Chapitre 40

Ce jeudi matin 1er septembre, le quai du Poudlard Express grouillait de monde. Il était difficilement possible de voir à plus de trois mètres tant la foule était compacte.

Drago Malefoy n'hésita pas une seconde à jouer des coudes pour pousser les élèves trop lents. Ses regards froids et son attitude hautaine empêchaient quiconque de protester.

Ses parents l'avaient laissé au bout du quai et les étreintes avaient été brèves, chargées de tension.

Sa mère lui avait glissé à l'oreille de se ressaisir et que tout finirait par s'arranger.

Enfin installé dans un compartiment vide, Drago se laissa aller à un soupir. La honte le submergeait et l'inquiétude le rongeait.

Il observa le quai quelques instants. Un groupe de Poufsouffle criait de joie et se serrait dans les bras, heureux de se retrouver.

Amer, Drago croisa les bras sur sa poitrine. L'idée même de retrouver Crabbe et Goyle le rebutait. Ils étaient utiles pour marcher dans les couloirs ou gonfler son égo mais pour le reste, les deux garçons ne valaient rien.

Et pour la première fois, il aurait aimé avoir un véritable ami pour discuter et échanger.

Le cours de ses pensées taciturnes furent interrompues quand Théodore Nott pénétra dans le compartiment.

- Drago.

- Théo.

Le brun avait grandi de plusieurs centimètres mais son air sinistre demeurait sur son visage. A peine installé, ce dernier se saisit d'un livre. Drago s'attendit à le voir imiter Granger et se plonger aussitôt dans son grimoire mais il resta droit comme un i, semblant chercher à démarrer la conversation.

Le blond se retint de ricaner. Théodore Nott était un garçon solitaire. Bien sûr, il ne rechignait jamais à une partie d'échec avec Blaise Zabini ou une séance de spiritisme lorsque Daphnée Greengrass et Tracey Davis le proposaient mais c'était le genre de garçon qui s'effaçait dès lors qu'il y avait trop de monde et d'agitation. Drago trouvait que cela lui donnait un air particulièrement arrogant.

Mais le monde sorcier changeait et eux grandissaient. Et Théodore avait certainement été briefé par son père : il était temps de se faire de bonnes relations.

En bon prince, Drago lança la conversation :

- Alors, ces vacances ?

- Instructives. Je suis allé chez ma tante maternelle en Suisse. Et toi ?

- Quelques visites dans la famille également.

Drago hésita un instant avant de prendre la parole et Théodore le devança :

- J'ai croisé Pansy sur le quai. Elle discutait avec Millicent. Enfin quand je dis qu'elle discutait, disons plutôt qu'elle se lamentait d'une situation qui te concerne. Tu devrais lui dire de se faire plus discrète.

Drago sentit ses joues le brûler de honte et de colère. Quelle idiote ! Cette fille ne savait pas tenir sa langue.

- Rassure-toi, ajouta Théodore avant que le blond n'explose, tout le monde était bien trop occupé à ses propres affaires pour l'écouter se plaindre.

- Elle va m'entendre, déclara-t-il la voix chargée de rancœur.

Ce début d'année commençait très mal. Plus que tout, il se sentait tellement en colère contre lui-même qu'il aurait pu en pleurer.

- Je ne suis pas certain que ce soit une bonne idée. Du moins, attends d'être en tête à tête avec elle, à l'abri des oreilles indiscrètes.

- J'ai vraiment déconné, lâcha Drago.

Il ne savait même pas pourquoi il se confiait ainsi, baissant totalement sa garde. Mais Théodore était issue d'une grande famille sorcière et il faisait partie des rares élèves que Drago considérait comme son égal.

- Ma mère disait souvent qu'avant d'être des grands sorciers descendants de la noblesse, nous étions aussi des êtres humains.

- C'est marrant, moi ma mère a dit que faire preuve de noblesse, c'est de ne pas se vautrer dans tous les plumards.

Après tout, si Pansy piaillait à son amie ce qu'il s'était produit, il n'y avait plus grand chose à cacher.

- Euh… Vous avez été… pris sur le fait ? demanda Théo les joues rouges.

- Merlin non ! Encore heureux ! souffla Drago tout aussi embarrassé que son interlocuteur.

C'était la première fois qu'il avait une discussion aussi intime avec quelqu'un. Et plus étonnant, c'était étrangement facile de parler à Théo. Le brun hocha la tête, à l'écoute.

- On a été surpris après… Le père de Pansy a hurlé sur mon père, indiquant que je dévergonde sa fille. Ouais, ajouta Drago dans un sourire équivoque face au ricanement de Théo. Enfin bref, j'ai vraiment cru qu'un duel allait éclater mais ma mère a calmé le jeu. Pansy et son père sont partis et ma mère a demandé à mon père de trouver la raison pour laquelle Pansy avait réussi à pénétrer chez nous.

Alors que l'apaisement commençait à le gagner, l'angoisse revint à la charge.

- Notre elfe de maison a été sévèrement punie, conclut Drago d'un ton qu'il essaya de garder le plus neutre possible.

Il ne savait pas pourquoi la peine le gagnait ainsi. Dobby n'était qu'un elfe de maison et Drago l'avait si souvent entendu se faire battre que cela en devenait presque une habitude. Mais cette fois, il y avait quelque chose de différent. L'ambiance lourde dans le manoir tout au long de l'été, les messes basses entre ses parents, les visites de personnalité peu fréquentables… Et puis, Dobby n'y était pour rien cette fois-ci. Pansy était simplement bien plus rusée.

Perdu dans les souvenirs des hurlements de l'elfe couplés aux coups de bâton, le Serpentard n'entendit pas la porte compartiment s'ouvrir. Lorsqu'il revint à lui, Vincent, Gregory et Blaise discutaient de l'emploi du temps qu'ils espéraient avoir cette année. Théo, plongé dans son livre, lisait comme s'il n'y avait eu aucune conversation entre les deux quelques secondes plus tôt.

Drago porta son regard sur l'extérieur. Aux dernières nouvelles, Dobby était allité dans son cagibi. Dans un élan de pitié, Drago avait donné de l'eau à l'elfe.

- Vous êtes aussi bon que Harry Potter, monsieur Drago.

Au loin, Potter et toute sa clique arrivaient en courant.

oOo

La matinée avait filé comme l'éclair.

Harry et Severus avaient retrouvé Sirius et Remus à Londres. A peine avaient-ils eu le temps de se saluer que le clan Weasley et Hermione étaient arrivés, chargés comme des mules.

Puis, le fameux Alastor Maugrey, que tout le monde nommait Fol l'Oeil, avait surgi de nulle part en criant sur la troupe qu'il ne fallait pas rester là.

Dix minutes plus tard, Harry, Ron et Hermione trouvèrent enfin un compartiment libre, au même moment où le Poudlard Express se mit en branle.

- Fiou ! lâcha Ron en s'affalant sur la banquette. C'était moins une ! Es-tu certain que Rogue et Sirius ne vont pas s'entretuer ?

Harry offrit un sourire amusé à son ami. Les deux sorciers étaient de ronde dans le Poudlard Express.

- Si jamais on entend une explosion, on pourra toujours s'inquiéter, répondit Harry qui prit place aux côtés d'Hermione.

Après quelques rires, un ange passa.

Harry savait très bien d'où venait cette ambiance pesante. Il n'avait jamais répondu à leur courrier durant le mois d'août. Il aurait aimé leur expliquer qu'il avait beaucoup trop de choses à penser. Il devait travailler encore et encore pour être prêt. Sans compter le fait qu'il ne savait pas comment gérer la place que ses amis devaient avoir dans toute cette guerre qui se préparait. Ron et Hermione avaient toujours été présents pour lui mais cette fois, la situation était différente. Severus lui rappelait tous les jours que les adultes étaient là pour gérer la situation.

- Euh… Au fait… Désolé pour…

- Non mais qu'est-ce que ça pue dans le couloir ! coupa une voix. Encore quelqu'un qui veut imiter un troll des montagnes ou quoi ?

- On appelle cela des adolescents, ma chère sœur !

Ginny, Fred et George venaient de pénétrer dans le compartiment, éclatant au passage la bulle de malaise qui commençait à enfler.

- Désolé les gars, y'a plus de place nulle part ! lança George tout en rangeant sa valise dans l'espace à bagage. Vous allez devoir nous supporter.

Et pour la première fois en quatre ans, le trio ne trouva rien à redire à ce qu'on pénètre dans leur cocon, bien au contraire.

Ginny lança une partie de carte explosive et en quelques secondes, tout le monde fut détendu. Harry se prit même au jeu d'être un adolescent comme tous les autres, oubliant l'espace d'un instant qu'il était le Survivant.

Quand Ron lui envoya un sourire amical et Hermione le serra dans ses bras lorsqu'ils gagnèrent la partie en duo, une bouffée d'amour l'envahit. Il avait été bien stupide de mettre ses amis de côté durant l'été.

.

Le trajet se déroula sans encombre et l'estomac de Harry commençait à sérieusement crier famine lorsque les élèves de première année arrivèrent enfin dans la Grande Salle. Ron et Harry discutaient comme s'ils ne s'étaient pas quittés la veille. Le garçon avait appris un tas de choses concernant les dragons car son frère Charlie rejoignait régulièrement le Royaume-Uni pour les réunions de l'Ordre du Phénix.

Harry accusa un peu le coup car Severus ne lui en avait pas dit autant à ce propos. Bien sûr, Harry connaissait l'existence de l'Ordre mais son tuteur se montrait extrêmement discret à ce sujet.

Le vieux Choixpeau s'agita, signe que la répartition allait débuter.

Soudain, ce fut le noir complet, le silence total. Harry eut l'impression de tomber de dix étages. Il attrapa instinctivement le rebord de la table et sa tête tourna frénétiquement.

Que se passait-il ? Poudlard était-elle attaquée ?

Au loin, il entendit le fracas des applaudissements de la Grande Salle.

Et il comprit enfin ce qu'il se passait.

Ça recommençait… Comme la nuit de son anniversaire. A deux doigts de céder à la panique, Harry inspira profondément, cherchant à rassembler toute sa force mentale.

- Lumos !

Devant lui, au milieu d'une forêt, l'homme qui avait égorgé la pauvre femme quelques semaines plus tôt et l'avait donné en repas à ses affreuses bêtes.

Il devait se concentrer, chasser la terreur qui menaçait d'exploser. Mais Harry était loin de maîtriser la Magie de l'Esprit. Sans parler du fait qu'une partie de lui, un brin coupable et honteuse, voulait savoir ce qu'il se passait.

- Tout est prêt, maître, dit l'homme aux bêtes.

Il devait quitter cette connection avant que Voldemort se rende compte de sa présence. Harry se concentra pour étendre ses barrières de protection, concentrant son esprit sur le tic tac d'un métronome imaginaire.

Peu à peu, le bruit de Poudlard revint à lui. Il s'y accrocha et glissa son esprit délicatement vers sa réalité. L'odeur typique de la Grande Salle, les cris des élèves et la main sur son épaule l'aida à revenir à lui.

Il mit plusieurs secondes avant de ne plus sentir l'odeur de cette forêt de pins dans laquelle il se trouvait quelques instants plus tôt.

La main fit pression sur son épaule et il s'accrocha à cette dernière.

- Harry ! Harry est-ce que ça va ?

Enfin, il redressa son visage. La lumière l'agressa et un mal de tête lancinant s'installa aussitôt. A ses côtés, Hermione l'observait avec inquiétude.

Il retira sa main qui s'accrochait à celle d'Hermione tout en hochant la tête.

Autour de lui, Ron, Parvati Patil et Dean Thomas semblaient aussi avoir constaté son absence.

- Ça va mon pote ? demanda Ron. Est-ce que tu veux sortir cinq minutes ? La répartition est bientôt terminée.

- Non, non, ça va, dit Harry la voix rauque. J'ai juste eu un petit coup de mou. Il est temps qu'on mange.

- Ne t'inquiète pas Harry, ça ira mieux ce soir, lâcha Parvati d'un air déterminé avant de retourner son attention vers l'élève de première année envoyée à Poufsouffle.

Dean proposa une chocogrenouille que Harry refusa poliment. Ne souhaitant pas discuter avec ses amis et les jambes encore tremblantes, il porta son attention sur la répartition.

- Cauldwell, Owen ! appelait le professeur McGonagall.

- Poufsouffle !

Les mains tremblantes, Harry s'efforça d'applaudir.

- Crivey, Dennis !

Un jeune garçon plus petit que les autres avança. Trempé comme une soupe, il portait sur les épaules le manteau de Hagrid qui trainait sur le sol.

- Harry ! appela Colin Crivey. C'est mon petit frère, lui aussi est un sorcier !

Le garçon de troisième année paraissait très fier de son petit frère et Harry comprit enfin pourquoi Colin avait cherché à lui parler depuis qu'il avait mis les pieds dans la Grande Salle. Afin d'avoir la paix, Harry envoya un pouce en l'air dans un sourire qu'il essaya de rendre enthousiaste.

- Gryffondor !

Le dénommé Dennis se dépêcha de rejoindre son frère et de s'installer à ses côtés, le sourire jusqu'aux oreilles.

- Tu ne devineras jamais ! Je suis tombé dans le lac ! C'était incroyable ! s'exclama-t-il d'une voix aiguë. Quelque chose m'a rattrapé et m'a déposé dans une barque.

- C'est le calamar géant, expliqua Ron.

Colin fit les présentations et alors qu'il s'apprêtait à entrer dans un discours chargé de louange pour Harry, la préfète de Gryffondor leur demanda de faire moins de bruit.

Harry étouffa un soupir de soulagement. Il avait mal à la tête et s'agaçait de cette répartition. Il devait d'autant plus concentrer son esprit pour ne pas se laisser happer par celui Voldemort. Pourtant, il ressentait en lui une excitation qui n'était pas la sienne au point où sa faim avait totalement disparu. Tout ce qu'il souhaitait, c'était de retrouver Severus et lui expliquer ce qu'il avait vu.

Il se préparait quelque chose et compte-tenu de ce qu'il avait ressenti - et qu'il ressentait encore - il s'agissait d'un gros coup.

Il écouta à peine la fin de la répartition. Il semblait y avoir beaucoup d'élèves à Serdaigle et Poufsouffle cette année. Gryffondor s'agrandissait de trois filles et trois garçons.

- Il était temps, dit Ron qui saisit ses couverts et fixa son assiette d'or, attendant qu'elle se remplisse.

Le professeur Dumbledore s'était levé. Dans un sourire chaleureux, il ouvrit les bras dans un geste de bienvenue.

- Je vous souhaite à tous la bienvenue à Poudlard, déclara-t-il. Je vous demanderai de ne pas quitter la Grande Salle avant la fin du festin. Mais en attendant, bon appétit !

Une farandole de plats tous aussi appétissants les uns que les autres apparurent. Harry se saisit aussitôt d'une cuisse de poulet et de frites. L'inquiétude le rongeait toujours autant mais la nourriture l'appelait au réconfort à cet instant.

- Vous savez, déclara Hermione, j'ai réfléchi et me suis renseignée cet été et je trouve cela particulièrement aberrant que les elfes de maison n'aient ni salaire, ni retraite.

Nick-Quasi-Sans-Tête, le fantôme de Gryffondor qui flottait par là, s'approcha d'Hermione, le visage amusé.

- Mais enfin Miss Granger, les elfes ne souhaitent pas ce genre de choses !

- C'est ce que je me tue à lui expliquer depuis deux ans mais elle n'en fait qu'à sa tête, expliqua Ron avant d'enfourner trois choux de Bruxelles d'un coup dans sa bouche.

Hermione foudroya Ron du regard avant de porter son attention au fantôme.

- Je pense que c'est parce qu'ils sont conditionnés à penser comme cela. Mais ce sont des êtres vivants avec des sentiments et ils ne sont guère différents de nous. Ils devraient avoir des droits. A minima, ne pas être traité comme des moins que rien.

- Tu es vraiment utopiste lorsque tu t'y mets Hermione, dit Seamus Finnigan en levant les yeux au ciel. Est-ce que tu as déjà discuté avec un elfe une fois dans ta vie au moins ?

- Bien sûr que oui ! répliqua Hermione les joues rouges.

Seamus éclata de rire comme si elle venait de sortir un énorme mensonge.

- Arrête de rire face de pet, lança Ron. Je suis témoin et Harry aussi. Hermione a déjà discuté avec un elfe. Mais bon, c'était quand même un cas particulier et une exception de ce qu'on peut voir. C'est d'ailleurs à cause de lui que lui vient cette obsession hystérique de défense des elfes.

- Vraiment Ron, tu ne peux pas me défendre sans me rabaisser la minute d'après ? s'énerva-t-elle.

- Non mais qu'est-ce que j'ai dit ?

Alors qu'ils se chamaillaient, Harry pensa à Dobby, l'elfe de maison de Malefoy. Harry ne connaissait pas grand chose aux elfes si ce n'est le discours commun entendu partout. Il savait aussi qu'il était dit des choses fausses comme le fait que les elfes étaient stupides et mauvais magiciens. Pour ce qu'il avait vu de Dobby, l'elfe était intelligent et puissant. Si seulement il avait pu le libérer…

- Mais sinon Hermione, qu'est-ce que tu voudrais faire pour les elfes ? demanda Parvati, coupant court à la dispute entre les deux amis.

Flattée qu'on lui demande, Hermione offrit un sourire à sa camarade de classe et de chambrée. A côté, Lavande Brown suivait la discussion avec surprise. Il était admis que les deux jeunes filles étaient meilleures amies et qu'Hermione, seule fille restante de Gryffondor, se trouvait bien souvent à part.

- J'aimerais monter une association de défense pour la libération des elfes de maison.

Seamus étouffa son sourire moqueur et Ron leva les yeux au ciel. Parvati et Lavande ne cachèrent pas leur surprise mais hochèrent la tête.

- C'est une idée… intéressante, dit Parvati.

- Tu devrais quand même continuer de te renseigner et faire les choses par étapes, ajouta Lavande.

Hermione opina du chef, heureuse qu'on l'écoute sans se moquer d'elle.

- Ne vous inquiétez pas pour moi ! Et je compte sur vous lorsque j'aurais monté mon association ! Mais j'ai d'abord une proposition à faire à Dumbledore.

Au loin, le directeur discutait avec Maugrey Fol Oeil. A ses côtés, Sirius Black dévorait son plat, les yeux brillants de joie, comme s'il était au paradis.

- A ce propos, est-ce que vous croyez que le directeur a choisi un ancien détenu comme nouveau professeur de Défense contre les forces du Mal ? demanda Dean.

- Il a été innocenté, précisa Harry aussitôt.

- Il y a quand même des zones d'ombre, déclara Seamus.

- T'as décidé d'être le roi des chiants cette année ou quoi ? lança Ron. Sirius Black a été innocenté, fin de la discussion. Et quand tu verras quel chic type c'est, tu reviendras sur tes paroles !

Seamus haussa les épaules et retourna à sa purée de carottes.

- Pour répondre à ta question, Sirius Black n'est pas le nouveau professeur de Défense, expliqua Harry à Dean. Est-ce que tu vois le sorcier avec les cicatrices sur le visage et la prothèse oculaire ? C'est lui ! Maugrey Fol Oeil, un excellent Auror.

- Alors qu'est-ce que Sirius Black fait ici ? demanda Colin.

Harry s'apprêtait à répondre quand les desserts firent leur apparition au point où le fil de la discussion se perdit.

Finalement, ce fut à la fin du repas que les présentations du corps enseignant eurent lieu.

Dumbledore présenta donc le nouveau professeur de Défense contre les forces du Mal puis Sirius Black.

- Mr Black sera gardien des clés et des lieux à Poudlard, le professeur Hagrid étant déjà bien occupé. Mr Black sera chargé de la sécurité dans l'enceinte du château. Il sera aussi un appui pour la directrice adjointe, le professeur McGonagall.

Tout le monde applaudit poliment et quelques murmures s'élevèrent.

- L'air de rien, le professeur Dumbledore le place sur un rôle clé, marmonna Hermione.

Harry opina du chef. Il savait que Sirius venait à Poudlard mais l'homme était resté évasif sur le poste qu'il occuperait. Harry avait suffisamment vu Severus vérifier les sécurités à Inverness pour savoir que Sirius aurait du pain sur planche. Sans compter le braconnage dans la forêt interdite dont Harry avait plusieurs fois entendu parler.

- Dumbledore a été intelligent. Sirius travaillera à la fois avec Hagrid et le professeur McGonagall. Ça l'empêchera de se sentir seul, déclara Harry.

Jetant un coup d'œil au maître des potions, c'était aussi un moyen de laisser les deux anciens ennemis suffisamment éloignés pour que les rancoeurs du passé restent là où elles étaient.

Severus semblait s'impatienter. Avait-il vu Harry faire son malaise ?

Leurs regards se croisèrent. Harry n'eut pas besoin de déchiffrer le visage de l'homme, il savait déjà qu'il viendrait le voir dans la soirée, une fois ses obligations terminées.

- J'ai également une grande annonce à vous faire ! lança le directeur de Poudlard après avoir énuméré les règles de l'école. Cette année, Poudlard accueillera un évènement légendaire dans les mois qui arrivent. Un évènement que nous n'avons pas vu depuis plus d'un siècle, j'ai nommé : le tournoi des trois sorciers !

Une grande partie de la salle s'exclama de joie. Harry fronça les sourcils et jeta un œil à Severus qui haussa les épaules, l'air de dire "c'est comme ça".

- Vous PLAISANTEZ ! cria Fred Weasley sous les rires de ses camarades.

- C'est de la folie ! chuchota Hermione à l'oreille de Harry. Avec tout ce qu'il se passe…

- Le tournoi de trois sorciers est une compétition amicale entre les trois grandes écoles de sorcellerie d'Europe : Beauxbâtons et Durmstrang. C'est une compétition amicale qui a commencé il y a sept cents ans environ. Pour les amoureux d'histoire, je vous laisse ajouter vos précisions à vos camarades à la fin de mon discours. Lors de cette compétition, un élève de chaque école est sélectionné en tant que champion. Les trois champions accomplissent trois tâches à caractère magique. A l'époque, chaque école accueillait le tournoi à tour de rôle tous les cinq ans. C'est l'occasion d'établir des relations internationales entre jeunes sorciers et sorcières d'Europe. Cependant, le tournoi a cessé d'exister, faute aux trop nombreuses morts qui ont eu lieu.

- Ah parce qu'en plus il y avait des morts ?! souffla Hermione, effarée.

Beaucoup d'élèves parlaient à voix basses. Tous semblaient enthousiastes. Ron et Harry échangèrent un long regard lourd de sens.

- Cependant, cette année, le Département de la coopération magique internationale et celui des jeux et sports magiques ont estimé que le moment était venu de remettre en place ces jeux. Nous avons beaucoup travaillé au cours de l'été pour nous assurer que ces jeux seraient réalisés dans la sécurité la plus totale et qu'aucun champion ne se trouvera en danger de mort.

Harry eut la soudaine envie d'éclater de rire. Au fond de lui, il savait déjà que tout allait se finir en drame et qu'il se trouverait au première loge de tout ça.

- Les responsables de Beauxbâtons et de Durmstrang arriveront fin octobre avec leurs élèves présélectionnés. Un juge impartial décidera quels sont les élèves qui sont les plus dignes de concourir pour le Trophée des Trois Sorciers.

A chaque table, on pouvait voir des élèves chuchoter avec ferveur ou regarder Dumbledore d'un air radieux. En balayant du regard la table des Serdaigle, Harry croisa le regard de Cho Chang qui lui adressa un sourire enthousiaste. Son estomac fit un looping au point où il regretta d'avoir mangé un peu trop de tarte à la mélasse.

Dumbledore reprit la parole et tout le monde se tut, l'attention totale sur le directeur.

- Il y a cependant une nouvelle règle pour cette édition, déclara solennellement Dumbledore. Pour la sécurité de tous, les responsables des trois écoles et le Ministère de la Magie ont décidé que seuls les élèves majeurs - c'est-à-dire qui ont dix-sept ans ou plus - seront habilités à soumettre leur candidature.

Dumbledore dû hausser la voix, plusieurs élèves poussaient des cris scandalisés, Fred et George en tête de file. Harry plongea son regard dans celui de Severus qui hocha la tête l'air de dire "je tenais particulièrement à cette règle". Harry ne put s'empêcher de sourire. Bien sûr, dans un monde idéal, il aurait souhaité candidater mais la conjoncture n'était pas au beau fixe pour ce genre de fantaisies…

- Je sais que certains d'entre vous auraient rêvé de représenter l'école mais cette règle a été décidée pour la sécurité de tous. En dépit des précautions prises, je tiens à vous signaler que ces tâches seront difficiles et dangereuses. Se porter candidat n'est pas une décision à prendre à la légère et encore moins pour les craintifs. Aussi, je tiens à vous assurer que le juge qui sélectionnera le ou la championne de Poudlard ne pourra être dupé.

Dumbledore posa ses yeux bleus pétillants sur les jumeaux.

- Ne perdez pas donc votre temps à trouver un moyen de contourner cette règle. Je compte sur vous pour accueillir les délégations comme il se doit. Et sur ces belles paroles, je vous souhaite à tous une bonne nuit !

Dans un vacarme assourdissant, tout le monde se leva. Le mal de tête de Harry se réveilla et il proposa à Ron et Hermione de passer par un raccourci, au calme.

- Ils sont fous ! Comment Dumbledore peut laisser passer ça ? demanda Ron. Il sait bien que ce n'est pas le moment.

- Il n'est pas seul dans les décisions prises, contra Hermione.

- Il n'a clairement pas eu le choix, déclara Harry. J'ai ressenti que son enthousiasme pouvait être quelque peu feint à certains moments.

- C'est clairement un moyen pour le Ministère de la Magie de se racheter pour sa bourde immense avec Sirius. J'en suis certaine. Donnez du pain et des jeux au peuple et il ne verra rien d'autre.

- N'empêche, sans tout ce qu'il se passe en ce moment, j'en aurais rêvé de faire ce tournoi. Pas vous ?

- Oh que oui ! répondit Harry, un brin rêveur.

- Non mais ça ne va pas ? s'exclama Hermione. Il y a eu des morts lors des autres éditions !

- Ce n'est plus pareil, répondit Ron.

- Laisse-moi en douter, dit Hermione septique.

Une fois devant le portrait de la grosse dame, le trio attendit patiemment que d'autres élèves arrivent.

- On aurait dû demander le mot de passe à la fille préfète.

- La fille s'appelle Clarisse Brandstone et elle est en cinquième année, expliqua Hermione. Vaiment Ron, tu pourrais montrer un peu plus de respect envers les préfets.

Ron haussa les épaules. Finalement Neville, Ginny, Fred et George arrivèrent.

- Fariboles ! Tant que je m'en souviens encore, autant que ce soit moi qui annonce le mot de passe, non ? s'amusa Neville.

L'odeur, la lumière et le feu de cheminée réconfortèrent aussitôt Harry. Heureux d'être à Poudlard, il s'installa dans un fauteuil avec ses amis. Ginny abandonna la troupe, rejoignant ses amies. Ils discutèrent pendant de longues minutes sur ce tournoi. Les premières années apparurent à leur tour et Harry s'étonna de les trouver si petits.

.

Harry jetait un cinquième coup d'œil à sa montre lorsque Severus entra dans la pièce. Comme à chaque fois, le bruit de la salle baissa drastiquement.

- Je reviens, dit-il à l'adresse de ses amis.

Sans un mot, les deux sorciers sortirent de la Salle Commune des lions et trouvèrent une salle de classe vide. Au même moment, Sirius Black arriva.

- Harry, est-ce que ça va ?

- Nous allions justement en parler, répliqua Severus d'une voix blanche.

Merlin ce qu'il semblait se faire violence pour ne pas envoyer paître Sirius ! Harry préféra tout déballer.

- J'ai été dans l'esprit de Vol… Vous-Savez-Qui. J'ai essayé de fermer mon esprit mais j'ai mis du temps. C'était difficile mais je n'ai pas l'impression qu'il se rend compte que je le vois.

- Il ne s'est sûrement pas encore aperçu de votre connexion. Et le plus tard sera le mieux, crois-moi, déclara Severus.

- Je l'ai encore vu avec cet homme, continua Harry, réprimant un frisson. Il disait que tout était prêt.

- Où est-ce qu'ils se trouvaient ? demanda Sirius.

- Dans une forêt. Et il y avait encore ces horribles monstres.

- Je suis certain que ces histoires de braconnage ont un lien avec ce taré anonyme, déclara Sirius le visage sombre.

- Vous devez voir si quelque chose se trame. Parlez-en aux réunions de l'Ordre et à Dumbledore !

- Ne t'inquiète pas, ce sera fait. Pendant ce temps, ne fais rien d'imprudent.

- Oui papa, singea Harry, insolent.

Sérieusement ! Il n'avait pas besoin que Severus le couve de la sorte !

- Surveille ce ton, je ne suis pas ton ami.

- Je vous dis que ce que j'ai vu annonce quelque chose de grave !

- Et on te croit Harry, répliqua Severus. On prend les choses très au sérieux.

- Et je suis témoin, ajouta Sirius. Si tu avais vu à quel point ton tuteur a tout mis en place pour la limite d'âge de ce tournoi.

- Remarque, ça aurait pu me changer les idées, déclara Harry.

- Haha ! Ça c'est mon filleul !

- Black…

- Oui, bon, reprit Sirius avec un peu plus de sérieux. Tu te divertiras depuis les gradins, c'est très bien aussi.

- Je sais, soupira Harry, résigné. Imaginez si j'avais pu participer, il me serait encore arrivé une montagne de problèmes. N'empêche que ça donne quand même envie.

- On ne peut pas tout avoir dans la vie, dit Severus.

Sirius grimaça et Harry put lire sur les lèvres de son parrain "quel aigri". Amusé, Harry observa ses pieds pour ne pas éclater de rire.

- En attendant, continue tes exercices d'Occlumancie. On se voit demain, tu commences à huit heures pour deux heures de Potions. On se voit l'après-midi à seize heures, pour un entraînement au combat. Repose-toi.

Severus pressa l'épaule de Harry avant de faire demi-tour. Sirius raccompagna son filleul jusqu'au portrait de la Grosse Dame.

- Tu vas avoir du pain sur la planche ici à Poudlard, encore plus avec un tournoi international.

- Tu l'as dit ! Mais je ne suis pas seul. En réalité, je serai davantage le bras droit de McGonagall.

- Si elle a autant de travail que Severus, ça ne sera pas de trop.

- Elle en a même davantage puisqu'elle est adjointe de l'école. Et tu sais, avec tout ce qui se passe dehors…

- Oui je sais.

Sirius s'arrêta, plongea ses yeux bleus dans ceux de Harry.

- Mais tu n'es pas seul. Jamais. Je sais que tu aimerais te battre. Bon sang, tu es comme ton père ! ajouta-t-il fièrement. Mais ta mission pour le moment c'est d'apprendre et de grandir. Viens-là.

Sirius serra dans ses bras Harry qui se laissa aller à cette étreinte.

- Allez ! Au lit !

L'idée de se lever tôt enchantait guère Harry…

- Au fait, demanda Harry avant de pénétrer dans la Salle Commune. Comment est-ce que tu vas faire avec la ferme de Remus ? N'étais-tu pas censé l'aider ?

- Je retourne à la ferme le weekend et tu sais, je transplane facilement maintenant !

- Ça vous fait du bien de vous retrouver après toutes ces années, n'est-ce pas ?

Sirius rigola doucement, chose qui ne lui ressemblait pas. Il frotta l'arrière de sa tête avant d'annoncer :

- Tu sais Harry, Remus et moi, on est plus que des amis.

- Comment ça ? Vous êtes des frères cachés ? s'amusa Harry.

Cette fois, Sirius explosa de rire.

- Non non ! On est ensemble. Enfin amoureux si tu préfères.

- Oh !

Harry ouvrit de grands yeux. Bien sûr, il savait que l'homosexualité existait mais il n'en avait entendu que du mal de la part de son Oncle. Mais comme les mots de son Oncle ne valait rien…

- C'est marrant ! ajouta-t-il. En même temps, maintenant que tu le dis, c'est logique.

- Oui…

- Bon bah… Bonne nuit !

Un peu plus léger, Harry retrouva ses amis à qui il rapporta la discussion qu'il avait eue avec Severus et Sirius.

- Le maître des potions a raison, déclara Hermione. Tu dois te concentrer sur tes apprentissages.

Quand Harry se glissa sous ses draps bien chauds, réchauffés par la bouillotte, il se sentit un peu plus léger. Il fit ses exercices d'Occlumancie avec sérieux et s'endormit plus apaisé qu'en début de soirée.


Note de l'Autrice : Alors, qu'avez-vous pensé de ce chapitre ? Est-ce que vous aimez voir d'autres point de vue, notamment celui de Drago ? Sirius à Poudlard, ça vous plait ? A votre avis, Harry va-t-il être tiré au sort par la Coupe de feu ou vais-je partir sur totalement autre chose ?

A vos claviers, je VEUX vos avis !

La suite arrive le 17 mai !