NDA : Merci pour les gentils commentaires et les follows qui montent un peu plus à chaque chapitre ! J'espère que cette suite vous plaira. Pour information, l'écriture de la trame de la partie 2 est bouclée. Il devrait y avoir dix chapitres environ et ce sera un "entre-deux" avant la partie 3 qui sera plus longue et plus intense. Concernant la partie 1, plus qu'une poignée de chapitres à écrire que je bouclerai certainement fin septembre (on sera sur 25 chapitres environ). Continuez de commenter, ça me motive à avancer !
Chapitre 11
Trois jours durant, Harry s'évertua à travailler d'arrache pied afin de rendre un devoir plus que convenable à Rogue. Il ne savait pas d'où venait ce besoin de satisfaire le professeur à tout prix. Ron lui aurait certainement dit de laisser couler et attendre que la rentrée arrive mais Harry ressentait ce besoin dévorant de se faire pardonner pour l'explosion du chaudron.
Il savait pertinemment qu'il avait été trop loin et même s'il avait beau détester Rogue, Harry était submergé par la culpabilité. Vernon devait avoir raison après tout, Harry n'était qu'un monstre. Il avait été incapable de se contrôler, encore une fois, et tout avait explosé. Et puis, Rogue s'était interposé pour le protéger. C'était un geste courageux que Harry n'aurait jamais cru un jour pouvoir accorder au professeur. Rogue avait toujours été aux yeux de Harry un homme antipathique, aigri et vicieux mais il avait aidé Harry. Aucun adulte n'avait fait cela pour lui. Aucun adulte à part James et Lily Potter qui l'avaient payé de leur propre vie.
Dans un soupir, Harry relut pour la troisième fois la page sur les propriétés des algues dans la préparation des potions de soin. Installé au fond de la classe, le Gryffondor travaillait depuis le début de l'après-midi. Il pleuvait depuis le matin, apportant une fraîcheur bienvenue sur Poudlard. Harry n'avait pas eu le cœur à jouer au Quidditch. Sans Ron, c'était moins amusant. Dumbledore et McGonagall étant occupés quelque part dans le château et Hagrid auprès des animaux dans la forêt interdite, les pas de Harry l'avaient machinalement dirigé vers les cachots. Avant même qu'il s'aperçoive où il était, le professeur Rogue lui intimait de s'asseoir et de travailler silencieusement s'il voulait rester dans ses pattes.
Poussant un soupir, Harry repoussa son livre et reformula sa phrase sur son parchemin qui ressemblait désormais à un torchon. C'est précisément à ce moment-là que la chaise de Rogue racla le sol, annonçant qu'il se déplaçait vers Harry pour voir l'avancée de son travail. Harry conserva ses yeux sur sa copie, se persuadant que s'il ne regardait pas Rogue alors ce dernier l'oublierait. Cela aurait pu marcher s'il s'était trouvé dans une classe remplie d'élèves et surtout si le professeur avait été quelqu'un d'autre que Rogue.
- J'espère qu'il s'agit là d'un brouillon, lança le professeur de sa voix dangereusement lente.
Harry ne répondit rien, préférant attendre que la tempête passe. Il pouvait tout à fait encaisser les remarques désobligeantes sur son piètre niveau. Ce n'était un secret pour personne et Harry ne devait pas se laisser aller à la colère. Cela lui faisait peur. Il finissait par faire des choses mauvaises lorsqu'il était furieux. Il devenait méchant malgré lui. Réprimant un frisson, Harry se concentra sur sa respiration.
- On va passer à la pratique, dit le professeur avant de réaliser un mouvement sec du poignet.
Un chaudron lévita jusqu'au bureau de Harry qui écarquilla les yeux de terreur. Sa dernière expérience avec une potion avait été plutôt chaotique. Et si le sentiment bizarre dans son ventre lui reprenait ? Et s'il faisait n'importe quoi et blessait le professeur ?
Harry envoya un regard paniqué à Rogue et secoua la tête.
- Avez-vous perdu vos capacités de langage ? grinça le professeur.
- Je… Je ne crois pas que ce soit une bonne idée monsieur, dit Harry dans un souffle tandis que son cœur tambourinait dans ses tempes.
- De quel droit vous autorisez-vous à me dire ce que je dois faire ou non ?
Une vague de terreur s'empara de Harry. Le professeur n'allait pas le comprendre, ils allaient se mettre en colère et Harry referait un drame. Reculant de quelques pas, Harry chercha la porte de sortie du regard. Rogue, furieux, lui lança un regard noir.
- Vos engagements pour vous rattraper s'arrête donc ici je suppose. La porte est grande ouverte.
Harry cru voir l'ombre de la victoire briller dans le regard du professeur. S'humectant les lèvres, Harry faisait face à un dilemme et resta déboussolé quelques instants. Il voulait vraiment se rattraper et payer sa dette envers Rogue. Le professeur l'avait sauvé alors qu'il n'était pas obligé. Il devait faire ce qu'on lui disait mais Harry n'avait pas confiance en sa magie instable. Plongé dans ses réflexions, Harry ne savait plus où donner de la tête et il vit avec horreur le chaudron se mettre à trembler. Ou peut-être était-ce dans sa tête ?
Il recula à nouveau d'un pas en arrière, gémissant de terreur malgré lui. La panique le prit carrément à la gorge. Une bulle d'angoisse l'entoura, sa vision se mit à rétrécir. Les battements erratiques de son cœur résonnaient dans ses oreilles au point de ne plus rien entendre autour de lui. Harry ne pouvait plus penser normalement. Tout ce qu'il savait, c'était qu'il allait à nouveau faire des dégâts.
Car il était incapable de se contrôler, car il avait déjà tué un professeur, car il était un monstre. Les Dursley avaient eu raison de l'abandonner.
Sans crier gare, un sanglot s'échappa de sa gorge et un torrent de larmes dévala brutalement ses joues. Affolé par sa propre réaction, Harry n'eut même plus la présence d'esprit d'avoir honte. Il voulait juste sortir de cet état de stress intense. Les oreilles bourdonnantes et les sanglots lui déchirant la gorge, Harry recula de plusieurs pas, se cachant le visage dans ses mains. Il voulait hurler, frapper et s'échapper de son propre corps si cela était possible. Un malaise qu'il n'avait encore jamais ressenti jusqu'ici lui dévorait les entrailles et Harry crut mourir.
Il sentit alors une main lui attraper l'épaule sans douceur et l'asseoir sur une chaise. Pendant un instant, il crut être à Privet Drive, prêt à recevoir une torgnole de Vernon. Cela aggrava sa panique et il chercha vainement à calmer ses larmes qui redoublaient tout en repoussant son assaillant avec ses mains. Soudain, une main glacée se saisit fermement de son menton pour le forcer à relever le visage. Le corps secoué de tremblements, Harry ancra son regard dans les billes noires qui cherchaient à le ramener à la réalité. Peu à peu, il distingua des bruits autres que sa respiration erratique, ses sanglots et les battements de son cœur.
Une voix, à peine un murmure, s'adressait à lui de façon sèche mais il y avait quelque chose d'étrangement rassurant. Harry s'y accrocha comme à une bouée de sauvetage et son cœur prit enfin un rythme normal.
La bulle d'anxiété s'évapora autour de lui et il se rappela alors qu'il était dans la salle de potions et que le professeur Rogue - qui tenait toujours fermement le menton d'Harry - lui parlait. Harry était si épuisé qu'il ressentit à peine une gêne. Rogue lui intimait de se concentrer sur sa respiration et Harry fît du mieux qu'il put pour s'exécuter. Mais Merlin que c'était compliqué avec ces sanglots qui secouaient son corps de façon incontrôlable.
Harry ne sût pas combien de temps cela dura mais au bout d'un moment, les larmes se calmèrent et Harry s'ancra enfin dans la réalité même si une tension demeurait à l'intérieur de son cœur. Rogue se leva alors pour se diriger vers son étagère. Harry ressentit un vide immense et une peur irrationnelle se loger à nouveau dans son estomac. Cependant, le professeur revint rapidement, lui collant une fiole dans les mains.
- Buvez, dit-il simplement.
En temps normal, Harry aurait refusé de peur de se faire empoisonner sauf qu'il n'y avait plus rien de normal depuis quelque temps. Il porta alors la potion à ses lèvres. C'était doux et sucré, on aurait dit un sirop de fraise. Aussitôt, Harry se sentit comme sur un nuage et le poids dans son ventre s'échappa, ses épaules se détendirent et ses sanglots s'arrêtèrent pour de bon.
- C'est un philtre de paix ? demanda alors Harry la voix rauque.
- Je ne vous pensais pas capable de reconnaître cela, dit Rogue sarcastique.
- Vous en avez parlé pendant la classe d'été, on apprend ça en cinquième année, récita Harry avant de renifler.
Rogue, qui avait pris place sur une chaise en face de lui, se redressa et observa Harry minutieusement.
- Donc il vous arrive d'écouter pendant mes cours.
- Pourquoi on n'apprend pas ce genre de potions plus tôt ? demanda-t-il. C'est quand même plus intéressant et utile...
- Bien que cette conversation puisse être passionnante, il me semble que nous devons discuter de certaines choses Potter, coupa Rogue dont l'agacement se reflétait dans sa voix.
Harry observa son professeur qui le dévisageait. Que pouvaient-ils se dire ?
- Je suis…
- Si vous dîtes "désolé" je vous envoie chez Pomfresh, menaça Rogue.
Harry ne voulait surtout pas aller à l'infirmerie. L'infirmière avait tendance à être oppressante. Harry pinça ses lèvres pour se taire.
- Très bien, dit Rogue d'un ton sec mais satisfait. Maintenant, j'aimerais vous dire deux trois choses. Pour commencer, les moldus qui vous servaient de famille ne vous ont dit que des bêtises. Vous n'êtes pas un monstre. Bien sûr, vous êtes arrogant, avez tendance à vous croire au-dessus des règles et êtes un peu trop impulsif mais vous n'êtes ni un monstre, ni une abomination, ni une erreur de la nature.
Harry écarquilla les yeux, abasourdi. Ce n'était pas la première fois qu'il avait l'impression que Rogue pouvait lire dans son esprit.
- Ensuite, continua-t-il d'une voix lente et égale, en ma présence, vous ne risquez rien lorsque vous faites une potion à partir du moment où je vous le demande. Il n'y a aucun risque d'une nouvelle explosion comme la dernière fois. C'était un accident qui s'est produit suite à de nombreuses erreurs, la première étant celle de ne pas vous avoir demandé de sortir lorsque j'avais repéré votre présence.
Cela demanda un effort surhumain à Harry pour ne pas se décrocher la mâchoire tant il n'en croyait pas ses oreilles. Rogue avait visiblement lu dans sa tête -il ne pouvait en être autrement- mais surtout le professeur reconnaissait sa part de responsabilité dans l'accident. On pouvait lui dire qu'il neigeait bien qu'on soit en août que cela aurait été la même chose : déroutant et invraisemblable.
Les mots de Rogue ne rassurèrent pas pour autant Harry. Il n'avait pas réussi à se contrôler et faisait encore de la magie accidentelle à son âge. Et puis, il avait ressenti cette attirance vers la potion des Jugson. Il était presque sûr que c'était de la magie noire.
- Vous avez beaucoup de puissance en vous, lâcha Rogue et cela sembla lui écorcher la bouche de l'admettre, c'est pour cela que vous avez ressenti la magie dans cette potion. C'est tout.
Harry fronça les sourcils, à deux doigts de demander si le professeur pouvait lire dans son esprit mais Rogue se redressa et posa ses mains sur ses hanches.
- On laisse tomber la potion pour le moment, déclara Rogue au grand soulagement de Harry. Vous avez assez travaillé pour aujourd'hui, vous pouvez aller vous détendre.
- Comment ça se fait que j'ai ressenti la magie ? demanda Harry de but en blanc. Poudlard est plein de magie et pourtant je ne ressens pas les choses de la même façon que pour la potion.
Si le philtre de paix n'était pas en train d'agir, le Gryffondor n'aurait jamais osé poser cette question et encore moins de cette manière. Il ne ressentait aucun danger et n'avait aucun souci à questionner le professeur de potion comme lorsqu'il s'adressait à Hagrid. Harry aurait pu paniquer mais encore une fois, les effets du philtre agissaient parfaitement. Rogue l'observa quelques instants, l'air implacable. Harry crut pendant un moment que le professeur allait l'ignorer voire lui hurler dessus.
- C'est simplement car c'était une magie exceptionnelle que vous n'avez pas l'habitude de ressentir, dit Rogue d'une voix blanche.
- Quand vous dites magie exceptionnelle… vous parlez de magie noire ?
Un éclair d'étonnement frappa le regard de Rogue. Cela fut si rapide que Harry crut l'avoir imaginé. Le silence de l'homme mena cependant Harry aux pires conclusions.
- J'ai ressenti de la magie noire… C'est parce qu'il y a un truc qui cloche en moi n'est-ce pas ?
- Absolument pas, claqua la voix agacée du professeur de Potions. Etes-vous avide de compliments au point de vouloir m'entendre dire à nouveau que c'était surtout le signe d'un grand potentiel magique ?
- Non monsieur, dit Harry en baissant les yeux.
Il était soudain très fatigué et retint de justesse un bâillement. Son ventre se mit également à gargouiller et s'il espérait que Rogue n'ait rien entendu c'était raté puisque l'homme affichait une moue sarcastique.
- Il serait temps d'aller nourrir votre appétit de moineau, déclara Rogue.
Le professeur se décala pour ouvrir la marche dans un mouvement ample. Son apparence de chauve-souris arracha un sourire discret à Harry. Sans aucun doute, les effets du philtre de paix. Harry ne s'attendait pas à ce que le professeur se rende dans la Grande Salle lui-aussi et il resta à bonne distance. Le chemin se déroula dans un silence religieux.
McGonagall affichait une mine surprise de voir Harry arriver en même temps que le professeur de potions, leurs rapports conflictuels étant connus de tous. Dumbledore en revanche avait un sourire accroché à ses lèvres et le regard pétillant comme si on lui avait annoncé noël à l'avance.
Lorsque Harry s'approcha, sa directrice de maison le dévisagea puis jeta un coup d'œil à Rogue avant de revenir vers Harry.
- Mr Potter tout va bien ? demanda-t-elle finalement alors que Harry se servait une portion de légumes.
- Oui madame, répondit Harry qui se rendit compte avec horreur que sa voix était encore rauque.
Avait-elle vu qu'il avait pleuré ? Se sentant rougir, Harry commença à manger silencieusement, espérant éviter un interrogatoire. C'était beaucoup trop embarrassant.
- Severus ? demanda-t-elle la voix menaçante. Est-ce que tout s'est bien déroulé cet après-midi ?
Harry leva les yeux vers Rogue, le suppliant intérieurement de ne strictement rien dire. Il ne savait pas trop pourquoi il espérait autant du maître des potions mais l'homme avait su le surprendre au cours des derniers jours.
- Rien d'anormal, répondit Rogue d'un air tout à fait convainquant. Potter a beaucoup travaillé cet après-midi, voilà pourquoi il a… les yeux si rouges. Il s'agirait d'ailleurs de vérifier que vos verres soient toujours à la hauteur de votre vue Mr. Potter. Vous risquez de vous abîmer les yeux.
Harry manqua de s'étouffer et s'il fut certain que McGonagall ne croyait pas entièrement aux paroles de Rogue, les adultes avaient trouvé un nouveau sujet de conversation : les lunettes. Harry profita donc de son dîner en paix et - de cela il ne s'en remettait pas - remerciant intérieurement Rogue de l'avoir sauvé pour la seconde fois en une semaine.
oOo
- Pourquoi avait-il les yeux rouges ? demanda pour la troisième fois Minerva, le regard furieux. Si vous l'avez fait pleurer…
- Alors quoi ? coupa Severus en posant sa fourchette, agacé. Vous allez le prendre sous votre aile entre deux conférences ? En attendant, c'est chez moi que votre petit lion préféré passe la majorité de ses vacances. Un comble ! cracha-t-il.
C'était petit, Severus le savait. Mais il en avait par-dessus la tête des accusations à peine voilées du professeur de métamorphose. Il savait très bien que Dumbledore demandait beaucoup à sa collègue et qu'elle n'avait effectivement que très peu de temps libre dans la journée. Cependant, il ne voulait pas parler de la crise d'angoisse qu'avait eu Potter plus tôt dans l'après-midi. Un philtre de paix, un bon repas et le gamin allait déjà mieux. Certes, il n'avait pas encore beaucoup mangé et était déjà reparti en compagnie de Hagrid mais le garçon allait bien. Et puis, Severus avait remarqué - sans avoir besoin de passer par la légilimencie cette-fois - que Potter ne voulait pas que sa directrice s'inquiète. Non pas qu'il veuille faire plaisir à Potter loin de là… Mais tout de même.
La légilimencie. L'art de lire dans les pensées. Severus n'hésitait jamais à l'utiliser pour parvenir à ses fins. Alors lorsque l'enfant s'était mis à paniquer sans aucune raison valable, le maître des potions n'avait pas attendu une seconde pour entrer dans cet esprit pour le moins torturé. La crise avait duré une bonne vingtaine de minutes et il avait fallu user de patience pour que Potter sorte la tête de l'océan d'angoisse dans lequel il se noyait. Severus avait d'abord cru qu'il allait voir le Seigneur des Ténèbres le soir dans la salle du miroir du Risèd où Potter s'était trouvé quelques semaines plus tôt. Quelle n'avait pas été sa surprise de voir que les angoisses de l'enfant étaient bien plus… terre à terre.
Et s'il ne le verbalisait pas ni même le conscientisait, Potter était touché par la fin de tutelle des Dursley et les mauvais traitements lui parvenaient en pleine face à la moindre contrariété. C'est ainsi que le gamin croyait être un horrible monstre pour le coup du chaudron. Surtout, à la grande surprise du maître des potions, Potter était moins stupide que Severus avait pu le penser. Il ne manquait pas de jugeote et avait fait le rapprochement avec la magie noire. Il avait eu l'intelligence sensorielle pour ressentir que cette magie n'était pas comme les autres. Bien évidemment, en digne héritier de Lily et James Potter, il en avait conclu que c'était de la mauvaise magie. Severus ne souhaitant pas lui expliquer les nuances de magie et sachant que le gamin était loin d'avoir la maturité nécessaire pour analyser les choses, avait préféré botter en touche.
- Je crois que Harry et Severus apprennent à se connaître intelligemment, déclara Dumbledore pour couper court au conflit.
- Potter a pleuré !
- Et si Harry ne vient pas vous en parler alors il serait sage de ne pas intervenir, répondit Dumbledore. Je crois que Severus gère parfaitement la situation, n'est-ce pas ?
Severus n'était pas vraiment certain de "gérer parfaitement la situation" mais hocha la tête pour avoir la paix.
.
Le lendemain, Severus cacha sa surprise de voir débarquer le Survivant par un masque d'indifférence. Potter affichait une mine déterminée et le maître des potions se tendit par réflexe. Le gamin s'approcha de son bureau et seul l'émeraude de son regard laissait briller une certaine inquiétude.
Haussant un sourcil pour l'inviter à parler, Severus attendit que le garçon vide son sac.
- Est-ce que vous pourriez m'apprendre à faire un bouclier comme vous l'avez fait la dernière fois ? lâcha Potter d'une voix rapide.
Heureusement que Severus était assis. S'il s'était attendu à ne pas voir le gamin suite aux évènements de la veille, Severus pensait que le Gryffondor venait simplement pour arrêter les leçons de potions sous couvert d'une excuse bidon.
Alors que le Gryffondor lui demande des leçons de défense contre les forces du mal… C'était stupéfiant. Encore quelques semaines plus tôt, il aurait soupçonné une quelconque manigance de la part du Gryffondor mais Severus avait appris à lire le langage corporel de l'enfant.
- Je ne suis pas professeur de Défense contre les forces du mal, répondit-il d'une voix sèche.
- Mais tout le monde sait que vous rêvez de ce poste, lâcha Potter qui se mordit les lèvres face au regard furibond que lui lança le maître des potions. Euh… Enfin je veux dire… C'était impressionnant ce que vous avez fait la dernière fois…
- Je n'ai pas besoin de vos flatteries Mr. Potter.
Qu'est-ce que le gamin croyait ? Qu'il allait lui enseigner ce qu'il savait ? A quel point était-il tombé si bas pour venir ramper dans les pattes de la chauve-souris des cachots ?
- S'il vous plaît monsieur, supplia Potter faisant briller ses yeux de chiots battus. Je veux pouvoir protéger les gens si jamais… ça se reproduit.
Le ça renvoyait évidemment à l'incapacité de Potter à se contrôler et donc faire exploser des chaudrons. Severus fut à deux doigts de répondre que le gamin devait surtout apprendre à maîtriser ses émotions, la meilleure façon de le faire étant d'apprendre l'occlumencie mais il était certain que le Gryffondor se révèlerait incompétent dans la matière. Beaucoup trop impulsif, beaucoup trop soumis à ses émotions et surtout beaucoup trop jeune.
Il observa l'enfant qui le regardait les yeux plein d'espoir. C'était une occasion de voir ce que le Survivant valait en pratique. Le niveau étant de piètre qualité à Poudlard, il y avait quelque chose de grisant d'apprendre des sorts défensifs au garçon-qui-a-survécu-et-qui-devrait-un-jour-affronter-le-seigneur-des-ténèbres. L'appel de l'orgueil associé à la curiosité titilla Severus. Et puis de toute manière, c'était juste pour une fois. Cela allait sûrement se transformer en catastrophe et il serait entièrement débarrassé de Potter.
- Très bien Mr. Potter mais au moindre comportement inapproprié, vous disparaissez de ma vue. Asseyez-vous.
Severus avait l'impression de l'avoir un peu trop répété ces derniers jours et pourtant, le Survivant se trouvait toujours dans ses pattes. Potter hocha la tête, n'arrivant visiblement pas à masquer son excitation dans un sourire proche de l'hystérie. Sous le regard menaçant du professeur, le garçon reprit son sérieux.
- Très bien, dit simplement Severus lorsqu'il vit que le gamin était prêt à écouter sérieusement. Tout d'abord, j'aimerais que vous me fassiez un résumé de ce que vous savez déjà concernant les sorts défensifs.
- Il y en a de plusieurs catégories, dit le Survivant d'une voix hésitante. Les plus utilisés sont les boucliers qu'on utilise majoritairement avec le sortilège protego. On peut aussi utiliser des boucliers avec notre environnement mais on apprend cela plus tard, ajouta-t-il d'une voix plus assurée.
- Que comprenez-vous lorsqu'on parle de bouclier avec notre environnement ?
Potter pinça les lèvres dans une moue concentrée. Severus ne s'y ferait jamais à cette mimique qui lui rappelait tant Lily…
- Je crois qu'on peut utiliser ces sortilèges si par exemple on est face à un sort qui projette des flammes par, hésita-t-il. Dans ce cas, on peut faire un bouclier d'eau.
- C'est l'idée oui, acquiesça Severus assez impressionné.
Il savait pertinemment qu'il n'avait pas vu cela en cours et que Potter avait déduit cela tout seul. Cependant, le professeur ne se laissa pas émouvoir pour si peu, restait à voir ce que Potter avait dans la baguette.
- A votre avis, quel genre de bouclier ai-je utilisé la dernière fois ?
- Justement, je n'arrive pas à savoir, dit Potter beaucoup plus détendu, le sujet le passionnait sans aucun doute. On aurait dit que c'était un protego mais c'était beaucoup plus puissant…
Si Potter n'avait pas été répartie à Gryffondor, Severus aurait presque vu le potentiel d'un bon Serpentard. Ses yeux s'illuminaient avec une détermination qu'on ne trouvait habituellement que chez ses serpents. Le gamin semblait même avoir oublié qu'il s'adressait à son professeur de potions.
- C'est exactement ce que j'ai fait Potter, expliqua-t-il d'une voix lente. Le sortilège protego a plusieurs variantes mais, comme tous les sortilèges, peut avoir des conséquences plus ou moins importantes selon la puissance mit dans le sortilège. Nous avons été projetés en arrière car j'y ai simplement mis beaucoup de force.
Severus passa sous silence que la magie de Potter et le lieu exigüe associés à sa propre magie avaient eu raison de leur vol plané. Allez savoir ce que le gamin aurait encore imaginé. A la fête foraine de l'angoisse, Potter avait tendance à essayer toutes les attractions. Il ne voulait pas se retrouver avec une nouvelle crise de larmes à gérer comme la veille.
- Et vous n'avez pas prononcé la formule, ajouta Potter les yeux brillants d'une admiration que Severus n'était pas certain de vouloir. Dumbledore fait régulièrement ça aussi. Un coup de baguette et pouf !
Le gamin associa le geste à la parole en mimant avec ses mains ce qui semblait être l'apparition de quelque chose.
- C'est du niveau sixième année, tempéra Severus de sa voix cassante habituelle. Vous allez d'abord vous contenter de réaliser un simple protego. Suivez-moi.
Méfiant, Potter mit quelques instants avant de suivre Severus qui était déjà sortie des cachots. A son grand soulagement, il ne posa aucune question et finit par le suivre. Severus détestait les discussions inutiles et les questions stupides, Potter semblait l'avoir compris.
Ils montèrent les marches et arrivèrent dans la salle de classe de Défense contre les forces du mal. Toutes les décorations avaient disparu et les quelques tables furent poussées au fond de la large salle d'un geste de baguette. Puis, sans crier gare, Severus se positionna à bonne distance de Potter qui semblait enfin comprendre dans quelle galère il s'était embarqué tout seul. Méfiant, le gamin sortit sa baguette. Il avait adopté naturellement la position de défense attendue lors des duels.
- Vous vous rappelez de la formule ? demanda Severus de sa voix lente.
- Oui mais…
Avant même qu'il ne puisse terminer sa phrase, Severus envoya un expelliarmus informulé. C'était un coup bas mais il n'y avait rien de mieux que de la pratique pour apprendre. Le gamin écarquilla les yeux sous la surprise et hurla la formule défensive. A la grande surprise du Survivant -et de Severus- , le sortilège ricocha mais le bouclier fit vaciller sa baguette qui trembla. Potter échappa sa baguette plus par surprise qu'autre chose.
Pour une première fois, ce n'était pas mal du tout. C'était même excellent. Sans compter que le gamin n'avait même pas encore débuté sa deuxième année d'étude.
- Vous auriez pu prévenir, bougonna le gamin vexé qui alla récupérer sa baguette.
- Premièrement, vous n'êtes pas obligé de hurler votre formule pour qu'elle soit efficace. Ensuite, dans la vraie vie, vous ne serez jamais prévenu avant d'être attaqué.
Severus observa l'enfant récupérer sa baguette. N'importe quel professeur aurait couvert le Survivant de compliments et de félicitations mais Severus se refusa à tomber dans ce piège. Il n'avait jamais été friand des compliments et encore moins pendant des séances d'apprentissage. Potter se positionna à nouveau, prêt à parer une attaque. Les jambes légèrement fléchies, le corps penché en avant dans un angle parfait et le bras gauche souple, légèrement relevé en arrière.
- Laissez votre instinct vous guider, ajouta-t-il.
Severus n'aurait jamais prodigué ce conseil à n'importe qui mais Potter était de ces élèves qui avaient un don dans la Défense contre les forces du mal. L'évidence lui arrachait le cœur de l'admettre mais le gamin était doué. Cela se voyait au premier coup d'œil.
Sa position dans l'espace, le mouvement naturel du poignet et la rapidité qu'il avait à dégainer la formule au bon moment n'étaient pas le fruit du hasard. C'était le genre de choses qui pouvaient prendre des années à maîtriser pour quiconque - soit la majorité des sorciers- n'avait pas cet or entre les mains. Potter était un diamant brut. Et de savoir que le gamin allait encore certainement être entraîné par le dernier des abrutis en Défense contre les forces du mal était une insulte à la magie.
Et subitement, avant même que Severus ne le conscientise, il n'y avait plus de James et Lily Potter. Il n'y avait plus de guerre Gryffondor contre Serpentard. Il n'y avait plus de concurrence malsaine. Il n'y avait plus d'animosité, plus d'amertume, plus de mensonges, plus de secrets.
Il y avait juste Harry Potter, douze ans et son envie de maîtriser l'art noble de la Défense contre les forces du mal.
Il y avait Harry Potter, douze ans, qui ne savait pas encore qu'un jour, il devrait vaincre le plus grand mage noir de l'histoire de la magie.
Il y avait Harry Potter, douze ans, qui possédait un talent vertigineux que lui-même ignorait.
Il y avait Harry Potter, douze ans, prêt à apprendre et à faire des miracles s'il avait le bon maître en face de lui.
Et il y avait Severus Rogue, intrigué, fasciné, passionné par les capacités de cet enfant et sa magie qui ne demandait juste qu'à se révéler.
Severus Rogue qui se sentait les épaules pour faire de Potter un sorcier à la hauteur des attentes du monde sorcier.
Severus Rogue qui pouvait enfin se rattraper vis-à-vis de la prophétie.
Severus Rogue qui aperçut enfin la lumière.
Severus Rogue qui ressentit enfin cette vague excitante d'ambition qu'il n'avait pas ressenti depuis des années.
Et cette fois, il savait au plus profond de ses entrailles que c'était le bon choix.
- Très bien Potter, en garde ! lança-t-il, enivré comme jamais.
NDA : Alors ? Verdict ? N'oubliez pas que le commentaire est le seul salaire ;)
