Hello !

Une note d'auteure pour répondre aux commentaires en mode invité :

Pixiel: Je suis ravie de te revoir et de te lire . Oui… Avec Georgiana, Lydia… et Wickham dans les parages, c'est vrai que ça fait un peu peur xD. Je souhaite bien venir à bout cette histoire et ne pas m'y éterniser… du mieux que je peux. C'est dommage de voir des fics inachevées.

P: Bonjour P. J'avoue qu'en lisant votre message, je suis assez troublée D: . Cette version FR devrait être la seule version de cette fic puisque cette fanfiction est de moi. Est-il possible de connaître plus de précisions sur ce que vous dites s'il vous plait, notamment sur l'histoire en anglais dont vous parlez. J'espère vraiment que vous verrez mon message. Merci.

Samaben et Guest: D'accord, c'est noté :)

Vos préférences vont visiblement vers les appellations en anglais qui seront donc gardées pour la fic. Merci à toutes pour vos réponses.

Et bienvenue aux nouveaux followers.


Chapitre 14 : Désirs et désagréments

Elizabeth Bennet était confortablement installée dans sa baignoire, prenant plaisir au bien-être que le bain chaud lui procurait. Elle se détendit, soulagée de quelques fatigues qu'elle avait pu ressentir. La tête appuyée sur la partie supérieure de la baignoire, la jeune femme alla fermer les yeux lorsque la porte de la salle d'eau s'ouvrit.

Elle sursauta, embarrassée, non moins contrariée d'être ainsi interrompue dans un tel moment, et ne fut pas aux bords de sa surprise en découvrant la personne qui entra.

— Mr Darcy !

La jeune femme croisa automatiquement les deux bras sur sa poitrine découverte, tout en s'enfonçant dans l'eau, rouge de honte.(1)

— Mais… Vous ne devez pas être là... ! Comment êtes-vous entré… ! s'exclama-t-elle dans un chuchotement, de plus en plus déconcertée et non moins troublée par les yeux d'un bleu profond fixés sur elle.

— Miss Elizabeth, répondit-il en refermant la porte, vous savez que j'ai vécu pendant des jours à Longbourn. Je connais désormais chaque recoin de cette demeure comme ma poche. Je me suis faufilé comme une petite souris pour vous rejoindre. Je tiens à vous rassurer que personne n'a remarqué mon entrée…

Elizabeth écarquilla les yeux de stupeur, ses pupilles dirigées vers la stature imposante de son voisin. Cette longue explication ne justifiait en rien au fait qu'il était là.

Faisant abstraction de toute éventuelle gêne qu'il put éprouver dans une telle situation, Mr Darcy se dirigea vers la jeune femme. Puis un genou à terre, il s'accroupit, les mains appuyées sur le bord de la baignoire.

— Il fallait absolument que je vous voie, dit-il en la regardant intensément dans les yeux.

Elizabeth déglutit. Elle voulut lui rappeler ardemment l'indécence de la situation et le risque qu'il prenait si jamais quelqu'un l'aperçevait dans cette pièce… Mais la jeune femme était tellement prise au dépourvu par l'attitude de l'homme qu'elle en oublia toute parole sensée pendant un instant, où ils se dévisagèrent.

— Mr Darcy…, je… ce serait un plaisir de… de vous parler, balbutia-t-elle en baissant les yeux, décontenancée par l'audace du jeune homme. Mais… Vous devez vraiment sortir… Accordez-moi d'abord un bref moment pour finir rapidement mon… bain… Vous pouvez m'attendre au salon…et…

Le jeune homme ne lui laissa pas le temps de continuer. Il prit doucement le menton de la jeune fille entre ses doigts, lui releva le visage, et commença à le caresser discrètement du bout de ses doigts. Elizabeth n'eut aucun choix que de soutenir son regard.

— Miss Elizabeth, pourquoi vous entêtez-vous tant à résister ? Dois-je vous rappeler que mon esprit a cohabité avec votre corps... Et que vous savez pertinemment que vous n'avez plus rien à me cacher... murmura-t-il. Et vous n'êtes pas sans le savoir que mon être, mon âme, mon cœur, tout de moi vous ont déjà appartenu depuis longtemps...

Elizabeth sentit son cœur palpiter à cette dernière déclaration qu'elle n'avait plus espéré réentendre de lui un jour.

— Monsieur…, ce genre de disposition n'a plus lieu de l'être, émit-elle toutefois, en tremblant. Et nous nous devons de respecter la convenance…

— Miss Elizabeth… Ces derniers jours ont été un vrai supplice, continua-t-il tout bas, en approchant ses lèvres si près qu'Elizabeth put ressentir le souffle frais et très léger du jeune homme sur son visage. Ne nous voilons plus la face… Il ne sert plus à rien de résister à ce que nous ressentons mutuellement… Je sais que je ne vous laisse pas indifférente... J'ai cru le comprendre au moins une fois... à Rosings... Dites-moi que je ne me suis pas fait d'illusions…

En dépit de la bouffée de plaisir qu'elle ressentait, Elizabeth avait la vague impression de ne plus vraiment reconnaître l'homme lui faisant face. Son attitude laissait croire qu'il était sous l'effet d'une forte dose d'une sorte d'excitant qui l'empêchait de ne plus être maître de lui-même, au mépris de toute règle de conduite, l'incitant à se laisser aller presque sans retenu à ses pulsions apparemment refoulées vainement depuis un moment…

Mais Elizabeth n'eut plus le temps de réfléchir longtemps…

Elle tressaillit de plaisir, sentant les lèvres du jeune homme commencer à effleurer délicatement et successivement sa tempe…, son front…, ses yeux…, ses joues…, son cou…

— Vous me semblez bien sûr de vous monsieur..., parvint-elle à murmurer.

— Eh bien… Si vous ne m'appréciez pas, prouvez-le-moi, chuchota-t-il contre la peau de la jeune fille, tout en continuant à explorer son visage.

— Monsieur…, vous ne me facilitez pas la tâche…, émit Elizabeth faiblement dans un frisson.

Ce fut la dernière phrase qu'elle parvint à dire avant de désister. Oubliant toute forme de raison, elle se laissa aller à l'envie qu'elle ne put visiblement plus réprimer. Elizabeth ferma les yeux. Elle devina sans peine l'intention du jeune homme. Elle ressaisit son buste, et releva ainsi la tête afin de lui offrir ses lèvres.

Leurs bouches n'étaient plus qu'à quelques millimètres de se toucher lorsque la jeune femme rouvrit les yeux.

Elle se retrouva aussitôt au sec dans le lit qu'elle partageait avec Jane, la pénombre de la nuit se faufilant à travers la fenêtre de leur chambre. Vêtue de sa chemise de nuit et au chaud sous sa couverture, elle rougit de honte à la pensée du songe qu'elle venait juste de faire. Et le malaise s'intensifia lorsqu'elle se rendit compte qu'elle voulait que le rêve se prolongea et ne s'arrêta pas ainsi. C'était si frustrant de rêver et de se réveiller après pour réaliser que tout n'était qu'illusion…

Le contact des lèvres et des mains du jeune homme, le désir intense qu'elle avait lu dans son regard pénétrant, le plaisir qu'elle avait ressenti… tout avait semblé si étrangement réel. L'engouement persistant qu'elle sentit tout au fond de son être à la partie la plus intime de son corps en cet instant précis, y faisait foi. Elle allait goûter à ses lèvres juste avant de se réveiller… Le rencontrer d'ici quelques heures ne l'aidait en rien à l'oublier, et ne fit que renforcer son agitation. Elizabeth mit les mains aux yeux afin de réprimer les images de son onirisme, se rendant compte qu'elle s'égarait et ne devait pas avoir de telles pensées. Comment seulement son esprit avait-il pu lui envoyer de telles images ? La jeune femme poussa un profond soupir et s'enveloppa entièrement de sa couverture jusqu'à sa tête, tentant de tout oublier, et espérant retrouver un sommeil calme et surtout sans rêve. Elle jeta un coup d'œil vers Jane, dos à elle, et lui envia de parvenir à dormir si paisiblement.

Au petit matin, Lizzie finit par se rendormir, loin de se douter que l'homme de ses rêves n'était pas non plus épargné du même type de songe à son égard, si ce n'est même plus osé, et ce, depuis bien plus longtemps qu'elle.


De bonne heure, la demeure de Longbourn était déjà fort animée. Tout le personnel se focalisait sur la préparation de l'assemblée de ce jour. Chaque recoin des pièces programmées pour recevoir les invités fut astiqué et nettoyé soigneusement de fond en comble.

L'ultime but dans la vie de Mrs Bennet n'était pas inconnu de tous. Et ceci était de caser à tout prix ses filles aux meilleurs partis possibles. Mais l'essentiel était avant tout de les voir mariées. Même Mary. Mrs Bennet n'était encore qu'à un cinquième de l'aboutissement de sa mission, le plus dur restait à accomplir. Et c'était déplorable pour elle de penser que Lizzie aurait aussi dû déjà avoir la bague au doigt si celle-ci n'avait pas été assez sotte pour refuser d'épouser l'héritier du domaine.

Mais ce premier grand pas avec l'aînée était un atout majeur pour l'avenir des quatre restantes. C'était plus que normal que Mrs Bennet envisageait déjà de dénicher les futurs prétendants pour Lydia, Lizzy, Kitty, voire Mary, parmi le cercle de connaissances de Mr Bingley, comme elle l'avait si bien expliqué à Lydia. Jusqu'à récemment, Mrs Bennet n'avait pas imaginé qu'un de ces potentiels prétendants pourrait déjà se trouver plus proche de Longbourn qu'elle ne l'avait pensé avant.

Vraiment bien proche.

L'attitude du jeune homme envers Lizzie ces derniers temps avaient renouvelé les impressions de Mrs Bennet envers le maître de Pemberley. Une idée avait ainsi germé dans la tête de la femme. Mr Bennet avait compris bien assez tôt les manigances de son épouse, non sans une certaine appréhension.

Comme prévu, c'était donc avec un enthousiasme non contenu que la maîtresse de Longbourn fit préparer le dîner à trois services. D'autres connaissances, dont les Lucas et les Phillips seront aussi de la partie. Mrs Bennet avait également prié à Mr Darcy d'inviter sa petite sœur. Mais le jeune homme devina sans peine que Georgiana, avec sa timidité, était peu encline à faire face à tant de monde dont l'extravagance de la plupart d'entre eux n'était plus inconnue de son frère. Et de plus, la majorité de ces invités étaient encore de parfaits inconnus aux yeux de Georgiana. Mr Darcy lui épargna donc cette pénible épreuve en déclinant poliment l'invitation pour sa sœur en son nom, arguant que celle-ci ne sortait pas encore dans le monde.

Jane se chargea d'établir le plan de table. De bonne humeur, Mrs Bennet fit une annonce à ses employés.

— Écoutez moi bien. Le dîner que nous composons est de la plus haute importance ! Comme je l'ai dit, Mr Bingley, qui est - comme vous le savez tous - le futur mari de Miss Bennet, y sera l'invité d'honneur. Je veux que tout soit impeccable ! Mr Bingley sera accompagné de Mr Darcy de Pemberley ! Vous avez bien compris ? De Pemberley !

Les membres du personnel prirent bien à cœur les paroles de leur maîtresse. Conscients de l'égard attribué aux convives mentionnés et dictés par la crainte de décevoir leur maîtresse, ils s'appliquent chacun à leurs tâches bien plus sérieusement qu'au quotidien.


Vers quinze heures, Mr Bingley franchit le seuil de la porte de Longbourn avec l'accueil chaleureux de la famille Bennet. Mr Darcy apparut à son tour, et Elizabeth sentit aussitôt l'engouement la gagner. Le jeune homme salua globalement tout ce petit monde. Lorsque son regard passa sur Elizabeth, cette dernière détourna instantanément les yeux de lui en rosissant, fuyant son regard malgré elle. Les souvenirs de la nuit dernière étaient encore bien ancrés dans l'esprit de la jeune femme.

Les deux gentlemen furent aussitôt sollicités à rejoindre les autres invités dans la grande salle qui était déjà bien animée. Une musique entrainante emplissait la salle et les tables de jeu étaient déjà à moitié remplies. Sir Lucas invita Mr Bingley, Jane et Mr Darcy à rejoindre leur table où une partie de cartes allait bientôt commencer.

Le dîner fut annoncé plus d'une heure plus tard. Les invités rejoignirent petit à petit la salle à manger où une grande table avait été disposée.

Mr et Mrs Bennet occupaient chacun un bout de la table. Jane s'assit à droite de son père, suivi de Mr Bingley, puis de Mr Darcy. Les chaises suivantes étaient destinées aux Lucas, à commencer par Maria Lucas, fort intimidée à la vue de Mr Darcy, son voisin de table. Elle fut encore la seule de la famille ayant pris place. Les autres étaient encore plongés dans des discussions de groupes animées.

Lizzie était prévue occuper la place près de Mrs Phillips, assise à droite de Mrs Bennet. La jeune femme s'assit tranquillement lorsqu'elle entendit la voix de sa mère non loin de là :

— Jane ! Mais pourquoi avez-vous placé Maria là-bas ?

Lizzie pressentit que cette phrase n'annonçait rien de bon lorsqu'elle vit sa mère s'avancer vers Maria pour lui prendre la main en lui incitant à se lever.

— Maman… que faites-vous…, dit Jane prudemment entre ses dents, déplorant déjà ce qui allait se passer.

— Maria ! Vous ne pouvez pas vous placer là voyons ! Vous serez mieux de notre côté, près de Mrs Phillips ! Allez ! Venez !

Près de Mrs Phillips ?

Elizabeth réalisa que sa mère faisait allusion à la chaise qu'elle-même était en train d'occuper et vit avec appréhension les deux femmes se diriger vers elle.

— Levez-vous Lizzie. Maria va s'asseoir là et vous, vous prenez sa place de l'autre côté.

— Mère, dit-elle à son tour entre ses dents, en faisant attention à parler le plus discrètement possible afin de ne pas attirer l'attention de toute la salle. Il serait plus convenable de respecter le plan de table prévu au départ. Ne réalisez-vous pas l'embarras que vous causez...

— Lizzie ! Ce n'est pas le moment de jouer les entêtées ! Levez-vous et prenez place de l'autre côté !

Mortifiée, Lizzie réalisa que résister contre sa mère ne ferait qu'accentuer le malaise. Elle obéit à contrecœur, priant pour que le maximum d'invités ait été assez absorbé par leur occupation du moment pour ne pas avoir été témoins de la scène. Elle croisa les yeux de Jane et de son père, qui la regardèrent rejoindre son nouveau siège avec une expression désolée et compatissante. La mortification de Lizzie s'accentua lorsque ses yeux glissèrent sur Mr Darcy qui, avec son expression grave, n'avait rien raté de la scène dont il était ironiquement la cause d'origine malgré lui.

Quand elle fut assez près, Lizzie avança d'un pas lent lorsqu'elle sentit sa mère - encore - la pousser brusquement afin de s'asseoir.

Lizzie croisa aussitôt le regard de son nouveau voisin de table, et parvint juste à esquisser un sourire réticent pour masquer sa gêne. Le demi-sourire à peine voilé que Mr Darcy lui retourna était un curieux mélange de perplexité, d'étonnement, et d'embarras.

— C'est parfait ! s'exclama Mrs Bennet, avant de rejoindre sa place et engager la conversation avec Mrs Phillips, comme si de rien n'était.

Rouge de honte, Lizzie resta parfaitement immobile, les yeux fixés sur son assiette.

Les servants commencèrent à servir les premiers plats lorsque tout le monde fut installé.

Jamais l'indélicatesse de sa mère ne lui avait été aussi humiliante.

Comment sa mère osait-elle lui faire un coup pareil, et devant la majorité de leurs connaissances ?

D'où lui était venue cette idée, à la fois mauvaise et ô combien maladroite ?

Mrs Bennet ne remarquait-elle pas que rien que la présence de Mr Darcy troublait déjà assez sa fille comme ça ?

Sa mère ne comprendrait-elle donc jamais que ses manières faisaient plus fuir les jeunes célibataires qu'autres choses ?

— Miss Elizabeth, je crois que de mon côté, le dîner va être plus animé que je ne le prévoyais.

Coupée dans ses sombres pensées, Elizabeth leva des yeux brillants et surtout surpris vers Mr Darcy qui venait de parler.

Elle ne s'attendait pas à ce qu'il soit enclin à lui adresser la moindre parole de toute cette réunion après ce qui venait juste de se produire.

— Avec les deux fiancés à côté de moi qui ont tendance à complètement oublier leur entourage lorsqu'ils se retrouvent entre eux, continua-t-il sur le ton de la plaisanterie, je m'apprêtais à passer le dîner à tenir la chandelle à Mr Bingley et à Miss Bennet. Mais heureusement qu'on m'a sauvé la mise. La maîtresse de maison a peut-être deviné ma détresse..., éluda-t-il avec un sourire fin.

Elizabeth laissa passer un moment de confusion avant d'être déridée par ces paroles réconfortantes et inespérées. Elizabeth lui esquissa enfin un sourire attendri, soulagée quoique étonnée de voir ainsi Mr Darcy prendre le spectacle de sa mère à la légère. Mais pour cacher son trouble, elle commença à se préparer pour le dîner en plaçant sa serviette de table sur sa robe.

— Et j'espère bien Miss Elizabeth, que vous n'avez pas l'intention de me laisser dans un monologue durant tout le dîner, dit Mr Darcy en haussant un sourcil avec un regard du coin de l'œil, ayant noté le mutisme de son interlocutrice.

Les lèvres d'Elizabeth esquissèrent un rire un peu nerveux.

Puis, reprenant confiance en elle, elle finit par s'exprimer avec un air malicieux au visage.

— Mr Darcy, j'aimerais vous faire remarquer que Miss Lucas aurait pu être une voisine de table avec qui vous auriez pu discuter aussi, en supposant qu'au moins l'un de vous deux se serait décidé à parler en premier pour engager la conversation.

— Pas faux, admit le jeune homme. Mais vous savez que je n'ai pas le talent de… (Il s'interrompit en croisant les jolis yeux amusés et appuyés vers lui, se souvenant de la leçon que la jeune femme lui avait donnée à Rosings.) Enfin, peu importe.

Lizzie plongea sa cuiller dans sa soupe en ajoutant :

— Mr Darcy, je tiens à vous rassurer. Je suis bien disposée à parler avec tous les invités de cette assemblée.

— Voilà qui est mieux. A un moment, j'avais vraiment cru que votre langue a été permutée avec celle d'un personnage muet, dit-il tout bas, en entamant son repas à son tour.

Elizabeth, un sourire reconnaissant aux lèvres, remercia intérieurement son interlocuteur, trouvant à quel point il pouvait être charmant lorsqu'il s'en donnait la peine.

« Pourquoi vous entêtez-vous tant à résister ? »

Les bribes d'images de son rêve de la nuit dernière accompagnée de ce murmure lui revinrent furtivement à l'esprit. Elle secoua aussitôt la tête pour les réprimer.

Elle s'interdit de passer son temps à rougir à chaque fois que Mr Darcy lui adresserait la parole ou poserait les yeux sur elle. Elizabeth inspira profondément et essaya de se mettre à l'aise du mieux qu'elle put.

Mais elle culpabilisa à la pensée que jusqu'à l'heure de ce dîner, elle avait justement passé tout l'après-midi à fuir la présence de ce jeune homme qui, pourtant, ne cherchait apparemment qu'à être une agréable compagnie de table.

Le reste du dîner se passa sans plus d'incidents tandis que Mrs Bennet épiait discrètement l'échange entre Mr Darcy et Lizzie de l'autre côté de la table.


A la fin du dîner, les hommes furent invités par Mr Bennet à rejoindre la bibliothèque, aménagée spécialement pour l'occasion, tandis que les femmes rejoignirent la salle des jeux.

Un moment vint où Mrs Hill annonça à Mr Darcy qu'un messager de Netherfield Park le cherchait. Il adressa des excuses à ses compagnons avant de sortir voir ce qu'il en était.

— Mr Darcy, l'intendante m'a chargé de vous remettre ce courrier parvenu pour vous il y a peu de temps à Netherfield. C'est assez urgent, il paraît.

Le jeune homme prit la lettre et remercia le messager qui prit congé.

Mr Darcy s'isola dans un coin non loin de la demeure afin de commencer sa lecture.

Elizabeth du côté du salon, l'aperçut. Elle s'avança discrètement vers la fenêtre afin de l'observer, remarquant que la vue de profil du jeune homme lui était bien à son avantage.

Plongeant dans ses récents souvenirs, Lizzie sonda si cet homme avait encore une quelconque affection envers elle, ou bien s'il était désormais vain d'espérer quelque chose dans ce sens, et qu'elle avait laissé passer sa chance.

La jeune femme se remémora le discours de Charlotte au bal de Netherfield Park en novembre dernier, sur le fait de ne pas dissimuler son affection à un homme.

Mue par une espérance et une force invisible, ses pas la dirigèrent vers la cour où Mr Darcy était toujours debout à la même place, concentré dans sa lettre.

A la vue de son expression quelque peu préoccupée, ce qu'il lisait n'était apparemment pas très plaisant. Réalisant la présence d'Elizabeth, il jeta un bref coup d'œil vers la jeune femme avant de replonger dans sa lecture.

Elle s'apprêta à lui offrir un sourire chaleureux et une discussion allant au-delà des banalités quand il aura fini sa lecture.

Mais l'arrivée de Lydia, avec son habituel élan démesuré gâcha tout.

Elle surgit soudainement de nulle part devant Elizabeth qui sursauta.

— Lizzie ! J'ai failli oublié de vous le dire ! Je l'ai rencontré ce matin à Meryton avant son départ pour Londres ! Mr Wickham m'a dit qu'il vous a rencontrées, vous et Miss Darcy l'autre jour. Petite cachotière ! s'exclama-t-elle avec un clin d'œil.

Mr Darcy - qui avait tout entendu malgré lui – leva la tête, les yeux écarquillés vers les deux jeunes filles.

Lydia, inconsciente de l'expression désapprobateur que Lizzie tenta de lui faire comprendre vainement, continua de papoter au grand dam de sa sœur.

Cela n'en finira donc jamais !

Pourquoi sa mère et sa sœur se mettaient-elles toujours à la vexer ainsi devant Mr Darcy, dont elle ne connaissait que trop la désapprobation envers les manières de ces dernières ?

— …Il m'a chargée de vous dire au revoir de sa part ! C'est certain, il va terriblement toutes nous manquer, finit Lydia.

Elizabeth put à peine esquisser un mot que Lydia retourna déjà à l'intérieur de la maison, loin de se douter du tourbillon qu'elle allait causer.

Horriblement mortifiée par la conscience de la présence de Mr Darcy, Elizabeth se tourna prudemment vers celui-ci, en ayant un mauvais pressentiment.

Elle tomba sur les yeux assombris de Mr Darcy qui la fixaient.

— Mr Wickham… ? dit-il incrédule, les mâchoires crispées, tout en s'approchant dangereusement d'Elizabeth.

— Ce n'était vraiment qu'un malheureux incident…, balbutia-t-elle rapidement, ne trouvant rien d'autres à dire sur le coup, décontenancé par le regard noir de son interlocuteur.

Mr Darcy la dévisagea avec des yeux défaits.

— Je sens que vous m'en voulez..., émit Elizabeth faiblement, troublée par le changement d'humeur de l'homme qui s'était aggravée d'un instant à l'autre, tellement en contraste avec son humeur du dîner.

— Je cherche avant tout à comprendre dit-il. D'abord, vous avez emmené Georgiana dans le Hertfodrshire malgré la présence de la milice. (Elizabeth alla s'expliquer mais le jeune homme ne lui laissa pas le temps : ) Puis comme si cela ne suffit pas, vous l'emmenez à Meryton pour tomber sur cet individu. Je vous avoue que j'ai du mal à concevoir votre scénario, expliqua-t-il, assemblant tout l'effort du monde pour adopter une attitude sereine, mais qui ne cachait rien de son expression, lui donnant un air redoutable et curieusement séduisant à la fois aux yeux d'Elizabeth. Et cela n'aidait en rien la jeune fille à avoir les idées claires. Les mots se mirent à bousculer dans son esprit.

— ...J'en suis sincèrement désolée... Je ne savais pas du tout que... C'est ma faute… Je croyais qu'il était parti pour de bon. Nous l'avons juste aperçu de loin...

— Et vous n'avez pas jugé bon de m'en informer, dit-il.

Sa phrase était plus une affirmation qu'une interrogation.

— J'ai cru comprendre lors de ma discussion avec votre sœur qu'elle vous en aurait parlé ?

Mr Darcy leva un sourcil.

— Mais elle ne l'a pas fait…, conclut Elizabeth dans un murmure.

Darcy émit un soupir las, baissa les yeux et se tut.

Ce silence ne dura pas plus d'une minute mais parut comme une éternité à Elizabeth. En cet instant, elle ne remarqua pas la peine grandissante qui se dessinait sur le visage de son interlocuteur.

Finalement, il releva le regard et remarqua les yeux teintés de crainte d'Elizabeth, avant d'y réagir.

— Je suis désolé Miss Elizabeth, soupira-t-il. Je ne voulais pas vous brusquer ou quoi que ce soit du genre. Je conçois que les affaires de ma sœur ne vous concernent pas. Et je suis responsable de vous avoir imposé sa présence.

Elizabeth fronça les sourcils, hésitante sur l'interprétation des propos du jeune homme qui continua de parler.

— Si vous voulez fréquenter cet individu, c'est votre affaire. Mais ma sœur doit être tenue à l'écart de vos relations peu recommandables, marmonna-t-il.

Elizabeth ouvrit aussitôt la bouche, s'apprêtant à répliquer lorsque la voix merveilleuse de sa mère retentit de la porte d'entrée.

— Ohhh ! Je suis terriblement désolée de vous interrompre ! s'égaya-t-elle en les apercevant, un air agréablement ravi dans l'expression.

Mr Darcy se lassa des allusions insistantes d'entremetteuse de Mrs Bennet. Ennuyé, il secoua la tête de consternation, les yeux baissées.

Il préférait la période d'antan où cette femme le détestait encore. Au moins à l'époque, elle l'avait laissé un peu tranquille.

— Le thé est servi ! continua Mrs Bennet. Vous continuerez votre discussion à l'intérieur. Venez monsieur.

Le jeune homme fit une courbette polie à Elizabeth puis s'excusa. Sans un mot de plus, il se dirigea vers l'entrée suivre Mrs Bennet pour retourner dans la maison.

Elizabeth resta figée sur place.

— Monsieur…, émit-elle dans un souffle, mais le jeune homme était déjà loin devant la porte, puis disparut à l'intérieur.

Il s'isola dans la bibliothèque désormais vide pour continuer la lecture interrompue de son courrier.

Dehors, Elizabeth était blessée en pensant que Mr Darcy crut encore qu'elle continuait d'accorder un quelconque intérêt à Wickham après tout ce que Mr Darcy avait révélé dans le Kent. Cela n'avait aucun sens. Ne remarquait-il pas plutôt l'intérêt grandissant qu'elle portait pour lui ?

Ma chère Charlotte, je fais l'effort pour ne pas cacher mon égard pour cet homme. Mais c'est lui qui, apparemment, n'a plus gardé ses bons sentiments pour moi, vu le niveau d'estime bien bas où il me met, soupira-t-elle. Que me conseillerez-vous si seulement vous étiez là ? songea-t-elle tristement.

A l'intérieur, l'homme prit congé de tout le monde après avoir émis des excuses vagues de devoir quitter la fête.

— Mais pourquoi part-il si tôt ? Vous n'avez pas l'impression qu'il a l'air un peu contrarié ? dit Mrs Bennet à son époux lorsque le jeune homme fut hors de vue.

— Qu'en sais-je ! répondit Mr Bennet en haussant les épaules.

— Et pourtant, pendant le repas, il était tout à fait de bonne humeur. Oh ! Ciel ! Serait-ce les mets ? Ont-ils manqué de sel ? Étaient-ils trop fades ? N'étaient-ils pas de son goût ?

— Mrs Bennet, si j'étais vous je ne me poserais pas trop de questions.

— ...Quel gentleman... étrange et imprévisible..., commenta Mrs Bennet pensivement.

— Et vous voulez caser votre progéniture avec ça !


Dehors, Elizabeth vit Mr Darcy s'éloigner et l'appela d'une petite voix.

— Partez-vous monsieur ?

— Oui, dit-il après s'être retourné, quelque peu mal à l'aise. Il toucha sa veste pour désigner la lettre qui se trouvait dans la poche intérieure. Une missive urgente à rédiger, continua-t-il.

— Mr Darcy, avant que vous ne vous en alliez, il faut que je vous dise quelque chose…

Ce dernier se demanda s'il devrait commencer à s'inquiéter.

— Je vous écoute, répondit-il, troublé.

Prenant son courage à deux mains, Lizzie inspira profondément. Elle se prépara mentalement pour mettre les mots sur ses sentiments.

Elle alla entamer son discours, lorsqu'ils furent interrompus par un bruit de cavalier qui attira aussitôt l'attention des deux jeunes gens. Ils se retournèrent et reconnurent Mrs Annesley, en train de se diriger vers eux. Cette dernière était dans un état de panique évident.

— Je vous demande pardon Monsieur mais il fallait que je vienne…

— Mrs Annesley... Qu'y-a-t-il ?

La femme déglutit avant de répondre.

— C'est Miss Georgiana, monsieur… Elle a disparu.


(1) Ce passage est inspiré d'une scène du film Northanger Abbey (2007).


Et une dernière information : Je vous le dis maintenant que la première partie de cette histoire est terminée il y a quelques chapitres déjà, l'idée de départ (un peu cinglée) avec l'échange de corps au début de cette fanfiction est inspirée du film "It's a boy girl thing".