Bonjour, voici le dernier chapitre !
Je remercie Nemerof91 pour sa review.
Bonne lecture et bon week-end à tous !
Disclaimer : Le Seigneur des Anneaux appartient à J.R.R. Tolkien. Et Final Fantasy7 à Square Enix.
Traduction elfique :
Hannon lae : merci
Chapitre 9 :
Le cadeau de Galadriel
Assise en retrait du campement, Lowen était partagée entre la peur et le chagrin.
Elle aurait dû se douter que parler à Legolas n'apporterait rien de bon. Apparemment, le roi n'avait pas écouté son fils. Pire encore, il l'avait éloigné d'elle. Maintenant, elle ne pouvait plus compter sur son seul ami.
Non, il y a aussi Faelwen…?
Non, la guérisseuse n'aurait rien pu faire. Quant à Radagast, personne ne l'avait mis au courant.
Et aujourd'hui, Tangadion et ses soldats les plus fidèles l'emmenaient vers une destination inconnue.
Ils avaient chevauché toute la journée à travers le sentier. Lowen n'avait pas dit un mot depuis leur départ du palais. Une fois suffisamment loin du palais, un Elfe l'avait menacée avec un poignard sous la gorge pendant tout le voyage.
L'enfant n'y comprenait rien. Pourquoi la traiter ainsi ? Elle n'était qu'une petite fille ! Avec des souvenirs d'une vie antérieure, c'était vrai, mais cela ne la rendait pas dangereuse pour autant !
Pourquoi est-ce qu'ils ont tous si peur de moi ? Non, pourquoi me haïssent-ils ?
L'incompréhension et l'injustice de la situation attisaient sa colère. Une fois de plus, elle se surprenait à éprouver de mauvaises pensées envers eux.
Parfois, elle arrivait à repousser ces idées, mais dès qu'elle sentait la fatigue prendre le dessus et qu'elle s'endormait, des cauchemars sombres et sanglants assaillaient son esprit.
C'était pourquoi elle dormait par à-coups. Les autres soldats dormaient sur des couchettes confortables, tandis qu'elle n'avait eu droit qu'à une vieille couverture humide et couverte de boue.
Lowen demeurait donc en position assise par terre, le dos contre un sac de provisions.
Toutefois, elle refusait de se laisser abattre. Car depuis son cinquième réveil, une certitude s'était emparée d'elle : il fallait qu'elle s'en aille.
Si les Elfes étaient déterminés à lui mener la vie dure, elle ne resterait pas avec eux. Mais où aller ?
Pas à Dol Guldur, c'est sûr. Ni au Mordor.
Il fallait qu'elle trouve un moyen de rejoindre le Rohan ou le Gondor. D'après ce qu'elle avait appris, c'était des territoires occupés par les Hommes. Là-bas, elle aurait plus de chances… Du moins, elle l'espérait. Si ce monde était régi par un système de type médiéval, alors rien ne disait qu'une petite orpheline comme elle pourrait y survivre aisément. Qui voudrait l'adopter ? La vie de mendiante risquait de ne pas être aisée…
Dépitée, elle secoua la tête. Il valait mieux ne pas penser à ça pour l'instant. Elle devait d'abord s'enfuir.
Il faisait bien sombre à présent. Le feu du campement s'était éteint, les braises n'éclairaient plus rien.
Lentement, Lowen prit appui sur le sac pour se lever puis, à reculons, elle s'éloigna vers les arbres.
Une fois suffisamment loin, elle se mit à courir à travers la forêt.
Lorsqu'elle eut besoin de reprendre son souffle, elle s'arrêta et prit appui contre un arbre. Ses doigts entrèrent en contact avec une matière collante et visqueuse.
Elle les retira et vit qu'il s'agissait d'une grande toile d'araignée. Lowen réalisa qu'il y en avait partout autour d'elle.
Soudain, une violente douleur se fit sentir dans son dos. Elle tomba par terre et gémit.
« Alors, petit monstre, on voulait s'enfuir ? »
Lowen reconnut avec horreur la voix d'un des jumeaux. Levant la tête, elle les vit au-dessus d'elle, la regardant avec un sourire malveillant.
« Tu comptais nous fausser compagnie pour rejoindre Dol Guldur ? »
Comment savaient-ils pour Dol Guldur ? Non, jamais elle n'en avait eu l'intention ! Elle ne put leur répondre, car l'un des deux lui asséna un coup de pied au visage. Elle le reçut au front.
Avec un gémissement douloureux, Lowen se roula en position fœtale.
« Ne l'abîme pas trop, il faut qu'on la ramène au campement », dit Nestarion.
« Pourquoi ? Le roi et le capitaine n'ont que faire d'elle. Personne n'a souligné l'importance de la ramener en vie au palais », dit Nostalion.
« Mais notre mère n'aimerait pas apprendre qu'elle est morte. »
« Ne me parle pas de mère ! Elle s'est laissée berner par cette créature du mal. »
« … Oui, c'est vrai. »
Le maigre espoir qu'avait ressenti Lowen au début de cette conversation s'éteignit aussitôt.
« Pourquoi ? » gémit-elle.
« Pardon ? » dit Nostalion.
« Pourquoi vous me haïssez ? Qu'est-ce que j'ai fait pour mériter ça ?! »
L'un des jumeaux lui tira violemment les cheveux pour la mettre à son niveau.
« Tu es une aberration. Tu n'es pas comme nous, ni comme les Hommes ou les Nains. Tu n'es qu'un accident né de la combinaison de deux magies opposées », dit Nostalion.
Lowen écarquilla les yeux. Elle ne comprenait pas de quoi il parlait.
« Mon frère a raison. Gandalf et Radagast auraient dû te tuer quand ils t'ont trouvée dans cette fleur, à Dol Guldur », renchérit Nestarion.
« Assez parlé ! Finissons-en », dit Nostalion en dégainant un poignard.
Catastrophée, Lowen se débattit et tenta de reculer, mais l'elfe tenait toujours sa chevelure d'une main ferme. Elle tira jusqu'à se dégager, même si elle sentit au passage des cheveux se détacher de sa tête.
Sitôt libérée, elle courut se cacher derrière un arbre, mais ses mains se retrouvèrent collées à la toile. Elle se mit à tirer dessus, ce qui provoqua des vibrations dans le réseau de fils.
Soudain, un concert de cliquetis et de chuintements résonna. Les Elfes s'immobilisèrent, puis armèrent leurs arcs en visant la cime des arbres.
Soudain, des araignées s'abattirent sur eux. Les jumeaux tirèrent leurs flèches et parvinrent à en tuer une chacun, mais d'autres enjambèrent les cadavres de leurs sœurs pour les attaquer.
Les deux elfes battirent aussitôt en retraite pour rejoindre le campement.
Horrifiée, Lowen réalisa qu'elle était maintenant seule, coincée contre l'arbre, avec les araignées.
Elle voulut crier pour appeler à l'aide, mais elle avait trop peur. Et puis, à quoi bon ? Ils se moquaient de son sort !
L'une des araignées, plus grosse que les autres, s'approcha d'elle lentement, comme si elle se délectait de la peur grandissante de l'enfant.
Lorsqu'elle fut proche, Lowen la vit ouvrir une énorme gueule hérissée de crocs gluants.
Cette fois, la fillette ouvrir la bouche et hurla.
Soudain, une puissante lumière bleue s'abattit sur le sol. Le choc fit reculer les araignées de quelques pas.
Lowen vit quelque chose de lumineux et rapide fondre sur celle qui avait failli la manger. L'insecte eut un bref soubresaut, puis tomba raide mort sur le dos.
Surprise, la petite regarda la lumière fondre sur les araignées. Un bruit de lame en métal lui indiqua que cette chose avait une épée, mais elle bougeait si vite qu'elle ne pouvait croire qu'il s'agissait d'un humain !
Lorsque la dernière araignée fut tuée, la lumière disparut, révélant un Homme.
Grand, musclé, ses cheveux bruns touchaient son menton. Une barbe naissante couvrait sa mâchoire virile. Lowen n'en revenait pas, c'était le premier Homme qu'elle voyait dans cette vie-ci !
« Tout va bien, mon enfant. Tu es en sécurité », dit l'homme d'une voix rassurante.
D'un coup sec, il dégagea les mains de Lowen, puis se mit à genoux devant elle.
Tout en frottant ses doigts contre sa tunique, l'enfant le détailla en silence.
Il portait des bottes et un pantalon en cuir sale, une tunique bleue et une cape de la même couleur bordée de fourrure. Des protections en cuir entouraient ses avant-bras, couvertes de boue.
« Je suis Talion », poursuivit son sauveur. « Et toi ? »
« L-Lowen », dit l'enfant en claquant des dents.
Comprenant qu'elle était encore sous le choc, l'Homme tendit doucement les mains, puis la souleva dans ses bras.
Soudain, des éclats de voix résonnèrent depuis le campement des Elfes.
« On ne peut pas rester ici. Tu me fais confiance ? » dit l'homme d'une voix douce.
Lowen acquiesça vigoureusement. Inutile de lui expliquer, elle savait que les Elfes ne seraient pas ravis de la voir en vie.
Rassuré qu'elle partage son avis, Talion s'en fut à travers la forêt.
Lowen était surprise de la vitesse à laquelle il courait. Elle avait l'impression de monter une moto humanoïde. Le vent lui fouettait le visage si fort qu'elle ne pouvait parler.
Bientôt, ils arrivèrent devant un massif rocheux. Tout en la portant d'une main, Talion se mit à gravir les rochers de l'autre.
Arrivés au sommet, ils avisèrent une grotte. Talion posa la petite, puis s'avança vers l'ouverture. Il fit quelques pas à l'intérieur, puis tendit la main à l'enfant.
« C'est inhabité, nous pouvons nous y réfugier un instant. »
Lowen se demanda comment il pouvait affirmer ça sans y être entré. Il faisait si noir qu'elle ne distinguait rien.
La main dans la sienne, l'enfant le suivit dans l'obscurité. Bientôt, le rôdeur s'arrêta.
Lorsqu'il se tourna vers elle, Lowen eut un hoquet de surprise. Ses yeux brillaient d'un bleu surnaturel!
« Tout va bien ? » demanda Talion.
« V-vos yeux ! Ils… brillent ? »
« Oh… Oui, j'avais oublié ce détail. »
Lowen ne put l'interroger, car une autre personne apparut près de Talion.
L'inconnu avait une silhouette humaine, mais il semblait fait de fumée. Son corps était translucide et brillait d'une lumière blanche, comme celui d'un fantôme. Son visage avait des traits tirés, la peau semblait collée à son crâne comme celle d'un cadavre. Il avait peut-être été beau de son vivant, mais à présent, c'était un spectre décharné.
« Demande-lui pourquoi les Elfes voulaient la tuer. »
Sa voix était grave et emplie d'autorité, c'était celle d'un seigneur, mais elle sifflait comme si elle s'échappait de la gorge d'un mort.
Cette fois, Lowen n'y tint plus. Elle poussa un cri de pure terreur et recula jusqu'à se retrouver acculée contre une paroi.
« UN FANTÔME !? »
Le fantôme en question parut surpris.
« Tu peux me voir ?! »
Lowen le vit s'agenouiller devant elle. Malgré la peur, l'enfant vit qu'il portait une armure et un diadème elfiques.
« Tu ne dois pas avoir peur de lui », la rassura Talion. « Il ne te fera rien, tu as ma parole. »
L'enfant lui coula un regard méfiant. Elle réalisa que les yeux de l'Homme brillaient du même éclat que la lumière du fantôme.
« Vous êtes qui, au juste ? » demanda-t-elle.
« Je suis… j'étais un rôdeur du Gondor, autrefois. Un capitaine de la Porte Noire. »
« Ah… »
Cela n'expliquait pas grand-chose, mais Lowen voyait bien que Talion n'avait aucune mauvaise intention à son égard.
Le rôdeur se détourna d'elle pour sortir de son paquetage un tas de bois. Tandis qu'il allumait un feu, Lowen reporta son regard sur le fantôme. Il l'observait toujours, mais ne disait plus rien.
Lorsqu'enfin le feu fut allumé, l'enfant ne put résister. Elle se détacha du mur et s'assit près des flammes. Les mains tendues devant elle, Lowen accueillit avec soulagement leur chaleur.
Soudain, elle sentit quelque chose tomber sur ses épaules. Talion s'était approché d'elle en silence pour la recouvrir de sa cape.
« Lowen, j'ai besoin de savoir qui tu es et pourquoi les Elfes semblent t'en vouloir », dit le rôdeur.
L'enfant baissa tristement les yeux.
« Je ne sais pas pourquoi ils me détestent. C'est comme ça depuis ma naissance. Je… J'ai eu beau poser des questions, personne n'a jamais rien voulu me dire. Ils me disaient toujours la même chose : Tu sauras quand tu seras plus grande. »
« Et pourquoi est-ce que Sauron s'intéresse à toi ? » demanda le fantôme.
« Sauron ? C'est qui ? »
Talion plissa les yeux.
« Ne joue pas l'innocente. Tu as discuté plusieurs fois avec son esprit. Mon… ami et moi l'avons vu à travers une pierre de vision. Il t'a dit de le rejoindre au Mordor. »
Lowen ouvrit la bouche pour protester, quand elle réalisa qu'il faisait allusion au fantôme qu'elle avait vu au palais de Mirkwood.
« Vous parlez du monsieur aux longs cheveux blonds et habillé en blanc ? Il a dit qu'il s'appelait Aulendil. »
Le fantôme eut un rire moqueur.
« C'est un des noms qu'il s'est donnés pour berner son entourage. Sa véritable identité est Sauron, le Seigneur Ténébreux du Mordor. »
La fillette prit l'air ahuri. Elle avait parlé avec le Seigneur des Ténèbres, le grand méchant de ce monde ?
« Je vous jure que je ne savais pas ! Il avait l'air gentil. »
Le spectre secoua la tête.
« Il est doué pour berner son entourage », dit-il avant de disparaître.
Talion regarda Lowen avec compassion.
« Tu ignores donc pourquoi il s'intéresse à toi ? »
« Non ! Je suis personne, je… Enfin… »
« Oui ? »
« J'ai… »
Elle hésita. Pouvait-elle se confier à lui ? Il avait l'air gentil, mais d'autres l'avaient déjà trahie parce qu'elle s'était confiée à eux.
Non, il m'a sauvé la vie. Et il a l'air sincèrement désireux de m'aider.
« J'ai des pouvoirs. Je suivais des leçons chez un magicien, au début. Il s'appelle Radagast. »
« Des pouvoirs ? Quels pouvoirs ? »
« Bof, pas grand-chose. Je peux faire pousser des plantes et soigner des animaux, c'est tout. »
« Ce doit être cela qui intéresse Sauron. Il souhaite te recruter pour rejoindre son armée. Les Elfes ont dû apprendre la nouvelle et jugé que tu étais une menace. »
« Mais je ne veux pas rejoindre les Ténèbres ! Je ne veux pas servir le méchant de l'histoire ! Je vous jure… » gémit l'enfant.
Talion lui prit la main. Ce geste rassurant la lui arracha un frisson, car cet homme avait la peau froide.
« Je te crois. Ne t'en fais pas. »
Le fantôme réapparut devant Talion.
« Nous ne pouvons rester ici. Les elfes sont de bons pisteurs, ils nous retrouveront vite. »
« Pas tout de suite ! Lowen a besoin de se reposer. »
Le spectre émit un son méprisant, comme si la fatigue d'une enfant ne le concernait rien, puis il disparut à nouveau.
« Repose-toi, je vais monter la garde », dit Talion.
Rassurée, Lowen arrangea sa couverture près du feu. Elle fut tentée de remercier le rôdeur, de lui dire qu'elle était vraiment heureuse qu'il soit là. Peut-être les Valars avaient-ils répondu à ses prières ? Peut-être qu'il pourrait l'emmener dans un endroit sûr, loin de la forêt et des Elfes.
Mais en attendant, elle était fatiguée. Aussi, elle ferma les yeux et s'endormit.
XxXxXxXxXxXxXxX
Talion observa la petite silhouette endormie devant le feu en réfléchissant.
Ainsi, elle avait des pouvoirs. Peut-être était-ce une Maia… ou la descendante d'un des cinq Istaris ?
« Nous ne pouvons pas nous encombrer d'une enfant, elle nous ralentirait dans notre quête », dit la voix de Celebrimbor dans sa tête.
Je sais. Je vais l'emmener au Gondor. Dès que je trouverai une famille disposée à s'occuper d'elle, nous reprendrons nos recherches de la Main Noire.
Cette réponse parut satisfaire Celebrimbor, qui ne dit rien de plus.
Reportant son regard sur l'enfant, Talion eut un pincement de cœur. Elle était si jeune ! La sensation quand il l'avait portée dans ses bras avait suscité un douloureux pincement de cœur. Cela lui avait rappelé le temps où son fils, Dirhael, était aussi petit qu'elle. Il l'avait souvent porté dans ses bras de la même façon.
Soudain, Lowen gémit dans son sommeil. D'instinct, Talion posa la main sur ses cheveux. Aussitôt, il sentit un flux d'énergie traverser sa paume et atteindre sa tête pour lui transmettre des images.
Il vit une étrange cité, aux immenses demeures en béton et aux fenêtres carrées. Une jeune fille qui ressemblait à Lowen adolescente courait à travers une route couverte de goudron, avec une cage renfermant un chat, quand d'étranges machines montées sur quatre roues passèrent de chaque côté d'elle.
L'une d'elles la percuta violemment, la faisant rouler sur le sol avec la cage.
Talion regarda la jeune fille et l'animal rendre leur dernier souffle, quand l'image se brouilla dans un nuage de noirceur, puis de lumière. Il se retrouva à Dol Guldur, au milieu d'un étrange champ de fleurs.
Elles ressemblaient à des symbelmynë, mais elles étaient plus grandes que la normale. Et toutes étaient de couleur noire, striées de rouge. Certaines avaient un cœur d'où s'échappait de la fumée noire, tandis que d'autres émettaient un halo doré.
Parfois, de la fumée fusait de l'une d'elles pour aller toucher une lumineuse. Celles-ci commençaient alors à se flétrir, jusqu'à finir en un tas de cendres.
Mais parfois, les dorées tendaient leurs racines hors du sol et les faisaient serpenter jusqu'aux noires pour les étouffer.
Bientôt, il ne resta plus qu'une seule fleur, qui brillait comme un petit soleil au milieu des ruines de Dol Guldur.
Talion vit deux vieillards coiffés de chapeaux pointus arriver près de la fleur, puis l'un d'eux la toucher. Aussitôt, elle s'ouvrir en grand et cracha un bébé enfermé dans un cocon de sève.
Ébahi, le rôdeur regarda le bébé être emmené à Mirkwood. Des images se succédèrent, montrant l'enfant qui grandissait, jusqu'à devenir l'enfant qu'il avait sauvée.
Soudain, un coup de tonnerre retentit. Les visions cessèrent, laissant le rôdeur ébahi dans la grotte.
Le bruit de gouttes d'eau tombant sur la roche lui parvint, signe qu'il commençait à pleuvoir.
Interdit, Talion regarda Lowen d'un œil neuf. Cette petite fille n'était pas humaine.
Tu as vu ? demanda Talion.
« Oui », répondit Celebrimbor d'une voix aussi confuse que la sienne. « Cette enfant n'a rien d'humain. »
Que faire, maintenant ? Talion se demandait s'il pouvait la confier à une famille humaine. Puisqu'elle avait des pouvoirs, la logique voulait qu'il la confie à un Istari.
Mais Radagast habitait Mirkwood et les Elfes semblaient persuadés qu'elle était dangereuse. En plus, la laisser si près de Dol Guldur était une mauvaise idée. Sauron ferait tout pour qu'elle rejoigne son armée.
Il se rappela ses étranges yeux, l'un bleu et l'autre doré.
« La Lumière et les Ténèbres se disputent son âme », dit Celebrimbor. « Nous ne pouvons laisser Sauron la recruter. »
Talion en avait parfaitement conscience. Sauf que s'il voulait éviter qu'elle rejoigne l'Ombre, il devait l'emmener aussi loin que possible de Dol Guldur.
Mais partir loin et longtemps du Mordor ne lui plaisait pas. Que faire ?
Soudain, un bruit de sabot atteignit ses oreilles. Le rôdeur s'empressa de dégainer son épée, puis marcha à pas mesurés vers l'entrée de la grotte.
Lorsqu'il aperçut le mystérieux cavalier qui se tenait devant lui, il grommela un juron surpris.
« Qu'est-ce que cela signifie ?! » s'écria le rôdeur.
XxXxXxXxXxXxXxXxX
Au moment où Talion toucha les cheveux de Lowen, il ne fut pas le seul à recevoir des visions.
À son contact, Lowen se mit à rêver… mais cela ressemblait plus à un cauchemar qu'à un rêve.
Elle vit d'abord un Elfe, assis sur un trône dans une salle aux murs de marbre argenté. Il avait un port noble et altier. Un diadème elfique reposait sur sa longue chevelure noire.
Ses yeux étaient d'un bleu incroyable, qui lui rappelait étrangement celui des yeux de Talion.
Aux côtés de ce seigneur elfe se trouvait une femme blonde, qui serrait tendrement dans ses bras une Elfe plus petite, aux cheveux argentés. Les trois Elfes se regardaient avec l'amour unissant une famille, quand la petite tourna un regard méfiant vers l'entrée de la salle.
Lowen vit entrer Aulendil. L'homme s'approcha du trône, se mit à genoux devant le seigneur et lui tendit un magnifique marteau orné de symboles elfiques.
« Que voilà un magnifique présent ! » dit le seigneur elfe.
Lowen le regarda discuter avec le nouveau venu, avant de se lever de son trône pour lui serrer la main.
La vision changea, Lowen se retrouva dans ce qui ressemblait à une forge. Le seigneur Elfe avait enfilé une tenue de forgeron et s'occupait de façonner du métal brûlant avec le marteau. Aulendil apparut derrière lui, l'observant avec un l'air malveillant.
Lorsque l'Elfe eut fini, il laissa son observateur s'approcher pour admirer le fruit de son travail : des anneaux. Tous en argent, ornés de ciselures et de pierres précieuses, ils brillaient comme de petites étoiles.
Aulendil s'approcha pour en examiner un entre ses doigts, puis il dit : « Toi seul peux accomplir une telle prouesse, Celebrimbor. »
Après cela, Lowen regarda partir cet homme sournois, puis Celebrimbor vaquer à ses occupations. Jusqu'au jour où, alors qu'il forgeait une épée, il eut une vision.
Lowen la partagea avec lui : Aulendil se trouvait au cœur d'un volcan, sur une plateforme surplombant la caldeira. Il semblait occupé à forger un anneau. Sauf qu'il était différent de ceux de Celebrimbor. Plus petit, forgé dans de l'or massif, il était marqué de symboles elfiques que l'enfant ne put déchiffrer. À peine l'eut-il mis à son doigt qu'il se transforma. Au lieu d'un bel homme vêtu de blanc, Aulendil devint un guerrier recouvert d'une armure en métal noir.
Celebrimbor parut choqué par cette vision. Une Elfe blonde apparut près de lui, l'air fort inquiet.
« Nous sommes trahis », dit la dame. « Son pouvoir irradie tel le feu, et causera la ruine de toute la Terre du Milieu. »
Les visions s'estompèrent, laissant Lowen seule dans le noir. Elle plaqua les mains sur sa bouche. Talion et le fantôme n'avaient pas menti. Aulendil était en réalité Sauron. Et il avait tenté de la manipuler, tout comme il avait berné d'autres victimes avant elle.
« Tu connais la vérité, à présent », dit une voix.
Lowen leva la tête et fut surprise de voir la dame blonde réapparaître devant elle.
Jamais elle n'avait vu une femme aussi belle. De longs cheveux blonds ondulés, une robe blanche dont les manches vaporeuses flottaient autour de ses bras, et un diadème argenté orné de fleurs dorées sur la tête, cette femme était splendide ! Ses yeux étaient d'un bleu magnifique, avec des paillettes qui évoquaient une fleur ou une étoile.
« Vous êtes la dame qui a averti Celebrimbor ? » demanda timidement l'enfant.
La dame lui offrit un sourire chaleureux, le premier auquel Lowen avait eu droit depuis son départ de Mirkwood.
« Mon nom est Galadriel de la Lothlorien. Je suis heureuse de pouvoir enfin te rencontrer, Lowen. »
« Ah bon ? D'habitude, les gens n'aiment pas que je sois dans les parages », dit la fillette avec amertume.
Ces mots effacèrent le sourire de la dame, tandis qu'une tristesse sincère apparut sur son visage.
« Je suis navrée pour tout ce que tu as vécu. Tu ne méritais pas cela. Je ne pensais pas que Thranduil en arriverait à de telles extrémités. »
« Et vous ? Vous n'approuvez pas ses idées ? Il pense que je suis une… aberration. »
La dame secoua négativement la tête et se mit à genoux devant Lowen.
« Mon miroir m'a appris ce qui t'est arrivé, bien avant que tu renaisses dans ce corps. Je suis en partie responsable de ton malheur. »
« Comment ça ? »
« Il y a longtemps, avant ta naissance en Terre du Milieu, j'ai affronté Sauron dans les ruines de Dol Guldur. Nous avons déchaîné nos pouvoirs et cela a marqué la terre. La végétation s'est imprégnée de notre magie. Je n'ai hélas pas eu le temps de m'en rendre compte, car le combat m'avait gravement affaiblie. Sauron l'a découvert avant moi et en a profité pour faire une expérience. »
« Une expérience ? »
« Comme tu l'as vu dans tes songes, Sauron a trompé Celebrimbor et l'a convaincu de forger des anneaux de pouvoir, sous prétexte que cela aiderait les seigneurs de la Terre du Milieu à maintenir l'ordre et la prospérité dans leurs royaumes. Mais sur les terres du Mordor, dans les flammes de la Montagne du Destin, Sauron forgea en secret un maître anneau. Dans cet anneau, il déversa sa cruauté, sa malveillance et sa volonté de dominer toute vie. Un Anneau pour les gouverner tous… De nombreux peuples se soulevèrent contre les armées du Mordor. Isildur, le fils du roi du Gondor, parvint à arracher l'Anneau à Sauron, ce qui l'affaiblit grandement. »
« Il n'a pas tué Sauron ? » s'étonna l'enfant.
« Sauron est lié à son Anneau, sa force vitale est enfermée dedans. »
« Alors… Isildur a détruit l'Anneau ? » demanda Lowen avec espoir.
« Non, l'Anneau fut perdu il y a des années. Personne ne sait où il est, aujourd'hui. L'esprit de Sauron le cherche, mais lorsqu'il a découvert la magie qui subsistait à Dol Guldur, il a chargé un de ses plus fidèles sorciers, la Main Noire, de créer des fleurs particulières, pour lui concevoir un nouveau corps à Dol Guldur. Chacune de ces fleurs devait façonner un enfant dont le corps serait imprégné de ma magie et du Seigneur Ténébreux. L'expérience n'a pas eu le résultat escompté. Les Valars se sont interposés, grâce à ton souhait. »
« Mon souhait ? De quoi vous parlez ? »
« Je t'ai observée longtemps avant ta naissance en ce monde, Lowen. Je sais qu'autrefois, tu te nommais Jodie Bennett. »
Lowen écarquilla les yeux. Cela faisait si longtemps qu'elle n'avait pas entendu son ancien nom !
« Tu étais la fille de deux Érudits, un groupe d'Hommes qui essayaient de préserver l'histoire de la Terre du Milieu. »
« Ce… Oui, c'est vrai ! On… On avait même une théorie : que notre monde et le vôtre ne faisaient qu'un, que toutes ces histoires, votre histoire, était celle de la Terre, et qu'elle s'appelait autrefois Arda. Mais je ne vois pas de quel souhait vous parlez ! »
« Tu ne te souviens pas ? Cette pierre brillante que ta mère t'avait confiée, avant que tu partes vivre chez une autre fille de ton âge ? »
Ah oui, son séjour chez Tina ! Lowen se rappela cette soirée, peu avant que sa mère parte à l'hôpital. Elle lui avait raconté l'histoire des Valars, et ensuite…
XxXxXFLASHBACKXxXxX
Sa mère glissa la main sous le col de sa chemise et en retira un cordon au bout duquel pendait une bourse en cuir. Elle l'ouvrit, en retirant une pierre étrange. Selon la manière dont on l'exposait à la lumière, elle pouvait briller comme un petit soleil, ou bien se parer de vert et d'orange avec une surface recouverte de paillettes scintillant comme de l'or.
« Ceci est un minuscule fragment des Silmarils, les trois joyaux créés par un Elfe de l'ancien temps. L'un de nos propres ancêtres, un plongeur du début du XXe siècle, l'a trouvé dans l'Océan Pacifique. Il était bien plus grand et plus beau que cela, mais il n'a pu en extraire qu'un maigre fragment avant de remonter à la surface. Il tenta par la suite de le retrouver, mais lorsqu'il revint aux coordonnées qu'il avait enregistrées, la pierre avait disparu. Il se consola avec ce maigre éclat. Après tout, c'était une découverte formidable ! La preuve que toutes les histoires que nous nous transmettons de famille en famille sont vraies. Arda a bien existé, même si le monde a changé. »
Jodie effleura la pierre du doigt. Elle était toujours étonnamment chaude, comme si un feu couvait à l'intérieur.
XxXxXFIN DU FLASHBACKXxXxX
Lowen écarquilla les yeux. Lorsque la voiture l'avait percutée avec son chat, elle portait le fragment de Silmaril sur elle ! Et la pierre avait brillé de mille feux, alors qu'elle rendait son dernier soupir.
Elle se rappela les instants qui avaient précédé ce funeste moment. Le désespoir d'avoir perdu sa mère, que son père soit peut-être mort, qu'elle allait finir en famille d'accueil et séparée de Perle. Elle avait tant prié pour que le monde où elle vivait soit différent, qu'il y ait plus de place pour la Lumière et l'espoir.
Le morceau de Silmaril l'avait entendu ! Cette pierre avait donc vraiment des pouvoirs. Et les Valars avaient intercédé en sa faveur.
Lowen n'en revenait pas. Elle avait pris un corps destiné à Sauron, tout cela à cause d'un souhait !
« Je n'ai pas souhaité renaître comme ça », soupira l'enfant.
« Et pourtant, les choses sont ainsi. Les Valars l'ont fait pour empêcher Sauron de renaître. Non seulement ce corps était celui d'une fille, ce qui présentait déjà un problème pour lui, mais en plus, ton âme est marquée par les Ténèbres et la Lumière. C'est pour cela que tes yeux ont deux couleurs différentes. »
Lowen porta les doigts à ses yeux, comme s'il s'agissait d'organes étrangers, qu'on lui avait greffés sans son accord. Elle regarda Galadriel et réalisa qu'elle avait un œil aussi bleu que ceux de la Dame.
« Alors, je ne suis pas vraiment… moi ? »
« Si, tu es toi. Sauron ne peut te voler ton corps. Mais si tu choisis d'embrasser sa cause, tu deviendras l'une de ses servantes. C'est cela que craint Thranduil, et c'est pour cela qu'au lieu de te convaincre de rester dans notre camp, il a jugé plus prudent de t'éliminer. »
Secouant la tête, Lowen se mit à faire les cent pas.
« Ce n'est pas juste ! Je ne savais rien ! Je… Enfin, jamais je ne ferais ça ! Je sais que les Ténèbres sont mauvaises, je… Vous l'avez dit vous-même, je suis une Érudite ! Ce que j'ai toujours voulu, dans mon ancienne vie comme dans celle-ci, c'est préserver la Lumière. »
Galadriel lui offrit un sourire amusé.
« Je le sais, tout comme les Valars. C'est pour ça que je suis là. »
« Mais pourquoi n'êtes-vous pas venue me voir avant ? »
Elle aurait tant aimé avoir une vraie figure maternelle dans sa vie. Elle avait beau ne connaître Galadriel que depuis quelques secondes, elle ressentait une forte connexion avec elle.
« Je voulais te voir. J'ai essayé à maintes reprises de te rencontrer, soupira la Dame. J'ai envoyé une lettre à Thranduil chaque année, le jour de ton anniversaire, pour lui demander la permission de te rendre visite. Cette année, je lui ai même suggéré de te laisser faire un séjour dans mon royaume. Le roi n'a jamais répondu à mes lettres. Mon miroir m'a révélé qu'il les brûlait sans révéler leur existence à personne, pas même à son fils Legolas. Et j'ai vu ce qui se passerait si je tentais de venir sans l'accord de Thranduil. Il t'aurait éloignée de moi, pour te laisser te perdre dans sa forêt. J'ai dû attendre le jour où tu t'enfuirais avec le rôdeur pour pouvoir enfin te parler en songe. »
Fatiguée, Lowen garda la tête baissée. Elle regrettait d'avoir enfin des réponses à ses questions. La vérité était plus horrible que tout ce qu'elle s'était imaginé.
« Qu'est-ce que je vais devenir ? » soupira l'enfant.
« N'aie crainte, j'ai envoyé quelqu'un pour t'aider. Tu le rencontreras à ton réveil. Vous avez beaucoup de choses en commun, je suis sûre que vous allez vite devenir amis. »
Lowen voulut lui poser d'autres questions, quand elle vit la dame se pencher pour embrasser son front. La fillette se sentit traversée par une vague de chaleur apaisante.
« Namarïe, Symbelmÿniel. »
L'enfant ne put lui demander ce que signifiait le dernier mot, car elle se sentit tomber dans le vide.
Dans un sursaut de panique, elle ouvrit les yeux. Elle était de retour dans la grotte où Talion, le fantôme et elle avaient élu domicile.
Un feu brûlait toujours au centre de la caverne, mais le rôdeur discutait avec quelqu'un que Lowen ne connaissait pas.
En voyant sa longue chevelure blonde et ses habits vert sombre, elle crut avec espoir qu'il s'agissait de Legolas, mais cet Elfe était différent.
Il avait une aura beaucoup plus lumineuse, comme s'il renfermait en lui un soleil. Sentant le regard de Lowen, il tourna vers elle des yeux d'un azur pur et sans nuage. L'enfant eut le souffle coupé par sa beauté. Il était magnifique !
« Bonjour, fille de la fleur », dit l'elfe d'une voix mélodieuse.
Intimidée, Lowen répondit par un léger hochement de tête. Talion parut étonné par son absence de réaction et dit :
« Voici le Seigneur Glorfindel. Il vient de Fondcombe et affirme être venu pour toi. Il dit que tu étais au courant. Est-ce vrai ? »
Se rappelant les paroles de Galadriel, Lowen sentit l'espoir brûler en elle. Ce devait être lui, cette personne qu'avait envoyée la dame pour l'aider. Il dégageait le même type d'aura lumineuse qu'elle.
« Oui, c'est lui. »
Souriant, Glorfindel s'approcha d'elle et posa la main sur son cœur, avant de la poser sur sa joue.
« La dame de la Lorien m'a demandé de te donner ceci », dit l'Elfe.
Il sortit un pendentif d'une bourse à sa ceinture. En le voyant, Lowen eut le souffle coupé. Doté d'une chaîne en argent, il représentait une fleur dorée en forme d'étoile, avec un saphir en son centre.
« Il représente la fleur étoile-soleil, qui pousse sur la plaine de Cerin Amroth, en Lothlorien », lui révéla Glorfindel. « On l'appelle l'Elanor. »
« C'est magnifique ! » souffla Lowen.
En voyant l'Elfe tendre le bijou vers son cou, l'enfant fut surprise. Pourquoi lui faire un tel présent ?
Devinant son trouble, Glorfindel expliqua :
« La Dame Galadriel a insisté pour que je te l'offre, avant de t'emmener à Fondcombe. Elle veut que tu saches que pour elle, tu as ta place parmi les alliés de la Lumière. »
Lowen laissa Glorfindel lui passer le bijou autour du cou. Elle prit la fleur-étoile entre ses doigts et sourit.
Merci, Galadriel. Promis, je vais me battre. Sauron ne m'aura pas !
« Hannon lae », dit l'enfant à Glorfindel.
Ce dernier lui sourit, puis parut intrigué.
« La Dame m'a aussi révélé que nous avions des choses en commun, tous les deux. Comme moi, tu aurais des souvenirs de ton ancienne vie. »
Surprise, Lowen écouta l'Elfe lui expliquer que, dans une ancienne vie, il avait affronté un Balrog, une créature d'ombres et de feu. Il avait réussi à le vaincre, mais y avait laissé sa vie. Les Valars lui avaient proposé, à lui comme à tous les siens dans l'au-delà, de renaître sans ses souvenirs, mais Glorfindel avait refusé.
En cet instant, Lowen se sentit plus liée à lui qu'à quiconque depuis sa naissance en Terre du Milieu. Cet Elfe comprenait ce que c'était que renaître avec les souvenirs et le poids d'une vie perdue trop tôt.
Tandis qu'elle mangeait du lembas apporté par Glorfindel, Lowen l'écouta discuter avec Talion.
« Puisque vous repartez avec la petite, je vous suivrai jusqu'à l'orée de la forêt, puis je reprendrai ma route de mon côté », dit le rôdeur.
Glorfindel accepta, mais Lowen fut étonnée.
« Vous comptez aller où ? »
Le fantôme apparut pour lui répondre sur un ton glacial : « Cela ne te regarde pas ! »
Lowen voulut lui répondre par une réplique cinglante, quand elle réalisa que son visage cadavérique présentait de nombreux traits en commun avec ceux du seigneur elfe de sa vision.
« Celebrimbor ? » dit-elle sans y croire.
Talion et le spectre la dévisagèrent avec surprise.
« Je ne t'ai pas dit son nom. Comment le connais-tu ? » demanda le rôdeur.
« J'ai fait un rêve. J'ai vu des bribes de votre vie. Comment vous avez forgé les Anneaux, la trahison de Sauron… J'ai aussi vu votre famille. Je suis désolée pour vous. Ils avaient l'air gentils. »
Le fantôme resta silencieux quelques secondes, avant de lui tourner le dos pour disparaître.
Lowen craignit de l'avoir vexé, mais Talion lui offrit un sourire rassurant.
« Celebrimbor et moi devons poursuivre notre quête de la Main Noire de Sauron. Il a massacré ma famille et m'a maudit, tout comme Celebrimbor. »
« Vous comptez donc vous rendre au Mordor », dit Glorfindel.
« C'est cela. »
L'Elfe lui offrit une expression désapprobatrice.
« Votre quête vous oblige à emprunter des chemins plus sombres que nos autres alliés. Vous risquez d'y perdre plus que le repos de votre âme, Talion. »
« Je n'ai pas le choix », dit le rôdeur.
«Vous pourriez venir avec nous. Galadriel pourrait peut-être vous aider, elle semble avoir de grands pouvoirs», dit Lowen.
« Je doute qu'elle puisse briser ma malédiction », soupira Talion.
« Pour briser une malédiction, il faut en connaître la nature exacte », dit Glorfindel. « Je doute que vous ayez trouvé le bon responsable, capitaine. »
Refusant d'en parler davantage, Talion sortit de la grotte. Lowen le regarda s'éloigner avec inquiétude. Elle ne connaissait pas le rôdeur depuis longtemps, mais il lui avait sauvé la vie et s'était montré gentil avec elle.
L'abandonner ainsi lui semblait injuste.
« Il faut vraiment qu'il s'en aille au Mordor, tout seul ? » demanda Lowen.
« Nous ne pouvons le forcer à nous suivre, Lowen. Et ta sécurité est importante. »
« Alors, on va en Lothlorien ? »
« Non, c'est encore trop proche de Mirkwood. Je vais t'emmener à Fondcombe. Le seigneur Elrond, le beau-fils de la Dame, est déjà au courant et accepte de t'accueillir là-bas. Il a déjà élevé un enfant humain, Estel, et ne voit aucun inconvénient à faire de toi sa nouvelle protégée. »
Curieuse, Lowen l'écouta lui parler de Fondcombe. Glorfindel y vivait depuis longtemps et adorait cet endroit. En l'écoutant lui décrire la vallée enchanteresse, ses immenses cascades et les magnifiques habitations, l'enfant eut un sourire rêveur.
Elle riait en écoutant Glorfindel lui narrer une farce des jumeaux d'Elrond, quand Talion rentra dans la grotte.
« La pluie a cessé. Nous pouvons y aller. »
Un cheval blanc les attendait dehors. Glorfindel dit à Lowen qu'il se nommait Asfaloth. Il installa l'enfant sur la selle, puis se mit derrière elle et prit les rênes.
Le cheval partit au pas. Le rôdeur les suivit d'un pas tranquille, son regard glissant sur les arbres, à l'affût du moindre signe de danger.
Lowen regarda autour d'elle et frissonna en voyant les toiles d'araignée gigantesques, que la pluie avait couvertes de gouttes. Cette vision aurait pu paraître enchanteresse, si les toiles n'étaient pas souillées de taches noires et d'ossements.
« On ne peut pas l'aider ? » souffla Lowen, en voyant un cocon renfermant une forme humaine.
« Ce malheureux est mort depuis longtemps », soupira Glorfindel.
« De toute façon, même s'il était encore en vie, nous perdrions du temps à l'aider. Nous n'avons pas le temps de combattre des araignées, notre mission importe davantage », dit Celebrimbor, apparaissant près de Talion.
Lowen considéra le fantôme. Elle se demanda quel genre de malédiction pouvait obliger un spectre à partager le corps d'un humain.
D'autant que maintenant qu'elle prenait le temps de le regarder, l'enfant remarquait une marque au cou du rôdeur. Il avait eu la gorge tranchée, mais la plaie n'avait pas l'air d'avoir bien cicatrisé. La peau du rôdeur était pâle, trop pâle, comme si on l'avait vidé d'une grande partie de son sang.
« Talion ? »
« Mmmmm ? »
« Vous n'êtes pas fatigué ? »
« Non, mais je te remercie pour ta sollicitude. »
Lowen fut tentée de lui poser d'autres questions, mais un regard de Celebrimbor l'en dissuada. Elle avait la désagréable impression que le fantôme devinait le cheminement de ses pensées, et qu'il n'apprécierait pas qu'elle fourre le nez dans ses affaires.
Ce spectre ne m'inspire pas confiance, pensa l'enfant.
Soudain, elle sentit Glorfindel se tendre dans son dos. L'Elfe arrêta sa monture et dégaina son épée.
Saisissant le message, Talion prit son épée et se mit en position.
Silencieuse, Lowen guetta avec eux le moindre signe suspect, quand l'Elfe émit un juron.
« Des Orques ! »
Lowen capta un cliquetis métallique, puis des créatures hideuses jaillirent des buissons.
Jusqu'ici, elle n'avait entendu que des descriptions faites par Faelwen et quelques guérisseurs. Ils étaient bien plus hideux que ce qu'elle s'était imaginée : voûtés, la peau noire, des yeux allant du rouge au jaune maladif, des dents pointues souillées de sang séché et des armures faites avec des morceaux de métal noirâtre. Ils se jetèrent sur le rôdeur et le cheval.
Asfaloth se cabra, mais ses cavaliers demeurèrent sur son dos. Glorfindel se pencha pour faucher la tête de trois Orques avec son épée.
De son côté, Talion les frappait à coup d'épée, de pied et de poing. Le rôdeur se battait à une vitesse stupéfiante, presque aussi vite que la lumière. Parfois, Lowen voyait l'éclat du fantôme de Celebrimbor recouvrir son corps, comme s'ils étaient deux à se battre.
Soudain, elle sentit quelque chose enfoncer ses griffes dans sa cheville. Elle se pencha et vit qu'un Orque, blessé au flanc, avait rampé jusque près du cheval pour l'attraper.
Lowen se dégagea et lui donna un coup de pied au nez. Ce dernier émit un craquement horrible. L'Orque tomba de tout son long. Asfaloth l'acheva d'un coup de sabot.
Bientôt, le groupe d'Orques fut vaincu. Talion entreprit de nettoyer son épée, quand le son d'un cor lui parvint.
« D'autres arrivent », dit-il sur un ton grave. « Partez, je vais les retenir. »
« Quoi ?! Mais vous n'allez pas rester les affronter tout seul ? » s'écria Lowen.
Le rôdeur lui sourit.
« Tout ira bien, mon enfant. »
Glorfindel parut hésiter, avant de murmurer à son cheval d'avancer.
Lowen se contorsionna pour garder le rôdeur dans son champ de vision.
« Talion… »
« Tu dois vivre, Lowen. »
Celebrimbor se manifesta de nouveau près du rôdeur pour ajouter : « Si tu es vraiment du côté de la Lumière, accepte de partir. »
Lowen lança un regard furibond au fantôme.
« Vous êtes vraiment casse-pieds, vous ! »
Ces paroles firent glousser le rôdeur, puis il s'approcha pour donner un coup sur la croupe d'Asfaloth.
Ce dernier partit au petit trot, qui se changea vite en galop. Lowen n'eut d'autre choix que s'accrocher au pommeau de la selle, tandis que Glorfindel menait sa monture à travers la forêt.
