette chevêche. Tranquillement installée devant une des alvéoles, l'oiseau délaissa son repas, une petite chauve-souris, pour observer ce chat qu'elle ne reconnaissait pas.
La Directrice de Poudlard allait se diriger vers cette chouette inattendue quand son attention fut attirée par une lueur qui semblait aller et venir dans la chambre la plus à droite. En un instant, elle finit de traverser la terrasse pour se dresser contre la porte fenêtre et découvrir quelle était la cause de cette lueur changeante. C'était la chambre des parents, mais il y avait aussi un petit lit blanc. Et de ce petit lit émanaient des boules lumineuses qui dansaient autour du lit. Après un instant, deux petites mains joufflues prirent appui sur le bord du lit, vite suivies pas une petite tête qui observait avec émerveillement les lueurs qui envahissaient à présent l'ensemble de la pièce.
-« La petite Agatha n'est visiblement pas la seule à avoir des pouvoirs magiques dans cette famille » ne put elle s'empêcher de penser en son for intérieur. Et elle allait pour passer aux autres fenêtres lorsqu'une silhouette se redressa sur le bord du lit. A la carrure, elle devina qu'il s'agissait du cousin de Harry, celui la même qui avait un jour fait les frais des facéties de Hagrid et des jumeaux Weasley. Et elle retint son souffle car si quelque chose devait se produire, c'était maintenant ou jamais, et devant ses yeux. Heureusement pour elle, la fenêtre était légèrement entrebâillée, lui permettant d'entendre tout ce qui allait se dérouler sous ses yeux.
-Est beau, hein ? Est beau.
-Oui, Andrew, c'est magnifique, répondit Dudley. Mais maintenant, il faut faire dodo, compris ? Et il prit l'enfant dans ses bras pour le câliner quelques instants avant de le recoucher et de le recouvrir.
-Faites des gosses, qu'ils disaient, murmura t'il d'un ton amusé avant de se retourner vers la fenêtre avec l'impression qu'on l'observait. Non pas que la présence d'un chat le surprenne, mais à cet instant, il avait la furieuse impression d'être observé non pas par un chat, mais par un humain. Et sur le rebord, effectivement Minerva Mc Gonagall regardait fixement l'homme qui fut un jour de ceux qui brutalisaient Harry, l'odieux rejeton d'une odieuse famille.
Il s'approcha de la fenêtre pour l'entrouvrir et faire une caresse à ce chat qu'il ne reconnaissait pas comme un des protégés de sa fille.
-Toi, tu es visiblement nouveau dans le quartier. Rassure-toi, fit-il tandis que la Directrice de Poudlard reculait instinctivement, tu n'as rien à craindre dans cette maison. Ni de moi, ni du reste de la famille, mais soit prudent avec les autres chats de la maison, ils ont tendance à surveiller jalousement leur territoire. Maintenant, file ! Moi, je retourne pioncer.
Et tandis que Dudley refermait la fenêtre, Minerva Mc Gonagall entreprit d'inspecter les autres fenêtres tout en se disant que visiblement des choses avaient changé dans cette maison. Mais la petite Agatha était-elle en sécurité ? Là était la question. Certes elle n'était pas visiblement la seule à faire partie du monde magique, elle venait d'en avoir la preuve. De nombreux signes lui disaient que l'évocation de la magie n'était pas un sujet tabou dans cette maison. Mais, elle savait aussi que l'âme humaine, moldue ou magique d'ailleurs, pouvait receler des monceaux de noirceur insoupçonnés et insoupçonnables. Et maintenant, elle cherchait en toute hâte la chambre de la petite Agatha.
Les deux fenêtres suivantes ne lui apprirent rien de bien intéressant. Les chambres de deux jeunes garçons, visiblement mordus de football comme beaucoup d'enfants moldus, semblables en cela aux enfants sorciers qui soutenaient avec autant de ferveur leur équipe de quidditch préférée.
Restait la dernière porte-fenêtre, celle-là même qui était la plus proche de la volière. Intérieurement, elle poussa un ouf de soulagement. La chambre de la petite Agatha était tout ce qu'il ya de plus normale, semblable à toutes les chambres des fillettes de son âge. Des jouets, un bureau et des étagères chargées de livres. Mais en tout cas, aucun élément physique ne lui donnait à craindre que la petite ne soit maltraitée. C'était déjà çà.
Absorbé par l'observation minutieuse des lieux, elle n'avait pas prêté attention à la peluche posée sur le lit, aux pieds d'Agatha, préférant rechercher un éventuel indice de maltraitance de la fillette. Et ce ne fut qu'au bout de quelques minutes, quand la peluche s'étira, qu'elle réalisa que c'était un chat, un chat de très grande taille qui se redressa brusquement lorsqu'il sentit sa présence. La Directrice de Poudlard resta un instant, immobile, comme surprise de la présence de ce chat pas ordinaire, avant de réaliser qu'il était la cause de cette odeur familière qu'elle avait eu du mal à identifier tant elle était préoccupée par la sécurité de la petite Agatha.
-Un demi-fléreur ! J'aurais dû y penser. C'était donc çà que j'avais remarqué sans pouvoir l'identifier en faisant le tour de la maison. Maintenant, il va falloir faire vite car aussi sur que 19 noises font une mornille, je vais rapidement me faire démasquer. Nulle besoin de déclencher une émeute. Maintenant, je file.
Et sur cette pensée elle entreprit de redescendre en toute hâte la pergola tandis que dans la maison, Majestic dévalait l'escalier pour rameuter ses congénères et chasser l'intrus. A l'instant même ou elle posait la patte sur la terrasse, elle entendit t le bruit de la chatière qui laissait le passage à un, puis deux, puis trois chats qui se ruèrent aussitôt vers elle. Pour la discrétion, s'était raté ! Maintenant, il lui fallait quitter les lieux au plus vite en essayant de ne pas réveiller tout le quartier. Elle n'avait fait que quelques foulées en direction de la cabane de jardin qu'elle avait entrevue dans la pénombre et d'où elle pensait pouvoir transplaner vers Poudlard quand Majestic et ses disciples parvinrent à la rejoindre et à l'encercler, menaçants. L'espace d'un instants, ils se firent face, éclairés par la Lune qui apparaissait et disparaissait entre les nuages. Sous sa forme de chat, elle était dans l'impossibilité d'invoquer le moindre sortilège et elle profita qu'un des chats se tournait vers celui qui semblait être leur chef, le demi-fléreur vu dans la chambre de la petite Agatha, pour sauter le plus haut et le plus loin possible afin de se rapprocher au plus près de la cabane.
A peine avait elle atteint l'abri des arbres devant la cabane que les chats l'entouraient de nouveau, et cette fois plus menaçants. Poil hérissé, oreilles rabattues en arrière, tous les signaux lui indiquaient que si elle restait plus longtemps sous sa forme féline, elle allait passer un sale quart d'heure. Adossée à la cabane, elle regarda les chats en souriant intérieurement. On allait voir ce que l'on allait voir. Et sur cette pensée, elle reprit son apparence humaine, provoquant la panique des chats qui fuirent à travers le jardin, comme si le diable était à leurs trousses.
