Chapitre 27

- Il faut que je rentre, cria Harry à travers le tonnerre qui grondait de plus en plus fort. Est-ce que tu sauras t'abriter ?

Le chien répondit d'un aboiement fort, l'air de dire "pour qui me prends-tu ? Evidemment !". Harry lui offrit un sourire puis une accolade avant de se relever.

- J'ignore quand est-ce qu'on pourra se revoir. Je vais bientôt chez les Weasley et j'ai encore un tas de choses à faire. Tu ne m'oublieras pas hein ?

L'animal aboya à nouveau et tourna sur lui-même. Harry lui fit un signe de la main avant de s'éloigner.

La pluie martelait le sol boueux et il glissa plusieurs fois avant de parvenir aux buissons qui menaient au jardin. Le nuage était arrivé subitement et il n'avait pas terminé sa discussion - ou plutôt son monologue - avec le chien. Désormais, il était trempé comme une soupe mais le cœur léger comme à chaque fois qu'il se confiait à l'animal.

Le ciel gronda à nouveau et il sursauta dans un cri lorsqu'il tomba nez-à-nez avec le maître des potions.

Les lèvres pâles, le visage crispé, l'homme était furieux.

Et pour cause, Harry le savait très bien. Il n'était pas censé mettre un pied dehors.

- Je ne pensais pas que vous serez de retour si vite, osa-t-il dire, tentant de détendre l'atmosphère déjà beaucoup trop électrique.

Cela n'eut pas l'effet escompté et il se retrouva traîné par le bras jusque dans la maison. L'homme pointa sa baguette sur lui, toujours silencieux mais le visage bel et bien crispé par la colère. Le Gryffondor recula prudemment, les excuses se bousculant sur ses lèvres. Le souffle chaud qui lui sécha les vêtements fût un chouilla plus puissant qu'à l'accoutumé mais au moins, il ne tremblait plus de froid.

La peur en revanche…

- Explique-toi ! gronda le professeur.

- Je…

- Bon sang mais qu'est-ce qui peut bien se passer dans ta tête ! explosa l'homme. C'est dangereux. Dois-je te rappeler qui rôde dehors ?

- J'étais juste à la lisière de la forêt, tempéra Harry.

- Juste à la lisière ? Est-ce que tu te moques de moi ? Juste à la lisière ! beugla-t-il.

Les joues rouges de colère, l'homme balança sa baguette à travers la pièce comme s'il redoutait de s'en servir et se mit à tourner en rond tel un griffon en cage. Comparaison qui n'aurait certainement pas plu au maître des potions.

Harry quant à lui était ratatiné contre la porte vitrée. L'homme ne le frapperait pas, il en était certain. Pour autant, ce regard chargé de déception et de colère lui fit presque regretter les gifles de Pétunia.

Par ailleurs, il ne voyait pas pourquoi l'homme faisait tout un fromage de la situation.

- J'y vais pratiquement tous les jours, au moindre problème je peux revenir tout de suite dans le jardin.

- Tous les jours ? C'EST UNE BLAGUE ? DÎTES MOI QUE C'EST UNE CAMÉRA CACHÉE ! rugit-il les bras tournés vers le ciel.

Harry se colla un peu plus à la fenêtre. L'homme devenait complètement marteau. Voilà la réponse : c'était un gigantesque maboule. En plus, l'entendre parler d'objet moldu de façon parfaitement naturelle ajoutait un peu plus de folie au personnage.

Le Gryffondor laissa l'homme tempêter dans son coin et croisa les bras sur sa poitrine, attendant que la colère de son tuteur redescende.

- Tu me déçois fortement mon garçon, finit-il par dire. Je te faisais confiance. Je te pensais suffisamment intelligent et mature pour comprendre que sortir par les temps qui courent n'était pas une bonne idée.

Les mots tombèrent sur les épaules de Harry comme des pierres. Cette fois, ce fût sa colère à lui qui monta.

- Vous faites toute une histoire de rien du tout ! se défendit-il. Je ne suis pas en danger dans cette forêt. Sirius Black est probablement à des kilomètres d'ici. Je vous ai déjà dit que je restais proche du jardin, c'est comme si je ne le quittais pas. J'ai le droit de m'amuser comme tout le monde, c'est même vous qui me le répétez !

- Cela ne signifie pas que tu dois te mettre en danger !

- Je ne me mets pas en danger !

- Change de ton !

- Non ! Vous allez m'écouter ! Je ne suis pas un petit garçon incapable de se défendre.

- Harry, on ne va pas revenir sur ce sujet.

- J'en ai marre ! Je passe mes vacances dans cette maison sans rien faire d'autre. Je n'ai pas le droit de visiter la ville ou de découvrir la forêt. Alors oui, je suis allé à la lisière de la forêt car j'aime cet endroit. Je n'ai rien fait de mal et je suis toujours revenu entier.

Harry savait qu'il allait trop loin et qu'il était quelque peu de mauvaise foi. Il adorait ses vacances et il savait que le professeur faisait tout ce qu'il pouvait pour lui rendre sa vie agréable. Mais à cet instant, seule la colère occupait son cerveau et guidait ses réactions.

- Tu te comportes en enfant pourri gâté, répliqua le professeur le regard dur. Je te conseille de changer rapidement d'attitude. Je pense avoir été assez sympathique avec toi mais si tu veux que les choses changent il n'y a pas de problème. Qu'en est-il de ton choix d'option ? D'instrument de musique ? De tes devoirs ? Il te reste une semaine avant ton séjour chez Weasley mais continue sur cette lancée et tu ne mettras pas un pied chez ton ami.

Enragé, Harry ne vit pas que les assiettes dans le vaisselier tremblaient dangereusement. Serrant les dents et retenant des larmes de rage, il plongea son regard dans celui - tout aussi colérique - de son professeur.

- Vous êtes comme Oncle Vernon, cracha-t-il en détachant chaque syllabe.

Les mots arrivèrent à destination. Frappé par la douleur, le visage du professeur changea pour devenir un masque d'impassibilité.

Harry voulut s'excuser sur le champ mais l'homme lui indiqua la chambre de son index.

- Très bien. File dans ta chambre.

La gorge trop sèche et serrée pour dire quoique ce soit sans s'effondrer, il s'exécuta en silence, d'un pas précipité. Claquant la porte, il se laissa glisser contre celle-ci, plongeant sa tête dans ses mains.

Il ne voulait pas que les choses se passent de la sorte. Simplement, si le professeur lui répétait souvent que parfois, il ne savait pas faire avec un pré-ado de treize ans, Harry non plus ne savait pas toujours comment s'y prendre dans cette nouvelle vie.

Il n'avait jamais eu quelqu'un pour le protéger ou lui dire quoi faire. Il se gérait toujours tout seul. La contradiction lui déchirait l'esprit car il était à la fois heureux d'avoir quelqu'un pour le cadrer et en même temps, cela avait la particularité d'être oppressant.

Il aurait aimé vagabonder seul dans la ville et peut-être même se faire des amis maintenant que Dudley n'était plus dans les parages.

C'était injuste de sa part de tout mettre sur le dos du professeur. Un fou furieux qui avait trahi ses parents - et qui plus est était son parrain - rôdait en toute liberté et voulait probablement sa peau. Mais Harry voulait juste vivre comme tout le monde. Il voulait parfois oublier tous les dangers.

Ce chien était apparu comme un cadeau tombé du ciel. Il pouvait tout lui dire. Il se sentait en sécurité avec lui et ça lui faisait du bien de raconter tout ce qu'il avait sur le cœur sans être jugé. Mais comment le dire au maître des potions ? Nul doute qu'il ne voudrait jamais d'un chien à la maison - et encore moins dans les appartements de Poudlard.

Un sanglot s'échappa de sa gorge sans prévenir.

Il détestait sa vie à cet instant.

Avant, tout était nul. Désormais, il avait goûté au bonheur et cela lui faisait mal qu'il y ait cette épée de Damoclès qui tomberait un jour ou l'autre. Ce bonheur n'était qu'un écran de fumée.

Frappant le sol avec ses poings, un cri de rage lui déchira la gorge. Ses livres dans sa bibliothèque tombèrent dans un fracas que Harry ne remarqua même pas. Il laissa juste les larmes dévaler sur ses joues.

oOo

Harry était parfois comme un enfant en bas-âge. Severus en faisait régulièrement la constatation. Il y avait par moment de soudaines régressions. Besoin d'une parole rassurante, besoin d'une étreinte, de serrer un coussin fort contre lui ou encore des colères disproportionnées comme ce qu'il se passait à l'instant.

Le maître des potions ne pouvait plus entendre les pleurs du Survivant.

Habituellement, chez un enfant de treize ans, on conseillait plutôt de le laisser se calmer.

Mais Harry n'était pas comme les autres.

Bourré d'insécurités, il fallait faire ce qui n'avait pas été réalisé lorsqu'il était plus jeune. Et si la colère persistait en lui, Severus se fit violence pour réagir comme un homme. Il était l'adulte, il devait se comporter comme tel.

Grimpant quatre à quatre les marches de l'escalier, Severus entendit à nouveau un sanglot de désespoir avant de frapper contre la porte.

- Harry, ouvre moi.

Sans réponse de la part du gamin autre qu'un pleur étouffé, Severus actionna la poignée de la porte qui s'ouvrit. Tant mieux, il ne se voyait pas forcer la serrure à cet instant.

Assis sur son lit, le visage du Gryffondor était ravagé par les larmes. Le coeur du maître des potions se serra, incapable de prendre du recul sur la situation.

- Oh Harry…

- Laissez-moi, répondit le garçon sans grande conviction.

Le professeur préféra aller droit au but.

- Harry, j'ai eu une peur bleue est-ce que tu comprends ? Excuse-moi, je me suis emporté. Je suis revenue à la maison et je ne t'ai pas trouvé alors que tu m'avais promis de ne pas sortir. Arrête de pleurer, supplia-t-il en s'approchant près du lit et voyant que les derniers mots avaient pour effet de transformer le gamin en véritable fontaine.

- Je suis perdu, répondit Harry dans un souffle. J'aime bien aller près de la lisière c'est tout.

- Et tu avais l'habitude de traîner là où tu voulais dès que tes corvées étaient achevées lorsque tu étais à Privet Drive, je sais. Mais il y a des règles ici Harry. Ce n'est pas pour t'embêter mais parce que je tiens à toi.

Severus ne s'attendait pas à ce que le gamin lui tombe dans les bras aussi vite mais force était de constater qu'il n'était jamais rassacié des étreintes du garçon. Même s'il préférait que ces dernières ne soient pas chargées de larmes.

Il le consola dans ses bras, le rassurant autant que possible. Non, il ne lui en voulait pas. Oui, il avait été déçu de sa désobéissance mais il n'était pas déçu de lui.

Il comprenait parfaitement le mélange de sentiments contradictoires qui animaient le garçon.

- Je n'ai sûrement pas été assez présent ces derniers temps et je te demande pardon. Je sais aussi que tu aurais aimé sortir un peu plus mais les choses sont ainsi.

En réalité, Severus avait prévu au départ d'emmener Harry en France et de découvrir le Paris des sorciers. Il comptait l'emmener au musée de l'Alchimie et lui apprendre les potions d'une manière différente. Et puis, Severus souhaitait se rendre à la Sorbonne, dans les archives de l'Université - partie sorcière - où il aurait peut-être trouvé des parchemins intéressants concernant le Feudeymon. Dumbledore lui avait demandé de chercher si ce que Harry avait vécu en voyant sa mère était réel ou non et particulièrement "le truc gluant" que Harry avait repéré dans cet état de transe. Les recherches dans les parchemins du Royaume-Uni s'épuisaient et le maître des potions espérait trouver des réponses ailleurs.

Malheureusement, tout était tombé à l'eau lorsque Black s'était échappé. A croire que son ennemi d'antan lui pourrissait la vie jusqu'au bout.

Il n'avait cependant rien dit à Harry afin de ne pas le décevoir plus que nécessaire. Le garçon avait été suffisamment perturbé à la découverte du parcours de Black.

- Non, mes vacances sont très bien, répondit Harry. J'ai dit ça sur le coup de la colère. En réalité, je n'ai jamais eu d'aussi belles vacances. Ah oui et puis, vous n'êtes pas comme Oncle Vernon.

- Me voilà flatté, ironisa Severus.

En réalité, il était complètement soulagé. Le maitre des potions savait pertinement qu'il n'était pas comme l'Oncle du gamin mais ce qui comptait était ce que Harry pensait.

L'enfant resserra sa prise sur lui alors que Severus s'apprêtait à se relever. Levant les yeux au ciel mais malgré tout touché, il se remit à lui caresser le dos dans un geste réconfortant.

- J'espère que ce n'est pas une technique pour ne pas faire tes devoirs.

Un rire s'échappa sous la cape de Severus, là où Harry avait collé son visage. Severus avait remarqué que c'était une habitude chez l'enfant de fourrer son nez de la sorte. Mais généralement, les étreintes ne duraient pas aussi longtemps. Visiblement, Harry avait besoin d'être rassuré plus qu'il ne l'aurait pensé.

La vérité frappa Severus à cet instant.

Il faisait les mêmes erreurs qu'il avait fait avec Drago dans une mesure encore plus intense : croire que Harry était parfait.

Il avait été stupide d'imaginer que Harry respecterait les règles à la lettre - on parlait du fils Potter pardi ! - et il avait été carrément idiot de croire que le gamin avait une maturité émotionnelle stable.

Ce n'était pas parce qu'il était heureux les trois quart du temps que des questions ne se bousculaient pas sous sa tête dure.

Il cala alors son dos contre le mur afin d'apporter le réconfort nécessaire à l'enfant sans briser sa colonne vertébrale.

- Je crois que j'ai choisi mes options, dit la voix étouffée de Harry.

Severus reconnut ce ton entre mille. Le gamin allait finir par s'endormir. Parfois, Harry était vraiment au ralenti…

- Ah oui ?

- Je pensais à la Divination et les Soins aux créatures magiques.

Severus ne cacha même pas sa grimace. Il chercha ses mots, dessinant machinalement des cercles avec la paume de sa main sur le dos du Gryffondor. Ses yeux voguèrent vers la chouette de Harry qui dormait sur son perchoir puis la lettre sur la table de bureau.

- Je suppose que c'est l'option que va prendre ton ami Ron ?

- Il me l'a dit ce matin, avoua le Gryffondor.

- Si les choses étaient simples, je te dirai que tu peux prendre ces options. Mais l'amitié ne justifie pas de mettre entre parenthèses des opportunités plus avantageuses. Si tu avais un don en Divination, on le saurait déjà. Tu vas t'ennuyer dans ce cours et l'enseignante est angoissante au possible. Je n'ai rien à dire concernant l'option de Soins aux créatures magiques car ça pourrait t'être utile plus tard.

- Je savais que vous diriez ça, ronchonna Harry en se redressant et se calant contre les murs.

Ses yeux rouges ne trompaient pas quant à l'état dans lequel il s'était trouvé quelques minutes plus tôt.

- J'hésite avec l'Arithmancie ou les Runes.

- Je suppose que Miss Granger t'a conseillé la première option ?

- Elle veut toutes les prendre les options.

- Tu ne veux pas prendre exemple sur elle ? demanda le professeur sans trop d'espoir.

- Très drôle.

- Les deux matières sont intéressantes. L'Arithmancie est l'étude des chiffres et leurs destins. L'étude des Runes anciennes est à mon sens une matière qui devrait être obligatoire. Cela te permettra d'apprendre plusieurs langues magiques, de les traduire et de t'en servir plus tard si tu souhaites créer des sortilèges ou des potions par exemple. Il y a également toute une partie histoire sur les runes qui seront, je te l'assure, bien plus passionnante que les cours du vieux Binns. Ce sera également un moyen de mieux appréhender tes sortilèges de tous les jours. Et si je dois donner un dernier argument en faveur de cette option : ta maman l'avait choisie.

- Alors là… Je crois que je ne peux rien devant autant d'argumentation, rigola Harry. En plus, c'est une matière qui m'intéressait vraiment. Enfin, celle qui me rebute le moins.

Suivant cette discussion, Harry bailla à s'en décrocher la mâchoire.

- Il va être l'heure de déjeuner, est-ce que tu veux que je te laisse te reposer ou tu viens avec moi ?

- Je viens.

Ils préparèrent le déjeuner tous les deux, Harry éplucha les légumes pour la tourte végétarienne que Severus cuisina. L'appétit de Harry ne cessant de croître, Severus devait veiller à doser suffisamment les plats.

Ils mangèrent tout en discutant, la crise de la matinée déjà loin.

- Vous faisiez quoi à Poudlard ? demanda soudainement Harry.

- J'ai accueilli ton nouveau professeur de Défense contre les forces du Mal.

- Celui qui était ami avec mes parents ?

- Oui, le professeur Remus Lupin.

- Et alors ?

- Comment ça "et alors ?" ?

- Bah… Comment ça s'est passé ? Vous n'aviez pas l'air de beaucoup l'aimer quand vous m'en avez parlé la dernière fois à Pré-au-lard.

Ses émotions étaient-elles aussi visibles ou Harry le connaissait-il mieux que ce qu'il croyait ?

- Nous sommes allés à l'essentiel, répondit-il.

- Ça veut dire que c'était plutôt moyen.

- Disons les choses comme ça. Cela ne change rien au fait que tu lui dois le respect et que j'attends des bonnes notes dans cette matière. Tu as un don pour la Défense et les duels et il est hors de question que tu gâches ça.

- J'espère que ce sera un meilleur professeur que Lockhart. A ce propos, vous l'avez retrouvé ?

Soupirant à l'évocation de cet énergumène, Severus secoua la tête.

Des recherches avaient plus ou moins été établies mais Lockhart semblait s'être évaporé dans la nature. Des mouvements bancaires avaient été identifiés à Gringotts. Cependant, les gobelins étaient peu coopératifs. Par ailleurs, la fuite de Sirius Black mobilisait la majorité des Aurors. L'enquête demeurait donc au point mort.

S'il en avait eu le temps, le maître des potions aurait fait ses recherches par lui-même. Évidemment, les sorts de traçage ne fonctionnaient pas sur les sorciers aguerris mais il était certain de pouvoir mettre la main sur l'homme rapidement et lui asséner la déculotté de sa vie dans un combat le réduisant en miettes. Severus avait eu le temps de mouliner sa rancœur contre l'ancien professeur de Défense contre les forces du Mal.

- Il est introuvable pour le moment.

- J'espère qu'il ne lui est rien arrivé de grave.

Le regard inquiet de Harry était sincère et une bouffée d'affection envahit Severus. Il ne méritait pas ce gosse…

- Ne t'inquiète pas pour lui, rassura-t-il. Qu'en est-il de ton choix d'instruments de musique ?

- Je n'en sais rien du tout…

- Harry, prévint Severus d'un ton sévère.

- Je sais que c'est important pour plus tard et la magie de l'esprit mais je n'ai jamais été intéressé par la musique. Tante Pétunia n'a jamais jugé bon de nous inscrire à un instrument et Oncle Vernon disait que c'était un truc de drogué et de péd… Oups, pardon, se reprit de justesse Harry les joues rouges.

L'homme se doutait parfaitement que le garçon n'avait pas reçu une éducation des plus tolérantes. L'important était que Harry ne suive pas ce chemin. Il balaya les excuses du Survivant d'un geste nonchalant de la main.

- Ce que cet homme pense n'a aucune importance et aucune valeur.

Harry opina du chef et Severus chercha les mots pour poursuivre correctement la discussion.

- Mon père était un peu du même genre que ton oncle.

Les coups et l'alcoolisme en plus, pensa-t-il également. Harry releva brusquement le nez de son assiette.

- Ce… C'était un moldu ?

- A ton avis, comment aurais-je pu connaître ta maman ?

- Bah… A Poudlard ?

- En étant à Serpentard et elle à Gryffondor ? Sache que la rivalité entre ces deux maisons existe depuis la création de Poudlard.

- Dis comme ça, ça fait sens.

- On vivait dans deux quartiers différents mais un parc nous reliait. On s'est rencontrés là-bas.

- Oh.

Severus laissa Harry digérer ces nouvelles informations concernant Lily et lui. Il ne voulait pas le brusquer avec trop de souvenirs que lui-même avait du mal à formuler.

Au fil du temps, maintenant qu'il vivait pleinement sa vie, le maître des potions avait des difficultés à se rappeler de son passé avec Lily. Comme essayer d'attraper de la fumée avec les mains, plus il tentait de s'accrocher à un souvenir, moins il arrivait à se le remémorer. Il n'y avait plus qu'une sensation douce et agréable.

Comme à son habitude, Harry débarrassa la table sans que Severus ne demande quoi que ce soit. Lançant un sortilège de nettoyage, Severus put se concentrer sur ses lectures qu'il avait reçues le matin même sur les sortilèges de feu.

S'installant confortablement sur son fauteuil, il manqua de sursauter lorsque Harry débarqua à son tour dans la pièce. Il portait un énorme livre de potions que Severus avait laissé traîner dans la bibliothèque de l'enfant ainsi que son sac de cours.

Il ne fit aucune remarque et laissa le gamin travailler consciencieusement. Il était vrai qu'en dépit de vacances ressemblant à autre chose qu'à vivre la vie d'un elfe de maison, Severus avait offert peu de sorties à Harry. Même si le Gryffondor ne réclamait rien, le maître des potions s'autorisa à penser qu'une simple sortie en ville ne pourrait pas faire de mal, quitte à se métamorphoser un peu.

Pour des raisons évidentes de sécurité, Inverness n'était connue que de Dumbledore et Hestia Jones.

- Que dirais-tu de te rendre à un concert de musique classique avant d'aller chez les Weasley ? proposa le professeur de but en blanc.

Harry posa sa plume, étonné.

- Chez les moldus ?

- Il n'y a qu'un seul orchestre magique classique et je suis désolé de t'annoncer que les musiciens sont actuellement en tournée aux Etats-Unis. Donc oui, ce sera chez les moldus. Inverness propose plusieurs concerts au cours de l'été. Je pensais que ça t'aiderait à voir plus clair afin de choisir un instrument de musique.

L'homme savait parfaitement qu'il gonflait Harry avec cette histoire d'instrument. Mais plus tard, quand il faudrait commencer à utiliser la magie de l'esprit, le gamin le remercierait. L'apprentissage de la musique permettait de créer des rouages dans le cerveau qu'aucune autre activité ne pouvait offrir. Sans parler de la guerre qui arriverait tôt ou tard…

La guerre, c'est de la musique.

- On ira au restaurant après, ajouta Severus en guise de carotte.

Le Gryffondor tomba la tête la première dans l'appât et lui adressa un grand sourire avant d'opiner du chef.

Dire que quelques mois plus tôt, l'idée de manger rebutait l'enfant…

Le maître des potions retourna à son livre, notant ça et là des éléments qu'il connaissait déjà sur un bout de parchemin.

Au bout d'une heure, lorsqu'il releva la tête afin de se frotter les yeux et étirer ses jambes, il tomba sur un Harry endormi sur le canapé. Il n'avait même pas entendu le Gryffondor cesser ses devoirs tant il était inspiré par sa propre lecture.

Recroquevillé sur lui-même, Harry ne bougea pas lorsque Severus lui retira ses lunettes de son nez et le couvrit d'un plaid.

Retournant à la lecture, il sursauta et manqua d'insulter la personne qui osa allumer son feu de cheminée. Il ne pouvait y avoir que deux personnes dans cette situation…

- Jones, grinça-t-il. Silence ! Harry dort !

Le visage de la jeune femme disparue un instant avant de réapparaître avec son corps entier cette fois-ci. Sans un mot, l'homme se dirigea vers la cuisine qui, grande ouverte, lui permettait de garder un œil sur Harry.

- Thé ?

- Volontier.

Des mèches s'échappaient de la queue de cheval de la jeune femme qui lui donnaient un air loufoque. Ses grands yeux marrons se posaient sur tous les recoins de la pièce. Severus savait parfaitement qu'elle faisait un état des lieux de l'endroit où vivait Harry. Sachant qu'il n'avait strictement rien à se reprocher, il alla chercher deux tasses et en posa une devant la sorcière.

- Vous avez mis des objets moldus dans la pièce, constata-t-elle.

- Et donc ?

- Et donc c'est toujours un bon point pour votre tutelle aux yeux du Ministère. Même si entre nous, l'appui de Dumbledore est tel que je n'aurais pas à revenir souvent.

La femme lui lança un sourire amical auquel Severus répondit par un visage impassible. Il se méfiait des agents du Ministère de la Magie. Oui, Jones était une femme d'honneur et elle avait toute la confiance de Dumbledore. Cependant, tant qu'elle viendrait chez lui pour juger la façon dont il éduquait Harry, il ne pourrait la voir comme une alliée.

La femme porta son thé à ses lèvres et observa le Gryffondor endormi.

- Je suis venue dans l'optique de boucler mon dossier concernant la tutelle et donner un dernier avis favorable, expliqua-t-elle.

Plus intelligente qu'il ne l'aurait pensé, Severus salua la capacité de la femme à comprendre qu'il n'appréciait guère être visité par le Ministère.

- Je voulais également vous féliciter en personne et vous annoncer que votre potion d'aide au sommeil infantile a été validée par le Ministère.

- Qu'est-ce que c'est que ce nom ridicule ? Je n'ai jamais nommé ma potion de la sorte !

- Ils ont jugé que c'était le plus parlant. Mais enfin Severus, je vous annonce une bonne nouvelle !

Non, ce n'était pas une bonne nouvelle. Le nom de la potion était grotesque et désormais, dès qu'on chercherait des informations sur cette potion, son nom serait associé à celle-ci !

- Comment revenir dessus ? demanda-t-il en élevant la voix un peu fort au point de faire bouger Harry dans son sommeil au loin.

- Je ne crois pas que ce soit possible, répondit l'agent savez tout aussi bien que moi que la pharmacologie et ses laboratoires…

Hestia Jones laissa sa phrase en suspens et Severus ne put que soupirer de dépit. Au moins, il avait parfaitement négocié les parts qui iraient dans son compte en banque. Avec un enfant à charge, c'était loin d'être négligeable.

- Vous pouvez être fier de ce que vous êtes devenu. Je n'ai plus de raison de revenir. Évidemment, s'il y a un souci qui arrive aux oreilles du Ministère, vous me reverrez mais maintenant, j'ai fait mon travail. Si vous avez besoin…

Severus opina du chef pour avoir la paix. Les yeux rivés sur Harry, il vit que le gamin s'agitait dans son sommeil. Entre la matinée forte en émotions et l'absence de "potion d'aide au sommeil infantile" - par les glandes de Merlin, c'était un nom immonde - il était fort à parier que le sommeil de Harry en soit pertubé.

Il s'approcha à grandes enjambées du Gryffondor qui commençait à gémir et se battre contre des démons invisibles.

Habitué, Severus s'agenouilla à ses côtés et passa une main rassurante sur son front, oubliant par la même occasion la présence de Jones. S'il avait regardé la sorcière à cet instant, il aurait vu le sourire ému sur son visage.

- Doucement, chuchota-t-il lorsque Harry se débarrassa de son plaid d'un coup de pied dans un gémissement terrifié. Tout va bien, gamin.

Harry s'arqua, se retourna dans un cri déchirant et plongea dans les bras de son professeur, désormais tuteur. Severus le savait encore endormi et il se contenta de le serrer contre lui jusqu'à ce que ses pleurs cessent. Une fois la crise passée, il le reposa délicatement sur le canapé et remit le plaid sur Harry qui dormait à nouveau profondément.

Ce fût à cet instant que Severus tomba sur le regard attendri de Jones. Fronçant les sourcils, il se raidit de gène. Mais délicate, la jeune femme ne dit rien sur la petite scène dont elle avait été témoin.

- Je vous ai laissé un document concernant Harry. Trois fois rien, ajouta-t-elle en voyant l'air agacé de Severus qui en avait plus qu'assez de la paperasse. C'est un document à remplir sur les évolutions de Harry et comment il se sent chez vous.

- Si c'est pour savoir comment se sent Harry, ne serait-ce pas plutôt à lui de le remplir dans ce cas ? demanda-t-il fort à propos.

- Vous savez, le Ministère…

Jones avait la manie de ne jamais terminer ses phrases. Severus ne manqua cependant pas le ton irrité de la jeune femme.

Elle se dirigea vers la cheminée et jeta une poignée de poudre de cheminette.

- C'était un plaisir de vous rencontrer.

Severus lui serra la main, impassible mais inclinant tout de même la tête.

- On était à Poudlard ensemble, se sentit-elle obligée de préciser.

Pourquoi les gens aimaient-ils autant les discussions au raz des pâquerettes ? Severus s'évertuait à expliquer à Harry que lorsqu'on n'avait rien à dire, il valait mieux se taire. Mais les autres adultes ne cessaient de prouver le contraire. Résultat, il avait un moulin à paroles à la maison. Pour Harry, il faisait la discussion mais il ne chercha pas à réaliser le moindre effort avec Hestia Jones.

- Je sais.

- Ne vous êtes-vous jamais dit que votre place aurait été tout à fait appropriée à Serdaigle ?

- Absolument pas, répondit le professeur du tac au tac, un peu contrarié.

En réalité, le choixpeau avait longuement hésité à l'envoyer chez les bleus et bronze. Personne ne le savait et lui-même avait relégué ce souvenir loin dans sa tête. Lui à Serdaigle et c'était certainement un Severus qui n'aurait jamais été mangemort ni coupé les ponts avec Lily Evans. Il ne servait à rien de refaire le passé. Les choses étaient ainsi désormais et il n'avait pas besoin d'ajouter un peu plus d'amertume à sa vie. Particulièrement quand cette dite vie commençait enfin à lui sourire et où il n'était plus constamment en apnée.

- Très bien, dit-elle sans perdre son sourire. Dans ce cas, bonne journée.

oOo

Assis sur sa chaise de bureau, Harry attendait patiemment que son tuteur termine d'inspecter sa valise. Il lui avait déjà fait changer l'intégralité de sa trousse de toilettes - soit disant les produits étaient trop vieux - et il comptait minutieusement les paires de chaussettes.

- Tu n'as mis que trois paires, déclara l'homme. Tu restes deux semaines là-bas, pas trois jours.

- Mrs Weasley fait des machines tous les jours.

- Mrs Weasley n'est pas ta bonne à tout faire, claqua le professeur d'un air sévère. Tu me rajoutes des paires de chaussettes s'il te plait. Pareil pour tes sous-vêtements, je t'en ai acheté un paquet, ce n'est pas pour la décoration.

Roulant des yeux, Harry se dirigea vers son armoire pour récupérer les vêtements. Qui aurait cru que la chauve-souris des cachots aux cheveux gras était autant axée sur l'hygiène ? Il n'y avait pas un jour dans la semaine où le maître des potions s'assurait que le Gryffondor ait bien pris sa douche comme si c'était d'une importance capitale.

Harry s'apprêtait à ranger ses affaires dans sa nouvelle petite malle pour les voyages courts - il avait été décidé que le reste de ses vêtements seraient transférés avec le professeur lors de la rentrée- mais l'homme prit les devants et rangea en bonne et due forme les vêtements d'un mouvement de baguette.

- Très bien. Je vais ajouter tes potions et on peut y aller.

- Je n'en ai plus besoin je pense, déclara Harry les joues rouges. Je dors mieux maintenant.

Oui, il devait l'avouer, il n'aimait pas vraiment l'idée de prendre des potions pour dormir tel un petit enfant devant son ami Ron.

- Tu dors mieux parce que justement tu prends cette potion. Il n'y a aucune honte à avoir.

Harry haussa les épaules, peu convaincu par les mots de son tuteur. Mutique, il préféra gratter machinalement sa valise avec son doigt, attendant que le professeur apporte les potions.

- Je les mets ici. Tu prends deux gouttes le soir, tu pourras le faire ?

- Oui.

- Je te le note sur le flacon ?

Harry jeta un regard au professeur qui voulait dire "je ne suis pas débile" et l'homme se contenta de poser les fioles dans un recoin de la valise.

.

Ils arrivèrent au Terrier juste après le déjeuner. Ron et Harry se sautèrent dans les bras, beaucoup trop heureux de se retrouver. Fred et George proposèrent immédiatement une partie de Quidditch. Ginny Weasley, comme à son habitude, se contenta d'un sourire timide, les joues rouges et les lèvres définitivement closes.

Mrs Weasley avait entraîné le professeur de potions dans sa cuisine afin de lui servir un tas de gâteaux accompagné de thé.

Harry eut la vision soudaine de Tante Pétunia qui accueillait parfois à Privet Drive la maman de Malcolm, l'ami de Dudley. Les deux femmes échangeaient des banalités pointées d'hypocrisie. Il entendait encore Pétunia s'extasier des prouesses de Malcolm lors de son dernier match de football alors que tout le monde savait qu'aux yeux de Pétunia, aucun enfant n'arrivait à la cheville de Dudley.

L'idée de mettre en miroir Rogue et Mrs Weasley avec Pétunia et la mère de Malcolm était particulièrement hilarante. Il ne manquait plus qu'un énorme nœud rouge dans les cheveux du professeur et il remplissait parfaitement le rôle de mère-poule.

Ils jouèrent pendant plus d'une demi-heure, haut dans les airs, en poussant des hurlements de joie à chaque but.

Quand Ginny hurla à ses frères - visiblement, la fillette savait donner de la voix quand elle le souhaitait - qu'il était temps de rentrer car le professeur s'en allait, Harry ressentit une petite pointe d'appréhension à l'idée de se séparer de l'homme qui était déjà sur le pas de la porte. La tribu Weasley leur laissa un peu d'espace afin que le duo puisse se dire au revoir convenablement.

- Vous ne rentrez pas par poudre de cheminette, remarqua Harry.

- Je dois me rendre à Londres. Je préfère transplaner.

- Vous allez faire quoi pendant que je suis ici ?

Harry pensait seulement maintenant que l'homme allait se retrouver deux semaines seul à Inverness. Nul doute qu'il saurait s'occuper, il avait toujours un tas de choses à faire mais une préoccupation inexplicable agitait la tête du Gryffondor. Tout à coup, il avait besoin de poser cent-mille questions au professeur, juste pour qu'il reste encore un peu.

Le maître des potions fixa Harry quelques instants comme s'il était une potion étrange qu'il n'avait jamais vu. Puis, il se mit à marcher vers le portail des Weasley, Harry à ses côtés.

- Je dois signer quelques documents concernant la mise en marché de la potion que j'ai réalisée. Ensuite j'irai acheter ton piano qui nous suivra à Poudlard.

Harry sourit à l'évocation de ce souvenir. La veille, Rogue et lui s'étaient métamorphosés quelque peu afin de se rendre dans le centre-ville d'Inverness et plus particulièrement à la cathédrale St André où un orchestre symphonique jouait plusieurs morceaux.

En un coup de baguette, les cheveux de Harry étaient devenus châtains, plus longs et lisses. L'homme avait retouché le nez de Harry ainsi que ses lèvres. Le maître des potions avait joué sur les mêmes changements et à cet instant, l'un et l'autre passaient aisément pour père et fils.

Lorsque les notes s'étaient élevées dans la nef, des frissons avaient parcouru l'échine de Harry. Les musiques étaient toutes plus différentes les unes des autres. Harry en avait oublié l'objet de sa venue, à savoir choisir un instrument, tant les sons sublimaient le lieu sacré. Jusqu'au moment où une pianiste s'était installée. Ses doigts paraissaient flotter sur les touches de l'instrument et l'apaisement sur son visage était tel qu'il avait décidé que c'était de cet instrument qu'il voulait apprendre à jouer.

Le professeur paraissait soulagé qu'il ait enfin fait son choix. Ils avaient mangé ensuite dans un petit restaurant italien. D'aussi loin qu'il ne s'en souvienne, Harry n'avait jamais vécu une aussi belle après-midi.

- Tu auras tes leçons avec un excellent professeur le lundi après manger et le vendredi après-midi.

- Mais peut-être que j'aurais cours.

- Ne crois-tu quand même pas que je n'ai pas déjà tout arrangé à ce niveau là ?

Harry eut le bon goût d'adresser une grimace d'excuse. Le professeur avait déjà l'intégralité de la liste de fourniture à quelques matières près. Il était donc évident qu'il connaissait déjà l'emploi du temps de prévu pour les troisième années de Gryffondor.

Arrivés au portail, l'homme se tourna vers Harry.

- Je vais aussi me rendre à Paris pour des recherches. J'aurais aimé t'y emmener et je te promets qu'on le fera un jour.

Harry n'en croyait pas ses oreilles et son cœur s'emballa d'une excitation nouvelle. Il hocha la tête avec empressement.

- En attendant, je compte sur toi pour ne pas te mettre inutilement en danger. Si tu ne te sens pas bien, tu le dis à Mrs Weasley et elle saura quoi faire. Est-ce clair ?

- Oui monsieur.

- Viens ici, dit-il en empoignant Harry et le plaquant contre son torse.

Surpris de cette embrassade engagée par l'homme, Harry eut un temps de réaction avant de répondre à l'étreinte dans un soupir apaisé.

Puis le tuteur du garçon s'éloigna de quelques pas avant de disparaître dans un tourbillon de poussières.

Un vide s'installa en Harry mais dès qu'il fût en présence de Ron et de tous les Weasley, il se sentit tout de suite mieux. L'ambiance chaleureuse et l'odeur de nourriture qui commençait à s'élever dans la cuisine réconfortèrent Harry.

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A l'image de l'année précédente, les vacances au Terrier s'écoulèrent rapidement et dans une ambiance chaleureuse. Il y avait toujours du bruit, des rires, des chamailleries et surtout de la bonne nourriture. Molly s'assurait toujours que Harry mange une double ration, même lorsqu'il s'agissait de tarte à la mélasse.

Un soir, Mr Weasley rentra plus tôt du Ministère de la Magie, au plus grand bonheur de Mrs Weasley qui ne cessait de sourire à son mari. Il y avait toujours quelque chose de plaisant à voir l'amour entre deux personnes mais encore plus lorsqu'elles - aux yeux de Harry - étaient âgées. Le Gryffondor savait que Ron avait parfois honte de sa famille car ils n'avaient pas beaucoup d'argent mais Harry n'avait jamais rien trouvé d'aussi parfait. Des parents s'aimant de tout leur cœur et des enfants formant une fratrie soudée malgré les disputes, que demander de plus ?

- Amos m'a proposé une sortie au lac demain, déclara Mr Weasley à la fin du repas. Je me disais que ça pourrait être une idée de sortie tous ensemble.

- Cédric sera là ? demanda George Weasley avec intérêt. Il me doit six Mornilles, l'Angleterre a battu l'Ecosse et il disait que c'était impossible !

- Les choses risquent de changer avec l'Éclair de Feu qui arrive, lança Fred. En attendant, si on pouvait récupérer nos sous avant la fin de l'été, ça nous arrangerait.

- Je vous ai déjà dit d'arrêter ces paris stupides, gronda Mrs Weasley des éclairs dans les yeux. Mon chéri, est-ce bien prudent… Tu sais, avec tout ce qu'il se passe.

Le regard fuyant, Mrs Weasley regardait partout sauf vers Harry qui n'osa piper mot. Les jumeaux grimaçaient et semblaient déjà fomenter un plan pour que leur mère accepte qu'ils se rendent au lac.

- Enfin chérie, il y aura Amos, toi et moi. Bill est encore au Royaume-Uni, si nous l'invitons on se retrouverait en supériorité numérique et magique. Sans compter Percy et le fils d'Amos qui sont déjà bien avancés pour leur âge…

- De quoi est-ce que vous parlez ? demanda Ron, fort intéressé par la discussion. Pourquoi aurions-nous besoin d'être en supériorité numérique et magique ?

- Un évadé d'Azkaban rôde dans la nature Ron. Il serait bon de lire le journal de temps en temps tu sais, déclara Percy d'un air supérieur et dont les joues avaient pris une teinte rosée à l'évocation de son niveau en magie.

- On le sait déjà ça gros malin, répliqua Ron piqué au vif. Mais je ne vois pas ce que ferait Black dans le coin ! On ne va pas s'empêcher de vivre parce qu'un fou s'est échappé d'une prison. D'autant que les détraqueurs sont à ses trousses. Hein papa ?

- Au lit ! lança Mrs Weasley.

- On va au lac ou pas ? demanda Ginny.

Mrs Weasley lança un regard noir à son mari qui voulait dire "pourquoi as-tu parlé de ça devant les enfants ?" et Mr Weasley haussa les épaules, penaud. Tout le monde fût témoin de la discussion silencieuse entre les époux et lorsque Mrs Weasley réitéra l'ordre à tout le monde d'aller se coucher, l'intégralité des enfants obéirent sur le champ.

- Non mais qu'est-ce qu'ils nous cachent encore ? s'exclama Ron en fermant la porte de sa chambre. Je n'ai jamais vu maman aussi angoissée lors d'une discussion entre papa et elle.

- C'est à cause de moi, déclara simplement Harry en s'installant sur le lit de Ron. C'est quoi un détraqueur ?

- Comment ça à cause de toi ? Qu'est-ce que tu racontes ? Toi aussi t'as perdu la boule ?

- Sirius Black. Il cherchera forcément à me tuer. C'était un partisan de Vol… Tu-sais-qui.

- Mais…

- L'histoire est compliquée Ron, soupira Harry. Sirius Black était le meilleur ami de mon père. Un traître également. Il a vendu à Tu-sais-qui le lieu où se cachaient mes parents. Ensuite, il a tué treize personnes dont douze moldus. Tu veux connaître la meilleure ? C'était mon parrain.

Cette explication laissa à Harry un goût amer sur la langue. Formuler la situation était encore plus ignoble que de l'entendre. Ron s'était approché de Harry et semblait chercher ses mots. Avant qu'il n'ouvre la bouche, les jumeaux entrèrent dans la chambre sans prendre le temps de frapper.

- Il faut qu'on négocie pour aller à ce lac, déclara immédiatement Fred.

- Il est hors de question qu'on passe à côté de cette opportunité, continua George.

- On ne parle que de quelques Mornilles les gars !

- Petit frère, un sous est un sous. T'as grandi chez les Malefoy pour croire qu'on pouvait se passer de quelques Mornilles avant le début de la rentrée ou quoi ?

- Mon pauvre Fred, on ne pourra motiver notre frère qu'en lui offrant les meilleurs arguments. Je suis sûr qu'ils sauront convaincre Harry également.

Les bras croisés sur leur torse, les jumeaux affichaient une mine réjouie et déterminée des grands jours. Ron et Harry échangèrent un regard amusé, légèrement pris au jeu de leurs aînés.

- Les cousines du vieux Lovegood seront au lac, déclara George d'un air solennel. Et j'ai aussi entendu dire que Cédric Diggory avait réussi à convaincre quelques filles de venir.

- Même si on sait qu'il n'a pas vraiment eu besoin de les convaincre tellement elles sont toutes à ses pieds.

Harry était partagé entre la curiosité, le dégoût et l'envie. Un coup d'œil à Ron lui fit comprendre que son ami pensait pareil que lui. Ils éclatèrent de rire en même temps, grisés par les jumeaux. Harry se reprit le premier.

- Les gars, on aurait aimé vous suivre mais…

- Pas de mais !

- Fred, Sirius Black est mon parrain !

La surprise passée, les jumeaux s'installèrent à même le sol, écoutant Harry expliquer à nouveau qui était l'homme. S'ils s'amusèrent à l'idée que Rogue raconte toutes ces informations à Harry - ils le taquinèrent un peu, imaginant le professeur bordant Harry et lui racontant des histoires avant de dormir- les jumeaux montrèrent un grand intérêt quant à la question de l'amitié que pouvait avoir James Potter avec Sirius Black. Ils furent littéralement inspirés par les faits. Le dégoût face à la trahison de Black envers ses amis se lisait sur leur visage, signe évident qu'on ne jouait pas avec la loyauté chez les jumeaux.

- Écoute Harry, il est fort à parier que Black est loin d'ici, déclara finalement Fred. Papa a raison quand il dit qu'il y aura suffisamment d'adultes et de sorciers puissants pour contrer un seul évadé. Qui plus est, on ne sait même pas s'il a récupéré une baguette.

- Il a réussi à s'évader d'Azkaban, ce n'est pas rien.

- Qu'est-ce que tu peux être trouillard quand tu t'y mets Ron !

- De toute manière, maman demandera d'abord au professeur Rogue, dit George avant que Ron ne réplique. Le lac est protégé et si Bill est là, il n'y aura aucune raison de refuser.

Harry n'en fût pas si certain. Le professeur pouvait se montrer ultra-protecteur voire totalement étouffant lorsqu'il s'y mettait. Cependant, il avait accepté de le laisser venir au Terrier, preuve qu'il avait suffisamment confiance en les Weasley.

Mais la perspective d'aller au lac avec ses amis et peut-être voir de jolies filles…

- Il faut mettre toutes les chances de notre côté, déclara-t-il au milieu d'un silence. Comment faire pour que votre frère Bill vienne ? Je croyais qu'il était en Egypte ?

- Il est revenu avec nous et est resté quelques jours à la maison. Il en profite pour aller faire quelques missions pour son travail, expliqua Ron.

- Cinq noises qu'il retourne voir son ex-copine Paloma Davies ! lança Fred.

- Pari tenu, répondit automatiquement George.

- Il n'y aura aucun pari qui tienne si on ne va pas au lac, réfuta Ron.

- Ce sera très simple, déclara Fred.

Les jumeaux se regardèrent et échangèrent un sourire complice. Visiblement, en plus de se comprendre à la perfection, ils avaient un plan tout établi. Ils saluèrent Harry et Ron avant de filer un étage plus bas.

- C'est sportif avec eux, dit Harry dans un sourire. Est-ce que tu sais ce qu'ils vont faire ?

- Je pense qu'ils vont essayer de convaincre Ginny pour qu'elle supplie Bill de venir. Elle a une énorme force de persuasion quand elle le veut et surtout, c'est la préférée de notre frère. Je crois d'ailleurs qu'elle sera certainement la seule à parvenir à le faire venir ici. Il a eu sa dose de famille nombreuse et il a besoin de souffler.

- Ou de voir sa copine, ricana Harry.

- Ou de voir sa copine, répéta Ron dans un rire. Oh je t'en supplie Harry, faudra qu'on s'empêche mutuellement de devenir ce genre d'adolescents perturbés par leurs histoires d'amour à la mord moi le nœud.

- Aucun risque à ce que ça nous arrive à nous, promit-il.

oOo

Le Ministère de la Magie accueillait désormais Severus avec un regard nouveau.

Il n'était plus seulement un grand potionniste - qui par ailleurs avait déjà fait ses preuves - il était aussi le tuteur officiel de Harry Potter.

Désormais, des éclairs de curiosité rayonnaient dans le regard de certains sorciers et s'il avait toujours inspiré le respect de part son attitude, il y avait moins de crainte dans le regard de ses semblables.

Perché dans les étages du Ministère de la Magie donnant sur la cour intérieure, Severus faisait face à un investisseur et un représentant du Ministère.

L'investisseur, Mr Oberon s'écoutait parler tandis que le maître des potions luttait contre l'envie de regarder sa montre et s'enfuir. C'était un échange pourtant indispensable et s'il voulait faire fructifier ses ventes, il lui fallait des investisseurs.

- Voici donc mon offre Mr Rogue, déclara l'homme en déposant le parchemin devant ses yeux. Un investissement à hauteur de cinq-cent-mille gallion par an avec un retour sur bénéfice de quarante-cinq pour cent pour Oberon Investisseurs. C'est une offre qui tiendra jusqu'à demain midi.

- C'est une offre particulièrement intéressante, déclara le représentant des affaires économiques du monde magique, Mr Kyzarko.

Severus lutta pour étouffer un bruit moqueur. Bien évidemment que l'offre était intéressante. Surtout pour le Ministère qui gardait ses parts à vingt pour cent. Mais Severus lui, se faisait totalement rouler dans la farine. Par ailleurs, la durée de l'offre le faisait tiquer.

Il sortit à son tour un parchemin. Son contrat.

Mr Oberon était certainement l'investisseur le plus honnête - si l'on considérait que les termes "honnête" et "investissement" pouvaient s'associer. Les familles Nott, Malefoy et Parkinson avaient tenté de le joindre mais il préférait désormais demeurer loin de ces gens-là.

Mr Oberon, issue d'une famille de sorciers depuis sept générations, avait toujours réalisé ses projets dans son coin sans se vanter. Il avait acquis une certaine somme et influence dans le milieu économique et Severus n'avait rien à lui reprocher.

Cependant, l'homme aux cheveux gominés restait un homme d'affaires qui cherchait avant tout ses intérêts et Severus restait un serpent.

- Voici ma proposition, déclara-t-il d'une voix veloutée. Quarante pour cent chacun sur les bénéfices. En plus de cinq cent mille gallions par an, je souhaite trois-cents gallions par mois pour mes recherches ainsi qu'une participation à hauteur de cinquante pour cent dans les achats de mes ingrédients. Mon contrat exige qu'à chaque nouvelle création, quarante pour cent des bénéfices iront dans votre poche, Mr Oberon. De mon côté, je m'engage à proposer trois nouvelles potions par an, amélioration de potions existantes comprises.

- Trois nouvelles potions ? Mais enfin Mr Rogue, c'est quasiment impossible.

- Je suis le meilleur maître des potions de ce pays, voire d'Europe, ne me challengez pas Mr Kyzarko.

L'homme rougit violemment et se ratatina sur lui-même. Severus se concentra sur l'investisseur qui lisait le contrat, une ride de concentration barrant son front.

- C'est un contrat de trois ans renouvelable, ajouta-t-il.

- Mr Kyzarko a raison, déclara finalement Mr Oberon. Vous êtes talentueux, sans aucun doute. Mais qu'est-ce qui m'assurera que trois potions par an seront prêtes ?

Severus pointa avec sa baguette une petite ligne en bas de la page.

- Il est précisé ici qu'en cas de manquement à mes obligations, l'intégralité de mes parts vous reviendront.

L'homme en eut le souffle coupé et se tortilla sur sa chaise.

- Je suppose que vous savez dans quoi vous vous engagez…

Severus garda un masque d'impassibilité, refoulant sa joie lorsque l'homme apposa sa signature. Mr Kyzarko regardait le maître des potions comme s'il venait de signer son arrêt de mort. Severus savait parfaitement ce qu'il faisait. Trois potions par an ? Il en avait déjà une quinzaine en stock…

Ce n'était pas son salaire de professeur qui lui permettrait d'offrir les meilleurs vêtements, voyages et études supérieures à Harry. Un investissement comme celui-ci pouvait rapporter gros.

Une pointe d'excitation s'agita dans son ventre et il quitta le Ministère, un sourire fier aux lèvres, le sentiment du devoir accompli.

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C'est à la mode moldue que Severus se rendit à Paris. Il prit le tunnel sous la manche, ravi de trouver un anonymat au milieu de la foule. C'était aussi un bon moyen d'éviter de se retrouver face à Black. L'homme cherchait certainement à le retrouver maintenant que tout le monde savait qu'il était le tuteur de Harry Potter.

Non pas qu'il ait peur de se retrouver face à l'homme, bien au contraire. Mais il n'était pas certain de réussir à le rendre vivant au Ministère de la Magie si l'évadé se trouvait sur son chemin.

La chaleur parisienne écrasait la ville, quasiment vide en plein mois d'août. Il fallait cependant se rendre sur la place Montmartre où de nombreux touristes flânaient, pour aller à la Place Cachée, la rue commerçante sorcière.

Dans la puanteur du métro parisien, Severus regretta de ne pas avoir transplanné lorsqu'il tomba dans la rame où un chanteur-jongleur - le maître des potions en fît des cauchemars pendant plusieurs jours - braillait des chansons dans un anglais approximatif.

Severus fût soulagé d'arriver dans le dix-huitième arrondissement parisien sans encombre et se dirigea droit vers la Place Cachée. En haut d'une volée de marche, une statue de femme en robe écarta les bras lorsqu'il passa à côté. Via le socle, il accéda enfin au monde magique.

La rentrée approchant comme dans toutes les écoles d'Occident du monde sorcier, la rue était aussi bondée que le Chemin de Traverse.

Le maître des potions s'était déjà rendu à Paris plusieurs fois au cours de sa carrière et il y retrouva les boutiques habituelles de la Place. L'opulence et l'insouciance régnaient en maître. Encore en avance sur son rendez-vous, Severus en profita pour se rendre à la maison Cape Noire afin de se fournir en nouvelles robes. La qualité du tissu et le savoir-faire défiaient toute concurrence. Il commanda plusieurs robes et donna également les mesures de Harry afin qu'il ait de bonnes robes pour l'hiver.

Lui comme l'enfant n'avaient jamais eu l'occasion de porter des tenues de grande qualité. Maintenant que Severus en avait les moyens, il était hors de question de s'en priver.

C'est avec une certaine excitation qu'il pénétra chez le Dr Aziz Branchiflore père et filles. La boutique d'apothicaire contenait les meilleures plantes du monde à en faire pâlir Pomona Chourave. La propriétaire et vendeuse de la boutique reconnut le maître des potions d'un simple coup d'œil et le salua à voix basse.

Elle le laissa faire ses emplettes sans le déranger et le professeur salua intérieurement cette délicatesse. A Londres, le vendeur lui sautait constamment dessus, un sourire hypocrite accroché aux lèvres et le besoin de prouver qu'il avait les meilleurs ingrédients du pays.

Severus posa délicatement des racines de cactus de lune à la caisse. Les cheveux noir de jaie bouclés et épais attachés dans une queue de cheval donnait à la vendeuse un air sévère. Pourtant, lorsqu'un sourire s'afficha sur le visage de la femme, Severus ne put s'empêcher de constater la lumière de la bienveillance dans son regard. Il remarqua aussi qu'il la trouvait particulièrement jolie. C'était un sentiment étrange car il ne se rappelait plus la dernière fois qu'il avait trouvé une femme jolie. En réalité, il n'avait jamais trouvé aucune femme jolie depuis Lily. Mais là…Son teint olive, ses yeux chocolat et pétillant et cette intelligence qui brillait dans son regard lui firent baisser sa garde. Il s'autorisa presque à être un homme comme tant d'autres. Oui, il était jeune et oui, il pouvait trouver une femme belle et attirante. Il n'y avait rien de mal à cela, se répéta-t-il.

- Avec ceci Mr Rogue ? demanda-t-elle dans un anglais parfaitement maîtrisé mais dont l'accent français ajoutait une sonorité douce comme du miel.

- Ce sera tout.

- Je vous ajoute quelques échantillons de nos dernières trouvailles. Vous nous en donnerez des nouvelles.

Severus tenta d'accrocher un sourire à ses lèvres mais il eut la sensation à l'instant même où il retroussait ses lèvres qu'il ressemblait à un parfait idiot et s'en tint à hocher le menton. La femme semblait trouver cela amusant et souria de plus belle en poussant le sac de fournitures sur le comptoir tout en annonçant la somme.

- Je vous ai fait moins vingt pour cent, expliqua-t-elle lorsque le maître des potions afficha un regard confus. Ce n'est pas tous les jours qu'un aussi grand potionniste vient ici.

L'air taquin - et… séducteur ?! - de la jeune femme destabilisa Severus qui prit son sac avec précipitation et sortit de la boutique, heureux de retrouver l'air frais.

Fort heureusement, l'heure était suffisamment avancée pour ne pas se pencher sur ce qui venait de se passer. Severus se dirigea droit vers le Café Abringer.

Mrs Trembley attendait déjà à l'intérieur, un café posé devant elle. De taille moyenne, des mollets aussi ronds que ses joues, Mrs Trembley était de ce genre de femme dont l'aristrocracie se voyait rien qu'à son port de tête. Elle se fondait parfaitement dans la décoration style art-nouveau. Tout rappelait ici la Belle-époque, des tapisseries rouges aux ornements végétaux des meubles. La lumière basse donnait à la pièce un air intimiste et secret.

Un sourire de convenance et un baise-main plus tard, Severus écoutait Mrs Tremblay - Mahaut de son prénom - expliquer les différentes étapes pour se rendre dans les archives de la Sorbonne, catégorie sorcière.

Elle demanda à Severus de remplir un tas de documents tous plus répétitifs et inutiles les uns que les autres. Dumbledore avait prévenu le maître des potions que les français aimaient beaucoup la paperasse. Il ne l'avait cependant pas prévenu qu'il y avait souvent un air de séduction mêlé à de l'assurance excessive dans le regard de certaines femmes.

En sortant du rendez-vous, l'heure et le mot de passe fourni pour les archives, Severus se demanda s'il avait été ensorcelé en arrivant à Paris.

Il avait la sensation d'avoir à nouveau quinze ans et de déborder de pensées libidineuses, perturbé par le moindre regard qu'une femme posait sur lui.

Était-ce la liberté de n'avoir à s'occuper que de lui ? Le besoin de relâcher la pression ? Le sentiment de se sentir comblé ? Il n'en savait strictement rien mais Paris réveillait en lui des sensations qu'il avait longtemps enfouies.

Il décida de passer sa soirée dans le Paris moldu, à l'abri de tous les regards sorciers. Et lorsqu'il se vit offrir un verre de champagne par une femme attablée à un bar, il s'autorisa à être simplement un homme.

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La Sorbonne - bien que officiellement moldue - respirait la magie. Severus marchait au côté de Mrs Tremblay au cœur des couloirs tout en repérant chacun des lieux. Les pierres blanches et le sol ancien donnaient un air religieux à l'édifice.

- La rentrée étudiante n'a pas encore commencé, vous avez de la chance, déclara-t-elle avant de s'arrêter devant un tableau. Les couloirs grouillent de monde à cette heure-ci.

Les deux mains levées, elle marmonna une litanie en français. Quelques secondes plus tard, Mrs Tremblay entraînait Severus à travers le tableau qui menait aussitôt sur des escaliers. Descendant dans les entrailles du bâtiment, l'exaltation motiva Severus à accélérer le pas.

Il voulait découvrir les lieux mais espérait grandement trouver des informations sur le Feudeymon.

La pièce, vaste et sombre, paraissait vide à première vue. Mais après quelques secondes, les colonnes qui soutenaient les différentes voûtes laissèrent apparaître des pans entiers de parchemins et livres à l'intérieur de celles-ci.

Suivant Mrs Tremblay, Severus constata qu'il ne pouvait lire ce qui était affiché sur les ouvrages. Une protection magique bien utile. Il sut qu'il avait atteint la zone autorisée lorsqu'il fut à même de déchiffrer les titres des volumes.

- Je vous laisse ici Mr Rogue. Si vous avez besoin, lancez des étincelles rouges.

La femme ne perdit pas plus de temps et s'en alla d'un pas vif et pressé. Dans un même mouvement, Severus entreprit de sortir le premier livre sur les sortilèges de Magie Noire et entama sa lecture.

A la fin de la journée, le maître des potions retourna immédiatement à son hôtel, la tête en feu. Lire dans une langue étrangère était toujours fastidieux au début. Il savait qu'il prendrait moins de temps le lendemain mais il fût difficile de ne pas perdre le moral : pour le moment, rien n'indiquait qu'il trouverait plus d'informations.

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Severus fût réveillé tôt le matin par la chouette de Harry, Hedwige. Soudainement inquiet, l'homme se précipita pour ouvrir à l'animal qui se percha immédiatement sur l'armoire pour trouver un peu de repos.

L'écriture n'était pas celle de Harry, ce qui l'inquiéta davantage. Sans commune mesure, il déchira l'enveloppe et parcourut le courrier dans un soupir de soulagement.

Mrs Weasley demandait l'autorisation à l'homme d'emmener Harry au lac le plus proche de la maison avec les autres membres de la famille Weasley. Elle assurait que plusieurs adultes seraient présents dont Bill Weasley et Amos Diggory.

Severus fût longtemps partagé mais il ne pouvait mettre Harry dans une bulle. Le simple fait qu'on lui demande l'autorisation augmentait la confiance de Severus dans la capacité de Mrs Weasley à bien s'occuper de sa pupille.

Une boule désagréable qu'il mit un temps à identifier lui contracta l'estomac.

Manque.

Harry lui manquait profondément et réellement.

Il répondit à Mrs Weasley par la positive et descendit au café du coin pour prendre un petit déjeuner made in France qu'il savoura puis acheta une carte postale. Il écrivit quelques mots et, avant de se rendre aux archives de la Sorbonne, donna les courriers à Hedwige.

- Repose-toi avant d'y aller, lui dit-il en lui donnant quelques gâteaux. Je laisse la fenêtre ouverte.

L'oiseau roucoula avant de fermer les yeux.


Note de l'autrice : Un chapitre très fluffy qui j'espère ne vous aura pas trop écœuré. Rassurez-vous ça ne sera pas toujours comme ça.

Merci à ma Béta-reader Livia Tournois.

Pour information, par rapport aux options, je préviens immédiatement, toute la trame du canon avec Hermione qui est obligée de prendre un retourneur de temps pour suivre tous les cours, ne sera pas respectée. Au delà du fait que cette boucle temporelle, un lecteur sur deux n'y pige rien (je ne parle même pas de l'Enfant Maudit où les bases n'ont même pas été respectées même si R. a lâché sa plus belle signature), il n'est de toute façon pas logique de ne pas pouvoir prendre certains duos de cours optionnel. Comment faire si un élève choisit Arithmancie ET Divination ? Donc j'ai réglé le problème en disant ici que les cours optionnels sont correctement repartis dans la semaine. Tout simplement. J'en suis même allée jusqu'à rédiger un EDT à la fois pour Harry et pour Severus XD (et franchement, on finit par comprendre pourquoi il est totalement aigrie avec le nombre de cours qu'il a à assurer). Même chose pour les cours de Remus. Lorsqu'il sera absent, il ne sera pas remplacé par Severus. C'est techniquement IMPOSSIBLE. Il aurait fallu que R. annonce qu'il y avait deux professeurs par matières voire trois pour que cela soit réalisable.

Indices - sans spoiler - pour le programme du prochain chapitre : vacances, connaissances, hormones.

Au 17 mai !