Hello, comme promis voici le chapitre 16 ! Dedans il y a la scène originale qui a inspirée cette histoire (enfin la scène en question a été coupée en deux idée, et ici il y a la deuxième !). J'espère que le chapitre vous plaira, perso je l'aime beaucoup !
Bonne lecture !
Chapitre 16 : Les mains sales
Bam bam bam.
Livai émergea péniblement de derrière le canapé, se passant une main dans les cheveux, alors qu'on frappait à nouveau à sa porte avec autant de délicatesse qu'un bœuf enragé.
"Livai !" appela Hanji, "On a besoin de toi !"
Livai poussa un soupir et se leva pour aller ouvrir la porte.
"Le soleil est à peine levé, pas besoin de réveiller tout le quartier."
Hanji s'apprêtait à protester mais son regard se posa sur ses vêtements froissés de la veille, ses cheveux en bataille, et les cernes encore plus sombres que d'habitude sous ses yeux.
"Houla, y en a un qui connait pas le sens du mot 'dormir'."
"Ta gueule."
"Woooouuuu," brailla-t-elle avant de redevenir sérieuse quand Livai lui jeta un sale regard. "Tu vas pouvoir être utile pour une fois, il y a eu un éboulement à Maliin et ils ont besoin de toutes les mains disponibles pour évacuer les blessés. Dont nous, apparemment. Enfin, on suppose que ce n'est pas qu'un simple éboulement, mais plutôt un attentat de la Résistance…"
"Maintenant ?" demanda-t-il avec une grimace et Hanji parut surprise.
"J'aurais pensé que tu serais content de faire quelque chose pour une fois ? Des civils ont été pris dans l'éboulement, et tu te doutes que l'armée va mettre en priorité ses soldats, et ne s'occupera des autres que s'ils ont le temps. Et on sait tous qu'ils ne le trouveront pas, ce temps."
Livai tourna les talons et traversa le salon vers sa chambre, laissant la porte ouverte dans une invitation silencieuse destinée à Hanji. Ce n'était pas que ça lui déplaisait d'aller aider à Maliin, le problème était d'y aller maintenant. Il avait eu le temps d'y réfléchir cette nuit, et le mieux qu'il puisse faire c'était de laisser quelques jours à Eren avant de retourner au Fi Malja pour s'excuser en espérant de pas se faire démembrer par Mikasa. Il verrait bien à ce moment s'il voulait toujours de lui comme ami, mais il ne voulait pas se séparer sur un malentendu, pensa-t-il en rassemblant rapidement des affaires. Maliin n'était pas si loin, il devrait être revenu deux-trois jours plus tard avec un peu de chance.
Hanji était en train d'inspecter la fiole d'huile d'argan quand il revint dans le salon et il poussa un soupir exaspéré.
"Touche pas," râla-t-il et Hanji dût sentir qu'il était vraiment d'humeur exécrable car elle reposa la fiole sans poser de questions.
"Les chevaux nous attendent dehors, on doit vraiment pas traîner," annonça-t-elle et Livai se contenta d'acquiescer avant de la pousser dehors et de fermer la porte.
Toute son escouade était là, mais personne ne fit le moindre commentaire sur son apparence, sûrement parce qu'il n'y en avait pas un avec les yeux en face des trous à cette heure-ci.
Peut-être que cette mission ne tombait pas si mal finalement. Elle aurait au moins le mérite de le distraire d'Eren.
o O o
"J'ai merdé."
"Je sais Eren, c'est déjà la cinquième fois que tu le répètes."
Eren avait la tête dans ses mains et tapait nerveusement du pied sur le carrelage de la cuisine d'Armin.
"Ça fait dix jours et il n'a pas remis les pieds au Fi Malja. Je crois qu'il ne veut plus me voir."
Dix jours qu'il se redressait à chaque fois qu'un nouveau client entrait, s'attendant à le voir franchir la porte. Livai était devenu un régulier ces derniers temps, mais il n'était pas revenu depuis qu'ils s'étaient embrassés.
"Parce que tu as refusé ses avances ?" demanda Armin d'un air sceptique, et dit comme ça, Livai était un connard. Et aussi, ce n'était pas vraiment ce qu'il s'était passé.
"C'est plutôt moi qui ait initié," admit-il en se redressant avec un soupir, "et après j'ai paniqué sans aucune raison et je me suis enfui sans rien expliquer. En cassant plus ou moins sa table. Et une tasse aussi."
Peut-être que c'était sa tasse préférée, offerte par sa petite sœur morte ou quelque chose comme ça. Peut-être que le problème n'était pas le fait qu'il l'ait embrassé, mais le fait qu'il ait cassé sa tasse.
Bah bien sûr. Il devenait surtout complètement con.
"Donc tu penses qu'il t'en veut ?" intervint Armin, forçant Eren à enfin dire à voix haute ce qu'il pensait vraiment.
"Je pense qu'il se sent coupable."
Bien sûr, Armin devait se douter de tout ça. Ce qui était bien avec lui, c'était qu'il le forçait juste à réaliser ce qu'il savait déjà au fond de lui.
"Alors qu'est-ce qui t'empêche d'aller chez lui pour clarifier la situation ? S'il t'évite parce qu'il pense que tu ne veux plus le voir, alors que clairement, ce n'est pas le cas," rétorqua Armin avec un regard qui lui faisait parfaitement comprendre à quel point il avait l'air pathétique, "qu'est-ce qui te retient ?"
Eren poussa un soupir, laissant son regard se poser sur la fenêtre. Reiner courait partout dans le jardin en portant Aslan comme un sac à patate au plus grand plaisir de l'enfant. Il regarda Aslan éclater de rire et reporta son attention sur Armin.
"Si je veux vraiment lui expliquer pourquoi j'ai paniqué, je dois d'abord lui dire que je suis un oméga, et que je suis passé par une maison de réconfort."
"Et ça casserait le mythe," ajouta Armin pour lui.
Décidément, il avait tout compris.
"Et ça casserait le mythe," confirma Eren.
Il voulait être Eren qui se bat pour la justice, qui rassure et fait rire les gens. Eren qui a vécu des choses difficiles peut-être, mais qui s'en est relevé après toutes ces années. Pas Eren qui pleure la nuit à cause de stupides cauchemars, qui s'écarte dès que quelqu'un s'approche trop.
Une pierre solide. Pas du sable.
"Tu ne peux pas prétendre toute ta vie."
… C'était plus ou moins ce qu'il avait prévu de faire.
"J'ai peur qu'il réagisse mal," répondit-il en le regardant droit dans les yeux. C'était la première fois qu'il le disait à voix haute, qu'il reconnaissait l'emprise que Livai avait sur lui. "Je commence enfin à avoir de l'estime pour moi même, Armin. Il me détruirait."
"Tu accordes plus d'importance à son jugement qu'au nôtre ?" demanda simplement Armin. Eren baissa la tête, enfouissant ses mains dans ses cheveux.
Il savait ce que pensaient Mikasa, Armin, Darya et tous les autres de lui. Mais ils étaient biaisés. Ils le soutenaient parce qu'il faisait partie de leur famille, parce qu'il les avait aidés par le passé. Livai… Livai le verrait tel qu'il était. Il n'essaierait pas de le protéger.
"Oui."
C'était la vérité. En quelques mois, Livai s'était frayé un chemin jusqu'à lui.
Armin resta longtemps silencieux. Eren n'osa pas lever les yeux.
"Tu as déjà cassé le mythe tu sais ?" murmura-t-il finalement.
Peut-être. Sûrement.
"Il t'a vu tuer Nakisa," ajouta Armin quand il comprit qu'il ne répondrait pas, et depuis quand il parlait avec Livai, lui ? Parce que ce n'était clairement pas Eren qui avait parlé de ce glorieux moment. "Je lui ai demandé ce qu'il s'était passé après que tu sois revenu couvert de sang."
C'était vrai qu'il y avait eu ça aussi.
Eren poussa un soupir et se frappa trois fois l'oreille du plat de sa main. Le bruit sourd contre son tympan réussit à le rassurer un peu.
Pour être honnête, Livai l'avait déjà vu dans ses moments les plus vulnérables, et il ne pensait pas que ça changerait grand-chose entre eux s'il savait.
Il jeta un coup d'œil à Armin, qui attendait patiemment qu'il atteigne sa conclusion tout seul, et leva les yeux au ciel.
"D'accord," céda-t-il finalement, et il n'aimait pas du tout le petit sourire arrogant d'Armin. "D'accord. Je vais lui dire."
"Vas-y maintenant."
Eren secoua la tête.
"Je ne sais pas encore comment je vais lui dire."
"Si tu attends, tu vas te dégonfler. Fais-moi confiance, il vaut mieux que tu ne réfléchisses pas trop sur ce coup là."
Eren fit la moue. Un piaillement résonna derrière son oreille, et il grimaça. Il y était peut-être allé un peu fort sur son oreille. Il s'excusa silencieusement auprès d'Azadi.
"D'accord."
Un autre piaillement, encore un peu plus perçant.
"D'accord !" répéta-t-il en se levant de sa chaise.
Il passa une main dans ses cheveux. Maintenant. Il pouvait y aller maintenant. Il pouvait faire ça.
Armin avait raison. S'il ne se bougeait pas maintenant, il passerait encore une semaine à se morfondre dans sa chambre. Au moins, il avait créé trois nouveaux talismans.
Il alla chercher Aslan, remerçiant à peine Reiner au passage, et ils s'échappèrent rapidement. Armin lui fit un signe de tête quand il referma la porte. Une nouvelle vague de détermination le remplit. Si ça ne tenait qu'à lui, il aurait couru jusque chez Livai. Il ne voulait pas avoir le temps de réfléchir, de douter. Il se trouvait cependant que ça ne tenait pas qu'à lui, et qu'il était censé se comporter comme un parent convenable.
Il ralentit un peu pour permettre à Aslan de le suivre à son rythme. Celui-ci avait pris l'habitude de refuser de donner la main à un adulte quand il marchait dernièrement. Au début, ça avait un peu angoissé Eren, et il avait insisté jusqu'à ce qu'Aslan pique une crise dans la rue juste devant le Fi Malja. Au fur à mesure, il s'était détendu. Ou du moins, Darya l'avait fait se détendre. Maintenant, la seule chose qu'il retenait, c'était que s'il lui avait tenu la main, Eren l'aurait sans doute traîné à sa suite dans son engouement, pensa-t-il avec une grimace. Il ralentit encore un peu, pour bonne mesure.
C'était la première fois qu'il se rendait compte d'à quel point Aslan était lent. Chaque pas semblait être au ralenti. Comme Jean quand il tentait de comprendre pourquoi Mikasa ne répondait pas à ses blagues nulles.
"On rentre à la maison ?" demanda Aslan et Eren acquiesça.
Il ne savait pas comment allait se dérouler la conversation avec Livai, mais dans tous les cas, ce n'était pas une discussion à avoir avec Aslan présent. Ou n'importe qui d'autre d'ailleurs.
C'était peut-être un peu contradictoire avec son ressenti à peine quelques minutes plus tôt, mais il avait le sentiment que ça n'allait pas si mal se passer. L'émotion qui montait dans sa poitrine n'était pas de l'anxiété, mais de l'anticipation. Livai lui avait manqué.
"Tu vas pouvoir montrer à Mouima le nouveau jeu que tu as appris," déclara-t-il en baissant le regard vers l'enfant à ses cô-
Eren se figea. Il n'y avait personne autour de lui.
Il eut à peine une seconde pour relever le regard et paniquer avant qu'une poigne ne se referme sur son avant-bras. Une main lui attrapa la nuque avant qu'il ne puisse utiliser un talisman explosif, pointant son regard vers la ruelle en cul-de-sac à sa droite. Un homme qu'il ne connaissait pas pressait la lame d'une épée contre la gorge d'Aslan. L'homme n'était pas en uniforme, mais il reconnaissait ce type de pommeau… Il le voyait tout le temps sur l'épée de Livai.
"Je ne tenterais rien de stupide, si j'étais toi," sourit quelqu'un derrière son oreille, et toutes ses pensées s'arrêtèrent de tourner, paralysées.
Il pensait ne plus jamais avoir à entendre cette voix. Ses doigts se déserrèrent autour du talisman. Il aurait dû tuer Farhad. Il aurait dû se débarrasser de lui avant qu'il ne parte de Shiganshina, ou le suivre jusqu'à Karanese. Tant qu'un ennemi était vivant, il pouvait revenir se venger.
L'homme dans la ruelle raffermit un peu plus sa prise sur Aslan. Il pouvait voir son menton trembler d'ici, mais il n'ouvrit pas la bouche. Eren dégagea sa main de manière bien visible, sans quitter cette ordure du regard. La rue était déserte, mais même si quelqu'un passait, il ne leur viendrait pas en aide. Il devait gagner du temps, jusqu'à ce qu'il puisse sortir Aslan de là. Ensuite il improviserait.
Farhad l'entraîna dans la ruelle, un troisième homme fermant la marche, et le poussa sans ménagement contre le mur. Eren se rattrapa juste avant de se manger la pierre et se retourna brusquement.
Il ne savait pas comment il avait pu trouver cet homme séduisant un jour. La seule vue de Farhad lui donnait envie de hurler, et ce n'était pas à cause de l'affreuse cicatrice qui lui marquait la moitié du visage.
"Tu as vraiment cru que tu pourrais t'en sortir comme ça, Eren ?" moqua Farhad, en tapotant sa joue défigurée. "Sauvé par ce fouineur de Livai ? Tu as vraiment cru que je ne reviendrais pas me venger ?"
"Qu'est-ce que tu veux ?" demanda-t-il d'une voix tendue.
Il aurait eu du mal à se battre contre les trois hommes sans blesser Aslan en temps normal, mais sans son épée c'était impossible. Et il ne doutait pas qu'ils tueraient Aslan au moindre faux pas de sa part. Il ne pouvait absolument rien faire, et Farhad en était parfaitement conscient.
"D'abord, tu vas me laisser mettre ce petit collier," répondit Farhad en sortant une chaîne qu'il ne reconnaissait que trop bien. "Je ne tiens pas à répéter la dernière fois."
Eren tenta de déglutir, mais c'était comme si quelque chose était coincé dans sa gorge, l'enserrait jusqu'à ce qu'il ait du mal à respirer. Il n'avait même pas encore mis la chaîne…
"Si tu laisses partir Aslan."
"Tu me prends pour un con ? Le collier d'abord."
La boule dans sa gorge continuait de monter dans son cou, de serrer plus fort. Il pouvait sentir son coeur dans sa poitrine. Il allait exploser.
Eren prit une discrète inspiration, refusant de montrer la moindre faiblesse à ces enfoirés. Son regard se posa sur Aslan. Il ne l'avait pas entendu commencer à pleurer. L'homme le tenant le tira un peu plus par les cheveux. Son épée égratigna le cou de l'enfant, provoquant un nouveau pleur, et Eren se retourna brusquement vers Farhad.
"Ne le touche pas, enfoiré ! Je vais la mettre, ta putain de chaîne !"
Le sourire de Farhad s'élargit, une lueur malveillante dans les yeux. Il fit un signe à son complice d'arrêter. La lame s'éloigna un peu de la gorge d'Aslan, mais Eren avait l'impression qu'il venait de perdre la partie.
"Tu accordes plus d'importance à ce gosse qu'à ta propre vie…"
Eren ne répondit rien. Il leva lentement les mains pour les placer bien en évidence au-dessus de sa tête.
"Pas de conneries," le prévint Farhad en s'approchant lentement. Il passa derrière lui. Eren baissa les yeux, croisant le regard terrifié d'Aslan. Il ne pouvait pas paniquer maintenant, Aslan avait besoin de lui. Eren réussit à lui offrir un sourire bien plus rassurant qu'il ne pensait être capable.
Le métal froid du collier se referma autour de son cou. Le fourmillement familier de la magie s'évapora et son oreille se mit à siffler. Eren ravala un gémissement. Son torse était bien trop étroit, mais il ne sentait même pas la chaleur habituelle de la panique. Tout était froid.
"Si stoic," commenta Farhad dans son dos. C'était un jeu pour lui. "Est-ce que tu parviendras à garder cette expression quand on te découpera sous les yeux du petit ?" souffla-t-il dans son cou et Eren écarquilla les yeux.
Il voulut se retourner mais Farhad lui donna un coup à l'arrière des genoux et il tomba à genoux dans le sable et la poussière.
"Tu ne vas pas le faire regarder ça ?" s'écria-t-il, perdant son sang-froid pour la première fois depuis qu'ils s'étaient emparés d'Aslan, "tu as dit que tu le laisserais partir !"
"Ah vraiment ? Je ne me souviens plus," moqua Farhad et Eren sentit la rage se mêler à la terreur. S'ils croyaient qu'il allait les laisser faire…
Farhad le saisit par les cheveux et Eren ne réfléchit pas : il ramassa une poignée de sable et la lui balança dans les yeux. D'un bond, il était debout et envoyait valser l'épée menaçant Aslan contre un mur, le soldat la tenant suivant rapidement le même sort.
"Petit fils de pute !" gronda Farhad mais Eren poussait déjà Aslan vers la sortie de la ruelle.
Le troisième soldat était juste derrière eux et Eren dévia son épée avec son avant-bras avant de l'envoyer contre le mur d'un coup à la gorge. Il l'attrapa par les épaules avant qu'il ne puisse se ressaisir, lui enfonça son genou dans le ventre une, deux fois et finit par le tirer vers lui et l'assommer d'un coup à la nuque.
"Cours Aslan ! Rentre à la maison !" cria-t-il à l'enfant qui assistait à la scène, pétrifié.
Farhad avait réussi à se débarrasser du sable dans ses yeux et l'envoya rouler par terre d'un coup de pied dans l'estomac. Eren sentit sa respiration se couper avant qu'un autre coup ne l'atteigne au menton, puis dans les reins. Il essaya de se relever mais un nouveau coup au diaphragme l'envoya manger la poussière, le corps secoué de spasmes.
Il releva la tête et réalisa avec horreur qu'Aslan n'avait pas bougé de place.
"Fais ce que je te dis !" hurla-t-il, sortant Aslan de sa transe, "Cours !"
Cette fois-ci, Aslan l'écouta. Il fit volte-face et partit en courant.
"Reviens ici !" ordonna le soldat restant en commençant à se lancer à sa poursuite.
Oh que non.
Eren rassembla toutes ses forces et se jeta sur les jambes de l'alpha, réussissant à le faire tomber dans la poussière. L'homme sortit un talisman mais Eren lui attrapa la cheville, se rappelant comment Livai lui avait appris à aspirer l'énergie spirituelle, jusqu'à ce que Farhad ne le force à lâcher prise en le tirant en arrière par le col.
"Rattrape le gosse," ordonna-t-il au soldat qui se relevait péniblement, "débrouille-toi pour qu'il n'atteigne pas le Fi Malja."
"Non !" s'écria Eren et Farhad l'envoyer rouler dans la poussière d'un nouveau coup dans le ventre.
"Toi… tu ferais mieux de te préoccuper de ton propre cas," menaça-t-il. Son sourire avait disparu de son visage, remplacé par une colère froide.
Eren se redressa tant bien que mal sur ses avant-bras et essaya de ramper le plus loin possible de lui -vers le cul de sac- avant de s'effondrer à peine cinq mètres plus loin. Farhad le laissa faire, semblant s'amuser de ses pathétiques tentatives.
"Qu'est-ce que tu fais, Eren ? Tu crois vraiment que tu vas m'échapper comme ça ?"
Eren ne répondit rien, affalé dans la poussière et Farhad s'approcha avec une fausse nonchalance. Il regarda l'oméga gisant sur le sol avec mépris.
"Tu peux plus t'enfuir maintenant, petit con. Où est-ce que t'as appris à te battre comme ça ?" demanda-t-il en jetant un coup d'œil par-dessus son épaule vers l'homme toujours inconscient contre le mur.
Eren avait arrêté de bouger et restait là, la tête dans le sable, ce qui eut le don d'irriter Farhad. Il le retourna, le souleva par le col et le plaqua contre le mur sans se heurter à la moindre résistance.
"J'te cause !" s'énerva-t-il avant que son regard ne dévie vers la partie du sol sur laquelle Eren était effondré quelques secondes plus tôt.
"... c'est quoi ça."
o
Livai poussa un soupir et se redressa un peu plus sur sa selle. Ils venaient tout juste de rentrer à Shiganshina et leurs habits étaient couverts de sable et de poussière. Il n'avait qu'une envie : rentrer chez lui et se laver. Les deux-trois jours à Malin, transformés en dix jours, avaient été un enfer. Ils avaient pris moins de deux jours pour s'occuper des survivants, mais après ça il avait fallu dégager tous les décombres pour ramasser les cadavres, et essayer de prouver que ce n'était pas un accident. Et ça, ça avait pris plus de temps.
Livai arrêta son cheval, s'attirant un regard étonné d'Eld, mais ses yeux étaient rivés sur une petite silhouette encore loin devant eux. Deux secondes plus tard, il était descendu de cheval et se précipitait vers elle.
Aslan le reconnut et courut vers lui aussi vite que ses petites jambes le lui permettaient, et Livai sentit sa peur le contaminer. Il s'accroupit à sa hauteur et Aslan se jeta dans ses bras, le corps tremblant.
"Qu'est-ce qu'il se passe Aslan ? Où est Eren ?"
Pas besoin d'être un médium pour se rendre compte que quelque chose n'allait pas.
Aslan éclata en sanglots en entendant le nom d'Eren mais il n'eut pas le temps de répondre car un homme qu'il reconnaissait vaguement déboula dans la rue et se dirigea vers eux. Livai se releva et se plaça devant Aslan, la main sur son épée.
"Cet enfant est à moi," lui dit l'homme en Sinayen et Livai fut presque impressionné par son culot.
"Te fous pas de ma gueule," répondit Livai en replaçant son visage. Il l'avait déjà vu plusieurs fois au quartier général. "Tu as exactement une minute pour expliquer ce qui se passe."
Son équipe l'avait rejoint désormais, mais restait légèrement en retrait, n'osant pas intervenir mais prêts s'il en avait besoin.
Le soldat parut agacé et commença à le contourner. Il fut assez stupide pour essayer de frapper Aslan juste devant lui, et cela suffit à lui ôter tout scrupule. Son fourreau s'abattit sur la nuque de l'homme. Celui-ci vacilla quelques instants avant de s'effondrer. Livai ne s'en préoccupait pas assez pour vérifier s'il était encore en vie. À la place, il ramassa Aslan et le transmit à Gunther.
"Amenez-le en sécurité," dit-il en se tournant également vers Auruo avant de partir en courant dans la direction d'où était arrivé Aslan. Il entendit Eld et Petra derrière lui mais il ne ralentit pas pour les laisser le rattraper.
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"...c'est quoi ça."
Sur le sable était tracé un emblème sanglant, un emblème que Farhad n'avait jamais vu auparavant. Enfin si, une fois.
Il se retourna vers Eren et le secoua un peu par le col.
"Je t'ai posé une question !" cria-t-il, et cette fois il y avait une trace de peur dans sa voix.
Eren agrippa le poignet de Farhad qui le maintenait plaqué contre le mur et traça sur le dos de sa main une croix du bout de son doigt ensanglanté. Son visage se fendit d'un rictus. Farhad le lâcha comme s'il l'avait brûlé, le teint livide. Il tomba lourdement au sol, juste à côté du talisman de sang.
Crève.
Il vit que Farhad avait compris, et il essaya de l'arrêter, mais il était trop tard. Eren plaqua ses deux paumes sur le talisman, lui insufflant juste assez d'énergie pour qu'il absorbe toutes les émotions négatives qui flottaient partout dans la rue. Plus rien ne pouvait arrêter la vague de magie noire qui se déferla sur eux.
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Livai n'avait pas demandé à Aslan où était Eren mais il n'en avait pas besoin. Il pouvait voir d'ici les miasmes d'énergie noire converger vers un unique point, deux rues plus loin. Il ne lui restait qu'à tourner à l'angle de la rue et…
Il sentit la vague mortelle venir et eut le réflexe de lever le bras devant son visage juste avant qu'elle ne le frappe de plein fouet. C'était la première fois qu'il était la cible de magie noire, et il comprit très vite que ce serait sans doute aussi la dernière. La barrière qu'il avait érigée par réflexe, et dont il avait toujours été très fier commençait déjà à se fissurer, et il savait qu'à l'instant où elle lâcherait, il serait mort. Au moins Eld et Petra n'avaient pas été assez stupides pour le suivre vers une source de magie noire. Son bouclier commençait à se fissurer, un éclat argenté, puis un autre. Livai parvint à tenir bon deux secondes de plus avant qu'il ne se brise en mille morceaux. Il fit instinctivement un pas en arrière, se préparant à se recevoir l'énergie noire en plein visage, mais quand il osa rouvrir les yeux, il fut ébloui par une lumière blanche qui l'enveloppait.
Qu-?
L'énergie malsaine le contournait, le fuyant comme s'il la repoussait alors que son bouclier était tombé depuis bien longtemps. Il baissa les yeux sur la source de lumière. La bague… la bague d'Eren le protégeait. Elle n'était plus qu'un anneau de lumière éblouissante, dissipant la noirceur autour d'elle, repoussant toute énergie négative qui essayait de s'approcher de lui, et Livai sentit son souffle se couper.
La vague de magie noire commençait à faiblir, et avec elle la lumière émanant de la bague. Livai parvint à discerner Eren tenter de se relever en s'appuyant contre le mur au fond de l'allée. Il courut vers lui, arrivant juste à temps pour le rattraper au moment où ses genoux cédaient sous son poids et ils glissèrent tous les deux jusqu'au sol. Eren avait les yeux fermés, les sourcils froncés par la douleur et sa main droite était crispée autour de sa poitrine, d'où Livai pouvait voir des tâches noires se propager à une vitesse alarmante.
"Non, j'étais censé la contrôler," marmonna Eren mais Livai n'était pas sûr qu'il lui parlait. Son regard était perdu dans le vague. Ses doigts agrippèrent sa manche avec force.
"Eren, il faut que tu te calmes," l'enjoignit-il avec urgence en regardant autour de lui.
Eren continuait d'émettre des vagues de magie noire et Livai pouvait voir les tâches progresser le long de son cou. La bague était la seule raison pour laquelle il n'était pas dans le même état que les deux cadavres à peine reconnaissables derrière eux.
"Je ne veux pas, je ne veux pas les tuer," répéta Eren, des larmes s'échappant de ses paupières étroitement fermées, et Livai lui agrippa le poignet.
"Eren !" appela-t-il mais celui-ci se dégagea.
"Je ne la contrôle plus ! Elle va tous les tuer !"
Livai regarda autour de lui avec désespoir, avant de frapper Eren sur le crâne.
"Ressaisis-toi bordel !"
La magie noire ne s'arrêta pas, mais Eren écarquilla les yeux.
"Coupe-moi," souffla-t-il, et Livai n'était pas sûr d'avoir bien entendu.
"Quoi ?"
"Coupe-moi maintenant, fais-moi mal !" s'écria-t-il en rencontrant brièvement son regard.
Livai se figea. Il n'était même pas sûr qu'il l'ait reconnu, ses yeux tremblaient frénétiquement. Livai ne réfléchit pas, il sortit son épée en espérant ne pas être en train de faire une connerie. Il entailla le bras d'Eren d'un coup sec, évitant les artères. Eren laissa échapper un cri de douleur avant de prendre une grande inspiration, ses yeux se focalisant à nouveau. Il laissa tomber son front sur son épaule, et Livai le pressa un peu plus fermement contre son cou, priant pour que ça marche.
"Reviens avec moi Eren," murmura-t-il en passant sa main libre dans son dos. La bague commençait à trembler.
Livai regardait avec inquiétude les vagues d'énergie continuer à déferler quand celles-ci s'amincirent brutalement, et tout à coup, les miasmes se dispersèrent, ne laissant derrière eux qu'un calme plat. Eren ouvrit les yeux et laissa échapper un souffle tremblant.
"...Livai."
"Je suis là," répondit-il en resserrant son emprise. Il avait l'impression qu'Eren était prêt à s'écrouler si jamais il s'écartait ne serait-ce que d'un centimètre.
Il sentait sa respiration dans son cou, se faisant de plus en plus calme.
"Qu'est-ce que… tu fous là… j'aurais pu… j'aurais pu te tuer…" finit-il par souffler en s'écartant légèrement.
Il avait l'air secoué, mais la lucidité revenait sur son visage. Livai le laissa lui incliner la tête à la recherche de traces de magie noire sur le cou ou le visage. Ses mains tremblaient encore.
"Je n'ai rien," le rassura-t-il en voulant se relever mais Eren l'attrapa par la manche.
"Aslan !" paniqua-t-il, comme s'il venait de se rappeler qu'il avait été avec lui.
"Aslan est en sécurité, je l'ai récupéré," le rassura-t-il. Tous les traits d'Eren s'affaissèrent sous le coup du soulagement. "Mais on doit pas traîner ici."
Il espérait qu'Auruo et Gunther aient eu le temps d'emmener Aslan loin de là. L'attaque d'Eren avait dû atteindre tous les êtres vivants dans un périmètre proche. Il ne pensait pas que ça ait tué qui que ce soit à plus d'une rue, mais les enfants étaient particulièrement vulnérables. Les habitants juste à côté cependant… Il devrait revenir nettoyer rapidement tout ça. Le plus urgent maintenant était de sortir Eren de là.
"Tu peux marcher ?" demanda-t-il en se redressant et Eren hocha la tête avant de commencer à se relever péniblement en s'appuyant sur lui. Il ne tint pas une seconde avant de s'affaler à nouveau et Livai dût le rattraper, passant son bras par-dessus son épaule.
"Non," se rectifia Eren d'une voix tremblante. "Livai, ton… ton épée s'il-te-plaît."
Livai ne pensait pas qu'il soit en état de tenir une épée mais Eren ne lui avait clairement pas demandé son avis : il profita du fait qu'il avait les mains occupées à le soutenir pour lui glisser son épée encore sanglante des doigts. Il n'eut pas le temps de protester, Eren coupa la chaîne autour de son cou d'un mouvement brusque, s'égratignant au passage.
"Doucement," s'inquiéta Livai alors que le collier tombait au sol et Eren ferma les yeux, essayant de regagner le contrôle sur sa respiration. Une goutte de sang roula dans son cou, se mêlant à la sueur.
"Je ne vais pas… tenir très longtemps," souffla difficilement Eren.
Une seconde plus tard, Livai le sentit s'effondrer de tout son poids contre lui.
o
Livai ne prit même pas la peine d'essayer d'utiliser son cheval. Il fit passer Eren sur son dos et se mit à courir. Le Fi Malja n'était pas si loin, il ne ferait que perdre du temps s'il essayait de retrouver sa jument.
"Caporal !" cria Pétra en le voyant débarquer, et Dieu merci, elle ne semblait pas avoir trop souffert de l'attaque d'Eren.
"Va chercher Hanji ! Dis-lui de me retrouver au Fi Malja après vous avoir donné quelque chose contre la magie noire !" cria-t-il sans ralentir, et elle obéit sans protester, emmenant Eld avec elle.
Lorsqu'il arriva au Fi Malja, il eut la présence d'esprit de passer par derrière, ouvrant la porte avec tant de force qu'elle cogna violemment dans le mur derrière.
"Mikasa ! Soraya ! Quelqu'un !" appela-t-il, et on devait l'entendre depuis le salon de thé mais il n'en avait rien à foutre.
Il entendit quelqu'un dévaler les escaliers, et quelques secondes plus tard Mikasa le délestait du corps inconscient d'Eren, le portant jusqu'à sa chambre deux étages plus haut. Du sang continuait de couler le long de son bras, maculant les marches.
"Qu'est-ce qu'il s'est passé ? Il n'était pas censé être avec Aslan ?" demanda-t-elle en ouvrant frénétiquement des tiroirs du bureau d'Eren.
"Aslan est en sécurité. Je ne sais pas exactement ce qu'il s'est passé mais il a perdu le contrôle sur sa magie noire," répondit-il en ouvrant la chemise d'Eren pour constater l'ampleur des dégâts. C'était au moins trois fois plus noir que la dernière fois, et remontait de manière beaucoup plus inquiétante vers son visage. Son bras continuait de saigner faiblement, mais la coupure était bénigne.
Mikasa trouva le talisman qu'elle cherchait au moment où Soraya entra dans la pièce.
"Qu'est-ce qu'il s'est passé ?"
"Soraya, est-ce que tu peux descendre dans le salon de thé, et si une personne s'appelant Hanji se présente, tu la ramènes ici ?" demanda-t-il alors que Mikasa plaquait le talisman sur la poitrine d'Eren et l'activait.
"Tu lui fais confiance pour traiter la magie noire ?" demanda Mikasa sans arrêter de fournir de l'énergie au talisman, alors que Soraya redescendait les escaliers en courant.
"On a pas le choix, c'est la personne la plus qualifiée que je connaisse."
Eren avait l'habitude de se soigner lui-même. Mikasa connaissait les bases, mais il avait peur que ce ne soit pas suffisant cette fois. Celle-ci consuma deux talismans entiers en essayant de purger la magie noire du corps d'Eren. Il pouvait voir les parchemins noircir jusqu'à se dissoudre, mais les taches ne semblaient pas reculer. Livai referma rapidement la coupure sur son bras, mais il ne pouvait rien faire de plus. Au bout d'une dizaine de minutes, Mikasa lui demanda de prendre le relais. Ils avaient consumés quatre talismans.
Hanji déboula dans la pièce au moment où ils entamaient le sixième, les poussant de son chemin sans ménagement. Livai la laissa faire avec soulagement. Il n'était pas sûr que les talismans étaient vraiment utiles. Il échangea un regard avec Mikasa, qui devait penser la même chose, et ils retournèrent leur attention sur Eren.
Hanji utilisa plusieurs talismans que Livai n'avait jamais vu de sa vie, dont un qui avait des signes incompréhensibles. Ce n'était même pas du maranien, où alors l'écriture d'Eren. Il essaya de lire sur le visage d'Hanji si ça s'annonçait mal, mais son visage ne trahissait aucune émotion.
Finalement, après lui avoir fait inhaler une vapeur, Hanji redéposa Eren doucement sur son lit et se tourna vers eux.
"Il me reste encore quelques endroits à purger, mais ça devrait aller maintenant."
Livai poussa un long soupir et s'autorisa enfin à s'asseoir par terre. Tant pis si le sol n'était pas propre. L'adrénaline venait de retomber et toute la fatigue et la peur accumulée lui tombait dessus. Le soulagement était indescriptible. Après une vingtaine de minutes à essayer de purger la magie noire du corps d'Eren sans succès, il avait vraiment commencé à réaliser la gravité de la situation.
Il regarda Hanji finir son auscultation en laissant aller sa tête contre le mur derrière lui, passant une main dans ses cheveux. Mikasa n'était pas dans un meilleur état que lui, et il savait que Soraya attendait pas loin de la porte.
Il était tellement perdu dans son soulagement qu'il mit du temps à remarquer la marque dans le dos d'Eren, alors qu'Hanji le retournait pour finir son travail. Là, se distinguant bien des tâches de magie noire, se dressait La Sina.
À suivre…
Pfiou, je sais pas combien de fois je l'ai réécrit celui là mais au moins 7-8 fois! Je suis contente qu'il soit enfin sorti, j'espère que vous avez aimé ! Pour le chapitre 17, je vais essayer de le poster encore dans 2 semaines, mais cette fois c'est pas tout à fait sûr, parce qu'il y a encore certains passages que j'ai pas écrit encore une seule fois dedans, donc on verra. A, et merci à tous ceux qui lâchent des reviews, c'est super motivant !
