Note de l'Autrice :

Réponse aux reviews anonymes :

Guest : Merci beaucoup pour ton commentaire ! En effet, les liens se renforcent ! Tu supposes bien les choses mais pas sûr que Severus accepte ce caractère impulsif Gryffondorien sans au moins se faire quelques cheveux blancs... A bientôt !

Ce chapitre a été béta-readé par Livia Tournois. Merci à elle.

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Bonne lecture tout le monde.


Chapitre 22

Severus Rogue réfléchissait intensément. Assis dans la salle d'attente, il attendait que l'heure des visites débute. Agitant son café désormais froid dans sa main, les yeux dans le vague, le maître des potions cogitait sur les paroles de Dumbledore.

Le directeur de Poudlard lui avait proposé de prendre Harry avec lui.

C'était invraisemblable.

Comment le ministère pourrait accepter alors qu'il était un ancien mangemort ? Mangemort repenti, avait rectifié Albus Dumbledore. Puis l'homme avait poursuivit d'une voix solennelle :

- Vous êtes l'un des sorciers les plus puissants de notre monde. Vous saurez protéger l'enfant qui s'est déjà attaché à vous. Je ne l'ai pas seulement vu dans sa magie…La vôtre aussi. Un lien indéfectible est né et il s'est renforcé au fil des mois.

- Je ne serais jamais à la hauteur ! Je lui ai dit des choses horribles. Mr. Weasley ne vous l'a pas dit je suppose ? J'ai tout raconté au sujet de la prophétie. J'ai blessé cet enfant sans savoir m'arrêter. J'ai eu des mots bien trop durs à entendre. Dumbledore, je ne suis pas fait pour ça ! Je suis incapable d'assumer un rôle aussi important.

Il avait occulté de justesse ses pensées autour de son propre père et du modèle éducatif défaillant qu'on lui avait offert.

- Ce sont vos peurs Severus…

- Oh je vous en prie Dumbledore ! Par ailleurs, rien ne nous dit que Harry le souhaitera !

- Je pense que vous vous méprenez sur ce que peut ressentir cet enfant pour vous, mais Severus attendez ! Je vous laisse réfléchir. Harry serait bien chez vous, j'en suis certain mais n'ayez aucune pression, je trouverai une solution pour qu'il trouve une bonne famille. Nous avons encore du temps et Hestia Jones est de notre côté.

Buvant d'un trait le fond de café froid qui traînait dans sa tasse, Severus se leva et jeta un coup d'œil à l'horloge qui affichait presque neuf heures. Les couleurs de la salle d'attente des visiteurs avaient été pensées pour accueillir les familles avec enfant. Ainsi, une fresque géante habillait l'ensemble de la pièce. Des fées, des dragons et des sorciers vivaient dans une parfaite harmonie.

Écœurant, pensa Severus.

Toutes ces couleurs vives lui donnaient mal à la tête et l'oppressaient. Il espérait que la chambre dans laquelle Harry avait été transférée n'était pas aussi enfantine. D'autant qu'il n'était pas certain que le gamin aurait apprécié d'être traité comme un petit enfant… Il réprima un sourire à l'idée d'un Harry frustré de se voir affublé d'un pyjama avec des petits dragons. Nul doute qu'il serait hors de lui. L'enfant détestait qu'on le prenne pour plus jeune qu'il n'était et pire, qu'on lui fasse remarquer sa petite taille.

- Le temps est long, n'est-ce pas ?

Severus maîtrisa un sursaut de surprise et se tourna vers la voix particulièrement aiguë qui s'était adressée à lui. Une petite femme, les cheveux poivre et sel et les joues rondes lui adressait un sourire bienveillant.

- Ma fille est hospitalisée depuis près d'un mois ici, expliqua-t-elle comme si Severus en avait quelque chose à faire. Elle n'était pas revenue depuis quatre mois, un record. Les médecins ne savent pas ce qu'elle a… Ils soupçonnent une malédiction. Cela fait cinq ans que ça dure.

Le maître des potions ne répondit rien, laissant la femme s'exprimer. Il n'avait de toute façon rien à répondre. Que dire dans ce genre de cas ?

La femme qui observait par la fenêtre reporta son regard vers lui. Ses yeux gris dégageaient une émotion que Severus avait déjà vu quelque part mais dont il était incapable de se souvenir où et quand.

- Vous avez l'attitude du parent qui attend pour la première fois à l'hôpital pour son enfant, je me trompe ?

Combien de fois l'avait-on pris pour le père de Harry depuis qu'il avait mis les pieds dans ce fichu hôpital ? Bien que cela soit la déduction la plus logique, cela n'en demeurait pas moins bizarre… Parce que quelques mois plus tôt, il aurait remis les pendules à l'heure à quiconque aurait suggéré un lien de parenté entre lui et Potter mais désormais, il ne disait plus rien. Cela n'avait pas vraiment d'importance et il ne désirait pas s'aventurer sur le chemin de cette réflexion.

Malgré lui, certaines interrogations subsistaient dont la principale : combien de professeurs venaient voir un élève malade ? Même Minerva McGonagall ne s'était pas déplacée alors qu'elle y avait bien plus sa place en tant que directrice de Gryffondor. Sans compter qu'il avait toujours cru que Harry était le chouchou de la lionne. Mais la relation entre Harry et Severus allait plus loin qu'une simple préférence qu'un professeur pouvait naturellement avoir pour un de ses élèves…

C'était bien plus que ça.

Filiale. Protecteur. En somme, paternel.

Car aucun professeur n'aurait pu ressentir ce qu'il avait traversé ces dernières heures, semaines, mois. Il avait appris à aimer cet enfant, s'attachant à lui sans même s'en rendre compte.

- Je vous ai vu hier soir. Ne me regardez pas comme ça, on a tous eu nos moments de faiblesses et c'est bien normal.

Pourquoi cette femme lui parlait ? Il n'avait même pas la force de l'envoyer paître. Il voulait voir comment Harry se portait et qu'un rapport détaillé sur la santé de l'enfant lui soit transmis. Que tout le monde pense qu'il était le père lui faciliterait les choses. Sauvé par le gong, l'infirmier ouvrit les portes qui menaient au couloir des chambres des patients.

- Ce n'est pas trop tôt, soupira la femme. Profitez bien de votre loulou.

Severus se renfrogna. Harry n'était pas son loulou. Quel était donc ce genre de surnom stupide ? Avançant d'un pas rapide, il annonça le nom de Harry entre ses dents et on lui indiqua la chambre numéro 7.

.

Lumineuse et blanche, la chambre baignait dans les rayons matinaux. Harry dormait, le visage calme et reposé. Rien n'aurait pu laisser deviner l'épreuve douloureuse qu'il avait vécu la veille. Severus s'installa dans le fauteuil, fixant l'enfant dans l'attente qu'il s'éveille.

Ce gosse ne méritait pas tout ça.

Il avait besoin d'être protégé, encadré et aidé dans la mission qui lui était destinée.

Comment Severus pouvait avoir l'impertinence de croire qu'il pourrait le faire et être à la hauteur ?

L'égocentrisme et la colère guidaient ses pas et ses réactions. Il avait été incapable de comprendre que Harry était un enfant maltraité alors comment pourrait-il être à la hauteur ? Et comment Harry faisait-il pour passer l'éponge aussi rapidement ? Cet enfant était une perle.

Fort à propos, il bougea dans son lit avant d'ouvrir les yeux.

- Vous êtes venu.

- Comme prévu.

Severus lui tendit ses lunettes. Harry grimaça lorsqu'il se redressa dans son lit.

- Ta brûlure te fait mal ? La médicomage va passer dans la matinée mais je peux demander une potion calmante si tu en as besoin.

- Non ça va merci. Quand est-ce que je retourne à Poudlard ?

- On va voir ça avec l'équipe médicale mais je pense que tu resteras au moins une semaine ici. Ensuite tu auras besoin de soins supplémentaires.

Le gamin jouait avec les draps de son lit nerveusement, semblant chercher ses mots.

- C'est bien que vous soyez honnête avec moi, lâcha-t-il de but en blanc. Même si c'est difficile à entendre parfois…

La bouche sèche, Severus eut du mal à soutenir le regard vert de l'enfant. L'un comme l'autre savait à quoi Harry faisait référence et le maître des potions prit sur lui. C'était certainement la première fois de toute sa vie qu'il allait se prêter à cet exercice. Il respiration profondément trois fois puis se lança, les mains moites :

- Je te demande pardon Harry, déclara-t-il en manquant de rire tant le visage de l'enfant était surpris d'entendre ces mots. Je n'ai pas su voir ta souffrance et je n'ai jamais vraiment réussi à t'apporter une confiance totale. J'ai été dur avec toi et je le regrette. Je t'ai parlé de cette prophétie et je n'aurais pas dû. C'était à Dumbledore de le faire, le jour où tu serais prêt.

- Je n'aurais jamais été prêt…

- Bien sûr que si. En étant un peu plus vieux et surtout mieux entouré. Je suis désolé. Je n'ai pas réussi à faire face à ma peur. Je ne peux que te promettre que cela ne se reproduira plus et surtout, je m'engage sur l'honneur de Merlin à t'accompagner jusqu'au bout. Si tu le souhaites, j'affronterais les ténèbres à tes côtés et te transmettrais tout ce que je sais. Aussi, je m'engage à t'aider du mieux que je le peux et d'être celui sur lequel tu pourras te reposer à chaque minute que la vie t'offrira.

Harry resta muet face à cette déclaration. Un silence ponctua le discours du maître des potions et tous deux le savourèrent quelques instants. Le garçon secouait la tête, cherchant ses mots mais la porte de la chambre s'ouvrit à la volée. Harry sursauta violemment, les yeux écarquillés de frayeur.

L'infirmier, un grand brun dégingandé, ne sembla pas s'en émouvoir et s'approcha d'un pas vif et conquérant.

- Bonjour Harry, comment vas-tu aujourd'hui ? Je vais prendre tes constantes, ajouta-t-il sans attendre de réponse. Ok tout est parfait. On va venir te chercher pour ta toilette et changer tes pansements.

L'homme agitait sa baguette dans tous les sens et plus il parlait, plus le gamin se décomposait et pâlissait. Il nota quelques mots sur son carnet puis s'échappa tel un vif d'or, laissant un Harry au regard épouvanté et un Severus médusé. Harry parla en premier :

- Qu'est-ce qu'ils vont me faire avec mon pansement ?

- Je pense qu'ils vont t'emmener prendre un bain puis ils referont ton bandage afin de soigner ta brûlure.

- Il avait l'air pressé le monsieur.

Une ride d'angoisse barrait le front du Gryffondor qui fixait encore la porte. En colère, le maître des potions se demanda qui pouvait bien être l'abruti qui avait décidé de mettre cet infirmier en pédiatrie. Les enfants avaient besoin qu'on leur explique les choses, ce n'était pourtant pas compliqué à savoir ! Si l'intégralité du personnel médical était comme l'infirmier, Severus se chargerait de faire sortir Harry beaucoup plus rapidement.

Pour le moment, il fallait rassurer le garçon mais avant que Severus ne trouve les mots adéquats, deux petites femmes entrèrent dans la chambre de façon plus discrète. Au moins, elles avaient frappé à la porte !

- Bonjour Harry, je suis Marita et voici ma collègue Kina.

Compte tenu de leur petite taille, leur voix aiguë et leurs oreilles pointues, ces femmes ne pouvaient être qu'à moitié elfes de maison. Ces semi-créatures étaient souvent employées - ou plutôt exploitées - dans les hôpitaux ou les hôtels afin de réaliser les tâches les plus ingrates dont principalement le ménage ou les soins des personnes.

- Bonjour, répondit Harry d'une voix timide qui ne lui ressemblait absolument pas.

Imperceptiblement, le gamin s'était rapproché de Severus.

- On va t'accompagner dans la salle de bain où tu pourras te laver. On t'a préparé un grand bain avec des potions qui vont soulager tes brûlures.

Harry hocha simplement la tête en guise de réponse et Severus se leva afin d'entamer le mouvement. Les deux demi-elfes aidèrent Harry à s'installer dans un fauteuil roulant qu'elles avaient fait apparaître pour l'occasion.

- Je peux marcher ! s'exclama Harry, levant son menton d'un air fier.

Manquant de lever les yeux au ciel, Severus l'attrapa par le bras afin de l'aider à se déplacer. Harry lui adressa un petit sourire de remerciement et ils allèrent à la salle de bain qui se trouvait au bout du couloir. Le gamin était fébrile et le moindre coup de vent l'aurait fait tomber à terre mais le maître des potions garda une main ferme contre le dos du garçon tandis que l'autre tenait fermement son bras. Après de longues minutes interminables, ils arrivèrent enfin à destination. Une immense baignoire remplie d'une eau blanche dégageait une fumée à l'odeur sucrée.

Les aides-soignantes s'approchèrent pour l'aider à retirer sa blouse. Son corps maigrichon et enfantin était entouré d'un bandage, couvrant ses brûlures.

Le cœur serré, Severus se décala afin de prendre congé et laisser toute l'intimité nécessaire à l'enfant mais c'était sans compter la poigne ferme du Survivant autour de son avant-bras.

- Ce sont des filles, chuchota Harry les joues rouges tandis que les femmes lui retiraient son bandage.

- Elles ont l'habitude, tenta de rassurer Severus qui trouvait tout de même parfaitement ridicule qu'il soit aussi pudique.

Les yeux émeraudes brillaient d'une panique intense et le maître des potions ne savait plus quoi dire.

- Tu ne peux pas faire ça tout seul. Tu as besoin d'aide. Et elles ne regardent même pas.

Harry se renfrogna et baissa la tête. Severus ressentit l'étrange besoin de renouer contact avec l'enfant tout en étant agacé par ce comportement qui n'était peut-être pas un caprice mais qui avait tendance à irriter le maître des potions.

- Vous pouvez rester avec lui s'il le souhaite, déclara Marita dans un sourire bienveillant.

- Ils pensent tous que vous êtes mon père, pouffa Harry dans un chuchotement tandis qu'il se séparait de son sous-vêtement.

Severus l'accompagna jusque dans sa baignoire. La brûlure commençait à dessiner une étrange forme. Il laissa les femmes masser la plaie en cours de cicatrisation. Des rougeurs en forme d'ailes se distinguaient sur la longueur les reins de l'enfant. Les ailes du Feudeymon ou plus précisément de l'oiseau-tonnerre. Le bain semblait faire du bien à Harry qui se détendit au fur et à mesure que les femmes passaient différents onguents et potions sur son dos.

Une dizaine de minutes plus tard, Harry sortit de la baignoire, cachant son corps avec ses mains et quelque peu gêné.

Une blouse de patient apparut devant lui et Harry grimaça.

- C'est vraiment obligé la blouse ? Je ne peux pas m'habiller comme tout le monde ?

Severus claqua sa langue contre son palais et Harry pinça les lèvres, comprenant parfaitement qu'il allait trop loin dans ses réflexions.

- On peut vous laisser ou as-tu besoin d'aide ? demanda Kina.

- Je peux me débrouiller.

Les deux petites femmes s'en allèrent et Harry perdit toute pudeur et s'habilla aussi rapidement que possible avant de rejoindre lentement le professeur de potions.

Lorsqu'ils marchèrent, Harry serra fort le bras de Severus et il fut tellement épuisé à la fin du parcours que le maître des potions le porta presque jusque dans son lit pour les derniers mètres.

oOo

Lorsqu'on lui apporta son déjeuner, Harry s'était endormi sans s'en être aperçu. La nourriture était loin d'être appétissante mais à sa grande surprise, le professeur Rogue était toujours présent et il ne pouvait faire l'impasse sur ce repas.

- Mange ce que tu peux.

Etonné mais bien décidé à ne pas le faire changer d'avis d'être venu le voir, Harry mangea la purée de pomme de terre ainsi que sa poire dans un silence religieux. Pendant ce temps, l'homme corrigeait des copies, les sourcils froncés et l'air passablement agacé.

A peine déposait-il son verre d'eau sur son plateau qu'on frappa à la porte.

Harry mit quelques secondes avant de reconnaître la sorcière puis son cœur s'accéléra de panique.

- Bonjour Jones, déclara le professeur en se levant et lui serrant la main d'un air solennel.

Venait-on le chercher pour l'emmener à l'orphelinat ? Était-ce pour cela que le professeur Rogue était présent ? Non, c'était impossible, se reprit-il. Severus Rogue prenait soin de lui. Quoiqu'il arrive, il le défendrait, il lui en avait fait la promesse.

- Bonjour Rogue, bonjour Harry, ajouta-t-elle de sa voix naturellement douce. Je viens aux nouvelles. Est-ce que tout va bien ?

- Aussi bien que possible, répondit Harry d'une voix assurée et franche, sachant pertinemment comment se comporter avec les services sociaux qu'ils soient moldus ou sorciers.

Sur ses gardes, Harry ne lâcha pas du regard Hestia Jones qui pénétra un peu plus franchement dans la pièce afin d'échanger quelques mots avec Severus Rogue. Rien d'intéressant, son esprit se concentra sur le physique de la femme. Brune, les cheveux aux épaules, elle était grande et mince. Sa taille était presque la même que celle du professeur. Son visage respirait la bienveillance mais Harry se rappelait encore des tests qu'elle avait fait sur lui alors qu'il était en position de faiblesse. Comme si elle avait lu dans ses pensées, la femme se tourna alors vers Harry.

- Harry, je tenais à m'excuser pour la dernière fois. J'étais très inquiète pour ta santé et j'ai poursuivi les examens afin de trouver des réponses.

Hochant la tête, Harry se sentit subitement très fatigué et bailla à s'en décrocher la mâchoire.

- Il a besoin de dormir, déclara inutilement la femme. Si nous allions discuter dans la salle d'attente ?

- Non ! s'exclama Harry qui ne voulait pas s'endormir seul pour une raison qu'il n'expliquait pas. Vous pouvez rester ça ne me dérange pas.

- On reste, déclara le professeur de potions.

Le duo se mit alors à discuter de Poudlard, des cours, des examens, des nouvelles recrues du Ministère et Harry tomba dans une brume de sommeil sans vraiment sombrer totalement dans l'inconscience. Au loin, il entendait la discussion qu'entretenaient les deux adultes.

- Mr Rogue, je me suis entretenu avec Albus Dumbledore. Le Ministère souhaite comprendre ce qui a pu se passer et ils veulent que Harry soit entouré d'une famille.

- Je comprends.

- Seulement Dumbledore ne l'entend pas de cette oreille. Je crois qu'il vous en a touché quelques mots.

- Parfaitement, résonna la voix douce du professeur. Je ne suis en revanche pas vraiment certain que ce soit une bonne idée.

- Que voulez-vous dire ?

- Allons Miss Jones, vous le savez autant que moi.

- Premièrement, vous avez été blanchi. Ensuite, ne me faites pas croire que vous ignorez la force de frappe que peut avoir Albus Dumbledore dans le monde de la magie. Il impose et le monde s'exécute.

- Certes. Et l'enfant ? Avez-vous pensé à son bien-être ?

- C'est la première chose que nous verrons avec lui afin de connaître son avis éclairé. Mais nous ne parlons pas de Harry Potter mais bien de vous pour le moment. Seriez-vous prêts à le prendre avec vous et à être son tuteur référent ?

S'enfonçant dans le sommeil, Harry remonta quelque peu à la surface sans se réveiller totalement. Avait-il bien entendu ?

- La question est simple Mr Rogue.

- Non elle ne l'est pas ! Je… Je ne suis pas sûr d'être la bonne personne et ne me bassinez pas avec les mots que Dumbledore aurait pu vous dire. Il a laissé Harry chez des gens négligents et maltraitants. Tout aussi influent qu'il puisse être, je ne suis pas certain qu'il soit une bonne référence en termes de choix de parentalité.

- Mais personne n'est parfait Mr Rogue. Nous n'allons pas chercher à savoir si vous êtes le parent parfait. On veut simplement s'assurer que Harry grandisse dans un foyer sain, sécuritaire et équilibré. Et quoi que vous puissiez dire, vous êtes plutôt bien placé. Vous avez un travail, vous avez pris soin de Harry cette année et il s'est attaché à vous. Mais si vous ne le souhaitez pas, on ne vous forcera à rien. Des familles sont prêtes à accueillir Harry notamment les Tonks qui ont un lien avec…

- Je sais, résonna la voix du professeur qui dégageait un épuisement non dissimulé mais également - il fallait être attentif - une certaine amertume.

Harry n'entendit plus rien pendant de longues minutes, rêvant qu'il volait au-dessus de Poudlard.

- On ne vous laissera pas seul. Il y aura des visites et je m'en chargerai. Harry vient de vivre un nouvel événement traumatique et il est parfaitement sain de vous inquiéter d'être à la hauteur pour l'aider. Lisez les livres que je vous ai fourni et n'hésitez pas à vous rendre dans les différentes conférences que réalise l'Université d'Oxford sur la psychologie de l'enfant. Il me semble que vous avez toujours été doué pour les études…

- Vos souvenirs sont exacts.

Harry fut certain que Hestia Jones souriait pendant que Rogue devait certainement afficher un air supérieur et hautain.

- Si je peux vous donner quelques conseils, Harry sera certainement en phase de stress aigüe puis de stress post-traumatique. Sans compter tout ce qui s'accumule avec ce qu'il a vécu au cours de sa vie. Il est entre deux âges donc ses réactions peuvent être variées mais les plus courantes sont les troubles du sommeil, une agitation, des résultats scolaires en baisse et parfois une régression comportementale. Soyez là pour lui et rassurez le. Si besoin, je vous laisse ma carte et je pourrai vous mettre en contact avec des personnes habilitées pour vous aider tous les deux. Vous serez à la hauteur. Vous avez déjà su le faire. Faites-vous confiance.

Harry retomba dans les limbes du sommeil, parfaitement détendu. Tout irait bien.

oOo

Trois jours plus tard, Harry pouvait bouger sans trop souffrir et l'équipe médicale avait diminué les anti-douleurs. L'influence du directeur de Poudlard avait permis à ce qu'il sorte au bout d'une semaine sous conditions de soins à domicile, rendant l'enfant plus que joyeux et impatient de quitter cet univers médical.

De son côté, Severus restait aux aguets après la conversation qu'il avait eue avec Hestia Jones. Elle lui avait dépeint un avenir plutôt sombre concernant la santé mentale de l'enfant mais Harry avait une capacité de résilience époustouflante.

Les cours avaient repris et les pétrifiés avaient été ramenés à la vie. Grand bien fasse au plus jeune des Weasley qui avaient retrouvé un repère en la personne d'Hermione Granger. A la fin du cours, accompagnés de l'intégralité des lions de deuxième année - y compris Londubat - qui faisaient bloc derrière eux, le duo s'approcha du bureau de Severus afin de demander des nouvelles de Harry.

Courageux mais pas téméraires, ils s'étaient contentés d'une réponse sèche indiquant que leur camarade sortirait d'ici la fin de la semaine et qu'il allait bien.

Le maître des potions savait qu'il ne valait mieux pas donner de date afin d'éviter toute réclamation si la santé d'Harry s'aggravait. Hors de question de se coltiner des cornichons chouineurs et vindicatifs.

Le sourire de l'enfant et sa démarche bien plus confiante annonçait cependant un retour prochain au sein du château.

Harry jouait aux échecs avec une fillette dont le visage joufflu et ses petits yeux lui donnaient un air taquin. Sept enfants évoluaient dans la salle de jeux à cette heure-ci et Severus réalisa qu'il y avait bien plus d'enfants malades hospitalisés qu'il ne pensait. Des accidents pouvaient être la raison de leur présence ici mais également des malédictions comme l'avait suggéré la mère poule qu'il avait recroisé la veille et qu'il avait habilement évité.

Enfin, Harry leva la tête et aperçut son professeur. Il s'excusa auprès de la fillette et s'approcha de lui dans un sourire ravie. Les événements semblaient déjà lointains.

- Je ne savais pas que vous reviendrez !

- Je t'ai pourtant dit que je reviendrai tous les soirs jusqu'à ton départ.

- On devrait aller dans ma chambre, vous faites peur aux autres enfants, s'amusa Harry.

Severus ne s'en formalisa pas, bien au contraire. Il était ravi de renvoyer encore cette image de chauve-souris effrayante. Il avait déjà perdu drastiquement de sa réputation depuis que les élèves savaient qu'il rendait visite à Harry Potter tous les jours. Le maître des potions soupçonnait le directeur pour cette "fuite" d'information. Non pas qu'il ait honte d'être un peu plus humain, au contraire ce n'était pas si terrible qu'il ne l'aurait pensé, mais les conséquences pouvaient être plus importantes qu'il n'y paraissait.

Le maître des potions eût tout l'occasion d'en faire l'expérience à l'instant même où ils s'installèrent à la petite table posée contre le mur de la chambre. Il s'apprêtait à donner les cours de la journée à l'enfant quand on frappa de trois coups secs à la porte. Instinctivement, il sût que les choses allaient être plus compliquées qu'une simple visite d'Hestia Jones.

La porte s'ouvrit aussitôt. Il vit nettement Harry se raidir et saisir sa baguette lorsque la silhouette et l'air conquérant de Lucius Malefoy apparurent dans l'encadrement de la porte. A ses côtés se tenait son elfe de maison, effrayé et la mine basse. Mais lorsque la créature croisa le regard du Survivant, les oreilles de cette dernière se redressèrent avec joie.

- Dobby ? s'exclama le garçon sans aucune mesure de sûreté. Alors c'est lui ton maître !

Encore une chose que le maître des potions devrait lui apprendre : se taire si on était incapable de feinter le respect. Grinçant des dents, Severus se leva et posa une main sur l'épaule de l'enfant, espérant de toutes ses forces qu'il comprenait le message subtil de se taire à partir de maintenant.

- Mr Malefoy, que nous vaut cette visite ? dit-il d'une voix si neutre que personne n'aurait pu y distinguer la méfiance totale qui habitait le professeur.

- Bonjour professeur.

Lucius Malefoy aimait l'art de la mise en scène. Ainsi, il prit son temps pour pénétrer dans la pièce et observer les lieux d'un air de dégoût non dissimulé. Son regard se posa sur les cahiers et parchemins de Harry pendant plusieurs secondes. Severus devina sans mal que les rouages dans la tête de l'homme s'activaient.

Mais Severus Rogue avait perdu sa couverture d'espion la nuit même où l'espèce de souvenir du Seigneur des Ténèbres l'avait vu sauver Harry. Alors pourquoi s'embarrasser de faux semblants ?

- Il s'avère que le Ministère et plus particulièrement le Conseil d'Administration s'inquiétaient de savoir qu'une élève avait été enlevée et pire, que deux autres avaient cherché à la sauver. Albus Dumbledore n'a pas été en capacité de nous en dire plus sur cet événement hormis une information abracadabrante comme un retour du Seigneur des Ténèbres par le biais d'un journal…

Harry se raidit sous ses doigts et il accentua la pression pour l'empêcher d'agir comme un stupide Gryffondor. Plombée par la tension qui régnait désormais dans la pièce, la lourdeur de l'air en était presque suffocante. Pourtant, ni Severus, ni Lucius Malefoy ne laissèrent penser qu'il y avait un quelconque problème. Seuls les tremblements de l'elfe de maison et de Harry laissaient deviner que des choses bien plus étranges et importantes se jouaient. D'autant que ces deux-là avaient l'air de communiquer silencieusement. Lucius Malfoy était cependant trop occupé à analyser le maître des potions.

Les yeux bleus de l'homme vibraient d'interrogations que Severus n'eût aucun mal à interpréter. Était-il encore des leurs ? Avait-il un plan concernant le garçon qui a survécu ? Était-ce juste un geste purement égoïste et intéressé s'il était désormais dans les bonnes grâces du Survivant ?

Rien dans le langage corporel de l'homme n'aurait pu trahir ses questionnements et pourtant toute l'incompréhension qui le traversait se fracassait sur ses micro-expressions. Severus en fut presque amusé et savourait la scène, attendant patiemment que l'homme se mette à parler. Mais Harry prit la parole bien avant :

- C'est de votre faute ! accusa-t-il sans la moindre considération pour les enjeux sociaux qui se tramaient. Vous avez mis le journal dans le chaudron de Ginny lorsqu'on s'est rencontrés chez Fleury et Bott.

Mr Malfoy serra les poings et son regard passa de Severus - qui bouillonnait face à cet élan de stupide témérité - et Harry qui s'était désormais levé.

- Il faudrait le prouver, siffla-t-il.

- Oh, personne n'y arrivera, coupa finalement Severus. Mais enfin, je vous déconseille de distribuer des anciens artefacts du Seigneur des Ténèbres la prochaine fois. Principalement si cela doit tomber dans les mains d'une Weasley dont le père saura sûrement prouver que ça vous appartient. Par ailleurs, Mr Potter a une tendance fâcheuse à prouver son côté chevaleresque. Cependant, il est désormais sous ma responsabilité et je ne laisserais rien de regrettable lui arriver. Les conséquences seraient… Bien plus regrettables pour vous.

Il sentit Mr. Malefoy prêt à exploser. Severus posa la main sur sa ceinture où sa baguette était rangée. L'espace d'un instant, il crut bien qu'ils allaient finir par se lancer dans un combat. Mais l'un comme l'autre savait que cela était parfaitement inutile et Lucius Malefoy secoua la tête avec colère mais ne fît rien.

- Avez-vous eu toutes les informations que vous vouliez ? Le Conseil d'Administration sera-t-il satisfait ? ajouta-t-il dans un sourire provoquant parfaitement inutile mais ô combien satisfaisant.

- Êtes-vous le gardien de cet enfant ?

- Oui.

Severus sentit le gamin sursauter mais une pression sur son épaule suffit à ce qu'il ne suréagisse pas. A vrai dire, il avait répondu sans réfléchir. Ou plutôt, sa réponse s'adaptait à la situation.

Lucius Malefoy cesserait de mettre son sale nez dans les affaires de Potter pour un certain temps. Rien de mieux qu'un ancien mangemort pour savoir de quoi Severus était capable.

Le regard furieux de Lucius passa de l'enfant à Severus quelques instants puis il s'éloigna, ouvrant la porte dans un grand fracas.

- Viens Dobby ! cracha-t-il.

Harry amorça un mouvement pour retenir l'elfe mais Severus l'en empêcha. Harry se retourna, le regard chargé de tristesse.

- On ne peut rien pour lui, chuchota-t-il entre ses dents. Mr Malefoy est son maître.

- On pourrait le libérer, supplia-t-il alors que l'elfe s'en allait en trottinant.

- Pas aujourd'hui.

Harry poussa un soupir à fendre l'âme. Lui qui avait si peur de ne pas être un Gryffondor…

- Sais-tu quelle est l'épée que tu as fait sortir du choixpeau dans la Chambre des Secrets ?

Changer de sujet demeurait le meilleur moyen pour éviter les larmes ou une crise de nerfs. Pour cela, Severus était rodé à la tâche. Harry secoua la tête, les sourcils froncés.

Severus s'installa à nouveau et Harry le suivit. Il lui expliqua alors que l'épée de Godric Gryffondor était apparue et que la légende disait que seul un véritable Gryffondor pouvait la faire venir à lui.

- J'aurais pensé te voir plus soulagé que ça, après toutes les inquiétudes que tu avais, s'amusa Severus.

- Je suis touché. Flatté même ! répondit finalement Harry. Mais ce n'est plus si important.

- Ah bon ?

- Je me rends compte que l'essentiel est ailleurs. Vous êtes un Serpentard et vous m'avez aidé dans la Chambre des Secrets. Je suis certain qu'Eléonore aussi l'aurait fait si elle avait été là.

Severus préféra ne pas relever cette phrase plus que naïve. Harry se mit à gribouiller son parchemin - Severus se fit violence pour ne pas le reprendre - cherchant ses mots.

- Et puis vous aviez raison.

- J'avais quoi ?

Harry haussa les épaules dans un sourire amusé, continuant de gribouiller. C'était visiblement difficile à assumer pour lui.

- Oui bon… Quand vous me disiez qu'on s'en fichait de ce que pensent les autres. Je comprends mieux maintenant car un jour je vais devoir affronter Voldemort. Qu'est-ce qu'il en aura à faire de ma maison ? Il n'a pas attendu de savoir où j'allais être réparti quand il a décidé de m'assassiner il y a onze ans. Et puis, je sais que je ne suis pas l'héritier de Serpentard ou du moins que je ne partage pas ses idées. C'est le principal, non ?

Il s'était retourné vers Severus qui ne pipa mot. En réalité, peut-être pour la première fois, il trouva ce gamin intelligent et éveillé. Une bouffée de fierté s'empara de ses tripes. Ne sachant plus vraiment comment réagir, il pointa du menton le parchemin.

- Un brouillon n'a pas besoin d'être gribouillé pour autant.

A cette réplique, Harry sourit franchement.

- Donc… métamorphose, commença-t-il.

Ils travaillèrent pendant une demi-heure, Severus l'aidant dans ses devoirs et lui expliquant les éléments que Harry ne comprenait pas. Ce n'était vraiment pas si terrible. Lorsqu'il gardait son calme, Harry saisissait rapidement les choses.

- Ça suffit pour aujourd'hui, déclara-t-il lorsque Harry bailla pour la troisième fois. Le dîner va être servi de toute façon.

- C'est pas bon la nourriture de l'hôpital, grimaça Harry tel un enfant de quatre ans et demi. Quand est-ce que je rentre ?

- Dans trois jours si tout va bien. Et pour cela, tu ne dois pas trop forcer sur ton corps.

Harry se leva et prit machinalement le bras du maître des potions qui se raidit en premier lieu avant de se détendre. Il n'avait jamais été friand des élans physiques et malgré tout le chemin parcouru, il n'était pas encore totalement à l'aise.

- Est-ce que vous êtes réellement mon gardien maintenant ?

La voix fébrile et inquiète, Severus se demanda un instant si Harry allait le rejeter.

- Hestia Jones devait t'en parler avant. C'est seulement si tu le souhaites. Marche doucement, on n'est pas à un marathon !

- Je… Je crois que je suis d'accord si vous l'êtes aussi.

- Et bien… dans ce cas…

Harry grimpa sur son lit. Ils avaient tous les deux du mal à maintenir leurs regards mais Severus se fit violence. Tout cela était sérieux.

- Je veux bien essayer de prendre soin de toi.

- Vous le faites déjà. Vous êtes le seul à avoir fait tout ce que vous faites depuis l'année dernière.

Les paroles étaient outrageusement maladroites mais cela toucha Severus qui hocha la tête. Quelques secondes plus tard, le plateau repas arriva et Severus se posa au bureau pour préparer ses cours de la semaine. Lorsqu'il releva la tête, Harry dormait à poings fermés, le plateau encore devant lui et la cuillère de sa compote toujours dans la main.

Il s'approcha silencieusement, retira le plateau d'un geste de baguette et allongea Harry qui ouvrit à peine les yeux.

- Dors.

Harry opina du chef avant de tomber à nouveau dans les bras de Morphée.

.

A peine était-il à Poudlard qu'il rédigea un courrier à l'intention d'Hestia Jones. Il acceptait d'être le gardien de Harry Potter. Dumbledore l'accueillit avec un sourire joyeux le lendemain. Nul doute que l'information était déjà connue dans les plus hautes sphères.

Severus Rogue avait eu beaucoup de doutes dans sa vie, même s'il s'était toujours vanté du contraire. Désormais, bien qu'il ne savait pas du tout dans quoi il s'engageait, il savait parfaitement qu'il prenait la bonne direction. C'était effrayant car il nageait à l'aveugle mais cette fois, il faisait le bon choix.

Lorsqu'il pénétra dans ses appartements le soir même, la pièce supplémentaire qui faisait habituellement office de dressing s'était métamorphosée en petite chambre, salle de bain attenante. Et s'il en fallait davantage pour montrer que Severus se transformait peu à peu en Helga Poufsouffle, il en fut émerveillé.


NDA :

Si vous voulez tuer l'autrice pour ne pas avoir libéré Dobby, tapez 1.

Si vous voulez gifler Lucius Malefoy car c'est un fouille-merde, tapez 2.

Si vous voulez câliner Harry Potter d'avoir été courageux, tapez 3.

Si vous voulez qu'Helga Poufsouffle déteigne encore un peu plus sur Severus Rogue, tapez 4.

Pour toutes autres réclamations, l'espace commentaire vous accueille ci-dessous. L'autrice se fera un plaisir de vous répondre dans les plus brefs délais.