Vivre au Présent

Disclamer : One Pièce et ses personnages originaux sont à Oda. Je ne fais que les emprunter…

Résumé : "Quel que soit ce que le moment présent contient, acceptez-le comme si vous l'aviez choisi. – Eckhart Tolle" Un an s'est écoulé depuis qu'ils ont tous brisé leurs chaînes, venez découvrir leurs nouvelles aventures... Suite de "Liberté d'Avenir" (lien dans mon profil)

NDLA : Bien le bonjour à tous ! Oulala, ça fait un moment que je n'avais pas publié… manque de temps, d'inspiration, reprise sur reprise de ce chapitre… bref ! Plein d'éléments variables que je ne vous détaillerais pas !

Chapitre très long, histoire de me faire pardonner mon retard !

Bonne lecture à tous !


Chapitre 11 : Purgatoire

Le soleil commençait tout juste à se lever quand Lîn émergea lentement du sommeil. Percluse de douleur avec une légère migraine qui tambourinait dans son crâne, elle était encore à demi allongée sur son frère. Elle mit un moment à réaliser où elle se trouvait et se releva lentement dans l'intention de s'asseoir sans réveiller son jumeau.

Les traits du visage d'Akio étaient tirés, il n'avait pas dû beaucoup dormir cette nuit et sûrement à cause d'elle…

La tentation de lui caresser le visage fut trop forte et elle leva la main avec l'intention d'effleurer le contour de sa joue, mais elle s'arrêta net quand elle vit son poignet bandé. Elle reporta son attention sur ses bras meurtris et les leva devant son visage.

Qu'est-ce qu'il lui était arrivée ? Tellement perturbée par son réveil d'hier, elle n'avait pas senti les bandes de gaze autour de ses avant-bras.

La panique la gagna quand Lîn sentit le tiraillement de son entrejambe et son cœur s'emballa. Elle ne voyait qu'une raison pour avoir mal à cet endroit. La nausée la prit, un froid incontrôlé s'empara de son corps et elle se mit à trembler. La princesse respira lentement malgré tout et s'écarta de son jumeau toujours endormi. Elle se leva avec peine, des suppositions plus horribles les unes que les autres toujours à l'esprit, et c'est là qu'elle vit une silhouette qui courait sur le sol et longeait les murs.

Un rat…

L'animal eut le mérite de la distraire de son état de panique. Son humeur permuta complètement, sauf le froid toujours présent qui s'intensifia. La sensation que ce rat était le responsable de tous ses maux la mit dans une colère noire. Son regard se durcit, cette bestiole devait être annihilée.

L'animal au pelage brun-noir fit le tour de la pièce pour se diriger vers un meuble qui était fixé au mur. Il se blottit dans un coin, s'appuya sur ses pattes arrières et lécha avec application ses pattes avant. Il jeta un regard dédaigneux à Lîn quand elle se dirigea vers le pied de perfusion pour l'attraper. Elle le prit comme elle aurait saisi une lance, le fit tournoyer sans bruit autour de sa main pour le positionner et dans un geste souple et sans aucune hésitation, elle le lança directement sur la pauvre bête qui n'avait pas prévu l'attaque, trop habitué aux hommes qui ne faisaient pas attention à lui. Coincé entre le mur et la commode, le rat ne réussit pas à l'éviter et couina de douleur quand le métal du crochet le perfora sur le côté.

Le vacarme réveilla Akio en sursaut et dans un état encore second, il vit Lîn récupérer son arme improvisée, le rat toujours planté dessus qui s'agitait en tout sens pour tenter de se dégager. La princesse porta la pauvre bête devant son visage, le fixa quelques secondes, le regard vide. Insensible à sa souffrance, elle leva plus haut le pied de sérum et le frappa au sol encore et encore.

L'animal mourut dès le premier coup mais la princesse n'en avait pas assez.

Le peu de sang que contenait le cadavre du rat giclait en de fines éclaboussures. Akio, enfin remit de sa surprise, sauta du lit pour désarmer Lîn. Elle lâcha le pied de perfusion qui émit un tintement presque mélodieux en tombant au sol, à contrario du bruit humide du corps de la bête quand il se détacha enfin du métal.

- Lîn ! Calme-toi ! Qu'est-ce qui te prends ?!

- Ce parasite doit disparaître ! hurla sa sœur en voulant reprendre son arme improvisée mais son frère l'immobilisa dos contre son torse en l'entourant de ses bras.

La fatigue commençait à jouer sur la patience d'Akio, sans parler de ses blessures. Il avait mis presque toute la nuit à s'endormir, son esprit essayant de classer les nombreux scénari qui se déclencheraient en étant constamment aux côtés de sa moitié durant les prochains jours. Puis il avait divagué en imaginant que cela pourrait durer des semaines, des mois… Ou bien même des années si Lîn ne retrouvait pas la mémoire et gardait les sentiments qu'elle avait pour lui tout aussi passionné que ce qu'elle avait démontrée la veille. Ce ne fut que bien tard dans la nuit, quand il avait fini par se dire qu'il s'adapterait à toutes situations pour garder sa sœur avec lui, qu'Akio s'était enfin endormi.

Lîn fit une prise pour se dégager de son frère qui préféra la relâcher pour ne pas qu'elle se blesse. Elle fit quelques pas et se tourna vers lui, pliée en deux la main sur le pansement de son flanc.

L'attitude de Lîn changea du tout au tout. Le désarroi s'empara d'elle. Son frère ne comprenait pas, il ne voulait pas l'aider. Elle tomba à quatre pattes au sol et le frappa plusieurs fois de son poing fermé, ses cheveux tombèrent devant son visage et elle se mit à pleurer encore plus fort. Sa bonne résolution de la veille fondit comme neige au soleil, ignorer ce qui lui était arrivé ne lui convenait plus du tout.

-Je veux savoir, Akio. Pitié dis le moi… J'ai tellement mal, froid…

-Lîn, murmura son frère.

Il approcha pour l'aider et la couvrir de la couverture qui avait glissé du lit.

-Je te l'ai déjà dit, Lorkarn…

Il ne put aller plus loin quand Lîn se mit à hurler des injures destinées au prince et à la chimère.


-Elle hurle après Akio ?

Anita écoutait avec inquiétude les cris de Lîn qui passaient à travers la paroi. Tous les mots n'étaient pas parfaitement audibles, mais elle en avait clairement après son frère et Lorkarn.

-Ash, qu'est-ce que l'on fait ? demanda Yumiko.

-Qu'est-ce qu'il n'a pas compris votre prince dans « Cocon émotionnel » ? grommela l'albinos en massant ses tempes.

Le bateau naviguait vite et son mal de mer avait repris, accompagné d'un mal de crâne qui ne passait pas.

-Ash ? Ça va ? lui demanda Jake.

-C'est pas moi le plus urgent… Lîn aime Lorkarn comme un père, amenez-lui. Peut être que ça la rassurera.


La porte de la cabine s'ouvrit pour laisser entrer Yumiko, suivie de près par Jake. Anita resta en retrait dans le couloir pendant que ses deux amis entraient. Elle portait avec précaution la chimère dans ses bras. Le couple analysa la scène en quelques secondes, le rat mutilé, Lîn qui continuait d'hurler et Akio qui semblait rester stoïque face à tout cela.

Les bras le long du corps et les poings serrés, il observait sa jumelle avec un regard qui aurait pu paraître aussi froid que celui qu'il réservait aux victimes de la guilde. Mais la lueur au fond de ses yeux ne trompa pas Jake et Yumiko. Les cris de Lîn reprirent de plus belles.

-Sors d'ici ! Je ne veux plus te voir ! Si tu ne me dis rien, alors va t'en !

-Akio, l'appela Jake. Viens, nous allons chercher de quoi manger. Yumiko va rester s'occuper de Lîn avec Anita. Lîn, regarde, Lorkarn est là.

Jake invita Anita à entrer. Lîn s'était assise sur ses jambes repliées. Elle s'était arrêtée net en voyant l'état de son protecteur, dans les bras d'une jeune fille qu'elle ne connaissait pas.

Toujours inconscient, les volutes de brouillard continuaient d'apparaître et de disparaître. La princesse tendit lentement ses bras et Anita glissa avec douceur l'animal dedans. Le silence s'installa quand elle la serra contre elle et elle se coupa volontairement du monde pour ressentir la chaleur de son protecteur.

-Allez Akio, laissons-les, l'appela Jake une seconde fois en lui montrant la porte.

Sans répondre, le prince se dirigea vers la sortie. Jake referma derrière eux et le silence du couloir vint apporter un moment de calme dans le cœur du prince.

- Lîn t'a frappé ? l'interrogea Jake pendant qu'ils se dirigeaient ensemble vers la salle commune.

Akio ne comprit pas de quoi il parlait jusqu'a ce que le blond précise sa pensée en montrant sa propre lèvre :

- Ta lèvre…

- Tu t'inquiètes pour moi ? Très ironique, venant de l'homme qui m'a tranché la main…

- Juste retour de tes actions passées…

- Je te l'accorde, répliqua Akio. Quant à ce qui se passe entre Lîn et moi, ça ne regarde personne.

Le regard du blond se fit plus acéré et il attrapa Akio par l'épaule pour le plaquer contre le mur. Le bras de Jake appuyé en travers de sa gorge, le prince préféra ne pas réagir, attendant la suite.

-Méfie-toi Akio. Ace a été mis à l'écart de force, mais rien ne m'empêche de finir ce que j'ai commencé avec toi pour protéger Lîn. Même la promesse que je lui ai faite sur ce balcon.

De quoi parlait Jake, Akio n'en avait aucune idée. Le prince repoussa lentement le bras du blond pour se dégager et reprendre sa marche. Akio allait devoir se montrer prudent, car il savait parfaitement de quoi Jake était capable. Et si l'occasion se présentait pour l'éliminer, il ne ferait pas deux fois la même erreur.

L'ancien assassin aux yeux émeraude le suivit du regard quelques mètres avant de le rejoindre. La mise au point étant faite, il était temps de mettre tout en œuvre pour que tout reprenne sa place.


Un pic-vert ne ferait pas mieux pour attiser son mal de crâne. Mêlé aux autres membres d'équipage dans la salle commune, Sabo se mit à gémir et laissa tomber sa tête un peu fort sur la table. Son cerveau protesta et l'oiseau qui y avait élu domicile frappa de plus belle.

Les relents alcoolisés de son haleine lui provoquèrent un haut le cœur qu'il ravala avec difficulté. Le révolutionnaire avait suivi Ace dans son concours de boisson improvisé durant leur nuit dans le nid de pie. Ace avait fini par oublier un temps soi peu la situation de Lîn, aidé de Sabo, et de quelques bouteilles de saké. Ils s'étaient rappelés l'un après l'autre les souvenirs de gamins des rues chez les brigands, puis leur début sur la Grand Line, pour l'un dans la piraterie, pour l'autre chez les révolutionnaires.

Deux chopes furent brutalement claquées sur la table devant eux, leur arrachant une grimace et plaintes de la part d'Ace, aussi mal en point que son frère de cœur. Il décolla difficilement son front du plateau de bois.

-Bordel Mya ! Doucement ! râla le pirate en observant le comprimé effervescent fondre dans le verre.

-Aspirine… Ne me remercie pas sale gosse, sourit Mya en reprenant le verre et en le claquant un peu plus fort sur le bois.

-Merci Mya, marmonna Sabo en relevant enfin la tête, les yeux vitreux et le teint verdâtre.

Le blond attrapa l'anse de la chope pour la tendre vers Ace qui en fit de même; un sourire amusé plaqué sur les lèvres.

-A la tienne frangin…

Les deux frères claquèrent lentement leur verre, l'avalèrent d'une traite et tirèrent simultanément la langue de dégoût.

-Y'a pas que de l'aspirine là-dedans ! Pouah !

-Bien deviné ! Chou Kale macéré pour drainer le foie, citron et gingembre pour supprimer les nausées ! s'exclama Mya fière d'elle, sous le rire de Marco qui s'approchait.

Cette femme pouvait être une vrai sorcière quand elle s'y mettait. D'où provenaient ces idées tordues ? Puis Marco avisa Akio et Jake qui entrèrent dans la pièce. Le prince ne semblait pas non plus dans sa meilleure forme.

-Mya, Tu vas pouvoir tester une autre de tes potions sur Akio.

Mya se retourna vers le prince que lui montrait le capitaine d'un mouvement de menton. Ace se redressa, trop vite au goût de son crâne mais son inquiétude pour Lîn fut plus forte que son vertige. Il attendit quelques instants, repoussant son envie de se jeter sur Akio. Sabo sentit son malaise et tira légèrement sur son bras pour qu'il reste assis.

-Mya va te donner des nouvelles. Inutile d'aller au contact.

-J' vais pas forcément le frapper pour qu'il me dise ce qu'il s'passe… marmonna le brun en poussant brusquement son verre vide.

-Mais oui… mais oui… s'amusa Sabo. T'as une gueule de bois et même si je ne te connais pas dans cet état, je me doute que le mot de trop mettrait… Le feu aux poudres ! plaisanta le révolutionnaire.

De nouveaux marmonnements lui répondirent, prouvant à Sabo qu'il avait raison. Mécontent, Ace posa sa joue sur son poing et se contenta d'observer l'échange entre les deux « chaperons » attitrés de Lîn.

Fatigué, Akio entendit des talons claquer sur le parquet, signe que Mya s'approchait de lui. Le prince redressa la tête vers l'infirmière et elle put constater l'éclat terne de ses prunelles nuits.

S'en suivit un échange un peu animé où Akio expliqua à Mya qu'il valait mieux qu'elle laisse Yumiko s'occuper de Lîn. Cette décision fit réagir la blonde qui protesta mais le prince resta catégorique. Il termina la discussion en montrant le buffet du petit déjeuner et en annonçant qu'il allait ramener à manger aux filles.

Jake, qui n'avait pas fait un geste, retînt Mya de poursuivre en s'interposant entre elle et Akio.

-Mya, laisse Yumiko s'occuper de Lîn. Je me doute que c'est dur pour vous tous, mais ça lui permettra de se rétablir plus vite.

Sans laisser le temps à d'autres protestations, l'ancien assassin s'empressa de rejoindre Akio sous l'air méfiant de Mya qui resta plantée au milieu de la pièce les bras croisés, son pied tapant le sol nerveusement. Son attitude attisa le mécontentement d'Ace quand il vit que Mya renonçait et s'éloignait.

-Sab… Y a un truc qui me plait pas du tout… annonça Ace en fixant les deux hommes qui sortirent de la pièce avec deux plateaux chargés.

-Loin de moi l'idée de rajouter de l'huile sur le feu… et c'est sans mauvais jeu de mot, rajouta Marco quand il vit Ace lever les yeux au ciel. J'ai le calcul du trajet pour Darkfog…

-Ça va être plus long que prévu… c'est ça ? comprit instantané le fils de Gol D Roger.

-Oui, confirma le capitaine. Nous avons dû continuer notre route vers la prochaine île après la destruction de l'équipage des frères Chy, donc on s'est éloignés. À partir de notre prochaine destination, il faudra espérer que le vent et les courants nous soient favorables…ce qui nous donne une quinzaine de jours au minimum.


Deux jours, deux longues journées ou Yumiko s'était appliquée à veiller sur la princesse. Lîn avait alterné phase de sommeil et de réveil mais n'était pas du tout reposée pour autant. Elle avait très peu mangé ce qu'Akio lui avait apporté et elle l'avait ensuite chassé de la pièce depuis la veille. Elle avait toujours mal aux poignets, au flanc gauche et surtout elle avait toujours froid et de plus en plus. La douleur entre ses cuisses, qu'elle avait préféré garder secrète, s'était estompée et elle crut l'avoir rêvé. Yumiko lui avait appris qu'elle avait reçu une faible dose de sang de dragon, ce devrait être pour ça.

Avec regret, elle avait laissé Anita ramener Lorkarn dans leur cabine après seulement quelques heures passées avec lui, sans qu'il ne lui soit précisé que c'était pour le laisser sous la surveillance d'Ash, le plus à même de vérifier l'état de guérison de la chimère.

Yumiko avait tenté de la réchauffer avec d'autres couvertures, une bouillotte chauffe-lit en cuivre, mais rien n'y faisait. Dans ces moments d'impuissance, Lîn se mettait en colère et hurlait de rage, puis elle pleurait. La première fois, Akio, qui avait décidé de rester dans sa cabine, avait accouru pour la consoler. Mais sa présence énervait sa jumelle et elle lui avait interdit de revenir tant qu'il n'aurait pas de solution.

Anita avait fini par laisser Yumiko seule avec Lîn. Elle avait accompagné Jake, qui préférait s'occuper sur le bateau. Marco avait reçu cette demande avec un sourire moqueur, en lui annonçant que la cabine de Mya avait été victime d'une explosion et qu'elle avait besoin d'être réparée. Cette remarque avait fait rougir Anita jusqu'aux oreilles et elle avait intégré avec le blond l'équipe de pirates qui se chargeait des travaux de menuiseries navales.

En allant chercher du matériel dans les cales, elle était tombée sur la réserve de vêtements et de fourrures, un butin volumineux volé aux navires marchands qui avaient croisé la route des pirates du Phénix. Elle avait ouvert les malles et les caisses avec curiosité. Il y en avait pour tous les goûts et toutes les tailles.

-Tu cherches quelque chose ?

La jeune fille sursauta un grand coup et se retourna le cœur battant pour se retrouver face à un homme qui portait un masque. Trop absorbée par l'idée qui germait dans son crâne, elle n'avait plus fait attention à son environnement. Le pirate attendit sa réponse, les bras croisés. Voyant qu'elle ne semblait pas décidée, il prit la parole :

-Tu es la petite qui accompagne les amis de Lîn.

-Oui… Vous connaissez Lîn ?

-Attends… Je réfléchis… Ah oui ! Nous faisons partie du même équipage ! se moqua Masked Deuce.

Anita préféra ne pas répondre et referma la caisse qu'elle venait d'ouvrir. Ce que dégageait cet homme était vraiment sympathique, mais elle devait quand même se méfier. Il continua les présentations :

-Tu peux m'appeler Deuce. J'ai été le second de l'équipage des Spades alors je connais plutôt bien nos tourtereaux. Tu as besoin de quelque chose ?

-En fait… je me demandais si je pouvais prendre des vêtements chauds et une cape en fourrure pour Lîn.


Les vêtements et la cape n'avaient pas eut grand effet. Anita avait choisi avec soin une chemise à manche longue qui descendait sur les cuisses et un jupon de laine. Une robe bleue nuit corsetée en laine également avait complété le tout. Puis elle avait installé la capeline, faite en fourrure d'ours brun, d'après Anita, sur la princesse.

La jeune fille l' avait donnée à Lîn à la fin d'après-midi du premier jour avant de retourner aider Jake. Quand elle était revenue au coucher du soleil pour avoir des nouvelles, la princesse avait toujours froid, presque frigorifiée. Yumiko ne sut pas quoi faire de plus quand le soir du second jour, Lîn se mit à pleurer encore une fois.

-Laisse-moi…

-Lîn…

-Laissez-moi tranquille ! Tous ! Je ne vous supporte plus ! s'emporta la jeune femme.

Yumiko la regarda fixement pendant que Lîn, qui était assise sur son lit et adossée au mur, se camoufla sous la capuche de la fourrure en entourant ses jambes repliées de ses bras. Ses sanglots étouffés par le tissu qui couvrait son visage, résonnaient dans le silence de la chambre.

Yumiko capitula en soupirant. Elle rajusta tout de même la peau de bête sur la tête de son ancienne meilleure amie. Elle frotta son épaule et Lîn fit un mouvement pour se dégager.

-On te laisse. Si tu as besoin de quoique ce soit, appelles-nous. Les murs sont fins et notre cabine est juste à gauche. Akio est encore après si tu veux le voir. Bonne nuit Lîn.

La princesse ne répondit pas. Yumiko poussa doucement Anita devant elle pour l'obliger à sortir.

-Je pensais que ça irait mieux avec la fourrure, on ne peut pas la laisser comme ça jusqu'à Darkfog, soupira Anita quand son aînée eut refermé doucement la porte.

-Moi aussi, mais je crois que seul Ace pourrait arranger ce problème.

-Alors je vais le chercher ! annonça la brunette avec un élan de volonté. Pas question qu'elle se laisse abattre si facilement.

-Ash a été clair ma chérie… tenta Yumiko pour la raisonner.

Anita s'élança avant que Yumiko ne puisse l'arrêter. L'ancien assassin dodelina de la tête avec un sourire. Sa petite protégée avait de la ressource quand il fallait s'occuper des autres. La brune était là pour en témoigner. Elle avait parfaitement confiance en elle pour trouver une solution stable qui arrangerait les choses pour Lîn et Ace.


Ce fut avec une grande dose de détermination qu' Anita se dirigea vers la salle commune. De nombreux pirates faisaient le trajet en même temps qu'elle, leur nombre les empêchait de prendre leur repas en même temps et la cuisine était sollicitée presque en permanence.

Malgré le brouhaha, la jeune fille entendit l'un des hommes l'appeler. Elle s'arrêta d'un coup, manquant de faire tomber un grand pirate en se retrouvant dans ses jambes. Elle s'excusa prestement et se dirigea vers Deuce qui lui faisait signe.

-Alors Anita, qu'est-ce que ça a donné la fourrure ?

-Rien… expliqua-t-elle avec une moue déçue. Alors je vais chercher Ace !

-Oulah… Bon courage… Pas sûr qu'il soit disposé…

-Quand il aura des nouvelles de Lîn, il fera le bon choix !


- Non.

Dire qu'Anita ne s'y attendait pas fut un euphémisme… Sa mâchoire s'entrouvrit sous le coup de la surprise et elle resta bloquée sur cette réponse plus que catégorique. Ace plaqua avec force sur la table la chope de bière qu'il buvait et s'essuya négligemment la bouche avec le dos de sa main.

Le regard brillant à cause de l'alcool qu'il avait ingéré toute la soirée, il jeta un coup d'œil dans son verre avant de tenter de recentrer son attention sur Anita. Il la menaça du doigt, sauf qu'il montrait l'espace vide à côté de la jeune fille.

-Tu l' sais pas le chaton ?! J'dois pas l'aider !

-Mais…

-Laisse tomber Anita, cette bourrique est pas prête de quitter cette table ! pestait Sabo en essayant de prendre la chope du brun qui ne se laissait pas faire.

Le révolutionnaire n'avait pas pensé qu' Ace avait gardé la sale manie de faire dans l'excès et l'auto-flagellation. Deux jours qu'il n'arrivait pas à lui faire entendre raison et à l'emmener se coucher au nid de pie ou dans sa cabine. Boire était bien plus attrayant apparemment !

-À moi ! Pas touche ! Eh Deuce ! T'es là aussi.

Son ancien second avait décidé d'accompagner Anita. Il avait bien fait. C'était le moment pour lui d'intervenir.

-Oui, pour t'amener à Lîn en te trainant par les pieds. Dans cinq secondes d'après ce que je vois.

-Ah ouais ! Bah ça je veux bien voir ! spèce de…

Le fils de Gol D Roger n'en rajouta pas plus. Il s'écroula sur la table avec un bruit de frappe sonore et Sabo put enfin lui retirer sa chope de bière.

Sans attendre et sans aucune délicatesse, Deuce frappa le pied du tabouret sur lequel son ancien capitaine était assis. Il s'étala au sol, sans se réveiller et le masqué attrapa sa cheville pour le tirer sans ménagement vers la sortie, sans que les pirates agglutinés dans la salle commune n'interviennent, habitués à la narcolepsie de leur commandant. Anita suivit en trottinant derrière, vite imité par Sabo qui attrapa l'autre pied d'Ace pour aider l'ancien second de son frère.

-Comment t'as su ? questionna le révolutionnaire.

-Les prunelles d'Ace se dilatent toujours au maximum avant sa crise, en général quelques secondes avant qu'il s'étale. C'est pas facile à voir avec la couleur de ses yeux, mais une fois qu'on a le truc, c'est plutôt pratique !

-Ah ouais ! Bien vu ! Si je puis dire… s'esclaffa Sabo.

-Vous êtes sûr que le forcer à venir…

-T'occupe Anita. Ace est en colère, et quand il est comme ça, faut lui forcer la main pour lui faire reconnaître qu'il est ridicule.

La jeune fille se contenta d'hocher la tête et ils ne prononcèrent aucun mot durant tout le trajet qui les mena aux quartiers de l'infirmerie.


Le long couloir était silencieux. Contraste ettonant avec la grandeur de cet équipage, mais la majorité des pirates évitaient le secteur depuis l'arrivée des membres de l'île du Dragon et de Ash. Les trois hommes et Anita parcoururent encore quelques mètres avant que les sanglots de Lîn leur parviennent. Le groupe stoppa net. Sabo baissa son chapeau pour camoufler son regard et Deuce tourna la tête vers Anita.

-Anita, chuchota-t-il, c'est comme ça depuis…

-Depuis qu'elle s'est réveillée hier matin, confirma la jeune fille avec les larmes aux yeux. Elle a froid, il faut qu' Ace l'aide.

Un lourd soupir résonna au sol derrière eux. Les pieds du brun s'agitèrent dans la main de Sabo et Deuce et les deux hommes tournèrent leur attention vers Ace.

Celui-ci les bras en croix et bien réveillé fixait le plafond. Le visage grave, il écoutait les pleurs de sa princesse. La culpabilité qui se dégageait de lui et l'urgence de la situation dont il ignorait complètement l'ampleur l'avait fait désaoulé.

-C'est bon, j'vais gérer.

Les deux hommes lâchèrent ses chevilles et il s'accroupit d'un bond en retenant son chapeau sur sa tête. Il écouta encore Lîn quelques instants, le regard perdu dans le vague. Il savait parfaitement ce qu'il se passait pour Lîn. Elle était en pleine crise d'angoisse. Son cœur se serra en se rendant compte qu'elle avait dû subir cet état tout ce temps.

-C'est quoi le plan, Chaton ? demanda-t-il en se relevant.

-La cabine à côté de celle de Lîn est vide. Ça c'est pour pas vous voir. Le truc c'est de chauffer la chambre de Lîn à travers la paroi. Vous pouvez le faire ?

-Bien sûr gamine… marmonna le brun en passant devant elle. Tu peux y aller Anita.

Pour toute réponse, il sentit la petite passer ses bras autour de sa taille et elle le serra fort. Attendri, il la laissa faire quelques secondes, le souvenir de son pleurnichard de Luffy quand il faisait la même chose enfant le traversa.

-Merci.

Et Anita le relâcha pour courir vers sa cabine, un grand sourire aux lèvres.

-Elle est mignonne cette petite, chuchota Deuce quand elle eut refermé la porte derrière elle.

Ace ne répondit pas et reprit sa route vers son objectif, vite suivi de ses deux amis.

-Pas besoin de vous les gars…

- À d'autres, commandant…

Le trio pénétra en silence la cabine vide. Plus proche encore, ils entendirent Lîn nettement comme si elle était dans la pièce.

Ace se dirigea directement vers le mur mitoyen et posa sa main dessus. Il soupira encore et posa son front contre le bois du mur.

-Je suis un vrai enfoiré…

-Ace… tenta de le rassurer Sabo.

-Je vaux pas mieux que mon père… chuchota le brun. Cherche pas Sabo… ce bon à rien a laissé tomber ma mère et moi je fais pareil avec Lîn. Suis même un sacré connard… parce que je suis en colère contre elle. Elle m'a oublié bordel… J'lui en veux à mort et elle n'y est pour rien. Elle aura largement le droit de me détester quand elle se rappellera que je l'ai abandonnée.

- Alors fait ce qu'il faut pour pas que ça arrive, commandant.

Deuce se dirigea vers une couchette, s'allongea et croisa les bras derrière la tête. Sabo se rapprocha d'Ace, lui envoya un coup de poing dans l'épaule et s'assit directement au sol, en tailleur et adossé au mur.

-Z'êtes pas obligés de rester…

-On veut dormir là, c'est toi qui t'incruste, répliqua Sabo et Deuce approuva de la main quand Ace se tourna vers lui.

-Magne-toi, j'ai pas encore mangé et j'ai la dalle... Et tu sais que je deviens paranoïaque quand j'ai faim.

Ace souffla légèrement et le léger sourire qu'il avait sur les lèvres fana complètement quand le bruit d'un pleur plus fort que les autres passa la paroi. Il s'assit de la même manière que Sabo et ferma les yeux.

Ace se projeta mentalement dans la cabine de Lîn, il revit la pièce dans laquelle il l'avait veillé, l'emplacement du lit, juste derrière le mur et laissa la présence de Lîn l'envahir.

Concentré au maximum sur sa femme, il imagina Lîn dans ses bras et la chaleur de son fruit du démon passer au travers le mur. Son cœur se mit à battre plus fort… Elle lui manquait tellement…


Froid… Cette horrible sensation était toujours là. Après le départ de Yumiko, Lîn avait basculé pour s'allonger en chien de fusil sur le lit, ses bras entourant ses jambes repliées. Elle avait pleuré encore plus fort, tentant de s'endormir d'épuisement, mais ça n'avait rien donné.

Ce sentiment incessant que quelque chose lui manquait lui étreignait les boyaux. Elle retint un cri qui ne l'aurait pas soulagé de toute façon, en pensant encore à cette sensation désagréable entre ses cuisses. Elle ouvrit avec peine les paupières et essuya avec la manche de son vêtement les larmes qui perlaient à ses cils et mouillaient ses joues.

La fenêtre de la cabine était devant elle et elle distinguait à travers le brouillard qui lui couvrait les yeux, la lune qui éclairait l'extérieur. La lumière était intense, reflétée par l'océan que la princesse ne voyait pas, allongée dans cette position. Alors elle se concentra sur l'aspect de l'astre dans le ciel pour se calmer.

La jeune femme devait se reprendre, arrêter de pleurnicher malgré tout ce qui lui arrivait. Peut-être pour la centième fois en deux jours, elle se rappela des séances d'entrainement avec Maître Dukes. Au début, le sage leur avait appris à faire disparaître leur aura pour devenir invisibles. Cela commençait toujours avec la respiration. Faire le vide dans son esprit, ça, elle l'avait appris de Tirésias.

La première inspiration lente de Lîn lui donna envie de tousser, sa gorge irritée malmenée par le flux d'air. Elle expira lentement, suivant mentalement l'air plus chaud qui passait de sa cage thoracique à ses narines.

Au bout de quelques longues minutes, la jeune femme se rendit compte que l'air qu'elle respirait était aussi plus chaud. Ce n'était pas possible de réchauffer la pièce avec la seule chaleur de sa respiration, alors elle crut que parce qu'elle se retrouvait seule, elle réussissait enfin à se calmer et à éloigner le froid.

Ses frissons disparaissaient, son corps se détendit alors Lîn changea de position. Elle enleva la capuche de la fourrure, s'allongea sur le dos, les bras le long du corps. Elle soupira de bien-être et son esprit dériva de lui-même, imaginant un soleil brûlant sur une mer d'huile. Un magnifique spectacle, bien plus réconfortant que l'astre lunaire, qui l'aida enfin à s'endormir et qui l'invitait à oublier sa souffrance pour au moins cette nuit.


Quand Ace ouvrit les yeux le lendemain matin, Deuce et Sabo avaient disparu. Il se releva et s'étira en étouffant un grognement. La position assise lui avait donné mal aux reins. Ses genoux émirent un craquement quand il se leva et il se dirigea vers la sortie, courbé en deux.

Il vérifia l'extérieur avant de sortir en faisant le moins de bruit possible. Il était presque arrivé au croisement des couloirs, au bout du large corridor de l'infirmerie, quand une porte s'ouvrit brusquement derrière lui. Le pirate se jeta sur le côté pour se camoufler quand il reconnut l'aura de sa femme. Des pas précipités résonnèrent et il ne put s'empêcher de regarder discrètement en arrière.

Son coeur rata un battement quand il vit Lîn s'arrêter devant la cabine d'Akio. Toujours aussi belle à ses yeux malgré la situation. Il se retint de se manifester quand il la vit appuyer quelques longues secondes sur son flanc en fermant fortement les paupières et la mâchoire contractée, sûrement pour atténuer la douleur.

Comment avait-il pu la laisser tomber ? Mais Ash avait été catégorique et Ace se devait de suivre ses ordres, pour le bien de sa princesse.

Lîn, ignorant qu'elle était ainsi observée, rajusta sa robe, leva le poing pour frapper à la porte de son frère et s'arrêta dans son élan. Ace la vit mordiller l'intérieur de sa lèvre inférieure. Il savait qu'elle faisait cela quand elle se soumettait à un dilemme et à l'heure actuelle il mourrait d'envie de savoir lequel.

Lîn s'était réveillée reposée et surtout apaisée. Le soleil avait commencé à éclairer sa cabine de magnifiques lueurs ambrées. Elle avait longuement observé le plafond avant de se décider à rejoindre Akio pour s'excuser et maintenant qu'elle était postée devant sa porte, elle se demanda ce qu'elle allait pouvoir lui dire. Elle inspira rapidement, ayant encore mal, ferma les yeux et frappa enfin au battant.

Quelques minutes passèrent et Akio ouvrit enfin la porte, torse nu et l'air encore endormi. Il passa la main sur son visage pour se réveiller sans vraiment réaliser qui il avait en face de lui.

-Ouch !

Sa moitié se jeta contre lui, lui coupant la respiration quand elle enserra fort sa taille sans prendre garde à la brûlure et aux blessures que lui avait infligées It Chy. Il passa les bras autour d'elle pour la retenir alors qu'elle camouflait son visage dans le creux de son cou. Enfin complètement réveillé, il plongea son nez dans les cheveux de Lîn. Son odeur, la douceur de sa peau lui avaient tellement manqué. Deux journées sans elle et il avait cru qu'il l'avait de nouveau perdue. Heureusement sa drogue lui avaient permis de dormir une bonne partie du temps ou il avait été séparé d'elle, lui permettant de supporter cet éloignement.

-Pardon… Je suis désolée Akio, murmura Lin toujours calée étroitement contre lui.

Akio la repoussa à contre-coeur et l'obligea à le regarder en soulevant doucement son menton.

-Lîn… Ça va, d'accord.

Pour toute réponse, elle se blottit de nouveau contre lui et il soupira en caressant son dos.

-Tu reviens dormir avec moi ? demande la jeune femme d'une toute petite voix.

-J'arrive, va te recoucher, il est encore tôt, lui répondit le prince en s'éloignant de nouveau d'elle avec un sourire tendre.

Lîn était tellement heureuse de constater que son jumeau ne lui en voulait pas. Elle serra brièvement ses doigts, l'embrassa à la commissure de ses lèvres et rejoignit sa chambre, ses longs cheveux volant derrière elle.

Akio attendit qu'elle ai rejoint sa cabine et rabattu sa porte avant de se retourner vers Ace qui sortait de sa cachette en le toisant d'un air mauvais. Si sa drogue l'avait préservée du manque de sa sœur, elle lui avait aussi empêché de détecter l'aura du prince des pirates qui devait traîner depuis un moment dans le coin.

- Tu n'as rien à faire ici.

- A quoi tu joues ?! bordel ! gronda le pirate à voix basse.

- A rien, répondit Akio sur le même ton. Elle a besoin de moi alors je suis là. Et toi ? Tu n'as pas compris que tu devais rester à l'écart ?

Akio se détourna, ignorant sciemment Ace qui se fit violence pour ne pas se jeter sur le prince. Celui-ci se dirigea avec nonchalance vers la cabine de sa moitié.

Ace pouvait bien aller se faire voir ailleurs. Pour le moment, c'est lui qui avait toutes les attentions de sa soeur


A peine entré dans la cabine de Lîn, Akio comprit ce qu'Ace avait fait. Il n'eut pas le temps d'analyser plus en détail la chaleur résiduelle dans la pièce que Lîn lui coupa la respiration pour la seconde fois en quelques instants.

La jeune femme l'attendait de pied ferme devant le lit. Elle avait pris la décision de faire disparaître ses souffrances et d'oublier le froid qui l'avait persécuté, du moins pour un temps, car elle savait qu'elle ne tiendrait pas longtemps cette résolution. Et qui de mieux que l'homme qu'elle aimait pour l'aider ? Lîn prit immédiatement possession des lèvres du prince, l'obligea à faire demi-tour et à s'allonger sur le lit.

Malgré l'assaut de sa moitié, Akio fit de son mieux pour résister, mais rien ne l'empêchait d'en profiter un peu... juste assez longtemps pour sentir Lîn passer de ses lèvres à son cou, de son cou à son torse…Il arrêta sa jumelle au moment où Lîn commença à vouloir lui enlever son pantalon et où il comprit que la ligne de baisers et de morsures allait descendre beaucoup plus bas.

- Lîn, arrête… Ce n'est pas le moment…

-... Au contraire… C'est la meilleure manière de m'excuser, le coupa Lîn en voulant l'embrasser de nouveau.

- Je t'ai dit que je ne t'en voulais pas… Allez, il faut dormir, décréta Akio en la repoussant pour l'allonger à ses côtés dans le lit.

La bonne marche de son plan étant repoussé à plus tard, la princesse grommela et le laissa faire à contre-coeur. Elle se plaça face à lui et se mit à bouder. Elle soupira et attrapa la prothèse de son frère qui la laissa faire, le temps que lui aussi laisse tomber l'envie qu'il avait de l'embrasser. Elle glissa lentement ses doigts sur le métal, examina les jointures, la manière dont elles étaient assemblées, son regard se fit plus vague.

De multiples questions lui brûlèrent les lèvres et elle résista à l'envie de l'interroger de nouveau. Son frère resterait muré dans le silence de toute façon… Ou peut-être pas, mais ce ne n'était pas ce que Lîn espérait…

-Lîn, quand as-tu compris que nos sentiments l'un pour l'autre étaient… différents ?

-Pourquoi tu me demandes ça ? Tu crois que je l'ai oublié aussi ? répondit Lîn avec une légère rougeur aux joues.

Apparemment ce sujet la gênait. Mais Akio mourait d'envie de savoir ce que Mîme avait pu transformer comme souvenir pour avoir ce résultat. Devant le regard insistant de son jumeau, elle soupira et finit par répondre en détournant les yeux :

-La nuit ou je t'ai vu avec Rika…

-Quelle nuit ? s'étonna sincèrement le prince.

-Tu le sais très bien… mais puisque tu insistes, soupira Lîn en prenant une teinte de rouge supplémentaire. La nuit où j'ai entendu des gémissements en provenance de ta chambre, ou j'ai entrouvert la porte et que je t'ai vu avec Rika… et que j'ai réalisé que je voulais sa place, dans ton lit…

Akio fronça les sourcils, Lîn avait vraiment dû voir cette scène pour que Mîme en tire ce genre de conclusion. Mais qu'avait vraiment ressenti sa sœur ? gêne ou excitation sexuelle ? Comment, malgré le lien, ne s'était-il aperçu de rien à ce moment-là ?

Voyant qu'Akio était perdu dans ses pensées, Lîn décida de délaisser la prothèse de son frère et tenta à son tour d'obtenir des réponses :

-Pourquoi tu me repousses ? À cause de ça ?

Lîn désigna sa blessure au flanc et montra ses poignets toujours bandés.

-Je ne suis pas une petite chose fragile… même si en ce moment, ça a l'air d'être tout le contraire, soupira la princesse en se calant de nouveau contre lui.

- Lîn, ne m'en veut pas, lui demanda Akio en passant sa main de métal dans le dos de sa moitié. Mais je veux que tu te soignes avant tout.

-Et comment faire passer mon temps ? Je commence à en avoir marre de ne rien faire de plus que me morfondre, déclara-t-elle en se reculant pour voir son visage.

Pas de réponse… mais Akio eut un sourire amusé et il ferma les yeux pour clore le sujet, ce qui agaça Lîn. Elle soupira fortement, eut une quinte de toux qu'elle contint difficilement en se recroquevillant sur elle-même. Elle bascula sur le dos en marmonnant pour exprimer son ras-le-bol et regarda de nouveau le soleil par la fenêtre.

Le temps à l'extérieur promettait d'être magnifique. Il avait l'air de faire chaud, dommage de ne pas en profiter…


C'était l'effervescence sur la Chimère en ce début de matinée. Marco avait donné les consignes aux commandants et ceux-ci se chargeaient de les appliquer pour préparer les hommes aux dangers qui pouvaient survenir. Enfin… presque tous les commandants… Ace était aux abonnés absents alors qu'il faisait partie des membres de l'équipage les plus efficaces pour défendre le navire.

Ralant contre leur tête à flammes ou plutôt tête à claques, le capitaine déplia la carte de la zone qui regorgeait de monstres marins en tout genre, et pas les plus inoffensifs.

Par contre, certains d'entre eux faisaient partie des plus goûteux de la Grand Line et ce serait un beau cadeau pour leur arrivée à leur prochaine destination : Purgatoire.

Une île sans foi, ni loi où tous les bannis de la bonne comme de la mauvaise société se retrouvaient pour affronter ou succomber à leur vice…

… Ou le droit de passage était élevé, surtout pour un équipage complet. Alors leur proposer de la nourriture en quantité sans trop de frais paraissait être une excellente idée.

Sauf quand votre meilleur grilleur de monstre se planquait il ne savait où sur ce navire et Marco n'avait pas le temps, et l'envie, de le chercher.

D'une, parce que l'humeur d' Ace devait être massacrante, il n'y avait que Sabo qui le supportait depuis l'avant-veille. De deux, il était le capitaine et devait s'habituer à déléguer, chose qu'il avait encore du mal à faire malgré toute une année écoulée.

Alors il avait envoyé les Spades à la recherche de leur ancien capitaine.

Deuce avait organisé les fouilles et d'après ce que Marco venait de voir, elles s'avérèrent fructueuses quand le masqué débarqua par l'entrée de la réserve de la cambuse en trainant sur le sol, ça allait finir par être une habitude, un homme de feu boudeur par le col de sa chemise, les bras croisés et qui ne faisait aucun effort pour aider son ami.

L'ancien Spade se dirigea d'un pas décidé vers l'escalier qui menait à Marco. Le Phénix se demanda un instant où Deuce trouvait la force physique de bouger le poids mort que devait être Ace et il eut pitié du membre de la seconde division.

En une envolée de flammes bleues, Marco sauta au pied des marches et Deuce poussa un soupir reconnaissant.

-Merci Capitaine, je me demandais comment j'allais faire pour transporter cet âne !

-Va te faire Deuce ! grommela le brun qui garda sa position fermée.

-Ace, t'arrête tes conneries et tu montes au nid de pie pour surveiller les alentours. Il y a du monstres marins et je veux que tu les éloignes. Sauf ceux que tu préfères manger, ceux là ont les attire et on les attrape. T'en ai capable ou pas ?


Encore une dispute… Lîn avait décidé de sortir de sa cabine et Akio n'avait surtout pas envie qu'elle croise Ace en voulant aller voir l'océan du pont du navire. Malgré tout l'argumentaire qu'il avait mis en place, sa tête de mule de moitié ne capitulait pas.

Quelqu'un frappa à la porte, arrêtant Akio dans ses objections et Lîn répondit un peu brusquement à ses amis d'entrer.

-Eh bien ? Qu'est-ce qui vous arrive ? demanda Yumiko en entrant et en retenant le « encore » qu'elle avait sur le bout de la langue.

-J'ai décidé de prendre l'air et Akio ne veut pas me laisser aller sur le pont !

-Tu dois te reposer !

-Je vais très bien !

Et l'échange virulent reprit de plus belle entre les jumeaux, camouflant presque l'entrée d'Anita et Ash qui revenaient de la cambuse.

-Qu'est-ce qui se passe ? demanda la brunette en déposant son plateau.

Lîn arrêta automatiquement de contrer son frère quand elle vit Ash aux côtés de la jeune fille. La princesse le fixa intensément, des larmes vinrent à ses yeux et en quelques pas elle se retrouva face à l'albinos et le serra dans ses bras.

-Ash… T'es là aussi… pourquoi vous ne m'avez rien dit ?

Peu habitué aux contacts humains, l'adolescent prit sur lui pour ne pas la repousser trop brusquement. Il la força à reculer et elle résista à peine, apparemment consciente que cette étreinte le dérangeait.

-Tu te rappelles de moi ? demanda Ash devant son silence.

Lîn préféra ne pas répondre à cette question. Elle le serra de nouveau dans ses bras malgré la gêne de l'albinos.

-S'il te plaît Ash, dit à notre têtu de frère de me laisser sortir d'ici.

L'ambiance changea encore une fois. Un voile d'incompréhension se posa sur le groupe qui s'échangeait entre eux des regards perdus, s'interrogeant sur ce qu'ils avaient tous entendu. Seul Ash garda son calme, comprenant que Mîme avait fait bien plus de dégâts qu'une amnésie.

-Lîn, je ne suis pas votre frère, expliqua -il avec calme et sans bouger.

La température fraîche qui émanait d'elle avait quelque chose d'apaisant, comme le brouillard de son île, ce qui le troubla une poignée de secondes.

-Arrête de dire ça ! Tu sais que je n'aime pas ça ! s'emporta modérément la princesse en s'écartant de lui et en levant les yeux au ciel. Et je vais te répondre ce que je dis à chaque fois : une famille, c'est le lien du cœur !

Une phrase que répétait Mîme à Ash à longueur de temps…

La jeune femme illustra ses propos en plantant son index dans le torse d' Ash qui attrapa rapidement son poignet pour lui écarter cette fois-ci et Lîn comprit que le jeune adolescent avait atteint ses limites en matière de contact.

S'en était trop pour Akio qui se croyait dans un livre rocambolesque. Il passa sa main dans ses cheveux en soupirant, lassé de ses coups de théâtre. Ce n'était pas le moment de s'embarrasser des premières consignes du gardien :

-Lîn, qu'est-ce que tu te rappelles à propos d' Ash ?

Sa sœur claqua la langue par agacement. Elle n'avait plus l'envie d'être docile. Son jumeau ne l'était pas non plus après tout. Pourquoi devrait-elle faire tant d'efforts ?

-Tu le sais. Alors je ne te dirais rien tant que « toi » tu ne répondras pas à mes questions !

-Et à moi ? questionna Ash avec une douceur que Yumiko et Jake ne lui avait pas encore vu.

L'attitude de Lîn vira et elle s'exprima avec tristesse et colère mélangées.

-La guilde t'a ramené gravement blessé en même temps que Lorkarn et le fruit d'Akio. Père s'est opposé aux sages car ces monstres avaient d'autres projets pour toi ! Et il t'a placé sous sa protection !

-C'est bon Lîn, ça va, l'arrêta Ash en posant doucement sa main sur son bras.

Jamais Ash ne prenait l'initiative de toucher un autre humain, hormis pour frapper, et cet élan le surprit lui-même.

-Non ! Ça ne va pas ! Vous êtes tous trop bizarres et je veux sortir d'ici ! Ash, aide-moi s'il te plaît ! commença à s'énerver Lîn.

-Lîn ! Pas question ! s'emporta de nouveau Akio.

Le prince ne s'attendait pas au regard que lui lança Ash. Tout indiquait que la donne avait changé. L'ancien assassin comprit que la stratégie de retrait ne serait plus celle employée. Le plus jeune allait s'opposer clairement à lui, pour des raisons évidentes liées à ce qu'avait fait Mîme.

-Et c'est ce que nous allons faire Lîn, décréta Ash. Mais je veux que tu te calmes, que tu manges un peu et ensuite, nous allons tous ensemble sur le pont.


Une fois de retour dans sa cabine, Ash ignora Anita, Jake et Yumiko qui ouvrait déjà la bouche pour le questionner. Akio suivait complètement fermé, il avait encore tenté de convaincre sa moitié. Ash l'avait laissé faire, sûrement car il savait que le prince échouerait, et Lîn avait fini par le mettre dehors pour ne plus entendre ses objections au sujet de cette sortie.

Ash se planta devant le lit sur lequel était allongé Mîme, toujours sous sa forme de renarde, et qui plaqua ses pattes sur ses yeux pour ne plus croiser le regard réprobateur de son grand frère.

-Mîme ! gronda Ash. Tu as modifié ses souvenirs ! Pourquoi tu ne me l'as pas dit ?! Bon sang !

-Je voulais juste tout remettre en place mais nos esprits se sont mélangés ! jappa le renard en se relevant d'un bond sur ses quatre pattes.

-Ash, le coupa Akio, son inquiétude pour sa sœur reprenant le dessus. Qu'est-ce que ça veut dire ? Lîn est-elle en danger ?

- Je ne sais pas encore… Et je ne suis même pas sûr que Lorkarn puisse faire quoique ce soit maintenant…

Tiens ? Finalement le coup de théâtre allait peut-être arranger les affaires d'Akio…

-Alors on fait quoi ? demanda d'une petite voix Anita.

-Continuer de jouer le jeu, il n'y a que ça à faire pour le moment.

-Et ça va aller pour toi ?

L''inquiétude d'Anita pour lui le surpris, peu habitué. Anita vit qu'il ne comprenait pas sa réaction.

-Bah euh oui… tenta-t-elle de se justifier. Tu n'aimes pas les gens et Lîn est plutôt du genre tactile, alors…

Ash plaça sa capuche sur sa tête et préféra ne pas répondre, surtout avec le sourire amusé qu'il vit sur les lèvres de Yumiko. Jake se contenta d' hocher la tête, son sourire à lui plus discret. Akio le jaugea de haut en bas pour deviner la « stratégie » qu'Ash allait mettre en place pour aider Lîn.

-Oui, c'est bon… je crois que prendre l'air va nous faire du bien à tous.

-Grand-frère…

-Non pas toi ! Tu en as assez fait !

-Mais…

Vaincue devant le ton catégorique de son gardien, la petite chimère se contenta de se rouler en boule sur le lit afin de lui tourner le dos. C'était injuste ! Parce que maintenant Lîn aurait en plus de l'attention de tous les autres, celle d'Ash également… et ça c'était le plus dur à supporter…


-Enfin de l'air ! s'exclama Lîn en sortant du couloir sombre qui la mena vers la liberté, sur le pont central.

Elle avait croisé quelques hommes qui s'étaient écartés sur son passage ou lui avaient juste jeté un coup d'œil et passé leur chemin.

Le soleil brillait haut dans le ciel, le vent soufflait faiblement mais l'odeur des embruns était tellement sublime. Elle simagina sur le balcon de sa chambre au palais, à observer l'océan. Elle ferma les yeux, savourant la chaleur des rayons du soleil qui caressait ses épaules et ses bras nus.

Une fois rassasiée, elle avisa l'escalier à sa droite pour grimper sur la poupe surélevée derrière elle, Akio marmonnant sur ses talons. Elle l'ignora, ainsi que les nombreux pirates qui la dévisageaient quelques secondes avant de reprendre leur tâches.

Akio constata que Marco, au courant de leur petite sortie, avait fait le nécessaire pour communiquer à son équipage de les laisser tranquille. Ash avait décidé que c'était finalement peut être mieux si Lîn voyait Ace.

Ce qui déplaisait fortement à Akio... Il profita tout de même lui aussi des rayons du soleil quelques secondes et rejoignit Lîn qui l'attendait en bas des marches.

La princesse s'était changée. Elle avait demandé à porter autre chose que la lourde robe de laine et Akio avait fait une syncope quand elle avait choisi une robe noire dans le tas qu'Anita avait ramené des cales.

Pas du tout fait pour une sortie en mer, le tissu satiné collait à la taille fine et aux hanches de sa moitié. La longueur de sa robe ample camouflait le bas de son corps mais dès qu'elle se déplaçait, le tissu fendu de chaque côté et presque jusqu'en haut de ses cuisses, s'ouvrait et dévoilait ses jambes graciles, ce qui attirait automatiquement l'attention du prince. Elle n'avait pas voulu porter de chaussures. Akio ne savait toujours pas pourquoi elle avait pris cette habitude avec Ace et pourquoi cette manie lui était restée…

Enfin la partie du bustier qui entourait sa poitrine la serrait, au point qu'elle avait enlevé son soutien-gorge qui la gênait. De nombreuses lanières tressées partaient du haut du décolleté de la robe et rejoignaient un collier de tissu autour du cou de sa sœur. Elle avait laissé ses cheveux détachés, de sorte qu'ils camouflaient ou dévoilaient son dos nu à chaque mouvement. Alors Akio avait exigé qu'elle mette la cape de la guilde… et bien sûr, elle ne l'avait pas écoutée.

La sensualité incarnée se baladait comme si de rien n'était devant lui et il avait eu beau lui dire que ce n'était pas du tout une tenue à porter au milieu d'un équipage pirate, elle l'avait envoyé paître et répliqué qu'il n'avait qu'à aller faire la même remarque à la blonde qui servait d' infirmière. Terrain glissant, alors il avait renoncé…

-Bon ?! Tu viens ?! commençait à s'impatienter Lîn.

Sa jumelle souleva ses jupons et commença à monter quatre à quatre les marches. Qui aurait pu savoir qu'elle avait failli mourir quelques jours plus tôt ? Son attitude ne pouvait paraître qu'étrange aux yeux des autres et il en était malheureusement le seul responsable.

Sa moitié devait prendre tellement de plaisir à le faire tourner en bourrique !

Bon sang, qu'est-ce qui était passé par la tête d' Anita pour ramener une robe pareille ?!

Akio ajusta son t-shirt avec un geste un peu trop brusque. Il avait changé lui même ses pansements, en tirant un peu fort dessus par énervement et maintenant il le regrettait. Il allait aussi devoir penser à faire quelque chose pour la marque de It Chy qui se pavanait sur sa peau. Un tatouage ? Oui, mais lequel ?

Encore rageur, il sortit d'un pas rapide de la petite salle d'eau de sa cabine et tomba nez à nez avec sa jumelle.

-Eh bien, tu ne m'as pas senti arrivé ? le meilleur assassin de la guilde se laisse aller ? se moqua sa moitié en croisant les bras sous sa poitrine.

Akio eut tout le loisir de voir ses seins sans maintien se soulever et prendre un peu plus de volume. Mais il fut immédiatement détourné du corps de Lîn quand il vit ce qu'elle tenait à la main : sa pochette de cachets.

-Lîn, rends moi ça, s'il te plaît.

- Qu'est-ce que c'est ?

Silence…

-Mmmhhh… voyons…

Akio écarquilla les yeux quand Lîn entrouvrit les lèvres et il vit sur sa langue sa drogue qu'elle avait déjà en bouche.

-Ce sont des anti-douleur dosés pour moi ! Tu n'aurais pas dû en prendre un ! c'est dangereux!

-Je reconnais la formule de Paraclele… cocaïne, opium et belladone… Oui, dangereux si on en abuse. Quant à ta douleur… Voyons… Une main tranchée…

-Lîn, je…

-Et une jambe blessée. Inutile de vouloir me le cacher. Je connais ta gestuelle par cœur. Alors ? Qu'est-ce qu'il t'es arrivé pour que tu prennes ça ?

-Je n'ai rien à te dire.

-Tu souhaites vraiment jouer à ce jeu là avec moi, Akio…

Lîn avait volontairement appuyé de manière menaçante et tellement sexy sur son prénom qu'il se recula légèrement d'elle. La manipulatrice était de retour et ce n'était vraiment pas sans lui déplaire, surtout quand elle s'approcha tel un prédateur en chasse pour passer ses bras derrière son cou, l'obliger à courber l'échine et se coller contre lui pour déposer un baiser papillon sur ses lèvres.

Le prince avait tenu bon, mais pour quel résultat ? Dire qu'il y avait si peu de temps, Akio aurait volontairement donné tout et n'importe quoi pour satisfaire sa moitié… Il soupira lourdement et se décida enfin à suivre la jeune femme.

Lîn déboula sur le pont supérieur et fit de grands signes à Ash qui pour une fois ne portait pas sa capuche et qui patientait en compagnie de ses amis et d'un grand homme blond qu'elle reconnut par rapport aux avis de recherche qu'elle avait pu voir.

Lîn se calma quelque peu pour ne pas passer pour une hystérique et se dirigea vers le capitaine en souriant plus largement qu'elle ne l'aurait voulu. Elle se sentait tellement bien ! Plutôt déconnecté de ses soucis à vrai dire… Les drogues de son frère faisaient des miracles ! Jake lui présenta le pirate quand elle fut enfin arrivée à sa hauteur.

-Lîn, je te présente Marco le Phénix.

-Enchantée, répondit la princesse avec une petite révérence.

-Je suis heureux de vous voir debout Lîn.

-Et moi tellement d'être enfin dehors ! Votre vaisseau est magnifique ! s'exclama Lîn en tournant sur elle-même pour mieux admirer le navire.

Marco se contenta de sourire face à son attitude enfantine, loin de l'air soucieux qu'il lui avait parfois vu et qui ne s'éloignait que quand Ace était avec elle. Elle arrêta son observation et fronça les sourcils. Marco lui fit un signe de menton pour l'inviter à s'exprimer :

-L'empereur Barbe Blanche n'est pas là ?

Ah… ça aussi elle l'avait oublié. Jake allait prendre le relais mais Marco le devança.

-Notre père nous a quittés, il y a plus d'un an.

-Oh… je suis navrée, s'excusa Lîn en s'inclinant, réellement attristé par cette nouvelle.

Lîn préféra s'éloigner avant de faire un autre impaire, mais Marco intervint toutefois en la voyant s' approcher des gardes-corps extérieurs.

-N'allez pas trop près du bord, il y a de nombreux monstres marins dans le secteur. Mes hommes veillent mais certains sont très rapides…

-Oh d'accord… capitula Lîn.

La jeune femme bifurqua de direction pour se mettre au niveau de la barrière qui empêchait de tomber du pont supérieur sur celui duquel elle avait débouché.

Effectivement, tout l'équipage était prêt. Les hommes tenaient des places précises et surveillaient l'horizon. Ils étaient majoritairement armés. Ses yeux passèrent de l'un à l'autre et elle visualisa enfin la proue.

-La figure de Proue… c'est une chimère ? demanda la princesse en se tournant vers Marco qui approchait, bras croisés.

-Oui. Une idée inspirée de vous.

-Quand nous sommes devenus alliés ?

Marco se contenta d' hocher la tête, puis il fronça les sourcils, son regard attiré vers bâbord. Une énorme masse noire glissait sous l'eau. Elle envoyait des gerbes d'écumes au fur et à mesure qu'elle sortait de l'océan et Marco eut un sourire satisfait en reconnaissant le monstre qui émergeait d'un coup des profondeur en hurlant. Tout en longueur, des nageoires dorsales ornées de pic orangés se déployèrent dans son dos.

-Un monstre rascasse, c'est parfait se félicita Marco. Dur à abattre, parfait pour se défouler !

Le capitaine porta ses doigts à sa bouche et lança un sifflement strident. Lîn ne put le questionner davantage quand elle vit les pirates s'écarter pour encercler la bête en restant tout de même à bonne distance. Un autre sifflement répondit à celui du Phénix, sa source provenant du nid de pie. La jeune femme vit un homme sauter du haut du mât directement dans le vide.

Il fit une pirouette maîtrisée durant sa chute pour poser ses deux pieds sur le mât et avec un saut horizontal d'une puissance qui fit pencher légèrement le bateau et que Lîn n'aurait imaginée, il attaqua la rascasse et la frappa avec force sur la joue avec un long tuyau de métal. Le coup lui fit voler quelques dents et le fit vaciller.

La colère de l'animal augmenta d'un cran et il allait se jeter sur le blond qui venait de toucher le pont sans encombre. Ce dernier se décala et les mâchoires du monstre claquèrent dans le vide. L'homme au haut-de-forme se gratta l'arrière de la tête, visiblement gêné de ne pas avoir abattu le monstre Marin d'un coup et il ne semblait pas du tout impressionné par la rascasse qui souffla de colère par les naseaux et envoya des gouttelettes de morve mêlée d'eau de mer.

Tellement absorbée par son futur déjeuner, la bête ignora le second homme dans le nid de pie qui hurlait à l'amateurisme.

-Laisse tomber blondinet ! Tu fais pas le poid ! Laisses faire les spécialistes !

Sans attendre, le second pirate s'élança à son tour dans une volée de flammes orangées assorties au stetson de même couleur qu'il tenait d'une main sur sa tête.

L'homme que Lîn avait vu à son réveil…

Elle l'aurait reconnu n'importe où. La jeune femme s'approcha d'un pas de plus de la barrière, complètement absorbée. Marco, plus en retrait, surveilla son changement d'attitude. Akio avançait déjà pour l'appeler mais Ash leva la main devant lui en lui intimant silencieusement de ne plus faire un geste. Vaincu, le prince observa lui aussi le spectacle qu' Ace était en train de leur offrir.

Le pirate fonça directement au sol, entouré de ses flammes. Il frappa durement le pont en arrivant accroupi dessus et en le noircissant sur son passage. Il repartit en l'air en un saut qui fit trembler le bateau et en utilisant son feu pour se propulser plus rapidement encore. Son poing s'enflamma et percuta durement le menton de la bête et sa tête partie en arrière.

L'homme de feu retomba sur ses pieds en douceur, ralenti par les flammes qui continuait de sortir de son corps. Il posa les mains sur ses hanches pour regarder la rascasse vaciller le regard vide. Le monstre, assommé, tomba brusquement en avant sur le pont dans un vacarme assourdissant, à peine une cinquantaine de centimètres devant Ace qui n'avait pas bougé. Les hommes les plus proches harponnèrent le corps de la bête pour ne pas qu'elle retombe à l'eau. Immédiatement des marins plantèrent leur arme dans sa gorge pour le faire saigner et l'achever. Le liquide carmin ruissela du pont et d'autres pirates le repoussèrent dans l'océan à l'aide de balais et de seaux d'eau de mer. Ace s'écarta pour ne pas se faire asperger d'eau salé. Ce n'était pas le moment d'affaiblir son fruit du démon.

Puis, tout fut enfin fini. Les pirates acclamèrent l'homme de feu, l'applaudirent et il ne se fit pas prier à renfort de saluts exagérés pour marquer encore plus son exploit, pendant que son ami blond levait les yeux au ciel en ricanant devant toute cette comédie. Il s'avoua vaincu quand il attrapa son haut de forme pour saluer bien bas l'homme de feu qui pour toute réponse lui attrapa le cou pour lui faire une rapide prise de catch qui les fit rire aux éclats.

Apparement il avait suffit de remporter un stupide pari pour faire oublier sa mauvaise humeur au prince des pirates.

-T'as fait exprès de perdre ? Avoue !

-Eh eh ! ricanna Sabo en se dégageant de la prise d'Ace. Il fallait au moins ca pour te rendre encore plus... flamboyant !

Sabo illustra ses propos en montrant la direction de la poupe à Ace. Ce dernier comprit alors ce que son frère avait voulu faire quand il vit Lîn sur le pont qui le regardait fixement.


Lîn n'avait rien raté du spectacle. Marco la vit s'appuyer plus encore et avec lenteur au garde-corps. Elle fixait l'homme de feu, les sentiments indéterminés qu'elle ressentait faisait marteler son cœur.

A moins que ce ne soit la colère d'Akio qu'elle réceptionnait au plus profond d'elle-même ? Mais pourquoi son frère se mettait dans cet état ? Parce qu'elle s'intéressait à un autre homme ? Elle sentit l'aura de son jumeau avancer, Ash l'ayant enfin autorisé. Lîn voulut se tourner vers le prince mais elle n'osait pas quitter le tueur de monstre Marin des yeux.

Celui-ci arrêta brusquement son cinéma et se tourna enfin vers elle. Maintenant qu'elle discernait mieux les traits de son visage, elle imagina qu'il en était de même pour lui et elle entrouvrit la bouche pour des félicitations que le pirate n'entendrait pas d'ici mais amplement mérité… Et il la fusilla du regard.

Confuse, elle baissa immédiatement la tête et se recula.

Elle voulut faire demi-tour mais la présence de ses amis, qui avaient vu la réaction d'Ace, l'en empêchèrent. Elle ne voulait pas leur montrer les larmes qui étaient en train d'embuer ses yeux et sans prévenir, elle sauta d'un seul bon par dessus le garde-corps. Akio n'eut pas le temps de la retenir, juste de la voir atterrir avec souplesse malgré sa robe devant la porte des cabines et elle s'engouffra sans attendre à l'intérieur du bateau.

L'action de la jeune femme n'avait duré que quelques secondes, mais assez longtemps pour qu'Ace se rende compte de la connerie monumentale qu'il venait de faire en menaçant Akio du regard alors que Lîn était dans la même ligne de mire… Ses proches amis se tournèrent vers lui en croisant les bras, dépités par son attitude. Deuce se frappa même le front du plat de la main, tellement désabusé par l'impulsivité de son ancien capitaine.

-Ace… commença à le rabrouer Sabo en lui claquant la main derrière la tête. T'es irrécupérable mon pauvre !

Mais l'homme de feu n'eut pas le temps de s'apitoyer plus sur son sort que le compagnon du monstre rascasse, reconnaissable à sa couleur mauve, émergea au niveau du pont arrière, juste à côté de son capitaine.

Marco allait gérer le problème mais Akio le devança. Une énorme boule de flammes noire et violette apparut instantanément au-dessus de la pauvre bête et s'abattît sur sa tête. Le craquement de ses os ne laissa aucun doute sur son état et la créature retomba dans l'eau pour disparaître presque immédiatement dans les profondeurs.

L'équipage garda le silence, ne sachant pas trop quoi dire ou faire, surtout par respect pour leur second commandant qui commençait à prendre la couleur cramoisie de la colère. Jake et Yumiko ne réagirent pas, habitués à la puissance d'Akio. Puis quelqu'un frappa dans ses mains, brisant le silence.

-Bien joué Bad Boy ! le félicita Mya qui avait troqué son uniforme d'infirmière pour un haut de maillot de bain et un short en jean minimaliste.

Akio remercia les dieux que Lîn ne soit pas dans les parages, puis il vit Ash qui l'observait fixement.

Haussant les épaules, il commença à se diriger vers l'escalier pour rejoindre sa jumelle. Il ressentait des pincements dans son cœur, comme des regrets. La stupide attitude d'Ace arrangeait ses affaires mais elle avait aussi fait souffrir Lîn. Yumiko se planta devant lui au moment où il atteignait l'escalier.

-Je vais voir Lîn, l'arrêta Yumiko.

-Et pourquoi ferais-tu une chose pareille ?

-Parce qu'il y en a ras le bol de ta rivalité avec Ace, alors il va falloir penser à régler vos comptes ! Laisses Lîn souffler un peu.

Et Yumiko partit rejoindre Lîn comme prévu. Akio ne répondit rien… Elle n'avait pas tort sur le fait qu'il pouvait bien se défouler un peu, repousser les monstres marins avait quelque chose de grisant.

Cette sortie au grand air tombait finalement plutôt bien…


Sans perdre le temps de frapper à la porte, Yumiko entra dans la cabine de Lîn.

Cette dernière, assise sur le bord de son lit, s'affairait à retirer le bandage de son poignet gauche, l'autre traînait déjà au sol. Elle le faisait machinalement, ressassant les images de ce qu'il venait de se passer sur le pont. Cet homme avait bien des raisons de lui en vouloir, elle avait bien faillit le blesser lors de son réveil, et Lîn comprenait parfaitement sa réaction. Mais pourquoi ça la touchait autant ?

-Ça va ?

Pas de réponse. Yumiko avait espéré que des souvenirs reviendraient à son amie, mais rien… elle alla s'allonger sur le lit avec un grognement de plaisir quand elle s'étira sur le matelas. Son dos était encore douloureux.

-Nous arrivons sur Purgatoire ce soir, et moi je compte bien en profiter ! Cette île est géniale !

Lîn avait enfin enlevé sa deuxième bande et observa ses poignets avec attention.

Des marques d'entraves… des cordes sûrement. La peau était brûlée, pas coupée comme pouvait blesser les chaînes de la guilde…

-Lîn ?

Des larmes ruisselaient sur les joues de la princesse. Elle pleurait en silence, attisant l'inquiétude de Yumiko.

-Lîn… eh, calme-toi.

-C'est peut être mieux que je ne me rappelle pas… nous devrions quitter ce navire et rentrer chez nous… et pourtant… je veux savoir qui m'a fait ça ! s'écria la princesse en montrant ses poignets et en isolant sciemment de sa question le pincement de son entrejambe. Yumiko comprit parfaitement ce qu'il se passait. Lîn savait qu'elle avait été violer. Elle ne parvint pas à imaginer ce que la princesse devait ressentir. Souffrir physiquement sans savoir ce qu'il lui était arriver. Malheureusement, même quand elle aura retrouvé sa mémoire et que le temps aura passé, cette douleur durera. La brune pouvait le confirmer.

-Ils sont morts.

La respiration de Lîn se coupa et elle tourna vivement la tête vers son amie qui la regardait d'un air grave.

-Je te le dis car il faut que tu ailles de l'avant. C'est toi qui a tué les responsables, il ne pourra plus rien t'arriver. D'accord ?

La princesse hocha la tête avec lenteur et essuya ses joues. Elle n'eut pas la force de continuer sur ce sujet alors elle tenta d'en aborder un autre, surprenant un peu Yumiko.

-Tu y es déjà allée ? Sur cette île ?

-Oui…

Quand la brune voyageait avec Teach… elle venait de trouver sa liberté et elle avait passé des jours à fêter ça avec lui sur Purgatoire. Que ferait le pirate au fruit des ténèbres s'il apprenait qu'elle voyageait avec l'équipage de Marco ?

-Purgatoire… ça ne donne pas très envie…

-Ne le prends pas au sens propre. C'est même complètement l'inverse d'un purgatoire. Tous les plaisirs de la vie sont là-bas, et personne ne juge les autres.

« Même l'amour incestueux ? » pensa Lîn. Elle eut un petit sourire en coin, attristée par cette situation.

-A quoi tu penses ?

-Rien…

-Alors c'est décidé ! Dès que nous aurons appareillés, on va faire la fête ! il est temps de se changer les idées ! Nous allons tous nous préparer à sortir !

-Mais si la guilde l'apprend ? Éléa va…

-Oublie la guilde, Lîn. Elle ne pourra rien nous faire, fais-moi confiance.

Lîn se mit à réfléchir. Pas de guilde sur le dos, c'était une sortie « normale » qui se profilait à l'horizon… Chose qu'elle n'avait jamais fait hors mission. Elle s'approcha de Yumiko qui se relevait d'un bond et elle la prit dans ses bras.

-Merci… D'être mon amie…

Le visage de Yumiko se ferma et elle serra plus fort la jeune femme contre elle pour ne pas qu'elle puisse voir les larmes qui lui montait aux yeux.

Le véritable purgatoire, Yumiko l'avait traversé et pas question qu'elle fasse encore du mal aux personnes qu'elle aimait pour re-descendre en enfer.


-Marco le Phénix ! Bienvenue sur Purgatoire !

Le capitaine serra la main du responsable de l'île, avant de le prendre dans ses bras pour le frapper virilement dans le dos, en retenant une grimace.

Sur Purgatoire, il n'y avait pas plus hypocrite que Monsieur le Président. Petit, gras, le cheveux rouge gominé dans un costume vert Jade extravagant, il était toujours affublé de ses deux gardes du corps, Tic et Tac de leur surnom, car l'un et l'autre mangeaient à longueur de temps directement des noix, sans les casser.

Et il n'était pas question de se moquer de cette habitude, au risque de voir les deux colosses à la peau noire et luisante qui mettait en valeur leur taille avoisinant les deux mètres et les quelques cent-trente kilos de muscles. Des forces de la nature qui ne portaient que leur short rouge à sequins. Le contraste avec leur boss était saisissant.

-Je suppose que tu as ce qu'il faut pour payer la taxe ?

-Bien sûr, répondit Marco en montrant des caisses derrière lui.

Son équipage avait passé le restant de la journée à préparer et saler la chair du monstre marin.

-Viande de rascasse, plusieurs tonnes…

-Eh eh… Très très bien… Les portes de l'île vous sont ouvertes ! s'exclama le Président en ouvrant grand les bras, tandis que les portes qui fermaient l'entrée de la ville s'ouvraient dans son dos.

Les pirates du Phénix acheminèrent les caisses sans attendre vers le grand dépôt qui recevait les paiements. Plus tôt la marchandise serait livrée, plus vite ils iraient enfin décompresser un peu…

À l'écart de toute cette agitation, Ace attendait au pied de la passerelle, avec la ferme intention de croiser Lîn et… Et après il n'en avait aucune idée… Sabo patientait à ses côtés, mais il n'allait pas pouvoir rester très longtemps.

-Ace, je dois y aller. Je ne dois pas rater le rendez-vous.

Le blond montra le sac qu'il portait sur son dos et qui contenait toutes les informations qu'il avait récupéré sur le navire des frères Chy.

-Les contacts n'attendent pas… trop peur des pièges que pourrait tendre le gouvernement.

-J'arrive… répondit le brun à contrecœur.

Le prince des pirates enfonça plus profondément son chapeau sur sa tête. Il tira les pans de la chemise noire qu'il avait passé sur un t-shirt sans manche orangé. Il avait encore du mal à voir ses cicatrices. Lui qui se baladait tout le temps torse nu, il devait s'habituer à porter des vêtements.

Sabo patienta encore quelques courts instants et il posa sa main sur l'épaule de son frère pour l'encourager à le suivre. Ace se détourna enfin de la passerelle.

Leur présence sur Purgatoire serait effective jusqu'au lendemain soir, il avait le temps de croiser sa princesse mais la patience était loin d'être son fort.

Le duo passa les portes de la cité quand le groupe de l'île du Dragon fit enfin son apparition.

Lîn avait gardé sa robe noire mais avait fini par capituler pour mettre sa cape. Akio lui avait rendu ses armes : sa dague et un poignard qu'elle n'avait pas reconnu. Pour la dent de Lorkarn, elle avait opté pour un fourreau attaché autour de sa cuisse. Avec le fendu de sa robe, elle pouvait dégainer aisément en cas de besoin. Elle inspira un peu fort et les odeurs du port l'assaillir. Elle voyait derrière les portes des flashs lumineux et des bâtiments illuminés dans de nombreuses couleurs. Un vrai appel à la découverte.

Yumiko était tout autant éblouissante, en combi-short à manches longues et évasées, noir également, avec un décolleté pigeonnant. Elle portait des cuissardes dans lesquelles elle avait glissé ses lames. Elle avait emprunté de magnifiques bijoux en argent. Un bracelet aux bords coupants, un cadeau qu'avait fabriqué Jake, ornait le poignet de sa prothèse. Elle pouvait dégainer cette arme et la faire voltiger avec son magnétisme en cas de besoin.

Anita avait préféré garder des vêtements amples, pantalon et tunique d'un joli bleu ciel qui allait parfaitement avec la couleur de ses cheveux et de sa peau. Son poignard était caché dans un fourreau camouflé sous sa tunique.

Jake suivait docilement, sa dulcinée n'avait pas eu grand chose à faire pour le convaincre. Après tout, c'était leur objectif en quittant l'île d' Anita : lui faire visiter le monde. Yumiko n'avait d'yeux que pour lui. En jean et gilet ouvert sur son torse dénudé, il forçait le trait de la décontraction avec le tatouage de la guilde qui ressortait sur sa musculature. Lui aussi s'était sur-armé pour faire face à toute éventualité. La cicatrice qu'Akio lui avait laissé en plantant un poignard dans sa poitrine formait une ligne nette plus claire sur sa peau déjà pâle. Elle avait attiré l'attention de Lîn, mais elle ne lui posa pas de question.

Restait le dernier homme de la bande. Akio portait une chemise blanche plutôt évasée, avec un lacet en haut qu'il n'avait pas noué. Le gilet sans manche noir qu'il portait faisait ressortir la musculature de son torse. Son pantalon de toile assorti et la cape de la guilde cachaient ses armes. Lîn le trouvait tellement beau ainsi. Elle leva le bras pour l'inviter à la rejoindre, ce qu'il fit en quelques enjambées assurés. Il glissa sa main dans le creux du coude de sa moitié qui se retint de justesse de l'embrasser sur les lèvres. Elle bifurqua au dernier moment, appliquant un baiser léger sur sa joue et il soupira d'aise.

-Alors ?! Vous venez ! appela Yumiko derrière elle.

-Tu peux arrêter d'être aussi enthousiaste ? grommela Ash en rabattant la capuche de son sweat.

Il n'avait changé que de pantalon, juste parce que le sang qui restait dessus suite à sa blessure aurait trop attiré l'attention.

La princesse serra plus fort le bras de son jumeau. Akio sentit son hésitation. Il en aurait bien profité pour la faire douter et la convaincre de faire demi-tour. Lîn ne semblait pas lui en vouloir, mais le rayon de tristesse qui traversait son corps lui donnait envie de déplacer des montagnes pour lui redonner le sourire qu'elle n'avait pas retrouvé depuis l'après-midi. La relation tendue qu'il y avait entre eux depuis qu'Ash avait "intégré" la famille l'invitait à faire quelques efforts. Et que pourrait-il arriver de pire que ce qu'elle avait vécu à Darkfog ? Ils savaient tous se défendre et Yumiko connaissait un bar soi-disant sans ennui.

-Vous allez voir ! Je vous emmène chez Alistair ! Et le peu de types qui tente d'y mettre le bazar est vite évincé. Allez ! En avant !


Le bar dans lequel se trouvait Ace et Sabo était bien animé, chant, alcool, belles femmes peu habillées... De quoi se changer les idées. Ace avait un verre à la main et plusieurs prostituées avaient déjà abordé les deux jeunes hommes.

-Ton contact est en retard… marmonna le brun en buvant une gorgée de sa bière. Tu ne m'as pas dit que c'était dangereux d'attendre ?

-Si… ça ne ressemble pas à… Koala ?

-Bonjour chef ! le salua une jolie jeune femme souriante aux cheveux châtains.

Koala poussa Sabo sans ménagement plus loin sur le banc et s'installa à ses côtés. Elle tendit sa main à Ace qui la serra, un sourire en coin planté sur le visage.

-Et bien Sabo, tu ne m'as pas dit que ton contact était aussi joli… plaisanta le brun dans le but de piquer son frère au vif.

Enfin il allait connaître encore plus de détails de la vie de son révolutionnaire de frère.


Cette ville, mélange de tous les genres, était surprenante, peut être même un peu trop pour Lîn qui suivait docilement Yumiko qui avait l'air d'être chez elle ici. La princesse s'arrêta devant une grande maison verte où de nombreux chiens étaient présentés aux badauds par un couple de personnes âgées.

-Mister WahWah… Yumiko, l'appela la princesse en passant devant l'échoppe, les femmes dans les vitrines du précédent quartier, j'ai bien compris ce qu'elles proposaient comme services. Mais là…

-Lîn ! pouffa Yumiko en levant les yeux au ciel, ne t'inquiète pas pour ces chiens, les gens qui entrent ici sont là pour les chouchouter !

-Donc ils payent pour ça ? s'étonna Anita.

-L'espèce humaine est vraiment trop bizarre… marmonna Ash.

-Allez venez, nous sommes arrivés.Tiens, tiens… La patronne et son acolyte sont de corvée de poubelle.

L'ombre noire qui sortait de l'établissement nommé « Le sans-visage » ne portait rien d'autre qu'un masque sur lequel était dessiné deux yeux , une bouche immobile et deux triangles de couleur rouge sous chaque œil. Une jeune femme à la chevelure rousse et bouclée qui lui arrivait jusqu'au rein claqua des doigts et le monstre ouvrit grand une seconde bouche implantée sous son masque pour vomir deux types qui échouèrent au sol en hurlant de dégoût.

-Maintenant vous vous barrez ! Si vous cherchez encore les emmerdes, je lui dis de vous bouffer !

Les deux hommes, couvert de salive et de liquide qui devait être de la bile, ne demandèrent pas leur reste et passèrent en courant devant le groupe qui arrivait à destination. La femme rousse, qui portait une robe en résille scintillante à travers laquelle l'on pouvait voir ses sous vêtements, les remarqua aussitôt, ou plutôt elle reconnut instantanément Yumiko.

-Yumiko ! Tiens, tiens… je croyais que nous nous étions dit adieu… surjoua la femme en s'approchant.

-Bonsoir Alistair !

-Oh ! Tu as amené du monde avec toi…

Alistair repéra immédiatement Jake qui était en avant du groupe.

- Eh, mon joli… Moi c'est Alistair… Ali pour les futurs intimes… ronronna-t-elle.

-Chasse-gardée Alistair, grogna Yumiko en se plantant entre elle et Jake.

-Les plans à trois ne m'ont jamais dérangé… gloussa la rousse en enroulant une mèche de la brune autour de son doigt. Et si tu faisais les présentations ?

Yumiko leva les yeux au ciel, Jake préféra dodeliner de la tête et se laisser porter par les surprises que réservait la brune. Les autres approchèrent, curieux, sauf Ash qui resta en retrait.

- Je te présente Jake, Lîn, Anita et Akio. L'enfant boudeur là-bas c'est Ash.

-Eh bien, bienvenue dans mon auberge ! Sansvisage, emmène-les dans le carré des fauchés.

-Des fauchés ? s'étonna Anita.

-Oui ma mignonne ! Car quand mes invités repartent, c'est avec rien dans les poches !


-Je sais que tu n'as « pas le droit » de me le dire… mais quelle mission de la guilde a pu te faire arriver ici ?

- Et la réponse est dans ta question… s'amusa Yumiko au dépend de Lîn en s'installant à une table aux sièges confortables.

-Yumiko, qui est Alistair ? lui demanda Anita.

-Alistair, c'est l'histoire classique de la prostituée qui veut s'en sortir. Son proxénète s'est aperçu que ses recettes diminuaient parce qu'elle lui volait pour enfin s'échapper. Ça s'est passé dans cette même auberge, son « patron » était en train de la battre devant l'ensemble de son équipe pour montrer l'exemple. C'est là que sansvisage a passé la porte.

-Et qu'est ce qu'il s'est passé ?

-La bête est tombée amoureuse de la belle. Personne ne sait d'où vient cette créature, mais ça été la vrai panique quand il s'est mis à dévorer le patron et ses gros-bras. Et il ne les a pas recrachés cette fois-ci. Il n'est pas parti après ça. Il a veillé Alistair pendant des jours et quand elle était de nouveau d'attaque, elle a décidé de reprendre la maison close et de la nommer du nom de son sauveur.

-Quoi ? Mais…

-Ce n'est pas ce que tu crois, Anita. Regarde la clientèle du bar.

La petite analysa avec soin les personnes présentes dans la pièce. De nombreuses prostituées, des escorts-boys… mais pas un seul client pour utiliser leur services. Le groupe détonnait même un peu dans le paysage. Un orchestre dans le fond jouait une musique d'ambiance, type danse de salon.

-Il n'y a pas de passes ici, juste des personnes qui viennent oublier leur soucis, faire tomber le masque que beaucoup sont obligé de porter.

-… et les emmerdeurs comme tout à l'heure sont exclus ! s'exclama Alistair en amenant un plateau chargé de boissons alcoolisées et de mets appétissants.

Elle servit à chacun une chope de bière finissant par Ash qui portait toujours sa capuche.

-Tu peux enlever ça mon mignon, personne va te dévisager ici.

Ash se tendit en entendant cette remarque et obtempéra après un moment de réflexion. Il n'avait pas l'habitude de se montrer, car même après des années, les membres de son village le regardait encore d'un autre oeil.

-Eh ! Quel magnifique regard ! Dommage que tu le caches chéri !

Alistair n'avait pas trop fait attention jusqu'ici aux physiques des personnes qui accompagnaient Yumiko, hormis celui du blond sexy. L'habitude de ne pas jauger et de ne pas juger les personnes qui passaient sa porte.

-Eh ! Yumiko, tu sais t'entourer de gravure de mode ! s'exclama la rousse en dévisageant Lîn et Akio.

La jeune femme lui envoya un regard sombre. Pour qui se prenait cette femme pour parler ainsi à ses deux frères ?! Akio ressentit la jalousie de sa moitié lui traverser le cœur. Il attrapa discrètement la main de Lîn et déposa leurs doigts entrelacés sur le genou de cette dernière pour la calmer.

-J'espère que vous savez danser mes amours ! La fête va commencer ! s'exclama la tenancière sans se formaliser de l'attitude de Lîn.


-Sabo, ces documents sont une vraie mine d'informations.

-J'espère que ça fera avancer les choses.

Le blond picora dans l'assiette d'Ace, sa sixième ou septième, il avait arrêté de compter.

-Eh ! Demande à manger si t'as faim ! s'offusqua le brun en tirant le plat vers lui.

Sabo le fixa durant un long moment et eut un sourire en coin. Il tira brusquement sur l'assiette d'Ace pour l'écarter.

-Bordel ! Sabo ! A quoi tu…

-Pratique cette narcolepsie… faudra que je pense à remercier Deuce, ricana Sabo quand Ace s'écroula sur la table.

- Sabo… qu'est-ce qui arrivé sur Darkfog ? l'interpella sérieusement Koala en ignorant la crise d'Ace, ce qui fit reprendre son sérieux au révolutionnaire.

-De vrais horreurs… Mettre les Chy hors d'état de nuire serait devenu une priorité si les pirates du Phénix ne s'en étaient pas chargé.

-Un grain de sable dans le désert malheureusement…

Le duo fit un bond quand Ace se releva comme un diable sortie de sa boîte. Il bouscula la serveuse qui passa derrière lui, les chopes qu'elles portaient difficilement se vidèrent sur le pirate qui eut comme réflexe de s'enflammer, surpris par le liquide glacé.

Ace retomba sur sa chaise, dépité… il n'était peut être plus mouillé, mais était devenu poisseux et sentait le houblon brûlé. Sabo porta sa main à ses narines

-Bon sang Ace ! C'est une vraie puanteur !


Magnifique, ou bien peut être incroyable ? Anita hésitait encore en voyant Yumiko et Jake danser en duo sur la piste de danse. Lorsque l'orchestre s'était mis à jouer, le blond avait murmuré des mots à l'oreille de sa compagne. Il avait invité Yumiko sous prétexte de se rappeler de bon souvenir. Le couple avait commencé par un tango sensuel qui avait fait rougir Anita, puis une salsa et enfin d'autres danses qu'elle ne connaissait pas. Leurs pas parfaitement maîtrisés leur avait valu plusieurs salves d'applaudissements.

L'ambiance de cette auberge n'avait vraiment rien à voir avec les bars de gros bras. Tout était joyeux, tous dansaient sans crainte de se faire alpaguer par des clients lourds ou violents.

Alistair jonglait entre les tables pour faire le service, sans-visage installé dans un coin, attendait patiemment.

Enfin une valse se mit à retentir et les deux amants se séparèrent en s'inclinant et retournèrent à leur table.

-Ouah ! s'écria Anita quand ils arrivèrent à eux. Vous savez trop bien danser ! Vous avez appris quand ?

-C'était pour une mission de Jake. Il lui fallait une partenaire, expliqua Yumiko en souriant à sa protégé.

-Ah… pas vraiment pour les bonnes raisons…murmura Anita, sa bonne humeur envolée.

-Allez viens, lui proposa Jake en tendant sa main vers elle. Je vais t'apprendre quelques pas.

-Quoi ? Non, je suis presque sûre que je vais te faire honte !

Sans préavis, Jake attrapa sa main et la tira vers la piste de danse sous le regard amusé de Yumiko, indifférent d'Ash et d'Akio et celui plus triste de Lîn.

La princesse fixa son verre devant elle, suivant des yeux les gouttelettes de condensation qui longeaient la paroi pour finir leur course sur la table. Voir ses amis si heureux, l'avait plongé dans une tristesse profonde qu'elle n'arrivait pas à refouler. Il lui manquait quelque chose, ou peut être quelqu'un ? Son frère jumeau se leva pour se planter debout devant elle. Il dégrafa la cape qu'il portait encore et la posa sur sa chaise. Il en fit de même pour Lîn qui sursauta, tellement absorbée dans ses pensées.

-Princesse, m'accorderez-vous cette danse ? lui proposa t'il avec un sourire amusé.

-Euh…

-Viens Lîn, tu as besoin de te changer les idées, insista Akio alors qu'elle ne bougeait toujours pas.

Elle se mit à sourire grandement et sauta presque de sa place pour étreindre son frère.

Enfin, les sentiments de tristesse et de solitude qui traversaient le cœur du prince, depuis que Jake et Yumiko avaient commencé à danser, s'évanouirent. Sa moitié était heureuse et c'était le plus important.

Lîn se reprit rapidement en réalisant ce qu'elle venait de faire et fit à son tour une révérence.

-Avec plaisir mon prince ! Pouffa t'elle et Akio attrapa son bras pour l'entraîner vers la piste de danse.

Anita les vit arriver, se dé-concentra et Jake évita de justesse à ses orteils de se faire écraser.

-Comment tu fais pour toujours être si parfait ? marmonna la jeune fille en regardant ses pieds. Même quand je te fais rater des pas…

Jake se mit à rire et lança un regard à Yumiko qui les observait. Elle répondit d'un signe de la main et d'un clin d'œil. Ils vivaient tous les trois une liberté tellement agréable.

Alistair s'approcha de leur table et s'appuya sur le mur derrière Yumiko qui buvait une gorgée de son verre.

-Alors tu traines avec la responsable de tes ennuis ? lui demanda la rousse avec sérieux, en montrant Lîn du menton.

-Je…

-Laisse, ne répond pas. J'avais déjà compris quand tu es arrivée ici que ta colère n'allait pas dans le bon sens.

-Oui, et j'ai bien failli en payer le prix fort…

Ash légèrement en retrait écouta attentivement leur échange. Yumiko regarda sa prothèse et passa machinalement ses doigts métalliques sur la cicatrice présente sur le dos de son autre main. Une espèce de rond, comme un « O » solitaire. Ash avait déjà remarqué cette marque, parce qu'il avait exactement le même en haut de son torse, camouflé en permanence par les vêtements qu'il portait.

Il s'agissait sans aucun doute d' une signature, laissée par les personnes qui avaient attaqué son village il y a dix ans. Yumiko avait subie le même traitement que sa famille, et il ignorait pourquoi. L'adolescent reporta son attention sur Lîn et Akio qui dansaient sur la piste. Ils entamaient une seconde valse sous les saluts et applaudissements de l'assemblée. Ils dégageaient une prestance qui laissait les couples qui dansaient autour d'eux complètement admiratifs.

Sa main autour de la taille de sa moitié, Akio ressentait le bien être et le bonheur de Lîn qui ne le lâchait pas du regard. Ils tournaient l'un avec l'autre en parfaite synchronisation, sa robe et ses cheveux voletaient autour d'elle. Lîn était tellement à l'aise qu'elle se rapprocha encore de son frère, son corps effleurant le sien à chaque mouvement, tandis qu'Akio faisait le nécessaire pour s'éloigner d'elle.

Subitement, elle avait envie de s'isoler avec lui pour lui demander une explication parce qu'elle venait de prendre conscience que depuis son réveil, Akio l'évitait consciemment. Sa blessure était une excuse bancale et elle devait absolument savoir pourquoi il agissait ainsi avec elle. Quitte à le manipuler un peu…

L'orchestre termina son morceau et ils se saluèrent l'un et l'autre sous d'autres applaudissements et un nouvel air de musique commença. Lîn posa la main sur son flanc et Akio s'inquiéta de suite.

-Ta blessure ? l'interrogea son frère en retournant à leur table.

-Oui… Je suis essoufflée… J'ai besoin de prendre l'air…

-Il y a un toit terrasse, la porte d'accès est là-bas, désigna Yumiko du menton.

Lîn la remercia d'un signe de tête et s'éloigna, son frère sur ses talons.

-On les laisse seuls ? demanda Jake à Yumiko.

-Le seul risque c'est qu'ils se disputent encore… La nouvelle Lîn est beaucoup plus combative avec lui, je ne m'inquiète pas pour elle.


Le bâtiment était l'un des plus hauts du quartiers. Lîn s'approcha du bord pour admirer la vue. Les nombreuses lumières de la ville animaient le ciel, le brouhaha de la rue, les odeurs de plats en train de cuire arrivaient jusqu'à elle et elle ferma les yeux un instant pour profiter du moment.

-Ça va mieux ?

Le jeune femme se tourna vers Akio qui patientait debout au milieu du toit. Elle avait dit qu'elle voulait de l'air, alors il faisait son possible pour la laisser respirer. Elle se rapprocha de lui en hochant la tête et il fronça les sourcils en la voyant mordiller l'intérieur de ses lèvres.

-Tu ne m'as pas embrassé depuis mon réveil…

-Quoi ? s'étonna le prince légèrement inquiet. Tu l'a oublié ?

La princesse claqua la langue, agacée et s'approcha encore de lui.

-Si, je me rappelle que « Je » t'ai embrassé, toujours la première, tu ne faisais que répondre.

-Lîn… Je…

Mais Akio ne savait pas quoi dire de plus. Et pourquoi aborder ce sujet maintenant ? A moins que l'impatience qu'il ressentait à l'instant provenait en réalité de sa sœur ? Lîn s'arrêta enfin juste devant lui.

-Fais moi l'amour, maintenant.

La demande de sa moitié lui fit la sensation de recevoir un uppercut en plein estomac, suivi de l'affolement de son cœur. Son bas-ventre s'enflamma aussitôt alors que Lîn ne le quittait pas des yeux, le regard emplit de désir et… d'espoir ?

Pourquoi lui résister ? Par crainte qu'elle se rappelle qui elle aimait vraiment ? Et si Lorkarn n'arrivait pas à réparer ce que Mîme avait brisé ? Si l'attente éloignait Lîn définitivement de lui ?

Dans un geste lent et mesuré, il caressa la cicatrice sur la joue de sa sœur. Cicatrice dont il était entièrement responsable. Il baissa le visage vers elle et effleura de ses lèvres celles de Lîn qui ne bougeait pas. Puis tout s'enchaîna, il attrapa la taille de la princesse pour la plaquer contre lui. Sa langue s'insinua dans la bouche de sa moitié qui le laissa complètement faire.

Ses mains glissèrent le long des reins de Lîn jusqu'à ses cuisses et il la souleva contre lui alors que leur baiser devenait plus passionné. Il se retourna et la plaqua un peu fort contre le mur et elle laissa échapper un gémissement qui le ramena à la réalité. Il pouvait aller plus loin, Lîn l'y autorisait. Il pouvait passer sa main sous la robe, décaler le sous-vêtement de sa moitié qu'il devinait complètement humide. Il pouvait déboutonner son pantalon et il pouvait…

-Je ne peux pas…

Les mouvements de Lîn qui voulait lui enlever son gilet se figèrent tandis qu'Akio la relâcha. Il continua de la bloquer avec son corps contre la paroi, sa bouche contre l'oreille de la jeune femme.

-J'ai fais de très mauvaises choses Lîn. Je t'ai fait beaucoup de mal… et quand tu te rappelleras…

Les mots se coincèrent dans la gorge d'Akio et il s'écarta pour voir la réaction de sa jumelle… Qui ne fut pas ce qu'il espérait. Elle aurait pu être compréhensive, lui dire que ce n'était pas grave… Mais non, il ne le méritait pas.

Sans un mot et sans un regard pour son frère, elle rajusta sa robe, se détourna de lui afin de retourner dans la salle commune de l'auberge.

La porte d'accès se referma derrière elle avec un grincement. Le vide s'installa dans le cœur du prince, la présence de Lîn qu'il sentait au plus profond de lui-même s'évanouit pour ne laisser que du néant.


-Lîn ? Ça va ?

Yumiko se leva de son siège pour rejoindre son amie qui arrivait vers eux, la mine sombre. La princesse lui présenta un sourire de convenance et passa à côté d'elle pour récupérer sa cape et l'attacher autour de son cou.

-Oui, juste fatiguée, je rentre au bateau.

-Seule ?

-Oui, répondit Lîn d'une manière qui ne laissait la place à aucune discussion.

-Je viens avec toi, décréta Ash en remettant sa capuche sur sa tête.

-Ash…

-Allez viens.

L'albinos passa devant Lîn qui n'avait pas le courage de contrer son second frère. Elle avait bien assez luttée pour ce soir.


La rue commençait à être encombrée de soûlards qui sortaient des bars et des maisons closes ou autres casinos en chantant à tue-tête. Des bagarres éclataient ici et là.

Ash et Lîn avançaient en silence. L'albinos était aux aguets et anticipait leur trajectoire afin d'éviter les ennuis. Lîn s'arrêta subitement en attrapant sa main et montra une ruelle sur sa gauche.

-On passe par les toits ?

Avisant la direction que lui montrait Lîn, Ash se demanda si c'était une habitude chez elle. Elle ne l'avait pas lâché et sa fraîcheur lui fit courir un frisson de nostalgie sur sa peau.

-Oui, je te suis, finit-il par répondre en se dégageant le plus naturellement de sa prise pour entrer dans la petite rue.

Lîn le suivit immédiatement. Ash monta le premier. Il sauta sur le mur à droite, rebondit sur celui de gauche et arriva sur le toit sans effort malgré la blessure de sa jambe. Il attendit en haut que sa « sœur » le rejoigne. Elle grimpa souplement de la même manière mais s'arrêta en appuyant fortement sur la plaie de son flanc.

-Tu viens ? s'impatienta Ash.

La princesse eut un léger soupir d'amusement et l'albinos se demanda ce qui la faisait rire. Lîn vit son expression et elle s'expliqua:

-C'est ce que je préfère chez toi, tu ne me demande pas si ça va où tu ne tentes pas de me materner comme le fait Akio.

-Parce que ce n'est pas mon rôle.

Une réponse à double sens qui ne perturba pas Lîn. Ash ne la connaissait pas, il n'avait aucune raison de l'aider… où de se démener pour trouver une solution pour sa mémoire… Mais c'était pour rattraper l'erreur de Mîme ! Rien de plus ! La princesse se redressa enfin pour commencer à marcher.

Ce que ressentait Lîn à son sujet était ce que ressentait Mîme ? Est-ce que sa chimère pensait qu'il n'en avait rien à faire d'elle ?

Ils avancèrent vite et efficacement, contournant les obstacles ou sautant de toit en terrasse et inversement. Enfin le port apparut au loin. Lîn se réceptionna sur le sol et s'approcha des portes d'accès de la rade qui étaient restées ouvertes. Ash la rejoignit et tous deux s'arrêtèrent pour observer la magnifique proue d'onyx du navire.

-Ash, qu'est-ce que tu ressens à l'idée d'aller sur ton île natale ? lui demanda à voix basse la jeune femme.

-Rien de spécial.

Et c'était vrai, à cent pour cent. Son village ne lui manquait pas, sa famille non plus. Peut-être un peu Kai, mais il n'en était pas très sûr. Il n'avait jamais eu de vraie relation de cousins avec lui, juste celle du gardien et du servant.

-Moi ça me fait peur…

-Cette île n'est pas si dangereuse.

Lîn expira dans un souffle avec un sourire triste et en fixant le sol. Ash ne comprenait pas…

-J'ai peur de perdre mon petit frère, qu'il décide de rester là bas et de ne jamais le revoir.

L'albinos ne s'attendait pas à ça… Il se tourna vers Lîn qui ne le regardait toujours pas. Elle reprit sa marche sans rien ajouter de plus pour se diriger vers la passerelle. Un cri l'arrêta brusquement et l'aura de tristesse qu'elle dégageait se transforma instantanément.

-Eh Lîn ! Déjà de retour ? Akio n'est pas avec toi ?

Il ne manquait plus que ça : la bimbo blonde… que voulait-elle à Akio ?

-Non.

Inutile de mentir, l'infirmière voyait bien que Lîn n'était pas avec son frère.

-C'est bien, reprit Mya en ignorant sciemment l'attitude de Lîn.

Celle-ci lui envoya un regard mauvais. Qu'est-ce qui était bien ? Qu'elle soit loin de son frère pour laisser quartier libre à cette fille ?

Parce que oui, sa tenue : talons aiguille, mini jupe rouge et haut assorti ne laissait pas beaucoup de place à l'imagination. Tout ce que pouvait désirer un homme se trouvait là dessous.

Devant le silence de Lîn, Mya prit partie de lui sourire et la salua de la main.

-Bon bah j'y vais. Belle soirée !

Et elle partie en direction d'Ash, le dépassa avec un signe de tête en guise de salut, avant de disparaître dans la rue animée plus loin.

Ash attendit que Lîn reprennent sa marche pour monter sur le bateau et disparaître sur la passerelle. Son pas était rapide, elle n'aimait clairement pas cette infirmière. La princesse en sécurité, Il était temps pour lui de retrouver un peu de ses habitudes. Parler à Mîme en priorité, il la voyait bien dans l'ombre du bateau, invisible de tous mais pas de lui.

-Mîme ? Tu m'entends ? J'ai été trop dur avec toi… pardon.

Une masse sombre glissa le long de la coque et un loup de petite taille se matérialisa juste devant Ash. Le jeune garçon se mit à genoux devant lui et la bête glissa sa tête sur son épaule pour se laisser aller à l'étreinte de son grand frère.

-Tu m'en veux ?

Mais Mîme ne répondit pas à sa question.

-…Dis Ash… tu veux bien que l'on aille se promener ?

-Oui… capitula l'albinos. Mais prenons aussi par les toits. Il faut rester discret.


Les mains au fond des poches de son pantalon, Ace marchait en direction de La Chimère en râlant mentalement contre son fruit du démon. S'enflammer alors qu'il était recouvert de bière… une idée génialissime ! Maintenant il sentait pire que le fauve, ses fringues étaient foutues et Sabo lui avait presque ordonné d'aller se changer comme s'il n'était qu'un gamin capricieux ! Des hommes qui puaient, il y en avait bien pire que lui sur toute cette foutue île !

-Ace ? Déjà de retour ? Pouah ! Mais qu'est-ce que t'as fait ?!

-C'est bon Izou ! En rajoute pas ! J'me change et je repars !

L'homme-geisha porta la manche de son kimono à son nez et Ace voyait bien que c'était aussi pour camoufler son fou rire. Sa division était de garde sur le navire et l'ambiance était bien plus calme qu'à l'accoutumé. Des petits groupes d'hommes jouaient aux cartes, aux dominos ou aux dés en fumant ou chiquant l'excellent tabac réservé au service de garde. Pas d'alcool pour ne pas affaiblir la surveillance, il fallait bien leur faire plaisir autrement.

-Alors... Je vais chambouler ton programme. Oui, tu te changes. Non, tu ne repars pas.

-Ah ouais et pourquoi ? l'agressa le plus jeune

-Parce que Lîn est sur ce bateau et tu vas aller la voir.

-Mais bien sûr… avec son chien de garde qui veille ? maugréa le pirate

-Elle est revenue seule.

La mauvaise humeur d'Ace s'envola pour laisser place à l'inquiétude.

Qu'est-ce qu'il s'était passé ? Sabo lui avait rapporté des autres pirates que les jumeaux s'étaient disputés plusieurs fois. Est-ce qu'Akio lui avait fait du mal ? Une claque à l'arrière de son crâne arrêta son flot de pensées.

Décidément, ses compagnons prenaient de mauvaises habitudes en le frappant par derrière !

-Arrête ! Tes oreilles fument !

Izou secoua sa main poisseuse. Oh oui ! Ace devait aller se laver.

-Donc tu prends une douche, tu mets ton meilleur after-shave, la tenue que Lîn préfère… Et ne me dis pas que c'est quand tu es nu ! Parce qu'elle n'est clairement pas prête à voir ça ! Et tu fonces à sa cabine pour t'excuser.

-Izou…

-Dépêche-toi ou je te mets mon pied au cul pour te motiver ! Allez !


Cette femme était la raison de l'éloignement d'Akio, Lîn en était persuadée. Mais à quel degrés ? Est-ce qu'Akio jouait double-jeu ? L'avait-il trompée ? C'est de cela qu'il parlait sur le toit-terrasse ?

Les lumières tamisées des lampes gaz éclairaient les couloirs qu'elle traversait d'une lueur bleutée. La princesse connaissait parfaitement le chemin, ses pieds la conduisaient sans qu'elle n'ait le besoin de se concentrer.

Perdue dans ses pensées, son humeur alternait jalousie, colère ou tristesse, le trajet à sa cabine se fit le cœur lourd. Elle souhaitait juste dormir et oublier le froid qui de nouveau s'emparait d'elle.

Son soupir résonna autour d'elle. Lîn n'avait croisé personne, ce qui n'avait rien d'étonnant. Enfin arrivée à destination et sans réfléchir, elle ouvrit en grand la porte de sa chambre et entra rapidement à l'intérieur.

Ce qui la frappa le premier fut l'odeur de cet endroit. Un mélange de musc masculin épicé mais adoucit par autre chose. Une fragrance qui apaisa momentanément le froid qui commençait à la saisir. Elle examina avec attention l'intérieur de cette cabine qui n'était pas la sienne, malgré la faible lueur des lampes du couloir.

-Mmhhh… J'aurais dû faire plus attention au chemin… murmura pour elle-même la jeune femme.

Cette cabine n'était pas très spacieuse, mais chaque chose était à sa place. Elle détailla les rideaux accrochés devant le hublot, le nombre de coussins sur le lit fait. Des affiches au-dessus d'un petit bureau attirèrent son regard. Un indice sur le pirate aux goûts efféminés qui logeait ici ? L'homme-geisha ?

D'un pas léger, la princesse entra plus profondément dans la pièce. Ses yeux s'accoutumèrent à l'obscurité plus importante et elle cligna rapidement des paupières quand elle vit qui se trouvait sur l'avis de recherche.

-Le pirate de feu…

Elle approcha lentement la main de l'affiche qui le représentait de côté, le poing fermé et les muscles de son bras et de son dos contractés. Il utilisait son fruit du démon. Elle devait avouer que le brun s'était bien débrouillé si son but avait été de paraître séduisant sur son avis de recherche.

-Ace aux Poings Ardents… chuchota Lîn quand elle retraça de ses doigts la première lettre du prénom du pirate, juste au-dessus de sa prime qu'elle imaginait amplement mérité.

Alors cette cabine était la sienne ? Lîn n'avait pas l'intention d'entrer plus dans l'intimité du pirate… mais elle se sentait bien dans cet endroit. Elle dégrafa sa cape et la plia sur son bras. Elle étudia plus attentivement tous les avis de recherche. Ceux d'Ace n'était pas les seuls sur ce mur. Il y avait ceux d'un autre garçon au sourire solaire, Monkey D Luffy, qui n'avait pas non plus à rougir de sa prime. Par contre, pas de trace du jeune homme blond que Lîn avait vu sur le pont lors de la chasse aux monstres marins.

Pourtant, ils avaient l'air réellement proche ?


Parler à Lîn… plus facile à dire qu'à faire ! Izou lisait vraiment trop de livres à l'eau de rose…

Les mains de retour dans ses poches, Ace alternait marche rapide, quand il se donnait le courage d'aller rejoindre sa princesse pour s'excuser, et lente, quand des pensées insidieuses lui faisaient croire que Lîn risquait de le repousser ou pire !

Le brun se figea subitement, sa porte était grande ouverte… Sa respiration s'accéléra en reconnaissant l'aura de la personne présente dans ses quartiers. Lîn était là ?! Elle se souvenait !

Son rythme de marche frôla presque la course quand il se précipita vers sa cabine. Il s'arrêta net devant l'entrée et il vit Lîn se retourner brutalement pour lui faire face, dans cette robe qui la mettait diablement en valeur.

L'intensité du regard effrayé qu'elle posa sur lui fit envoler tous ses doutes : Lîn ne se souvenait toujours pas de lui…


Le bruit de pas rapides provenant de derrière elle obligea Lîn à faire volte-face. Elle posa précipitamment sa main sur sa blessure. La valse, Akio qui l'avait plaquée contre le mur, le retour sur les toits et maintenant ça… C'était trop pour elle. Elle aurait dû voler un autre cachet à son frère…

La jeune femme croisa instantanément le regard d'Ace aux poings ardents et elle eut peur de sa réaction. Elle n'avait rien à faire là et sa colère serait justifiée. Mais le pirate ne réagit pas de cette manière. Il cligna rapidement des paupières, comme surpris de la trouver ici et s'approcha en tendant la main vers elle.

-Eh ça va ?

Sa sollicitude perturba la jeune femme et Lîn attrapa son poignet de sa main libre pour l'empêcher de s'approcher encore d'elle. Le pirate dû comprendre qu'il l'effrayait car il ne fit pas un pas de plus. Il se dégagea lentement.

-Vous avez mal ? Je vais chercher Mya si…

-Non ! Enfin… Moi ça va… balbutia-t-elle. Mais vous… Peut-être… que vous… devriez aller à l'infirmerie ?

Ace ne comprit pas d'où pouvait lui venir cette déduction et il vit Lîn froncer le nez et porter par réflexe la main vers son visage. Génial… Superbe retrouvaille…

- C'est de la bière brûlée… Un stupide accident… Je sens pas ça d'habitude, marmonna le brun en détournant la tête et en croisant les bras sur son torse.

Si Lîn avait admiré les muscles d'Ace sur l'avis de recherche, les voir en vrai avait quelque chose de plus impressionnant. Malgré les ombres de la pièce à peine éclairée par la lumière du couloir, elle voyait bien que le brun était tout en force. Lîn ne put s'empêcher de comparer à Akio, plus fin, mais qui n'avait pas à rougir, loin de là.

-Il n'y a pas que ça…

Lîn montra du menton les bras d'Ace, toujours croisés, celui qu'elle avait saisi plus exactement.

-Vous avez de la fièvre.

Quelques longues secondes passèrent et le pirate ricana, alors qu'il n'y avait rien de drôle. Cette conversation plus que cordiale était bien étrange, mais les mots venaient seuls sans qu'elle n'y réfléchisse. Peut-être une manière de se rassurer ?

-Le chaud c'est juste mon fruit du démon.

-Ah…

Lîn ne chercha pas plus loin et tenta de se redresser, toujours courbée en deux. Mais la douleur était bien là et elle laissa échapper un court gémissement. Ace ne voyait qu'une explication à son état : Elle avait dû forcer, ce n'était pas ce simple mouvement, quoique rapide retournement, qui la lançait comme ça. Il désigna d'un geste la couchette à quelques pas.

-Venez vous asseoir sur le lit quelques instants.

Ace vit Lîn se tendre un peu plus et son cerveau se mit en marche… Un pirate qui lui fait peur, lui propose son lit dans une pièce sombre… Assez d'éléments pour qu'elle se mette sur ses gardes. Il claqua les doigts et des orbes parfaitement rondes et enflammées apparurent, éclairant largement la pièce.

Surprise, Lîn se redressa pour admirer les flammes qui volaient lentement autour d'eux. Ace attendait et laissa un micro-sourire fleurir sur ses lèvres. La première fois qu'il avait utilisé son fruit devant elle sur Vacio, elle était de mauvaise humeur et il y avait de quoi. Alors que là, il savourait l'émerveillement dans ses yeux…

Maintenant que "la lumière" s'était allumée, elle détailla plus précisément le visage de son hôte improvisé. Si on mettait de côté cette fameuse odeur nauséabonde qui l'entourait, elle réalisa qu'Ace devait avoir du succès auprès de la gente féminine… ou peut-être masculine ? Elle ne savait pas trop quoi en déduire par rapport à la décoration de sa cabine… Ace l'interrompit en lui montrant de nouveau le lit et en lui tendant la main.

La princesse obtempéra mais ne prit pas la main d'Ace. Elle se laissa tomber assise sur le bord du matelas, un peu trop fort quand la douleur la reprit.

Le silence s'étira entre eux, Lîn fixait le sol, comme absente. Comment sa princesse avait atterri dans leur cabine ? Ça, c'était un mystère… ou un signe du destin ? Elle redressa la tête vers lui et Ace voulut se lancer, faire ce qu' Izou lui avait dit, mais Lîn plongea son regard nuit dans le sien et elle le devança :

-Je suis désolée.

-Euh… de quoi ? l'interrogea le pirate, sincèrement surpris.

-De vous avoir attaqué à mon réveil. J'ai failli vous blesser. Je comprends que vous soyez en colère contre moi… termina la princesse à voix basse et en fixant de nouveau le sol.

Voir Ace en contre-plongé la mettait mal à l'aise. Elle n'aurait pas dû s'asseoir…

Le cerveau du brun se mit en route. D'où Lîn pouvait tirer une idée pareille ? Ah, sûrement le sujet de ses propres excuses : le regard noir sur le pont.

-Je ne suis pas du tout fâché contre vous.

-Mais cet après-midi, vous…

-Je vois à quoi vous faites allusion, c'était pas pour toi… pour vous.

Le sentiment de soulagement que Lîn ressentit dû se voir sur son visage car le pirate lui souriait d'un air doux, presque tendre. Elle détourna le regard, gênée par cette familiarité. Encore quelques secondes de silence où Ace ne savait pas quoi faire. Il soupira.

-Je vais vous raccompagner.

-Je… enfin est-ce que je peux rester encore un peu ? Je n'ai pas le courage de marcher.

Être mal à l'aise et se sentir bien, parce que c'était bien ça la vraie raison qui la poussait à ne pas bouger, c'était bien la chose la plus étrange du moment.

-Prends tout le temps qu'il te faudra.

Encore un tutoiement... Elle relâcha enfin la pression de sa main sur son pansement. Ça allait mieux mais elle avait de nouveau froid. Elle rabattit ses bras autour d'elle. Ace comprit qu'elle avait un autre problème que sa blessure et il savait très bien lequel. Lîn avait laissé échapper sa cape au sol quand il l'avait surprise. Il la récupéra, s'approcha et la posa sur ses épaules. Il prit le temps de l'accrocher, penché sur elle qui prenait une teinte plus rouge.

-Permettez ?

La jeune femme hocha la tête avec lenteur. Que pouvait faire Ace de plus proche encore ? Elle hoqueta quand il s'agenouilla pour passer le bras sous ses genoux, l'autre dans son dos et il la souleva comme si elle n'était qu'un fétu de paille. Son corps diffusait une chaleur forte et agréable. Il la reposa un peu plus loin, le dos calé dans les coussins du lit contre le mur. Le fendu de sa robe laissa entrevoir sa cuisse et elle sentit le rouge qu'elle avait sur les joues augmenter d'intensité. Ace fit semblant de ne rien avoir remarqué, attrapa la couverture sur le lit et l'étendit sur les jambes de Lîn.

-Voila ! Ça devrait aller mieux.

-Merci, le remercia-t-elle du bout des lèvres.

Il était temps pour Ace d'enfin se décrasser. Ses flammes volantes se rapprochèrent de Lîn et il alluma un feu bien plus gros juste devant elle.

-Je te laisse, je vais me rendre plus présentable, expliqua le brun en montrant la porte de la salle d'eau derrière lui.

Il n'attendit pas la réponse de Lîn et entra dans la salle de bain en refermant derrière lui. Le pirate s'appuya contre le battant et soupira lourdement pour se détendre.

Sauf que la sensation d'une caresse courant de son cou à ses pectoraux le réveilla d'un seul coup. Il savait très bien ce que c'était : Lîn venait de toucher l'une de ses flammes avec le feu glacial de son frère.

Il lui avait expliqué une fois que ses flammes étaient comme une projection de lui. Quand quelqu'un les éteignait, lorsque qu'il combattait par exemple, son corps ressentait les coups. Lîn avait voulu tester à sa manière, tout en douceur. Le meilleur jeu érotique auquel ils s'étaient adonnés tous les deux...

Ce n'était peut être pas le moment de se souvenir de ça, surtout quand une nouvelle caresse passa de sa hanche au creux de son aine.

« Douche froide ! Maintenant ! » lui ordonna son cerveau primaire.

« Et t'as oublié de prendre d'autres fringues, Portgas ! » rajouta sa conscience.


La boule de flammes était passée à portée d'elle et Lîn n'avait pas pu résister.

Utilisant le fruit de son frère pour éloigner la morsure du feu, elle avait touché avec légèreté la sphère qui semblait lisse et elle avait vibré au bout de ses doigts.

La seconde fois, l'orbe s'éteignit complètement dans une mini explosion et Lîn cru qu'elle avait fait une bêtise mais il ne se passa rien de plus. Toutefois, elle ne se risqua pas à en toucher une autre.

La princesse s'adossa plus confortablement contre le mur dans les coussins moelleux. Le bruit de l'eau coulant dans la pièce à côté la berçait et elle ferma les yeux.

L'espèce d'odeur que portait le brun s'était estompée et avait laissé place à sa fragrance naturelle, encore plus forte sur la couverture qui la couvrait. Elle se sentait tellement bien. Elle avait chaud, ses soucis étaient loin pour le moment, elle pourrait investir cette cabine, se cacher indéfiniment ici.

Le bruit de fond cessa et quelques minutes à peine s'écoulèrent quand Ace refit son apparition, juste vêtu d'un boxer. Quelques gouttes tombaient de ses cheveux en bataille et glissaient sur lui, soulignant sa musculature. Il se dirigea d'un air faussement innocent vers l'armoire.

-S'cusez! J'ai oublié mes fringues !

-Vous n'avez pas l'air du tout désolé ! s'offusqua Lîn en détournant le regard. Vous vous baladez souvent presque nu devant les femmes ?!

-Tu veux dire quand elles sont dans ma cabine et sur mon lit ? rétorqua le brun amusé de la répartie de sa princesse.

Il retrouvait sa Lîn et ça lui faisait réellement plaisir. Elle n'enchaîna pas, mais elle ne se laissa pas non plus impressionnée. Elle reporta son attention sur Ace qui choisissait un pantalon de jogging ample pour l'enfiler. Il n'avait plus l'envie de retourner en ville, alors autant se mettre à l'aise. Il rabattit le battant de l'armoire sans prendre le temps d'attraper un t-shirt, quand il vit que sa princesse le regardait. Les affaires de Lîn étaient aussi à l'intérieur et ce serait très difficile de lui expliquer pourquoi si elle les apercevait.

Mais pour le moment, ce n'était pas le meuble qu'elle fixait, mais lui. Son torse plus exactement. Elle mordilla sa lèvre, entrouvrit la bouche mais Ace la devança.

-Balle de granit marin… lâcha t'il dans un souffle, sa bonne humeur envolée.

Lîn hocha lentement la tête, signe qu'elle comprenait qu'il ne voulait pas aborder le sujet… alors elle posa l'autre question, ou plutôt l'affirmation, qui venait de lui traverser l'esprit.

-Nous nous connaissons.

Le temps de pause, suivit du profond soupir que poussa Ace confirma son hypothèse. Ce qui déclencha deux autres sentiments chez Lîn : Colère, car ce pirate avait essayé de jouer la comédie et l'avait pris pour plus bête qu'elle ne l'était. Déception… Les inconnus ne nous décevaient pas. Ce qui conforta Lîn dans son idée.

-Et je parie que tu as la même consigne que tous les autres ! s'emporta la jeune femme.

Elle rabattit ses genoux contre elle dans un geste rageur et les entoura de ses bras. Bouleversée, elle ignora l'air coupable d'Ace qui décida de la rejoindre sur le lit. Il bondit à côté d'elle qui sursauta violemment. Le cœur de Lîn se mit à battre la chamade alors qu'il s'adossait à son tour contre le mur et elle se demanda si le pirate l'entendait. Il étira les jambes et croisa ses bras derrière sa tête. Il joua silencieusement avec ses flammes. Il les rassemblait, les écartait, modulait leur forme et leur éclat. Il s'arrêta quand le silence de Lîn devint trop pesant.

-Vous…

-Laisse-tomber le vouvoiement, marmonna la princesse sans le regarder.

-…Ok… Tu… Je te ramène à ta chambre ?

Question polie pour l'inviter à partir ? Est-ce qu'il voulait se débarrasser d'elle pour ne pas rompre le secret qui entourait l'année, ou peut-être bien plus, écoulée ? Comment réagirait le pirate à une réponse négative ?

-Non… soupira-elle puis elle retint sa respiration en surveillant la réaction de son hôte d'un soir.

Ace ne s'était pas attendu à cette réponse, il pensait plus que sa femme allait le fuir. Mais apparemment la rancœur qu'elle avait contre lui s'était déjà estompée. Mais ce n'était pas une raison pour continuer à l'importuner. Elle voulait sûrement être seule.

-Tu peux rester là autant que tu veux. Je vais te laisser.

Le pirate commença à se lever à contrecœur mais Lîn se mit à genoux à ses côtés et posa sa main fraîche sur son torse, l'empêchant d'aller plus loin. Elle se mit à rougir en comprenant ce qu'elle était en train de faire et retira précipitamment sa main. Mais qu'est-ce qu'il lui avait pris ? Ace resta assis, l'interrogeant du regard. La jeune femme déglutit et rabattit un épaisse mèche de ses cheveux devant son épaule pour la tordre entre ses doigts. Se cacher sous cette couverture était également bien tentant pour échapper au regard du brun. Mais elle lui devait une explication… qu'elle ne connaissait pas elle-même.

-Ace…

Cette manière de prononcer son prénom avait tellement manqué au pirate. Elle utilisait ce ton quand elle trouvait que la question qu'elle voulait poser serait peut-être mal venue. Bon sang, ce qu'il voulait glisser ses doigts dans les mèches ébènes de sa princesse aussi. Mais ça serait sûrement impoli de le faire maintenant.

-Tu… Reste s'il te plaît.

Lîn voulait qu'il reste avec elle ?

-D'accord… Si c'est ce que tu veux… Eh ! Ne pleure pas !

Le soulagement que ressenti Lin fit sauter la soupape de ses émotions qu' elle essayait difficilement de retenir. Rester seule lui semblait tellement douloureux. Elle se mit à sangloter et ne vit pas qu' Ace s'était mit également à genoux d'un geste souple et rapproché d'elle.

Apparemment, c'était trop compliqué pour l'instinct du pirate de se tenir un minimum. Il franchit le court espace qui les séparait et il attira Lîn pour la serrer contre lui. Ne sachant comment réagir, Lîn se camoufla contre son épaule. Elle n'était plus à ça près… Ce pirate devait la prendre pour une dépressive.

-Non, je ne te prends pas pour une dépressive.

Alors plutôt une folle qui pensait à voix haute…

-Tu le fais encore.

-Alors arrête d'écouter ! lui ordonna Lîn en donnant un coup de poing sans force sur les abdominaux d'Ace qui laissa échapper un rire bas.

Faire le vide dans son esprit semblait la meilleure option pour ne plus dire n'importe quoi… Ils restèrent silencieux un moment, jusqu'à ce qu' Ace ne s'aperçoive qu'il avait commencé à jouer avec les cheveux de sa princesse. Il fallait qu'il s'écarte maintenant, mais c'était trop difficile. Comme anticiper la douleur avant d'arracher un pansement, en puissance mille.

-… tu veux bien me parler de toi ? murmura t'elle encore calée contre lui. Je…

Ace la repoussa, l'empêchant de justifier cette drôle de demande. Lîn venait d'arracher le fameux pansement et avait appliqué un anti-douleur en même temps. Il fit rouler l'articulation de son épaule comme s'il s'échauffait avant un effort. Lîn essuya maladroitement ses joues. Elle se cala de nouveau dans les coussins en se rapprochant du pirate, cherchant inconsciemment à prolonger la promiscuité qu'elle venait de partager avec Ace.

Rien que la forte chaleur du corps du brun suffit à la faire rester prêt de lui, jusqu'à oublier le temps qui passait. Ace commença à conter ses aventures et ça promettait d'être passionnant. Alors Lîn réalisa qu'elle voulait tout connaître de cet homme, sûrement un véritable ami, dans une autre vie.

A suivre…


À bientot pour le chapitre 12 : Voyage-retour. Qui paraitra l'année prochaine maintenant.

Joyeuses fêtes de fin d'année !

DG.