Je n'avais aucune idée. Jusqu'à ce que l'inspiration me vienne enfin. Et que je tape 1 000 mots d'un coup. Et, évidemment, j'ai galéré pour les 992 suivants xD

Plus qu'un et un mois supplémentaire de fini !

Bonne lecture !


C'était à ne rien y comprendre.

Jamais, de mémoire d'homme ou d'hylien, la région de Latouane n'avait vécu ça. Bien sûr, son climat humide était connu de tous, et les caprices de la météo pouvait aussi bien favoriser les cultures que les faire pourrir sur pied, mais jamais ô grand jamais une catastrophe de cette envergure n'avait été enregistrée.

Les maisons n'étaient plus visibles, seuls les quelques toits ou étages supérieurs perçaient l'immensité de l'étendue d'eau, les silhouettes des habitants s'y trouvant, s'y étant réfugiés dès qu'il avait été certain que l'eau ne ferait que monter. Heureusement, aucune perte humaine n'avait été à déplorer, mais les récoltes de l'année étaient fichues, et ne parlons pas des chèvres qui avaient sans doute toutes péries, leurs carcasses finissant d'empoisonner leur tombeau liquide.

Link grimaça, son reflet déformé le lui rendant bien.

Aussi originale que fut sa demeure, l'eau s'y était aussi bien infiltrée que chez n'importe qui d'autre, et il regretta amèrement que son toit eut été troué en son centre. Ce qui, à l'origine, était une décision pour faire entrer la lumière naturellement, était un inconfort dans la situation actuelle. La surface disponible était étroite et il n'était pas rare qu'il manque de rouler dans l'eau, que ce soit celle entourant l'arbre ou celle dedans, lorsqu'il s'évanouissait de sommeil, l'en arrachant en sursaut.

La montée les avait tous surpris, déjà par leur apparition, mais surtout parce que la source de Latouane était dans la forêt. Quand elle avait atteint Toal, il était déjà trop tard pour la contrôler. L'unique route permettant de quitter le village était déjà submergée et ils n'avaient eu d'autres choix que de se retrancher chez eux. Mais, bien évidemment, la rivière zigzaguant au milieu de leurs maisons n'avait pas été en reste et avait bien tôt quitté son lit à son tour.

Mais s'il n'y avait eu que ça, encore…

Pas en reste, le ciel s'était aussitôt déchiré d'averses qui semblaient avoir amplifiées le phénomène, provoquant chutes de branches, création de courant et les avaient trempé jusqu'aux os, faisant craindre le pire pour les plus jeunes et les plus fragiles.

De là où il se trouvait, Link ne pouvait que les observant, se maudissant pour vivre à l'écart des siens, le condamnant à ne pouvoir communiquer clairement avec eux et le coupant de tout contact.

Ils avaient été quelques-uns à avoir tenté de se jeter à l'eau, à essayer de rejoindre tel groupe ou tel bâtiment, que ce soit pour se réunir avec les siens ou pour obtenir plus de provisions, mais bien vite durent-t-ils se rétracter, manquant de se faire engloutir sous la force des flots ou se rendant compte qu'elle n'avait plus rien à voir avec la rivière ou la source limpide et pure, s'en arrachant en hurlant leur dégoût.

Au moins, pouvaient-ils boire l'eau de pluie…

Le jour et la nuit semblaient se fondre en un, leur faisant perdre leurs comptes. Depuis combien de temps se trouvaient-ils ainsi ? Dans combien de jours pourraient-t-ils retourner sur le plancher des vaches, retourner à leurs vies d'avant ? Le pourraient-ils seulement ou se trouvaient-ils condamnés à ne jamais pouvoir retrouver leur village ?

Il n'y avait pas grand-chose à faire, juste à attendre. Attendre et prier pour que tout ça ne soit qu'un mauvais rêve, un vilain tour joué par une quelconque divinité ou malfaisance et que tout ça soit derrière eux au plus vite.

Lorsque les premiers cris retentirent, Link ne fut pas le seul à penser que ce n'était qu'une hallucination que la faim leur jouait. Ça n'aurait pas été la première et nombreux manquèrent de finir dans l'eau de par leur faute.

Mais non, les barques finirent bien par glisser jusqu'à eux, chargés de visages inconnus, de denrées alimentaires et de tissus sans doute bien plus chauds que ceux qui les couvraient, détrempés et sales. Et, parmi ces étrangers, Link put en reconnaître deux.

— MOÏ !

— JEHD !

Les voix de sa famille adoptive s'étaient mêlées à la sienne alors qu'il se levait, tentant ainsi de mieux apercevoir leurs sauveurs, vite imité par tous.

Les appels épuisés furent accompagnés de mouvements de bras afin de signaler leurs présences.

Les embarcations se séparèrent, chacune allant à une destination différente, secourant les malheureux.

Link n'avait pas besoin de mentir quand il se dit que jamais il ne s'était autant senti soulagé de revoir le visage de son ami, quand celui-ci se présenta avec une couverture chaude et de la nourriture. Les larmes qui coulèrent sur son visage se mêlèrent aux gouttes de pluie, mais elles n'avaient pas le même goût, alors qu'il se courbait au-dessus du présent, affaibli par la privation et terrassé par le soulagement. Il sentit les mains de l'érudit sur lui, l'encourageant à se redresser. Lorsqu'il le fit, ce fut pour être étreint avec force.

Il lui rendit son affection avec maladresse, épuisé, mais il y mit tout son cœur, les larmes continuant de couler sans qu'il n'y prit garde.

Qu'il était surprenant de ne pas être celui qui offrait une accolade solide et réconfortante, d'être celui qui avait besoin d'une épaule contre laquelle se poser…

Mais, bien vite, il lui fallut s'éloigner, quitter une partie de ses vêtements humides et se réfugier sous la couverture, monter dans la barque et se laisser nourrir par l'érudit, alors que les autres personnes présentes ramaient dans la direction de l'ancienne et unique route, quittant le village pour une direction encore inconnue.

Bien vite, les autres barques les rejoignirent, alourdies par leurs nouveaux passagers. Sur les visages exténués et amaigris brillaient l'espoir (ou la fièvre, allez savoir).

Quand Link reconnut celle où se trouvait Moï, il ignorait si c'était l'épuisement ou autre chose, mais il ne ressentit pas le pincement de jalousie habituel alors qu'il le voyait étreindre son épouse et leurs enfants. Si eux avaient vécu des jours horribles, que dire de lui, loin de sa famille et n'ayant aucune nouvelle ?

Mais il s'en détourna rapidement, et revint à Jehd qui le couvait comme une mère cocotte, tenant un pli de la couverture, sans qu'il ne sache si c'était pour éviter qu'elle ne glisse sous la météo atroce, pour se rassurer qu'il était toujours là ou pour une autre raison qu'il ignorait. Pas qu'il restait en lui la moindre étincelle d'énergie suffisante pour y réfléchir.

Le savoir là était bien assez suffisant pour le réconforter.

Le sommeil pesait lourdement sur ses paupières et ses épaules alors que ce qui avait été des paysages familiers défilaient, modifiés par les intempéries, mais il n'y avait bien que les intrus pour y faire attention, et encore. Tout ce qu'ils comprenaient, c'est qu'ils remontaient la route et que, sans doute, ils les sortaient de ce qui avait été leur enfer. Peut-être y aurait-il d'autres personnes, d'autres provisions, d'autres choses. Mais pour l'heure, ils étaient simplement satisfaits de ne plus être perchés sur les toits de leurs demeures et de pouvoir mâcher autre chose que les feuilles des arbres environnants.

Il fallut attendre d'être pratiquement à la forêt de Firone pour enfin pouvoir toucher pied à terre, et encore.

Heureusement, les hyliens eurent la bonté de se mouiller en sautant à l'eau et de diriger leurs barques le plus près possible du bord, jusqu'à ce que leurs fonds ne râclent.

Les premiers pas dans l'eau furent des rappels violents des derniers jours et certains essuyèrent des crises, effrayés que tout ça ne soit qu'un rêve éveillé et qu'ils se trouvaient encore sur les tuiles de bois, ayant glissé jusqu'aux flots meurtriers. Il fut facile de les tempérer et de gérer le problème, ce n'était pas les gros bras qu'il manquait.

Des tentes avaient été montées et si Link pouvait se fier à son odorat, Telma devait être là. Ou, en tout cas, son ragoût. Il ignorait si c'était l'idée de la présence de son amie ou de sa recette qui l'emplit soudainement d'une excitation toute fébrile mais dans tous les cas, sans l'aide de Jehd, il se serait sans doute écroulé au sol, ses jambes ne le portant pas aussi bien qu'il l'avait espéré.


La plus grande tente était celle protégeant le mess, et ce fut là où furent réunis les habitants de Toal, grelottant sous leurs couvertures, les mains plaquées contre les bols brûlant, remplis de ragoût à en déborder, entourant le poêle de fortune.

En-dehors de quelques remerciements murmurés, aucun mot n'avait été prononcé. Ils étaient gelés jusqu'aux os et avaient des difficultés à traiter les dernières heures. Le médecin accompagnant les hyliens avait estimé qu'ils iraient mieux après une bonne nuit de sommeil, mais aucun ne s'en sentait capable. Et si, au réveil, tout cela n'avait été qu'un rêve ? Ou que, si tout cela était réel, ils découvriraient avoir été séparé ou ce genre de chose ?

Ils s'épuisaient à garder les yeux ouverts, saturant d'énergie nerveuse.

Parfois, ils quittaient leur immobilité pour observer les visages les entourant, les comptant intérieurement, s'assurant que tout le monde était là, avant de retourner à sa prostration initiale.

La plupart des bénévoles restaient en-dehors de cette tente, certains rentrant pour récupérer de la boisson ou un plat, puis ressortaient aussi sec. L'ambiance n'était pas à la fête et était légèrement teinte de deuil, alors ils préféraient garder leurs distances, par respect.

Évidemment, de leur point de vue, c'était une réussite : ils n'avaient aucun mort à déplorer, après quelques soins, tout le monde ira mieux et ils avaient pu réaliser tout ça rapidement ! Ils devaient rester sur place une semaine, au moins, le temps de retaper tout ce petit monde, puis la reine décidera après avoir obtenu les rapports du médecin et des soldats.

Si, d'ici-là, les rivières ne seraient pas retournées dans leurs lits, il devront sans doute prendre la direction de la capitale avec les survivants, et ce sera à sa majesté de gérer le reste.

Et, si même le niveau augmentait entre-temps, leur départ serait avancé et le royaume prévenu du danger.

Pour leur part, ils avaient fait leur devoir !


Des tentes servant de dortoir avaient été montées tout autour, et la nuit était tombée depuis une poignée d'heures.

La plupart des gens dormait du repos du juste et des ronflements étaient les seuls bruits perceptibles. Une garde avait été tout de même instaurée, plus pour surveiller l'eau au cas où une augmentation significative les forcerait à se déplacer soudainement.

Et ce fut là, sous la lune en quartier, que Jehd remarqua la présence solitaire de Link.

Il le rejoignit, inquiet, et se plaça à côté de lui, scrutant son visage.

Quittant sa contemplation silencieuse, l'aventurier se contenta de le regarder à son tour et d'étirer sa bouche en un sourire poli. Puis ils se détournèrent l'un de l'autre pour examiner l'étendu calme, reflétant l'éclat des étoiles et les astres.

Chacun emmitouflé dans une couverture légère, ils frissonnèrent un peu sous la bise mais ne bougèrent pas.

— Tu sais… murmura soudainement Link.

Il eut aussitôt toute son attention, même s'il le regardait par-en-dessous, curieux.

— J'aurais voulu que ta première visite de Toal soit plus…

La fin de la phrase fut broyée dans sa gorge serrée, alors que l'hylien tentait d'écraser les larmes qu'il voulait de nouveau verser.

— J'aurais voulu que tu puisses voir pourquoi Moï et moi sommes si fier de notre petit village, pas que ta première vision de chez nous ne soit qu'une immense piscine.

Honteux, Link baissa la tête et la couvrit de sa couverture. Mais il en sortit lorsqu'il sentit de nouveau la main de Jehd sur la sienne, attirant son attention. Malgré la semi obscurité, il parvint à discerner son petit sourire doux.

— Alors, tu n'auras qu'à me le remontrer quand tout sera fini.

Il sentit les larmes couler finalement le long de ses joues mais Link s'assura de lui sourire comme il savait si bien le faire, se réchauffant à cette promesse.

Ils restèrent ainsi à admirer le paysage nocturne, main dans la main, sans mot dire.


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