Vivre au Présent
Résumé : "Quelque soit ce que le moment présent contient, acceptez-le comme si vous l'aviez choisi. – Eckhart Tolle" Un an s'est écoulé depuis qu'ils ont tous brisé leur chaînes, venez découvrir leurs nouvelles aventures... Suite de "Liberté d'Avenir" (lien dans mon profil)
NDLA : Bonjour, bonsoir ! Me revoilà repartie dans le monde de la fanfiction ! Et pour commencer, je veux dédié ce prologue à TishaX Ton enthousiasme pour cette suite me donne la pêche ! J'espère que je ne te décevrais pas !
Un grand merci à Armenius, mon éternelle bêta qui a repris les rênes de la correction après plus d'un an !
Bonne le lecture à tous !
Prologue : Comme le temps passe vite...
- Tu veux vraiment y aller seul ? Demanda Lîn à Ace pour la quatrième fois.
- Oui, c'est juste une course à faire, j'en aurai pour une heure au plus. Pas la peine de te déranger pour ça, répondit le pirate en enfilant sa chemise qu'il laissa ouverte.
Le regard dubitatif que lui lança Lîn ne le fit pas plus réagir. La dernière fois que le brun avait dit ça à la princesse, sur la dernière île où le navire des pirates du Phénix avait fait halte, Ace n'était rentré qu'au matin. Il attira rapidement Lîn à lui pour un court baiser et quitta leur cabine avec un simple signe de la main.
Voilà un an que Lîn voyageait avec les pirates du Phénix, un an qu'elle ne s'était jamais sentie aussi bien, profitant de pouvoir décider de son avenir mais Ace avait complètement changé de comportement ces dernières semaines. Il se montrait plus distant, trouvant de nombreuses excuses pour partir faire des choses de son côté, un service à rendre, une course à faire, et souvent au début de la nuit, quand l'équipage faisait escale sur une île.
Au début, Lîn n'y avait pas vraiment fait attention. Ace était grand, ils passaient déjà leur temps ensemble presque vingt-quatre heures sur vingt-quatre. Il était normal pour la jeune femme que son pirate ait besoin d'air. Elle-même de temps en temps aimait bien flâner en compagnie de Mya, dernière femme présente sur le bateau, les autres infirmières ayant finalement décidé de partir.
Mais ce soir, Lîn décida de ne pas écouter Ace. Il était temps pour elle d'en savoir plus sur ce que tramait son pirate d'amant. Le temps d'enfiler sa cape et elle quittait le navire à sa suite.
Suivre Ace sans se faire repérer ne lui avait posé aucun problème. Elle n'avait rien oublié de son entraînement d'assassin, Lîn avait même développé ses capacités auprès des pirates, autant en force qu'en technique.
Les rues de la ville étaient bondées de soûlards, pirates ou civils, la jeune femme avait vite compris que cette partie de la cité portuaire était celle des plaisirs peu vertueux. Elle contourna un groupe de personnes qui pariait sur un combat entre deux types couverts de cicatrices et armés de couteaux. Elle rabaissa un peu plus son capuchon sur son visage, ce n'était pas le moment d'attirer les ennuis.
Ace, qui n'avait qu'une trentaine de mètres d'avance sur elle, s'arrêta enfin face à un établissement éclairé par des lumières rouges vives. Des femmes peu vêtues devant la porte l'invitèrent à rentrer et il ne se fit pas prier, tendant quelques berrys aux jeunes filles qui gloussèrent. Le cœur de Lîn rata un battement. Une maison de passe... Elle secoua énergiquement la tête. Ça ne pouvait pas être ce à quoi elle pensait. Le temps qu'elle se remette, elle sentit une main attraper son poignet et on la força à se retourner.
L'ivrogne qui l'avait attrapée n'eut pas le temps de tenter autre chose qu'elle le repoussa directement dans le cercle des parieurs qui hurlèrent leur désapprobation. Le temps de cette diversion, Lîn avait parcouru la distance la séparant du bordel et avait pénétré à l'intérieur, ignorant les filles qui la jaugèrent de haut en bas.
Le hall était fermé par de légers rideaux de dentelle, de telle manière que l'on pouvait distinguer l'intérieur. Les odeurs de parfum féminin et les vapeurs d'opium la prirent à la gorge, elle jeta un coup d'œil à la ronde en enlevant son capuchon. La mère maquerelle se glissa à ses côtés, lui demandant dans le même mouvement ce qui lui ferait plaisir. Lîn l'ignora, elle avait déjà repéré ce qu'elle cherchait et passa les tentures.
Ace était tranquillement assis, une catin rousse installée sur le siège à sa gauche, elle était affalée sur lui. Il riait pendant que la jeune femme lui racontait quelque chose aux creux de son oreille, sa main posée sur les pectoraux découverts du pirate. L'instant d'après, elle plongea sa main aux ongles vernis de rouge dans le pantalon du brun en gloussant. Celui-ci eut un sursaut mais pas à cause du geste dont il était victime, mais plutôt parce qu'il avait croisé le regard de Lîn.
L'instant d'après, celle-ci avait fait demi-tour, était sortie du bâtiment et avait disparu dans la foule.
- Lîn ! Reviens ! Je peux tout t'expliquer !
Ace courrait et slalomait entre les fêtards et les soûlards présents dans la rue en ce milieu de nuit. Il tentait de rattraper la jeune femme qui venait de le voir discuter avec une des prostitués du plus grand bordel de l'île sur laquelle le restant de l'équipage de l'homme le plus fort du monde avait accosté. Et malheureusement pour lui, Lîn venait d'assister aux avances de la fille de joie avant qu'il ne puisse la repousser.
Lîn, quant à elle, était déjà bien loin devant. Le cœur lourd, elle n'avait qu'une envie : rejoindre sa cabine et... Et après elle n'en savait rien.
La jeune femme croisa quelques regards goguenards durant sa course, les passants la cataloguant sûrement dans la catégorie des femmes bafouées. Ce qui finit par la confronter à la réalité.
Rageuse, elle essuya les larmes qui lui vinrent aux yeux. Jusqu'à ce qu'elle ait vu Ace entrer dans ce bordel, elle lui avait laissé le bénéfice du doute... Quelle idiote naïve!
Trouvant qu'elle ne s'éloignait pas assez vite à cause de la foule, la jeune femme bifurqua dans la première ruelle à sa droite et grimpa souplement sur les toits des maisons environnantes. Quand Ace tourna à son tour dans la ruelle, il n'y avait plus personne. Sans attendre, il reprit sa route, courant plus vite encore. Si Lîn imaginait bien ce qu'il pensait, il allait passer un sacré quart d'heure, puis il réalisa que sa femme serait prête à quitter le navire sans préavis.
Le port s'ouvrit enfin devant Lîn. Elle accéléra sa marche et sauta du toit directement sur une caisse. Elle prit une nouvelle impulsion et effectua une roulade pour ne pas se blesser à son atterrissage sur le sol.
Les pirates du Phénix, qui s'occupaient du chargement du bateau, la suivirent du regard un instant. Elle sauta le long de la coque de leur navire, montant plus rapidement à bord qu'avec l'aide de la passerelle, encombrée des membres d'équipage qui montaient les marchandises, vivres et matériel achetés sur l'île. La brune croisa Marco, qui faisait l'inventaire et qui lui lança un regard surpris, elle l'ignora grandement et pénétra dans les entrailles du navire, se glissant entre les marins et leur chargement, et disparut dans l'ombre.
C'est à ce moment-là que le fils de Gol D Roger fit son apparition sur le port, complètement essoufflé. Le brun regarda autour de lui et repéra immédiatement l'entrée du bateau. Il s'élança mais fut vite arrêté par la main de Vista.
- Ace, qu'est-ce que tu lui as fait ? demanda l'épée fleurie.
- Pas le temps d'expliquer ! s'écria le pirate en repoussant l'épéiste, avant d'être arrêté cette fois-ci par Izou qui buvait une tasse de thé en surveillant l'embarquement.
- C'est à cause de ta surprise ?
- Elle m'a vu chez "Little Lili" !
Ace reprit sa course comme s'il avait le feu aux fesses. Les anciens commandants de Barbe Blanche se lancèrent un regard entendu avant de se mettre à sourire. Nul doute que quand Lîn apprendra le pourquoi du comment de la présence du "bébé commandant" dans un tel endroit, elle allait tout de suite pardonner à Ace. Mais avant ça, elle allait sûrement leur proposer du beau spectacle.
Mya se préparait tranquillement à aller au lit. Elle était en survêtement noir, ayant abandonné les tenues roses depuis qu'elle n'était plus officiellement infirmière à bord. De retour de la cuisine ou elle s'était préparé un savoureux encas, elle était prête à le déguster en lisant un bon livre.
Elle passa devant la cabine ouverte d'Ace et Lîn, s'arrêta deux pas plus loin, avant de reculer. L'infirmière leva son sandwich à sa bouche et en prit une petite bouchée en observant Lîn qui plantait rageusement son poignard de granit dans le dernier avis de recherche de son cher et tendre. Elle n'avait rien trouvé de mieux pour passer ses nerfs.
- Lîn chérie... Que fais-tu ? Ou peut-être devrais-je te demander ce qu'Ace a fait ?
- Il est allé au bordel ! s'écria la jeune femme en plantant son arme plus fort dans le bois.
L'ex-assassin laissa sa lame là où elle était avant de se reculer et de porter ses mains à ses yeux. Non, elle ne pleurerait pas de douleur, de colère oui, mais pas de tristesse.
Mya leva les yeux au ciel, la situation ne l'étonnait pas, ça devait bien arriver à un moment où à un autre, à force de chercher des informations dans ce genre d'endroit.
- Bon, je ne devrais peut être pas te dire ça, mais Ace a une excellente raison de...
- … de laisser une pute se dandiner contre lui avec la main dans son pantalon !
- Oh... fut la seule réponse intelligente de la blonde qui croqua un autre morceau de son sandwich.
Cette réponse fit immédiatement réagir la plus jeune, elle planta son regard d'encre dans celui d'azur de l'infirmière qui tenta de garder un air impassible devant la brune.
- Tu... le savais ?! comprit tout à coup l'ex-assassin.
- J'allais te le dire, Ace a une très bonne explication et ce n'est pas ce que tu crois. Pour le reste, je suis sûre à deux cents pour cent qu'il ne voulait pas fricoter ailleurs, exposa calmement Mya.
Les paroles de l'infirmière réussirent à canaliser un instant la colère de la princesse de l'île du Dragon. Mya avait l'air au courant de ce que son pirate tramait, et qui d'autre encore ? Elle croisa les bras sur sa poitrine en réfléchissant, au moment où Ace cria son nom au loin.
Mya tourna la tête vers lui qui venait de faire irruption au bout du couloir, quand elle reporta son attention sur Lîn, celle-ci avait disparu par le hublot ouvert, n'ayant pas envie d'affronter Ace tout de suite.
- Lîn ! s'écria le pirate en rentrant dans sa cabine, bousculant Mya qui manqua de peu de faire tomber son sandwich au sol.
L'infirmière recula de quelques pas, un sourire aux lèvres.
- J'ai sauvé les meubles. Elle ne quittera pas le bateau, mais tu devrais vite aller la rejoindre sur le pont, expliqua Mya en se dirigeant vers ledit pont. Elle ne voulait pas rater le spectacle, qui allait être sûrement beaucoup plus divertissant que son livre.
Le château de l'île du Dragon était plongé dans l'obscurité. L'air de la nuit était doux en ce milieu d'été. De nombreuses fenêtres étaient ouvertes pour créer des courants d'air qui tentaient de rafraîchir les couloirs et les nombreux appartements du palais. La nuit était déjà bien entamée et pourtant une pièce était encore éclairée. Un bruit de respiration soutenue brisait la quiétude de la nuit, et il attira le souverain des lieux vers cette pièce d'une cinquantaine de mètres carrés aménagée en salle d'entraînement depuis quelques mois maintenant.
Le roi s'arrêta au niveau de la porte et observa silencieusement son fils effectuer des tractions rythmées à deux mains. Il était nettement impressionné par les capacités physiques d'Akio qui avait récupéré tellement vite de ses blessures. Le prince lâcha sa main droite, il resta suspendu par sa "nouvelle" main gauche un instant, hésitant à reprendre puis il décida d'essayer d'atteindre la trentaine de tractions pour ce soir.
Akio recommença son exercice mais il sut immédiatement qu'il ne pourrait pas en faire autant qu'il l'avait espéré, son bras n'ayant pas encore récupéré toute la force qu'il avait perdue durant presque un an sans entraînement ou mouvement. Sa jambe aussi le lançait de temps à autre, en fonction des exercices qu'il s'était imposé contre l'avis de Paracelse. Il utilisait donc une attelle pour la maintenir durant ses exercices et évitait ainsi de trop forcer sur ses os qui avaient été réduits en miettes. Il réalisa une quinzaine de tractions et se laissa tomber délicatement au sol. Il se tourna vers son père et lui adressa un signe de tête, non surpris par sa présence. Sa force physique s'était peut-être affaiblie, mais son instinct était toujours intact.
- Père, vous n'êtes pas couché ? demanda le prince en se saisissant d'une serviette pour éponger son visage dégoulinant de sueur. Son t-shirt était lui aussi trempé et il l'enleva pour passer une chemise sèche.
- Toi non plus. Paracelse t'a bien dit de ne pas trop forcer. Les attaches de ta prothèse sont encore fragiles, ta jambe aussi.
- Je sais, mais c'est tellement... Agréable de pouvoir retrouver son autonomie, déclara Akio en boutonnant sans aide son vêtement.
Voilà maintenant quelques mois que sa jumelle lui avait envoyé cette main biomécanique. Lîn expliquait dans son courrier qu'elle l'avait trouvée au marché noir et qu'elle venait de l'île de Balgimoa, spécialisée dans les cyborgs. Elle lui avait bien expliqué que ce n'était qu'un prototype mais que peut-être Paracelse pourrait faire quelque chose pour l'améliorer.
Les prouesses qu'avait réalisées l'ancien sage, aidé de Dukes leur avait permis de rapidement greffer la main à Akio. Le jumeau de Lîn fit jouer un instant ses doigts, les refermant contre sa paume d'acier.
Akio se rappelait encore de la lettre accompagnant le cadeau de sa soeur. Ils s'écrivaient très régulièrement mais celle-là avait eu le mérite de le faire rire. Surtout la dernière ligne du courrier, écrite d'une écriture un peu brouillonne et venant d'Ace, qui lui signalait que le Prince lui devait un paquet de Berrys. Il semblerait que Lîn pouvait mener son pirate par le bout du nez pour obtenir ce qu'elle voulait. Mais ce que Points Ardents ne savait pas, c'était que le prince n'avait aucune envie de payer son "cadeau".
Akio releva subitement la tête, posant sa main sur son cœur : quand on pensait aux loups… Le roi vit son sourire et l'interrogea du regard.
- Lîn est en colère contre Ace, expliqua-t-il, avec un ton satisfait.
- Akio... commença à le rabrouer le roi.
- C'est sûrement en rapport avec ce qu'il nous a demandé dans son message. À mon avis, la patience de Lîn a lâché. Elle m'avait parlé dans son dernier courrier du changement d'attitude de Portgas, exposa Akio en enlevant l'attelle de sa jambe.
- Oui, c'est vrai, je m'en souviens, sourit le roi en amenant sa canne à son fils. Que lui avais-tu répondu d'ailleurs ?
- Que si elle avait des doutes, elle devait creuser, répondit le prince avec un léger rire en saisissant le morceau de bois travaillé. Il n'en avait plus vraiment besoin, mais après ses entraînements, il appréciait cette aide.
- Tu ne devrais pas mettre des bâtons dans les roues d'Ace. Il a déjà eu du mal à obtenir tout ce qu'il voulait...
- Il n'avait qu'à pas avoir cette excellente idée avant moi. Je suis déçu, j'aurai aimé y penser le premier…
La chaleur émise par l'âtre de la cheminée commençait à baisser. C'était le moment de remettre du bois pour que la cabane ne se refroidisse pas complètement pendant la nuit. Même pendant la saison d'été, l'île de Realtha Tratonna gardait son tempérament froid la nuit, et le soleil ne permettait que de difficilement gagner quelques degrés en pleine journée.
Se levant de sa chaise sans bruit, Jake avisa le tas de bois à côté de la cheminée. Il en sélectionna un de bonne taille avant de le placer correctement dans le foyer. Il resta un moment devant les flammes, perdu dans ses tristes souvenirs des événements des derniers jours.
- Va la voir.
Le blond se tourna vers sa compagne, interrogeant Yumiko du regard. La jeune femme fit un geste de sa main de bois vers la porte de la chambre d'Anita.
- Tu sais comment lui parler. Elle a besoin de toi.
- J'ai les mots, mais c'est toujours toi qu'elle écoute... Tu es mieux placée que moi pour la réconforter, répondit l'ex-assassin en se déplaçant vers elle de sa marche silencieuse.
La couverture polaire qui recouvrait les jambes de Yumiko était tombée au sol quand elle avait montré la porte. Jake la ramassa avant de la lui tendre mais elle la refusa.
- J'ai assez chaud. J'ai plus envie de me dégourdir les jambes.
La brune attrapa ses deux béquilles accrochées dans le dos de son fauteuil roulant. Elle remercia Jake d'un baiser quand il l'aida à se mettre debout, et il ne la lâcha que quand elle fut sûre d'avoir trouvé son équilibre. Elle claudiqua quelques pas avant de tourner sa tête vers la porte de la chambre d'Anita qui venait de s'ouvrir. La brune attendit que l'adolescente sorte de son antre, celle-ci le fit d'un pas hésitant, sans oser affronter leur regard. Anita se dirigea vers la cheminée. Elle renifla peu gracieusement et finit par se frotter le bout du nez avec sa manche. Elle sursauta quand Jake se mit à ses côtés, Yumiko prit place plus lentement à sa droite.
L'adolescente lâcha finalement ce qu'elle avait sur le cœur.
- Je... Je veux pas que vous partiez sans moi... sanglota la brunette.
- Pourquoi penses-tu que nous allons te laisser ? l'interrogea Jake.
- Je vous ai entendus ce matin... Avant... Avant l'enterrement de grand-père !
Alors c'était ça, les deux adultes pensaient que c'était l'épreuve du deuil qui avait rendu la petite distante toute la journée. Mais non, c'était leur évocation de quitter cette île.
- Tu es stupide, la réprimanda Yumiko.
Jake lui coula un regard en biais devant le manque de tact de sa compagne et Anita la fixa avec ses grands yeux bruns, surprise. Sa frange ne lui tombait plus devant son regard à présent. En un an de temps, elle les avait laissé pousser pour qu'elle puisse les mettre derrière ses oreilles, le palmier qui lui servait de coiffure avait disparu et c'était maintenant de jolies boucles bien dessinées qui lui cascadaient dans le dos.
- Que...
- Ce serait faire honte à grand-père si nous t'abandonnions ici. Nous voulons t'emmener avec nous, te faire découvrir le monde ! s'exclama la brune en montrant de sa béquille la fenêtre qui donnait sur le noir de la nuit.
La petite, quant à elle, jeta un regard au blond qui acquiesça de la tête avant de reprendre la suite de Yumiko qui se détournait pour retourner dans son fauteuil roulant.
- Anita, nous aimerions trouver une île plus accueillante. Mais si tu veux que nous restions ici encore un peu...
- Non... Je crois que c'est bon. Grand père... Il aurait pas voulu que je continue de pleurer sur sa tombe.
Jake approuva de la tête. Anita reprit :
- Yumiko a raison... Je suis stupide.
- Et un peu naïve, je te le dis tout le temps, renchérit la brune en tentant de s'installer plus confortablement dans son fauteuil.
Anita leva les yeux au ciel. Elle s'approcha rapidement de son aînée et l'aida à placer ses jambes comme il le fallait pour que le sang circule bien. Jake activa les braises du feu avec le tisonnier, avant de s'installer de nouveau à la table. Anita, quant à elle, s'assit sur l'accoudoir de la brune, penchant la tête en arrière pour bien déployer ses cheveux dans son dos, dans une demande muette adressée à l'ex-femme assassin. Yumiko eut un petit sourire et se saisit de la brosse à cheveux qu'elle avait toujours à portée de main. Ce rituel étant assez régulier au cours de la journée.
Jake les observa attentivement durant leur petit moment à toutes les deux. Au début, quand Yumiko s'était réveillée quelques mois après son "accident", celle-ci nourrissait de profondes rancunes envers tout le monde. Ses jambes ne fonctionnaient plus comme avant, sa main coupée l'empêchait d'utiliser des béquilles. Elle repoussait tout le monde, y compris le blond, ainsi que les efforts et attentions d'Anita qui s'était mis en tête de s'occuper d'elle. La petite prenait son rôle très au sérieux, parfois à devenir trop envahissante et c'était des cris de rage qui résonnaient alors dans la cabane.
Le grand-père avait tenté de faire comprendre à sa petite fille que son entêtement n'était pas la meilleure solution. Jake, lui, culpabilisait de l'état de la femme qu'il aimait et Yumiko ne l'aidait pas à se sentir mieux avec son attitude. Puis, un soir, le grand père avait tapé du poing sur la table, dans le vrai sens du terme.
- Vous êtes vraiment bêtes la jeunesse ! Il va falloir que chacun d'entre vous fasse un effort ! Jake ! Ce n'est pas en te morfondant que tu trouveras une solution pour Yumiko ! Yumiko ! Ce n'est pas comme ça que tu dois utiliser ta colère ! Tu dois l'utiliser pour te battre et pour avancer ! Et toi Anita ! Je te prierais de penser aussi à ce que veulent les autres avant de te borner à croire que tu sais ce qui est bon pour eux !
- Qu'est-ce que vous en savez de la souffrance ?! s'écria Yumiko. Vous n'êtes...
- Ma femme, ma fille et mon gendre sont morts parce que j'étais trop soûl à longueur de temps pour aller pêcher ! Si j'avais été sobre, c'est moi que cette tempête aurait emmené par le fond ! Et je remercie dieu chaque jour que ma fille ait pensé à confier Anita à l'une des marchandes de poissons du village avant ce désastre !
La tirade du grand père laissa place à un silence religieux. Tous les jeunes de la pièce le fixaient alors qu'il se rasseyait en se tenant le dos et en grommelant. Et ce fut apparemment le coup de pied aux fesses dont ils avaient tous besoin pour avancer.
Yumiko se montra plus patiente à l'encontre de sa petite infirmière, la petite infirmière devint moins envahissante et la laissait tranquille quand le besoin d'être seule se faisait sentir. Jake commença à sculpter une main de bois, qui permettrait à son amour de retrouver un peu d'autonomie. Aidé du grand père, il modifia une chaise en chaise roulante et sculpta deux solides béquilles pour que Yumiko puisse se déplacer sans constamment demander de l'aide et ainsi commencer une longue rééducation. Ses jambes n'étaient pas devenues complètement insensibles et l'espoir qu'elle puisse un jour remarcher sans aide la faisait tenir.
À côté de tout ça, Anita avait voulu que Jake l'entraîne au combat. Au début le blond avait refusé, il ne voulait pas lui faire subir ce qu'eux avait vécu. Puis Yumiko l'avait frappé derrière la tête en lui disant que des cours beaucoup plus soft étaient largement suffisants.
Ce fut un soir après ces longues heures d'entraînement et après avoir pris une douche bien méritée qu'Anita demanda à Yumiko de la coiffer. Élevée par son grand-père, sans aucune référence féminine, elle avait voulu trouver en Yumiko une soeur et une amie. Grand-père n'en avait été que plus heureux de voir la paix régner de nouveau dans sa maison.
Et aujourd'hui, le grand père n'était plus là.
- Je peux choisir la première destination ? demanda Anita en sautant de son perchoir.
Les deux adultes hochèrent la tête, puis ils le regrettèrent rapidement.
- Je veux aller sur l'île du Dragon.
Quand Ace débarqua de nouveau sur le pont accompagné de Mya, il remarqua immédiatement que ses compagnons s'étaient installés comme pour assister à un spectacle de rue. Il grommela contre leur indiscrétion et repéra Lîn qui était à genoux sur le sol, face à Izou qui avait sorti tout son nécessaire à thé. Il en servit une tasse à Lîn qui ne bougeait pas, fixant sa tasse d'un air absent.
Apparemment elle avait retrouvé son calme, du moins en apparence. Elle sentit le regard d'Ace sur elle et se releva pour lui faire face pendant qu'il s'approchait. Elle tendit sa tasse à Izou. Son pirate s'arrêta à quelques pas, essayant d'ignorer les regards des commandants et autres membres de l'équipage du Phénix. Lîn croisa les bras, le fixant dans les yeux et il remarqua ses paupières gonflées et rougies. Il était temps de révéler sa surprise, même s'il n'en avait pas tous les éléments. Il n'aimait pas voir sa princesse triste.
- Lîn, je vais tout t'expliquer, promis. Mais est-ce que l'on ne pourrait pas aller dans un endroit plus...
- Nous sommes très bien ici, trancha la jeune femme. De plus, comme apparemment tout le monde est déjà au courant, ça ne devrait pas te déranger.
Ace crispa la mâchoire et prit une grande inspiration.
- Si je suis allé là-haut, c'était pour te faire une surprise...
- … Et ça a bien réussi... répondit la jeune femme, les yeux un peu plus brillants.
- Je te jure qu'elle a été trop rapide pour que je puisse...
- ... L'empêcher de mettre ses mains là où je pense ? Est-ce que Ace aux Poings Ardents s'ennuie à mes côtés pour passer tout son temps libre dans les bordels ?!
- Quoi ?! Déjà ce n'est pas pour ce que tu crois ! Et qu'est-ce que tu veux que je te dise ?! râla le jeune pirate face à l'agressivité de sa femme. Je ne vais pas te mentir en disant que ma virilité a été flattée quand elle m'a dit qu'elle aimait ma belle gueule ! Mais je ne m'attendais pas à une telle rapidité de mouvement!
La jeune femme desserra ses bras croisés et Ace comprit qu'il allait avoir droit à de sacrées représailles. Les autres pirates et Mya secouèrent la tête en réponse à la tirade du fils du roi des pirates. Il était juste en train de s'enfoncer. Ace allait rajouter quelque chose pour rattraper la véritable connerie qu'il venait de sortir, quand le cri familier d'un Martin Facteur les avertit de la venue d'un courrier imminent.
Le volatile relâcha son chargement directement sur Ace qui attrapa de justesse le tube de transport. Son regard s'illumina, pile à temps.
Lîn le regarda faire en train de sortir un rouleau de parchemin de sa boîte. Il lui tendit pour qu'elle puisse le dérouler elle-même.
- C'est pour ça que je faisais des recherches. Les catins sont les meilleures informatrices qui soient. Leurs clients passent leur temps à se vanter de leurs excursions, expliqua-t-il en secouant le rouleau. Lîn s'en saisit enfin d'un geste brusque, ignorant son sourire.
La jeune femme déroula le rouleau de papier. Elle repéra directement en bas à droite le symbole de la guilde, le dragon à la dague. Son regard parcourut ce qui s'avérait finalement être une carte. Le nom d'une île et les indications pour s'y rendre étaient tout à fait précis. Mais malgré tout ça la princesse ne comprenait pas.
- Ace, je crois que ma patience s'épuise... gronda la princesse, avant d'être coupée par son pirate qui lui fit l'un de ses grands sourires dont lui seul avait le secret.
- Ça fait plus d'un an qu'on navigue ensemble, je me suis dit que pour l'occasion nous pourrions aller visiter cette île. C'est celle de Lorkarn.
La respiration de Lîn se coupa en entendant l'explication du brun et le nom de son ancien protecteur et elle n'osa plus faire un geste de peur d'abîmer la carte.
- J'ai demandé à ton père s'il pouvait me trouver cette carte dans les archives de la guilde. Les infos que je demandais partout, c'était pour éviter que l'on se retrouve à faire une excursion du même type de Vacio, expliqua le brun pendant que Marco, curieux, s'approchait pour prendre la carte des mains de Lîn qui tremblaient légèrement.
L'instant d'après, elle se jeta au cou du brun, le serrant fort contre elle pendant qu'il riait. L'ensemble de l'équipage lança un "hourra" sonore, même s'ils étaient un peu déçus. Lîn les avait habitués à plus de représailles quand Ace faisait des choses qui ne lui plaisaient pas.
- Tu es vraiment incroyable... Il me reste tout de même un truc à régler... murmura Lîn. Puis elle le relâcha pour aller chercher son thé qui attendait sagement dans les mains d'Izou.
Ace la regarda faire en poussant un très discret soupir de soulagement, cette fois-ci il n'allait pas avoir droit aux vengeances dont sa princesse avait le secret. Puis il vit autour de la tasse que Lîn venait de prendre en main les flammes noires et violettes caractéristiques du feu glacial. Son thé était trop chaud ? C'est ça qu'elle voulait régler ?
L'instant d'après, Lîn était près de lui, avait tiré l'avant du bermuda du pirate et avait versé le liquide glacé à l'intérieur. Le silence se fit sur le pont pendant que le brun avait un sourire crispé, et que tout son corps tremblant tentait de résister aux stimuli qu'il venait de recevoir.
- Ahhh ! Lîn ! C'est glacé !
- Dis-moi Ace, demanda Lîn d'une voix mielleuse, la tasse de thé couverte de givre encore à la main. Est-ce que ta "virilité" est toujours aussi flattée d'attirer les femmes ?
Mya prit une autre bouchée de son sandwich en regardant le brun se rouler au sol en s'attrapant l'entre-jambe sous les moqueries de ses frères.
Oh oui, Lîn et Ace en train de se disputer en utilisant des coups-bas, c'était vraiment un meilleur spectacle que son livre.
Le spectacle de désolation du petit village ravissait les pirates qui venaient de le saccager. Les pillards exécutaient les habitants blessés qu'ils jugeaient inutiles, finissaient de s'occuper des femmes qu'ils avaient trouvées sur leur chemin. D'autres regroupaient les survivants sans délicatesse, les hommes les plus forts d'un côté, les femmes de l'autre, sans parler des enfants qui étaient déjà entassés dans une cage. Des cris de désespoirs et de douleur résonnaient en tous sens, les mères appelant leurs enfants, ou tentant de les rassurer dans la cacophonie ambiante et dans la lueur des flammes qui brûlaient les maisons.
Deux pirates coiffés de tricornes sortirent de l'une des habitations encore épargnée par les flammes. L'un d'eux tirait une jeune fille, dont les vêtements étaient déchirés, par la main. Il la jeta vers l'amas de femmes qui la réceptionnèrent, cachant le corps à demi dénudé.
- Eh eh mon frère, tu sens cette odeur de pognon... On va faire une belle vente avec tout ça ! se félicita le pirate au tricorne orné d'oreilles de rat.
- Pour sûr frangin ! Et en plus on va en profiter un max le temps de la traversée ! lui répondit l'autre homme au tricorne d'oreilles de chat en lorgnant sur le groupe de femmes.
- Capitaine It ! Capitaine Scrat ! Nous avons enfin l'info qui nous manquait ! hurla l'un des hommes. Les agents l'ont trouvée !
Les deux compères se tournèrent vers le second de leur équipage, un homme de petite taille, bedonnant, aux cheveux hirsutes et au teint jaunâtre, le foie usé par les quantités d'alcool qu'il buvait à longueur de temps. Il arriva devant ses deux capitaines, essoufflé, sortit une fiole en argent de son gilet ouvert et but une longue rasade de rhum.
- Eh bien parle Bart ! s'impatienta l'homme aux oreilles de souris avant que ta boisson te fasse éclater la barrique qui te sert de ventre !
- Oui, capitaine Scrat ! On a le plan ! On sait où trouver l'île du monstre qu'a sauvé le gamin de Roger à Marinford !
- Ha ha ha ! se mit à rire de contentement Scrat. C'est le moment pour les frères Chy de se remettre en chasse ! Le temps de débarquer la nouvelle marchandise et nous allons pouvoir offrir son plus beau cadeau au Joker ! Ah ah ah !
"Il n'y a pas de liberté sans risque, sans ignorance, sans aventure."
Jacques Attali
À suivre...
