Hello tout le monde, après le chapitre citronné, voici une petite introspection ( avec humour bien évidemment) sur le futur de la vie à deux et surtout d'une problématique assez compliquée pour notre critique culinaire. je vous souhaite une bonne lecture.

Enjoy


Chapitre 5: le poids du monde

John Watson aurait aimé rester dans cette bulle.

Il aurait aimé oublier tout le reste, s'abandonner entièrement à cette évidence qu'était Sherlock Holmes, ne plus penser aux complications, aux doutes, aux peurs.

Mais la réalité ne se tait jamais longtemps.

Et ce matin-là, alors qu'il était encore enfoui sous les draps avec Sherlock, alors que les lèvres du chef parsemaient distraitement sa peau de baisers paresseux, alors que leurs jambes étaient encore entremêlées sous le poids de leur nuit de fièvre…

La peur le frappa.

D'un coup.

Violente.

Inéluctable.

Il était dans les bras d'un homme.

Et il n'avait jamais été censé être ce genre d'homme.

John Watson n'était pas gay.

Il se l'était toujours dit.

Et pourtant…

Il était là.

Avec Sherlock.

Totalement, irrémédiablement foutu.

Sherlock le sentit immédiatement.

Il releva la tête de son épaule, plissa les yeux comme un chasseur ayant flairé un changement dans l'air.

Watson.

John ne répondit pas.

Il fixait le plafond, son corps soudainement tendu, prisonnier de son propre esprit.

Sherlock caressa doucement son bras, traçant une ligne invisible sur sa peau.

Tu penses.

John ferma les yeux.

Oui.

Trop ?

Oui.

Sherlock soupira contre sa tempe, puis murmura avec une douceur qu'il ne réservait qu'à lui :

Dis-moi.

John inspira profondément.

Puis il lâcha, d'un seul coup :

Je vais briser mon père.

Sherlock cligna lentement des yeux, sa main s'arrêtant sur la hanche de John.

Pardon ?

John sentit sa gorge se serrer.

Il se redressa légèrement, passant une main nerveuse dans ses cheveux, son autre bras pressé contre son ventre comme une barrière invisible.

Il m'a déjà rayé de sa liste pour ne pas être devenu médecin. Pour ne pas avoir suivi la voie familiale. Il ne me regarde déjà plus comme son fils.

Sherlock ne dit rien.

Mais son corps entier s'était crispé.

John sentit sa propre respiration trembler.

Et maintenant, je vais lui dire que mon âme sœur est un homme ?

Silence.

Puis, d'une voix basse, glaciale :

Il te rejettera ?

John eut un rire sans joie.

Il a déjà renié ma sœur. Il n'a jamais accepté qu'Harry soit lesbienne. Je… Je me suis toujours dit que j'avais de la chance d'être né dans le bon moule. Que je n'aurais pas à me battre comme elle l'a fait. Et maintenant…

Il sentit son cœur se briser.

Maintenant, je vais être son autre enfant à décevoir.

Sherlock resta immobile.

Trop immobile.

Et lorsqu'il parla, ce n'était plus le ton suave du séducteur, ni celui du génie joueur.

C'était une voix tranchante. Sombre.

Je le hais déjà.

John leva les yeux vers lui, surpris par l'intensité brûlante dans son regard.

Sherlock…

Je le hais déjà, John. Sa main serra légèrement sa hanche, comme s'il refusait de le laisser s'éloigner. Comment un homme peut-il être assez stupide pour te perdre deux fois ?

John sentit sa gorge se serrer encore plus.

Sherlock avait mis des mots sur sa peur la plus profonde.

Il allait être perdu.

Effacé.

Un fils rayé d'un trait de plume.

Sherlock le regardait comme s'il voulait arracher le monde entier pour le protéger.

Et John ne savait pas comment respirer sous tant d'intensité.

Alors il jeta ses bras autour de lui.

Il l'agrippa comme si sa vie en dépendait, enfouissant son visage dans son cou, cherchant la seule ancre qu'il lui restait.

Sherlock le serra immédiatement.

Fort.

Comme s'il le retenait de tomber.

Tu ne le perdras peut-être pas, murmura-t-il dans ses cheveux.

John eut un rire tremblant.

Ne sois pas naïf, Holmes. Mon père ne changera pas. Pas après tout ça.

Sherlock se redressa légèrement, attrapant le visage de John entre ses mains, forçant son regard à s'accrocher au sien.

Je ne parle pas de lui.

John cligna des yeux.

Puis Sherlock effleura ses lèvres avec une douceur insoutenable.

Je parle de moi.

John sentit tout son corps se tendre.

Tu ne me perdras pas, John. Jamais.

John ouvrit la bouche.

Puis il ne dit rien.

Parce que Sherlock était déjà sur lui.

Sa bouche saisissant la sienne, son corps le pressant contre le matelas, ses mains le couvrant de caresses brûlantes et rassurantes à la fois.

Sherlock Holmes l'aimait déjà trop pour le laisser partir.

Et John Watson était foutu.

Irrémédiablement.

Définitivement.

Et cette fois…

Il choisit de ne plus lutter.

OoOoO

Le critique était épuisé.

Pas seulement physiquement.

Pas seulement à cause de la nuit hallucinante qu'il venait de passer dans le lit de Sherlock Holmes, une nuit faite de fièvre, de baisers qui brûlaient l'âme et de corps enchevêtrés sans fin.

Non.

John Watson était épuisé dans sa tête.

Parce que, quelque part entre les draps froissés et les soupirs rauques murmurés dans l'obscurité, la réalité avait fini par le rattraper.

Son père.

Sa foutue famille.

Le regard glacial de son père lorsqu'il avait annoncé qu'il ne serait pas médecin.

Le silence qui avait suivi.

L'ombre de sa sœur, effacée des photos de famille, comme si elle n'avait jamais existé.

Et maintenant, lui.

Lui, qui venait de tout foutre en l'air, une seconde fois.

John était allongé sur le ventre, la tête enfoncée dans un oreiller, ses pensées un foutu chaos, incapable de bouger, incapable de rationaliser ce bordel.

Jusqu'à ce que l'odeur le frappe.

Quelque chose de beurré.

De sucré.

De chaud.

Le blond ouvrit un œil.

Puis l'autre.

Puis il tourna péniblement la tête vers la porte de la chambre.

Sherlock était debout dans l'encadrement, torse nu, un tablier négligemment noué autour de la taille.

Dans une main, un plateau de petit-déjeuner parfaitement garni.

Dans l'autre, une tasse de café fumant.

Il avait ce sourire satisfait, ce sourire de prédateur repu, mais quelque chose d'autre brillait dans ses yeux.

Quelque chose de beaucoup trop intense.

Watson. Lève-toi. J'ai fait des miracles pour toi.

John gronda, enfouissant sa tête sous l'oreiller.

Si ça ne contient pas une solution miracle pour ma vie entière, je ne veux pas me lever.

Le brun rit doucement.

Puis il s'approcha.

Déposa le plateau sur la table de nuit.

Et s'assit sur le bord du lit.

Ça contient du beurre. Beaucoup de beurre.

L'ainé sortit une main de sous l'oreiller, sans ouvrir les yeux, et chercha l'assiette à tâtons.

Le cadet attrapa son poignet.

Et le força à lever la tête.

John.

Le ton était différent.

Moins joueur.

Moins léger.

John ouvrit enfin les yeux, croisant immédiatement ce regard pénétrant.

Sherlock le déduisait.

Comme toujours.

Comme une évidence.

Tu étais perdu dans ta tête, murmura-t-il. Tu as dormi, mais pas bien. Tu étais tendu, tu as probablement rêvé de ton père, et tu te réveilles avec une lourdeur qui ne vient pas uniquement de l'épuisement physique.

John ne répondit pas.

Sherlock sourit doucement, mais c'était un sourire trop intelligent, trop conscient.

Tu as peur. Peur de ce que ça signifie pour toi. Peur de ce que ça signifie pour lui.

Il caressa distraitement la paume de John du bout du pouce.

Tu ne veux pas être rayé de sa vie.

John serra les dents.

Puis il se redressa enfin, attrapant une viennoiserie du plateau, et la mordit sauvagement.

Tu fais des feuilletés maison ? marmonna-t-il, la bouche pleine.

Sherlock rit.

Évidemment. Je ne suis pas un barbare.

Le blond mâcha lentement, savourant le beurre fondant, la perfection absolue de la texture.

Puis il soupira.

Je suis un putain de lâche.

Sherlock haussa un sourcil.

Parce que tu as peur ?

Parce que je n'ai même pas la force d'affronter tout ça maintenant.

Sherlock le fixa un long moment.

Puis il prit un morceau de pain et étala un peu de confiture dessus, tranquillement, posément, comme si rien n'était plus important que ce simple geste.

Et alors qu'il porta la bouchée à sa bouche, il déclara avec un calme absolu :

Je vais parler à ton père.

Le critique culinaire s'étrangla avec son café.

TU VAS QUOI ?

Sherlock haussa les épaules comme si c'était la chose la plus évidente du monde.

Je vais lui parler. Personnellement. En tête-à-tête.

John le fixa, horrifié.

Holmes, t'es complètement fou. Il va te pulvériser.

Vraiment ? Le chef étoilé croqua nonchalamment dans son pain. Parce que moi, je pense qu'il va comprendre. Très bien même.

John s'arracha les cheveux.

Comprendre QUOI ?

Sherlock posa enfin sa tasse de café.

Puis il se pencha sur lui, lentement, dangereusement, son regard devenant une promesse silencieuse.

Qu'il a perdu.

John s'arrêta net.

Sherlock souriait toujours.

Mais cette fois… c'était un sourire de guerrier.

Un sourire de prédateur prêt à détruire tout obstacle sur son chemin.

Je vais lui montrer que je suis là pour toi. Que tu es aimé, désiré, et que je ne compte aller nulle part. S'il veut t'effacer de sa vie, alors il devra m'effacer aussi. Parce que je ne te laisserai pas porter ce poids seul, John.

John sentit sa gorge se serrer.

Il n'avait jamais…

Personne n'avait jamais…

Il baissa les yeux, ébranlé.

Et le brun, d'une douceur infinie, prit son visage entre ses mains et embrassa son front.

Tu n'es plus seul, John.

Ce dernier ferma les yeux.

Puis, contre son front, dans un murmure tremblant :

Tu es une catastrophe, Sherlock Holmes.

Le cadet sourit contre sa peau.

Et pourtant, tu m'aimes déjà bien trop.

John ne répondit pas.

Parce qu'il savait que c'était vrai.

OoOoO

Sherlock Holmes partait.

Pendant trois jours.

Pour affronter le monstre Watson Senior.

Et John n'était pas prêt.

Pas du tout.

Il était encore torse nu dans le lit, un croissant dans une main et une tasse de café dans l'autre, complètement abasourdi par la tournure des événements.

Tu es sûr de vouloir faire ça ? demanda-t-il, les sourcils froncés alors que le chef, déjà habillé, bouclait sa valise avec une sérénité irritante.

Ce dernier leva les yeux au ciel.

Watson, combien de fois devrais-je te répéter que je ne fais pas les choses à moitié ?

Ouais, mais partir trois jours, seul, dans la campagne profonde, chez un homme qui considère l'homosexualité comme une anomalie génétique ? C'est un peu radical.

Sherlock ferma sa valise avec un claquement sec.

Puis il s'approcha du lit et attrapa la tasse de café dans la main de John, prenant une gorgée avant de répondre :

C'est efficace.

John le fusilla du regard.

Je peux venir avec toi.

Absolument pas.

Holmes…

Sherlock se pencha et l'embrassa, court, net, ferme.

Je gère. Toi, reste ici.

John grognait encore quand, quelques heures plus tard, il regarda Sherlock disparaître dans le taxi qui l'amenait à la gare.

OoOoO

13h47 – Dans le train

John tapotait nerveusement sur son téléphone.

John Watson :
"Tu es parti depuis 37 minutes et j'ai déjà l'impression qu'un vide intersidéral s'est installé dans mon appartement."

Sherlock Holmes :
"C'est normal. Je suis exceptionnel."

Le plus vieux roula des yeux et soupira.

John Watson :
"T'as bien dormi cette nuit ou c'est ton ego qui te tient éveillé ?"

Sherlock Holmes :
"Je n'ai pas bien dormi, mais je vais mettre ça sur le compte d'un amant insatiable qui m'a fait perdre 2300 calories en une nuit."

John éclata de rire, mais se reprit rapidement.

John Watson :
"D'abord, ce chiffre est faux. Ensuite, tu as bien aimé te faire détruire, donc ne te plains pas."

Sherlock Holmes :
"Watson, ai-je déjà dit que je me plaignais ? Non. Je fais juste un rapport scientifique."

John grimaça en lisant la réponse.

Il savait que Sherlock allait le rendre fou en son absence.

Mais il avait besoin de lui parler.

Alors il soupira et tapa un message plus sérieux.

John Watson :
"Holmes… Je suis inquiet."

Sherlock ne répondit pas immédiatement.

Puis, après une minute :

Sherlock Holmes :
"Je sais."

Le critique serra la mâchoire.

John Watson :
"Et toi ?"

Sherlock Holmes :
"Je suis confiant. Mais pas détendu."

John déglutit.

Puis il tapa :

John Watson :
"Si mon père est odieux avec toi, ne te retiens pas, ok ? Il a une mentalité de militaire, il respecte ceux qui ne plient pas."

Sherlock Holmes :
"Watson. Si j'avais prévu de plier, je ne serais pas dans ce train."

Le blond ferma les yeux.

Trois jours.

Trois jours à ne pas savoir ce qu'il se passe.

Trois jours loin de Sherlock après seulement une nuit où il l'avait enfin accepté.

Il était foutu.

Alors il fit ce que tout être humain désespéré ferait.

Il changea de sujet.

OoOoO

14h12 – Messages plus légers (ou pas)

John Watson :
"Dis-moi, Holmes… tu portes quoi dans ce train ?"

Sherlock Holmes :
"Watson, j'espère que tu n'es pas en train d'essayer de me distraire."

John Watson :
"Réponds."

Sherlock Holmes :
"Un costume. Trois pièces. Bleu foncé. Chemise blanche. Cravate bordeaux."

John soupira en imaginant la scène.

John Watson :
"Tu le fais exprès."

Sherlock Holmes :
"Quoi donc ?"

John Watson :
"D'être aussi foutrement sexy."

Sherlock Holmes :
"Ah. Oui. Je le fais exprès."

Le blond sentit son ventre se nouer.

Il mordit sa lèvre avant d'envoyer :

John Watson :
"Tu sais que si tu rentres vivant, je vais devoir te faire payer cette absence."

Sherlock Holmes :
"J'espère bien."

John se mit à rire, puis posa son téléphone contre son torse, réalisant qu'il ne s'était jamais senti aussi vivant.

Puis il reprit son portable et envoya :

John Watson :
"J'ai envie de toi."

Il savait que le chef allait répondre immédiatement.

Et il eut raison.

Sherlock Holmes :
"Décris-moi exactement ce que tu as envie de faire."

L'ainé gloussa, mais avant même de taper une réponse, Sherlock envoya un autre message.

Sherlock Holmes :
"Non, en fait, ne dis rien. Garde-le bien en tête. Trois jours. Tu vas avoir le temps d'y réfléchir, Watson."

John grimaça.

Puis il sourit.

Puis il se demanda comment diable il allait survivre trois jours sans ce foutu génie.

14h25 – Dans le train

Le grand chef était assis dans un wagon calme, son téléphone dans une main, un verre de vin dans l'autre ( il avait choisi une première classe) , observant l'écran avec un sourire lent et satisfait.

John Watson venait de tomber dans son piège.

Il savait que John ne pourrait pas résister.

Alors il patienta.

Il attendit la réponse qu'il savait déjà venir.

Et puis…

14h27 – Un message arrive.

John Watson :
"Très bien, Holmes. Tu veux que je sois explicite ? Tu l'auras cherché."

Sherlock croisa les jambes, ajusta légèrement sa veste et prit une gorgée de vin, savourant l'anticipation.

Un deuxième message arriva.

John Watson :
"D'abord, je vais t'attendre dans ce foutu lit à baldaquin, nu, et prêt."

Le brun sentit un frisson lui parcourir l'échine.

Son amant n'allait pas se retenir.

Un troisième message arriva.

John Watson :
"Tu vas rentrer fatigué, énervé, frustré de ton voyage. Tu vas vouloir une douche, peut-être même un verre de vin. Mais tu n'auras ni l'un ni l'autre."

Sherlock serra la mâchoire.

Oh, Watson jouait dangereusement bien.

John Watson :
"Parce que dès que tu passeras cette porte, je vais te plaquer contre elle. Je vais te faire comprendre à quel point j'ai eu envie de toi ces trois derniers jours."

Sherlock sentit sa respiration devenir plus profonde.

Un quatrième message suivit immédiatement.

John Watson :
"Tu ne pourras même pas parler, Sherlock. Parce que je vais prendre ta bouche avant que tu ne puisses dire quoi que ce soit. Et cette fois, ce ne sera pas un baiser lent. Ce sera sauvage. Désespéré. Plein de rage et d'envie. Je veux que tu ressentes ce manque que tu m'as infligé."

Le cadet serra un peu plus fort son téléphone, son verre de vin oublié sur la table.

John était un démon.

Un diable parfaitement calculateur.

Un pervers sans limites.

Sherlock adore ça.

Un cinquième message arriva.

John Watson :
"Et puis, il y aura mes mains. Sur toi. N'importe où, partout. Je vais les glisser sous ta chemise encore impeccable, je vais l'arracher si je dois, mais je ne vais pas te laisser respirer. Pas encore. Je veux que tu sois à ma merci, Sherlock. Je veux que tu sois incapable de penser, incapable d'analyser, incapable de contrôler quoi que ce soit."

Le chef laissa un soupir rauque lui échapper. Le critique l'appelait par son prénom, ce qui voulait tout dire.

Un sixième message.

John Watson :
"Et puis, je vais descendre. Lentement. Trop lentement pour toi. Tu es un homme impatient, Holmes. Tu veux toujours que tout aille vite. Mais pas cette fois. Cette fois, je vais te torturer."

Sherlock ferma les yeux un instant.

Dans ce foutu train, entouré de parfaits inconnus, il était en train de durcir sous la simple force des mots de John Watson.

Puis…

Un dernier message.

Un message brutal.

Dévastateur.

John Watson :
"Et quand tu seras enfin au bord de la rupture, quand tu supplieras presque, je vais m'arrêter. Je vais me redresser, te regarder droit dans les yeux et te dire : 'Trois jours, Amour. Trois jours à me laisser seul avec mon désir. Maintenant, c'est ton tour de souffrir.'"

Sherlock ouvrit brutalement les yeux.

Son cœur battait beaucoup trop vite.

Il déglutit difficilement, tentant de reprendre le contrôle sur son corps qui réagissait beaucoup trop bien aux provocations de John.

Puis il tapa une réponse immédiate.

Sherlock Holmes :
"Je vais rentrer plus tôt."

John Watson :
"Non. Tu vas aller parler à mon père. Et quand tu reviendras, tu vas comprendre ce que c'est que d'être torturé pendant trois jours."

Le brun laissa sa tête tomber légèrement en arrière contre son siège.

Putain. murmura-t-il entre ses dents.

Un message arriva encore.

John Watson :
"Bonne chance avec mon père, Sherlock Holmes. Moi, je vais commencer à préparer mon piège."

Sherlock sourit lentement.

Trois jours.

Trois jours d'enfer.

Et ensuite…

L'Apocalypse.

OoOoO

John essayait d'oublier.

Il essayait de reprendre le contrôle, de se distraire, de ne pas fixer son téléphone toutes les deux minutes en espérant un message de Sherlock.

Alors il fit ce qu'il faisait de mieux : il alla travailler.

Un carnet en main, un stylo coincé entre ses doigts, il parcourut les rues de Londres à la recherche d'un nouveau restaurant à critiquer.

Il poussa une première porte.

Un petit bistrot français qui sentait bon le beurre fondu et la farine grillée.

Il commanda un plat, prit une bouchée…

Et rien.

Sans intérêt.

Sans l'ombre d'un éclat de génie.

Sans l'essence même qui faisait d'un plat un souvenir indélébile.

Il laissa son assiette à moitié terminée et sortit.

Il poussa une deuxième porte.

Un italien réputé, tenu par un chef qui avait été étoilé l'année précédente.

Il s'installa, observa la carte, choisit un risotto aux truffes.

Une bouchée.

Deux.

Et…

Le vide.

John referma lentement sa serviette et la posa sur la table.

Parce qu'il venait de comprendre.

Le problème, ce n'était pas les restaurants.

C'était lui.

Depuis qu'il avait goûté à Sherlock Holmes, tout le reste lui semblait fade.

Le Déducteur avait ruiné son palais.

Pire encore…

Sherlock l'avait ruiné, lui.

Il était incapable de manger sans comparer.

Sans chercher ce foutu frisson qui l'avait saisi dès sa première bouchée dans ce restaurant trois semaines plus tôt.

Sans vouloir ce goût de génie qui, il le savait maintenant, était aussi intimement lié à Sherlock qu'à sa cuisine.

John Watson était foutu.

Définitivement condamné à n'avoir envie que d'un seul chef.

Et ce chef était dans un train, direction la campagne, pour affronter son père.

John fixa son téléphone.

Toucha l'écran.

Pas de nouveau message.

Il soupira et enfouit sa tête entre ses mains.

Trois jours.

Trois jours d'enfer absolu.

OoOoO

Sherlock, lui, n'avait pas le luxe de se laisser torturer par l'attente.

Il avait une mission.

Une véritable bataille à mener.

Alors, dans ce foutu train, puis dans ce foutu taxi qui l'emmenait dans les recoins de la campagne anglaise, il structura son attaque.

Son esprit fonctionnait comme une enquête.

Problème principal : Le père de John, médecin, rigide, traditionaliste.

Obstacle secondaire : Il avait déjà renié un enfant.

Données complémentaires : Son respect pour la science et la logique pure.

Solution : Parler son langage.

Le chef ouvrit sa mallette, en sortit un dossier bien ficelé, contenant des articles médicaux, des documents scientifiques, et surtout…

Un dossier complet sur la théorie des âmes sœurs.

Pas une fantaisie mystique.

Un ensemble d'études sur la neurologie, les phéromones, les corrélations entre l'activation des synapses lorsqu'un individu trouve la personne qui équilibre son schéma biologique.

Tout était expliqué de manière scientifique.

Il n'y avait rien à réfuter.

Et en feuilletant ses notes, Sherlock sourit.

Parce qu'il avait déjà gagné.

L'amour n'était peut-être pas une science exacte.

Mais il avait trouvé l'angle parfait pour que le père de John ne puisse pas le nier.

Il referma son dossier, satisfait.

Puis il attrapa son téléphone.

Message envoyé à John Watson :
"J'espère que tu es prêt. J'ai préparé un exposé médical pour ton cher père. L'âme sœur n'est pas une croyance, Watson. C'est une donnée biologique. Et ton père est sur le point de comprendre qu'il a perdu la partie avant même qu'elle ne commence."

Sherlock posa son téléphone, croisant les jambes avec une satisfaction prédatrice.

Trois jours, oui.

Mais trois jours où il allait faire comprendre aux Watson que John Watson lui appartenait.

Et que rien ni personne ne pourrait les séparer.

OoOoO

Sherlock Holmes venait d'envoyer son message et reposait son téléphone avec une satisfaction absolue.

Il n'attendait pas une réponse immédiate.

Il savait que John avait du mal à gérer ses émotions, qu'il luttait encore contre certaines vérités, qu'il ne se livrerait pas facilement.

Mais quand l'écran vibra à peine une minute plus tard, Sherlock fronça légèrement les sourcils.

Puis il lut.

Et ce qu'il découvrit fut une véritable déclaration.

John Watson :
"Tu veux savoir ce que j'ai fait aujourd'hui, Holmes ?"

Sherlock haussa un sourcil.

Il s'attendait à une pique, une blague, un sarcasme pour alléger la tension.

Mais quelque chose, dans la manière dont John avait formulé la question, lui fit comprendre que ce n'était pas juste un message ordinaire.

Son téléphone vibra de nouveau.

John Watson :
"J'ai fait ce que je fais toujours quand j'ai besoin de penser. J'ai marché. J'ai exploré. J'ai cherché un restaurant, un lieu, un chef, une cuisine qui pourrait me faire oublier que tu étais parti."

Sherlock se redressa légèrement, ses doigts se serrant autour du téléphone.

John était en train d'écrire quelque chose de sincère.

Quelque chose de vrai.

John Watson :
"J'ai goûté des plats dans trois restaurants différents. J'ai laissé des critiques en notes. J'ai analysé chaque bouchée, chaque saveur, chaque tentative de génie culinaire."

Le chef sourit légèrement. C'était du pur Watson.

Un homme de méthode, même dans ses émotions.

Mais ce qui arriva après lui fit arrêter de respirer.

John Watson :
"Et pourtant, rien. Absolument rien. Pas une étincelle, pas un frisson, pas une seule saveur qui ait réussi à s'imprimer en moi. Parce que maintenant, il n'y a plus que Le Déducteur."

John Watson :
"Il n'y a plus que toi."

Sherlock se figea.

Un battement de silence.

Puis un autre message arriva.

Et cette fois, le brun sentit son cœur s'emballer.

John Watson :
"Tu es devenu mon seul goût. Tu es devenu la seule saveur qui compte."

John Watson :
"Il n'y a plus rien que je veuille manger, rien que je veuille découvrir, rien qui puisse m'exciter ou m'impressionner ailleurs qu'avec toi. Parce que tu n'es pas juste un chef."

John Watson :
"Tu es mon âme sœur culinaire. Mon obsession. Ma faim insatiable."

John Watson :
"Et maintenant, je ne peux plus rien avaler qui ne soit pas signé Sherlock Holmes."

Ce dernier expira lentement, un frisson courant le long de son échine.

Il s'attendait à une confession.

Il n'était pas prêt pour celle-ci.

John venait de dire qu'il était à lui.

Qu'il ne pouvait plus se nourrir de rien d'autre.

Et pour Sherlock Holmes, c'était une possession absolue.

Il prit une inspiration tremblante, ses doigts serrant le téléphone comme s'il tenait John lui-même.

Puis il répondit.

Sherlock Holmes :
"John."

Sherlock Holmes :
"Si tu crois que je vais rentrer et ne pas te dévorer vivant après un message pareil, tu es un imbécile."

Quelques secondes passèrent.

Puis un dernier message.

Celui qui acheva Sherlock.

John Watson :
"J'espère bien, Sherlock. Parce que j'ai très, très faim de toi."

Le chef au cheveux foncés ferma les yeux, un sourire lent, sauvage, incontrôlable s'étirant sur ses lèvres.

Ils s'étaient appelés par leurs prénoms, cela signifiait tellement pour eux.

Trois jours où John allait mijoter dans son propre désir, trois jours où Sherlock allait négocier son droit absolu sur lui auprès du père Watson.

Et puis…

Il rentrerait.

Et alors…

John Watson ne pourrait plus jamais s'échapper.


TBC

je sais que le chapitre est un peu plus court mais je voulais terminer avant la rencontre fatidique afin de mieux servir l'histoire.

j'attends vos reviews avec impatience donc n'hésitez pas à venir discuter dans l'espace commentaires.

des bisous

Ariane