Chapitre 8 : La Fondation du Futur

Plus d'un jour s'était écoulé depuis que Naegi avait eu une vraie conversation avec qui que ce soit. La pagaille de la veille entre Kamukura et Komaeda l'avait laissé exténué. Il avait fait une sieste peu de temps après et s'était réveillé un peu plus tard pour trouver son dîner qui l'attendait sur le bureau. Il ne vit personne d'autre le reste de la journée.

Le lendemain matin, Komaeda était apparu avec de la nourriture comme à son habitude, mais le garçon habituellement énergique était réticent à discuter. Il répondait à Naegi par des mots simples et faibles et s'écartait devant le plus jeune Chanceux Ultime comme un chien menacé par un journal roulé. Il en fut de même au déjeuner et au dîner, jusqu'à ce que Naegi se sente coupable du comportement de Komaeda – bien qu'il sache que ça avait tout à voir avec ce qui s'était passé avec Kamukura et la photo.

Il se résigna à tuer le temps en se promenant sans but dans la chambre et en examinant les murs à la recherche de faiblesses non existantes. Dès qu'il n'y eut plus le moindre doute que ces murs n'avaient pas été construits dans le but de laisser s'échapper quelqu'un, il s'affaissa contre l'un d'entre eux et se mit à penser à rien. Le tic tac régulier de la petite horloge se mua en un bourdonnement de fond. Il voulait dormir, mais ne pouvait se résigner à faire un pas. Finalement, il rassembla assez de volonté pour bouger et se traîna jusqu'au lit. Il roula sur le côté, tournant le dos à son dîner à moitié mangé.

Il dormit mal, se réveillant plusieurs fois pendant la nuit. La dernière fois, il se réveilla gelé et frissonnant et réalisa qu'il était couvert de sueur. Il prit une douche, mais même l'eau chaude ne parvint à le réchauffer. Une nouvelle forme d'anxiété le consumait de l'intérieur.

Il toucha la patte de Monokuma récupérée dans les décombres et à sa grande horreur, découvrit que les griffes acérées de l'ours n'avaient pas été retirées. Il cacha immédiatement la patte sous le lit – ces choses étaient dangereuses – et fit de son mieux pour oublier sa présence.

Quand Komaeda entra avec son petit déjeuner le lendemain, il était huit heures du matin. Il ne parut pas dérangé à la vue de Naegi étendu sur le dos sur le tapis. Naegi l'ignora – jusqu'à ce qu'il s'aperçoive que Komaeda souriait.

« Komaeda-kun ! » Naegi se hâta de se redresser en position assise.

« Bonjour ! » dit l'autre garçon d'un ton enjoué. Il arborait son sourire chaleureux familier. Il n'y avait aucune trace de la misère qui l'avait hanté la veille. Devant ce retour en terrain connu, Naegi ne put s'empêcher de lui retourner son sourire.

Il devait cependant demander. « Tu vas bien ? Tu avais pas l'air dans ton assiette hier. »

Komaeda balaya son inquiétude d'un revers de main. « Je suis désolé que tu aies dû assister à ça. Je me suis oublié pendant quelques temps, mais je me sens mieux maintenant. Quelque chose de merveilleux est sur le point de se produire, après tout ! »

Merveilleux ? Naegi ne savait pas s'il devait être ravi ou terrifié. « Qu'est-ce que tu veux dire ?

-Et bien, comme tomber sur cet album avec cette photographie était un exemple de très grande malchance, ça signifie que je suis destiné à être chanceux dans les moments à venir, maintenant ! » Il battit des mains, ressemblant à un petit enfant la veille de Noël. « Si on a vraiment de la chance, ce sera quelque chose de bon pour nous deux.

-Je ne te suis pas. »

Komaeda secoua la tête, lâchant un « tsk » dans sa barbe. « Et dire que je pensais que tu étais censé avoir la Chance comme talent, toi aussi. La bonne fortune vient toujours à la suite de la malchance, tout comme l'espoir grandit dans le sillage du désespoir.

-... Ça ne marche pas comme ça. »

Komaeda eut un grand sourire. La main sur la hanche, il regarda Naegi droit dans les yeux et dit : « Désolé, Naegi-kun, mais c'est bien le domaine dans lequel je possède quelque chose qui s'approche d'une compétence. Laisse-moi te donner un exemple. Tu sais que j'ai gagné au loto ?

-Vraiment ? » Waouh. Ça c'était de la chance. Mais Komaeda ne venait-il pas de dire que la bonne fortune et la mauvaise allaient toujours de pair...

« Ce n'était pas mon ticket. Je l'ai trouvé dans les ordures de mes kidnappeurs !

-...Quoi ?

-On peut dire que j'étais presque la personne la plus riche de ma classe à Hope's Peak. Je n'ai pas fait que gagner au loto. J'avais un héritage énorme aussi, et je l'ai reçu en totalité quand mes parents se sont faits tuer par une météorite ! »

Une... quoi ?

« Sais-tu à quel point c'est peu probable de se faire percuter par une météorite ? Dans un avion ? Pendant qu'il était détourné ! Est-ce que tu comprends à quel point c'est improbable ? Ça n'arrive jamais ! Si je voyais ça dans une série télé, même moi je dirais qu'il n'y a aucune chance pour que ça arrive. »

Plus Komaeda parlait, plus il s'essoufflait. Il se plia en avant, tremblant, les bras serrés autour de son estomac comme s'il souffrait. Avec son manque de souffle vint ce rire sifflant. Cette fois cependant, ce n'était pas terrifiant. C'était pitoyable.

« C'est horrible, dit Naegi.

-Non, non, non ! Ce n'est pas horrible ! C'était de la bonne fortune. C'est grâce à ça que j'avais autant d'argent ! Tu vois ? Tout finit par s'arranger.

-Si ta famille est vraiment morte, alors ce n'était pas de la chance. Aucune somme d'argent n'en vaut la peine. »

Le rire de Komaeda s'intensifia progressivement, jusqu'à ce que sa voix craque et se brise.

« Tout va bien, Naegi-kun. » Toujours plié en deux, Komaeda haletait. « Tout finit par s'arranger. Je suis le Chanceux Ultime. Quand des trucs comme ça arrivent... bah, les choses s'améliorent toujours par la suite, non ? C'est comme ça que tu fonctionnes, n'est-ce pas ? Peu importe ce que le Désespoir Ultime te faisait subir, tu regardais toujours vers le futur et espérais que tout s'améliore le lendemain. Alors, il faut juste se ressaisir et attendre la lumière au bout du tunnel. Parce que... parce que c'est ça l'espoir ! C'est exactement ça ! Alors, c'est inutile de s'en faire parce que l'espoir est toujours là pour tout arranger ! »

Le sourire de Komaeda n'était pas complet, mais ressemblait davantage à une fissure formée par des années de pression. Était-ce réellement sa manière de voir les choses ? Si c'était le cas, ça expliquait quelques trucs, non ? Maintenant que Naegi le regardait, il ne voyait pas quelqu'un de fou ou de malveillant. Juste quelqu'un de brisé.

« Komaeda-kun... »

Naegi tendit le bras. Sa main se figea à mi-chemin. Pouvait-il vraiment faire ça, après tout ce que l'autre garçon avait fait ?

Il regarda la forme ratatinée de Komaeda.

Oui, il le pouvait.

Il tendit la main et serra l'épaule de Komaeda.

« Tu n'es pas obligé de continuer à refouler tout ça et à faire semblant, dit doucement Naegi. Je sais que ça te perturbe. Je sais que tu crois que je suis trop important pour m'en soucier, mais ce n'est pas vrai. Je... Je suis vraiment désolé que tu aies dû endurer tout ça.

-Tu... pourquoi est-ce que tu t'excuses... ? Ahahahaha et c'est moi qui suis censé comprendre l'espoir... »

Komaeda rit si intensément qu'il tomba à genoux.


Le vieil homme paraissait plus faible qu'il ne l'était sous les lumières tamisées du bureau. Des rides profondes accentuaient son âge et le bureau auquel il était assis aurait autant pu être là pour servir de support que pour son statut. Comme pour insister davantage sur la maturité du vieil homme, un homme beaucoup plus jeune se tenait à ses côtés. En un mot, le plus jeune avait l'air élégant ; un menton solide formait la base d'un visage mince aux longs yeux bridés. Une peau pâle, des cheveux d'argent et des vêtements clairs parfaitement repassés s'assemblaient pour donner un message puissant : ce n'était pas un homme à prendre à la légère.

Il y avait quelqu'un d'autre dans la pièce. Cet homme se tenait à l'écart des autres, adossé à un autre mur. Un fédora blanc était posé sur ses cheveux châtain clair. Son attitude décontractée était un contraste frappant avec les deux autres et il demeura ainsi même après qu'on eût toqué à la porte.

Le vieil homme prit la parole : « Kizakura-kun, pouvez-vous vous en occuper ? »

L'homme au fédora se dirigea vers la porte et l'ouvrit sur des yeux violets. Il sourit à la jeune fille qui ne le lui retourna pas et fit un pas de côté pour lui concéder l'entrée.

Cinq personnes pénétrèrent dans le bureau. Ils furent dirigés vers les cinq chaises qui attendaient alignées en un petit arc devant le vieil homme et son bureau. La jeune fille aux cheveux violets s'accapara le siège central (à la consternation de son camarade blond) et les quatre autres se positionnèrent autour d'elle.

Quand tous furent installés, le vieil homme reprit : « Merci à vous tous d'avoir accepté cette réunion. »

Kirigiri Kyoko hocha la tête. « Il n'est pas nécessaire de nous remercier. Nous aimerions vous remercier de nous avoir fourni un abri. »

Kizakura émit un petit rire. « Est-ce que l'estimé Togami Byakuya est inclus dans ce « nous » ? »

L'héritier blond se renfrogna, détournant la tête. « Comparé à notre situation précédente, ce que votre organisation nous a fourni est... adéquat. »

Kizakura sembla trouver cette réponse amusante. Peut-être pour le bien de la conversation, le vieil homme choisit de reprendre la parole.

« Permettez-moi de nous présenter. Je suis Tengan Kazuo, le président de la Fondation du Futur. » Du mention, il désigna l'homme pâle à côté de lui. « Voici Munakata Kyosuke, notre commandant en second. Lui », il fit un signe vers l'homme au fédora, « s'appelle Kizakura Kouichi. »

Kirigiri dit : « Je suppose que vous savez déjà qui nous sommes. »

Tengan hocha la tête. « Oui, les noms des Six Survivants sont connus dans le monde entier. »

La mention de ce titre eut un effet immédiat sur les élèves. Le visage de Kirigiri, déjà inexpressif, devint dur comme de la pierre. Togami serra la mâchoire. Hagakure s'éclaircit la gorge, fixant le mur. Fukawa se mordit la lèvre et se tordit les mains, tandis qu'Asahina jetait un regard nerveux vers ses camarades.

« N... Nous savons tous pourquoi vous v... vouliez nous parler, dit Fukawa d'un ton qui était autant un murmure qu'un sifflement.

-S'il vous plaît, ne vous méprenez pas sur nos intentions, dit Tengan. Nous avions l'intention de porter secours à tous les survivants, peu importe leur identité. Cependant, il est vrai que nous espérions que Naegi Makoto serait parmi eux.

-Le récupérer était votre objectif principal, est-ce correct ? » Kirigiri avait énoncé ces mots comme une question, mais il était évident qu'elle n'avait pas besoin de réponse.

Hagakure se gratta l'arrière du crâne. « Je ne comprends pas. Qu'est-ce que ce petit gars a d'aussi spécial ?

-Naegi Makoto est le responsable de la chute du Désespoir Ultime. » Pour la première fois, Munakata avait ouvert la bouche et sa voix puissante fendit la pièce comme un couteau.

« Relations publiques, fit Togami avec mépris, comme si cette idée était indigne de lui. C'est ce que vous voulez pour lui.

-Je ne vais pas le nier, dit Tengan. Celui qui contrôlerait Naegi-kun gagnerait une influence considérable sur le monde. Il est tout aussi important, cependant, de le garder hors de portée de ceux qui en abuseraient.

-S'il est aussi important, pourquoi avez-vous attendu aussi longtemps pour nous retrouver ? » interrogea Togami.

Tengan soupira profondément. Munakata, d'un autre côté, se hérissa comme si la question de Togami était une insulte personnelle. Il contourna lentement le bureau, son regard alternant entre Togami et Kirigiri alors qu'il expliquait : « Nous avions déployé une équipe de secours dès le moment où vous aviez quitté l'académie. Ce que nous ignorions était que les Rémanents du Désespoir avaient déployé leur propre agent, Kamukura Izuru. Nous supposons que sa mission était d'empêcher le contact entre nos deux groupes.

-Une personne a paralysé votre organisation entière, répéta Kirigiri avec scepticisme.

-Kamukura Izuru n'est pas une personne ordinaire, dit Tengan. Il est le produit des plus grands scientifiques et ingénieurs du monde. Il est peut-être incorrect de le qualifier d'humain.

-On s'éloigne du sujet. » Munakata jeta un regard sévère vers Tengan. « Nous devons savoir ce qui est arrivé à Naegi.

-... C'est de ma faute. »

Tous les yeux se tournèrent vers la Nageuse Ultime. Le regard baissé vers le sol, la tête inclinée, Asahina cligna des yeux, refoulant ses larmes tout en murmurant ces quelques mots. Elle interrompit la tentative de Kirigiri de la réconforter, les bras étroitement serrés autour d'elle comme si elle avait froid. « Si j'avais été un petit peu plus rapide, si je n'avais pas été stupide, nous aurions pu le sauver.

-Hé, c'est pas ta faute, dit Hagakure, levant le pouce vers Asahina.

-C'est... C'est parce que c'est la tienne, idiot ! cracha Fukawa.

-Pourquoi tu dis ça !? »

Kizakura releva son fédora pour mieux regarder les élèves divisés. « Quelqu'un d'autre est largué, là ? Je crois que vous devriez commencer par le début, les enfants.

-Permettez-moi de m'en occuper. » Kirigiri posa soigneusement les mains sur ses genoux. « Nous avions découvert un vieux supermarché et nous espérions trouver des vivres à l'intérieur. A cause de la large surface, nous avions décidé de nous séparer en binômes. Nous étions censés rester à portée de voix les uns des autres, donc j'espérais que nous serions capables de venir à l'aide de chacun, si nécessaire.

-Ce fut ta première erreur, dit Togami comme s'il avait désapprouvé le plan de la détective dès le début. Tu n'aurais jamais dû laisser Naegi faire équipe avec cet idiot.

-Je ne me rappelle pas que tu aies objecté, rétorqua Kirigiri. Quoi qu'il en soit, Naegi-kun avait choisi Hagakure-kun comme partenaire. Il peut vous dire ce qui s'est passé ensuite. »

Ils attendirent. Asahina dut donner un coup de pied à Hagakure avant qu'il réalise que c'était à son tour de parler. « H... Hein ? Oh, ouais. Naegi et moi on était vers le fond en train de chercher à manger. J'ai cru voir un esprit quand nous sommes passés devant une allée, donc je suis allé jeter un coup d'œil...

-Vous étiez censés rester ensemble, dit Kirigiri entre ses dents.

-J'ai oublié, d'accord ? Quoi qu'il en soit, je l'ai plus ou moins perdu de vue. Mais je jure que je suis revenu le chercher tout de suite ! Mais... euh... quelque chose n'allait pas chez lui quand je l'ai trouvé. Il avait l'air dans les vapes et il y avait un type bizarre avec lui.

-A quoi ressemblait cette personne ? demanda aussitôt Munakata.

-Des cheveux blancs. Un sweat avec une capuche. Euh, plutôt grand ? »

Les trois adultes dans la salle échangèrent un regard, ce qui ne passa pas inaperçu auprès de Kirigiri et de Togami.

« Et ensuite ? dit Munakata.

-Hé bien, heuuuuu... »

Fukawa pointa un doigt accusateur vers Hagakure. « Il s'est enf... enfui comme un lâche ! Il ne nous a rien dit jusqu'à ce que le Maître l'arrête.

-Allez ! Qu'est-ce que j'étais censé faire ? Le type avait un pistolet...

-Il ne tirait pas des balles, dit froidement Kirigiri. Il l'aurait utilisé si c'était le cas. Considérant l'état de Naegi-kun quand tu l'as retrouvé, la conclusion logique est que le pistolet tire des fléchettes tranquillisantes. Pour reprendre l'histoire de Hagakure, dès que j'ai été informée de ce qui s'était passé, j'ai pu en déduire leur itinéraire de fuite le plus probable. Il avait plu la veille, si bien que dès que nous sommes sortis, nous avons trouvé des empreintes nous indiquant où allait le ravisseur de Naegi-kun. Nous les avons suivies. »

Un silence funèbre suivit ses mots. Kirigiri n'avait jamais été prompte à exprimer beaucoup d'émotion, mais si quelqu'un l'avait regardée de plus près, il aurait vu ses poings serrés.

« Vous les avez perdus ? poussa Munakata.

-A cause de moi. » Asahina cracha ces mots. « Les autres ne pouvaient pas maintenir l'allure, alors Kirigiri-san et moi nous sommes lancées à la poursuite de Naegi-kun. Nous les avons trouvés. Je les ai pourchassés. Je les rattrapais. Je l'aurais attrapé, si je n'avais pas été stupide... J'étais en train de courir dans un bâtiment et j'ai trébuché sur quelque chose. Ça m'a énervée, alors je l'ai attrapé et j'ai essayé de le lancer sur le type qui avait pris Naegi-kun... »

De nouveau le silence.

« Ma théorie actuelle est que l'impact de l'objet a été suffisant pour déclencher une mine intacte, dit Kirigiri. Quoi que ce fut, ça a fait s'effondrer le bâtiment derrière Naegi-kun et son ravisseur, nous séparant. Nous avons été capables de trouver une voie alternative, mais ça nous a pris un temps précieux. Nous avons de nouveau suivi la piste, mais finalement, j'ai trouvé des preuves convaincantes que Naegi-kun avait été embarqué dans une sorte de véhicule.

-Vous avez perdu le gamin par malchance, hein ? » Kizakura soupira. Il abaissa son fédora, dissimulant ses yeux.

« Y a-t-il autre chose que vous pouvez nous dire ? » demanda Munakata.

Quatre des cinq élèves secouèrent la tête. Une, cependant, ne fit rien. Fukawa se mordit nerveusement la lèvre. Son visage rougissait peu à peu sous la nervosité.

« I... Il est possible qu'elle ait vu quelque chose, dit Fukawa. Mais elle n'a p... probablement rien...

-Demander ne coûte rien, dit Tengan. De mon côté, je n'ai rien à craindre d'elle. »

Kizakura eut un sourire moqueur en direction de Munakata. « Tu devrais peut-être partir. Tu pourrais être en danger. »

Munakata se renfrogna. Il ouvrit un des tiroirs du bureau et en retira un petit sac. Tout en laissant tomber un peu de son contenu dans sa main, il demanda à Fukawa : « Le changement de personnalité est déclenché par un éternuement, n'est-ce pas ? Si tu es prête, j'aimerais parler à la Génocidaire Sho. »

Fukawa ferma les yeux. « D'accord. Mais n... ne me blâmez pas si elle massacre tout le monde ! »

Munakata lui jeta la poudre au visage.

« Ah... Atchoum ! »

Ce fut immédiat.

« Voyons, qu'avons-nous là ? » En un éclair, Sho la Génocidaire était sur pieds. Sur la chaise. Elle dominait tout le monde tout en sifflant et en goûtant l'air de sa langue allongée. « C'est un endroit beaucoup plus agréable que la dernière fois que Gloomy est tombée dans les pommes. Maître, devons-nous les massacrer pour nous en emparer ?

-Ce n'est pas nécessaire, dit Togami. Nous sommes partenaires. Pour l'instant.

-Kyihahahaha ! » Le rire de la serial killer était semblable à un crissement d'ongles sur un tableau noir. « Quelqu'un d'autre a reconnu le génie de mon Maître, n'est-ce pas ? Mais n'oubliez pas... » Les ciseaux apparurent. « Le Maître est mien ! Donc ne vous faites pas des idées. »

Sho la Génocidaire regarda autour d'elle, se délectant de l'attention comme un chat orgueilleux. Puis, cependant, elle fronça les sourcils.

« Hé, où est Mahkyutie ? »

Munakata plissa des yeux. « Est-ce que tu parles de Naegi Makoto ?

-Ouais ouais, Big Mac. Où il est allé ? » Quelque chose d'étrange traversa alors le visage de la serial killer, quelque chose de presque triste. « Il n'a pas décidé de partir avec le chamallow, hein ?

-Chamallow... ! dirent plusieurs personnes, mais ce fut Kirigiri qui posa réellement la question :

-Tu as vu le garçon aux cheveux blancs ?

-Hein ? Oh, tu veux dire Komaeda Nagito. Ouais, c'était un des élèves dans la classe supérieure. Chanceux Ultime, quelque chose comme ça.

-Qu'est-ce que tu as vu exactement ? l'interrogea Togami.

-Oh, quand tu demandes comme ça... Voyons voir. » Sho la Génocidaire se tapota le menton. « Il débitait des trucs comme quoi il voulait emmener Naegi dans un endroit sûr. Semblait bien et tout, mais après il m'a dit qu'il voulait seulement emmener Naegikins. Bah ! Comme si ce gars décharné méritait un endroit sûr plus que mon Maître. Donc j'ai dit au chamallow de foutre le camp avant que je ne le découpe ! Big Mac n'aurait jamais accepté de toute manière. »

Le silence s'ensuivit alors que tous comprirent ce qu'impliquait l'histoire de la Génocidaire.

Timidement, la voix débordante d'espoir, Asahina demanda : « Alors, est-ce que ça signifie que Naegi-kun va bien ? »

Munakata et Tengan échangèrent un regard.

« Komaeda Nagito est connu pour être un membre du Désespoir Ultime », fut tout ce que dit Munakata.

Asahina abaissa de nouveau la tête, des larmes coulant sur ses joues. Ils connaissaient tous le sort probable de ceux capturés par le Désespoir.

« Il n'y a aucune preuve que Naegi-kun ait été tué, dit doucement Tengan. Il y a encore des raisons de croire qu'il est en vie.

-A quel point est-ce possible ? demanda Kirigiri à voix basse.

-En considérant les circonstances, c'est en vérité fort probable, dit Tengan à la surprise des élèves. Komaeda Nagito a des motivations très différentes du reste du Désespoir Ultime. De plus, si le Désespoir avait tué Naegi-kun, ils auraient diffusé l'exécution dans le monde entier. En effet, le fait même que la capture de Naegi Makoto demeure un secret auprès du public me fait douter que Komaeda lui veuille du mal en premier lieu. »

Les yeux de Kirigiri s'écarquillèrent légèrement. « Donc, vous voulez dire...

-Oui. Il est possible de le sauver.

-Komaeda l'aurait emmené dans leur quartier général principal, dit Munakata. Si nous distrayons les Rémanents, il est possible pour une petite équipe tactique de s'y infiltrer et de le trouver.

-Vous allez le faire, n'est-ce pas ? » insista Asahina. Il semblait prête à imiter Sho la Génocidaire et grimper sur sa chaise. « Vous allez le sauver ? »

Tengan dit : « Soyez-en assurés. Nous avons toutes les intentions du monde de soustraire Naegi Makoto aux griffes du Désespoir. »