Chapitre 7: Triss Merigold est enfin la!

Arno errait dans les rues de Kovir, son pas léger malgré la fatigue du voyage. Il leva la tête vers les bâtiments qui s'élevaient tout autour de lui, réalisant à quel point sa ville natale avait changé. Rien n'était comme dans ses souvenirs, et ce n'était pas juste à cause des années écoulées. Les rues pavées avaient été rénovées, mais une certaine atmosphère pesait sur la ville, comme une ombre silencieuse qui n'avait rien à voir avec les changements architecturaux.

« Ah, Kovir, ma chère Kovir... Qui aurait cru que tu finirais par ressembler à une carte postale médiévale un peu trop léchée ? On dirait presque que quelqu'un a appuyé sur le bouton 'mode deluxe' du décor. » Il baissa les yeux sur un passant qui lui jeta un regard de travers. « Ouais, toi aussi tu trouves que c'est devenu trop propre, pas vrai ? »

Le passant s'éloigna rapidement, visiblement mal à l'aise. Arno haussa les épaules. « Sympa l'accueil. Bon, soyons honnêtes, je connais plus personne ici. Mais franchement, qui en aurait encore envie après... tout ça. » Il désigna vaguement son visage caché sous son masque de toile, une couverture qui camouflait la monstruosité qui le caractérisait désormais.

La ville avait un charme nouveau, certes, mais pour Arno, c'était comme un mauvais coup du sort. Il avait quitté Kovir jeune, vendu à l'École de l'Aigle par une famille trop désespérée pour garder un enfant sans avenir. Le Kovir qu'il connaissait n'était plus. Pas que ça le dérange vraiment. Après tout, il ne s'attachait plus trop aux souvenirs.

« Bon, allez, on va quand même essayer de pas trop se perdre. La dernière fois que j'ai erré sans but, ça a mal fini... Oh, et tiens, devinez quoi ? J'étais à moitié mangé par un wyvern. Mais bon, c'est du passé. »

Il se faufila à travers les ruelles, évitant la foule qui, étrangement, semblait plus dense qu'avant. Des marchands proposaient leurs produits à voix haute, les tavernes étaient pleines à craquer, et pourtant, il y avait cette tension palpable dans l'air. Quelque chose clochait.

C'est en traversant la place publique que son regard fut attiré par une grande affiche clouée sur un mur en bois. D'un geste distrait, il s'en approcha, plissant les yeux pour mieux voir. En lettres dorées et bien imprimées, l'avis proclamait :

Le Roi de Kovir cherche sorceleur compétent pour mission urgente. Enquête sur des massacres mystérieux au nord du royaume.

Un sourire naquit sous son masque. « Eh bien, il était temps que quelqu'un se rende compte que j'étais dans le coin. »

Les détails de l'affiche évoquaient des disparitions mystérieuses, des corps retrouvés dans des états abominables, des rumeurs de créatures non identifiées semant la terreur dans les montagnes au nord de Kovir. Une récompense royale était proposée, et le ton de l'affiche laissait entendre que le roi ne plaisantait pas.

« Bon sang, si c'est pas un appel à l'aventure, je sais pas ce que c'est. On dirait presque que c'est écrit pour moi. » Il secoua la tête avec amusement avant de se tourner vers le palais, visible à l'horizon avec ses tours imposantes et ses murs immaculés.

Arno haussa les épaules et se mit en route. « Allez, autant aller voir ce qu'ils veulent vraiment. Et qui sait ? Peut-être que j'aurai droit à un bon repas royal. »

Tout en marchant, il continuait de commenter ce qu'il voyait autour de lui. « Ça, c'est vraiment dingue, non ? Ils rénovent tout, ils construisent des palais en or, mais ils sont toujours incapables de s'occuper de trois créatures qui zigouillent dans le nord. Ah, la noblesse, c'est un concept fascinant. »

Les rues semblaient de plus en plus animées à mesure qu'il approchait du palais. Des gardes, armés jusqu'aux dents, surveillaient les alentours. Arno lança un coup d'œil vers eux, plissant les yeux comme s'il évaluait leur capacité à le repérer.

« Les gars, pas de panique. Je suis juste là pour voir le roi. Si quelqu'un me demande si je viens pour un banquet... eh bien, la réponse est probablement oui. »

En approchant des grandes portes du palais, Arno ne put s'empêcher de ressentir un brin de nostalgie. C'était là, à l'ombre de ces mêmes tours, qu'il avait grandi, rêvé de grandeur avant d'être envoyé à l'autre bout du continent pour devenir ce qu'il était aujourd'hui. Un sorceleur dégénéré, oui, mais un sorceleur tout de même.

Les gardes à l'entrée le dévisagèrent en silence tandis qu'il s'avançait vers eux, sa démarche désinvolte et son masque de toile lui donnant une allure singulièrement inquiétante.

« Messieurs, je viens répondre à votre petite annonce. Vous savez, celle pour laquelle vous cherchez un sorceleur ? Eh bien, vous avez de la chance. Je suis exactement ce qu'il vous faut. »

Les gardes échangèrent un regard perplexe avant de se pousser légèrement pour le laisser passer, hésitant, mais ne souhaitant visiblement pas contester un sorceleur – même aussi étrange que lui.

« C'est bien, c'est bien. Vous apprenez vite. » Arno leur adressa un salut théâtral avant de pénétrer dans l'enceinte du palais, ses pensées tournant déjà autour de la récompense mentionnée sur l'affiche. Après tout, il n'était pas revenu à Kovir pour rien. Peut-être que ce retour allait s'avérer plus lucratif qu'il ne le pensait.

Arno pénétra dans le palais de Kovir avec sa nonchalance habituelle, ses pas résonnant sur les dalles de marbre parfaitement polies. Il s'attendait à ce que les regards se tournent vers lui – et il ne fut pas déçu. Les courtisans, les soldats, et même les serviteurs ne pouvaient s'empêcher de le dévisager. Ce sorceleur masqué n'était pas exactement une figure commune ici, même dans ce royaume où les sorceleurs étaient parfois appelés pour résoudre des problèmes.

« C'est impressionnant, pas vrai ? » commenta-t-il à voix haute, comme s'il parlait à personne en particulier. « Ces tapisseries, ce plafond… Sérieusement, ils ont mis tout ça juste pour m'impressionner ? »

Ses remarques n'eurent pour effet que d'accentuer les murmures et les regards méfiants. Mais Arno s'en moquait. Il traversa les grandes portes de la salle du trône avec la même désinvolture, sa cape battant légèrement dans son dos. Au bout de la salle, sur un trône orné de motifs dorés et d'un éclat de pierreries, se tenait le roi de Kovir. À ses côtés, une silhouette plus petite mais imposante d'une autre manière : Triss Merigold, la puissante sorcière et conseillère du roi.

Arno s'arrêta juste avant le trône, observant le roi avec son sourire caché derrière son masque de toile. « Je suppose que c'est là que je fais une révérence, hein ? » plaisanta-t-il en faisant mine de s'incliner de façon exagérée. « Mais vous avez pas besoin de tout ça, n'est-ce pas ? On va sauter cette partie, OK ? »

Le roi de Kovir, un homme à la barbe soigneusement taillée et aux traits sévères, observa Arno avec des yeux perçants. Il resta silencieux un moment, évaluant visiblement cet étrange personnage qui venait de se présenter pour une mission si cruciale. Finalement, il parla d'un ton calme, mais ferme.

« Vous êtes venu pour répondre à l'appel, je présume. » Sa voix résonna dans la salle, pesant chaque mot. « Nous avons besoin d'un sorceleur pour enquêter sur une série de massacres dans le nord de Kovir. Les corps retrouvés sont... dans un état que même nos plus courageux soldats n'osent plus affronter. »

Arno hocha la tête, comme s'il s'attendait à ce genre de description. « Oh, des massacres mystérieux ? Vous auriez dû commencer par ça. Les mystères, c'est ma spécialité. Enfin, avec un peu d'humour en bonus. »

Triss Merigold, jusque-là silencieuse, fronça légèrement les sourcils. L'attitude d'Arno l'irritait déjà. Elle croisa les bras, fixant le sorceleur d'un regard perçant. « Vous parlez beaucoup, pour un sorceleur. » Elle accentua le mot, comme pour souligner son doute. « De quelle école venez-vous ? »

Arno se tourna vers elle avec un sourire qu'elle ne pouvait pas voir, mais qu'elle devinait dans son ton. « Ah, ça y est. La fameuse question. Je suis de l'École de l'Aigle. »

Un silence suivit, Triss le dévisageant avec un mélange d'incrédulité et de méfiance. « L'École de l'Aigle ? » répéta-t-elle, presque sarcastique. « Je n'en ai jamais entendu parler. »

Arno se balança légèrement sur ses talons, haussant les épaules. « C'est parce que vous n'êtes probablement jamais allée en Zerrikania. L'École de l'Aigle, c'est là-bas que ça se passe. Un endroit charmant, plein de sable, de chaleur et de trucs pointus qui piquent. »

Triss plissa les yeux. « Zerrikania ? » Elle ne pouvait s'empêcher de douter de son histoire. Jamais elle n'avait entendu parler d'une telle école parmi les sorceleurs, et elle en connaissait beaucoup. « Et je suppose que cette école forme des sorceleurs qui passent plus de temps à plaisanter qu'à utiliser leurs signes ? »

Arno éclata de rire. « Oh, vous m'avez ! » Il leva les mains en signe de reddition. « C'est vrai, j'ai jamais été très doué pour les signes. Un petit problème de mutation qui a mal tourné, si vous voulez tout savoir. Mais bon, on fait avec ce qu'on a, non ? »

Triss ne semblait pas du tout amusée. Elle jeta un coup d'œil au roi, presque pour s'assurer qu'il voyait la même chose qu'elle. Mais le roi de Kovir restait calme, fixant Arno avec un regard mesuré. Il était évident que cet homme, malgré son comportement déroutant, avait attiré l'attention du roi.

« L'École de l'Aigle, donc... » murmura le roi, répétant doucement les mots. « Peu importe d'où vous venez, sorceleur, si vous pouvez résoudre ce problème. » Il fit un geste vers une carte étalée sur une table à proximité. « Les massacres ont eu lieu dans plusieurs villages au nord. Nos meilleurs hommes ont été envoyés, mais peu sont revenus. Ceux qui l'ont fait parlent de créatures qu'ils n'ont jamais vues auparavant. »

Arno hocha la tête en s'approchant de la carte, jetant un coup d'œil rapide. « Hmm… Intéressant. Et vous avez dit que les corps étaient retrouvés... dans quel état ? »

Le roi hésita un instant avant de répondre. « Vidés de leur sang. »

Arno se redressa en un instant, un éclat moqueur dans ses yeux. « Ah, d'accord. Je vois où ça va. Vous avez besoin d'un sorceleur, pas d'un exterminateur de moustiques géants, hein ? »

Triss serra les dents, se demandant combien de temps elle allait encore supporter cet homme. « Vous ne semblez pas prendre cette mission au sérieux, » dit-elle sèchement. « Des vies sont en jeu. »

Arno se tourna vers elle, son ton plus léger que jamais. « Oh, ne vous méprenez pas, Mademoiselle Rouquine. J'ai vu des choses bien pires que des corps vidés de leur sang. Des trucs qui vous donneraient des cauchemars pendant des mois. » Il fit une pause, laissant son sourire s'élargir sous son masque. « Mais c'est juste ma manière d'aborder les choses. L'humour, voyez-vous, ça aide à ne pas devenir complètement cinglé. »

Le roi intervint, voyant que la tension montait. « Triss, je comprends vos doutes. Mais nous n'avons pas le luxe de nous montrer trop sélectifs. Si cet homme dit qu'il est capable, nous n'avons pas d'autre choix que de lui donner une chance. »

Triss soupira, mais acquiesça. « Très bien. Mais je vais l'accompagner. Je ne fais pas confiance à cet... 'huluberlu' seul sur le terrain. »

Arno éclata de rire. « Ah, Mademoiselle Rouquine de Feu veut jouer à la nourrice, c'est ça ? Parfait. J'adore les équipes. »

Triss intervint immédiatement. « Vous pouvez être sûr que je ne laisserai rien au hasard. » Elle fusilla Arno du regard, comme pour le défier de répondre.

Arno sourit, levant les mains en signe de reddition. « Pas de problème. Vous voulez de la rigueur, vous aurez de la rigueur. Enfin, peut-être pas. Mais je promets de faire de mon mieux. »

Le roi, fatigué de cette joute verbale, se rassit. « Vous partez demain. Trouvez la source de ces massacres. Et si vous réussissez, il y aura une récompense à la hauteur de vos attentes. »

Arno s'inclina légèrement. « Une récompense ? Vous aviez qu'à commencer par ça. Vous savez, un peu de motivation monétaire, ça fait des merveilles. » Il lança un regard amusé à Triss. « Alors, prête pour une petite aventure avec le meilleur sorceleur de Zerrikania ? »

Triss ne répondit pas, mais son regard en disait long. Elle n'appréciait pas du tout l'idée de travailler avec lui, mais elle n'avait pas le choix. « Si vous prenez ça au sérieux, alors peut-être. Sinon... »

Arno éclata de rire. « Sinon quoi ? Vous allez me transformer en grenouille ? »

Triss ne répondit pas, mais le silence était suffisant pour laisser Arno comprendre qu'elle n'hésiterait pas si nécessaire. Il aimait cette tension, ce jeu de désinvolture contre rigueur, et il avait bien l'intention d'en profiter. Mais en même temps, quelque chose clochait dans cette mission, et il le sentait.

En aparté, Arno se tourna légèrement vers le lecteur, brisant le quatrième mur avec une désinvolture familière.

« Bon, soyons clairs. Il y a quelque chose de louche ici. Des corps vidés de leur sang ? Ça me rappelle vaguement quelque chose. Et c'est pas les moustiques géants, si vous voyez ce que je veux dire. Mais hey, je vais garder ça pour moi. Pas besoin d'inquiéter tout le monde. Et puis, qui sait ? Peut-être que je me trompe. Ce serait bien la première fois... ou pas. Sinon mon poto Dracula affrontera la même menace dans ses aventures au chapitre 54.»

« Quoi qu'il en soit, on va bien s'amuser avec Rouquine de Feu. Elle a l'air de me détester, mais ça, c'est juste parce qu'elle ne m'a pas encore compris. Ça viendra, je vous le dis. »

Puis, se redressant, il revint dans la conversation, tout sourire.

Le roi conclut : « Faites ce qu'il faut. Je compte sur vous deux. »

« Et vous pouvez, Majesté, » répondit Arno avec un dernier salut théâtral. « En avant pour une mission sanglante. Littéralement. »

Triss roula des yeux, mais se résigna. La mission devait être menée à bien, et pour le meilleur ou pour le pire, elle devait coopérer avec cet étrange sorceleur. Mais une chose était sûre : elle ne lui ferait pas confiance avant d'avoir vu de quoi il était capable.

En quittant le palais, Arno et Triss marchaient côte à côte dans les rues animées de Kovir. L'atmosphère, loin de la solennité du palais, ne fit rien pour détendre la tension palpable entre eux. Arno, les mains dans les poches, observait la foule avec un sourire décontracté sous son masque de toile, tandis que Triss, bras croisés, fixait l'horizon, visiblement contrariée.

Le silence entre eux fut rapidement brisé par Arno, comme il fallait s'y attendre. « Alors, Mademoiselle Rouquine de Feu, prête à partir à l'aventure avec le meilleur sorceleur de Zerrikania ? »

Triss ne se tourna même pas vers lui. « Pour l'instant, je ne suis pas convaincue que vous soyez un sorceleur. »

Arno haussa un sourcil, amusé. « Oh, vraiment ? Je pensais que mon charmant charisme et mon masque mystérieux suffiraient à vous convaincre. Qu'est-ce qui vous met encore dans le doute ? »

Triss soupira bruyamment, clairement irritée. « Pour commencer, je n'ai jamais entendu parler de l'École de l'Aigle. Et je connais bien les différentes écoles de sorceleurs. Pourtant, vous débarquez ici, vous parlez trop, et vous plaisantez sur tout. Ce n'est pas vraiment ce qu'on attend d'un sorceleur. »

Arno éclata de rire. « Ah, je vois. Vous pensez que je suis un imposteur ! Ça me flatte presque, vous savez. Si vous voulez, je peux vous montrer mes petites griffes à l'œuvre. Mais bon, ce serait tricher. »

Triss le fixa du coin de l'œil, méfiante. « Vous plaisantez encore. C'est ça qui m'inquiète. »

Arno secoua la tête avec un sourire. « Ah, Rouquine de Feu, je plaisante parce que c'est ma manière d'affronter ce genre de situations. Vous devriez essayer. Ça aide à ne pas perdre la boule. »

Triss s'arrêta brusquement, forçant Arno à faire de même. Elle se tourna enfin vers lui, son visage marqué par l'agacement. « Écoutez, je ne suis pas ici pour plaisanter. Cette mission est sérieuse. Des vies sont en jeu. Si vous n'êtes pas à la hauteur, si vous êtes là juste pour... je ne sais pas, jouer les héros en quête de gloire, alors je veux le savoir tout de suite. »

Arno la regarda un instant, son sourire disparaissant lentement. Il s'approcha d'elle, réduisant la distance entre eux. « Vous savez quoi, Rouquine ? J'ai vu des choses qui feraient fondre votre cerveau comme du beurre au soleil. Des monstres, des massacres, des horreurs que même les sorcières de votre calibre ne pourraient pas supporter. Alors, ouais, je plaisante. Je plaisante parce que c'est ça ou sombrer dans la folie totale. »

Triss ne recula pas, mais quelque chose dans le regard d'Arno l'intrigua. Elle ne le dit pas, mais il y avait une profondeur derrière ses mots qu'elle n'avait pas anticipée.

« Très bien, » dit-elle enfin, ses yeux sondant les siens. « Mais sachez que je surveille chacun de vos mouvements. Je ne vous fais pas confiance. Pas encore. »

Arno recula d'un pas, retrouvant son sourire en coin. « Oh, vous allez adorer me surveiller. C'est comme regarder un feu d'artifice. Chaque minute est une surprise. »

Ils reprirent leur marche, Triss le surveillant toujours du coin de l'œil. « Et arrêtez de m'appeler Rouquine de Feu, » lâcha-t-elle avec frustration.

Arno leva les mains en signe de reddition. « Très bien, très bien... Triss. Mais avouez que ça vous va bien. »

Elle l'ignora, se concentrant sur la route. « Ce n'est pas un jeu. Nous allons probablement affronter quelque chose de bien plus dangereux que ce que vous laissez entendre. »

Arno haussa les épaules, continuant sur son ton désinvolte. « J'ai l'habitude des monstres assoiffés de sang. Et puis, entre nous, je pense que nous allons former un duo sensationnel. Imaginez : la sorcière sérieuse et le sorceleur décontracté. Un duo de détectives qui va résoudre des meurtres sanglants. Ça ferait un malheur dans les théâtres. »

Triss tourna brusquement la tête vers lui, clairement agacée. « Ce n'est pas une farce, Arno. Des villages entiers sont terrifiés. Les corps sont retrouvés dans des états que même les soldats aguerris n'ont jamais vus. Si vous n'êtes pas capable de prendre ça au sérieux, je le ferai seule. »

Arno sourit, observant la rue devant eux. « Oh, je prends ça très au sérieux. C'est juste ma manière de le montrer qui est différente. Vous verrez. Quand ça chauffera, je serai là pour faire le sale boulot. Et qui sait, peut-être que vous finirez par apprécier mon style. »

Triss serra les dents. Elle ne savait pas si elle pouvait supporter cet homme plus longtemps. Pourtant, malgré son agacement, il y avait quelque chose chez lui qui l'intriguait. Il ne ressemblait à aucun sorceleur qu'elle avait rencontré, mais elle ne pouvait nier qu'il y avait une sorte de compétence cachée derrière son comportement excentrique. Et cela la rendait encore plus méfiante.

« Ne vous avisez pas de me décevoir, » le prévint-elle avec gravité.

Arno fit semblant de réfléchir avant de répondre, enjoué. « Décevoir ? Moi ? Jamais ! Sauf si on parle de vos attentes démesurées, dans ce cas... peut-être. »

Triss poussa un soupir de frustration, se demandant comment elle allait pouvoir travailler avec cet individu. « Nous verrons bien, Arno. Nous verrons bien. »

Arno, quant à lui, était plus qu'amusé par cette tension. Il se tourna de nouveau vers le lecteur en brisant le quatrième mur, profitant de l'occasion pour partager ses pensées.

« Alors, vous voyez ce que je dois endurer ? Cette Rouquine de Feu est pleine de méfiance. Mais c'est toujours comme ça au début, pas vrai ? Ils me détestent d'abord, puis ils finissent par se dire : 'Eh, ce type n'est peut-être pas si mauvais que ça.' »

Il secoua la tête, continuant à marcher aux côtés de Triss tout en parlant au lecteur. « Mais bon, elle va apprendre à m'aimer. Ou au moins, à me tolérer. Ce qui est déjà un bon début. »

Alors qu'ils continuaient leur route, la tension entre eux restait palpable. Le partenariat forcé n'était pas exactement parti sur de bonnes bases, mais ils n'avaient pas d'autre choix que de coopérer.

Le matin suivant, Arno et Triss se retrouvèrent dans la cour du palais, prêts à partir pour le nord du royaume. Un brouillard épais enveloppait la ville de Kovir, rendant l'atmosphère lourde et silencieuse. Même si la tension entre eux était palpable, le duo n'avait pas d'autre choix que de coopérer pour accomplir leur mission.

Le roi de Kovir, accompagné de quelques conseillers, descendit les marches de pierre pour leur donner les dernières instructions. Un serviteur leur apporta des cartes et des provisions, tout en jetant des coups d'œil méfiants à Arno, dont le masque étrange et l'attitude nonchalante contrastaient avec la solennité du moment.

« Voici les villages touchés par les massacres, » dit le roi en pointant du doigt plusieurs localités marquées d'une encre rouge sombre sur la carte. « Vous commencerez par le village de Nothgir. C'est là que les premiers corps ont été découverts. Les villageois sont terrifiés. Je vous laisse les soins d'obtenir toutes les informations nécessaires. »

Arno hocha la tête, étudiant la carte d'un air faussement concentré. « Nothgir, hein ? J'imagine qu'il va falloir commencer par là. J'espère qu'ils ont du bon vin là-bas, sinon ça risque d'être un voyage un peu ennuyeux. »

Triss roula des yeux, son agacement visible. « Il y a des vies en jeu, Arno. Concentrez-vous. »

« Oh, je suis concentré, Rouquine. Ne vous en faites pas. Je veux juste être sûr qu'on aura quelque chose à célébrer une fois qu'on aura réglé cette affaire. »

Le roi resta impassible, bien qu'un soupçon de perplexité se lisait dans son regard. « Je compte sur vous deux. Triss, vous veillerez à ce que l'enquête soit menée correctement. »

Elle hocha la tête avec détermination. « Vous pouvez compter sur moi, Majesté. »

Arno, quant à lui, fit un salut théâtral. « Et sur moi aussi, bien sûr. Si vous avez besoin de chasser des moustiques géants, je suis votre homme. »

Le roi ne réagit pas à la plaisanterie, préférant se concentrer sur la gravité de la situation. « Des rapports parlent de créatures inconnues qui attaquent sous le couvert de la nuit. Soyez sur vos gardes. »

Triss rangea la carte dans une sacoche, puis lança un dernier regard au roi avant de se tourner vers Arno. « Nous devrions partir dès maintenant. »

Arno sourit sous son masque. « Prête à partir à l'aventure, hein ? » Il la taquina tout en ajustant ses lames à sa ceinture. « Vous savez, j'ai toujours rêvé d'affronter des vampires qui ressemblent à ceux de mes rêves d'enfance. Vous savez, les trucs bien kitsch avec des capes, des crocs brillants et tout. »

Triss le fusilla du regard. « Vous parlez encore, mais je ne vois toujours pas de preuves de vos compétences. »

Arno éclata de rire. « Oh, Rouquine de Feu, vous verrez bien. Laissez-moi juste un peu de temps, et vous finirez par m'adorer. Ou au moins à me tolérer. »

Triss soupira, se résignant à supporter son humour décapant. Bien qu'elle ne le montrait pas, une partie d'elle commençait à percevoir quelque chose de plus profond chez Arno. Sous ses blagues incessantes et son attitude désinvolte, il y avait une lueur d'expérience et de compétence. Mais elle restait sur ses gardes.

Ils montèrent à cheval, prêts à se diriger vers les montagnes. Le voyage allait être long, et le froid mordant du nord de Kovir ne ferait qu'amplifier la tension déjà présente. Alors qu'ils traversaient les portes de la ville, Arno brisa une nouvelle fois le silence.

« Vous savez, c'est drôle. Quand j'étais petit, je rêvais toujours de partir à l'aventure avec une rouquine. Bon, dans mes rêves, elle était un peu plus sympa, mais je suppose qu'on ne peut pas tout avoir, pas vrai ? »

Triss serra les rênes, tentant de garder son calme. « Je vous avertis, Arno. Si vous ne prenez pas cette mission au sérieux, je vous laisserai en plan au milieu des montagnes. »

Il éclata de rire. « Oh, je vous crois capable de le faire. Mais pas de souci. Vous allez voir, je suis très professionnel quand il s'agit de démembrer des créatures assoiffées de sang. »

Leurs chevaux avancèrent sur le chemin de terre, les collines et les forêts enneigées de Kovir se dessinant à l'horizon. Le vent froid soufflait doucement, rendant le voyage encore plus austère. Mais malgré le paysage sombre et les circonstances oppressantes, Arno continuait de plaisanter, refusant de laisser l'atmosphère le gagner.

En aparté, il se tourna de nouveau vers le lecteur avec son sourire habituel sous son masque.

« Alors, les amis, ça y est. On est en route pour une mission sanglante. Je vous parie qu'on va tomber sur des trucs vraiment bizarres. Vous savez, le genre de monstres qu'on n'ose même pas imaginer. Mais ne vous inquiétez pas, je gère. Et puis, j'ai Rouquine de Feu avec moi. Elle adore les duos. Même si elle ne le sait pas encore. »

Il fit une pause, contemplant les montagnes qui se profilaient au loin.

« Et ces massacres ? Ouais, je sens que c'est pas juste des bandits. Il y a un truc bien plus moche qui se cache là-bas. Mais chut, ne le dites à personne. Je préfère les surprises. »

Le vent soufflait plus fort à mesure qu'ils s'éloignaient de la ville, les routes devenant de plus en plus escarpées. Arno observa les nuages gris au-dessus d'eux, sentant que quelque chose de mauvais approchait. Les montagnes au loin, noires et menaçantes, semblaient les attendre.

Triss, de son côté, observait Arno avec un mélange de méfiance et d'intrigue. Bien qu'elle n'appréciait pas ses manières, elle ne pouvait nier qu'il avait une confiance en lui déconcertante. Peut-être qu'il n'était pas aussi incapable qu'elle l'avait d'abord cru. Mais elle préférait rester sur ses gardes. Ce sorceleur était bien trop imprévisible pour être pris à la légère.

Leurs chevaux gravirent la première colline, et bientôt, la ville de Kovir disparut derrière eux, ne laissant que le froid, la neige et les mystères qui les attendaient dans les montagnes.

« Alors, prête pour une balade en montagne, Triss ? » lança Arno, avec un ton enjoué.

Elle ne répondit pas, se concentrant sur le chemin devant eux, déterminée à ne pas se laisser distraire par ses plaisanteries.

Et ainsi, ils partirent vers l'inconnu, chacun avec ses propres doutes et motivations. Mais une chose était certaine : cette mission serait bien plus que ce qu'ils avaient imaginé.